TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AU STATUT
DE L'AVOCAT HONORAIRE EXERÇANT
DES FONCTIONS JURIDICTIONNELLES

Article 3
Statut de l'avocat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
dans le cadre de l'expérimentation

Cet article vise à fixer le statut de l'avocat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles et respecter ainsi l'article 64 de la Constitution qui dispose qu'« une loi organique porte statut des magistrats ».

Dans la mesure où la commission n'a pas adopté l'article 8 du projet de loi ouvrant l'expérimentation permettant aux avocats honoraires de siéger comme assesseur dans les cours d'assises et les cours criminelles départementales, elle a, par coordination, également supprimé cet article du projet de loi organique.

Conformément à l'article 64 de la Constitution et pour préserver l'indépendance de l'autorité judiciaire, le statut des magistrats relève de la loi organique.

Ainsi que l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 21 mars 2019 311 ( * ) , « les fonctions de magistrat de l'ordre judiciaire doivent en principe être exercées par des personnes qui entendent consacrer leur vie professionnelle à la carrière judiciaire. La Constitution ne fait cependant pas obstacle à ce que, pour une part limitée, des fonctions normalement réservées à des magistrats de carrière puissent être exercées à titre temporaire par des personnes qui n'entendent pas pour autant embrasser la carrière judiciaire , à condition que, dans cette hypothèse, des garanties appropriées permettent de satisfaire au principe d'indépendance qui est indissociable de l'exercice de fonctions judiciaires. Il importe à cette fin que les intéressés soient soumis aux droits et obligations applicables à l'ensemble des magistrats sous la seule réserve des dispositions spécifiques qu'impose l'exercice à titre temporaire de leurs fonctions ».

Dans ce cadre, l'objet de l'article 3 est de fixer le statut des avocats honoraires qui seraient appelés à exercer des fonctions d'assesseur dans les procès criminels. S'agissant d'une simple expérimentation, ces dispositions nouvelles ne seraient pas inscrites dans l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

L'article 3 s'inspire du statut déjà existant des magistrats exerçant à titre temporaire, tout en prévoyant une procédure de recrutement plus souple et plus rapide.

Pourraient être nommés pour trois ans - durée de l'expérimentation - des avocats honoraires, c'est-à-dire justifiant d'un minimum de vingt ans d'expérience , et n'ayant pas exercé la profession d'avocat depuis au moins cinq ans dans le ressort de la cour d'appel de rattachement . Cette règle des cinq ans permettrait de prévenir les conflits d'intérêts et de garantir l'indépendance et l'impartialité des assesseurs ainsi recrutés. Elle est reprise du statut des magistrats exerçant à titre temporaire 312 ( * ) , en élargissant le champ géographique de l'interdiction au ressort de la cour d'appel compte tenu de l'affectation des avocats honoraires à cette juridiction.

Les avocats honoraires auraient une formation allégée par rapport aux magistrats exerçant à titre temporaire et ne seraient soumis qu'à une formation préalable à leur installation dans leurs fonctions 313 ( * ) . L'étude d'impact justifie cet allègement par le fait que les fonctions exercées seraient proches de l'exercice professionnel de nombreux anciens avocats pénalistes ou généralistes et ne requerraient pas de travail de préparation ou de rédaction.

L'article 3 précise également les activités incompatibles avec l'exercice des fonctions d'avocat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, les termes de leur serment, les règles déontologiques auxquelles ils sont soumis, les conditions de la remise de leur déclaration d'intérêts et les conditions d'une action disciplinaire à leur égard.

Les avocats honoraires exerçant des fonctions juridictionnelles prêteraient serment et, selon la direction des services judiciaires, revêtiraient un costume de juge et non pas leur robe d'avocat dès lors qu'ils ne siègeraient pas en cette qualité malgré le nom qui leur serait donné 314 ( * ) .

À l'Assemblée nationale, outre diverses modifications d'ordre rédactionnel, la commission a précisé qu'un avocat honoraire ne pourrait connaître d'un dossier lorsqu'il entretient ou a entretenu des relations professionnelles avec les conseils d'une partie, et non plus uniquement la partie elle-même 315 ( * ) . En séance, à l'initiative de Laurence Vichnievsky 316 ( * ) , l'exigence d'absence de condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire a été érigée en exigence absolue, sans qu'il y ait lieu d'examiner si cette condamnation était compatible ou non avec l'exercice de fonctions juridictionnelles.

Considérant que les avocats honoraires peuvent déjà participer aux cours criminelles départementales en tant que magistrats exerçant à titre temporaire et que le projet de loi prévoit leur participation aux cours d'assises à ce titre, la commission a refusé l'expérimentation, perçue comme une défiance à leur égard par les magistrats, sans par ailleurs faire consensus chez les avocats 317 ( * ) .

Par cohérence, elle a adopté l' amendement COM-3 des rapporteurs pour supprimer la disposition qui fixe le statut de l'avocat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles dans la loi organique.

La commission a supprimé l'article 3.


* 311 Décision n° 2019-779 DC du 21 mars 2019 Loi organique relative au renforcement de l'organisation des juridictions.

* 312 Article 32 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

* 313 Elle comprendrait au moins 10 jours de formation théorique dispensée par l'École nationale de la magistrature, qui pourra porter spécifiquement sur la procédure criminelle, selon la réponse de la direction des services judiciaires au questionnaire des rapporteurs.

* 314 Réponse de la direction des services judiciaires au questionnaire des rapporteurs.

* 315 Amendement n° CL24 du rapporteur, M. Mazars.

* 316 Amendement n° 2 de Mme Vichnievsky.

* 317 Voir commentaire de l'article 8 du projet de loi.

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