Rapport n° 743 (2020-2021) de M. Philippe DOMINATI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 juillet 2021

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N° 743

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juillet 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2020 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 29a

Sécurités

(Programmes 152 « Gendarmerie nationale » et 176 « Police nationale » ; Programme 207 « Sécurité et éducation routières »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS
Rapporteur spécial : M. Philippe DOMINATI

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Mme Nadine Bellurot, M. Christian Bilhac, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

4090 , 4195 et T.A. 628

Sénat :

699 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Les taux d'exécution des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent à 97,2 % en AE et 99,61 % en CP , alors qu'ils s'établissaient respectivement à 101,05 % et 100,85 % en autorisations d'engagement (AE) et à 101,48 % en crédits de paiement (CP). Les dépenses de rémunération (17,67 milliards d'euros en exécution) ont ainsi été inférieures à celles programmées (17,81 milliards d'euros ouverts en loi de finances initiale). Le confinement et la mise en oeuvre des protocoles sanitaires ont conduit à réduire l'activité opérationnelle des forces de sécurité intérieure pendant la première partie de l'année et à décaler les incorporations vers la fin d'année.

2. Cette évolution n'empêche pas la mission « Sécurités » de dépasser la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 . En 2019, la mission « Sécurités » était déjà au-dessus de l'objectif normé, d'environ 146 millions d'euros. Depuis 2019, le dynamisme du schéma d'emploi et l'importance des mesures de revalorisation salariale, ont conduit à un dépassement systématique de ce plafond qui avait été anticipé par le rapporteur spécial dès 2017.

3. En 2020, la sous-consommation des dépenses de personnel est en partie imputable au retard des incorporations lié à la crise sanitaire et devrait entrainer un rebond des dépenses de personnel en 2021. Le rapporteur spécial relève donc que les faibles taux d'exécution des dépenses de personnel des deux programmes ne traduisent aucunement une amélioration de leur soutenabilité, mais un phénomène conjoncturel lié à la crise sanitaire qui devrait amplifier les tensions structurelles des deux programmes sur l'exercice 2021.

4. La loi de finances initiale pour 2020 a prévu une dotation exceptionnelle de 26,5 millions d'euros au titre de l'indemnisation du flux des heures supplémentaires dans la police nationale. En gestion, plus de 2,2 millions d'heures ont été indemnisées pour un montant total de 27,1 millions d'euros. Le rapporteur spécial estime que le stock d'heure supplémentaire, qui représente un montant indemnisable de 825,5 millions d'euros CAS « Pensions » compris, constitue une charge financière de nature à obérer significativement la marge de manoeuvre de la police nationale sur les années à venir. L'apurement de ce stock devra inévitablement s'accompagner d'efforts en matière d'organisation du temps de travail visant à limiter l'augmentation du flux.

5. La gestion de l'année 2020, marquée par des économies conjoncturelles en dépenses de personnel, a permis aux forces de sécurité d'investir dans des équipements pour leurs personnels dans le cadre du plan de relance . Le montant total des dépenses d'équipement réalisées en 2020 pour les deux forces s'élève ainsi à 401 millions d'euros, contre 332 millions d'euros en 2019. La loi de finances pour 2021 a prévu d'importants efforts en matière d'équipements portés par la mission « Plan de relance », mais qui devront impérativement s'inscrire dans la durée pour avoir de réels effets.

6. S'agissant du programme 207 « Sécurité et éducation routières », les taux d'exécution demeurent élevés tant en autorisations d'engagement (AE) qu'en crédits de paiement (CP), avec des taux qui s'établissent respectivement à 97,28 % et 97,18 %.

7. Pour la troisième année consécutive, le CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » enregistre, au terme de l'exercice 2020, un solde négatif . Ce dernier (- 182 millions d'euros) est plus élevé qu'en 2019 (- 40,40 millions d'euros) et en 2018 (- 3,55 millions d'euros). La baisse du trafic routier lié à la crise sanitaire est à l'origine de cette sous-réalisation.

8. L'architecture du CAS est devenue trop complexe . Non seulement le circuit d'affectation des amendes de la circulation a perdu toute lisibilité, mais de surcroît le CAS ne reflète pas l'effort fourni au titre de la sécurité routière puisque l'essentiel de ces dépenses (3,7 milliards d'euros en 2020 d'après le document de politique transversale annexé au PLF 2020) lui échappe.

I. LES PROGRAMMES « POLICE NATIONALE » ET « GENDARMERIE NATIONALE »

A. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2020

Les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » regroupent plus de 97 % des crédits de paiement (CP) consommés en 2020 au sein de la mission « Sécurités ».

Pour ces deux programmes, l'année 2020 est marquée par la crise sanitaire, dont les effets sur le budget des deux institutions ont été particulièrement marqués. Les dépenses de rémunération (17,67 milliards d'euros en exécution) ont ainsi été inférieures à celles programmées (17,81 milliards d'euros ouverts en loi de finances initiale). Le confinement et la mise en oeuvre des protocoles sanitaires ont conduit à réduire l'activité opérationnelle des forces de sécurité intérieure pendant la première partie de l'année et à décaler les incorporations vers la fin d'année.

