Rapport n° 464 (2012-2013) de M. Jean BESSON , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 2 avril 2013

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N° 464

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

• Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 avril 2013

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l' approbation de la convention postale universelle ,

Par M. Jean BESSON,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; M. Pierre André, Mme Kalliopi Ango Ela, MM. Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Luc Carvounas, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini, Paul Vergès .

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

701 (2009-2010) et 465 (2012-2013)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi du projet de loi autorisant l'approbation de la convention postale universelle, qui a été signée à Genève, le 12 août 2008.

La convention postale universelle, qui a été conclue dans le cadre de l'Union postale universelle, contient des règles applicables au service postal international, c'est-à-dire des stipulations concernant les services de la poste aux lettres et des colis postaux et des dispositions relatives aux rémunérations que les opérateurs postaux se versent pour compenser les coûts de traitement et de distribution des envois postaux internationaux.

Tous les quatre ans, les plénipotentiaires des pays membres de l'Union postale universelle se réunissent en congrès pour fixer le budget, adopter des normes et les principales décisions de stratégie et de politique générale.

Lors du Congrès de l'Union postale universelle qui s'est tenu à Genève en 2008, il a été procédé à la révision des Actes de l'Union postale universelle régissant les services postaux et notamment de la Convention postale universelle. Un nouveau texte, destiné à remplacer l'ancienne convention, a été adopté, notamment pour répondre aux évolutions du secteur postal, telles que la séparation juridique et fonctionnelle entre les Etats et les opérateurs postaux ou le développement du commerce électronique. L'approbation de cette nouvelle convention postale universelle fait précisément l'objet du présent projet de loi.

Avant de décrire les principales nouveautés de cette convention et ses effets sur notre droit, votre Rapporteur a jugé utile de présenter brièvement l'historique, le rôle et la structure de l'Union postale universelle et les nouveaux défis du secteur postal international.

I. LES ÉVOLUTIONS DU SECTEUR POSTAL INTERNATIONAL

A. L'UNION POSTALE UNIVERSELLE

Créée en 1874, l'Union postale universelle (UPU) est la deuxième plus ancienne organisation internationale, après l'Union internationale des télécommunications (UIT), et compte parmi les institutions spécialisées des Nations unies depuis 1948.

Organisation intergouvernementale composée de 192 pays-membres, l'UPU constitue le principal forum de coopération entre les gouvernements, les postes, les régulateurs et les nombreux autres acteurs du secteur postal.

Elle est la seule organisation internationale à représenter les intérêts du secteur postal dans le monde entier. Elle assure le fonctionnement d'un réseau véritablement universel dans ses dimensions physique, financière et électronique, fixe les règles concernant les échanges postaux internationaux et formule des recommandations visant à moderniser les produits et services, à stimuler la croissance du volume des échanges postaux, de la poste aux lettres, des colis et des services financiers, et à améliorer la qualité de service au profit des clients.

L'UPU n'intervient pas dans les affaires relevant des postes nationales. Les Etats et les postes nationales fixent leurs propres tarifs et décident de la nature et de la quantité des timbres-poste à émettre ainsi que du mode de gestion de l'exploitation et du personnel postal.

Tout membre de l'Organisation des Nations unies peut adhérer à l'UPU. Les pays souverains ne faisant pas partie de l'ONU peuvent également en devenir membres, à condition que leur demande soit approuvée par au moins les deux tiers des pays membres de l'Union. Actuellement, l'UPU compte 192 pays-membres.

Elle a son siège à Berne et sa langue officielle est le français.

La France fait partie des cinq plus gros contributeurs avec le Japon, l'Allemagne, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Sa contribution a été de l'ordre de 1,37 million d'euros en 2010. A ce montant s'ajoutent des frais supplémentaires pour la traduction simultanée lors des réunions du congrès et des conseils.

Le Congrès postal universel, qui a lieu tous les quatre ans, est l'autorité suprême de l'Union postale universelle. Il rassemble les plénipotentiaires des 192 pays-membres, qui se réunissent en vue d'adopter une nouvelle stratégie postale mondiale et de fixer les futures règles concernant les échanges postaux internationaux.

Entre deux Congrès, le Conseil d'administration, composé de 41 pays-membres, et le Conseil d'exploitation postale, constitué de 40 pays-membres, poursuivent les travaux de l'Union. Le Comité consultatif, dont les membres représentent les acteurs du secteur postal au sens large, y participe également. Le Bureau international joue le rôle de secrétariat au sein de l'Union et emploie environ 250 personnes.

