CHAPITRE VII
TRANSPARENCE ET AGILITÉ DES ENTREPRISES
PUBLIQUES LOCALES

Sous l'appellation générique d'« entreprises publiques locales », l'intitulé du chapitre VII du titre VII du projet de loi regroupe plusieurs catégories de sociétés commerciales , plus spécifiquement de sociétés anonymes dont le capital est détenu en tout ou partie par des collectivités territoriales ou groupements de collectivités, dont l'objet social comprend des activités d'intérêt général et qui sont liées aux collectivités ou groupements actionnaires par des contrats de la commande publique :

- les sociétés d'économie mixte , qui se sont développées à partir des lendemains de la Première Guerre mondiale, et dont le régime actuel est issu de la loi du 7 juillet 1983 248 ( * ) : elles associent une ou plusieurs collectivités territoriales ou groupements de collectivités à une ou plusieurs personnes privées et, éventuellement, à d'autres personnes publiques « pour réaliser des opérations d'aménagement, de construction, pour exploiter des services publics à caractère industriel et commercial, ou pour toute autre activité d'intérêt général », la participation au capital des collectivités ou de leurs groupements étant obligatoirement comprise entre 50 % et 85 % ;

- les sociétés d'économie mixte à opération unique (SEMOP) , dont l'institution est plus récente puisqu'elle date de la loi du 1 er juillet 2014 249 ( * ) . Créée pour une durée limitée par une collectivité territoriale ou un groupement et en vue de la conclusion et de l'exécution d'un seul contrat, la SEMOP a ceci de particulier que le ou les actionnaires opérateurs économiques ») avec lesquels la collectivité ou le groupement s'associe sont choisis au terme d'une procédure de mise en concurrence , ce qui permet ensuite d'attribuer le contrat à la société sans publicité ni mise en concurrence préalable, conformément à la jurisprudence Acoset de la Cour de justice de l'Union européenne 250 ( * ) ;

- les sociétés publiques locales (SPL) , issues de la loi du 28 mai 2010 251 ( * ) , dont le capital est intégralement détenu par des collectivités territoriales ou groupements de collectivités (au nombre de deux au moins), et dont l'objet social peut également comprendre la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction, l'exploitation de services publics industriels et commerciaux ou toute autre activité d'intérêt général. Les SPL ayant, en outre, l'obligation d'exercer leurs activités exclusivement pour le compte des collectivités et groupements actionnaires et sur leur territoire, elles satisfont aux critères fixés par le droit européen pour que des contrats de la commande publique soient conclus avec elles par leurs actionnaires sans publicité ni mise en concurrence préalable, conformément à l'exception dite « in house » ou de quasi-régie 252 ( * ) ;

- les sociétés publiques locales d'aménagement (SPLA) , d'abord créées à titre expérimental par la loi du 13 juillet 2016 253 ( * ) puis pérennisées, constituent une variété de SPL, ayant notamment pour objet de constituer des réserves foncières et de réaliser des opérations d'aménagement, de construction ou de réhabilitation. Une des collectivités territoriales ou un des groupements actionnaires doit détenir, à lui seul, au moins la majorité des droits de vote.

Il faut ajouter à cette liste deux types de sociétés commerciales que les collectivités territoriales ou leurs groupements sont habilités à créer avec l'État : les sociétés d'économie mixte d'aménagement à opération unique (SEMAOU) , qui fonctionnent comme les SEMOP, et les sociétés publiques locales d'aménagement d'intérêt national (SPLA-IN) , variété de SPLA 254 ( * ) .

Plusieurs référés et rapports récents de la Cour des comptes, de l'inspection générale de l'administration (IGA) et du contrôle général économique et financier (CGEF) ont mis en évidence certaines insuffisances du cadre juridique et comptable applicable aux entreprises publiques locales, eu égard au risque financier qu'elles font courir aux collectivités et groupements qui en sont actionnaires 255 ( * ) . En tant qu'actionnaires, en effet, ces collectivités et groupements sont exposés à absorber les pertes de ces sociétés, dans la limite de leur apport, voire davantage en cas de faute de gestion susceptible d'engager leur responsabilité pour insuffisance d'actif. Surtout, les collectivités et leurs groupements sont souvent appelés à cautionner les emprunts souscrits par les sociétés dont ils sont actionnaires, et qui, pour beaucoup d'entre elles, sont sous-capitalisées.

Le projet de loi s'inspire directement de ces recommandations.

Article 70
Contrôle des entreprises publiques locales par les collectivités territoriales
et groupements actionnaires : contenu du rapport des mandataires,
vote sur celui-ci et accord préalable aux prises de participation

L'article 70 du projet de loi vise à renforcer le contrôle exercé par l'assemblée délibérante des collectivités territoriales et groupements actionnaires de sociétés d'économie mixte ou de sociétés publiques locales sur la gestion de celles-ci, d'une part, en précisant le contenu du rapport de leurs représentants au conseil d'administration ou de surveillance et en imposant un débat préalable au vote de l'assemblée délibérante sur celui-ci, d'autre part, en renforçant le contrôle des prises de participation au capital d'autres sociétés.

La commission des lois l'a adopté dans une rédaction sensiblement modifiée afin de ne pas entraver trop sensiblement le fonctionnement des entreprises publiques locales et des sociétés dans lesquelles elles détiendraient une participation directe ou indirecte.

1. Le rapport des élus locaux mandataires

1.1. La représentation des collectivités territoriales et groupements actionnaires au sein des organes dirigeants des entreprises publiques locales et le rapport des mandataires aux assemblées délibérantes

Les règles relatives à l'administration des SEM et SPL dérogent en partie au droit commun des sociétés anonymes afin de garantir le rôle que doivent y exercer les élus locaux . En effet, les mandataires sociaux ne sont pas désignés librement par l'assemblée générale mais comprennent obligatoirement des représentants élus en leur sein par les organes délibérants des collectivités territoriales et groupements actionnaires . Plus précisément :

- en ce qui concerne les SEM, les statuts doivent réserver aux collectivités et groupements actionnaires, au sein du conseil d'administration ou de surveillance, un nombre de sièges correspondant à leur part totale dans le capital de la société (cette règle est sans objet dans les SPL) ;

- si l'effectif du conseil d'administration ou de surveillance (dont le nombre de membres est plafonné à dix-huit par la loi 256 ( * ) ) ne permet pas que toutes les collectivités et tous les groupements actionnaires y soient représentés, celles et ceux dont la participation au capital est la plus réduite sont réunis en une assemblée spéciale, qui désigne au moins un représentant commun au conseil ; les autres collectivités ou groupements y sont représentés par un ou plusieurs de leurs élus.

Les élus locaux agissant en tant que mandataires des collectivités territoriales ou de leurs groupements au sein des organes dirigeants des SEM et SPL peuvent percevoir une rémunération ou des avantages particuliers à condition d'y être autorisés par une délibération expresse de l'assemblée qui les a désignés. Cette éventuelle rémunération est soumise à la règle d' écrêtement fixée au II de l'article L. 2123-20 du code général des collectivités territoriales.

Une fois par an au moins, ces mandataires doivent présenter à l'assemblée délibérante de la collectivité ou du groupement qui les a désignés un rapport écrit portant « notamment sur les modifications des statuts qui ont pu être apportées ». L'assemblée est appelée à se prononcer sur ce rapport 257 ( * ) .

1.2. Le projet de loi : préciser le contenu du rapport des mandataires et imposer un débat préalable au vote de l'assemblée délibérante

Les référés et rapports susmentionnés de la Cour des comptes, d'une part, de l'inspection générale de l'administration et du contrôle général économique et financier, d'autre part, ont souligné que le contrôle des assemblées délibérantes sur la gestion des entreprises publiques locales méritait d'être renforcé , afin notamment que les élus soient pleinement informés de la situation économique et financière de ces sociétés et des risques financiers encourus.

L'IGA et le CGEF notaient, en particulier, que l'approbation du rapport des mandataires revêtait souvent un caractère formel. Ils appelaient à « solenniser » cette procédure en imposant un débat préalable au vote sur ce rapport, et à étoffer le contenu de celui-ci, le volume de l'information étant actuellement « trop réduit pour nourrir un débat de fond 258 ( * ) ».

La Cour des comptes relevait également que, si le contrôle de l'assemblée délibérante sur la rémunération et les autres avantages perçus par ses représentants est garanti par la loi, il n'en va pas de même pour les mandataires et dirigeants non élus. La Cour mentionnait le cas du directeur général d'une SEM qui avait perçu au cours d'une année plus de 580 000 euros de rémunération, dont une prime exceptionnelle de 300 000 euros, sans que les assemblées délibérantes en aient été informées 259 ( * ) .

L'article 70 du projet de loi prévoit ainsi de compléter le contenu du rapport des mandataires , qui devrait désormais comporter « des informations générales sur la société, notamment sur les modifications de statuts, des informations financières , le cas échéant consolidées, ainsi que les éléments de rémunération et les avantages en nature [des] représentants [des collectivités territoriales et de leurs groupements] et des mandataires sociaux », et serait précisé par décret.