Alors que les crédits des programmes exécutés connaissaient une augmentation tendancielle, ces derniers sont en baisse de 1,35 % en AE et n'augmentent que de 0,68 % en CP.

Exécution des crédits des programmes « Gendarmerie nationale »
et « Police nationale » en 2020

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés 2018

Crédits exécutés 2019

Crédits votés 2020

Crédits exécutés 2020

Évolution des crédits exécutés (2019-2020)

Exécution 2019 / LFI 2019

Police nationale

AE

10 808,82

11 073,78

11 092,90

10 895,20

- 1,61%

98,22%

CP

10 595,74

10 902,96

10 990,90

10 915,90

0,12%

99,32%

Gendarmerie nationale

AE

8 916,24

9 618,26

9 907,50

9 517,50

- 1,05%

96,06%

CP

8 734,98

8 977,38

9 103,20

9 100,30

1,37%

99,97%

Total

AE

19 725,06

20 692,04

21 000,40

20 412,70

- 1,35%

97,20%

CP

19 330,72

19 880,34

20 094,10

20 016,20

0,68%

99,61%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les taux d'exécution des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent ainsi à 97,2 % en AE et 99,61 % en CP, alors qu'ils s'établissaient respectivement à 101,05 % et 100,85 % en autorisations d'engagement (AE) et à 101,48 % en crédits de paiement (CP) en 2019 en raison des tensions importantes dans l'exécution des dépenses de personnel.

Évolution des crédits des programmes « Police nationale »
et « Gendarmerie nationale »

(en CP, en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette évolution n'empêche pas la mission « Sécurités » de dépasser la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 1 ( * ) . En 2019, la mission « Sécurités » était déjà au-dessus de l'objectif normé, d'environ 146 millions d'euros. Depuis 2019, le dynamisme du schéma d'emploi et l'importance des mesures de revalorisation salariale, ont conduit à un dépassement systématique de ce plafond qui avait été anticipé par le rapporteur spécial dès 2017 2 ( * ) .

Pour l'ensemble de la mission « Sécurités », déduction faite des fonds de concours et des attributions de produits, l'exécution atteint 14,058 milliards d'euros, dépassant l'objectif de dépenses de la mission fixé par la LPFP de 328,7 millions d'euros.

Évolution des crédits de la mission « Sécurités » par rapport à la LPFP

(en CP, en millions d'euros)

Norme LPFP pour 2020

13 730

Exécution 2020 hors fonds de concours et

14 058,77

Écart entre l'exécution et le plafond de dépenses

328,7

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes et la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022)

Pour les programmes 152 « Gendarmerie nationale » et 176 « Police nationale », l'intégralité des crédits de la réserve de précaution des dépenses de personnel, respectivement 38,4 millions d'euros et 49,7 millions d'euros, a été annulée ainsi qu'une partie des crédits de la réserve sur les autres dépenses, respectivement 32,1 millions d'euros et 28,2 millions d'euros.

En revanche, les deux forces ont bénéficié d'ouvertures d'AE et de CP en 3 ème loi de finances rectificative 3 ( * ) dans le cadre du plan de relance 4 ( * ) .

La gendarmerie nationale a bénéficié d'ouvertures au titre du plan de relance pour l'achat d'hélicoptères H160 (200 millions d'euros en AE et 20 millions d'euros en CP), pour la commande de véhicules et de bornes électriques (37,7 millions d'euros et 30,1 millions d'euros en CP), pour financer des équipements du quotidien et pour le reliquat des voitures commandées précédemment (20,6 millions d'euros en CP). Les AE et les CP pour l'achat d'hélicoptères ont été en partie reportés en 2021.

La police nationale a quant à elle obtenu une ouverture de crédits de 37,65 millions d'euros en AE et 30,10 millions d'euros en CP au titre du plan de relance pour l'acquisition de véhicules.

Mouvements de crédits intervenus en gestion sur l'année 2020
sur la mission « Sécurités »

(en millions d'euros)

* : fonds de concours et attributions de produits

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une sous-exécution inédite des dépenses de personnel, dont une part importante est reportée sur l'exécution 2021

Le faible niveau de consommation des crédits sur l'exercice 2020 par rapport à l'exercice précédent s'explique en grande partie par la sous-consommation des dépenses de personnel, qui constituent plus de 87 % des dépenses des deux programmes.

Taux d'exécution des dépenses totales et des dépenses de personnel

(en millions d'euros)

Exécution 2019

LFI 2020

Exécution 2020

Exécution 2020 / LFI 2020

Police nationale

Titre 2

9 743,94

9 954,39

9 789,27

98,34%

Total

10 902,96

10 990,91

10 915,89

99,32%

Gendarmerie nationale

Titre 2

7 633,47

7 778,13

7 701,59

99,02%

Total

8 977,38

9 103,15

9 100,34

99,97%

Ensemble

Titre 2

17 377,41

17 732,52

17 490,86

98,64%

Total

19 880,34

20 094,06

20 016,23

99,61%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La crise sanitaire a eu des conséquences sur l'exécution des dépenses de personnel de la police nationale en raison du ralentissement de l'activité opérationnelle et du décalage du schéma d'emploi.

