Rapport n° 65 (2014-2015) de Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 29 octobre 2014

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N° 65

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 29 octobre 2014

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Turkménistan relatif aux services aériens ,

Par Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Aymeri de Montesquiou, Mmes Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Emorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, M. Gaëtan Gorce, Mme Nathalie Goulet, M. Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Didier Guillaume, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Jean-Vincent Placé, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk .

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

370 (2013-2014) et 66 (2014-2015)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Cet accord vise à donner un cadre juridique aux services de transport aériens entre la France et le Turkménistan.

Il s'agit du premier accord aérien entre ces deux Etats, qui a été signé à Achgabat le 2 mars 2013 à l'occasion de la visite au Turkménistan du ministre des Affaires étrangères.

Il vise notamment à accompagner la mise en service d'une liaison aérienne régulière directe entre Paris et Achgabat, exploitée par la compagnie nationale turkmène, Turkmenistan Airlines.

Cette liaison aérienne, qui était en projet depuis une dizaine d'années, est effective depuis le 20 décembre 2013.

Dès le 3 décembre 2013, le Turkménistan informait la France qu'il s'était acquitté des procédures internes nécessaires à l'entrée en vigueur de cet accord. Il est temps que la France le ratifie elle aussi.

I. LE CONTEXTE DANS LEQUEL S'INSCRIT LE PRÉSENT ACCORD

A. LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LE TURKMÉNISTAN

1. Les relations diplomatiques

La représentation française au Turkménistan, dont l'ouverture a été décidée lors de la visite du président François Mitterrand à Achgabat en avril 1994, a été élevée au rang d'ambassade en 1999 .

Après une première phase dynamique (conclusion de plusieurs accords, co-parrainage en 1995 de la résolution de l'ONU proclamant la neutralité du Turkménistan, visite à Paris du Président turkmène en 1996), les contacts se sont raréfiés .

Le changement de chef d'Etat à Achgabat en 2007 s'est accompagné d'une relance des relations bilatérales marquée par sa visite officielle à l'invitation du Président de la République les 1 er et 2 février 2010. La Secrétaire d'Etat au commerce extérieur a été reçue par le président turkmène lors de sa visite à Achgabat le 30 juin 2010 à l'occasion de la tenue de la 1 ère réunion de la Commission mixte économique, ainsi que son successeur qui s'y est rendu le 6 mars 2012. Enfin, le Ministre des Affaires étrangères a rencontré le Président et son homologue à Achgabat le 2 mars 2013.

2. Les relations économiques

Nos relations commerciales avec le Turkménistan font de ce pays le 3 ème partenaire de la France en Asie centrale derrière le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Elles sont quasi-exclusivement nourries par les grands contrats, ce qui les rend très fluctuantes .

En 2013 , le volume total des échanges s'est élevé à 126 M€, en nette baisse par rapport à 2012, dont 123,5 M€ pour les exportations françaises et seulement 2,5 M€ d'importations en provenance du Turkménistan . Les exportations françaises sont essentiellement composées de biens d'équipements mécaniques et électriques ainsi que de biens intermédiaires ( minéraux, produits chimiques ) utilisés dans l'industrie extractive.

Avec une part de marché de 3%, la présence française demeure limitée mais tend à se développer : 14 entreprises françaises y sont aujourd'hui implantées (principalement Bouygues, Cifal, Dgt Logistic, Schlumberger, Schneider Electric, Technip, Thales, Total, Vinci, CIS, Eurocopter), et en 2010, 147 entreprises domiciliées en France ont exporté vers le Turkménistan, dont 46 PME. Les activités de Bouygues depuis 1992 contribuent fortement à la présence française dans le pays (chiffre d'affaire de 2,5 Mds €, la moitié du chiffre d'affaires du groupe à l'international).

La Commission mixte pour la coopération économique et le groupe de travail bilatéral dans le domaine de l'énergie créé en 2010 (réuni une première fois à Paris en juin 2010, une seconde fois à Achgabat en mars 2013) constituent des vecteurs importants pour nos relations économiques bilatérales .

B. LES RELATIONS ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET LE TURKMÉNISTAN

Un accord de partenariat et de coopération (APC) a été signé entre l'Union européenne et le Turkménistan en mai 1998, mais n'a ni été ratifié par la France, ni par le Royaume-Uni ni par le Parlement européen en raison de la situation des droits de l'Homme dans le pays . L'accord intérimaire commercial, signé en novembre 1998, est entré en vigueur en août 2010.

