N° 770

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 28 juin 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, rejeté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021,

Par M. Jean-François HUSSON,
Rapporteur général,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

1094, 1270 et T.A. 124

Sénat :

683 (2022-2023)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Le présent texte relève d'un cas de procédure tout à fait nouveau.

Un premier projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 a déjà été déposé par le Gouvernement le 4 juillet 2022, dans des termes presque identiques à celui-ci (voir infra), mais, pour la première fois dans la Cinquième République1(*), il a été rejeté par le Parlement : si l'Assemblée nationale l'a adopté en première lecture le 13 juillet, le Sénat l'a rejeté le 19 juillet puis, après le désaccord constaté en commission mixte paritaire et une nouvelle lecture marquée par une nouvelle adoption par l'Assemblée nationale et un nouveau rejet par le Sénat, l'Assemblée nationale a finalement rejeté elle-même le texte en lecture définitive le 3 août 2022.

Le Gouvernement a donc fait le choix de présenter de nouveau le projet de loi de règlement de 2021.

Les dispositions portant constatation de l'exécution budgétaire et de l'arrêt des comptes sont identiques à celles de l'an dernier. Les deux textes se distinguent toutefois sur trois points2(*) :

- à l'article liminaire, certaines données ont été ajustées en prenant en compte les dernières publications de l'Insee ;

- à l'article 6, la disposition prévoyant que le solde n'est pas reporté sur certains comptes spéciaux a été supprimée, car elle n'avait plus de portée alors que les soldes ont d'ores et déjà été reportés en application de l'article 20 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;

- l'article 7, relatif à l'abandon de créances détenues sur la République fédérale de Somalie au titre de l'aide publique au développement, est absent du présent texte car cette disposition a été reprise à l'article 23 de la loi n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022.

Les deux textes étant identiques à l'exception des points mentionnés supra, le rapporteur général ne répètera pas ici les observations formulées dans l'exposé général de son rapport présenté l'an passé3(*), auquel il convient de se référer.

Il est toutefois utile de préciser les conséquences du rejet, l'an passé, du premier projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021. Ces éléments ont été présentés par la Cour des comptes dans son rapport sur le budget de l'État en 2022 et dans son rapport sur la certification des comptes de l'État en 2022. Ils ont également été précisés au rapporteur général par le Gouvernement.

La plupart des dispositions de la loi de règlement sont de simples constatations.

Certaines dispositions prévoient une approbation par le Parlement. C'est le cas du bilan et du compte de résultat de l'exercice 2021. Cette absence d'approbation n'a pas remis en cause l'opinion exprimée par la Cour des comptes pour l'exercice 2021, car elle a été donnée avant l'examen du texte par le Parlement et porte sur les comptes mis au point par l'administration, indépendamment de leur approbation ou non par la suite.

Les principales conséquences du rejet du texte, outre la non-adoption de l'article relatif à un abandon de créances mentionné précédemment, concernent deux dispositions juridiques du projet de loi de règlement qui appartiennent au domaine exclusif des lois de règlement et ne pouvaient donc pas être reprises dans un autre texte financier.

D'une part, à l'article 3, le solde des opérations de l'exercice 2021, en comptabilité générale, n'a pas pu être affecté au report à nouveau. En accord avec la Cour des comptes et le Conseil d'État, l'administration a ajouté une ligne nouvelle dans le tableau du compte général de l'État présentant le bilan de l'année 2022, qui est présenté dans le projet de loi de règlement pour 2022. Cette ligne, intitulée « Solde des opérations d'exercices antérieurs en attente d'affectation », contient le résultat de l'année 2021, soit - 142,1 milliards d'euros. Elle est susceptible d'être affectée au report à nouveau en cas d'adoption du présent projet de loi de règlement pour 2021 ; dans ce cas, une coordination entre les deux textes serait réalisée.

D'autre part, à l'article 6, le solde de tous les comptes spéciaux a dû être reporté, alors que le projet de loi de règlement prévoyait, comme chaque année, d'exonérer certains comptes spéciaux de ce report. L'article 20 de la LOLF prévoit en effet que le solde de l'ensemble des comptes spéciaux est reporté, sauf dérogation en loi de finances. Cette situation n'est pas jugée satisfaisante par l'administration, car le report du solde ne présente pas véritablement de sens pour les comptes concernés4(*). Le projet de loi de règlement pour 2022 prévoit donc de la régulariser en cumulant les non-reports pour les deux exercices.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE LIMINAIRE

Solde structurel et solde effectif de l'ensemble
des administrations publiques de l'année 2021

. Le présent article retrace l'exécution du solde structurel et du solde effectif des administrations publiques pour 2021. Le tableau d'exécution diffère de celui présenté à l'occasion du premier projet de loi de règlement pour 2021 examiné l'année précédente. Ces différences s'expliquent par la révision des comptes nationaux par l'INSEE au cours de l'année 2022.

L'article 8 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques5(*) prévoit que la loi de règlement comprend un article liminaire « présentant un tableau de synthèse retraçant le solde structurel et le solde effectif de l'ensemble des administrations publiques résultant de l'exécution de l'année à laquelle elle se rapporte ».

À l'occasion de l'examen du premier projet de loi de règlement pour 2021, le Gouvernement avait soumis à l'adoption du Parlement le tableau d'exécution suivant.

Article liminaire du premier projet de loi de règlement pour 2021

(en point de PIB)

 

Exécution 2021

LFI 2021 (prévision)

LPFP 2018-2022 (prévision)

Solde structurel (1)

- 4,4

- 3,8

- 1,2

Solde conjoncturel (2)

- 2,0

- 4,5

0,3

Mesures exceptionnelles et temporaires (3)

- 0,1

- 0,2

0,0

Solde effectif (1 + 2 + 3)

- 6,4

- 8,5

- 0,9

Note de lecture : l'écart entre le solde effectif et la somme de ses composantes s'explique par l'arrondi au dixième des différentes valeurs.

Source : commission des finances du sénat (d'après le premier projet de loi de règlement pour 2021)

À l'occasion du second projet de loi de règlement pour 2021, le Gouvernement soumet à l'adoption du Parlement le tableau suivant. L'estimation de solde est dégradée de 0,1 point de PIB.

Ceci s'explique par la révision des comptes nationaux par l'INSEE au cours de l'année 2023 qui a conduit à ré-estimer à la hausse le niveau du PIB de l'année 2021 par rapport à celui connu à l'été 2022.

Article liminaire du second projet de loi de règlement pour 2021

(en point de PIB)

 

Exécution 2021

LFI 2021 (prévision)

LPFP 2018-2022 (prévision)

Solde structurel (1)

- 4,4

- 3,8

- 1,2

Solde conjoncturel (2)

- 1,9

- 4,5

0,3

Mesures exceptionnelles et temporaires (3)

- 0,1

- 0,2

0,0

Solde effectif (1 + 2 + 3)

- 6,5

- 8,5

- 0,9

Note de lecture : l'écart entre le solde effectif et la somme de ses composantes s'explique par l'arrondi au dixième des différentes valeurs.

Source : commission des finances du sénat (d'après le second projet de loi de règlement pour 2021)

Les données concernant l'exécution du solde structurel et du solde effectif des administrations publiques pour 2021 ont fait l'objet d'une analyse détaillée dans le cadre de l'exposé général du rapport sur le premier projet de loi de règlement pour 2021, à laquelle le lecteur est invité à se reporter6(*).

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, la commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE PREMIER

Résultats du budget de l'année 2021

. Cet article arrête les résultats définitifs de l'exécution des lois de finances pour 2021.

Conformément au I de l'article 37 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001, le présent article « arrête le montant définitif des recettes et des dépenses du budget auquel elle se rapporte, ainsi que le résultat budgétaire qui en découle ».

Le I arrête le résultat budgétaire de l'État, hors opérations avec le Fonds monétaire international7(*), à la somme de - 170 739 441 421,20 euros.

Le II détaille le montant définitif des recettes et des dépenses du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux.

Le solde budgétaire résulte presque entièrement du montant des recettes fiscales, des recettes non fiscales et des dépenses du budget général.

Recettes et dépenses du budget général

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, à partir du projet de loi de règlement. FDC : fonds de concours. R&D : remboursements et dégrèvements. PSR : prélèvements sur recettes

L'analyse des principaux déterminants du solde budgétaire figure dans l'exposé général du rapport présenté par le rapporteur général sur le premier projet de loi de règlement pour l'année 20218(*).

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, la commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 2

Tableau de financement de l'année 2021

. Cet article retrace le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l'équilibre financier en 2021.

Le présent article arrête le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l'équilibre financier.

Le tableau de financement qui y figure arrête à 285,2 milliards d'euros le besoin de financement de l'État et décrit les ressources mobilisées pour y répondre.

Le besoin de financement résulte à titre principal, pour 118,3 milliards d'euros, de la nécessité de rembourser les titres de dette arrivant à échéance et, pour 170,7 milliards d'euros, du déficit de l'année.

La principale ressource mobilisée pour satisfaire le besoin de financement est l'émission de nouvelle dette à moyen et long terme, pour un montant de 260 milliards d'euros en 2021, identique au montant émis en 2020. L'encours des titres d'État à court terme diminue pour sa part de 6,2 milliards d'euros, alors qu'il avait augmenté de 54,7 milliards d'euros en 2020. Le complément du besoin de financement est donc comblé par la variation des dépôts des correspondants (+ 18,7 milliards d'euros) et les autres ressources de trésorerie (17,2 milliards d'euros), c'est-à-dire principalement les primes à l'émission.

L'exposé général du rapport présenté par le rapporteur général sur le premier projet de loi de règlement pour l'année 20219(*) comprend des éléments plus détaillés d'analyse du financement de l'État.

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, la commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 3

Résultat de l'exercice 2021 - Affectation au bilan
et approbation du bilan et de l'annexe

. Cet article approuve le compte de résultat de l'exercice, établi à partir des ressources et des charges constatées selon les règles de la comptabilité générale, affecte au bilan le résultat comptable de l'exercice et approuve le bilan après affectation ainsi que ses annexes.

Conformément au III de l'article 37 de la loi organique relative aux lois de finances, la loi de règlement approuve le compte de résultat de l'exercice, établi à partir des ressources et des charges constatées selon les règles de la comptabilité générale, affecte au bilan le résultat comptable de l'exercice et approuve le bilan après affectation, ainsi que son annexe. Le contenu de chacun de ces états et documents est précisé par la norme n° 1 « Les états financiers » du Recueil des normes comptables de l'État.

Le I approuve le résultat comptable de l'État, qui est arrêté à -142,1 milliards d'euros, soit la différence entre les produits régaliens nets, qui s'élèvent à 290,4 milliards d'euros, et les charges nettes, d'un montant de 432,5 milliards d'euros.

Le II affecte le résultat comptable de l'exercice 2020 au bilan à la ligne « Report des exercices antérieurs ».

Le III établit le bilan, qui se compose d'un actif net total de 1 223,7 milliards d'euros et d'un passif, hors situation nette, de 2 881,4 milliards d'euros. La situation nette s'établit donc à - 1 657,6 milliards d'euros.

La ligne « report des exercices antérieurs » vaut - 1 916,3 milliards d'euros dans le compte général de l'État. Par affectation du résultat comptable, soit - 142,1 milliards d'euros, elle prend la valeur de - 2 058,4 milliards d'euros en application du présent III.

Pour mémoire, le rejet du premier projet de loi de règlement pour 2021, lors de son examen à l'été 2022, ayant empêché d'affecter le résultat comptable de 2021 au report à nouveau, l'administration a décidé de rajouter, dans le compte de résultat 2022 approuvé par le projet de loi de règlement pour 2022, une ligne nouvelle intitulée « Solde des opérations d'exercices antérieurs en attente d'affectation », qui comprend ce résultat comptable non affecté. Une coordination entre les deux textes pourrait donc être nécessaire s'ils étaient tous les deux adoptés.

Le IV approuve l'annexe du compte général de l'État de l'exercice, qui consiste en un commentaire détaillé de chacun des postes du bilan et du compte de résultat, ainsi qu'une présentation des engagements hors bilan et des règles et méthodes d'évaluation comptables10(*).

L'exposé général du rapport présenté par le rapporteur général sur le premier projet de loi de règlement pour l'année 202111(*) contient des développements plus détaillés sur les comptes de l'État présentés en comptabilité générale.

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, votre commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 4

Budget général - Dispositions relatives aux autorisations d'engagement et aux crédits de paiement

. Cet article ajuste et arrête, pour le budget général, le montant par mission et par programme des autorisations d'engagement consommées et des dépenses réalisées au titre de l'année 2021.

La loi organique relative aux lois de finances (LOLF) prévoit, au 2° du IV de son article 37, que la loi de règlement ouvre, pour chaque programme ou dotation concerné, les crédits nécessaires pour régulariser les dépassements constatés et procède à l'annulation des crédits n'ayant été ni consommés ni reportés.

Le I du présent article arrête le montant des autorisations d'engagement consommées sur le budget général à un montant de 608,4 milliards d'euros, ouvre des autorisations d'engagement complémentaires à hauteur de 0,6 milliard d'euros et annule 6,4 milliards d'euros d'autorisations d'engagement non consommées et non reportées.

Le II du présent article arrête le montant des dépenses relatives au budget général à un montant de 540,7 milliards d'euros, ouvre des crédits de paiement complémentaires à hauteur de 0,6 milliard d'euros et annule 2,4 milliards d'euros de crédits de paiement non consommés et non reportés.

Les autorisations d'engagement et crédits de paiement complémentaires ouverts sont uniquement imputés sur des programmes dotés de crédits évaluatifs, à savoir les programmes 355 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » (+ 272,4 millions d'euros) et 201 « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » (+ 328,1 millions d'euros).