Le taux d'exécution des dépenses de personnel de la police nationale s'élève à 98,34 % en 2020. Cette sous-exécution s'explique par les conséquences de la crise, pour un total estimé à 21,2 millions d'euros, sous le double effet de la baisse de l'activité opérationnelle et du décalage des incorporations. Cette sous-consommation a permis de financer la « prime COVID-19 » (14,1 millions d'euros hors CAS « Pensions » pour 22 075 agents bénéficiaires soit 15 % des effectifs).

Le ralentissement de l'activité opérationnelle a généré une baisse des indemnités opérationnelles des forces mobiles pour 9,3 millions d'euros (IJAT pour 1,5 million d'heures, heures supplémentaires versées aux CRS pour 5,1 millions d'euros, heures de nuit, dimanche et jours fériés pour 1,7 millions d'euros, astreintes pour 1 million d'euros). La faible mobilisation de la réserve civile a également entrainé une économie d'environ 5 millions d'euros.

Malgré la réalisation du schéma d'emplois (voir infra ), le décalage des incorporations et la diminution de la capacité d'accueil des écoles font baisser l'impact financier du schéma d'emploi 2020 de 6,9 millions d'euros. Par ailleurs, certaines économies indirectes sont partiellement induites par le décalage des incorporations et génèrent un report des paiements sur 2021 (11,1 millions d'euros sur les primes de fidélisation, d'installation, prestations sociales).

Le taux d'exécution des dépenses de personnel de la gendarmerie nationale s'élève à 99,07 % : la crise sanitaire y a également dégradé le rythme normal des incorporations du fait des mesures de protection mises en place dans les écoles. En outre, la crise a généré des reports de charges sur 2021 du fait du décalage de l'activité opérationnelle de la gendarmerie nationale.

En revanche, la réserve opérationnelle et la gendarmerie mobile ont connu un engagement fort à compter de la fin du premier confinement sanitaire (sécurité du quotidien, contrôle aux frontières, lutte anti-terrorisme). Ainsi, un report de charge exceptionnel sur 2021 de 21,2 millions d'euros pour la réserve opérationnelle, de 6,8 millions d'euros d'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT), et de 1,3 million d'euros pour les incorporations, seront pris sous le plafond des ressources de 2021.

Ainsi, la sous-consommation imputable au retard des incorporations se traduit principalement, pour la police nationale, par un décalage des dépenses, avec un effet rebond des dépenses de personnel en 2021. Le rapporteur spécial relève donc que les faibles taux d'exécution des dépenses de personnel des deux programmes ne traduisent aucunement une amélioration de leur soutenabilité, mais un phénomène conjoncturel lié à la crise sanitaire qui devrait amplifier les tensions structurelles des deux programmes sur l'exercice 2021.

2. Une poursuite des recrutements et des mesures indemnitaires

L'année 2020 est marquée par la poursuite du plan de recrutement, de 10 000 effectifs des forces de sécurité intérieure sur le quinquennat, dont 7 500 pour la gendarmerie nationale et 2 500 pour la police nationale. Le schéma d'emplois de la mission était en loi de finances initiale de 1 900 ETP, en baisse par rapport à 2019 (2 388 ETP), en s'établissant à des niveaux de 2018 (1 870 ETP).

Le schéma d'emplois réalisé en 2020 pour les deux programmes (1 914 ETP) est supérieur de 14 ETP (0,7 %) à celui prévu en loi de finances initiale (1 900 ETP). Malgré une baisse de 19 % par rapport à 2019, le schéma d'emplois exécuté en 2020 traduit le dynamisme des emplois de la mission . En dépit de la crise et de ses conséquences directes sur le recrutement et la formation, ce schéma d'emplois a bien été réalisé, mais tardivement, reportant l'impact financier à 2021 en année pleine.

Schéma d'emploi de la mission « Sécurités »

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Le schéma d'emplois 2020 a été exécuté dans le respect de la cible fixée. Toutefois, les écarts des sorties et des entrées avec le schéma d'emplois prévisionnel sont consécutifs à la crise sanitaire sur le volume et le rythme des incorporations des adjoints de sécurité et des cadets de la République, décalées et compensées par le prolongement des contrats en cours.

Schéma d'emploi de la mission « Sécurités »

(en ETP)

Gendarmerie nationale

Police nationale

LFI

Exécution

LFI

Exécution

Sorties

11 153

11 239

7 326

8 389

dont retraites

3 127

3 289

2 173

2 296

Entrées

11 643

11 755

8 724

9 787

Schéma d'emplois

490

516

1 398

1 398

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Pour la gendarmerie, le schéma d'emplois réalisé en 2020 affiche un solde excédentaire (+ 26 ETP) par rapport à la cible. Cet excédent est dû à des mouvements intervenus en fin de gestion, notamment la création des effectifs nécessaires au renforcement de la lutte contre le cyber-djihadisme (+ 13 ETP) et dans le cadre de Frontex, pour renforcer les contrôles aux frontières (+ 11 ETP).

