PREMIÈRE PARTIE - PRÉSENTATION GÉNÉRALE

I. L'ARGENTINE, UN PILOTAGE POLITIQUE AFFIRMÉ

S'étendant sur près de 2,8 millions km² et avec 4 989 km de côtes, l'Argentine constitue le quatrième plus grand pays du continent américain et le huitième du monde ( Cf Carte en annexe). Après avoir été marquée par des crises politiques, économiques et sociales, l'Argentine a su bâtir sa stabilité sur des politiques réformatrices.

A. UNE POLITIQUE INTÉRIEURE ENTRE CRISES ET RECONSTRUCTIONS

L'Argentine est une République fédérale composée de vingt-trois provinces 8 ( * ) et son régime politique est de type présidentiel. La Constitution date de 1853. Elle réserve au pouvoir central (la Nation ) les compétences régaliennes. Elle a été révisée en 1860, 1866, 1898, 1957 et 1994.

Le Président est élu pour quatre ans au suffrage universel direct. Son mandat n'est renouvelable qu'une fois.

Le Congrès bicaméral est composé d'une Chambre des députés de deux cent cinquante sept membres, renouvelée par moitié tous les deux ans, et d'un Sénat de soixante douze membres élus dans chaque province, renouvelé par tiers tous les deux ans.

La mémoire collective argentine a été déchirée par de nombreux événements depuis sa découverte en 1516 par l'Espagnol Díaz de Solís. Elle a tout d'abord vécu une période de colonisation 9 ( * ) jusqu'à son indépendance proclamée le 25 mai 1810, mais effectivement acquise le 9 juillet 1816 après plusieurs années de guerre 10 ( * ) .

Elle a été ensuite marquée pendant la seconde moitié du XX e siècle par la personnalité du général Juan Perón 11 ( * ) , par une très forte instabilité politique et de nombreux coups d'Etat, une dictature militaire de huit années 12 ( * ) . Le retour à la démocratie s'est incarné par l'élection de Raúl Alfonsin à la présidence de la République en 1983.

Plus récemment, l'Argentine a connu à nouveau une grave crise économique, sociale et politique en 2001 et 2002, qui a profondément ébranlé le pays. Nestor Kirchner, élu en avril 2003 a permis de rétablir la situation économique argentine en menant une politique interventionniste. Tout d'abord, il a bénéficié de la dévaluation du peso par rapport au dollar décidée par son prédécesseur intérimaire, M. Eduardo Duhalde. En outre, les exportations de soja et la demande du marché brésilien ont contribué à la mise en oeuvre d'un sentier de croissance rapide et stable.

Le président Kirchner a été également l'artisan de l'abrogation, en 2003, des lois d'amnistie couvrant la période de la dictature militaire, offrant ainsi à l'Argentine la possibilité de mener un travail de justice et de mémoire 13 ( * ) . Ces lois dites du « point final » de 1986 et du « devoir d'obéissance » de 1987 définissaient une limite temporelle aux poursuites et exemptaient de responsabilité les militaires qui avaient obéi aux ordres de leurs supérieurs.

Cristina Fernández de Kirchner , épouse du président, lui a succédé après avoir été élue le 28 octobre 2007. Son mandat a été renouvelé en octobre 2011 14 ( * ) . Elle dispose aujourd'hui de la majorité dans les deux chambres du Congrès et de l'alignement de la quasi-totalité des gouverneurs.

Elle a, au titre de ses réformes, impulsé l'adoption de la loi de novembre 2009 sur le système politique et électoral prévoyant l'organisation obligatoire de primaires, notamment pour les candidats au scrutin présidentiel.

En matière économique, certaines de ses mesures ont été fortement contestées dans un contexte dégradé ainsi que l'illustre la crise dite du Campo . Elle n'est, en effet, pas parvenue à faire adopter son projet d'augmentation des taxes sur les exportations de céréales et de soja.

Elle a également diminué certaines des subventions publiques versées aux services publics (eau, électricité). Elle a fait adopter des mesures protectionnistes, un strict contrôle des changes et la limitation de transferts de fonds vers les provinces. Confrontée à de nombreuses grèves, elle a également fait l'objet de protestations dénonçant l'insécurité et la corruption.

Pour autant, la politique sociale constitue l'axe majeur des « présidences Kirchner ». Ces dernières ont permis d'introduire en Argentine un modèle économique caractérisé par de fortes redistributions sociales et appelé le « modèle K ».

Le budget du ministère du développement social, chargé de mettre en oeuvre ces mesures, a été considérablement augmenté de plus de 677 %, en passant de 360 millions d'euros à 2,8 milliards d'euros, entre 2003 et 2010.

Celles-ci ont notamment consisté en un plan intitulé « Argentina trabaja » prévoyant la création de 300 000 emplois, en un plan dit « familias », instaurant un soutien à 700 000 familles, en la mise en place d'une allocation familiale distribuée à plusieurs millions de familles sur critères sociaux et sous condition de scolarisation des enfants et en la nationalisation des fonds de pension. Parallèlement les prélèvements publics ont crû de 23 % en 2003 à 34,5 % en 2010.

S'agissant des droits de l'Homme , ils tendent à constituer une priorité de la politique mise en oeuvre depuis 2003. L'implication du couple présidentiel a été décisive pour permettre l'ouverture, au mois de novembre 2009, des premiers procès des crimes commis par les militaires pendant la dictature. Depuis 2009, sept cas de victimes françaises ont ainsi été traités par la justice argentine.


* 8 Les vingt-trois provinces et la capitale fédérale de Buenos Aires sont dirigées par un exécutif élu pour quatre ans au suffrage universel direct (le Gouverneur et le Vice-Gouverneur) et des assemblées régionales.

* 9 Elle a été colonisée par l'Espagne entre les XVI e et XVII e siècles.

* 10 Cette lutte a été menée notamment par les généraux José de San Martín, Manuel Belgrano et Martin Miguel de Güemes pour s'affranchir totalement de l'empire colonial.

* 11 Président de la Nation argentine entre 1946 et 1955, puis entre 1973 et 1974.

* 12 1976-1983.

* 13 « La lucha no ha terminado » affirmait Nestor Kirchner en mai 2004 lors de l'inauguration du futur musée de l'ESMA, ancien centre de détention.

* 14 Elle a été élue en 2007 au premier tour avec 45,25 % des voix. Elle a remporté sa seconde élection présidentielle le 23 octobre 2011 avec près de 53 % des suffrages, devançant notamment le candidat du parti socialiste M. Hermes Binner (17 %) et le radical Ricardo Alfonsin (13 %).

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