L'UPU a aussi mis en place deux coopératives. La Coopérative télématique, via le Centre de technologies postales, développe des solutions efficaces et abordables qui permettent aux postes non seulement d'améliorer le traitement du courrier et la qualité de service, mais aussi de fournir des services financiers postaux modernes. La Coopérative EMS aide les opérateurs postaux désignés des pays-membres de l'UPU à proposer le service de courrier express - le principal service de messagerie des postes - afin de maintenir un niveau de qualité de service élevé.

Les Actes de l'Union postale universelle régissent les modalités d'acheminement et de distribution des envois postaux internationaux. Ils garantissent la libre circulation des envois postaux sur un territoire postal unique composé de réseaux interconnectés et visent à encourager l'adoption de normes communes et équitables. Les Actes régissent également les rapports entre les Etats et entre les opérateurs désignés par les Etats pour assurer les obligations découlant de ces Actes.

Les Actes de l'Union postale universelle comprennent :

- la Constitution avec ses protocoles additionnels : c'est l'Acte fondamental, qui comprend les règles organiques de l'Union et la définition des Actes de l'UPU ; Des modifications ne peuvent y être apportées qu'à l'occasion des Congrès et sont consignées dans un protocole additionnel, également soumis à ratification. La Constitution actuelle date du Congrès de Vienne 1964, et il y a eu sept Protocoles additionnels ;

- le Règlement général, qui comporte les dispositions assurant l'application de la Constitution et le fonctionnement de l'Union ; Il est révisé à chaque Congrès ;

- la Convention postale universelle et ses règlements d'exécution, qui comportent les règles communes applicables au service postal international et les dispositions concernant les services de la poste aux lettres 1 ( * ) . Ces actes, comme les deux premiers, sont obligatoires pour tous les pays membres.

Tous les quatre ans, les plénipotentiaires des Pays membres de l'UPU se réunissent pour amender les Actes.

Lors du Congrès de Genève qui s'est tenu du 23 juillet au 12 août 2008, la Convention postale universelle a fait l'objet, comme à chaque congrès, des amendements estimés nécessaires pour garantir le bon fonctionnement du service postal international et prendre en compte les évolutions de ce secteur.

B. UN SECTEUR CONFRONTÉ À DE NOUVEAUX DÉFIS

On recense plus de cinq millions d'employés postaux et 663 000 bureaux de poste dans le monde. Ensemble, les réseaux postaux des différents pays constituent le plus vaste réseau de distribution physique au monde.

Les services postaux traitent et distribuent chaque année quelque 368,4 milliards d'envois de la poste aux lettres et 6,4 milliards de colis dans le monde. Ils fournissent également des services financiers utiles pour favoriser l'inclusion financière et des services électroniques afin de satisfaire les besoins évolutifs des clients du monde entier.

Entre 2006 et 2011, le trafic de la poste aux lettres intérieur a connu une baisse de 3,5 %, tandis que celui du régime international a chuté de 13 %. Toutefois, cette diminution générale n'est pas commune à tous les pays. En Amérique latine et dans les pays de l'Asie-Pacifique, la poste aux lettres est en progression.

En moyenne mondiale, chaque personne expédie 52 envois de la poste aux lettres (lettres, cartes postales, colis jusqu'à 2 kilogrammes, etc.) par an.

83,5 % de la population mondiale reçoit son courrier à domicile.

En revanche, le secteur des colis postaux a connu une forte augmentation ces dernières années. Les postes ont distribué 6,4 milliards de colis en 2011, soit 36 % de plus qu'en 2001. Le trafic international de colis a connu une croissance annuelle moyenne de 5,3 % depuis 2006 et était de 58 millions d'envois en 2011.

Les recettes postales mondiales ont été de 304 milliards de dollars en 2011.

L'avenir des postes dépendra de leur capacité à s'adapter à l'explosion du marché des communications. Ayant déjà lancé un processus de réforme et de restructuration, certaines d'entre elles sont devenues des entreprises commerciales plus indépendantes et autofinancées. Elles fournissent un service postal de meilleure qualité à des prix raisonnables ainsi qu'une gamme plus large de produits et de prestations répondant aux exigences de la clientèle.