En plus du plan de recrutement quinquennal, le dynamisme tendanciel des dépenses de personnel est alimenté par le poids des mesures de revalorisation indemnitaires, qui ont représenté une hausse de 263 millions d'euros en 2020 par rapport à 2019 pour les deux programmes.

Structure de la variation des dépenses de personnel des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » en 2020

(en millions d'euros, en crédits de paiement)

Gendarmerie nationale

Police nationale

Exécution 2019 hors CAS- Pensions

4 206

6 554,50

+/- Impact des mesures de transfert

- 9,6

- 153,1

- Débasage de dépenses atypiques

- 67,4

- 61,6

+/- Impact du schéma d'emplois 2019

29,1

34,9

+/- Impact du schéma d'emplois 2020

- 20,8

4,6

+ Mesures générales

2,6

2

+ Mesures catégorielles

92,6

170,3

+ GVT positif

56,2

80,5

- GVT négatif

- 66,4

- 37,1

Rebasage de dépenses atypiques

56,5

54

+/- Mesures diverses

- 27,9

- 17

Total : Montant exécuté 2020

4 251

6 632

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En effet, les policiers et les gendarmes ont obtenu, en avril 2016, la signature de deux protocoles leur accordant d' importantes mesures de revalorisation des carrières et des rémunérations 5 ( * ) . Les coûts supplémentaires liés à ces protocoles étaient alors estimés par le ministère de l'intérieur à 475,3 millions d'euros en 2022, hors contribution au CAS « Pensions ». En outre, ainsi que le relevait la Cour des comptes 6 ( * ) , l'ensemble de ces mesures catégorielles a un coût annuel élevé et mal maîtrisé, puisqu'elles prévoient également des avancements massifs par repyramidage des corps, augmentant mécaniquement la part des gradés les plus élevés, et les dépenses de personnel associées.

En 2020, le coût supplémentaire des protocoles de 2016 est de 54,9 millions d'euros pour la gendarmerie nationale et de 79,9 millions d'euros pour la police nationale.

Coût supplémentaire du protocole de 2018

(en millions d'euros, en AE/CP)

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Coût cumulé

Gendarmerie nationale

3,5

64,1

27,2

51,3

54,9

3,6

1,4

206

Dont coûts hors PPCR

3,5

46,1

27,2

20,3

10,9

2,5

1,4

111,9

Dont coûts PPCR

/

18

/

31

44

1,1

/

94,1

Police nationale

2,8

70,9

28,1

60,3

79,9

18,6

8,7

269,3

Dont coûts hors PPCR

1,4

12,5

28,1

24

24,3

13,6

8,7

112,6

Dont coûts PPCR

1,4

58,4

/

36,3

55,6

5,1

/

156,7

Total

6,3

135

55,3

111,6

133,4

22,1

10,1

475,3

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

Ce dernier a été suivi d'un autre protocole, conclu le 19 décembre 2018 7 ( * ) avec les syndicats de police nationale dans le contexte de la forte activité générée par le mouvement des « gilets jaunes ». En 2020, le coût du protocole de 2018 atteint 60,7 millions d'euros pour la police nationale et 37 millions d'euros pour la gendarmerie nationale. Au total, le coût du protocole de 2018 atteindra alors, pour les deux programmes, un coût annuel cumulé de 238,5 millions d'euros en 2021, hors contribution au CAS « Pensions ».

Ainsi, en exécution 2020, l'impact financier de ces deux protocoles est de 170,4 millions d'euros pour le programme 176 « Police nationale » et de 92,6 millions d'euros pour le programme 152 « Gendarmerie nationale ».

Le rapporteur spécial estime que ces mesures, conjuguées aux plans de recrutements, qui ne s'accompagnent d'aucune réelle mesure d'économie, ne sont pas maîtrisées et mettent en cause la soutenabilité de l'ensemble des deux programmes.

Le ministre de l'intérieur a également indiqué vouloir relancer « le projet de gratuité des transports pour les forces de l'ordre », qui existe déjà pour les gendarmes, et constitue une attente forte des policiers, mais serait extrêmement coûteux pour le programme. Le rapporteur spécial rappelle que cet avantage constitue pour les militaires une contrepartie de leur disponibilité permanente et de leur mobilité totale. En tout état de cause, le coût d'un tel projet, s'il devait être supporté par le programme 176 « Police nationale », s'élèverait à environ 60 millions d'euros par an 8 ( * ) , diminuant d'autant les marges de manoeuvre disponibles pour les crédits de fonctionnement et d'investissement.

3. Une poursuite de l'indemnisation du stock d'heures supplémentaires de la police nationale, dans des proportions toujours limitées

La soutenabilité des dépenses de rémunération des deux forces est également obérée par la persistance d'un stock d'heures supplémentaires dans la police nationale, qui atteignait près de 21 millions d'heures au 31 décembre 2019.