Les dépenses exécutées sur les missions du budget général sont analysées dans l'exposé général du rapport présenté par le rapporteur général sur le premier projet de loi de règlement pour l'année 202112(*).

Le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne ainsi que l'ensemble des missions font également l'objet d'une analyse détaillée des rapporteurs spéciaux dans les 33 annexes du tome II de ce rapport13(*).

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, la commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 5

Budgets annexes - Dispositions relatives aux autorisations d'engagement et aux crédits de paiement

. Cet article ajuste et arrête, pour les budgets annexes, le montant par mission et par programme des autorisations d'engagement consommées et les résultats de ces budgets au titre de l'année 2021.

Le I du présent article ajuste et arrête, pour les budgets annexes, les montants définitifs, par mission et par programme, des autorisations d'engagement consommées, soit 2 230,8 millions d'euros pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et 135,5 millions d'euros pour le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

Le montant des annulations d'autorisations d'engagement non engagées et non reportées est de 11,9 millions d'euros pour le premier budget annexe et de 14,1 millions d'euros pour le second.

Le II ajuste et arrête les dépenses et les recettes des deux budgets annexes, soit :

- 2 213,6 millions d'euros de dépenses et 2 140,6 millions d'euros de recettes pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », 12,7 millions d'euros de crédits non consommés et non reportés étant annulés ;

- 138,6 millions d'euros de dépenses et 204,1 millions d'euros de recettes pour le budget « Publications officielles et information administrative », 10,6 millions d'euros de crédits non consommés et non reportés étant annulés.

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, la commission vous propose de ne pas adopter cet article.

ARTICLE 6

Comptes spéciaux - Dispositions relatives aux autorisations d'engagement, aux crédits de paiement et aux découverts autorisés.
Affectation des soldes

. Cet article récapitule le montant des ouvertures complémentaires et annulations de crédits de l'exercice 2021, s'agissant des comptes spéciaux. Il arrête le solde de ces derniers au 31 décembre 2021 et, sauf exceptions, le reporte à la gestion 2022.

Le I et le II du présent article ajustent et arrêtent respectivement le montant des autorisations d'engagement et des crédits de paiement consommés sur les comptes spéciaux.

Les comptes d'affectation spéciale ont consommé 67,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 68,3 milliards d'euros en crédits de paiement, pour des recettes de 67,9 milliards d'euros, tandis que sont annulés des crédits non consommés et non reportés de 4,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Les comptes de concours financiers ont consommé 124,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 123,9 milliards d'euros en crédits de paiement, pour des recettes de 124,6 milliards d'euros, tandis que sont annulés des crédits non consommés et non reportés à hauteur de 4,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 4,2 milliards d'euros en crédits de paiement.

Les comptes de commerce ont des dépenses de 44,7 milliards d'euros et des recettes de 45,1 milliards d'euros. Les comptes d'opérations monétaires ont des dépenses de 1,6 milliards d'euros et des recettes de 3,2 milliards d'euros. Cette ligne supporte en outre une majoration du découvert de 17,3 milliards d'euros correspondant, comme chaque année, à la quote-part de la France au capital du Fonds monétaire international (FMI) et des prêts effectués dans le cadre de cet organisme.

Le III arrête les soldes des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2022, à la date du 31 décembre 2021, qui sont reportés à la gestion 2022 par le IV.

Sur ce point le présent projet de loi de règlement diffère de celui qui a été présenté et rejeté à l'été 2022.

En effet, comme chaque année, le premier projet de loi de règlement pour l'année 2021 exonérait de reports les soldes de quatre comptes spéciaux. Le rejet du texte a entraîné l'application de l'article 20 de la LOLF, aux termes duquel « sauf dispositions contraires prévues par une loi de finances, le solde de chaque compte spécial est reporté sur l'année suivante ». Une exonération de reports n'ayant désormais plus de sens, le présent projet de loi de règlement ne comprend plus cette disposition.

En revanche, le projet de loi de règlement pour 2022 propose de procéder aux non-reports des soldes des mêmes comptes en cumulant les non-reports pour les deux exercices.

*

* *

L'Assemblée nationale n'ayant pas adopté le présent projet de loi, elle n'a pas adopté cet article.

Décision de la commission : en conséquence de sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter l'ensemble du présent projet de loi, la commission vous propose de ne pas adopter cet article.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE M. GABRIEL ATTAL, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DU MINISTRE DE L'ÉCONOMIE, DES FINANCES ET DE LA SOUVERAINETÉ INDUSTRIELLE ET NUMÉRIQUE, CHARGÉ DES COMPTES PUBLICS (2 MAI 2023)

Réunie le mardi 2 mai 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 et le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022.

M. Claude Raynal, président. - Monsieur le ministre, alors que nous débattrons demain en séance, à la demande de notre commission, de la programmation de nos finances publiques pour les années 2023 à 2027, il nous est apparu nécessaire de vous entendre sur l'exécution des comptes de l'année 2022. Le Gouvernement a en effet présenté en conseil des ministres le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes (PLR) de l'année 2022, en même temps qu'il redéposait un projet de loi sur l'exécution des comptes de l'année 2021, après le rejet de ce dernier par le Parlement l'an passé.

Nous attendons donc que vous nous indiquiez quels ont été les résultats de l'année passée pour le budget de l'État et que vous précisiez dans quelle mesure ils correspondent aux estimations de recettes présentées par le Gouvernement et à l'autorisation parlementaire en dépenses qui figurait dans le collectif budgétaire de fin d'année. Les lois de finances ne sont en effet pas un exercice de pure prévision ; elles doivent être sincères au regard des informations dont dispose le Gouvernement lorsqu'elles sont présentées. Notre commission, appuyée en cela par la Cour des comptes, a déjà fait des observations l'an passé sur ce que l'on peut qualifier parfois de « cavalerie budgétaire ».

Par ailleurs, j'imagine que vous nous indiquerez quelles difficultés concrètes ont pu résulter, depuis l'été dernier, de la non-adoption du projet de loi de règlement pour 2021 et quelle motivation vous conduit à présenter de nouveau ce texte pour obtenir cette fois son approbation par le Parlement.

M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. - Le Gouvernement présente en effet à nouveau le projet de loi de règlement pour l'année 2021, qui a été rejeté par l'Assemblée nationale le 3 août dernier. Lors d'une audition récente, j'ai indiqué que, à mon sens, voter, ou du moins, ne pas s'opposer à l'adoption d'un projet de loi de règlement ne signifie pas que l'on donne un satisfecit au Gouvernement pour sa conduite des affaires de la Nation pendant l'année concernée, mais simplement que l'on prend acte de l'exécution du budget.

En tant qu'élu local, je crois n'avoir jamais voté contre un compte administratif présentant les résultats de l'année antérieure. Le projet de loi de règlement est une photographie du passé, or on ne peut pas changer celui-ci. Quoi qu'il en soit, ces remarques ne concernent pas le Sénat, qui avait, lui, voté ce projet de loi de règlement.

Nous présentons également le projet de loi de règlement pour 2022, une année marquée par le retour d'une forte inflation sur le plan mondial, qui a eu des conséquences importantes sur les conditions dans lesquelles l'État finance son endettement.

Permettez-moi tout d'abord d'indiquer les quelques modifications qui ont été apportées au projet de loi de règlement pour 2021.

L'article liminaire a été actualisé, à la suite de la communication par l'Insee, le 28 mars dernier, des comptes pour 2021, qui a porté le déficit de 2021 de -6,4 % à -6,5 %. Cette actualisation est notamment due à la requalification d'Action Logement en administration publique.

Par ailleurs, à l'article 6, des dispositions permettant de ne pas reporter certains soldes de comptes spéciaux ont été supprimées, puisque conformément à l'article 21 de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), l'intégralité de ces soldes a été reportée en 2022.

Enfin, à l'article 7, les dispositions ayant trait à un abandon de créances détenues sur la Somalie ont été supprimées, car elles ont été reprises dans la deuxième loi de finances rectificative pour 2022.

Le Conseil constitutionnel a jugé que la présentation et la mise au vote du projet de loi de règlement pour 2021 suffisaient pour permettre l'adoption d'un budget pour les années suivantes, et la Cour des comptes a certifié les comptes.

Outre certains points techniques, notamment des reports de soldes sur des comptes spéciaux, le rejet du PLR pour 2021 n'a donc pas eu d'impact sur l'adoption du projet de loi de finances (PLF) suivant ni sur la certification des comptes, ce qui, du reste, pourrait nous conduire à nous interroger sur l'utilité de conserver cette procédure dans la loi organique, qui pourrait faire l'objet d'un débat.

Nous présentons toutefois ce texte une nouvelle fois par souci de sincérité, au regard notamment des évolutions marginales qui sont intervenues depuis sa première présentation. En tout état de cause, je ne désespère pas que ce PLR soit adopté puisqu'il ne s'agit que d'une photographie.

J'en viens au PLR pour l'année 2022, qui peut être considérée comme une année de transition entre la crise sanitaire et la crise résultant de l'inflation. Pour faire face à l'une comme à l'autre, le Gouvernement a fait le choix de protéger les entreprises et les ménages, tout en assurant la maîtrise de nos finances publiques.

Je ne dis pas que tout va bien, mais je constate que le pays a tenu bon, grâce notamment aux millions de Français qui travaillent et aux chefs d'entreprise qui embauchent et qui investissent.

Avant de répondre à vos questions, permettez-moi de tirer quelques enseignements de l'exécution budgétaire de l'année dernière.

Premièrement, la politique économique qui a été conduite a protégé efficacement les Français des effets de la crise de l'inflation. Les boucliers gaz et électricité ont en effet permis de préserver la croissance économique, et partant, le dynamisme des recettes, qui est le principal facteur de l'amélioration de notre déficit public.

Les recettes ont progressé de 7,3 % en 2022, après une progression de 8,4 % en 2021. Cette croissance repose principalement sur la progression de l'impôt sur les sociétés, dont les recettes ont augmenté de 15,8 milliards d'euros par rapport à l'an dernier, portant leur montant total à 62,1 milliards d'euros, ce qui constitue un record, alors même que nous avons diminué le taux d'imposition de 33 à 25 %.

Les recettes d'impôt sur le revenu ont également augmenté de 10,3 milliards d'euros, notamment grâce au dynamisme de la masse salariale, et les recettes de la TVA ont augmenté du fait de l'inflation, à hauteur de 5,3 milliards d'euros.

Comme lors de l'exécution précédente, ce dynamisme des recettes a largement contribué à la baisse de notre déficit public, qui est passé de 6,5 % du PIB en 2021, à 4,7 % en 2022.

Dans une certaine mesure, les choix économiques que nous avons faits se sont révélés vertueux d'un point de vue budgétaire, puisqu'ils ont permis d'augmenter les recettes.

Comme pendant la crise covid, nous avons fait le choix de la protection tout en poursuivant le redressement des finances publiques, conformément aux objectifs que nous nous sommes fixés pour assurer le retour du déficit à un niveau inférieur à 3 % en 2027.

Pour autant - c'est le deuxième enseignement -, le solde des administrations publiques demeure très dégradé, précisément parce que nous avons consacré des moyens considérables pour casser cette spirale inflationniste. Pour les années 2021 et 2022, nous avons débloqué 34,5 milliards d'euros nets - dont je défalque les recettes de contribution au service public de l'électricité (CSPE) et de contribution sur la rente inframarginale des producteurs d'électricité (CRI) - pour lutter contre l'inflation, au travers principalement des boucliers énergie. Ce montant est certes considérable, mais le coût des boucliers reste moins élevé que celui des deux points d'inflation supplémentaires qu'ils nous ont épargnés. Nous assumons donc pleinement ce choix.

Nous devons impérativement tenir nos objectifs de redressement des finances publiques et enclencher le désendettement de la France à l'horizon 2027, comme nous nous y sommes engagés. J'ai conscience que le défi est de taille, et que les prochaines marches vers la réduction du déficit public à 3 % du PIB à l'horizon 2027 seront plus difficiles à franchir, notamment parce que l'environnement économique n'est plus le même.

En 2022, nous avons été portés par une croissance de 2,6 %, alors que celle-ci s'établira cette année autour de 1 %, dans un contexte de ralentissement mondial. En conséquence, notre déficit devrait cette année rester au même niveau que l'année dernière ou s'établir légèrement au-dessus, tandis que l'endettement public devrait continuer à diminuer.

Le défi est de taille, mais je sais que nous pouvons y arriver grâce à une stratégie qui consiste tout d'abord à continuer à substituer des mécanismes ciblés à la logique du « quoi qu'il en coûte » et aux dispositifs généraux qu'elle emporte.

Ce n'est pas toujours facile, mais nous avons commencé à le faire l'an dernier, quand nous avons remplacé la ristourne générale sur le carburant, qui a coûté 8 milliards d'euros sur l'année 2022, par une indemnité carburant ciblée sur les travailleurs les plus modestes, au titre de laquelle 1 milliard d'euros ont été budgétés.

Nous devrons également réaliser des économies en 2024 et les années suivantes. Nous dépensons trop dans certains secteurs, sans toujours obtenir les résultats escomptés. Un pays qui prend le chemin du plein emploi peut-il, par exemple, se permettre de garder le même niveau de dépenses que lorsqu'il croulait sous le chômage de masse ? Non, c'est pourquoi le Gouvernement travaille actuellement à la réduction des dépenses liées à l'emploi.

De même, nous devons reconsidérer certaines dépenses « brunes », notamment fiscales, qui ne sont plus en ligne avec notre ambition écologique et ne démontrent plus leur efficacité.

