Rapport n° 408 (2022-2023) de Mme Hélène CONWAY-MOURET , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 8 mars 2023

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N° 408

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 mars 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas ,

Par Mme Hélène CONWAY-MOURET,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Olivier Cigolotti, André Gattolin, Guillaume Gontard, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Philippe Paul, Cédric Perrin, Rachid Temal , vice-présidents ; Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, Isabelle Raimond-Pavero, M. Hugues Saury , secrétaires ; MM. François Bonneau, Gilbert Bouchet, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Édouard Courtial, Yves Détraigne, Mmes Catherine Dumas, Nicole Duranton, MM. Philippe Folliot, Bernard Fournier, Mme Sylvie Goy-Chavent, M. Jean-Pierre Grand, Mme Michelle Gréaume, MM. André Guiol, Ludovic Haye, Alain Houpert, Mme Gisèle Jourda, MM. Alain Joyandet, Jean-Louis Lagourgue, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Panunzi, François Patriat, Gérard Poadja, Stéphane Ravier, Gilbert Roger, Bruno Sido, Jean-Marc Todeschini, Mickaël Vallet, André Vallini, Yannick Vaugrenard .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

7 , 685 et T.A. 68

Sénat :

288 et 409 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

À la suite de l'Assemblée nationale, qui l'a adopté sans modification le 25 janvier 2023 en première lecture, le Sénat est saisi du projet de loi n° 288 (2022-2023) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas.

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure, a présenté ses conclusions sur ce texte à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées le 8 mars 2023, sous la présidence de M. Christian Cambon, président. À l'issue de cette réunion, la commission, suivant la proposition de la rapporteure, a adopté, sans modification, le projet de loi précité.

Conformément aux orientations du rapport d'information « Redonner tout son sens à l'examen parlementaire des traités » 1 ( * ) adopté le 18 décembre 2014 par la commission, celle-ci a autorisé la publication du présent rapport sous forme synthétique : le compte rendu de l'examen en commission qu'on pourra lire ci-après en tient lieu.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 8 mars 2023, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de Mme Hélène Conway-Mouret sur le projet de loi n° 288 (2022-2023) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas.

M. Christian Cambon, président . - Nous examinons à présent le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération en matière de défense et au statut de leurs forces sur les territoires caribéens et sud-américain de la République française et du Royaume des Pays-Bas, sur le rapport de notre collègue Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure. - Depuis 2017, les relations franco-néerlandaises se sont intensifiées dans le domaine de la défense. Cette dynamique est notamment portée par un contexte international où nos intérêts communs se rejoignent.

En juillet 2019, dans le rapport que nous avons présenté devant notre commission avec Ronan Le Gleut, nous avions souligné le fort potentiel de coopération avec les Pays-Bas, qui fut confirmé lors du déplacement à La Haye, effectué avec le président Cambon, où nous avions constaté à quel point les Pays-Bas étaient soucieux de conserver un équilibre avec leurs grands partenaires stratégiques, dont la France fait partie.

Dans la déclaration franco-néerlandaise du 31 août 2021, la France et les Pays-Bas ont plaidé en faveur d'une Europe résiliente et capable d'assumer davantage la responsabilité de sa sécurité et de sa défense, en allouant les ressources nécessaires à cet objectif. À cette fin, nos pays ont mis en avant leur détermination à travailler en faveur d'une boussole stratégique ambitieuse afin de fixer un haut niveau d'ambition en matière de sécurité et de défense. En outre, la France et les Pays-Bas se sont dits résolus à maintenir et à renforcer leur étroite concertation dans des régions présentant un intérêt stratégique commun, comme le Sahel, le Levant, le Golfe ou l'Indopacifique.