Au cours du dernier trimestre 2019, une partie de ce stock avait été indemnisé, à la suite de l'adoption de la loi de finances rectificative pour 2019, de crédits budgétaires à hauteur de 50 millions d'euros, dans des conditions toutefois contestables sur le plan de la régularité budgétaire 9 ( * ) .

La loi de finances initiale pour 2020 a prévu une dotation exceptionnelle de 26,5 millions d'euros au titre de l'indemnisation du flux des heures supplémentaires. En gestion, plus de 2,2 millions d'heures ont été indemnisées pour un montant total de 27,1 millions d'euros.

Stock d'heures supplémentaires de la police nationale

(en millions d'heures)

Source : commission des finances du Sénat

Toutefois, eu égard aux marges disponibles sur les dépenses de personnel cette année, la Cour des comptes s'interroge sur le choix d'utiliser une fongibilité asymétrique à hauteur de 62 millions d'euros au profit du hors titre 2 plutôt que d'indemniser plus d'heures supplémentaires 10 ( * ) . Le rapporteur spécial estime que ce choix démontre la hauteur des besoins financiers de la mission, qui concerne tant les engagements sur les dépenses de personnel que la nécessité de moderniser les équipements des forces.

En tout état de cause, le rapporteur spécial estime que le stock d'heures supplémentaires, qui représente un montant indemnisable de 825,5 millions d'euros CAS « Pensions » compris, constitue une charge financière de nature à obérer significativement la marge de manoeuvre de la police nationale sur les années à venir. L'apurement de ce stock devra inévitablement s'accompagner d'efforts en matière d'organisation du temps de travail visant à limiter l'augmentation du flux.

4. Un amorçage de l'effort de relance ne remettant pas en cause les grands déséquilibres de la mission en 2020, et qui devra s'inscrire dans la durée pour produire de réels effets

La gestion de l'année 2020, marquée par des économies conjoncturelles en dépenses de personnel, a permis aux forces de sécurité d'investir dans des équipements pour leurs personnels dans le cadre du plan de relance. Le montant total des dépenses d'équipement réalisées en 2020 pour les deux forces s'élève ainsi à 401 millions d'euros, contre 332 en 2019.

Dépenses d'équipement de la police et de la gendarmerie nationales

(en millions d'heures)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données de la Cour des comptes

Pour la gendarmerie nationale, cet effort a été permis par l'ouverture en loi de finances rectificative de crédits dédiés à l'achat d'équipements du quotidien (13 millions d'euros) au bénéfice des unités. Le plan de relance a également permis l'ouverture de crédits pour l'acquisition de véhicules (37,7  millions d'euros). Pour sa part, la police nationale a choisi de dédier une partie des crédits dégagés par une sous-consommation des dépenses de personnels au financement de pistolets à impulsion électrique et accessoires supplémentaires (5,5 millions d'euros), permettant d'accélérer la dotation des services. La police a aussi bénéficié d'ouvertures de crédits en lois de finances rectificatives, dans le cadre du plan de relance, pour renouveler son parc de véhicules (37,65 millions d'euros).

L'amorçage de l'effort de relance n'entraine pas, en 2020, d'évolution significative dans la proportion des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes.

Les dépenses de rémunération représentent 87,38 % des crédits des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », ce qui représente un niveau inférieur à celui prévu en loi de finances initiale, en raison de la sous-consommation conjoncturelle des dépenses de personnel entrainée par la crise sanitaire

Ce taux reste toutefois à un niveau comparable à celui constaté sur l'exécution 2019. Sans véritable plan de renforcement des capacités, le risque d'éviction des rémunérations sur le matériel demeure, d'autant plus qu'une partie des dépenses de personnel prévue en 2020 a été décalée, du fait du report de mesures catégorielles et de recrutements tardifs qui pèseront sur la gestion de 2021.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des crédits
de la « Police nationale » et de la « Gendarmerie nationale »

(en crédits de paiement)

2018

2019

LFI 2020

Exécution 2020

Police nationale

Titre 2

9 400,80

9 743,94

9 954,39

9 789,27

Total

10 595,74

10 902,96

10 990,91

10 915,89

Titre 2 / Total

88,72%

89,37%

90,57%

89,68%

Gendarmerie

Titre 2

7 346,69

7 633,47

7 778,13

7 701,59

Total

8 734,98

8 977,38

9 103,15

9 100,34

Titre 2 / Total

84,72%

84,13%

85,44%

84,63%

Total

Titre 2

16 747,49

17 377,41

17 732,52

17 490,86

Total

19 330,72

19 880,34

20 094,06

20 016,23

Titre 2 / Total

86,64%

87,41%

88,25%

87,38%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ainsi, alors que les dépenses de personnel ont augmenté de près de de 20 % en 10 ans, les dépenses de fonctionnement et d'investissement n'ont augmenté que de près de 11 %, traduisant l'existence d'un effet d'éviction des secondes par les premières.