Le Turkménistan bénéficie des projets européens financés par l'instrument de financement du développement de la coopération (ICD), qui soutient le développement économique et social, avec une priorité à la formation professionnelle, ainsi que des programmes d'infrastructure régionaux Inogate (hydrocarbures) et Traceca (transport).

Ce pays étant le seul d'Asie centrale à ne pas bénéficier d'une délégation de l'Union Européenne , un chargé d'affaire a été nommé en 2013.

Depuis son adoption en juin 2007, la coopération entre l'UE et le Turkménistan s'inscrit dans le cadre de la stratégie de l'UE pour l'Asie centrale qui a notamment permis d'instaurer un dialogue annuel sur les droits de l'Homme.

Le Conseil de l'UE a donné en septembre 2011 à la Commission européenne un mandat de négociations avec l'Azerbaïdjan et le Turkménistan dans le cadre du projet de gazoduc Nabucco et celui de gazoduc Transcaspien qui visent à proposer des voies alternatives d'évacuation des hydrocarbures turkmènes vers l'Europe via le Caucase et la Turquie .

Aucune négociation n'est ouverte à ce jour sur un accord aérien UE-Turkménistan et il semble peu probable qu'elles soient ouvertes à moyen terme, les négociations se concentrant pour le moment sur les grands pays émergents et les Etats du voisinage européen.

C. LES SERVICES AÉRIENS ENTRE LA FRANCE ET LE TURKMÉNISTAN

1. Etat du trafic aérien

Jusqu'à très récemment, il n'existait pas de ligne aérienne directe entre la France et le Turkménistan, les liaisons entre Achgabat et Paris s'effectuant avec des escales, principalement en Allemagne (Frankfort) ou en Turquie (Istanbul).

Le 20 décembre 2013, la compagnie nationale Turkmenistan Airlines a ouvert une ligne entre Achgabat et Paris , concrétisant un projet exprimé dès 2004. Pour mémoire, outre Paris, cette compagnie dessert également, dans l'Union européenne, Londres, Birmingham et Francfort.

La compagnie turkmène effectue depuis cette date deux vols par semaine entre les deux capitales . Entre l'ouverture et août 2014, quelque 5 000 passagers ont emprunté la ligne.

Ainsi, le trafic passagers entre les deux pays est faible et son potentiel de développement relativement limité .

En effet, si l'ouverture d'un service direct a permis de capter une partie de la clientèle qui transitait via la Turquie ou l'Allemagne, celle-ci est quantitativement modeste (environ 2 000 passagers annuellement) et, d'autre part, le principal marché européen avec le Turkménistan se situe au Royaume-Uni où la communauté Sikh utilise les services de la compagnie turkmène pour se rendre en Inde via une escale à Achgabat, ce qui rend peu probable le transfert d'une partie de ce trafic via Paris.

Le trafic passagers pourrait néanmoins être appelé à croître, à la faveur du développement des relations économiques et des flux liés au tourisme entre nos deux pays.

Pour mémoire, il existe également des liaisons aériennes ponctuelles entre la France et le Turkménistan pour le trafic de fret . Les besoins étant très irréguliers, ce trafic a porté sur 600 tonnes en 2011 contre 3000 tonnes en 2009, principalement avec les aéroports de fret de Châteauroux-Déols et Châlons-Vatry.

Côté français, aucune compagnie aérienne ne dessert actuellement le Turkménistan, ni les autres pays d'Asie Centrale. Aucune ne projette de le faire à moyen terme.

2. Cadre juridique

Faute de trafic aérien, il n'existait jusqu'à présent aucun cadre juridique applicable aux services de transport aérien entre la France et le Turkménistan.

C'est le projet de mise en service d'une ligne Paris-Achgabat par la société Turkmenistan Airlines qui a motivé l'ouverture de négociations en vue de la conclusion d'un accord, permettant de définir les dispositions applicables à l'activité de cette société en France ainsi que les conditions de coopération entre les autorités de l'aviation civile des deux pays.

Paraphé lors de consultations aéronautiques franco-turkmènes conduites du 20 au 23 novembre 2012 à Achgabat, l'accord a été signé le 2 mars 2013 à l'occasion de la visite au Turkménistan du ministre français des Affaires étrangères.