Par ailleurs, le vote sur ce rapport serait obligatoirement précédé d'un débat .

1.3. La position de la commission des lois

La commission des lois a approuvé ce renforcement du contrôle, par les assemblées délibérantes, de l'activité des entreprises publiques locales.

Il convient de noter que, préalablement au débat et au vote sur le rapport des mandataires, les membres de l'assemblée peuvent se faire communiquer par l'exécutif les comptes annuels de la société concernée, le rapport du commissaire aux comptes, ainsi que les autres documents d'information remis aux actionnaires en application du droit commun des sociétés anonymes (rapport de gestion, rapport sur le gouvernement d'entreprise, etc .) 260 ( * ) .

2. Le contrôle des prises de participations

2.1. Les risques liés à la filialisation et aux prises de participation

Conformément au droit commun des sociétés, les SEM et SPL ont la capacité de s'associer avec d'autres personnes physiques ou morales au sein de sociétés civiles ou commerciales, notamment de prendre des participations dans leur capital , à condition que cette association ou prise de participation se rattache à leur objet social. Elles peuvent aussi constituer des filiales, y compris sous forme de sociétés unipersonnelles dont elles détiennent la totalité du capital 261 ( * ) . Selon la revue de dépenses précitée, les entreprises publiques locales manifestent depuis quelques années « un réel engouement » pour la filialisation et les prises de participations, ce qui peut s'expliquer par des motivations diverses : développer une activité complémentaire, mobiliser des financements extérieurs, partager des risques avec d'autres partenaires, renforcer leur expertise technique, reprendre une entreprise existante dont l'activité est essentielle pour la société concernée, etc . 262 ( * )

Pour se prémunir contre ces risques , l'IGA et le CGEF recommandaient, d'une part, de renforcer le partenariat entre les préfectures, les directions régionales des finances publiques et, le cas échéant, les instances régionales de la Caisse des dépôts et consignations 263 ( * ) pour assurer une veille sur les filiales des entreprises locales, d'autre part, d'encourager les collectivités territoriales et groupements actionnaires à demander à la société « faîtière » l'établissement de comptes consolidés (lorsque ceux-ci ne sont pas obligatoires) ou d'une procédure de « transparence comptable » .

Le Gouvernement a choisi une autre voie, beaucoup moins praticable.

2.2. Le projet de loi : compléter les dispositions imposant l'accord préalable des collectivités actionnaires en cas de prise de participation et sanctionner leur méconnaissance de nullité

En l'état du droit, toute prise de participation d'une SEM ou d'une SPL dans le capital d'une société commerciale doit faire préalablement l'objet d'un accord exprès de la ou des collectivités territoriales et de leurs groupements actionnaires disposant d'un siège au conseil d'administration 264 ( * ) . Aucune sanction spécifique n'est prévue ; néanmoins, la violation de cette obligation légale est constitutive d'une faute qui, si elle cause un dommage, peut engager la responsabilité civile des dirigeants de la société.

Cette obligation procédurale, qui s'applique à toute participation au capital, quel qu'en soit le montant 265 ( * ) , est extrêmement lourde . Il faut rappeler, en effet, qu'en droit des sociétés, l'acquisition de titres de capital d'une autre société :

- relève des pouvoirs de gestion normaux des dirigeants, s'il s'agit seulement de placer les liquidités de la société ;

- relève également des pouvoirs des dirigeants, si une telle prise de participation entre dans l'objet social. À défaut, une décision de l'assemblée générale est requise pour modifier les statuts.

Le législateur aurait pu considérer que la place occupée par les représentants des collectivités et de leurs groupements dans les organes dirigeants des entreprises publiques locales, ainsi que l'approbation préalable de leurs assemblées délibérantes avant toute modification des statuts 266 ( * ) , suffisaient à garantir leur contrôle sur les prises de participations et filialisations 267 ( * ) .

Bien au contraire, l'article 70 du projet de loi, dans sa rédaction proposée par le Gouvernement, prévoit d' alourdir encore l'obligation procédurale consistant à obtenir l'accord préalable des assemblées délibérantes :

- en l'étendant aux prises de participation dans le capital de sociétés civiles (par exemple immobilières) ainsi qu'à la constitution de groupements d'intérêt économique ;

- en l'étendant aux participations indirectes, quel qu'en soit le degré et quelle que soit l'exposition financière de la SEM elle-même ;

- en requérant l'accord préalable de toutes les collectivités et groupements actionnaires , quel qu'en soit le nombre ;

- en sanctionnant le défaut d'accord préalable par la nullité des prises de participation ou du groupement d'intérêt économique.

De telles dispositions risqueraient de gripper complètement le fonctionnement des entreprises publiques locales . À titre d'exemple, les SEM dont l'objet social consiste à construire et gérer des logements sociaux sont souvent appelées à constituer rapidement des sociétés civiles immobilières de construction-vente 268 ( * ) à l'occasion d'appels d'offres, comme le font leurs concurrentes. Les délais exigés pour obtenir l'accord préalable de chacune des assemblées délibérantes des collectivités territoriales et groupements actionnaires empêcheraient les sociétés concernées de se porter candidates.

Pis encore, ces dispositions sont de nature à entraver gravement l'activité d'un nombre indéterminé d'entreprises françaises et étrangères, qui auraient un lien capitalistique même très indirect avec une SEM ou une SPL . Il faudrait, par exemple, qu'une première société dont quelques actions sont détenues par une deuxième société, dont quelques actions sont détenues par une troisième société, etc ., dont quelques actions sont détenues par une SEM ou une SPL obtienne l'accord préalable des assemblées délibérantes des collectivités et groupements actionnaires de celle-ci avant de placer quelques liquidités sur les marchés d'actions...

Enfin, sanctionner le défaut d'accord préalable par la nullité des prises de participation serait tout à fait inconsidéré .

Juridiquement, la prise de participation dans le capital d'une société est la conclusion avec celle-ci d' un contrat d'apport en numéraire , qui a également pour effet de rendre l'acquéreur partie au contrat de société (s'il ne l'était pas déjà). La nullité du contrat d'apport, et les restitutions qu'elle impliquerait, seraient susceptibles de nuire gravement aux intérêts de la société bénéficiaire et de ses associés . Elles pourraient même conduire cette société à la cessation des paiements , dans le cas où celle-ci ne disposerait plus des liquidités nécessaires pour rembourser l'apport.

En outre, cette nullité pourrait avoir des conséquences en chaîne sur la validité des actes accomplis postérieurement par la société bénéficiaire et ses organes . Supposons que l'entreprise publique locale, par sa prise de participation, soit devenue majoritaire au capital d'une société et ait acquis la majorité des droits de vote à l'assemblée générale : toute décision de l'assemblée générale (par exemple la nomination d'un dirigeant), et tout autre acte pris sur le fondement de celle-ci (par exemple un contrat conclu par le dirigeant au nom de la société) pourraient être remis en cause 269 ( * ) .

Dans le cas où l'apport en numéraire annulé aurait été consenti lors de la constitution d'une nouvelle société, cette société elle-même serait nulle .

Enfin, le régime de cette nullité et son articulation avec le régime général des nullités en droit des sociétés, défini par le code civil et le code de commerce, restent incertains . La rédaction proposée laisse penser qu'il s'agirait d'une nullité impérative, alors que le législateur préfère généralement laisser une marge d'appréciation au juge. On ignore, en revanche, si la nullité de la prise de participation pourrait être couverte par une délibération postérieure des assemblées délibérantes concernées, et quels seraient les titulaires et le délai de prescription de l'action en nullité.

Le régime des nullités en droit des sociétés

Dans un souci de sécurité juridique et de protection des intérêts légitimes en cause, la loi détermine restrictivement les causes de nullité en droit des sociétés, ainsi que les conditions d'exercice de l'action en nullité et les effets de l'annulation . Le régime général des nullités des sociétés et des actes et délibérations de leurs organes est défini aux articles 1844-10 et suivants du code civil ; celui applicable aux sociétés commerciales est défini aux articles L. 235-1 et suivants du code de commerce.

En principe, la nullité est obligatoire pour le juge , qui doit la prononcer lorsque les conditions en sont remplies. Dans le dessein de limiter la sanction aux cas indispensables, le législateur a néanmoins prévu des cas de nullité facultative . En outre, le juge fait parfois application de la règle « pas de nullité sans grief » 270 ( * ) .

1° En ce qui concerne la constitution de la société , sa nullité ne peut résulter que :

- du défaut de l'une des conditions de validité des contrats en général (capacité, consentement, contenu licite et certain) ;

- de la violation des dispositions du code civil relatives à la formation du contrat de société (nombre d'associés, apports, objet consistant en la recherche et la répartition de bénéfices, affectio societatis ) ;

- de certaines causes de nullité expresses des sociétés commerciales par la forme, prévues au livre II du code de commerce (principalement, le non-accomplissement des formalités de publicité requises lors de la constitution d'une société en nom collectif ou en commandite simple).