Évolution comparée des dépenses de personnel
et des autres dépenses depuis 2010

(en millions d'euros)

2010

2020

Évolution 2010 / 2020

Titre 2

14 112,9

17 490,86

19,31%

Hors titre 2

2 260,1

2 525,37

10,50%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Au total, le plan de relance doit être replacé dans le contexte d'augmentation des dépenses de personnel, sous le double effet des recrutements et des mesures indemnitaires. Ces dernières, qui sont difficilement pilotables devraient poursuivre leur tendance à la hausse et créer à nouveau un effet d'éviction des dépenses d'investissement et de fonctionnement une fois le plan de relance passé, ce qui appelle donc à une prudence particulière.

II. LE PROGRAMME 207 « SÉCURITÉ ET ÉDUCATION ROUTIÈRES »

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » retrace les dépenses réalisées par l'État pour réduire le nombre d'accidents de la route à travers des mesures de prévention, d'information et d'éducation routières. Les dépenses liées au volet répressif de la politique de sécurité routière (radars et gestion des points des permis de conduire) sont, quant à elles, financées par le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2020

En exécution, les dépenses hors personnel 11 ( * ) se sont élevées à 41,39 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit un montant légèrement supérieur à 2019 (hausse de 0,89 million d'euros soit + 2,2%).

Récapitulation de l'exécution 2020 du programme 207

(en millions d'euros)

Type de crédit

Exécution 2017

Exécution 2018

Exécution 2019

Crédits prévus
en LFI 2020

Exécution 2020

Évolution 2019/2020

Taux d'exécution 2020/LFI

AE

35,33

38,28

40,94

43,00

41,83

+ 2,17 %

97,28 %

CP

35,12

38,64

40,50

42,59

41,39

+ 2,20 %

97,18 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2020

Les taux de consommation demeurent élevés sur le programme 207 « Sécurité et éducation routières », tant en autorisations d'engagement (AE) qu'en crédits de paiement (CP). Au regard des crédits votés en loi de finances initiale (LFI), le programme 207 fait l'objet d'une légère sous-exécution avec des taux qui s'établissent respectivement à 97,28 % et 97,18 %.

Le taux d'exécution s'améliore notamment pour l'action 1 (95 %) mais reste stable à 81 % pour l'action 2. L'action 3 relative aux dépenses de communication est caractérisée comme chaque année par une surexécution .

Prévision et exécution des crédits des actions du programme 207 (en CP)

(en millions d'euros)

Action

2018

2019

2020

LFI

Exéc.

Taux

LFI

Exéc.

Taux

LFI

Exéc.

Taux

01 - Obs., prospective, réglementation et soutien

2,87

2,34

82 %

3,22

2,84

88 %

3,47

3,30

95 %

02 - Démarches intermin. et communication

16,32

19,92

122 %

16,29

19,37

119 %

16,29

19,68

121 %

03 - Éducation routière

20,68

16,31

79 %

22,17

18,3

83 %

22,83

18,41

81 %

TOTAL programme 207

39,87

38,57

97 %

41,69

40,50

97 %

42,59

41,39

97 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2020

D'un point de vue plus global, il faut noter que les crédits du programme 207 poursuivent la hausse engagée ces dernières années.

Évolution des dépenses hors personnel du programme 207 (2017-2020)

(en millions d'euros)

Montant des dépenses hors personnel

Année

AE

CP

2017

35,33

35,12

2018

38,28

38,64

2019

40,94

40,50

2020

41,83

41,39

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2020

B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une amélioration de l'indicateur « nombre de tués sur les routes » liée à la baisse du trafic routier

D'après le bilan définitif pour 2020 12 ( * ) publié par l'ONISR, la mortalité routière a atteint un point bas historique et s'établit à 2 780 tués sur les routes de France, en métropole ou en outre-mer, contre 3 498 en 2019 soit une diminution de 21 %. Ces bons résultats appellent deux remarques.

Tout d'abord, ils sont à mettre en parallèle de la diminution dans les mêmes proportions du trafic routier pendant les deux confinements si bien qu'il est difficile d'apprécier l'évolution de cet indicateur en termes de sécurité sur nos routes. L'année 2021 permettra de confirmer cette tendance.

Ensuite, cette baisse s'est répartie de manière inégale :

- selon le mode de transport : si la mortalité automobiliste, avec 1 243 tués en 2020 (-23% par rapport à 2019), représente pour la première fois moins de la moitié de la mortalité routière totale, a contrario la mortalité cycliste , en raison du report modal, ne baisse que légèrement, avec 178 tués en 2020, un niveau proche de 2019 (187 tués) ;

- selon le territoire : alors que la France Métropolitaine enregistre une baisse de 22 % avec 2 541 tués, le nombre de personnes décédées en Outre-Mer diminue peu (239 tués en 2020 contre 254 en 2019).