Il est à noter que les autres Etats avec lesquels le Turkménistan a conclu un accord aérien bilatéral (Allemagne, Grande-Bretagne, Russie, Turquie, Iran, Chine, etc.) sont les Etats desservis par Turkmenistan Airlines.

Dans l'attente de l'entrée en vigueur de l'accord aérien, les services de Turkmenistan Airlines sont autorisés sur la base d'un procès-verbal (« record of discussions ») entre les autorités de l'aviation civile françaises et turkmènes, signé à l'occasion de consultations bilatérales en novembre 2012.

Ce texte, qui repose sur la bonne coopération entre les signataires, n'apporte cependant pas de garantie juridique en cas de contentieux quant à son application.

II. L'ACCORD ENTRE LA FRANCE ET LE TURKMÉNISTAN RELATIF AUX SERVICES AÉRIENS

A. LA PORTÉE DE L'ACCORD

Le présent accord définit un cadre juridique moderne applicable aux services aériens des deux Etats.

Ainsi, il comporte des dispositions classiques pour ce type d'accord bilatéral, conformes aux principes définis par la Convention de Chicago du 7 décembre 1944 et qui reprennent globalement les clauses du modèle d'accord aérien établi par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) : octroi des droits, désignation des entreprises de transport aérien, exploitation des services agréés, sûreté et sécurité, redevances et droits de douanes, représentation commerciale des compagnies aériennes, tarifs, transferts de recettes...

Il instaure également un système de règlement des différends (art.21 de l'accord), qui offre aux entreprises et aux Etats une certaine sécurité juridique.

Les dispositions de cet accord sont également conformes au droit communautaire, de sorte que la France pourra, le cas échéant, désigner des compagnies aériennes communautaires établies sur son territoire en vue d'exploiter les services aériens entre les deux pays.

Pour la France, il apporte une garantie importante, qui est le libre survol du territoire turkmène par les compagnies françaises et la possibilité d'y effectuer des escales techniques.

En effet, le Turkménistan n'a pas encore adhéré à l'Accord de Chicago du 7 décembre 1944 relatif au transit des services aériens internationaux, qui stipule que les compagnies des Etats parties ont le droit de traverser son espace aérien et d'atterrir pour des raisons non commerciales.

Ce volet est particulièrement important pour la société Air France. En 2011, la compagnie française, dont les vols quotidiens à destination de l'Asie du Sud-Est transitent par l'espace aérien turkmène 1 ( * ) , s'était vu interdire l'accès à cet espace aérien, ce qui a occasionné pour elle des frais importants.

B. LES DISPOSITIONS DE L'ACCORD

L'accord comporte 25 articles et une annexe.

L'article 1 définit les termes de l'accord : « Convention » (qui désigne la Convention de Chicago relative à l'aviation civile internationale), autorités aéronautiques », « entreprise de transport aérien désignée », « service aérien », « routes spécifiées », « services agréés, « tarifs », « redevances d'usage » et « accord ».

L'article 2 définit les droits octroyés par l'accord . Il accorde ainsi aux entreprises de transport aérien de chaque Partie contractante le droit d'exploiter les « libertés de l'air » suivantes :

- le droit de survoler son territoire sans y atterrir (première liberté);

- le droit d'y effectuer des escales pour des raisons non commerciales (deuxième liberté) ;

- le droit d'embarquer et de débarquer des passagers, des bagages et du fret, y compris du courrier, à destination ou en provenance du territoire de l'autre Partie (troisième et quatrième liberté) ;

L'article exclut le droit de cabotage, qui est le droit pour un transporteur d'assurer un service entre deux points situés sur le territoire d'un même Etat, ce qui est habituel pour ce type d'accord.

L'article 3 porte sur la désignation par les Parties des entreprises de transport aérien habilitées à exploiter les services agréés (services aériens réguliers) sur les routes spécifiées à l'accord. Chaque partie peut autoriser plusieurs entreprises, la désignation se faisant par écrit par la voie diplomatique.

Cet article définit les conditions que doit respecter tout entreprise désignée pour se voir accorder par les autorités aéronautiques de l'autre Partie les autorisations d'exploitation (lieu d'établissement, contrôle réglementaire effectif, propriété du capital de l'entreprise de transport aérien concernée). Il permet à la France de désigner des compagnies aériennes françaises mais aussi des compagnies communautaires établies en France, conformément à la réglementation en vigueur.