S'agissant des ressources consacrées à la défense, le budget des armées néerlandaises devrait croître de manière significative ; l'augmentation annoncée, de l'ordre de 40 %, permettrait d'atteindre l'objectif otanien des 2 % du produit intérieur brut d'ici 2024. Cette hausse des crédits aura naturellement des répercussions dans le domaine capacitaire ; la France a ainsi l'opportunité de développer un partenariat stratégique avec les Pays-Bas dans le domaine maritime. En effet, en octobre dernier, une déclaration conjointe tripartite portant sur les bâtiments de guerre des mines a été signée avec la Belgique, faisant suite au contrat remporté en mars 2019 par Naval Group pour la fourniture et la maintenance de douze chasseurs de mines aux marines néerlandaise et belge. Par ailleurs, Naval Group est candidat à l'appel d'offres lancé par la marine royale néerlandaise pour le remplacement de ses quatre sous-marins de type « Walrus » - la date d'attribution, initialement prévue en 2021, n'est pas encore connue.

Dans la déclaration conjointe franco-néerlandaise précitée, nos pays ont également émis le souhait d'approfondir leur coopération bilatérale et régionale pour faire face aux problèmes de sécurité, tant en Europe qu'en Amérique latine, tout en soulignant l'importance de leur coopération en matière de défense et entre leurs garde-côtes dans la région, s'agissant notamment de la lutte contre le trafic de stupéfiants.

Le présent accord est la traduction concrète de cette volonté politique, circonscrit aux territoires caribéens et à la Guyane. Parallèlement, un accord intergouvernemental relatif à la coopération sur les territoires métropolitains est en cours de négociation, de même qu'un accord-cadre de défense annoncé pour l'an prochain.

En juin 2018, le royaume a rejoint les membres fondateurs de l'Initiative européenne d'intervention (IEI), et se montre particulièrement actif dans la zone caribéenne où nous partageons des intérêts communs et connaissons une coopération opérationnelle dense. À titre d'illustration, les forces armées aux Antilles (FAA) ont accueilli l'an passé plusieurs dizaines de Mariners - l'équivalent de nos « Marsouins » - pour des entraînements et des exercices communs, et des détachements du 33 e régiment d'infanterie de marine se sont rendus à plusieurs reprises sur les îles néerlandaises qui accueillent également, chaque trimestre, des navires français en escale.

Pour mémoire, le royaume des Pays-Bas possède plusieurs territoires dans les Caraïbes : d'une part, Bonaire, Saba et Saint-Eustache qui sont trois communes à caractère spécial des Pays-Bas, qui ne font partie ni de l'espace Schengen ni de l'Union européenne - à l'instar de la Nouvelle-Calédonie - ; et d'autre part, trois États devenus autonomes depuis la dissolution de la fédération des Antilles néerlandaises en octobre 2010, mais qui ont gardé le souverain néerlandais comme chef d'État, à savoir Aruba, Curaçao et Saint-Martin. Comme vous le savez, l'île de Saint-Martin est partagée entre la partie française au nord, et la partie néerlandaise au sud ; le contentieux de souveraineté qui oppose nos deux pays est en passe d'être résolu grâce à un accord sur la délimitation de la frontière et le partage de la baie située à l'ouest de l'île, rendu possible par une inflexion de la position néerlandaise.

Nos pays partagent donc une vision convergente des opérations conduites dans cette région éloignée du continent européen, et dont la superficie est semblable à celle de la Méditerranée. La zone caribéenne est sujette aux catastrophes naturelles - on se souvient des dégâts causés par l'ouragan Irma en 2017 - ainsi qu'au narcotrafic, compte tenu de sa proximité avec l'Amérique latine. Dès lors, le besoin de coopération opérationnelle est réel et appelle le déploiement de moyens humains, navals et aériens.

J'en viens à présent au contenu de l'accord soumis à notre examen.

Cet accord poursuit deux objectifs : d'une part, régir et faciliter la coopération en matière de défense et de sécurité entre nos deux pays ; et d'autre part, préciser le statut des forces armées et des membres du personnel de chaque partie sur le territoire de l'autre, en garantissant un statut protecteur.