2. Le permis de conduire : un délai d'attente en hausse de 21 jours en raison des périodes de confinement

Depuis la promulgation de la loi d'orientation des mobilités du 24 décembre 2019, le délai médian est désormais retenu à compter de 2020 comme indicateur de référence en lieu et place du délai moyen, ce qui devrait selon la Délégation à la sécurité routière avoir pour effet mécanique de diminuer l'impact des candidats qui tardent à se représenter.

Cependant, cette année la crise sanitaire a contraint la délégation à la sécurité routière d'annuler les examens pendant le premier confinement et de suspendre les leçons pendant le second, ce qui a dégradé de 21 jours le délai médian qui s'établit à 63 jours en 2020 (contre 42 en 2019).

III. LE COMPTE SPÉCIAL « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

L'article 49 de la loi de finances pour 2006 13 ( * ) a créé le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », habituellement appelé CAS « Radars ». Il a vocation à retracer les dépenses financées à partir du produit des amendes.

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2020

1. Un compte spécial en fort déséquilibre cette année

Pour la troisième année consécutive, le compte spécial enregistre, au terme de l'exercice 2020, un solde négatif. Ce dernier (- 182 millions d'euros) est plus élevé qu'en 2019 (- 40,40 millions d'euros) et en 2018 (- 3,55 millions d'euros). Il résulte de l'écart entre les dépenses en crédits de paiement, 1,326 milliard d'euros, et les recettes affectées au compte, 1,144 milliard d'euros (soit 82 % du produit total des amendes).

Toutefois, le montant cumulé du solde du compte spécial , depuis son ouverture en 2006 , demeure très nettement positif et s'élève à 817 millions d'euros .

Évolution des recettes et dépenses du CAS depuis 2015

(en millions d'euros)

Année

Produit total des amendes

Recettes affectées au CAS

Dont contrôle automatisé

Dépenses en CP du CAS

Solde budgétaire du CAS

2015

1 607,70

1 329,60

789,00

1 285,60

44,00

2016

1 817,90

1 421,40

920,30

1 342,00

79,40

2017

1 978,20

1 527,70

1 013,20

1 362,30

165,40

2018

1 750,90

1 462,85

864,30

1 466,40

- 3,55

2019

1 649,00

1 346,68

759,70

1 387,08

- 40,40

2020

1 387,00

1 144,00

553,00

1 326,29

- 182,29

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2020

Le tableau suivant retrace les dépenses par programme du compte spécial exécutées en 2020 :

(en millions d'euros et en %)

Programme

Crédits exécutés 2019

Crédits votés LFI 2020

Crédits
exécutés
2020

Exécution 2020
/exéc. 2019

Exécution 2020
/ LFI 2020

Section 1 - Contrôle automatisé

AE

326,63

339,54

312,17

- 4,4

- 8,1

CP

294,14

339,54

301,57

+ 2,5

- 11,2

751 - Structures et dispositifs de sécurité routière 14 ( * )

AE

326,63

339,54

312,17

- 4,4

- 8,1

CP

294,14

339,54

301,57

+ 2,5

- 11,2

Section 2 - Circulation et stationnement routiers

AE

1093,72

1 233,31

1025,71

- 6,2

- 16,8

CP

1 092,95

1 233,31

1024,72

- 6,2

- 16,9

753 - Contrôle

et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

AE

26,20

26,20

26,20

0

0

CP

26,20

26,20

26,20

0

0

754 - Contribution
à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

AE

572,18

620,67

656,82

+ 14,8

+ 5,8

CP

571,41

620,67

655,82

+ 14,8

+ 5,7

755 - Désendettement de l'État

AE

495,34

586,44

342,70

- 30,8

- 41,6

CP

495,34

586,44

342,70

- 30,8

- 41,6

Total

AE

1 420,35

1 572,85

1 337,88

- 5,8

- 14,9

CP

1 387,08

1 572,85

1 326,29

- 4,4

- 15,7

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2019

2. La réalisation des recettes, nettement inférieure aux prévisions, a nécessité un ajustement en loi de finances rectificative

Le produit total des recettes issues des amendes de la circulation et du stationnement routiers (radars et hors radars) a, en 2020, été nettement sous-réalisé : 1,837 milliard d'euros en loi de finances initiale contre 1,387 milliard d'euros réalisés

a) Les recettes ont été sensiblement impactées par la crise sanitaire

Estimées à 729 millions d'euros par la LFI 2020, les recettes des amendes forfaitaires radars (section 1) se sont élevées à 553 millions d'euros soit une réalisation très en-dessous de la prévision (- 24%).

La baisse du trafic routier liée à la crise sanitaire , les périodes de confinement, le recours massif au télétravail ou encore le développement du transport cycliste, sont très certainement à l'origine de cette sous-réalisation, sans qu'il soit possible de déterminer avec certitude l'impact de ces différents facteurs.