Toute personne intéressée peut agir en nullité , mais l'action en nullité se prescrit par trois ans .

Il existe, en outre, des possibilités de régularisation, soit préalablement à tout litige, soit en cours d'instance : la loi prévoit à la fois que l'action en nullité est éteinte lorsque la cause de nullité a cessé d'exister le jour où le tribunal statue sur le fond en première instance, et que le tribunal ne peut prononcer la nullité moins de deux mois avant l'introduction de l'instance ; en outre, le tribunal peut, même d'office, fixer un délai permettant de couvrir les nullités.

Par dérogation au droit commun, la nullité du contrat de société n'a pas d'effet rétroactif mais produit les effets d'une dissolution prononcée en justice.

2° En ce qui concerne les actes et délibérations des organes des sociétés , leur nullité ne peut résulter que :

- du défaut de l'une des conditions de validité des contrats en général ;

- de la violation de dispositions impératives du titre IX du livre II du code civil (relatif au contrat de société) ou du livre II du code de commerce (relatif aux sociétés commerciales). S'agissant des sociétés commerciales, et contrairement aux règles applicables à la constitution de la société, il n'est pas besoin que la sanction de nullité soit expressément prévue par lesdites dispositions.

Les titulaires de l'action en nullité , le délai de prescription et les possibilités de régularisation sont les mêmes que pour la constitution de la société.

En revanche, aucune disposition légale ne limite ici la rétroactivité de la nullité, si bien qu'elle peut conduire à l'anéantissement de tous les actes subséquents . Par exemple, la nullité d'une réunion du conseil d'administration au cours de laquelle avait été décidée la convocation d'une assemblée générale, pour violation du droit à l'information des administrateurs, entraîne celle de l'assemblée générale elle-même et de toutes les résolutions qui y ont été adoptées 271 ( * ) . De même, dans son arrêt Cointreau du 24 avril 1990, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que l'annulation de la désignation par l'assemblée générale de deux administrateurs devait entraîner l'annulation de toutes les décisions prises par le conseil d'administration nouvellement composé 272 ( * ) .

Ce régime restrictif, qui concerne les actes « internes » d'une société, n'est pas applicable aux actes accomplis en son nom par ses dirigeants , notamment aux contrats conclus avec des tiers. Toutefois, lorsque la loi ou les statuts prévoient que de tels actes sont soumis à une procédure interne, par exemple qu'ils ne peuvent être accomplis qu'avec l'accord ou l'autorisation du conseil d'administration ou de l'assemblée générale, les choses sont plus incertaines . Tantôt, la loi règle expressément le problème : ainsi, les conventions réglementées non approuvées par le conseil d'administration ou de surveillance « peuvent être annulées si elles ont eu des conséquences dommageables pour la société », quoiqu'elles continuent à produire leurs effets à l'égard des tiers, sauf cas de fraude 273 ( * ) . Tantôt, la loi est silencieuse et la jurisprudence hésitante : ainsi, alors que la loi impose au président d'une société anonyme d'obtenir l'autorisation du conseil d'administration ou de surveillance avant de donner des cautionnements, avals et garanties au nom de la société, le non-respect de cette obligation a été sanctionné, soit (le plus souvent) par une inopposabilité, soit (quelquefois) par une nullité 274 ( * ) .

3° Par exception, les actes modifiant les statuts des sociétés commerciales ne peuvent, comme la société elle-même, être annulés que si une disposition du livre II du code de commerce le prévoit expressément, ou si les conditions de validité des contrats en général ne sont pas remplies.

2.3. La position de la commission des lois : renforcer le contrôle des assemblées délibérantes sans gripper le fonctionnement des entreprises publiques locales

Soucieuse, néanmoins, de prémunir les collectivités territoriales et leurs groupements contre les risques liés à une filialisation incontrôlée des entreprises publiques locales ou aux simples participations financières prises par celles-ci, la commission des lois a recherché un terrain de compromis avec le Gouvernement .

Par l'adoption de l' amendement COM-1040 des rapporteurs , la commission a accepté de maintenir, malgré sa lourdeur, l'obligation de recueillir l'accord préalable des assemblées délibérantes des collectivités et groupements actionnaires disposant d'au moins un siège au conseil d'administration avant toute prise de participation, par une SEM ou une SPL, au capital d'une société commerciale, tout en la limitant aux prises de participation conduisant à la détention de plus 10 % du capital , conformément à la définition de la notion de participation en droit commercial. La commission a également accepté d'étendre cette exigence d'accord préalable à la constitution d'un groupement d'intérêt économique .

En revanche, il est apparu à la commission que la nécessité de recueillir l'accord préalable des collectivités et groupements disposant d'une part trop faible au capital pour être représentés au conseil d'administration présentait plus d'inconvénients que d'avantages .

S'agissant des prises de participation dans le capital de sociétés civiles , l'accord préalable des collectivités et groupements actionnaires de la SEM ou de la SPL détenant plus de 30 % du capital serait requis, ici encore à la condition que la participation excède 10 % du capital.

S'agissant des participations indirectes , la commission des lois a prévu de subordonner à l'accord préalable des collectivités et groupements actionnaires d'une SEM ou d'une SPL et représentées au conseil d'administration (à la condition, s'il s'agit d'une prise de participation au capital d'une société civile, qu'ils détiennent plus de 30 % du capital) toute participation prise, dans le capital d'une autre société, par une société contrôlée par la SEM ou la SPL, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce . Il en irait de même de la constitution, par une société contrôlée, d'un groupement d'intérêt économique.

La commission a pris en compte le cas des sociétés dualistes , en exigeant dans leur cas l'accord du conseil de surveillance au lieu du conseil d'administration.

Enfin, la commission a supprimé la sanction de nullité en cas de méconnaissance de l'obligation d'obtenir l'accord préalable des collectivités et groupements concernés, étant entendu que celle-ci pourra toujours engager la responsabilité civile des dirigeants.

La commission a adopté l'article 70 ainsi modifié .

Article 71
Désignation d'un commissaire aux comptes
par les entreprises publiques locales et obligations de celui-ci

L'article 71 du projet de loi vise, d'une part, à étendre aux sociétés contrôlées par les SEM et SPL et, éventuellement, aux autres filiales et sociétés au sein desquelles elles détiennent des participations l'obligation de désigner un commissaire aux comptes. D'autre part, il tend à assigner au commissaire aux comptes diverses obligations d'information des collectivités territoriales et groupements actionnaires.

La commission des lois a adopté cet article moyennant quelques modifications, visant notamment à maintenir la durée de droit commun de six ans du mandat du commissaire aux comptes.

1. Le rôle du commissaire aux comptes dans les entreprises publiques locales

Par dérogation à l'article L. 225-218 du code de commerce, qui réserve aux plus grandes sociétés commerciales l'obligation de désigner au moins un commissaire aux comptes 275 ( * ) , l'article L. 1524-8 du code général des collectivités territoriales en fait obligation à toutes les sociétés d'économie mixte locales , disposition également applicable, par renvoi, aux sociétés publiques locales .

Le commissaire aux comptes exerce, dans ces sociétés, la mission de contrôle légal définie aux articles L. 823-9 et suivants du code de commerce : il est chargé de certifier que les comptes annuels sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé, de la situation financière et du patrimoine de la société contrôlée, et il établit à cet effet un rapport à l'assemblée générale des actionnaires. Il signale à celle-ci, ainsi qu'au conseil d'administration ou de surveillance, les irrégularités et inexactitudes concernées. Le commissaire aux comptes est également tenu de révéler au procureur de la République les faits délictueux dont il a eu connaissance, et il est soumis à des obligations de vigilance et des obligations déclaratives aux fins de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, en application du chapitre I er du titre VI du livre V du code monétaire et financier.

Par ailleurs, lorsque le commissaire aux comptes relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation, il met en oeuvre la procédure d'alerte prévue à l'article L. 234-1 du code de commerce.

La procédure d'alerte par le commissaire aux comptes

Lorsque le commissaire aux comptes relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation, la loi lui impose de mettre en oeuvre une procédure d'alerte qui comporte plusieurs étapes , destinées à préserver autant et aussi longtemps que possible la confidentialité de la situation de l'entreprise.

1° Le commissaire aux comptes informe d'abord le président du conseil d'administration ou du directoire , par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

2° À défaut de réponse sous quinze jours ou si celle-ci ne permet pas d'être assuré de la continuité de l'exploitation, il invite, par un écrit dont copie est transmise au président du tribunal de commerce, le président du conseil d'administration ou le directoire à faire délibérer le conseil d'administration ou le conseil de surveillance sur les faits relevés. Le commissaire aux comptes est convoqué à cette séance. La délibération du conseil d'administration ou du conseil de surveillance est communiquée au président du tribunal de commerce et au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel. Le commissaire aux comptes peut demander à être entendu par le président du tribunal.