Avec la levée des obstacles au commerce et la libéralisation des marchés, la concurrence s'est intensifiée non seulement entre les opérateurs postaux publics et privés, mais aussi entre les opérateurs publics eux-mêmes. Certaines postes, notamment en Europe occidentale, explorent les opportunités commerciales au-delà de leurs secteurs d'activité traditionnels et hors des frontières nationales. Elles sont devenues des entreprises postales prospères. Pour être compétitives également sur le marché international, elles ont forgé des alliances, opéré des acquisitions stratégiques et diversifié leurs activités ainsi que leurs produits commerciaux.

Bien que la législation sur les monopoles réserve la plupart des marchés intérieurs aux opérateurs postaux nationaux, certains secteurs ont été ouverts à la concurrence. Dans la plupart des pays, le changement implique surtout la réforme postale au sens large du terme, et notamment la transformation en entreprise plutôt qu'une libéralisation ou une privatisation complète.

En même temps, les postes continuent de remplir la mission de service public universel leur étant assignée par les gouvernements.

Ainsi, dans le cas de la France, la loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, qui a transposé en droit français la troisième directive postale 2 ( * ) , a modifié le statut de La Poste en société anonyme, dont le capital est détenu par l'Etat ou par d'autres personnes morales publiques, tout en réaffirmant les missions de service public assignées à La Poste. Depuis le 1 er janvier 2011, le courrier ordinaire (moins de 50 grammes) est ouvert à la concurrence.

Les Postes ont montré leur capacité d'adaptation rapide au progrès technologique. Beaucoup sont déjà entrées dans l'univers électronique en adoptant de nouvelles technologies pour améliorer leurs produits et en créer de nouveaux pour leurs clients. Le principal défi pour les postes consiste à trouver un moyen efficace de contrebalancer les effets de la substitution du courrier physique par la communication électronique et, en même temps, à exploiter les possibilités offertes par le progrès technologique pour développer et améliorer leurs produits et services.

II. LA CONVENTION POSTALE UNIVERSELLE

Lors du Congrès qui s'est tenu à Genève en 2008, il a été procédé à la révision des Actes de l'Union postale universelle régissant les services postaux et notamment la Convention postale universelle. Un nouveau texte, destiné à remplacer l'ancienne convention, a été adopté, notamment pour répondre aux évolutions du secteur postal.

A. LES PRINCIPALES STIPULATIONS DE LA CONVENTION

Telle que modifiée en 2008, la Convention postale universelle se compose de 37 articles et d'un protocole final.

L' article 1 er précise certaines notions et harmonise les règles de l'Union postale universelle avec celles d'autres organisations internationales (colis, dépêches mal acheminées, envois mal dirigés, opérateur désigné, petit paquet) pour s'assurer que toutes les parties comprennent de la même manière les dispositions de l'Union postale universelle et pour garantir la validité juridique de ces termes dans un environnement postal qui évolue rapidement.

L' article 4 est relatif à la liberté de transit. Ce principe s'accompagne de l'obligation pour les Pays membres de s'assurer que leurs opérateurs désignés acheminent par les voies les plus rapides et les moyens les plus sûrs les envois qui leur sont livrés par un autre opérateur désigné y compris maintenant les envois ou les dépêches mal dirigés.

L' article 8 « Timbre-poste » énonce les principes essentiels d'émission et de mise en circulation des timbres-poste. Cet article a été remanié afin de mettre en exergue le droit souverain de chaque pays membre de décider de la façon dont les timbres- poste sont émis et administrés sur son territoire.

Les stipulations de la deuxième partie : « Règles applicables à la poste aux lettres et aux colis postaux » portent notamment sur les services offerts ( articles 12, 13 et 14 ) ainsi que sur les objets qu'il est interdit d'insérer dans des envois postaux.

Il convient de noter, à ce titre, que la France a notamment obtenu que les objets contrefaits et piratés soient ajoutés à la liste des envois non admis ( article 15 ). Cette disposition vise à réduire autant que possible la circulation de ces objets par la voie postale et à contribuer ainsi à protéger la propriété et le patrimoine intellectuels et créatifs des pays membres.

La deuxième partie porte sur la réglementation applicable aux matières radioactives et aux substances infectieuses ( article 16 ), le contrôle douanier ( article 18 ), les normes et objectifs en matière de qualité de service ( article 20 ), les règles relatives aux questions de responsabilité, et des dispositions particulières à la poste aux lettres visant à réglementer le repostage ( article 26 ) ainsi que sur les réclamations ( article 17 ). La nouvelle convention a été l'occasion de préciser que seules les réclamations concernant les colis et les envois recommandés, avec valeur déclarée et à livraison attestée, peuvent être acceptées. Cette décision se justifie par le fait qu'il n'y a pas de suivi des envois ordinaires. En outre, les réclamations doivent être transmises par les moyens les plus rapides (voie prioritaire, service postal express EMS ou moyens électroniques) pour permettre à l'opérateur postal de destination d'enquêter rapidement et pouvoir apporter une réponse au client dans les meilleurs délais.