Enfin, de manière transversale, nous continuerons à maîtriser les dépenses et à compter chaque euro de chaque budget pour faire en sorte que la dépense publique augmente moins vite que sa tendance naturelle. La Première ministre a adressé un courrier à l'ensemble des membres du Gouvernement leur demandant d'identifier 5 % de marge de manoeuvre dans le budget de leur ministère afin de préparer les travaux budgétaires pour 2024 et les années suivantes.

Comme l'année dernière, je souhaite que l'ensemble des groupes politiques représentés au Parlement soient associés à cette réflexion, et plus largement, au processus d'élaboration de la prochaine loi de finances. C'est la raison pour laquelle je vous proposerai de reprendre l'exercice des dialogues de Bercy, mais cette fois dès l'été. Le Gouvernement souhaite en effet aller vers davantage de coconstruction, ce qui suppose de nous laisser davantage de temps.

M. Claude Raynal, président. - Monsieur le ministre, je tiens à préciser que Sénat n'a pas voté la loi de règlement pour 2021. Nous entendons toutefois vos encouragements !

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Vous prônez la coconstruction, tout en faisant un appel à la consultation publique afin de savoir ce que les Français attendent de l'utilisation de l'impôt. Il sera sans doute difficile de concilier tout cela...

Une nouvelle fois, l'exécution budgétaire est très éloignée de la prévision. Alors que le projet de loi de finances rectificative (PLFR) de décembre 2022 prévoyait des recettes fiscales nettes de 315,8 milliards d'euros, celles-ci se sont finalement élevées à 323,3 milliards d'euros. La Cour des comptes souligne que ces écarts, devenus habituels depuis quelques années, ne s'expliquent pas par des événements exceptionnels. Quelles sont les raisons des difficultés que rencontre désormais le ministère du budget à prévoir les recettes fiscales ? Que comptez-vous mettre en oeuvre pour améliorer ces prévisions ?

S'agissant des dépenses, le budget de 2022 est une nouvelle fois marqué par un écart préoccupant entre les crédits approuvés par la loi de finances initiale et les crédits effectivement mis à la disposition des ministres. Alors que la loi de finances initiale (LFI) pour 2022 avait ouvert 392 milliards d'euros de crédits hors remboursements et dégrèvements, ces derniers ont été portés à 440 milliards d'euros au fil des collectifs budgétaires, auxquels se sont ajoutés 23 milliards d'euros via les reports de crédits. Finalement, les dépenses exécutées se sont élevées à 446 milliards d'euros, si bien que les reports n'ont été que peu utilisés et auraient pu être évités. Malgré ce constat, la pratique se poursuit, puisque 17 milliards d'euros ont à nouveau été reportés de 2022 à 2023.

La loi de finances initiale ne donne donc désormais qu'une vision imprécise de la réalité du budget, cette « stratégie du flou » réduisant d'autant la portée de l'autorisation parlementaire. Pourquoi ne pas mettre fin à cette pratique des reports massifs de crédits et revenir à des montants raisonnables ?

J'en viens à l'exécution du filet de sécurité. Au regard des deux premiers critères retenus - une épargne brute au 31 décembre 2021 inférieure à 22 % des recettes réelles de fonctionnement et un potentiel financier ou fiscal inférieur au double de la moyenne de la strate - 18 521 communes et 944 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) étaient éligibles au filet de sécurité, soit respectivement 53 % et 75 % des collectivités concernées. Compte tenu des dernières données en cours de finalisation sur les comptes de gestion 2022, quelle est, à date, votre estimation du nombre de communes et d'EPCI qui remplissent le troisième critère de baisse d'épargne brute de 25 % entre 2021 et 2022 ?

Sur les 430 millions d'euros ouverts en loi de finances rectificative (LFR) pour le paiement des acomptes, 106 millions d'euros ont été consommés. Combien de communes et d'EPCI ont-ils finalement demandé le versement de l'acompte ? Quel était le montant moyen de celui-ci ?

La dotation doit être versée au plus tard le 30 octobre 2023. Avez-vous déjà reçu des demandes ? Dans l'affirmative, combien de communes et d'EPCI ont-ils déposé cette demande à partir de leurs données financières définitives ?

Enfin, pouvez-vous faire un point sur les versements attendus de la part de l'Union européenne au titre de la mise en oeuvre du plan de relance ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. - Le montant de certaines recettes a effectivement été supérieur à celui des prévisions, y compris dans la dernière LFR de 2022. Nous avons enregistré des recettes supérieures de 3,2 milliards d'euros pour l'impôt sur les sociétés, de 1,6 milliard d'euros pour l'impôt sur le revenu et une moins-value de 1,9 milliard d'euros pour la TVA, qui est plus que compensée par la correction en droits constatés, d'un montant de 2,9 milliards d'euros.

Si nous cherchons toujours à être au plus juste, c'est plutôt une bonne nouvelle d'être surpris dans ce sens. Pour 2023, nous avons maintenu un objectif de croissance ambitieux, autour de 1 %, si bien que nous devrions être plus en ligne avec l'exécution.

Les reports sont certes toujours massifs, puisqu'ils s'élèvent à environ 18 milliards d'euros, mais ils sont moindres que l'année précédente, où ils avaient atteint le montant de 23 milliards d'euros, quand ils sont d'ordinaire de 3 à 5 milliards d'euros environ. Il est vrai que nous avons visé large et ouvert beaucoup de crédits, notamment au titre du guichet pour les entreprises « énergo-intensives », pour lequel une partie importante des crédits n'ont pas été consommés en 2022.

De même, les crédits ouverts pour un certain nombre de dispositifs, dont certains à la demande des parlementaires, comme les aides pour le fioul et le bois, n'ont pas été consommés en 2022 et sont donc reportés en 2023.

Par ailleurs, des restes à payer du plan de relance, notamment liés à des travaux de rénovation énergétique, ont pris un peu de retard.

Pour ce qui concerne les dépenses qui ne sont pas liées à la crise, l'un des principaux facteurs de report est le plan d'investissement dans les compétences (PIC). La part régionale du PIC, dont le montant est d'environ 1,9 milliard d'euros, a fait l'objet d'importants reports. Ainsi, près de 800 millions d'euros n'ont pas été décaissés par la région d'Île-de-France.

J'en viens au filet de sécurité. Au 31 mars dernier, un grand nombre de collectivités n'avaient pas encore rendu leurs comptes de gestion pour 2022, si bien que nous ne disposerons d'une première estimation fine qu'au mois de juin prochain. Je ne peux donc pas m'avancer sur des chiffres précis, mais le nombre de communes et d'EPCI éligibles au filet de sécurité pour l'année 2022 serait a priori supérieur à celui des collectivités ayant déjà reçu un acompte à ce titre. Si ce nombre était finalement inférieur, cela signifierait que moins de communes et d'EPCI rentreraient dans le cadre du dispositif voté par le Parlement, ce qui serait plutôt une bonne nouvelle.

En tout état de cause, je vous transmettrai ces estimations dès que j'en disposerai.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Vous pourriez déjà nous transmettre les données au 31 mars ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. - Comme je l'indiquais, nous manquions encore, au 31 mars, de nombreuses données, mais ce dont nous disposions semblait indiquer que les communes et EPCI éligibles au filet de sécurité seraient plus nombreux que les 4 100 collectivités auxquelles un acompte a été versé en 2022.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Il ne faudrait pas nous faire le coup à chaque fois !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. - En ce qui concerne le plan de relance, la France pourra recevoir jusqu'à 40,3 milliards d'euros de subventions dans le cadre du plan national de relance et de résilience (PNRR), dont 37,5 milliards de subventions au titre de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) et 2,8 milliards d'euros de subventions au titre du programme REPowerEU. Depuis l'adoption du PNRR français en 2021, la France a reçu deux versements, le premier de 5,1 milliards d'euros en août 2021 et le second de 7,4 milliards d'euros en mars 2022 à la suite du dépôt de la première demande de paiement en novembre 2021, soit un montant total de 12,5 milliards d'euros.

M. Jérôme Bascher. - De mémoire, il me semble que, lors du vote du PLR pour 2021, le groupe Les Républicains s'était abstenu. Si le PLR est une photographie, vous avez été pris en excès de report, monsieur le ministre, car vous n'avez pas respecté la Lolf. Bis repetita non placent. En prévoyant une épargne de précaution dans les lois de finances, en sus de la réserve de précaution qui est déjà prévue par la loi organique, vous contrevenez à l'esprit de cette dernière. S'il doit y avoir des ajustements en cours d'année, ces derniers doivent être votés dans le cadre de lois de finances rectificatives.

En cela, les projets de loi de règlement que vous nous présentez sont des photographies de vos excès de pouvoir. Je vous demande d'en prendre acte.

Mme Isabelle Briquet. - Le PLR pour 2021 que vous nous présentez comporte-t-il des évolutions qui permettront son adoption ?

Je note à mon tour des reports de crédits importants dans le PLR pour 2022. Est-il envisagé de limiter cette pratique qui nuit à la lisibilité des comptes, puisque l'amélioration du solde repose grandement sur ces reports et non sur des économies ?

Comptez-vous nous présenter une nouvelle loi de programmation des finances publiques (LPFP) ?

En ce qui concerne le filet de sécurité, il serait intéressant de connaître le nombre de communes qui doivent rembourser l'acompte qui leur a été versé parce qu'elles ne rentrent plus dans les critères. Certaines d'entre elles se trouvent de ce fait en difficulté. Cette situation est-elle due à une évolution des critères ou à une précipitation à proposer aux collectivités de bénéficier de ces acomptes ?

M. Stéphane Sautarel. - Je crains moi aussi que des collectivités ne se trouvent en difficulté du fait du critère relatif à l'épargne brute, qui méconnaît le haut degré de responsabilité dont les collectivités ont fait preuve, et que, de ce fait, le filet de sécurité relève davantage de l'effet d'annonce que du véritable soutien.

Au regard des résultats favorables constatés dans ce projet de loi de règlement pour 2022, avez-vous l'intention d'accélérer le désendettement ?

En dépit de la volonté affichée de sortir du « quoi qu'il en coûte », j'estime enfin que l'objectif de réduction du déficit et de l'endettement par une meilleure maîtrise de la dépense n'est guère engagé dans le projet de loi de règlement pour 2022.

M. Claude Raynal, président. - Vous avez indiqué que la ristourne généralisée sur le carburant avait coûté 8 milliards d'euros. Je crois que l'on peut dire que l'instauration de ce dispositif n'était pas une très bonne idée. En dépit de l'accord dont il a fait l'objet avec les LR de l'Assemblée nationale, il n'a d'ailleurs pas reçu beaucoup de soutien au Sénat. En effet, non seulement il paraît un peu dépassé de financer le carburant aujourd'hui, mais il aurait été plus judicieux de cibler les publics qui avaient le plus besoin d'être aidés.

Vous vous êtes par ailleurs interrogé sur le bien-fondé des lois de règlement. Je rappelle que dans le cadre de la dernière réforme de la Lolf, l'option de ne plus y recourir n'a pas été retenue, bien au contraire. La loi de règlement a d'ailleurs été renommée à cette occasion loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année.

Pouvez-vous nous indiquer si un décret d'avance ou une loi de finances rectificative pourrait nous être présenté d'ici à l'été ? Le ministre des armées a en effet indiqué dans la presse qu'une dépense supplémentaire de 1,5 milliard d'euros serait nécessaire au titre de 2023, en évoquant un « rectificatif budgétaire » pour le budget des armées, et l'inflation pourrait être à l'origine d'autres demandes.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. - La ristourne sur le carburant était-elle une erreur ? Nous avons toujours assumé le caractère temporaire de cette mesure, que, pour ma part, je ne regrette pas. J'observe que les dispositifs ciblés suscitent le ressentiment d'une partie des Français qui travaillent et qui ne bénéficient pas de ces aides, alors que d'autres Français qui ne travaillent pas en bénéficient. La ristourne a permis de leur donner un coup de pouce, y compris à ces Français qui peuvent être en colère.

De même, il nous a semblé plus opportun de mettre en oeuvre le trimestre anti-inflation pour tous les consommateurs qui souhaitent en bénéficier plutôt que des aides ciblées ou des chèques.

Je ne préconise pas la suppression des projets de loi de règlement. Je constate simplement que lorsque les oppositions ne souhaitent pas leur adoption, quand bien même on ne peut rien changer à ces textes qui ne font que prendre acte de l'exécution, leur rejet ne fait obstacle ni à la présentation du PLF suivant ni à la certification des comptes.

Pour vous répondre, madame Briquet, le PLR pour 2021 ne comporte pas de modifications susceptibles de faire changer le vote, tout simplement parce qu'on ne peut pas changer le passé.

Monsieur Bascher, j'estime qu'il est de bonne gestion, dans un moment de crise, de calibrer des dispositifs pour aider les différents publics qui ont besoin de soutien, même si - je le répète - notre objectif est de diminuer les reports.

En ce qui concerne la LPFP, dont je rappelle qu'elle a bien été adoptée par le Sénat, même si votre assemblée avait revu le projet du Gouvernement, la Première ministre a annoncé dans sa feuille de route qu'un nouveau projet serait présenté en juillet. Pour vous répondre, monsieur Sautarel, nous avons revu la trajectoire dans le cadre du programme de stabilité.

Nous accélérons le rythme de retour sous la barre des 3 % de déficit, tout comme le rythme de désendettement : la LPFP prévoyait un déficit à 2,9 % en 2027, nous passons à 2,7 %, et nous visons une diminution du ratio dette/produit intérieur brut dès 2026. La LPFP sera bien présentée à nouveau.

Concernant le filet de sécurité de 2022 pour les collectivités, certaines d'entre elles ont reçu un acompte, alors que leur perte de capacité d'autofinancement a finalement été moins importante que celle qui a été retenue pour bénéficier de ce filet de sécurité. Nous aurons les chiffres exacts à disposition en juin. Sur 80 % des comptes de gestion remontés, 4 838 collectivités peuvent bénéficier du filet de sécurité, tandis que 4 178 collectivités ont reçu un acompte à la fin de 2022.