Concernant la section 2 relative aux recettes des autres amendes de la circulation, ces dernières ont elles aussi été inférieures aux prévisions puisqu'elles s'élèvent à 834 millions d'euros alors qu'elles étaient estimées à 1 108 millions d'euros en LFI .

b) La loi de finances rectificative n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 a minoré de 155 millions d'euros le versement au CAS afin de préserver les recettes de l'AFITF

La LFI 2020 prévoyait, après un prélèvement de 26 millions d'euros pour le Fonds de modernisation des établissement de santé publics et privés (FMESPP), que 340 millions d'euros étaient affectés à la section 1 « Contrôle automatisé » (programme 751) tandis que 193 millions d'euros bénéficiaient à la section 2 « Circulation et stationnement routiers » (programmes 753, 754 et 755) ce qui avec des recettes des amendes forfaitaires radars de 553 millions d'euros n'aurait laissé qu'une part réduite à 17 millions d'euros à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).

Afin de tirer les conséquences de cette baisse des recettes des amendes forfaitaires des radars, la quatrième loi de finances rectificative a minoré les versements au programme 751 de 24 millions d'euros en CP, minoration répercutée sur le versement de la subvention à l'ANTAI, et de 131 millions d'euros à la section 2 du CAS (P754 et P755, pour respectivement - 71 millions d'euros et - 60 millions d'euros).

Ainsi, l'AFITF a pu bénéficier en 2020 d'un versement de 172 millions d'euros, soit 89 % des recettes initialement prévues.

B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Des recettes des radars en-deçà des prévisions qui fragilisent les ressources de l'AFITF

L'AFITF ne fait pas partie du périmètre du compte spécial, pour autant elle bénéficie du solde des recettes des amendes radars non versées au programme 751 et à la section 2 et ces recettes ont pu constituer une ressource importante (400 millions d'euros en 2017).

Mais depuis trois ans, les espoirs de recettes croissantes ont laissé place à des ressources bien plus faibles que prévues comme l'illustre le graphique ci-dessous :

Évolution du montant des recettes des amendes forfaitaires des radars

versées à l'AFITF (2016-2020)

(en millions d'euros)

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2020

Cette situation, par ailleurs source de complexité, n'est pas satisfaisante et plaide, à défaut d'une refonte ou suppression du CAS, pour l'intégration au sein de ce dernier des ressources versées à l'AFITF.

Un programme dédié pourrait être créé qui servirait de support budgétaire à l'instar du programme 754 tandis que le programme 753 d'un montant très faible (26 millions d'euros) serait fusionné avec le programme 751, schéma qui de plus simplifierait légèrement l'architecture d'ensemble.

2. Le CAS, devenu trop complexe, n'est plus lisible et ne reflète pas l'effort fourni au titre de la sécurité routière

L' article 21 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 dispose que les comptes d'affectation spéciale (CAS) « retracent (...) des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

Le compte spécial contrevient à ce principe de spécialité puisque 30 % de ses recettes sont attribuées au programme 755 « Désendettement de l'État » (343 millions d'euros) qui ne concerne pas des dépenses de sécurité routière.

En outre, 172 millions d'euros ont été versés à l'AFITF, mais ces dépenses (qui présentent un lien avec la sécurité routière au titre de l'amélioration du réseau routier) ne sont pas intégrées au compte spécial.

Enfin l'essentiel des dépenses de sécurité routière (3,7 milliards d'euros en 2020 d'après le document de politique transversale annexé au PLF 2020) échappe au compte spécial, ce qui conduit à multiplier les documents budgétaires (deux PAP, un jaune et le DPT) si l'on souhaite obtenir une vision d'ensemble du financement de cette politique.

Recettes et dépenses du compte spécial et de la sécurité routière

(en millions d'euros)

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2020


* 1 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

* 2 Rapport général n° 108 (2017-2018) de M. Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2017.

* 3 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

* 4 Ces ouvertures, concernant des dépenses pluriannuelles pour la gendarmerie et la sécurité civile, ont donné lieu à des reports sur 2021.

* 5 Il s'agit, notamment, de la transposition pour la police et la gendarmerie nationale du protocole de modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR).

* 6 Cour des comptes, référé au Premier ministre du 13 mars 2018 sur les rémunérations et le temps de travail dans la police et la gendarmerie nationales.

* 7 Ce protocole fait suite à un amendement du gouvernement adopté par l'Assemblée nationale, qui prévoyait de « de financer une prime exceptionnelle de 300 € qui sera versée aux 111 000 policiers et militaires qui ont participé aux récentes opérations [de maintien de l'ordre] ».

* 8 Rapport général n° 138 (2020-2021) de M. Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2020.

* 9 Rapport n° 625 (2018-2019) de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances, déposé le 3 juillet 2019.

* 10 Cour des comptes, note d'exécution budgétaire 2020 de la mission « Sécurités ».

* 11 Depuis le 1 er janvier 2015, les dépenses de titre 2 du programme 207 « Sécurité et éducation routières » ont été transférées au programme support 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieure », de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », afin d'en améliorer la gestion.

* 12 https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr/etat-de-l-insecurite-routiere/bilans-annuels-de-la-securite-routiere/bilan-2020-de-la-securite-routiere.

* 13 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 14 Le programme 751 intègre, depuis le 1 er janvier 2017, les anciens programmes 751 « Radars »
et 752 « Fichier national du permis de conduire ».

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