Telle que modifiée en 2008, la Convention postale universelle distingue les expressions « pays membre » ou « opérateur désigné » selon que la disposition apparaît du ressort des gouvernements ou du ressort de leurs opérateurs en charge des questions d'exploitation.

On peut relever que la notion d'« opérateur désigné » est définie à l'article 1bis de la Constitution de l'UPU, telle qu'adoptée par le Congrès qui s'est tenu à Genève du 23 juillet au 12 août 2008. Cette définition clarifie le dispositif en identifiant l'entité en charge des obligations d'exploitation découlant des Actes de l'UPU 3 ( * ) .

Cette distinction est apparue nécessaire pour clarifier la Convention postale universelle et bien délimiter les questions d'ordre stratégique et réglementaire de celles d'exploitation. La très grande majorité des pays membres de l'UPU ont créé des entités autonomes sur le plan juridique et fonctionnel chargées de l'exploitation des services postaux. Dans certains cas, des combinaisons plus complexes ont été retenues pour prendre en compte la diversité des situations qui existent dans les pays membres.

Cette présentation n'entraîne pas de nouvelles responsabilités pour les pays membres mais permet de mieux discerner les dispositions de nature stratégique et réglementaire des dispositions traitant de questions d'exploitation.

En effet, la responsabilité de l'Etat est de veiller à ce que l'opérateur désigné remplisse bien les obligations découlant du traité, notamment en offrant tous les services obligatoires dans les conditions prescrites dans les Actes de l'Union postale universelle. En cas de défaillance de ce dernier, il serait de sa responsabilité de désigner un autre opérateur pour faire assurer la prestation. En revanche, l'opérateur désigné est responsable de tous les aspects liés au bon fonctionnement des services postaux internationaux, tant vis-à-vis de ses clients que vis-à-vis des opérateurs désignés des autres pays membres. Ceci ressort des principaux changements apportés aux articles 21, 22 et 23 . Enfin, dans l'intérêt des clients, des autres opérateurs désignés et de la qualité du service en général, le droit de faire des réserves concernant l'article 21 a été limité.

La troisième partie relative à la rémunération ( article 27 et suivants) est très importante pour les opérateurs désignés car elle régit leurs relations financières. Les frais terminaux sont la rémunération que la poste expéditrice paie à la poste de destination pour la distribution de son courrier.

Compte tenu de l'extrême diversité des cent quatre-vingt-onze pays membres de l'Union postale universelle, le système actuel, même s'il est amélioré au fil des congrès, n'est pas totalement basé sur les coûts, car il résulte d'un compromis négocié entre opérateurs et validé par les Etats. Pour l'application du système des frais terminaux, les pays membres sont maintenant classés en cinq groupes. Les pays membres sont assujettis selon qu'ils sont placés dans l'un ou l'autre de ces groupes du système dit « système cible » ou du « système transitoire ». Le premier devrait être applicable à tous les pays membres à une échéance qui reste à déterminer, il repose sur les coûts de traitement des envois et sur la qualité de service. Le second consiste en une rémunération forfaitaire au kilogramme. Ce système transitoire devrait disparaître au profit du système cible qui devrait être le système appliqué par tous les pays membres. Ces modalités nouvelles ont permis de faire entrer dans le système cible un plus grand nombre de pays, notamment les pays émergents.

Avec les nouvelles modalités fixées par la convention, la rémunération des opérateurs notamment des pays membres industrialisés qui génèrent la grande majorité des flux devrait être améliorée.

B. LES EFFETS LIMITÉS EN DROIT FRANÇAIS

Au regard du code des postes et des communications électroniques et de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom, les stipulations de la Convention postale universelle, telle qu'adoptée lors du Congrès de 2008, ne soulèvent pas d'incompatibilité juridique.

Le code des postes et des communications électroniques, dans sa partie « postes » est issu de la transposition de la directive postale 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 modifiée concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité de service, modifiée par la directive du 10 juin 2002 qui traite uniquement du service universel postal au sens du droit communautaire.