Les critères ont été décidés par le Parlement : le dispositif a été fixé par votre collègue députée socialiste Mme Pires Beaune, il a été adopté à l'unanimité des groupes de l'Assemblée nationale, puis a été parfait au Sénat, grâce aux travaux de la majorité sénatoriale et de l'ensemble des groupes. Le critère de perte de 25 % de capacité d'autofinancement a ainsi été retenu pour être éligible au filet de sécurité. Finalement, si moins de communes sont éligibles, c'est que moins de communes ont acté une perte de capacité d'autofinancement supérieure à 25 %, ce qui est plutôt une bonne nouvelle.

J'ai demandé aux directions départementales des finances publiques d'attendre de savoir si les communes ayant reçu un acompte en 2022, sans être finalement éligibles au filet de sécurité pour 2022, y seront éligibles en 2023 avant d'avoir à rembourser. Les critères ont été revus, car le critère de perte de capacité d'autofinancement est désormais de 15 %. Notre objectif n'est pas de déstabiliser les collectivités locales. Nous y verrons plus clair en juin prochain.

M. Claude Raynal, président. - Avant que vous ne me répondiez sur le décret d'avance, je donne la parole à M. Segouin.

M. Vincent Segouin. - Ma première question est autant destinée au ministre qu'au Président de la commission. Vous nous avez dit, dans votre démonstration, que la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés (IS) entraîne une hausse des recettes au titre de ce même impôt... est-ce à dire que trop d'impôt tue l'impôt ?

Ma seconde question porte sur le chèque carburant : son coût aurait été de 8 milliards d'euros, mais quelles sont les recettes réelles pour l'État liées à l'augmentation des prix des carburants ?

M. Claude Raynal, président. - Trop d'impôt tue l'impôt ? Je précise que j'avais voté la baisse à 25 % du taux de l'IS, sous François Hollande, selon le principe suivant : ramener le taux d'imposition au niveau de la moyenne européenne.

Baisser les impôts fait-il que l'économie se porte mieux et que les recettes fiscales augmentent ? Le sujet mériterait d'être étudié de près. Inflation prise en compte, les recettes sont en fait similaires à celles d'il y a dix ans, quand le taux d'IS était de 33 %. Si nous voulions montrer l'intérêt de la baisse du taux d'IS, il faudrait attendre quelques années de plus : il s'agit de savoir si les ressources supplémentaires liées à la baisse de l'IS se traduisent par des investissements, et donc des chiffres d'affaires et des marges accrus, entraînant des recettes fiscales supplémentaires. Deux ans seulement après la baisse de l'IS, la mesure n'explique pas tout.

À cause des crises successives, les entreprises ont versé des acomptes faibles parce qu'elles anticipaient des résultats inférieurs à ce qui ont été finalement constatés. La résilience de l'économie française a d'ailleurs été une surprise. Nous constaterons les chiffres réels quand la situation économique sera stabilisée. Ce taux de 25 %, moyenne européenne, reste bienvenu pour la compétitivité de nos entreprises. En tirer des réflexions trop hâtives me paraît relever plus d'un dogme que de la réalité. Le ministre nous dira sans doute l'inverse.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. - Nous avons ce débat très souvent avec le président Raynal. Je le rejoins sur le fait que quelques années de recul sont nécessaires pour mesurer pleinement les effets de cette baisse. Cependant, avec un taux d'IS historiquement faible, l'année dernière, les recettes ont été historiquement hautes - voilà qui est factuel. J'espère que nous faisons la démonstration que quand on taxe moins un gâteau qui grossit, on reçoit plus que quand on surtaxe un gâteau qui rétrécit.

Par ailleurs, en baissant les impôts qui pèsent sur les entreprises, nous ne devenons pas pour autant un paradis fiscal. Sur les 38 pays de l'OCDE, nous sommes, après le Danemark, le deuxième pays avec le plus fort taux de prélèvements obligatoires, et ce malgré la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la baisse de l'IS.

M. Vincent Éblé. - Vous mélangez imposition des entreprises et imposition globale !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. - En France, tout le monde paie plus que chez nos voisins. Arrêtons de dire que la France est un paradis fiscal, ce n'est pas le cas.

Nous sommes le dernier pays européen à avoir un impôt national sur la fortune ; notre taux marginal est de 45 %, avec une contribution exceptionnelle pour les très hauts revenus qui devait être temporaire et qui dure depuis 13 ans, faisant que le taux marginal réel est plutôt de 49 % ; enfin notre contribution sociale généralisée (CSG) est progressive.

À ce stade, nous ne prévoyons pas de décret d'avance ou de projet de loi de finances rectificative autre que le PLFR de fin de gestion. J'espère qu'il n'y aura pas de crise d'ici là. Les dépenses liées à la situation géopolitique - vous avez cité les 1,5 milliard d'euros pour l'armée - pourront être régularisées en fin de gestion. Le ministère des armées dispose cette année d'une marge de 3 milliards d'euros, ce qui permettra d'absorber un certain nombre de dépenses.

Concernant les recettes fiscales, je demanderai une réévaluation à mes équipes. Cependant, en 2022, le surcroît de taxes lié à la hausse des prix du carburant était évalué entre 3,5 et 4 milliards d'euros ; la ristourne a coûté le double. L'État ne s'est donc pas enrichi grâce à l'inflation, notamment au regard de toutes les dépenses consenties : bouclier sur le prix de l'électricité et du gaz, guichet pour les entreprises, aides aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux très petites entreprises (TPE), ristourne puis aide sur le carburant. Nous avons dépensé beaucoup plus que nous avons reçu de surcroît de taxes lié à l'inflation.

M. Claude Raynal, président. - Je vous remercie, monsieur le ministre, pour vos réponses.

II. AUDITION DE MME CARINE CAMBY, PRÉSIDENTE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE DE LA COUR DES COMPTES ET MEMBRE DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES (24 MAI 2023)

Réunie le mercredi 24 mai 2023, sous la présidence de M. Vincent Éblé, vice-président, la commission a entendu Mme Carine CAMBY, présidente de la première chambre de la Cour des comptes et membre du Haut Conseil des finances publiques, sur le rapport de la Cour des comptes relatif aux résultats de la gestion budgétaire de l'exercice 2022, la certification des comptes de l'État pour l'exercice 2022 et les avis du Haut Conseil des finances publiques sur les projets de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année pour 2021 et pour 2022.

M. Vincent Éblé, président. - Nous entendons ce matin Mme Carine Camby, présidente de la première chambre de la Cour des comptes et membre du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Vous venez nous présenter quatre documents : le rapport sur le budget de l'État (RBDE) en 2022 ; l'acte de certification des comptes de l'État en 2022 ; enfin les avis du HCFP sur les projets de loi de règlement pour 2021 et 2022.

Ces documents permettent d'avoir un regard très complet sur les comptes publics et plus particulièrement sur les comptes de l'État en 2022. Le rapport de la Cour, accompagné de 64 notes d'exécution budgétaire (NEB), offre une analyse extrêmement riche de l'ensemble des dépenses et recettes de l'État. L'acte de certification des comptes de l'État valide le caractère globalement sincère des comptes, avec toutefois des réserves notables et persistantes ; ce n'est pas une simple formalité : la Cour a ainsi refusé cette année de certifier les comptes de la branche famille de la Sécurité sociale et de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Enfin l'avis du HCFP sur le projet de loi de règlement pour 2022 rappelle l'état très dégradé de nos finances publiques.

Après l'audition du ministre chargé des comptes publics Gabriel Attal le 2 mai dernier, votre audition s'inscrit dans le cadre des travaux de la commission sur le contrôle de l'exécution 2022, dans la perspective de l'examen du projet de loi de règlement, qui devrait avoir lieu au début du mois de juillet en séance publique. Contrairement à l'an dernier, le projet de loi de règlement a en effet été présenté dès le 13 avril, ce qui nous donne plus de temps pour l'examiner. Nous devrons également examiner une seconde fois le projet de loi de règlement pour 2021, rejeté l'an passé et déposé à nouveau par le Gouvernement.

Mme Carine Camby, présidente de la première chambre de la Cour des comptes et membre du Haut Conseil des finances publiques. - Le Premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, s'excuse de ne pouvoir être présent devant vous ce matin. Il me revient donc de vous présenter les rapports de la Cour des comptes et l'avis du HCFP.

La publication de ces rapports est un moment majeur pour la Cour des comptes et pour ses magistrats, qui sont attachés à leur mission d'assistance au Parlement dans le contrôle de l'exécution budgétaire. Les principaux artisans de ces travaux sont présents à mes côtés : MM. Giannesini, Vareille et Vazeille, ainsi que Mme Aeberhardt, pour le RBDE, M. Soubeyran, pour la certification des comptes de l'État et M. Éric Dubois, rapporteur général du HCFP.

Il convient de retenir quatre idées fortes dans le RBDE. Ce rapport fait apparaître le maintien d'un niveau élevé de déficit, qui pèse sur le volume de la dette, alors même que l'inflation en a augmenté le coût ; il fait aussi apparaître le dynamisme exceptionnel des recettes de l'État qui, en raison d'une forte progression des dépenses, n'a pas contribué à la réduction de notre déficit ; il contient des recommandations pour améliorer la lisibilité du budget et renforcer la portée de l'autorisation parlementaire ; enfin, il identifie des risques pour l'avenir, notamment le poids grandissant des lois de programmation sectorielles prévoyant des crédits supplémentaires pour certaines politiques publiques, ainsi que l'impact attendu de la hausse des taux d'intérêt sur la charge de la dette.

Le premier message du rapport est celui d'un déficit toujours élevé, d'une progression continue de l'endettement et d'une forte hausse de la charge de la dette.

En 2022, le déficit du budget de l'État s'est établi à 151,4 milliards d'euros, en légère baisse par rapport à 2021, où il avait atteint plus de 170 milliards. Malgré cette baisse, le déficit se maintient à un niveau très élevé par rapport aux années antérieures : il était de 92,7 milliards d'euros en 2019.

Je rappelle, en ma qualité de membre du HCFP, que le solde de l'ensemble des comptes publics, c'est-à-dire non seulement de l'État, mais aussi de ses opérateurs, des administrations de sécurité sociale et des collectivités territoriales et de leurs opérateurs, représente encore un déficit de 4,7 points de PIB en 2022 contre 6,5 points l'année précédente.

Quant au solde structurel, où les effets de la conjoncture sont neutralisés, ainsi que les mesures temporaires, il s'élève à 3,4 points de PIB potentiel. Même s'il s'est nettement réduit par rapport à 2021, quand il atteignait 4,4 points de PIB potentiel, une nette réduction de ce déficit structurel est encore indispensable pour réduire l'exposition de la France à un risque d'insoutenabilité de sa dette. En effet, l'évaluation du déficit structurel présentée par le Gouvernement pour 2022 est supérieure de 2,6 points à la prévision retenue dans la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Cet écart est très nettement supérieur à 0,5 point de PIB, ce qui justifierait le déclenchement du mécanisme de correction si la clause de circonstances exceptionnelles ne s'appliquait pas. Je rappelle que la Commission européenne a d'ores et déjà proposé de lever au 1er janvier 2024 la clause dérogatoire générale au cadre budgétaire européen.

Le HCFP invite par conséquent dans son avis le Gouvernement à préciser rapidement les conditions de levée de la clause de circonstances exceptionnelles ainsi que son calendrier.

J'en reviens maintenant au budget de l'État. En conséquence du niveau élevé de son déficit, la dette à moyen et long terme de l'État a continué sa progression. Le volume de dette a augmenté de 24 % en trois ans, passant de 1 823 milliards d'euros fin 2019 à 2 278 milliards d'euros fin 2022. Le besoin de financement demeure élevé, à 280 milliards d'euros en 2022 ; il est supérieur de 60 milliards d'euros à celui de 2019.

Dans un contexte de forte inflation et d'augmentation des taux d'intérêt, la charge de la dette constitue un point d'attention essentiel. Une première augmentation de la charge de la dette avait été observée en 2021, mais elle s'était limitée à 2 milliards d'euros. L'année 2022 marque une rupture très nette, puisque la charge de la dette a progressé de 13,2 milliards d'euros pour atteindre 50,7 milliards d'euros, soit une augmentation de 35 %. Cette augmentation n'avait d'ailleurs pas été anticipée par la loi de finances initiale pour 2022, qui prévoyait une charge de 38,7 milliards d'euros.

Le principal facteur de hausse n'est cependant pas, à ce stade, la hausse des taux, dont les effets ne se font pas encore sentir sur le stock de dette, mais l'inflation, qui s'est traduite par une augmentation de 11,9 milliards d'euros de la provision pour charge d'indexation des titres indexés sur l'inflation.

Afin de limiter l'accroissement de la charge de la dette dans ce contexte de reprise de l'inflation, la Cour recommande d'actualiser rapidement la doctrine sur les conditions d'émission des titres indexés.

La hausse des taux, si elle devait être durable, pourrait cependant exercer à long terme une pression bien supérieure à celle de l'inflation sur la charge de la dette et réduire en conséquence nos marges de manoeuvre budgétaires. L'impact de la remontée des taux d'intérêt sera appelé à peser davantage à partir de l'exercice 2023. L'Agence France Trésor estime ainsi qu'une hausse de 100 points de base des taux d'intérêt renchérit la charge d'intérêts de 2,5 milliards d'euros la première année, 6,1 milliards la deuxième année et de 29,5 milliards à l'horizon de dix ans. L'impact serait considérable et limiterait drastiquement les marges de manoeuvre.