L'article 4 prévoit la possibilité de révoquer ou suspendre l'autorisation d'exploitation des entreprises de transport aérien ne respectant pas l'une des conditions définies à l'article 3.

L'article 5 énonce les grands principes régissant l'exploitation des services aériens agréés : conditions de concurrence équitables, adéquation entre l'offre et la demande de transport, afin de permettre « un remplissage raisonnable » compatible avec des tarifs également raisonnables.

L'article 6 prévoit l 'application des lois et règlements d'une Partie contractante, en matière douanière et de navigation aérienne , pour l'entrée sur son territoire et dans son espace aérien des aéronefs, équipages, passagers et bagages de l'autre Partie contractante. L'article 17 prévoit néanmoins une facilitation pour les passagers, les bagages et le fret en transit.

L'article 7 énonce l'objectif commun de définir un cadre de concurrence loyale en matière d'exploitation des services aériens, conformément aux orientations prises par la politique extérieure commune de l'Union européenne en matière d'aviation civile (déclaration du conseil de l'Union européenne du 20 décembre 2012).

Les conditions de concurrence entre transporteurs aériens pourront faire l'objet de consultations entre autorités aéronautiques des Parties contractantes et, le cas échéant, de mesures compensatoires appropriées, proportionnées et restreintes en termes de champ d'application et de durée.

Ces mesures, qui ne sont pas précisées à ce stade, seraient vraisemblablement la suspension provisoire, voire l'annulation, des droits de trafic accordés à l'autre Partie, ou la révocation/suspension d'une autorisation d'exploitation accordée à une ou plusieurs compagnies désignées par l'autre Partie.

A l'article 8, les parties reconnaissent comme objectif commun la création d'un environnement de concurrence loyale pour l'exploitation des services aériens. Cela plaide notamment pour que les entreprises « exploitent leurs activités sur une base totalement commerciale et ne bénéficient pas de subventions publique s ». En cas de pratiques portant atteinte à cet objectif de concurrence loyale, les autorités aéronautiques de l'une des Parties peuvent soumettre des observations par écrit ou demander des consultations sur le sujet aux autorités de l'autre Partie. Si à l'issue de celles-ci, ces pratiques persistent, la Partie contractante peut prendre des mesures appropriées, proportionnées et restreintes en termes de champ d'application et de durée.

L'article 9 est relatif à la sécurité de l'aviation . Il prévoit que chaque partie peut demander des consultations au sujet des normes de sécurité adoptées par l'autre partie. A l'issue de ces consultations, s'il s'avère que ces normes ne sont pas au moins égales aux normes minimales exigées par la Convention de Chicago, elle peut lui demander de prendre des mesures correctives. A défaut, elle peut révoquer ou suspendre l'autorisation d'exploiter. Par ailleurs, chaque partie contractante peut effectuer des inspections au sol sur les aéronefs de l'autre partie contractante. Si elle en conclut que la sécurité n'est pas assurée, de même qu'en cas de refus d'accès, elle peut suspendre ou modifier unilatéralement une autorisation d'exploiter.

L'article 10 concerne la fixation des redevances d'usage , imposées aux entreprises de transport aérien au titre de l'utilisation des installations et services aéroportuaires et autres installations de sécurité, de sûreté, de navigation aérienne: celles-ci doivent notamment être « justes, raisonnables, non-discriminatoires et faire l'objet d'une répartition équitable entre les catégories d'usagers ». Elles doivent refléter, sans toutefois excéder, une part équitable du coût supporté pour la mise à disposition des installations et services aéroportuaires ainsi que des services et installation de sécurité, de sûreté et de navigation aérienne.

L'article 11 porte sur les droits de douane et les taxes imposés aux services aériens. Il prévoit des exemptions de droits sur différents équipements et fournitures (carburants, consommables, pièces détachées, provisions de bord...) nécessaires à l'exploitation des services aériens internationaux, conformément à la pratique et à la réglementation internationales en la matière.

L'article 12 vise à permettre les activités commerciales des transporteurs aériens d'une Partie contractante sur le territoire de l'autre Partie contractante, en garantissant notamment la liberté d'établir des agences commerciales, l'autorisation de faire entrer et séjourner du personnel ou encore le droit de vendre des services de transport aérien.