3° Lorsque le conseil d'administration ou le conseil de surveillance n'a pas été réuni pour délibérer sur les faits relevés ou lorsque le commissaire aux comptes n'a pas été convoqué à cette séance, ou si celui-ci constate qu'en dépit des décisions prises, la continuité de l'exploitation demeure compromise, une assemblée générale est convoquée. (Plus précisément, le commissaire aux comptes invite le conseil d'administration ou du directoire à faire délibérer l'assemblée générale et, en cas de carence, la convoque lui-même.) Le commissaire aux comptes établit un rapport spécial qui est présenté à cette assemblée. Ce rapport est communiqué au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.

4° Si, à l'issue de la réunion de l'assemblée générale, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d'assurer la continuité de l'exploitation, il informe de ses démarches le président du tribunal de commerce et lui en communique les résultats. Il peut demander à être entendu par celui-ci.

Dans un délai de six mois à compter du déclenchement de la procédure d'alerte, le commissaire aux comptes peut en reprendre le cours au point où il avait estimé pouvoir y mettre un terme lorsque, en dépit des éléments ayant motivé son appréciation, la continuité de l'exploitation demeure compromise et que l'urgence commande l'adoption de mesures immédiates.

Le contrôle exercé par le commissaire aux comptes concourt ainsi à la protection des associés ou actionnaires, des investisseurs et de l'ordre public économique .

En revanche, le commissaire aux comptes d'une entreprise publique locale n'est tenu d'aucune obligation d'information à l'égard du préfet ou de la chambre régionale des comptes , ce que la Cour des comptes regrettait dans son référé du 15 juin 2017 précité.

2. Le projet de loi

2.1. La désignation d'un commissaire aux comptes par les sociétés contrôlées par les entreprises publiques locales ou dans le capital desquelles elles détiennent des participations

Le projet de loi prévoit d' étendre l'obligation de désigner un commissaire aux comptes aux sociétés contrôlées par les SEM et SPL , au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.

Groupes de sociétés : définitions

En droit commercial, on dit qu'une société est la filiale d'une autre lorsque cette dernière détient plus de la moitié de son capital (article L. 233-1 du code de commerce).

Une société qui détient dans une autre société une fraction de capital comprise entre 10 % et 50 % est considérée comme ayant une participation dans la seconde (article L. 233-2 du même code).

Une personne physique ou morale est considérée comme en contrôlant une autre :

- lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales ;

- lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote en vertu d'un accord avec d'autres associés ou actionnaires ;

- lorsqu'elle détermine en fait les décisions dans les assemblées générales de cette société ;

- ou lorsqu'elle est associée ou actionnaire et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance (article L. 233-3 dudit code).

Quant aux sociétés dans lesquelles les SEM et SPL détiennent des participations directes ou indirectes, sans pour autant les contrôler , les collectivités et groupements pourraient conditionner leur accord préalable à cette prise de participation 276 ( * ) à la désignation d'un commissaire aux comptes.

Un même commissaire aux comptes pourrait être désigné au sein de la SEM ou de la SPL et de la société contrôlée ou au sein de laquelle elle détient une participation 277 ( * ) .

Qu'il soit désigné au sein d'une entreprise publique locale ou d'une société contrôlée par une telle entreprise ou au capital de laquelle elle détient une participation, le commissaire aux comptes le serait pour un mandat de trois exercices , au lieu de six selon le droit commun. Il s'agirait, selon l'étude d'impact, d'imposer « un renouvellement régulier des CAC plus propice à la transparence ».

2.2. De nouvelles obligations d'information

Par ailleurs, le commissaire aux comptes ainsi nommé se verrait assigner de nouvelles obligations d'information à l'égard des collectivités territoriales et groupements actionnaires, de la chambre régionale des comptes et du représentant de l'État dans leur département 278 ( * ) , puisqu'il devrait :

- leur signaler les irrégularités et inexactitudes relevées au cours de sa mission de contrôle des comptes ;

- les associer à la procédure d'alerte dans le cas où il relèverait des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. Plus précisément, le commissaire aux comptes devrait transmettre aux personnes susmentionnées l'écrit par lequel il invite le président du conseil d'administration ou du directoire à faire délibérer le conseil d'administration ou de surveillance sur les faits relevés. Dans la suite de la procédure, si, après la réunion de l'assemblée générale, le commissaire aux comptes considère que les décisions prises ne permettent pas d'assurer la continuité de l'exploitation, il informerait de ses démarches ces mêmes personnes en même temps que le président du tribunal.

3. L'approbation sous réserves de la commission des lois

Souscrivant à l'objectif poursuivi, la commission des lois a approuvé les dispositions proposées , sous réserve des modifications qu'elle a apportées à l'article 70 du projet de loi , en ce qui concerne la procédure d'accord préalable des collectivités territoriales et groupements actionnaires à toute participation d'une SEM ou d'une SPL au capital d'une autre société. Dès lors :

1° la désignation d'un commissaire aux comptes par les sociétés contrôlées par une SEM ou une SPL serait obligatoire, comme le propose le Gouvernement ;

2° s'agissant, en revanche, des sociétés dans lesquelles les SEM et SPL détiennent des participations directes, sans les contrôler, la désignation d'un commissaire aux comptes ne pourrait être exigée que par les collectivités et groupements disposant d'un siège au conseil d'administration ou de surveillance de la SEM ou de la SPL ;

3° s'agissant des autres sociétés, les collectivités et groupements actionnaires disposant d'un siège au conseil d'administration ou de surveillance d'une SEM ou SPL ne pourraient exiger la nomination en leur sein d'un commissaire aux comptes que si une société contrôlée par cette SEM ou SPL détenait une participation directe à leur capital ;

4° dans les deux hypothèses précédentes, s'il s'agissait plus spécifiquement de la désignation d'un commissaire aux comptes dans une société civile, ce pouvoir serait réservé aux collectivités et groupements détenant plus de 30 % au capital de la SEM ou de la SPL ;

5° une participation directe dans le capital d'une société serait entendue comme la détention d'au moins 10 % de celui-ci.

Toutefois, la commission a rétabli la durée de droit commun du mandat du commissaire aux comptes , soit six ans ( amendement COM-1060 des rapporteurs). Outre que son raccourcissement ne repose sur aucune justification évidente, il aurait pour effet, compte tenu de la rédaction de l'article L. 823-12-1 du code de commerce, de réduire les diligences imposées au commissaire aux comptes en les alignant sur celles prévues pour l'audit légal facultatif des petites entreprises (ALPE).

La commission des lois a adopté un amendement de coordination COM-1041 des rapporteurs.

La commission a adopté l'article 71 ainsi modifié .

Article 72
Contrôle de l'Agence française anticorruption
sur les entreprises publiques locales

L'article 72 vise à soumettre au contrôle de l'Agence française anticorruption les entreprises publiques locales autres que les sociétés d'économie mixte, qui y sont déjà assujetties.

La commission des lois l'a adopté sans modification.

1. Les missions de l'Agence française anticorruption

Créée par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique , dite « Sapin 2 », l'Agence française anticorruption est un service à compétence nationale, placé auprès du ministre de la justice et du ministre chargé du budget, investi par la loi de plusieurs missions 279 ( * ) :

1° une mission de coordination administrative, de centralisation et de diffusion des informations permettant d'aider à prévenir et à détecter les faits constitutifs de manquements à la probité au sens du code pénal (corruption, trafic d'influence, concussion, prise illégale d'intérêt, détournement de fonds publics, favoritisme) ;

2° une mission de conseil aux personnes morales de droit public et de droit privé , à l'intention desquelles elle élabore des recommandations ;

3° une mission de contrôle des entités appartenant à la sphère publique (voir ci-après) ;

4° une mission de contrôle et de sanction du respect de l'obligation faite aux plus grandes sociétés de mettre en place des mesures internes de prévention et de détection des faits de corruption . En cas de manquement, la commission des sanctions de l'Agence peut enjoindre à la société concernée de prendre les mesures nécessaires, voire prononcer des sanctions pécuniaires ;

5° une mission de contrôle de l'exécution de la peine de mise en conformité qui peut être prononcée par le juge pénal à l'encontre des personnes condamnées pour corruption ou trafic d'influence 280 ( * ) .

Par ailleurs, l'Agence est tenue d'aviser le procureur de la République des faits dont elle a eu connaissance dans l'exercice de ses missions et qui sont susceptibles de constituer un crime ou un délit.

Elle élabore un rapport d'activité rendu public.

S'agissant plus particulièrement de sa mission de contrôle des entités appartenant à la sphère publique (3°), l'Agence contrôle, de sa propre initiative, la qualité et l'efficacité des procédures mises en oeuvre au sein des administrations de l'État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et sociétés d'économie mixte, ainsi que des associations et fondations reconnues d'utilité publique, pour prévenir et détecter les atteintes à la probité .

