B. ALOURDIES PAR LE COÛT DES MESURES DE LUTTE CONTRE L'INFLATION ET LA HAUSSE DE LA CHARGE DES INTÉRÊTS DE LA DETTE, LES DÉPENSES PUBLIQUES PROGRESSENT TROP RAPIDEMENT

La prévision de dépenses publiques hors crédits d'impôts pour 2022 s'élève à un peu plus de 1 500 milliards d'euros soit une augmentation de près de 60 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale.

Sur ce montant, environ 35 milliards d'euros s'explique par le coût des mesures prises pour répondre aux conséquences de l'inflation . Ainsi, près de 12,4 milliards d'euros supplémentaires devraient être engagés au titre du bouclier tarifaire. La poursuite du dispositif de « remise à la pompe » participe à accroitre la dépense de 7,6 milliards d'euros. Les aides versées au profit des entreprises intensives accroissent les dépenses publiques de 3 milliards d'euros tandis que la revalorisation des prestations sociales et du point d'indice de la fonction publique entraine un surcoût pour les administrations publiques de près de 5,5 milliards d'euros .

Comme cela est indiqué supra , le coût total des mesures prises pour réduire les conséquences de l'inflation est estimé à 41 milliards d'euros en 2022 par le Gouvernement.

Au-delà des mesures prises pour lutter contre l'inflation, le rapporteur général observe que le montant de la charge de la dette augmente de 17,8 milliards d'euros par rapport à la prévision en loi de finances initiale (environ 28,4 milliards d'euros). Cette variation s'explique pour l'essentiel par les effets de l'inflation en France et en Europe sur le coût des obligations indexées.

En outre, environ 5,7 milliards d'euros de dépenses supplémentaires devraient finalement être engagées en 2022 dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de Covid-19.

La dépense primaire retraitée des mesures engagées pour la relance et le soutien lors de la crise sanitaire progresserait de 1,6 % en volume en 2022.

En conséquence, elle se situerait 3,9 points au-dessus des niveaux prévus en loi de programmation des finances publiques pour 2022 ce qui démontre que le Gouvernement - hors crise sanitaire - n'a pas su tenir ses engagement en matière de maitrise de la dépense publique.

Évolution des dépenses primaires en volume depuis 2017

(base 100 en 2017)

Source : calculs de la commission des finances d'après les documents budgétaires

C. LE DÉFICIT PUBLIC RESTE ÉVALUÉ À 5 % DU PIB ALIMENTANT UNE HAUSSE DE LA DETTE PUBLIQUE QUI S'ÉTABLIT À UN NIVEAU RECORD

Lors du dépôt de projet de loi de finances rectificative, la prévision de solde public devait rester stable par rapport à la loi de finances initiale et s'établir à 5 % du PIB.

Compte tenu de la faible variation de ce dernier en valeur - les pertes de croissance en volume sont compensées en valeur par la hausse des prix à la production - le déficit public devait se maintenir à environ 130 milliards d'euros.

Le déficit public s'améliore donc de près de 46 milliards d'euros par rapport à 2021 mais excède de près de 25 milliards d'euros le déficit constaté en 2019.

Décomposition du solde public depuis 2017

(en pourcentage du PIB pour le solde conjoncturel - en
point de PIB potentiel pour les autres composantes)

Source : calculs de la commission des finances d'après les documents budgétaires

La décomposition du solde montre que les administrations publiques auraient amélioré en 2022 le solde structurel d'environ 0,7 point de PIB potentiel.

Toutefois, d'après le Haut conseil des finances publiques, cette amélioration s'explique par le surcroit de recettes fiscales attendues en 2022.

À l'inverse, l'effort structurel qui traduit mieux l'effort des pouvoirs publics et mesure la différence d'augmentation des dépenses en volume par rapport à la croissance potentielle est légèrement négatif.

Du reste, la présentation du solde structurel à l'article liminaire du projet de loi de finances rectificative s'appuie sur la valeur du PIB potentiel inscrite en loi de programmation des finances publiques pour les années 2018-2022, laquelle est obsolète.

Ainsi, en retenant le scénario révisé de croissance potentielle retenu par le Gouvernement en loi de finances pour 2022, le déficit structurel serait en réalité supérieur d'un point de PIB.

La dette publique devrait s'établir à 111,9 points de PIB en 2022 en amélioration de 1,1 point par rapport à la prévision initiale et de 0,6 point par rapport à 2020.

Un tel niveau d'endettement correspond à une dette d'environ 2 930 milliards d'euros, en augmentation de 121 milliards d'euros par rapport à 2021.

L'évolution de l'endettement en points de PIB correspond à la somme de 3 facteurs cumulatifs :

- le niveau du déficit primaire qui s'élève à 3,2 % du PIB ;

- le différentiel entre la variation du taux d'intérêt de la dette et le taux de croissance du PIB (« l'effet boule de neige ») qui participe à réduire notre endettement de 3,4 % ;

- les flux de créances qui réduiraient notre endettement d'environ 0,4 point de PIB.

Si l'endettement public diminue en 2022, il devrait augmenter à nouveau à compter de 2023 et ne refluer qu'à compter de l'année 2026. D'après les premiers éléments transmis à la presse par le Gouvernement concernant le programme de stabilité.

En outre, il convient de noter que le taux apparent de la dette publique19 ( * ) et le niveau de la charge de la dette ont augmenté dans des proportions très importantes en 2021 et 2022 pour s'établir, respectivement, à 1,6 % et 1,8 %.

Évolution du taux apparent de la dette publique et
de la charge d'intérêt de la dette

(en pourcentage du PIB)

Source : calculs de la commission des finances d'après les documents budgétaires

Dans une publication récente 20 ( * ) , l'OFCE estime que la charge de la dette pourrait atteindre 2,3 % en 2027 soit plus de 60 milliards d'euros rapporté au PIB de l'année 2022.

Les conditions de financement de la France ont drastiquement changé et que les administrations publiques ne peuvent plus faire l'économie de maitriser leurs dépenses.


* 19 Le taux apparent de la dette publique mesure le rapport entre le montant de la charge de la dette au titre d'une année N et le stock de dette de l'année N-1.

* 20 OFCE - Policy Brief n°108 - Quelle trajectoire pour l'économie française au cours du prochain quinquennat - 21 juillet 2022.

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