Ainsi, le code fixe notamment les principes et règles du service universel qui concerne : les envois de correspondance nationale et transfrontière jusqu'à 2 kg, les colis nationaux et transfrontières jusqu'à 20 kg, les envois recommandés et les envois à valeur déclarée. De même, le code fixe les obligations de La Poste, en tant que prestataire de ce service universel, les règles concernant la régulation des activités postales et le régime de responsabilité applicable aux prestataires de services postaux vis-à-vis des utilisateurs dans le champ du service universel.

En revanche, le code ne traite pas des modalités d'exploitation des services postaux, ni des modalités d'échanges entre prestataires postaux pour les envois internationaux, qui sont du ressort du « Traité ». Sur ces sujets, la Convention postale universelle est complémentaire aux dispositions du code des postes et des communications électroniques. Lorsqu'il s'agit des modalités relatives au traitement des réclamations et de la responsabilité vis-à-vis des utilisateurs, les dispositions de la Convention postale universelle fixent un cadre qui laisse toute souplesse aux Pays membres pour compléter ce dispositif au regard de leur propre législation.

Au regard de la loi du 2 juillet 1990, l'article 8 de la Convention postale universelle relative au timbre-poste ne soulève pas de difficulté puisque l'article 16 de cette loi du 2 juillet confère à La Poste le monopole d'émission des timbres-poste qui doivent porter la mention « France » 4 ( * ) .

Il en va de même concernant les dispositions de la loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, qui a transposé en droit français la troisième directive postale 5 ( * ) , et qui a modifié le statut de La Poste en société anonyme, dont le capital est détenu par l'Etat ou par d'autres personnes morales publiques.

Les règles relatives au service postal international telles que fixées par la Convention postale universelle ne s'appliquent actuellement qu'aux opérateurs désignés par les pays membres pour remplir les obligations découlant du Traité relatif à la création d'une Union générale des postes du 9 octobre 1874.

Pour la France, La Poste est l'opérateur désigné. A ce titre, La Poste « met en oeuvre, pour ce qui la concerne, les engagements internationaux pris par l'Etat, dans le cadre de l'Union Postale Universelle. » 6 ( * ) .

La Convention postale universelle n'a en conséquence aucun impact sur les autres opérateurs postaux installés sur le territoire national.

La Poste continuera d'assurer le service postal international entrant et sortant en fonction des obligations de la Convention postale universelle.

Ainsi, La Poste est tenue d'offrir aux utilisateurs, entreprises et particuliers, les services de base définis à l'article 12 de la Convention postale universelle : les envois de la poste aux lettres, classifiés selon la rapidité de leur traitement (envois prioritaires et non prioritaires jusqu'à 2 kilogrammes) ou selon leur contenu (lettres, cartes postales, imprimés et petits paquets jusqu'à 2 kilogrammes, cécogrammes jusqu'à 7 kilogrammes, sacs spéciaux contenant des journaux, des écrits périodiques, des livres et des documents imprimés semblables jusqu'à 30 kilogrammes). Ces services de base sont obligatoires pour tous les pays membres de l'UPU.

La Poste est également tenue d'assurer l'admission, le traitement, le transport et la distribution des colis postaux jusqu'à 20 kilogrammes car la France était partie à l'Arrangement concernant les colis postaux avant le 1 er janvier 2001. Le Congrès de Pékin (1999) a en effet décidé de fusionner les dispositions générales de cet Arrangement avec la Convention postale universelle et de renvoyer les dispositions de nature opérationnelle vers un Règlement des colis postaux. Ces dispositions sont entrées en vigueur au 1 er janvier 2001. Les Pays membres qui n'étaient pas parties à l'Arrangement sur les colis postaux avant cette date ne sont pas tenus de fournir ce service selon les règles de l'UPU.

La Poste est également tenue d'offrir les services supplémentaires de l'article 13 qui sont obligatoires : service de recommandation, service de retour des correspondances commerciales-réponses internationales/CCRI, échange des coupons réponses internationaux, avis de réception pour les envois arrivants.

En revanche, les services définis à l'article 14 sont facultatifs. Il s'agit des services de courrier électronique, du service postal express EMS, du service de logistique intégrée et du cachet postal de certification électronique. La Poste n'a pas d'obligations au titre de ces services facultatifs.