Ces contrôles peuvent également être effectués à la demande du président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), du Premier ministre, des ministres ou, pour les collectivités territoriales et leurs établissements publics et sociétés d'économie mixte, du représentant de l'État. Ils peuvent faire suite à un signalement transmis à l'agence par une association agréée.

Ces contrôles donnent lieu à l'établissement de rapports transmis aux autorités qui en sont à l'initiative ainsi qu'aux représentants de l'entité contrôlée. Ils contiennent les observations de l'agence concernant la qualité du dispositif de prévention et de détection de la corruption mis en place ainsi que des recommandations.

Dans le cadre de ce contrôle, les agents habilités de l'Agence française anticorruption peuvent se faire communiquer tout document professionnel ou toute information, et procéder sur place à toute vérification de l'exactitude des informations fournies ( contrôle sur pièces et sur place ). Ils peuvent s'entretenir, dans des conditions assurant la confidentialité de leurs échanges, avec toute personne dont le concours leur paraît nécessaire. Toute mesure destinée à faire échec à l'exercice de leurs fonctions par ces agents est punie de 30 000 euros d'amende.

2. L'extension de la mission de contrôle de l'Agence à toutes les entreprises publiques locales

L'article 72 du projet de loi, corrigeant ce qui était vraisemblablement un oubli du législateur, vise à étendre la compétence de l'Agence française anticorruption à toutes les sociétés relevant du titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales , et non plus seulement aux SEM, pour l'exercice de sa mission de contrôle décrite précédemment.

La commission a adopté l'article 71 sans modification .

Article 73
Sanction du défaut de communication des délibérations
des organes des entreprises locales au représentant de l'État

L'article 73 du projet de loi prévoit de renforcer les sanctions applicables en cas de manquement à l'obligation légale de communiquer au représentant de l'État dans le département où se trouve le siège social d'une entreprise publique locale (SEM, SPL ou l'une de leurs variétés), dans le délai de quinze jours suivant leur adoption, les délibérations du conseil d'administration ou de surveillance et des assemblées générales.

Plutôt que de sanctionner le défaut de communication par la nullité desdites délibérations, comme le proposait le Gouvernement, la commission des lois a préféré instituer une procédure d'injonction de faire à la demande du préfet.

Si les actes pris par les SEM et SPL dans l'exercice de prérogatives de puissance publique qui leur sont éventuellement déléguées sont soumis au contrôle de légalité dans les conditions de droit commun 281 ( * ) , les délibérations de leur conseil d'administration ou de surveillance et de leurs assemblées générales doivent seulement être communiquées au représentant de l'État 282 ( * ) afin que celui-ci puisse assumer son rôle de contrôle de la gestion de ces sociétés. En effet, si le préfet estime qu'une délibération est de nature à augmenter gravement la charge financière d'une ou plusieurs collectivités ou de leurs groupements actionnaires, ou le risque lié aux garanties apportées, il saisit, dans le délai d'un mois, la chambre régionale des comptes, ce qui entraîne une seconde lecture de cette délibération par l'organe concerné. La chambre régionale des comptes dispose d'un délai d'un mois pour faire connaître son avis.

Il convient de noter que la chambre régionale des comptes peut exercer son contrôle de sa propre initiative , sur le fondement de l'article L. 211-8 du code des juridictions financières, et qu'elle dispose à cet effet de pouvoirs d'investigation très étendus.

La loi ne prévoit aucune sanction spécifique en cas de méconnaissance, par une entreprise locale, de son obligation de communiquer les délibérations concernées au représentant de l'État. Le défaut de communication est toutefois susceptible d'engager la responsabilité civile des dirigeants de la société dans le cas où il en résulte un dommage.

Dans son rapport précité de mai 2019 sur les sociétés d'économie mixte locales, la Cour des comptes mentionne le cas d'une SEM des Pays-de-la-Loire, chargée de la gestion de ports de plaisance, qui, selon les constatations de la chambre régionale des comptes, ne transmettait pas au préfet les délibérations de son conseil d'administration ni de ses assemblées générales, sans que celui-ci l'ait d'ailleurs jamais relevé. Le cas semble isolé. Néanmoins, pour rendre effectif le droit d'information du préfet , la Cour appelait à sanctionner le défaut de communication par l'absence de caractère exécutoire des délibérations.

Cette sanction de droit public n'ayant guère de sens en ce qui concerne les actes d'une personne de droit privé 283 ( * ) , le Gouvernement a fait le choix d'une sanction de nullité .

Pour les raisons déjà exposées, la commission des lois a estimé qu'une telle sanction était porteuse d' une insécurité juridique très excessive, au préjudice des associés de la société et de ses cocontractants .

Sur proposition des rapporteurs, elle a adopté un amendement COM-1042 visant à lui substituer une procédure d'injonction de faire , permettant au représentant de l'État de saisir le président du tribunal compétent 284 ( * ) , statuant en référé, d'enjoindre sous astreinte aux dirigeants de la société de lui communiquer les délibérations soumises à l'obligation de communication ou de désigner un mandataire chargé de procéder à cette communication.

La commission a adopté l'article 73 ainsi modifié .

Article 73 bis (nouveau)
Statut des élus locaux siégeant au sein des organes
des filiales d'entreprises publiques locales

Introduit par la commission des lois à l'initiative des rapporteurs, l'article 73 bis a pour objet de fixer le statut des élus locaux qui, représentant une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités au conseil d'administration ou de surveillance d'une entreprise publique locale, siègent également au sein des organes d'une de ses filiales.

En l'état du droit, les sociétés d'économie mixte ou, le cas échéant, les sociétés publiques locales 285 ( * ) sont représentées à l'assemblée des associés ou actionnaires de leurs filiales par leur représentant légal , à savoir le directeur général ou l'un de ses délégués ou, dans le cas des sociétés dualistes, le président du directoire ou le directeur général unique. Même lorsqu'il s'agit d'un élu local, il n'agit pas à ce titre au sein de l'assemblée.

Quant aux dirigeants de la filiale, ils sont désignés selon les modalités de droit commun prévues par la loi ou les statuts, en fonction de la catégorie à laquelle appartient la société concernée . S'il s'agit par exemple d'une société anonyme de type moniste, les membres du conseil d'administration sont désignés par l'assemblée générale des actionnaires. Même s'ils exercent par ailleurs les fonctions d'élu local, les mandataires sociaux ainsi désignés sont soumis aux règles de droit commun des sociétés anonymes, et non pas au statut propre aux représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements au conseil d'administration ou de surveillance de la SEM mère.

Cette situation n'est pas satisfaisante, car elle prive les élus et les collectivités elles-mêmes des garanties spécifiques prévues par ce statut .

Introduit par la commission des lois à l'initiative des rapporteurs, par l'adoption d'un amendement COM-1043 , l'article 73 bis prévoit donc que, sauf clause contraire de leurs statuts, les SEM 286 ( * ) soient représentées à l'assemblée des associés ou actionnaires de leurs filiales par l'un des élus locaux qui siègent au sein de leur conseil d'administration ou de surveillance . Cette disposition déroge fortement au droit commun des sociétés anonymes, même s'il arrive déjà, en pratique, qu'un élu exerce les fonctions de président-directeur général d'une SEM (comme la loi l'autorise) et représente donc celle-ci légalement. Le caractère supplétif de volonté de la nouvelle règle permet de conserver la souplesse nécessaire.

Par ailleurs, si cette filiale est une société anonyme, et sauf clause contraire de ses statuts, son conseil d'administration ou de surveillance devrait comprendre des élus locaux représentant leur collectivité ou leur groupement au sein du conseil d'administration ou de surveillance de la SEM mère , choisis par celui-ci.

Ces mêmes élus bénéficieraient alors du régime protecteur qui leur est applicable en tant que mandataires d'une collectivité ou d'un groupement au sein du conseil d'administration ou de surveillance de la société mère :

- ils devraient respecter les limites d'âge statutaires ou légales au moment de leur désignation, mais ne pourraient être déclarés démissionnaire d'office en cas de dépassement en cours de mandat ;

- la responsabilité civile résultant de leur mandat incomberait à la collectivité territoriale ou au groupement dont ils sont les élus ;

- pour l'application des règles d'inéligibilité prévues par le code électoral, ils ne seraient pas considérés comme entrepreneurs des services municipaux, départementaux ou régionaux, y compris s'ils exerçaient au sein de la filiale les fonctions de président du conseil d'administration ou de surveillance ou de président-directeur général ;

- pour l'application des règles de validité des délibérations de la collectivité ou du groupement , ces élus, de même que ceux qui seraient désignés pour représenter la SEM à l'assemblée des associés ou actionnaires de la filiale, ne seraient pas considérés comme étant intéressés à l'affaire lorsqu'ils participent à une délibération portant sur les relations de la collectivité ou du groupement avec la filiale concernée ; pour l'application de l'article 2 de loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique et de l'article 432-12 du code pénal, ils ne seraient pas non plus considérés comme étant en conflit d'intérêts ou en situation de prise illégale d'intérêts 287 ( * ) ;

- toutefois, ils ne pourraient pas participer aux commissions d'appel d'offres ou aux commissions d'attribution de délégations de service public de la collectivité territoriale ou du groupement lorsque la filiale est candidate à l'attribution d'un marché public ou d'une délégation de service public.