Quelque 3 600 personnels français, militaires et civils, sont déployés dans la région : 2 300 personnes composent les forces armées en Guyane (FAG), et 1 300 personnes composent les forces armées aux Antilles (FAA). Côté néerlandais, 900 personnes sont déployées sur place, pour l'essentiel des militaires et des garde-côtes. Naturellement, seuls les personnels civils et militaires appelés à se rendre sur le territoire de l'autre partie sont concernés par les stipulations de l'accord.

Le texte est de facture classique. Il renforce le cadre juridique de notre coopération militaire bilatérale ; à ce titre, il prévoit un champ volontairement large pour ne pas limiter cette coopération, déjà dense comme je l'indiquais précédemment - exercices amphibies, assistance humanitaire, échanges de militaires, etc.

En outre, l'accord régit les conditions d'entrée et de séjour sur le territoire de l'autre partie, le port de l'uniforme et des insignes militaires, ainsi que la détention, le port et l'utilisation des armes de service par les personnels de chaque partie. Par ailleurs, la France et les Pays-Bas reconnaissent, sur leur territoire, la validité des permis de conduire pour le maniement des véhicules militaires de l'autre partie.

Enfin, l'accord pose le principe de la compétence juridictionnelle de la partie d'accueil ; toutefois, en cas d'infraction d'un membre du personnel accomplie dans l'exercice de ses fonctions officielles, les autorités compétentes de la partie d'envoi exerceraient alors, par priorité, leur compétence juridictionnelle.

Pour conclure, cet instrument juridique s'inscrit dans une volonté politique affirmée de resserrement des liens avec notre partenaire néerlandais qui, comme nous, a des intérêts dans la zone caribéenne. Au-delà de la sécurité juridique qu'il confère à nos forces armées en mission sur le territoire néerlandais - et réciproquement -, le présent accord, qui traduit une évolution tout à fait positive de nos relations avec les Pays-Bas dans le domaine de la défense, constituera un jalon supplémentaire dans la construction d'une défense européenne grâce au volet consacré à la coopération bilatérale qui couvre un champ très large.

En conséquence, je préconise l'adoption de ce projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale le 25 janvier 2023. Son examen en séance publique au Sénat est prévu le mardi 21 mars prochain, selon la procédure d'examen simplifié, ce à quoi la conférence des présidents, de même que votre rapporteure, a souscrit.

M. Christian Cambon, président . - Il s'agit d'un accord important car, comme l'indiquait la rapporteure, Naval Group est en lice pour l'appel d'offres relatif à l'acquisition par les Pays-Bas de quatre sous-marins. D'après mes informations, la prise de décision dans ce dossier pourrait intervenir prochainement.

Notre commission pourrait d'ailleurs envisager un déplacement dans ce pays au titre de la coopération de défense franco-néerlandaise.

Mme Hélène Conway-Mouret, rapporteure . - Le Président de la République sera en visite officielle aux Pays-Bas le mois prochain. Les sujets de défense seront abordés à cette occasion.

Le projet de loi est adopté, à l'unanimité, sans modification.

Conformément aux orientations du rapport d'information n° 204 (2014-2015) qu'elle a adopté le 18 décembre 2014, la commission a autorisé la publication du présent rapport synthétique.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère des armées

• Capitaine de vaisseau Xavier Breitel , chef du bureau bilatéral Nord de l'état-major des armées

• Colonel Emmanuel Durville , chargé des relations avec le Parlement à l'état-major des armées

• Mme Audrey Strochlic , cheffe du bureau du droit international public général

Ministère de l'intérieur et des outre-mer

Mme Myriam Aflalo , cheffe de la mission du droit européen et international

Ministère de l'Europe et des affaires étrangères

• Mme Marion Hascoët , rédactrice Pays-Bas à la sous-direction de l'Europe occidentale et nordique

• M. Romain Couvert , rédacteur à la direction de la coopération de sécurité et de défense

• M. Rémi Thurlow , rédacteur à la direction de la coopération de sécurité et de défense

• M. Pierre Dousset , conseiller juridique à la mission des accords et traités


* 1 Rapport d'information n° 204 (2014-2015).

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