L 'article 13 permet aux compagnies aériennes de convertir et de transférer librement et sans délai les excédents de recettes qui ont été accumulés dans l'autre Etat partie vers le pays de son choix (le pays d'établissement de l'entreprise dans la plupart des cas, mais pas exclusivement). Il confirme également le droit pour les compagnies d'employer librement les recettes générées localement pour leurs besoins liées à l'exploitation de services (activités commerciales, redevances aériennes, taxes diverses).

L'article 14 permet aux entreprises de transport aérien de choisir librement leur prestataire pour les services d'assistance en escale (contrôle du chargement, manipulation du fret et du courrier, guidage de l'avion, nettoyage de l'appareil, fourniture de matériel, de carburant, assistance aux passagers, traitement des bagages...). Il les autorise aussi à pratiquer l'auto-assistance en escale, qui consiste, pour un transporteur aérien, à effectuer pour son propre compte un ou plusieurs services d'assistance.

L'article 15 garantit la libre fixation des tarifs par les entreprises de transport aérien désignées. Il prévoit que les autorités aéronautiques de chaque Partie contractante peuvent se faire communiquer ces tarifs et intervenir en cas de prix trop discriminatoires, trop élevés ou encore trop bas.

L'article 16 prévoit la soumission pour approbation des programmes d'exploitation des entreprises de transport désignées , et de toute modification qui leur est apportée, aux autorités aéronautiques de l'autre Partie contractante, au moins 30 jours avant leur application. Ces programmes détaillent les services réguliers, leur fréquence, les types d'aéronefs, leur configuration et leur capacité en nombre de sièges.

L'article 17 prévoit des contrôles simplifiés pour les passagers, bagages et marchandises qui ne font que transiter par le territoire des parties contractantes (en vue d'une destination finale se trouvant dans un pays tiers). Il exonère de droits de douane et autres redevances les bagages et marchandises en transit direct.

L'article 18 permet la communication aux autorités aéronautiques de chaque Partie contractante des documents statistiques nécessaires pour examiner l'exploitation des services agréés.

L'article 19 est relatif à la sûreté de l'aviation . Il rappelle l'obligation des Parties de garantit la sûreté de l'aviation civile contre les actes d'intervention illicite. Conformément aux dispositions prévues par l'OACI, il fixe les principes de coopération et d'assistance mutuelle des Parties contractantes, pour prévenir et traiter des atteintes à la sûreté de l'aviation civile du fait d'actes d'intervention illicite.

Les articles suivants comprennent les stipulations qui régissent classiquement la mise en oeuvre des traités : consultations et modifications (article 20), règlement des différends ( article 21 ), compatibilité avec un accord multilatéral passé ultérieurement ( article 22 ), dénonciation ( article 23 ), enregistrement auprès de l'OACI ( article 24 ) et entrée en vigueur ( article 25 ).

Enfin, l'annexe est constituée par le tableau des routes qui pourront être exploitées par les entreprises de transport aérien de chacune des Parties contractantes.

CONCLUSION

Votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi visant à ratifier l'accord entre la France et le Turkménistan relatif aux services aériens, qui donne un cadre juridique aux liaisons aériennes entre nos deux pays.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 29 octobre 2014, sous la présidence de M. Christian Cambon, vice-président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur sur le projet de loi n° 370 (2013-2014) autorisant la ratification de l'accord entre la France et le Turkménistan relatif aux services aériens.

Après un bref débat, la commission a adopté le rapport ainsi que le projet de loi précité.

Elle a proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique, en application des dispositions de l'article 47 decies du règlement du Sénat.

ANNEXE 1 -

ÉLÉMENTS SUR L'HISTOIRE, LA GÉOGRAPHIE,
LA SITUATION POLITIQUE, ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DU TURKMÉNISTAN 2 ( * )

1°) Histoire et géographie

Le Turkménistan est un Etat d'Asie centrale issu de l'éclatement de l'URSS en 1991. Il est quasi désertique, le désert du Karakoum couvrant 80 % de sa superficie. Il compte donc 5 millions d'habitants sur un territoire presque aussi vaste que l'Hexagone , avec 488 100 km 2 . Le pays est divisé en cinq provinces, chacune subdivisée en plusieurs districts, plus la capitale, Achgabat.