L'article 73 bis encadre également les conditions dans lesquelles ces élus peuvent percevoir une rémunération au titre de leurs fonctions au sein de la filiale :

- une telle rémunération serait soumise à l'autorisation préalable de leur assemblée délibérante, eux-mêmes ne pouvant pas participer à la délibération ;

- elle serait soumise aux règles d'écrêtement de droit commun.

La commission a adopté l'article 73 bis ainsi rédigé .

Article 73 ter (nouveau)
Conditions d'application des règles relatives aux conflits d'intérêts
aux élus locaux qui représentent une collectivité territoriale
ou un groupement au sein d'organismes extérieurs

Introduit par la commission des lois à l'initiative des rapporteurs, l'article 73 ter a pour objet de clarifier les conditions d'application aux élus locaux qui représentent une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales au sein des organes d'une entreprise publique locale, d'un établissement public local ou de certaines catégories d'associations ou de groupements d'intérêt public prévues par la loi, des règles relatives aux conflits d'intérêts et au délit de prise illégale d'intérêt.

Dans son Guide déontologique publié en février 2021, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) recommande aux élus locaux de se déporter dans le cas où, en tant que membres d'une assemblée délibérante ou en tant qu'exécutif, ils auraient à prendre ou à participer à la prise d'une décision relative aux sociétés d'économie mixte (SEM) et aux sociétés publiques (SPL) au sein desquelles ils représentent leur collectivité . La Haute Autorité considère en effet qu'une telle situation est constitutive d'un conflit d'intérêts , au sens de l'article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique , et d'une prise illégale d'intérêt au sens de l'article 432-12 du code pénal 288 ( * ) .

Conflits d'intérêts et prise illégale d'intérêt

I de l'article 2 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique

« Au sens de la présente loi, constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction. »

Article 432-12 du code pénal

« Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction. »

Cette interprétation, qui a suscité beaucoup d'émoi dans le monde local, paraît très éloignée de l'esprit de la loi .

Il faut rappeler, en effet, que les élus locaux qui siègent au conseil d'administration ou de surveillance des SEM et SPL sont soumis à un statut très dérogatoire au droit commun des sociétés commerciales . Ils ne sont pas désignés par l'assemblée générale des actionnaires, mais par l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités dont ils sont élus. La loi les désigne, non pas comme des mandataires sociaux, mais comme les mandataires de ces collectivités et groupements . Ils ne sont pas dépositaires des intérêts de la société, mais de ceux de la collectivité ou du groupement qu'ils représentent.

Pour l'application des règles de validité des délibérations, la loi prévoit d'ores et déjà que ces élus, lorsqu'ils participent aux délibérations de leur assemblée délibérante relatives aux relations de la collectivité ou du groupement avec la société, ne sont pas considérés comme étant personnellement « intéressés à l'affaire » 289 ( * ) .

Pour ce qui est de leur responsabilité pénale, le fait même que la loi prévoie que les collectivités territoriales et leurs groupements soient représentés au conseil d'administration d'une SEM ou d'une SPL, sans interdire à leurs représentants de prendre part à de telles délibérations, doit être interprété comme une autorisation de la loi au sens de l'article 122-4 du code pénal .

En outre, le raisonnement tenu par la Haute Autorité pourrait aussi bien s'appliquer aux élus qui représentent leur collectivité au sein d'un établissement public (par exemple de coopération intercommunale). Le distinguo opéré par le Guide déontologique , à ce propos, entre les personnes publiques et privées au sein desquelles les collectivités territoriales peuvent être représentées ne convainc pas, et il ne lierait d'ailleurs pas le juge pénal.

Reconnaissant elle-même qu'une telle interprétation du droit en vigueur aurait des conséquences non seulement excessives, mais injustes, la Haute Autorité, dans son rapport d'activité pour 2020 , rendu le 2 juin 2021, recommande :

- d'une part, de modifier l'article 432-12 du code pénal , afin de définir la prise illégale d'intérêt non plus comme « le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement », mais comme le fait d'y prendre un intérêt « de nature à compromettre l'impartialité, l'indépendance ou l'objectivité » de la personne concernée » , conformément à la recommandation formulée en 2011 par la commission de réflexion pour la prévention des conflits d'intérêts, présidée par M. Jean-Marc Sauvé ;

- d'autre part, de déroger expressément à l'article 432-12 du code pénal, afin qu'un élu siégeant, en tant que représentant de sa collectivité, au sein des organes dirigeants d'un établissement public et commercial, d'une SEM ou d'une SPL puisse participer aux décisions de sa collectivité portant sur cet organisme , « à l'exception des décisions lui procurant un avantage personnel, direct ou indirect, des décisions visant l'attribution de subventions et des décisions relatives aux marchés publics et aux délégations de service public » 290 ( * ) .

En attendant qu'une discussion fructueuse puisse s'engager entre les deux assemblées et le Gouvernement sur une redéfinition du délit de prise illégale d'intérêts, comme le Sénat le propose depuis plusieurs années, les rapporteurs ont estimé urgent d'apporter aux élus locaux la sécurité juridique indispensable à l'exercice serein de leur mandat.

Inséré à leur initiative par la commission des lois, par l'adoption d'un amendement COM-1065 , l'article 73 ter prévoit d'abord d'insérer, dans le code général des collectivités territoriales, un nouvel article L. 1111-7-1 de portée générale selon lequel, lorsque la loi prévoit qu'une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales est représenté par un ou plusieurs membres de son assemblée délibérante au sein des organes d'une personne morale de droit public ou de droit privé ou d'une entité dépourvue de la personnalité morale, ses représentants ne sont pas considérés comme étant intéressés à l'affaire, au sens des dispositions relatives à la légalité des délibérations, au délit de prise illégale d'intérêts et aux conflits d'intérêts, lorsque la collectivité ou le groupement délibère sur ses relations avec la personne morale ou l'entité concernée . Cette disposition ne fait qu' expliciter l'irresponsabilité pénale qui découle, dans un tel cas, de l'autorisation législative .

Dans un souci pédagogique, et sans que cela doive prêter à une interprétation a contrario , la commission a choisi de maintenir les dispositions spéciales, éparses dans la législation, selon lesquelles les élus locaux qui représentent une collectivité ou un groupement au sein d'entreprises publiques locales de diverses espèces ne sont pas considérés comme intéressés à l'affaire lorsqu'ils participent aux délibérations de leur assemblée délibérante touchant à ces entreprises publiques, tout en précisant que la notion d'intérêt doit s'entendre également au sens des dispositions du code pénal relatives à la prise illégale d'intérêt.

En outre, il est prévu d'ériger au rang législatif le principe - qui découle de l'article R. 2221-6 du même code - selon lequel les collectivités territoriales, les établissements publics locaux, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats sont représentés au conseil d'administration ou d'exploitation des régies qu'ils créent pour exploiter des services publics. Ces représentants ne seraient pas considérés comme intéressés à l'affaire lorsque la collectivité ou le groupement délibère sur ses relations avec la régie.

Enfin, l'article 73 ter traite du cas des maisons de l'emploi (qui concourent au service public de l'emploi) et des missions locales (consacrées à l'insertion professionnelle des jeunes), étant entendu que ces structures sont obligatoirement constituées sous forme d'associations ou de groupements d'intérêt public. Les élus locaux qui siègent au conseil d'administration en tant que représentants de leur collectivité ou de leur groupement bénéficieraient du régime protecteur institué à l'article L. 1111-7-1 du code précité.

La commission a adopté l'article 73 ter ainsi rédigé .

Article 73 quater (nouveau)
Habilitation des sociétés publiques locales
à exercer des activités accessoires

Introduit par la commission des lois, par l'adoption d'un amendement COM-314 de Patrick Chaize, sous-amendé par les rapporteurs, l'article 73 quater a pour objet d' autoriser les sociétés publiques locales à exercer des activités accessoires, en plus de celles qu'elles exercent pour le compte de leurs actionnaires .