Le second message de ce rapport est le dynamisme des recettes.

Après une forte progression en 2021, les recettes du budget général augmentent encore de 32,3 milliards d'euros en 2022, atteignant des niveaux exceptionnels. Cette progression s'explique non par des mesures nouvelles, mais par la forte augmentation spontanée des recettes fiscales, qui ont atteint 323 milliards d'euros, soit leur plus haut niveau historique.

Cette croissance a notamment été tirée par la hausse du rendement de l'impôt sur les sociétés et de la TVA. Elle est d'autant plus notable que le rendement de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) a baissé de 4,9 milliards d'euros dans le cadre de la mise en place du bouclier tarifaire et qu'un transfert supplémentaire de TVA de 3,6 milliards d'euros a été opéré au bénéfice de l'audiovisuel public, pour compenser la suppression de la contribution qui lui était affectée.

Comme lors des deux exercices précédents, le rapport fait apparaître un enjeu d'amélioration des prévisions de recettes fiscales et de meilleure information sur les facteurs d'évolution des recettes dans les documents budgétaires. L'écart positif en recettes observé entre l'exécution et la dernière estimation de la loi de finances rectificative de fin d'année est en effet substantiel, de l'ordre de 7,5 milliards d'euros.

La Cour recommande donc de fournir de manière précise dans les documents budgétaires, à l'occasion des lois de finances rectificatives, les éléments justifiant, pour chacun des grands impôts, les nouvelles estimations de recettes fiscales et l'origine des écarts avec les prévisions en loi de finances initiale.

L'année 2022 a été marquée par une nouvelle augmentation des dépenses de l'État, malgré le net reflux des dépenses d'urgence sanitaire et de relance. La Cour constate que la France n'est pas sortie du « quoi qu'il en coûte », au risque de créer une situation anormale de dépendance à la dépense. Les dépenses du budget général ont augmenté de 33 % depuis 2019.

L'année 2022 s'est en effet caractérisée par un choc inflationniste et par les conséquences de la guerre en Ukraine, qui ont conduit le Gouvernement à adapter en cours d'année la programmation budgétaire de la loi de finances initiale.

Ainsi, malgré une baisse de 47,3 milliards d'euros des dépenses d'urgence sanitaire et de relance, les dépenses du budget général de l'État ont progressé de 19 milliards d'euros en 2022. Hors urgence et relance, l'augmentation des dépenses en 2022 est donc de 66,3 milliards d'euros, dont 12 milliards pour les mesures « énergie » et « inflation », 10,5 milliards de dotations en vue de la renationalisation intégrale d'EDF et 13,2 milliards de charge supplémentaire d'intérêt de la dette. Les autres dépenses sont en hausse de 31 milliards d'euros par rapport à 2021 ; cette augmentation correspond à celle de la dépense ordinaire de l'État : dépenses de fonctionnement et masse salariale.

En matière de dépenses de personnel, les effectifs ont connu une baisse notable et inattendue - la loi de finances initiale pour 2022 prévoyait une augmentation nette du nombre d'emplois, mais les effectifs de l'État ont diminué en 2022 de 5 765 équivalents temps plein (ETP), plus fortement qu'en 2021. Ces diminutions se concentrent surtout sur les ministères de l'éducation, de l'économie, des armées et de la transition écologique. En dépit de cette situation, qui semble témoigner d'une attractivité réduite de l'emploi public, les dépenses de personnel atteignent 138,8 milliards d'euros, dont 94,5 milliards de rémunérations et 44,4 milliards de contributions au compte d'affectation spéciale Pensions. L'augmentation des rémunérations découle de la revalorisation du point d'indice, qui pèse pour 1,4 milliard d'euros en 2022, et de mesures catégorielles, à hauteur de 1 milliard d'euros.

Enfin, le coût des dépenses fiscales connaît une augmentation de 4,6 milliards d'euros en 2022, pour atteindre un total de 94,2 milliards d'euros, principalement sous l'effet de la très forte hausse du coût du régime de taxation forfaitaire au tonnage des entreprises de transport maritime.

La maîtrise des dépenses fiscales constitue donc toujours un enjeu important du pilotage budgétaire. À ce titre, la Cour constate à nouveau le caractère inopérant des mécanismes destinés à en stabiliser le nombre - qui est de 465 dans la loi de finances pour 2023 - et le coût ; les évaluations de leur efficacité qui étaient prévues n'ont dans l'ensemble pas été réalisées.

En troisième lieu, je souhaite attirer votre attention sur deux points relatifs à l'autorisation parlementaire donnée en loi de finances.

Premièrement, le rapport met en lumière la poursuite du cycle de sous-consommation et de reports de crédits, commencé en 2020 et poursuivi en 2021.

Dans le contexte de la crise sanitaire, puis énergétique, le Gouvernement a inscrit en lois de finances initiales et rectificatives des enveloppes de crédits larges, au-delà des besoins prévisibles. Cette situation a conduit à une sous-consommation de crédits de 24,6 milliards d'euros en 2022, comme en 2021, après 37,5 milliards en 2020.

Ces crédits, au lieu d'être annulés, ont été en grande partie reportés sur l'exercice suivant. Les reports ont atteint 23,2 milliards d'euros en 2021 et s'élèvent à 18,7 milliards en 2022, soit des niveaux très supérieurs aux valeurs antérieures. Ces pratiques portent atteinte au principe d'annualité du budget et interrogent sur le respect du principe de spécialité, dans la mesure où les redéploiements massifs permis par les reports sont susceptibles de bénéficier à d'autres politiques publiques que celles qui avaient justifié leur autorisation initiale.

La Cour recommande donc de n'ouvrir en lois de finances initiale et rectificatives que les crédits nécessaires à l'exercice en cours. Elle recommande également de limiter strictement les reports de crédits et d'apurer les autorisations d'engagement affectées à des opérations d'investissement devenues sans objet, pour une gestion budgétaire plus rigoureuse.

Second point, le budget vert, auquel le rapport consacre un développement spécifique.

Depuis 2020, le Gouvernement publie une annexe au projet de loi de finances portant sur l'impact environnemental du budget de l'État, dont une partie est communément appelée budget vert et qui revient à une démarche de cotation. Cette avancée importante nous place parmi les pays qui font le plus d'efforts pour identifier ce type de dépenses.

Pour autant, la Cour estime que le budget vert connaît plusieurs limites et doit encore progresser. Seules 10 % des dépenses sont cotées favorables ou défavorables ; les 90 % restants sont donc des dépenses soit « neutres » soit non cotées. La Cour publiera prochainement un rapport spécifique sur ce sujet.

Dernier point, le rapport pointe la complexification croissante des relations financières entre l'État et les autres administrations publiques à la faveur de la crise sanitaire. Le montant total transféré par l'État aux collectivités a atteint 143,1 milliards d'euros en 2022, soit une hausse de 2,4 %, qui s'explique notamment par l'effet des nouvelles affectations de fractions de TVA en compensation des réformes fiscales récentes : suppression de la taxe d'habitation, baisse des impôts de production.

Comme la Cour l'a rappelé dans son rapport public annuel 2023, le financement prépondérant des collectivités par la voie d'affectation d'impôts et de prélèvements sur recettes offre à ces collectivités des ressources dynamiques, notamment la TVA, mais limite les possibilités de régulation budgétaire de l'État

La TVA devient ainsi une ressource déterminante de la protection sociale, laquelle n'est plus financée par des cotisations que pour la moitié de ses recettes. Elle représente ainsi 60 % des 95 milliards d'euros d'impôts et taxes affectés à la protection sociale. Par ailleurs, le budget général de l'État finance également des prestations sociales versées par les caisses d'allocations familiales (CAF) pour un montant de 42 milliards d'euros en 2022. Si l'on prend en compte l'objectif de lisibilité et de consentement à l'impôt, ces circuits financiers sont encore trop opaques.

Enfin, je souhaite attirer votre attention sur les risques pesant sur la trajectoire budgétaire à venir de notre pays.

L'analyse de l'exécution du budget de 2022 met en lumière trois grands risques susceptibles d'affecter la soutenabilité des finances publiques au cours du prochain exercice.

D'abord, les reports des crédits restent importants et se traduisent par des restes à payer très significatifs. En 2023, les reports non consommés s'élèvent à 8,3 milliards d'euros hors fonds de concours et attributions de produits, contre 1 à 2 milliards d'euros avant la crise. Autorisés par la dernière loi de finances initiale, les reports concernent quarante programmes. Ce nombre important d'exemptions ne peut plus se justifier, comme précédemment, par l'incertitude découlant de la crise sanitaire.

Ensuite, les restes à payer atteignent 214 milliards d'euros à la fin de 2022, en augmentation très sensible.

Enfin, les lois de programmation sectorielles, au nombre de cinq, rigidifient drastiquement la dépense. Elles représenteront en effet 20 % du budget en 2023 et contraindront fortement à l'avenir les autres dépenses.

Un dernier mot sur la certification du compte général de l'État.

En premier lieu, il convient de rappeler que, pour la première fois depuis que la Cour certifie les comptes de l'État, les comptes de l'exercice 2021 n'ont pas été approuvés par le Parlement, comme cela a été déjà dit. Même si l'administration a trouvé une solution comptable pour présenter le résultat 2021 qui n'a pas pu être « affecté » à ce jour, ce n'est pas une bonne pratique.

En deuxième lieu, la Cour a constaté un certain progrès dans la qualité des comptes, puisqu'elle ne relève plus désormais que quatre anomalies significatives, contre cinq pour 2021. La levée de ces anomalies, qui portent sur des points de principe, est donc aujourd'hui à la portée de l'État.

Pour autant, le nombre d'insuffisances d'éléments probants a augmenté cette année, au nombre de treize contre dix en 2021. Ces observations correspondent à des situations dans lesquelles la Cour n'est pas en mesure de se prononcer au vu de l'information apportée par l'administration. Il s'agit par exemple du montant des engagements de retraite des fonctionnaires civils et militaires de l'État, des charges relatives aux boucliers tarifaires déployés en 2022 ou de la valeur du patrimoine immobilier de l'État.

En troisième lieu, les comptes de l'État, qui appliquent pour l'essentiel les principes de la comptabilité d'entreprise, apportent des enseignements complémentaires intéressants, car ils sont basés sur les droits et obligations de l'État et pas seulement sur les flux de trésorerie.

Ainsi, alors que le déficit de l'État s'est amélioré de 19 milliards d'euros en comptabilité budgétaire, il s'est dégradé au contraire du même montant en comptabilité générale, pour atteindre 160 milliards d'euros.

Je voudrais souligner que les charges de fonctionnement de l'État sont en hausse, alors que les charges d'intervention sont restées stables.

Quant au bilan de l'État, il fait ressortir une insuffisance d'actif de 1 758 milliards d'euros et un endettement financier net de 2 519 milliards d'euros, contre 2 368 milliards un an plus tôt.

Enfin, les engagements hors bilan atteignent 4 000 milliards d'euros au 31 décembre 2022.

En conclusion, la Cour certifie avec réserve que le compte général de l'État est, au regard du recueil des normes comptables de l'État, régulier et sincère, et qu'il donne une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé, ainsi que de la situation financière et du patrimoine de l'État.

M. Vincent Éblé, président. - Je vous remercie, madame la présidente. La Cour indique dans son rapport qu'« il est peu probable qu'au cours des prochaines années les recettes fiscales affichent le même dynamisme ». Considérez-vous que l'élasticité très forte des recettes à la croissance connue en 2022, soit 2,2, risque de ne pas se reproduire ? Par ailleurs, le Gouvernement nous dit régulièrement que la diminution des taux de l'impôt sur les sociétés (IS) permet aux entreprises d'améliorer leur situation et, finalement, d'accroître les recettes d'IS. Vos analyses vous permettent-elles d'apprécier, ou non, un tel effet ?

Un écart important entre la prévision et l'exécution concerne la part de la charge de la dette relative aux titres indexés : en raison de l'inflation, ces derniers ont coûté 15,5 milliards d'euros, alors que le coût prévisionnel était de 4,1 milliards. Vous proposez de développer et d'actualiser la documentation publique sur les modalités de recours aux titres de dette indexés. En quoi le suivi de ces titres est-il insuffisant ? Cela permettrait-il de réduire l'exposition de la charge de la dette aux aléas de l'inflation ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Merci, madame la présidente, pour votre présentation, même si elle ne me rassure pas. Elle s'inscrit, en effet, dans le droit fil de nos observations. Lors du dernier débat budgétaire, le ministre nous expliquait que le budget était « à l'euro près »... Que signifie cette expression au regard de la largesse inédite des reports de crédits, laquelle est pour l'instant passée sous les radars de l'actualité ? Avec ces reports et la remontée des taux, notre budget est en quelque sorte « en apesanteur », et l'atterrissage risque d'être particulièrement douloureux.

Nous avions émis des réserves sur le budget vert de l'État. Quand on veut se lancer sur un tel sujet, il faut prendre son temps pour mesurer réellement l'empreinte écologique et environnementale de nos dépenses. Ne se prononcer que sur 10 % de ces dépenses n'est pas à la hauteur de l'enjeu. Il faut dire clairement la vérité sur les chiffres, même si elle est douloureuse, car ils conditionnent nos choix pour l'avenir. On propose aux assemblées de voter des lois de programmation dans de nombreux domaines. La réalité vient percuter notre envie de toujours davantage de dépenses. Il faut accepter de reconsidérer les choses afin d'éviter un effet de dépendance à la dépense publique qui se traduit par la dégradation de nos comptes publics et l'envolée des déficits.

En ce qui concerne les dépenses, que pensez-vous de la « revue des dépenses publiques » annoncée par le ministre pour produire « plusieurs milliards d'euros d'économies », sachant que le déficit devrait être de 165 milliards d'euros ?