L'histoire du Turkménistan remonte à plusieurs millénaires : des archéologues ont découvert la présence d'un peuple vivant dans le désert du Karakoum il y a 5 000 ans. Entre 1863 et 1885, les Russes conquirent la région et en firent la Province transcaspienne, intégrée au Turkestan en 1897. En 1924, la République socialiste soviétique du Turkménistan fut créée et intégrée à l'URSS l'année suivante.

Le Turkménistan devint indépendant en octobre 1991 et Saparmurat Niazov fut élu Président. En 1993, il prit officiellement le nom de Turkmenbachi (le père des Turkmènes). En décembre 1999, le parlement turkmène prolongea à vie le mandat de Saparmurat Niazov, qui mourut le 21 décembre 2006.

Le vice-Premier ministre Gourbangouli Berdymoukhamedov fut désigné président par intérim et élu le 11 février 2007 avec 89 % des suffrages, puis réélu le 12 février 2012 avec 97% des voix.

2°) Situation politique

Le Turkménistan est demeuré un Etat à parti unique (le Parti Démocratique du Turkménistan) jusqu'à la création du Parti des industriels et des entrepreneurs du Turkménistan le 21 août 2012, conformément aux annonces faites par le président Berdymouhamedov en 2010.

Le Président du Turkménistan, élu pour cinq ans au suffrage universel direct , cumule, comme son prédécesseur, les fonctions de chef de l'Etat, de chef du gouvernement, de commandant en chef de l'armée et de président du parti au pouvoir.

La réforme de la constitution en septembre 2008 et l'adoption d'une nouvelle loi électorale constituent des premiers signes d'évolution du système politique. Le nombre de députés au Parlement (Medjlis), qui constitue désormais la seule instance législative, est passé de 65 à 125 ; ils sont élus au suffrage universel direct pour cinq ans.

Cette réforme ne remet cependant pas en cause l'absence de séparation des pouvoirs . Les dernières élections législatives qui ont eu lieu le 15 décembre 2013 ont constitué les premières élections bipartites dans le pays avec l'entrée au Parlement du Parti des industriels et des entrepreneurs qui a obtenu 14 sièges (le Parti Démocratique du Turkménistan en a 47, les sièges restants revenant à l'Union des femmes, l'Association des jeunes et quelques candidats « indépendants»).

Le Gouvernement (Cabinet des Ministres) est constitué de 10 Vice-Présidents du Cabinet du Ministre , couvrant chacun plusieurs ministères. Le rythme de rotation des portefeuilles ministériels est élevé .

Le Turkménistan a signé et ratifié les six grandes conventions des Nations Unies relatives aux droits de l'Homme, mais n'a ratifié ni le protocole additionnel à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ni le statut de Rome établissant la Cour Pénale Internationale.

3°) Situation économique

Après de premières années difficiles, le pays a renoué avec la croissance en 1998 .

Les autorités continuent d'asseoir leur politique économique quasi-exclusivement sur l'exploitation des importantes réserves en hydrocarbures , avec 76 Mds m 3 produits en 2013 (source AIE), le pays étant le 2ème producteur de gaz de la CEI. Le Turkménistan dispose de 10 000 Mds de m 3 de réserves de gaz prouvées fin 2013. Ses réserves potentielles d'au moins 20 000 Mds m 3 le placeraient au 4 ème rang mondial .

Le pays est peu touché par la crise mondiale : le PIB a crû de 9,5% en 2012 et 10,2% en 2013.

La croissance dont le principal moteur est la manne énergétique (50% du PIB, 90% des exportations) bénéficie surtout au secteur de la construction, qui fait l'objet d'importants programmes publics d'investissement (palais, ministères, hôpitaux, routes).

ANNEXE 2 - CARTE DU TURKMÉNISTAN


* 1 En février 2011, les autorités turkmènes ont interdit pendant une courte période leur espace aérien à la compagnie Air France, qui avait été contrainte de suspendre le règlement des redevances liées au survol du territoire turkmène suite à une saisie-attribution. Dans cette affaire, Air France était le tiers-saisi dans une procédure qui opposait un créancier et le gouvernement turkmène. Ce cas de figure, très particulier, ne s'est pas représenté.

* 2 Eléments fournis par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international.

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