AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, présenté en Conseil des ministres le 14 septembre 2016 et adopté le 18 octobre 2016 par l'Assemblée nationale, connaît un parcours législatif particulièrement rapide.

Il a toutefois été précédé d'un travail particulièrement intense de co-construction, avec la contribution décisive des élus de la montagne, aussi bien en termes de diagnostic, que d'identification de solutions et d'élaboration de propositions.

Le projet de loi comporte 75 articles après son passage à l'Assemblée nationale ; il en comportait 25 dans le projet de loi initial.

Votre commission a délégué au fond 27 articles à la commission des affaires économiques, relatifs aux activités pastorales, agricoles et forestières, à l'urbanisme et au tourisme. Elle a également délégué au fond 10 articles à la commission des affaires sociales, relatifs à la santé et au droit du travail. Par ailleurs, la commission des lois s'est saisie pour avis d'une large partie du texte. Enfin, la commission de la culture a procédé à une communication sur les articles relatifs à l'enseignement scolaire.

Au cours de ses auditions, votre rapporteur a noté la satisfaction des nombreux organismes et personnalités rencontrés vis-à-vis du texte résultant des travaux préliminaires et des modifications adoptées à l'Assemblée nationale. Si des aménagements restent nécessaires, un souhait général de stabilisation du texte a été exprimé, en vue d'une entrée en vigueur rapide de ses dispositions.

Votre rapporteur a ainsi décidé en priorité d'améliorer la qualité générale du texte, sans bouleverser les équilibres existants, afin de préserver et de renforcer le consensus construit depuis les débuts de cet acte II de la loi montagne.

Le projet de loi résultant des travaux de votre commission constitue ainsi un ensemble équilibré et consolidé, en faveur d'une relance ambitieuse et durable de la politique de la montagne.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE POLITIQUE DE LA MONTAGNE À RELANCER, POUR ASSURER LA PROTECTION ET LE DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES DE MONTAGNE

A. UNE POLITIQUE DE LA MONTAGNE CONSACRÉE PAR LA LOI FONDATRICE DU 9 JANVIER 1985

À tous égards, la montagne est une composante majeure de la nation française : 6,1 millions de Français vivent dans les zones de montagne, réparties sur plus de 6 000 communes, tandis que plus de 10 millions de concitoyens habitent dans le périmètre d'un massif, soit plus d'un Français sur dix. Les massifs recouvrent tout ou partie de la moitié des régions et des départements français.

Si la montagne est une destination touristique particulièrement prisée en France, mais également en Europe et dans le monde entier, il s'agit d'abord d'un lieu de vie et d'activité pour de nombreux concitoyens. Les territoires de montagne occupent par ailleurs une place toute particulière dans l'identité et la culture de notre pays.

Partageant certaines caractéristiques avec les territoires ruraux, en termes de densité démographique et d'éloignement des grandes aires urbaines, la montagne est un lieu de contraintes , géographiques et climatiques. Le relief de ces territoires complexifie l'implantation d'activités économiques et le déploiement des réseaux de toute nature, la rudesse du climat a des conséquences majeures sur la vie quotidienne des habitants, et les difficultés d'accès imposent le maintien de services de proximité, sans lesquels l'isolement devient insurmontable.

Ces spécificités sont bien sûr également à l'origine d'atouts spécifiques aux territoires de montagne, qu'il s'agisse d'une culture riche, authentique et diversifiée, de productions originales et de qualité, et bien entendu d'un patrimoine naturel exceptionnel, aussi bien en termes de paysages que d'espaces naturels et de biodiversité. À cet égard, 24 parcs naturels régionaux sur 51 et 6 parcs nationaux sur 10 sont situés dans des massifs montagneux. Les territoires de montagne regroupent 28 % de la forêt française. La montagne concentre enfin la ressource en eau, étant parfois qualifiée de château d'eau de la nation.

En 1985, le Parlement a souhaité adopter un texte fondateur pour consacrer dans la loi l'importance de la montagne pour la collectivité nationale, et pour définir une politique d'aménagement du territoire propre à la montagne. Adoptée à l'unanimité, la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne a créé un cadre ambitieux et novateur, en faveur des territoires de montagne.

Les deux priorités du texte de 1985 étaient de compenser les handicaps naturels et de valoriser les atouts spécifiques aux territoires de montagne. Reconnaissant la contribution majeure de la montagne pour le bien de la nation tout entière, le Parlement avait jugé indispensable de mobiliser la solidarité nationale en faveur de ces territoires.

L'avenir tracé par la loi montagne était audacieux : il s'agissait tout à la fois de permettre le développement économique des territoires de montagne, et d'assurer la protection des espaces et du patrimoine naturel. Dès 1985, le législateur s'était ainsi résolument engagé dans une démarche d'aménagement et de développement durables de la montagne , en vue de concilier les questions économiques, sociales et environnementales. Sans de tels équilibres, la spécificité et la richesse des territoires de montagne, comme espaces naturels et comme lieux de vie, risqueraient de disparaître.

La loi montagne de 1985 a fixé le cadre général de la politique de la montagne , en particulier l'affirmation du rôle majeur de la montagne pour la République et la mobilisation de la solidarité nationale en faveur d'une dynamique d'autodéveloppement, la mise en place d'un principe d'adaptation des normes, et la création d'instances de gouvernance et de représentation spécifiques : le Conseil national de la montagne d'une part, les comités de massif d'autre part. La montagne a par ailleurs été dotée d' outils de planification : les schémas de massif et les conventions interrégionales de massif.

La loi du 9 janvier 1985 a également inscrit au niveau législatif une définition juridique des territoires de montagne, par deux zonages distincts .

Le zonage montagne , dont les critères sont encadrés par le droit européen 1 ( * ) , qui comprend les communes dont l'altitude est supérieure à 600 mètres, ou dont la pente est supérieure à 20 %, ou caractérisées par la combinaison d'une altitude supérieure à 500 mètres et d'une pente moyenne de 15 %, soit un peu plus de 6 000 communes.

Le zonage massif , qui correspond aux zones de montagne, auxquelles s'ajoutent les territoires adjacents du piémont et des entrées de vallée, afin de former des entités administratives permettant de mener des interventions publiques sur un périmètre territorial, économique et social cohérent.

ZONES DE MONTAGNE ET PÉRIMÈTRE DES MASSIFS

Source : Commissariat général à l'égalité des territoires.

Enfin, la loi montagne de 1985 comprenait des mesures sectorielles , visant à prévoir des dispositifs spécifiques au sein de plusieurs politiques publiques, comme la préservation des zones agricoles, le développement des labels de qualité, la maîtrise de l'urbanisation ou la protection des travailleurs pluriactifs.


* 1 Le zonage de montagne est encadré par la directive 76/401/CEE du 6 avril 1976 et précisé par le règlement 1257/99 du conseil européen du 17 mai 1999 qui prévoient que ce zonage est fondé : soit sur l'existence de conditions climatiques très difficiles en raison de l'altitude, soit sur la présence à une altitude moindre, de fortes pentes dans la majeure partie du territoire, soit sur la combinaison de ces deux paramètres.

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