S'agissant des prévisions de recettes, vous recommandez que le Gouvernement présente des informations plus détaillées pour justifier les hypothèses retenues dans les collectifs budgétaires. Quelles sont, selon vous, les raisons profondes des écarts constatés entre les prévisions faites, notamment dans les derniers mois de l'année, et les recettes effectivement constatées ? Des changements de méthode sont-ils nécessaires ?

La certification des comptes est un gage de la bonne tenue des comptes. La Cour des comptes a ainsi refusé cette année de certifier les comptes de la branche famille de la sécurité sociale et de la Caisse nationale des allocations familiales. S'agissant de l'État, vous avez bien certifié la régularité et la sincérité des comptes, mais avec plusieurs réserves notables, qui portent notamment sur la comptabilisation des participations de l'État dans EDF et dans la Caisse des dépôts et consignations. Pourquoi le Gouvernement ne suit-il pas les recommandations que vous faites à ce sujet, et que vous faisiez déjà les années passées ? Que doit-on en déduire et que pourrait-on proposer ?

Mme Carine Camby. - J'évoquerai d'abord le dynamisme des recettes fiscales, qui dépassent les prévisions de 27 milliards d'euros. Ce rebond s'explique : par l'effet de l'inflation, qui a pesé sur la TVA, en augmentation de 9,4 %, soit 1,6 fois plus vite que la croissance du PIB en valeur ; par l'impact de l'impôt sur le revenu, à hauteur de 11 milliards d'euros, qui est lié aux augmentations de salaire ; et, surtout, par le rendement de l'impôt sur les sociétés. En 2021, le bénéfice fiscal des entreprises a augmenté de 41 %, une hausse importante liée à la croissance très forte et aux aides dont elles ont bénéficié. On constate d'ailleurs que les acomptes de la fin d'année 2022 n'ont pas diminué, ce qui montre que les anticipations des entreprises sur la poursuite de l'activité économique sont assez favorables.

Les deux baisses concernent la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE), à cause du bouclier tarifaire énergétique, et la redevance audiovisuelle. L'évolution reste néanmoins très positive.

Va-t-elle se poursuivre en ce sens ? Probablement pas. Les anticipations, dont nous rendrons compte dans le rapport qui paraîtra en juin prochain sur la situation des finances publiques, montrent que l'élasticité des recettes fiscales en 2023 devrait, du fait de la baisse de la croissance, être inférieure à 1, contrairement à cette année.

Les répercussions de l'inflation sur la charge de la dette sont doubles : elle produit un effet volume, lié à l'importante augmentation de l'encours, et entraîne la constitution de provisions pour charge d'indexation dans les comptes de l'État, qui correspondent à l'indexation des coupons qui seront versés aux détenteurs des titres au cours des mois à venir.

L'effet taux en 2022 est nul, mais il pèsera en 2023. Le recul attendu de l'inflation pourrait entraîner une diminution de la charge d'intérêts liée aux obligations indexées, en revanche l'effet taux deviendra prépondérant dans l'augmentation de la charge de la dette l'an prochain.

Pourquoi l'Agence France Trésor continue-t-elle en cette période d'inflation d'émettre des obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation (OATi) ? Cela correspond à une demande de certains investisseurs du fait d'un besoin de refinancement sur des titres en fonction de l'évolution de l'inflation. Le volume reste à peu près constant : les obligations indexées représentent environ 10 % de l'ensemble de la dette. Ce poids est relativement faible. Néanmoins, la Cour a recommandé d'actualiser la doctrine de l'Agence France Trésor sur les conditions d'émission des titres indexés, car cette doctrine est ancienne, antérieure au choc d'inflation. Cette mise à jour est en cours.

La précision des prévisions budgétaires était compliquée en période de fin de crise sanitaire et d'évolution forte de la situation internationale à la suite du choc entraîné par la guerre en Ukraine. L'inflation, préalable mais accentuée par l'augmentation des coûts de l'énergie, a rendu nécessaires des réajustements en cours d'année. Pour cette raison sans doute, il a fallu rédiger un décret d'avance et faire adopter deux lois de finances rectificatives.

Néanmoins, des sous-consommations très importantes de crédits sont constatées, principalement sur le plan de relance, qui ne va pas aussi vite que prévu, et sur la mission « Économie ». Dans cette dernière, l'aide aux entreprises énergo-intensives, par exemple, n'a pas du tout été consommée au niveau budgété. D'autres sous-consommations ont été plus ponctuelles, comme sur le plan d'aide aux demandeurs d'emploi de longue durée. Beaucoup de mises en réserve ont donc eu lieu.

Comment améliorer la situation ? La conjoncture se stabilise, donc nous pouvons espérer que les prévisions seront plus fiables, ce qu'elles doivent être. Les revues de dépenses permettront peut-être d'y voir plus clair au niveau de certains postes budgétaires ; le montant des économies ainsi attendues n'est pas connu précisément. Les évaluations sont en cours. Dans celles que réalise la Cour, des marges de manoeuvre sont identifiées sur certaines politiques publiques, par exemple sur les dépenses fiscales, un sujet qui revient depuis longtemps, ou sur certains budgets importants, comme les aides au logement.

Certes conçues pour réaliser des économies, les revues de dépenses ont aussi pour but d'améliorer la qualité de la dépense, donc l'atteinte de résultats. Dépenser moins est nécessaire, mais dépenser mieux l'est tout autant.

L'endettement a augmenté de 24 % en trois ans : il est devenu considérable. Avec la hausse des taux d'intérêt, nous enregistrerons certainement une augmentation de la charge de la dette, probablement après 2023, du fait du renouvellement des émissions d'obligations. Les conséquences sont majeures : il y aura beaucoup à faire pour revenir à une trajectoire plus proche de celle figurant dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 - la Cour, au travers de son président, appelle de ses voeux l'adoption d'un tel texte - ou pour s'inscrire dans les perspectives énoncées par la Commission européenne au sujet des nouvelles règles budgétaires.

Pour revenir à 3 % de déficit public en 2027, le Haut Conseil des finances publiques a eu l'occasion de rappeler qu'il faudrait, du fait du poids des dépenses rigidifiés par les lois de programmation, que les autres dépenses de l'État baissent de 1,4 % en volume chaque année. Cet effort paraît difficile compte tenu de ce que nous connaissons de la dynamique de la dépense publique. Aucun précédent ne permet de nous rassurer sur l'atteinte de cet objectif.

Je n'ai pas de réponse facile à vous donner au sujet des changements de méthode pour calculer les recettes : des instruments, notamment au niveau de la direction générale des finances publiques (DGFiP), doivent permettre d'appréhender plus tôt et plus finement les évolutions d'assiette qui expliquent le meilleur rendement constaté de l'impôt.

Je reviens à présent sur les deux réserves indiquées dans l'acte de certification.

En premier lieu, le désaccord avec la direction générale du Trésor sur la façon d'intégrer dans les comptes la participation de l'État à la Caisse des dépôts et consignations est très ancien. Cette question de classement comptable est technique, mais la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, a quelque peu modifié la donne : certaines dispositions précisent que le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations est nommé par le Gouvernement, rapprochant ainsi cette caisse de l'État. Nous ne sommes pas d'accord avec la direction générale du Trésor sur ce qu'il convient de retenir dans les comptes de l'État.

En second lieu, un certain nombre de titres n'appartiennent pas à l'État dans les comptes d'EDF ; ils n'ont pas été déduits de l'assiette qui permet d'intégrer la valeur d'équivalence dans les comptes de l'État. Nous pourrons progresser dans les années qui viennent sur ce point : je ne suis pas très inquiète.

M. Jérôme Bascher. - Concernant l'autorisation parlementaire, si le Premier président appelle à une nouvelle loi de programmation des finances publiques, nous appelons pour notre part au respect des textes : l'effort structurel n'ayant pas été au rendez-vous, il aurait fallu réviser la programmation actuelle. Or cela n'a pas été fait. Pourtant, dès la première année, il y a eu dérive. Vous le rappelez en soulignant que la loi de finances rectificative s'est éloignée plus encore de l'atterrissage constaté : ni la loi organique ni la loi de programmation des finances publiques n'ont été respectées.

Autant nous pouvions comprendre l'explosion des reports de crédits en 2020 du fait de la situation exceptionnelle, autant en 2022 ces reports ne se justifient plus. En outre, vous soulignez que les restes à payer, encore plus importants, ne cessent également de s'accroître. C'est une dérive complète de nos finances publiques.

Je vous invite à lire un rapport que j'ai commis sur le fait que la dette en OAT indexées sur l'inflation, depuis sa création en 1998 à laquelle j'ai modestement participé, a aujourd'hui encore un solde positif. Cela a été longtemps un bénéfice pour la charge de la dette. Tout cela a été gommé en 2022.

Qui détient les OAT indexées ? La Caisse des dépôts et consignations, qui en a besoin comme collatéral pour les livrets A et pour protéger son équilibre actif-passif. Ce sont nos économies. Je ne suis donc pas totalement d'accord avec vos recommandations.

Dès cette année peut-être, la dette française sera la première dette européenne en niveau, plus élevée encore que l'italienne. Son coût relativement modeste à l'heure actuelle provient de sa seule liquidité ; il ne faut donc surtout pas changer de politique sur l'émission, sinon le marché ne nous ferait plus confiance. Dans un autre rapport que j'ai commis, relatif aux OAT vertes, j'ai souligné la chance qui a été la nôtre d'avoir longtemps été le premier émetteur de dette verte. Cela participe à écouler notre dette.

La force de nos émissions de dette provient de la liquidité de cette dernière, de sa taille, de sa profondeur, de la diversité des produits et non, hélas, de la crédibilité de notre trajectoire de finances publiques.

M. Marc Laménie. - Vous avez raison d'insister sur la complexité du lien entre l'État et les collectivités territoriales. Les concours de l'État à ces dernières représentent 143 milliards d'euros. La question de l'autonomie financière des collectivités se pose. Comment voyez-vous l'évolution de ce partenariat entre État et collectivités ?

Concernant les recettes, la fraude représente un manque à gagner : peut-on estimer son montant ?

Mme Isabelle Briquet. - Les reports de crédits sont élevés. Je vous remercie d'avoir rappelé les principes d'annualité et de spécialité budgétaires : si l'État les respectait, nous pourrions y voir plus clair dans les comptes.

Les recettes sont dynamiques, mais la dépense l'est également. La charge de la dette s'accroît et l'effet de la hausse des taux d'intérêt sera bientôt sensible. Les besoins pour financer la transition écologique sont importants. Est-il donc judicieux, alors que de nouvelles baisses d'impôt sont annoncées, de se priver de recettes par un désarmement fiscal continu depuis plusieurs années ?

M. Michel Canévet. - Comment expliquer la très forte augmentation des restes à payer entre 2020 et 2022 ? Vous l'avez indiqué dans votre propos introductif, la Cour des comptes publiera un rapport spécifique sur le budget vert. Selon Les Échos, elle préconiserait la réduction du cheptel bovin en France. À l'heure où nous devons préserver notre souveraineté alimentaire et défendre notre tissu rural, cela m'inquiète. Qu'en est-il ?

M. Stéphane Sautarel. - Je voulais aussi vous interroger sur le rapport de la Cour des comptes sur l'élevage, qui suscite bien des inquiétudes dans le monde rural.

Le budget est très déséquilibré et fragile. Les inconnues et les facteurs de risques sont nombreux. On évoque un mur de la dette en 2023, dans la mesure où le niveau de refinancement sera très élevé. Pourtant la hausse des taux n'est pas encore sensible...

Vous avez insisté sur le dynamisme des dépenses fiscales. Quelle est leur part relative dans l'évolution de la dépense ?

Enfin, depuis 2021, une part de TVA est transférée aux collectivités locales. La contrepartie des dégrèvements d'impôts baisse : c'est inquiétant car les dégrèvements permettent de conserver une territorialité de l'impôt et de suivre sa dynamique. C'était le sens de nos propositions lors de la réforme de la CVAE, sans effet. Leur baisse est donc un facteur d'inquiétude pour la dynamique des ressources des collectivités et leur autonomie.

M. Christian Bilhac. - L'exercice budgétaire de 2022 peut se résumer ainsi : 160 milliards d'euros de déficit et le non-respect des grands principes de la comptabilité publique !

En ce qui concerne les recettes fiscales, l'écart entre les prévisions et la réalisation constatée lors de la loi de règlement était devenu une tradition, qui permettait de se réjouir d'une hausse des recettes fiscales en fin d'année, mais vu l'optimisme des prévisions actuelles, je crois qu'il faut s'attendre à de cruelles surprises... Les dépenses du budget général augmentent de 33 % par rapport à leur niveau de 2019, c'est considérable ! Or avec la fin du covid et des dépenses de soutien, il aurait été possible de faire des économies de l'ordre de 47 milliards d'euros et d'en réaffecter une partie aux autres missions de l'État. Mais ce n'est pas ce qui a été fait. Comment expliquer la hausse des reports de crédits qui atteignent le niveau de 8 % ? Les concours aux collectivités sont en hausse - 143 milliards d'euros au total -, mais il s'agit d'une évolution en trompe-l'oeil, car les transferts de charges sont élevés et cette hausse ne fait que compenser les suppressions d'impôts !

M. Daniel Breuiller. - Je souscris aux propos de Christian Bilhac sur les dégrèvements. Le budget vert est certes un outil imparfait, mais il a le mérite d'exister. Je ne comprends pas pourquoi les dépenses d'aide à l'achat de carburant pendant la crise pétrolière ne figurent pas dans les dépenses brunes. Dès lors, je m'interroge sur l'efficacité d'un dispositif qui ne sait pas faire la distinction entre les dépenses vertes et brunes. Je préfère le rapport de Jean Pisani-Ferry. La situation est préoccupante. La transition écologique est nécessaire. Peut-on la réaliser sans recettes supplémentaires ? Les coûts de la non-adaptation de notre pays à la crise climatique seront considérables demain. Mieux vaut donc investir dès aujourd'hui.