Les SPL ont aujourd'hui l'obligation légale d'exercer l'intégralité de leurs activités pour le compte des collectivités et groupements qui en sont actionnaires. Il suffirait pourtant, pour que ces derniers - qui, par ailleurs, exercent conjointement sur ces sociétés un contrôle analogue à celui qu'ils exercent sur leurs propres services - puissent continuer à conclure avec elles des marchés publics ou des contrats de concession sans publicité ni mise en concurrence préalable, en bénéficiant de l'exception de quasi-régie prévue par le droit européen et le droit national, que les SPL réalisent plus de 80 % de leur activité « dans le cadre des tâches qui lui sont confiées par les pouvoirs adjudicateurs qui la contrôlent ou par d'autres personnes morales contrôlées par les mêmes pouvoirs adjudicateurs 291 ( * ) ».

Comme le notait M e Gilles Le Chatelier dans un article récent, ouvrir aux SPL la faculté d'exercer des activités accessoires au profit d'entités publiques ou privées tierces permettrait, d'une part, à d'autres personnes publiques de bénéficier de leur expertise technique, d'autre part, d' « accroître la rentabilité de ces sociétés en leur permettant de valoriser leur savoir-faire sur le marché concurrentiel 292 ( * ) » .

Tel est l'objet de l'article 73 quater , aux termes duquel les SPL auraient désormais l'obligation d'exercer, non plus la totalité, mais plus de 80 % de leurs activités pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres, ce pourcentage d'activités étant déterminé selon les mêmes modalités que pour l'appréciation des conditions de l'exception de quasi-régie en matière de contrats de concession.

La commission a adopté l'article 73 quater ainsi rédigé .

Article 73 quinquies (nouveau)
Suivi des observations des chambres régionales des comptes
sur la gestion des entreprises publiques locales

Introduit par la commission des lois, par l'adoption de deux amendements identiques COM-12 rectifié et COM-261 rectifié, présentés respectivement par Antoine Lefèvre et Hervé Marseille, l'article 73 quinquies a pour objet de renforcer le suivi des observations des chambres régionales des comptes sur la gestion des entreprises publiques locales .

En application de l'article L. 211-8 du code des juridictions financières, les chambres régionales des comptes ont compétence pour contrôler « les organismes, quel que soit leur statut juridique, auxquels les collectivités territoriales les établissements publics locaux ou les autres organismes relevant de sa compétence apportent un concours financier supérieur à 1 500 euros ou dans lesquels ils détiennent, séparément ou ensemble, plus de la moitié du capital ou des voix dans les organes délibérants, ou sur lesquels ils exercent un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion », ce qui recouvre en particulier les entreprises publiques locales de toutes catégories.

En revanche, contrairement à ce que la loi prévoit pour les collectivités territoriales et leurs groupements, il n'existe aucune procédure imposant que le rapport d'observations définitives de la chambre régionale des comptes fasse l'objet d'un débat au sein des organes de l'entreprise, ni que la mise en oeuvre de ses recommandations fasse l'objet d'un suivi .

Afin de combler cette lacune , l'article 73 quinquies prévoit :

- d'une part, que le rapport d'observations définitives soit communiqué par le représentant légal de l'entreprise aux membres du conseil d'administration ou de surveillance et qu'un débat à son propos soit inscrit à l'ordre du jour de la prochaine réunion ;

- d'autre part, que dans un délai d'un an (ou au plus tard lors de la prochaine assemblée générale suivant l'expiration de ce délai), le conseil d'administration ou le directoire présente à l'assemblée générale des actionnaires un rapport sur les actions entreprises à la suite du rapport d'observations. Ce rapport serait communiqué à la chambre régionale des comptes, ainsi qu'à l'exécutif des collectivités et groupements actionnaires ; il ferait l'objet d'un débat lors de la prochaine réunion de l'assemblée délibérante, le compte rendu de ce débat devant être adressé à la chambre régionale des comptes.

La commission a adopté l'article 73 quinquies ainsi rédigé .

Article 73 sexies (nouveau)
Extension du régime fiscal du mécénat
aux sociétés publiques locales culturelles

Introduit par la commission des lois, par l'adoption de trois amendements identiques COM-14 rectifié , COM-263 rectifié et COM-899 rectifié , sous-amendés par les rapporteurs, l'article 73 sexies a pour objet d' étendre le bénéfice du régime fiscal du mécénat aux versements effectués par les entreprises aux sociétés publiques locales ayant une activité culturelle .

Pour mémoire, ouvrent droit à une réduction d'impôt, au titre du régime fiscal du mécénat, les versements faits par les entreprises à divers organismes d'intérêt général actifs, notamment, dans le domaine de la culture, y compris des sociétés de capitaux dont les actionnaires sont l'État ou un ou plusieurs de ses établissements publics, seuls ou conjointement avec une ou plusieurs collectivités territoriales, à la condition, d'une part, que leur gestion soit désintéressée, d'autre part, qu'elles aient pour activité principale la présentation au public d'oeuvres dramatiques, lyriques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques, audiovisuelles et de cirque ou l'organisation d'expositions d'art contemporain.

L'article 73 sexies prévoit d'abord d'étendre ces dispositions aux sociétés dont les seuls actionnaires sont des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités, à l'exclusion de l'État et de ses établissements publics.

Ensuite, la condition tenant à la nature des activités des sociétés bénéficiaires serait assouplie, puisqu'elle recouvrirait plus largement « toute activité à caractère culturel faisant l'objet d'une délégation de service public ou la gestion d'un musée de France ».

Une disposition similaire a déjà été adoptée par le Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020.

La commission a adopté l'article 73 sexies ainsi rédigé .

Article 73 septies (nouveau)
Dispense de déclaration de situation patrimoniale ou d'intérêts
en cas de cessation de fonctions avant deux mois

Introduit par la commission des lois, par l'adoption d'un amendement COM-986 rectifié , l'article 73 septies prévoit que les personnes qui cessent leurs fonctions avant l'expiration du délai de deux mois qui leur est imparti pour adresser au président de la HATVP une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d'intérêts, sont dispensées de ces obligations.

Cette simplification, que la HATVP appelle de ses voeux, s'appliquerait aussi bien aux personnes mentionnées à l'article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique qu'aux fonctionnaires mentionnés à l'article 25 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires .

La commission a adopté l'article 73 septies ainsi rédigé .

Article 73 octies (nouveau)
Déclaration d'intérêts unique

Introduit par la commission des lois, par l'adoption de trois amendements identiques COM-985 rectifié , COM-304 rectifié et COM-434 rectifié , l'article 73 octies a pour objet de simplifier les obligations déclaratives des personnes - représentants français au Parlement européen, élus locaux, membres de cabinets, membres d'autorités et organismes divers, etc . - mentionnées à l'article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique .

Ces personnes ont l'obligation d'adresser au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d'intérêts dans un délai de deux mois suivant leur prise de fonctions, puis une nouvelle déclaration de situation patrimoniale lors de la cessation de leurs fonctions.

En l'état du droit, lorsque la personne concernée a déjà établi une déclaration de situation patrimoniale depuis moins d'un an, en application du même article 11, de l'article 4 de la même loi (relatif aux membres du Gouvernement) ou de l'article L .O. 135-1 du code électoral (relatif aux députés et sénateurs) :

- la déclaration de situation patrimoniale d'entrée en fonctions n'est pas exigée ;

- la déclaration de situation patrimoniale de fins de fonctions est réduite à une récapitulation de l'ensemble des revenus perçus depuis l'entrée en fonctions et à une présentation des événements majeurs ayant affecté la composition du patrimoine.

En revanche, une même personne peut être astreinte à adresser au président de la HATVP plusieurs déclarations d'intérêts à quelques semaines ou mois d'intervalle, sans que le contenu de ces déclarations diffère : il en va ainsi, par exemple, du maire d'une commune de plus de 20 000 habitants, élu peu après à la présidence de l'EPCI à fiscalité propre auquel la commune appartient.

Afin d' éviter ces lourdeurs parfaitement inutiles , et conformément à une recommandation faite par la HATVP dans son rapport annuel pour 2020, l'article 73 octies prévoit qu'aucune nouvelle déclaration d'intérêts n'est exigée de la personne qui a établi depuis moins de six mois une telle déclaration .

La commission a adopté l'article 73 octies ainsi rédigé .


* 248 Loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 relative aux sociétés d'économie mixte locales . Le régime des SEM est aujourd'hui fixé aux articles L. 1521-1 à L. 1525-3 du code général des collectivités territoriales.

* 249 Loi n° 2014-744 du 1 er juillet 2014 permettant la création de sociétés d'économie mixte à opération unique , codifiée aux articles L. 1541-1 à L. 1541-3 du code général des collectivités territoriales.

* 250 CJUE, 15 octobre 2009, Acoset SpA , C-196/08.

* 251 Loi n° 2010-559 du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales . Le régime des SPL est fondé sur celui des SEM, sous réserve des dispositions de l'article L. 1531-1 du code général des collectivités territoriales.