Les utilisateurs devraient bénéficier en fonction des dispositions de la Convention postale universelle, telle qu'adoptée en 2008, de services postaux internationaux d'une qualité de service améliorée par :

- l'obligation faite aux opérateurs désignés d'acheminer les envois reçus selon les mêmes moyens qu'ils emploient pour leurs propres envois y compris pour les envois mal dirigés et aux dépêches mal acheminées. Ces deux types d'envois sont maintenant parfaitement définis ;

- le droit renforcé donné aux utilisateurs de déposer une réclamation qui concerne aussi bien les colis que les envois recommandés, avec valeur déclarée et à livraison attestée. Le nouveau dispositif prévoit que les réclamations doivent être transmises par les moyens les plus rapides, notamment par des moyens électroniques pour permettre à l'opérateur postal de destination d'enquêter rapidement et pouvoir apporter une réponse au client dans les meilleurs délais ;

- une responsabilité des opérateurs postaux clairement définie; elle concerne les envois recommandés, les envois avec valeur déclarée et des colis ordinaires ;

- la restitution à l'expéditeur des taxes perçues en cas de renvoi d'un colis, d'un renvoi de la poste aux lettres recommandé ou à valeur déclarée.

Les stipulations de la Convention postale universelle, telle qu'adoptée en 2008, n'auront pas d'incidence sur les tarifs des services postaux internationaux proposés. Ces tarifs sont fixés par La Poste et soumis selon le cas à la procédure fixée à l'article L. 5-2- 3° du code des postes et des communications électroniques dès lors que les services postaux internationaux portent sur des envois de correspondance jusqu' à 2 kg et sur les colis jusqu' à 20 kg.

La Convention postale universelle donne aux pays membres la possibilité de refuser ou de différer l'application des modifications de la Convention postale universelle qui susciteraient des difficultés en fonction de leur droit national.

Lors du Congrès de 2008, la France, comme 29 autres pays membres, a émis une réserve uniquement sur l'article 26 de la Convention concernant le dépôt à l'étranger des envois de la poste aux lettres. En effet, cet article 26 prévoit qu'un opérateur désigné contrairement aux obligations découlant du traité de l'UPU peut refuser le traitement des envois de la poste aux lettres que des expéditeurs résidant sur le territoire du pays membre déposent à l'étranger en vue de bénéficier de conditions tarifaires plus avantageuses. Cet article fixe le droit à rémunération de l'opérateur s'il accepte cependant de traiter ces envois de la poste aux lettres. Il peut demander une rémunération calculée soit en fonction des taux appliqués dans le système cible retenu pour les pays industrialisés, soit sur la base de 80 % du tarif intérieur applicable à des envois équivalents.

Certains pays membres ne souhaitent pas appliquer ces modalités de rémunération qui peuvent être selon les cas pénalisantes pour l'opérateur du pays sur le territoire duquel les envois de la poste aux lettres ont été déposés. Aussi, ces pays membres ont précisé par le biais d'une réserve qu'ils limiteraient le paiement en exigeant une rémunération fixée comme pour les envois en nombre. La France, comme vingt-neuf autres pays membres, a indiqué clairement qu'elle appliquerait dans son intégralité l'article 26 vis-à-vis de tous les pays membres.

CONCLUSION

Cette convention permettra d'améliorer les règles régissant l'acheminement des lettres et des colis internationaux, en tenant compte des évolutions du secteur, qu'il s'agisse de la séparation juridique et fonctionnelle entre les Etats et les opérateurs postaux ou du développement du commerce électronique.

L'enjeu est d'avoir un dispositif permettant de maintenir un service postal international de qualité reposant sur des règles clarifiées et actualisées.

La Convention postale universelle n'aura aucune incidence sur notre droit. En particulier, La Poste demeure l'opérateur désigné par la France. Elle continuera donc d'assurer le service postal international entrant et sortant du territoire.

Votre rapporteur vous recommande donc l'adoption du projet de loi autorisant l'approbation de la convention postale universelle.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent rapport lors de sa séance du 2 avril 2013.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le présent projet de loi et proposé qu'il fasse l'objet d'un examen en forme simplifiée en séance publique.


* 1 la poste aux lettres comprend notamment : les lettres, les cartes postales, les imprimés, les cécogrammes, les journaux... etc., ainsi que des colis postaux

* 2 Directive 2008/6/CE du 20 février 2008 modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne l'achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté

* 3 L'expression « opérateur désigné » est définie comme « toute entité gouvernementale ou non gouvernementale désignée officiellement par le pays membre pour assurer l'exploitation des services postaux et remplir les obligations y relatives découlant des Actes de l'Union sur son territoire »

* 4 article L.3-3 du code des postes et des communications électroniques

* 5 Directive 2008/6/CE du 20 février 2008 modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne l'achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté

* 6 Article R.1-1-19 du code des postes et des communications électroniques

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