M. Arnaud Bazin. - Je voulais vous interroger sur le maintien d'émissions d'obligations indexées sur l'inflation, mais j'ai entendu l'exposé de M. Bascher. Les acheteurs de ces obligations sont-ils bien ceux que M. Bascher a indiqués ? Il ne faudrait pas que ces obligations constituent une opportunité de trouver des revenus supplémentaires pour des investisseurs privés.

S'agissant des transferts de l'État aux collectivités, les contreparties de dégrèvements s'élevaient à plus de 20 milliards d'euros en 2020 ; elles n'atteignent plus que 7 milliards en 2022. Comment expliquer cette baisse ?

Mme Carine Camby. - La Cour dit non pas qu'il faut réduire le recours aux obligations indexées sur l'inflation, mais qu'il faut préciser leur doctrine d'emploi dans un contexte de hausse de l'inflation, quitte à maintenir leur niveau si elles répondent aux besoins de certains organismes, et notamment de la Caisse des dépôts. Ces obligations s'inscrivent dans une stratégie de l'Agence France Trésor pour diversifier ses instruments de financement, mais la hausse de l'inflation et des taux d'intérêt incite à la prudence.

S'agissant du respect de la loi de programmation des finances publiques, la question est la sortie programmée normalement pour la fin de l'année de la clause de circonstances exceptionnelles, selon des modalités en cours de négociation, mais qui aboutira à contraindre nos finances publiques encore davantage, car la France devra s'engager dans une trajectoire de finances publiques exigeante visant à passer sous la barre des 3 % de déficit en 2027.

Je ne saurais vous donner un chiffrage de la fraude. En effet, la DGFiP ne mesure pas l'écart fiscal, c'est-à-dire la différence entre ce que rapporteraient les impôts sans la fraude et ce qu'ils rapportent réellement. La DGFiP mène des travaux en ce sens, notamment depuis l'annonce du ministre chargé des comptes publics sur la lutte contre la fraude fiscale.

Sur la baisse des impôts, le Premier président de la Cour des comptes a dit qu'il était difficilement envisageable de programmer des baisses d'impôts qui ne soient pas intégralement compensées. Il faut rappeler aussi que le taux de prélèvements obligatoires en France est le plus élevé de la zone euro. La marge de manoeuvre est donc limitée, tant pour créer de nouveaux impôts que pour les baisser.

L'essentiel des restes à payer vient des crédits non affectés et des reports de crédits. En particulier, le plan France Relance n'a pas été exécuté comme il était prévu et cela explique la moitié du solde des restes à payer.

Les transferts de l'État aux collectivités territoriales se décomposent en trois tiers : les prélèvements sur recettes, la fiscalité transférée et la TVA transférée. La part des dépenses budgétaires est faible. La Cour des comptes publiera bientôt un rapport sur la situation des finances publiques locales. La situation financière des collectivités est très hétérogène, avec de fortes disparités, mais dans l'ensemble elle n'est pas mauvaise, l'État ayant largement compensé les baisses de recettes. Nous avions d'ailleurs remis l'an dernier à votre commission un rapport sur les scénarios de financement des collectivités territoriales.

En ce qui concerne les dégrèvements, il y a certes eu le problème lié à la suppression de la taxe d'habitation, mais dans l'ensemble la situation est équilibrée. Si l'on compare les pertes de fiscalité et les transferts correspondants, on observe une symétrie. Les transferts de TVA à la suite de la réforme de la TH et des impôts de production sont même plus élevés que les suppressions d'impôts correspondantes.

Enfin, les mesures sur l'énergie, qui étaient cotées neutres en 2022, devraient être cotées brunes en 2023, du moins en partie. La direction du budget est volontariste sur ce sujet. Elle s'efforce de coter le plus de dépenses possible. Encore faut-il qu'elle dispose de tous les éléments que possèdent les ministères. On peut donc espérer des améliorations.

M. Vincent Éblé, président. - Je vous remercie.

III. EXAMEN EN COMMISSION (28 JUIN 2023)

Réunie le mercredi 28 juin 2023, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de M. Jean-François Husson, rapporteur général, sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 et le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022.

M. Claude Raynal, président. - Nous poursuivons avec le rapport de M. Husson, rapporteur général, sur le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021 et le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Une fois n'est pas coutume, je vous présente ce matin mon rapport sur deux projets de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes, l'un pour 2021 et l'autre pour 2022.

La procédure est d'autant plus extraordinaire que le premier texte est en substance identique à celui qui a été présenté - et rejeté - à l'été 2022 par les deux chambres. Alors que le Sénat n'avait pas adopté le texte dès la première lecture, l'Assemblée nationale l'avait suivi en lecture définitive.

Je vous épargnerai une présentation exhaustive du texte : vous m'avez déjà entendu l'an dernier et rien n'a changé ou presque. Ainsi, l'article liminaire a très légèrement évolué pour tenir compte des chiffres les plus à jour de l'Insee. Il est utile de préciser néanmoins que le rejet du texte a eu pour effet la mise en place par la direction générale des finances publiques (DGFiP) de procédures comptables spécifiques dans le bilan de l'État. Si cela ne remet pas en cause la certification des comptes par la Cour des comptes, un nouveau rejet pourrait toutefois causer des difficultés dans la gestion de certains comptes spéciaux, car l'absence de loi de règlement a pour effet le report automatique de leur solde, ce qui n'a guère de sens. C'est une conséquence de la loi organique, qu'il serait peut-être utile de retoucher sur ce point un jour.

En tout état de cause, ce qui a justifié le rejet de ce texte l'an dernier est toujours d'actualité : dans un contexte de reprise économique, les comptes publics de la France restent profondément dégradés. Pour ce qui concerne le budget de l'État, les dépenses atteignaient un niveau historiquement élevé, sans que l'on ait le sentiment que cela constitue une situation exceptionnelle et temporaire. Du point de vue de la procédure budgétaire, le montant extraordinaire des reports de crédits de 2020 vers 2021 était très contestable, avec plus de 36 milliards d'euros, et cette pratique est devenue une habitude. Enfin, ce vote était cohérent avec le fait que le Sénat n'avait pas voté la loi de finances initiale pour 2021. Je vous proposerai donc, une nouvelle fois, de ne pas adopter ce projet de loi de règlement pour 2021.

Autant le dire tout de suite, j'aurai le même avis défavorable sur le projet de loi de règlement pour 2022.

Du point de vue macroéconomique, les chiffres arrêtés par l'Insee pour l'année passée sont le reflet d'un monde imprévisible, secoué par des crises multiples dont les effets s'entremêlent.

Ainsi, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, j'avais souligné le caractère « légèrement optimiste » de la prévision du Gouvernement, qui anticipait une croissance de 4 %.

Les experts de la Banque de France, du Consensus Forecasts et du Fonds monétaire international (FMI) prévoyaient quant à eux des taux inférieurs et plusieurs incertitudes pesaient sur la prévision de croissance comme, par exemple, l'ampleur de la reprise post-covid-19. Le déclenchement de la guerre en Ukraine en début d'année 2022 a constitué un aléa relativement imprévisible et aux effets majeurs sur nos économies. Ses conséquences ont été immédiates et très lourdes pour notre économie : augmentation drastique des prix du gaz et de l'électricité, forte inflation et incertitudes géopolitiques.

Alors que le Gouvernement avait revu sa prévision de croissance à la baisse, en la ramenant de 4 % à 2,5 % au cours de la loi de finances rectificative de l'été, puis à 2,7 % lors du collectif budgétaire de fin d'année, elle s'est finalement établie à 2,5 %.

Comme des travaux de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) l'ont bien montré, la hausse des prix de l'énergie a joué un rôle prépondérant dans cette contre-performance et a réduit la croissance de 1,5 point de pourcentage. Les incertitudes géopolitiques ont quant à elles joué pour 0,5 point, et la remontée des taux d'intérêt et la persistance de la crise sanitaire pour 0,4 point. À l'inverse, les mesures budgétaires mises en place par l'État pour soutenir le pouvoir d'achat ont permis de soutenir la croissance de 0,9 point. En ce qui concerne les déterminants de la croissance, l'Insee nous indique que la consommation des ménages a contribué pour 1,7 point, et l'investissement des entreprises pour 0,5 point.

J'observe là aussi un écart notable entre ces chiffres et les prévisions des conjoncturistes au début de l'année 2022. Cet écart permet de visualiser l'impact important des augmentations du prix de l'énergie et de l'accélération de l'inflation sur les dépenses des ménages. Ce phénomène s'est traduit par une contraction de la consommation de biens, en particulier en ce qui concerne les produits alimentaires et la consommation de gaz.

L'inflation s'est quant à elle nettement accélérée en 2022 pour atteindre un taux moyen annuel de 5,2 %. Cette situation s'explique en partie par la reprise économique post-covid-19, mais surtout par la hausse du coût de l'énergie, largement importée.

J'observe néanmoins que des facteurs internes ont également joué sur le niveau de l'inflation. Ainsi, en 2023, sa dynamique est de moins en moins expliquée par les prix de l'énergie et de plus en plus par des facteurs comme l'alimentation ou les services. C'est un sujet qui doit nous préoccuper. Je constate que le Gouvernement s'emploie à stabiliser le niveau de l'inflation, puisque certaines mesures seront maintenues au cours de l'été, ce qui n'était pas initialement programmé.

Face à l'inflation, l'État a mis en oeuvre un nombre conséquent de mesures de soutien pour un montant total d'environ 38 milliards d'euros. Comme le montrent les comparaisons internationales, ces mesures ont effectivement permis de limiter l'accélération des prix et d'afficher un taux d'inflation relativement plus faible en France que chez nos partenaires.

Je souhaite maintenant vous faire part de mon analyse de la situation des finances publiques en France pour l'année 2022. Cette situation, inquiétante, me pousse à réitérer l'appel à une prise de conscience et à une action immédiate pour éviter sa dégradation.

Commençons par les chiffres. Le déficit public pour 2022 est égal à 124,5 milliards d'euros, soit 4,7 % du PIB. Je note une amélioration par rapport à la prévision du Gouvernement lors de l'examen de la loi de finances initiale, mais n'oublions pas que nous restons très éloignés des objectifs fixés par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Pour rappel, nous nous étions engagés à contenir le déficit public à 0,3 % du PIB en 2022.

Je tiens à souligner que la survenue des crises sanitaire et énergétique ne suffit pas à expliquer cet écart. Le Gouvernement n'a pas tenu ses promesses de maîtrise des dépenses publiques depuis les événements des « gilets jaunes » à l'automne 2018.

Concernant l'endettement public, celui-ci s'est établi à 111,8 % du PIB en 2022. Si nous observons une diminution par rapport à l'année précédente, ne nous y trompons pas : cette réduction n'est pas le fruit d'une gestion plus rigoureuse des dépenses, mais bien d'une croissance plus dynamique du PIB par rapport à celle de la dette.

Ainsi, si nous nous comparons à nos voisins, nous maintenons des déficits parmi les plus élevés depuis 2020 et nous présentons un niveau d'endettement parmi les plus importants. Il est urgent d'agir.

En ce qui concerne les dépenses publiques, elles ont atteint 1 520 milliards d'euros en 2022. Il est alarmant de constater que le rythme d'augmentation des dépenses hors mesures de crise durant le quinquennat 2018-2022 a été plus rapide qu'au cours du quinquennat 2012-2017.

Je note, en particulier, la hausse de près de 16 milliards d'euros de la charge des intérêts de la dette, qui doit nous alerter sur les risques que nous prenons à financer nos dépenses à crédit : les conditions de financement pour la France ont changé, ce qui nous oblige à agir plus vite sur notre niveau de dépenses, mais aussi à maintenir la confiance des marchés en présentant une trajectoire de maîtrise des comptes volontaire et crédible.

Par ailleurs, l'année 2022 a été marquée par de bonnes surprises puisque les recettes fiscales ont augmenté bien plus rapidement que la croissance du PIB. Cependant, il serait imprudent de compter sur de tels vents favorables à l'avenir, d'autant que l'on constate des signes de ralentissement de l'économie au second semestre de cette année. Il est donc urgent de prendre des mesures concrètes pour réduire le déficit structurel.

J'en viens à présent au budget de l'État, dont le déficit s'établit en 2022 à 151,4 milliards d'euros. Le Gouvernement souligne une amélioration de près de 20 milliards d'euros par rapport à 2021, alors qu'un déficit aussi élevé - pour la troisième année consécutive - peut difficilement constituer un motif de satisfaction. Si le déficit est proche de la prévision initiale, c'est que les prévisions de dégradation du déficit faites en cours d'année ne se sont pas vérifiées.

La différence est particulièrement frappante avec la prévision de la dernière loi de finances rectificative, promulguée le 1er décembre 2022 : elle anticipait encore un déficit de 171 milliards d'euros, en raison d'une surestimation des dépenses comme d'une sous-estimation des recettes, sur lesquelles je reviendrai.

Ces écarts sont très importants depuis trois ans. Auparavant, la prévision de la loi de finances rectificative de fin d'année était très peu différente du déficit finalement constaté.

Par rapport à 2021, le solde ne s'améliore que parce que les dépenses du plan d'urgence et du plan de relance sont en voie progressive d'extinction, ce qui est la conséquence naturelle de l'éloignement de la crise sanitaire. En revanche, les autres dépenses sont en très forte augmentation avec, notamment, la mise en oeuvre d'un nouveau cycle de mesures de soutien aux ménages et aux entreprises, en réponse, cette fois, à la reprise de l'inflation et aux conséquences de la guerre en Ukraine. Parallèlement, les recettes progressent de manière significative avec la reprise économique.