* 252 Pour mémoire, pour que l'exception de quasi-régie trouve à s'appliquer, le pouvoir adjudicateur doit exercer, seul ou conjointement avec d'autres pouvoirs adjudicateurs, un contrôle analogue à celui qu'ils exercent sur leurs propres services ; le cocontractant doit exercer plus de 80 % de son activité dans le cadre de l'exécution des tâches qui lui sont confiées par le ou les pouvoirs adjudicateurs qui le contrôlent ou par d'autres personnes morales contrôlées par ces mêmes pouvoirs adjudicateurs ; le capital du cocontractant est exclusivement public (sauf participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocages requises par la loi nationale). Voir l'article 12 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE , qui a entériné la jurisprudence antérieure de la CJUE. Ces mêmes critères sont repris en droit national aux articles L. 2511-1 et L. 3211-1 du code de la commande publique.

* 253 Loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement . Le régime des SPLA est aujourd'hui défini aux articles L. 327-1 et L. 327-2 du code de l'urbanisme ; il est désormais aligné en grande partie sur celui des SPL de droit commun.

* 254 Ces sociétés sont régies, respectivement, par l'article L. 32-10-1 et l'article L. 327-3 du code de l'urbanisme.

* 255 Cour des comptes, référé du 15 juin 2017 sur les insuffisances du cadre juridique et comptable applicable aux entreprises publiques locales ( https://www.ccomptes.fr ) ; IGA et CGEF, La maîtrise des risques par les entreprises publiques locales , revue de dépenses, juin 2017 ( https://www.performance-publique.budget.gouv.fr ) ; Cour des comptes, Les sociétés d'économie mixte locales, un outil des collectivités à sécuriser , mai 2019 ( https://www.ccomptes.fr ).

* 256 Articles L. 225-17 et L. 225-69 du code de commerce.

* 257 Les représentants communs des collectivités et groupements réunis en assemblée spéciale adressent leur rapport à celle-ci, qui en assure la communication immédiate aux mêmes fins aux organes délibérants des collectivités et groupements concernés.

* 258 IGA et CGEF, revue de dépenses précitée, p. 50.

* 259 Cour des comptes, référé précité, p. 11.

* 260 En application de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales (aux termes duquel « Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération »), le conseil municipal doit être pleinement informé sur l'activité des SEM dont la commune est actionnaire (TA Paris, 27 novembre 1996, Aubry , n° 9111967-4. Des dispositions similaires s'appliquent aux membres des assemblées délibérantes des autres collectivités territoriales et de leurs groupements.

* 261 Une filiale, au sens du droit commercial, est une société dont plus de la moitié du capital est détenue par une autre (article L. 233-1 du code de commerce).

* 262 IGA et CGEF, revue de dépenses précitée, p. 39 à 47. Voir également le rapport de la Fédération des élus des entreprises locales (FEDL), Les Filiales de SEM , 2021.

* 263 Celle-ci détenant des participations au sein de nombreuses SEM.

* 264 Article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales. Le cas des sociétés dualistes est omis.

* 265 Au contraire, l'article L. 233-2 du code de commerce définit le fait, pour une société, d'avoir une participation dans une autre comme la détention d'une fraction de son capital comprise entre 10 % et 50 %.

* 266 Article L. 1524-1 du même code.

* 267 Cette exigence d'accord préalable, introduite par la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, avait d'ailleurs fait l'objet de fortes critiques du rapporteur de la commission des lois du Sénat Christian Bonnet : voir le rapport n° 61 (1992-1993), p. 143-146, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/1992-1993/i1992_1993_0061.pdf .

* 268 Ces sociétés, régies par les articles L. 211-1 et suivants du code de l'urbanisme, se caractérisent notamment par leur objet limité (la construction d'un ou plusieurs immeubles en vue de leur vente), par un régime fiscal attractif et par le fait que les associés ne sont pas tenus solidairement des dettes sociales, mais seulement à proportion de leurs droits sociaux.

* 269 Sur les nullités « en cascade » en droit des sociétés, voir l'encadré ci-après.

* 270 Voir par exemple Cass., com., 10 novembre 2015, n° 14-16.022.

* 271 Cass., com., 13 décembre 2005 - n° 04-12.135.

* 272 Cass., com., 24 avril 1990, n os 88-17.218 et 88-18.004. Sur la question de la validité des actes des organes irrégulièrement composés ou désignés, la jurisprudence semble toutefois avoir évolué dans un sens plus favorable à la sécurité juridique : selon un arrêt du 27 janvier 2009, la validité des actes pris par un dirigeant dont la nomination a été annulée ne peut être « appréciée qu'à propos de chacun d'eux » (Cass., com., 27 janvier 2009, n° 07-20.402). À ce sujet, voir J. Moury, Les nullités « en cascade » en droit des sociétés , Rev. sociétés 2013. 599.

* 273 Articles L. 225-42 et L. 225-90 du code de commerce.

* 274 Sur la jurisprudence à ce propos, voir J. Honorat, « Nullité », Répertoire Dalloz de droit des sociétés , § 127-128.

* 275 Les seuils ont été considérablement rehaussés par le décret n° 2019-514 du 24 mai 2019. Seules sont désormais assujetties à l'obligation de désigner un commissaire aux comptes les sociétés commerciales qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, deux des trois seuils suivants : un total de bilan de 4 millions d'euros, un chiffre d'affaires hors taxe de 8 millions d'euros et 50 salariés en moyenne au cours de l'exercice. Il convient de noter que la société faîtière de groupes de sociétés formant un ensemble qui dépasse deux des trois seuils précédents est également soumise à cette obligation (article L. 823-2-2 du code de commerce).

* 276 Article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales : voir le commentaire de l'article 70 du projet de loi.

* 277 Telle est l'intention du Gouvernement selon l'étude d'impact, même si la rédaction proposée est dépourvue de sens.

* 278 Ces obligations s'appliqueraient également dans le cas où il s'agirait d'une société au sein de laquelle une entreprise locale détient une participation, et dont la collectivité ou le groupement n'est pas directement actionnaire. L'étude d'impact est explicite sur ce point.

* 279 Article 3 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 précitée et décret n° 2017-329 du 14 mars 2017 relatif à l'Agence française anticorruption .

* 280 L'Agence est également chargée de veiller au respect, dans le cadre de l'exécution des décisions d'autorités étrangères imposant à une société dont le siège est situé sur le territoire français une obligation de se soumettre à une procédure de mise en conformité de ses procédures internes de prévention et de détection de la corruption, de la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968 relative à la communication de documents et renseignements d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères , dite « loi de blocage ».

* 281 Articles L. 2131-2, L. 3131-2 et L. 4141-2 du code général des collectivités territoriales.

* 282 Article L. 1524-1 du même code.

* 283 Malgré la relative imprécision du terme, le caractère exécutoire d'une décision administrative signifie qu'elle produit des effets juridiques, notamment à l'égard des administrés, nonobstant son caractère unilatéral et avant même qu'une juridiction se soit prononcée (conformément au « privilège du préalable »). Il n'implique pas, par lui-même, que l'exécution forcée de cette décision soit permise. Hors l'exercice délégué de prérogatives de puissance publique, les entreprises publiques locales n'ont aucunement le pouvoir de prendre unilatéralement des décisions ayant force obligatoire pour les tiers.

* 284 À savoir le tribunal de commerce ou, le cas échéant, le tribunal judiciaire statuant commercialement.

* 285 Selon les informations recueillies par les rapporteurs, il est très rare que les SPL soient dotées de filiales. Quoique la législation ne l'interdise pas expressément, le fait qu'une SPL soit contrainte d'exercer ses activités exclusivement pour le compte de ses actionnaires limite ses possibilités. En outre, il n'est pas certain que l'on puisse considérer que les collectivités actionnaires d'une SPL soient liées, à l'égard d'une de ses filiales même détenue à 100 %, par le même lien de quasi-régie qu'avec la SPL elle-même.

* 286 Cette disposition est également applicable, par renvoi, aux autres catégories d'entreprises publiques locales.

* 287 Voir le commentaire de l'article 73 quater .

* 288 HATVP, Guide déontologique II - Contrôle et prévention des conflits d'intérêts , février 2021, p. 28-30. Ce document est consultable à l'adresse suivante : https://www.hatvp.fr .

* 289 Article L. 1524-5 du code général des collectivités territoriales.

* 290 HATVP, Rapport annuel 2020 , juin 2021, p. 50-53. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.hatvp.fr .

* 291 Article 12 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE ; articles L. 2511-3 et L. 3211-3 du code de la commande publique. Le pourcentage d'activités est déterminé « en prenant en compte le chiffre d'affaires total moyen ou tout autre paramètre approprié fondé sur les activités, tel que les coûts supportés, au cours des trois exercices comptables précédant l'attribution du contrat de concession. Lorsque ces éléments ne sont pas disponibles ou ne sont plus pertinents, le pourcentage d'activités est déterminé sur la base d'une estimation réaliste » (articles L. 2511-5 et L. 3211-5 du même code).

* 292 G. Le Chatelier, « L'essor des sociétés publiques locales passe par une modification de la loi », AJCT 2018, p. 263.

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