En combinant ces effets, on voit à quel point l'écart entre les recettes et les dépenses s'élargit au fil des années. Le surcroît des dépenses nettes par rapport aux recettes nettes du budget général, qui était de 28,9 % au début du précédent quinquennat, est désormais de 55 % : le pic de la crise sanitaire, à 79,6 %, n'a été que très partiellement résorbé.

Or les signes ne sont pas rassurants pour l'avenir. Par exemple, l'amélioration du solde en comptabilité budgétaire s'accompagne, en sens inverse, d'une dégradation de 19 milliards d'euros du compte de résultat, qui passe de 141 milliards d'euros en 2021 à 160 milliards d'euros en 2022. Cela signifie en fait que les décisions prises en 2022 ont une conséquence sur les dépenses futures et engagent l'avenir.

Cela rejoint les constats de la Cour des comptes sur la multiplication des lois de programmation sectorielles, qui limitent les possibilités de moduler les dépenses sur un plan annuel.

Un autre exemple du poids de la manière dont les décisions présentes et passées contraignent les dépenses futures est le montant des restes à payer, c'est-à-dire le montant des autorisations d'engagement non encore couvertes par des crédits de paiement. Ils ont augmenté de 87 % entre 2017 et 2022. Je n'y intègre pas les 163,1 milliards d'euros de restes à payer qui résultent de la création artificielle du programme d'amortissement de la dette covid-19, car on ne compte habituellement pas la dette parmi les restes à payer.

Pourtant, la dette constitue bien, elle-même, un poids sur le futur et sa charge est repartie à la hausse : huit années de baisse ont été effacées en deux ans. En outre, il ne s'agit pour l'instant que de l'impact de l'inflation sur la dette indexée : dans les années à venir, il faudra compter avec l'effet progressif de la hausse des taux sur le renouvellement des titres.

J'en viens à la présentation des recettes et des dépenses. Les recettes fiscales nettes progressent en 2022, sous l'effet de la reprise économique. Si l'augmentation est de 18,2 % en deux ans, elle est moins spectaculaire à moyen terme puisque, en euros constants, le niveau des recettes est comparable à celui de 2017. La raison principale en est la chute de la recette issue de la TVA, en raison des nombreux transferts de TVA à d'autres entités : sécurité sociale, collectivités territoriales et, depuis l'an dernier, l'audiovisuel public.

Par rapport à la prévision de la loi de finances initiale, l'augmentation est de 35,7 milliards d'euros, soit plus de 12 %, dont une part significative correspond à une estimation insuffisante réalisée en fin d'année, à une période où la plupart des recettes sont pourtant déjà connues. L'écart est moindre qu'en 2021, mais il demeure tout de même très significatif, pour la troisième année consécutive, alors même qu'aucune crise particulière n'a eu lieu en fin d'année. Il est donc nécessaire, comme le recommande la Cour des comptes, de mieux analyser ces difficultés de prévision.

Parmi les impôts, c'est l'impôt sur les sociétés qui présente les plus gros écarts entre prévision et exécution, car il porte sur les bénéfices, qui sont très sensibles à la conjoncture. Les autres grands impôts portent plutôt sur le montant absolu des revenus ou de la valeur ajoutée, qui varie moins rapidement en proportion. Si le niveau de l'impôt sur les sociétés peut paraître très élevé en 2022, avec 62,1 milliards d'euros, il faut rappeler qu'il connaît des cycles hauts et des cycles bas : en 2007 et 2008, il atteignait un niveau comparable en euros constants.

Par ailleurs, les recettes non fiscales augmentent depuis deux ans en raison principalement des versements européens au titre du plan de relance. Toutefois, je veux souligner un cas particulier : la hausse très importante du produit de la vente des quotas carbone. Alors que leur produit était négligeable il y a quelques années, la hausse du cours du carbone a assuré des rentrées de 1,4 milliard d'euros pour l'État en 2022, sans compter les 481 millions d'euros affectés à l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Cette ressource est amenée à croître, voire à se multiplier, dans les années à venir et elle devra contribuer au financement de la transition écologique.

Alors que l'État ne voit pas ses recettes augmenter à moyen terme, on pourrait croire qu'il limite ses dépenses en conséquence. Malheureusement, ce n'est pas le cas. Au contraire, les dépenses sont en hausse et parallèlement, le Gouvernement généralise l'usage de procédures d'exception qui rendent le budget de moins en moins lisible et affaiblissent la portée de l'autorisation parlementaire.

Sur le moyen terme, la progression des dépenses est très claire. Alors que l'année 2010 avait constitué une exception, le niveau des dépenses revenant rapidement à son niveau antérieur en euros constants, ce n'est pas le cas avec la crise de 2020, qui a marqué non pas un pic, mais un nouveau plancher de dépenses, situé presque un quart au-dessus du niveau de 2019.

Sur l'année 2022, les diminutions significatives portent uniquement sur les missions « Plan de relance » et surtout « Plan d'urgence face à la crise sanitaire ».

Les principales hausses relèvent des différents effets directs ou indirects de l'inflation. Il s'agit, d'une part, d'effets mécaniques, avec par exemple une hausse de la charge de la dette de 13,2 milliards d'euros, et, d'autre part, de nombreuses mesures qui ont été décidées pour soutenir le pouvoir d'achat des ménages ou aider les entreprises. La nationalisation d'EDF représente également des dépenses de 10,5 milliards d'euros sur la mission « Économie ». Le coût des mesures de soutien au pouvoir d'achat des ménages et des entreprises a été estimé par la Cour des comptes à 11,1 milliards d'euros, dont 7,7 milliards d'euros pour les remises sur les prix des carburants et 1,3 milliard d'euros pour le bouclier tarifaire sur le gaz.

Les dépenses de personnel sont marquées par deux mouvements contraires. Les effectifs de l'État sont en baisse de 5 844 équivalents temps plein (ETP). Il ne s'agit pas d'un choix résolu de réduction des effectifs de la part du Gouvernement, car la loi de finances initiale prévoyait plutôt une augmentation de 767 ETP. La raison est plus inquiétante : certains ministères, notamment l'éducation nationale et les armées, ont des difficultés à recruter et à remplacer les partants. Parallèlement, la masse salariale, en revanche, poursuit son augmentation, en raison principalement de la hausse du point d'indice.

Je termine par des observations sur l'écart croissant entre le budget tel qu'il est présenté en loi de finances initiale et la réalité des dépenses effectuées. Je citerai plusieurs exemples.

J'ai parlé des recettes et des dépenses. Non seulement elles sont éloignées de l'autorisation parlementaire, mais certaines mesures votées dans les lois de finances rectificatives ont été mises en oeuvre de manière non satisfaisante et cela concerne, dans deux cas au moins, des initiatives du Sénat.

Premièrement, le Parlement a adopté, dans la loi de finances rectificative du 16 août 2022, la création d'un programme doté de 50 millions d'euros pour la mise en place d'une carte Vitale biométrique. 4,3 millions d'euros seulement ont été utilisés pour de simples études, et le programme a été supprimé dans la loi de finances pour 2023 : pour ce programme, contrairement à d'autres, les crédits sont annulés et non pas reportés.

Deuxièmement, la seconde loi de finances rectificative a retenu, pour un montant de 100 millions d'euros, deux amendements adoptés par le Sénat qui tendaient à financer à parts égales le réseau routier des collectivités et leurs ouvrages d'art, c'est-à-dire les ponts. Si 50 millions d'euros ont bien été confiés au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) pour financer les ouvrages d'art des collectivités, les 50 millions d'euros qui devaient être affectés au réseau routier de ces mêmes collectivités ont été réorientés en gestion par l'exécutif sur le financement des ouvrages d'art du réseau routier national. C'est proprement scandaleux et je ne manquerai pas d'interpeller le ministre sur ce point. En effet, cela signifie que les accords conclus en commission mixte paritaire ne sont pas respectés.

Autre exemple d'écart entre l'autorisation parlementaire et l'exécution, les reports de crédits sont devenus une procédure ordinaire pour les crédits non consommés. Je vous en parlais déjà pour l'année 2021, mais une nouveauté en 2022 est qu'une partie de ces crédits n'ont été reportés que pour équilibrer artificiellement le décret du 21 avril 2022, ce que nous avions d'ailleurs noté au moment de l'examen de ce projet ; les autres crédits annulés à cette occasion ont été rétablis par la loi de finances rectificative du 16 août, ce qui confirme le caractère purement formel des annulations.

Enfin, la création d'un programme censé rembourser la dette covid-19 ne réduit pas réellement la dette puisque ce programme ouvre des crédits d'un côté pour rembourser des titres de dette de l'autre. Ce faisant, il brouille la notion d'autorisations d'engagement et vide les restes à payer de leur signification : il est donc de plus en plus difficile de savoir quels sont les engagements budgétaires pour les années à venir.

M. Claude Raynal, président. - Comme l'a fait remarquer Vincent Delahaye pendant votre intervention, le déflateur correspond au rapport entre la variation en valeur et en volume. Ainsi, au troisième trimestre 2022, le déflateur des importations s'élève à 7,3 et celui du PIB à 0,5, ce qui signifie que l'inflation est essentiellement liée aux importations et peu à la production interne. Ce phénomène s'inverse d'ailleurs à partir du dernier trimestre 2022 : on passe à une inflation propre à la France, et non plus seulement une inflation d'importation.

M. Éric Bocquet. - Le rapporteur général indique que l'inflation est en partie liée aux coûts de l'énergie. C'est incontestable ; cependant, selon une note du FMI récemment publiée, l'inflation serait due pour moitié à la hausse des profits des entreprises. Dans un tweet, le FMI précise : « La hausse des bénéfices des entreprises a été le principal moteur de l'inflation en Europe au cours des deux dernières années, les entreprises ayant augmenté leurs prix au-delà de la flambée des coûts de l'énergie importée. ». Ce constat vient après celui de la Banque centrale européenne (BCE), de l'Insee et de l'Autorité de la concurrence. Le rapporteur intègre-t-il cette donnée dans sa réflexion ?

Depuis des décennies, on nous rebat les oreilles avec la dette publique, car nous risquerions de perdre la confiance des marchés : en réalité, nous aurions dû la perdre depuis 1975, puisque depuis cette date, notre déficit est constaté chaque année. La France vit à découvert depuis quarante-huit ans. Depuis 1998, 10 % des titres de cette dette sont indexés sur l'inflation. Était-ce une bonne idée ? On parle de 13 milliards d'euros d'intérêts supplémentaires cette année. Cette hausse est-elle essentiellement liée aux obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation (OATi) ? La France empruntera à nouveau cette année 270 milliards d'euros. Je n'ai pas le sentiment d'une panique à l'agence France Trésor ! Chaque émission donne lieu à des propositions fort intéressantes des marchés financiers. Il semble que nous pouvons continuer à vivre à découvert très longtemps. On paie des intérêts et on réemprunte chaque année ; vous connaissez le système.

M. Vincent Delahaye. - En effet, le terme « déflateur » manque de clarté : parler de la part de l'inflation importée et de l'inflation endogène serait peut-être préférable.

Les années que nous venons de vivre étaient exceptionnelles en matière de dépenses. Je remercie le rapporteur général pour son exposé, mais la distinction entre les dépenses ordinaires et les dépenses exceptionnelles, ainsi que leur évolution sur trois années, ne me paraît pas lisible. Il est légitime de décider de dépenses exceptionnelles pendant des années de crise, à condition de revenir rapidement à la normale. J'avais demandé au Gouvernement de distinguer la part du déficit qui provient des dépenses exceptionnelles et celle qui découle des dépenses ordinaires, mais je peine à m'y retrouver.

À la page 9 de la présentation, on lit que le déficit entre les recettes nettes et les dépenses nettes du budget général s'établit à 158 milliards d'euros puis à 151 milliards d'euros. J'ai des difficultés à ce sujet.

J'aimerais entendre le rapporteur général sur l'évolution des restes à payer. Comment expliquer une telle augmentation, en dehors de l'amortissement de la dette covid-19 ? Entraînera-t-elle des conséquences sur la sincérité des comptes de l'État ?

Enfin, les effectifs diminuent tandis que la masse salariale augmente de manière importante. Ces deux phénomènes ne vont pas dans le bon sens.

Je partage le constat d'une situation alarmante des finances publiques depuis plusieurs années. Je n'avais pas voté les lois de finances initiales de 2021 et de 2022 ; je ne voterai donc pas les lois de règlement. Plus largement, le groupe Union Centriste s'abstiendra dans sa majorité sur ces deux lois de règlement.

M. Jérôme Bascher. - Je vous remercie de cette présentation confondante sur l'état de nos finances publiques et du respect de l'autorisation parlementaire. Il ne s'agit pas du tout, comme on peut l'entendre dans nos collectivités, d'une simple photographie de la gestion : ce compte ne respecte pas l'autorisation parlementaire, notamment sur les reports, et nous l'avions déjà signalé en 2021.

Un autre constat inquiétant, qui se répète d'année en année, est la disparition des ETP au moment de la loi de règlement. Diminuer les effectifs doit être une politique assumée : il ne s'agit pas de supprimer les emplois en loi de règlement. Cette manière de procéder a beau être habile, elle n'est pas du tout respectueuse de la LOLF ni des ETP autorisés au titre des fongibilités asymétriques.

J'en viens à la dette covid-19. Contrairement à nos préconisations répétées, elle a été isolée, ce qui crée une comptabilité baroque par rapport à la LOLF, puisque l'on mélange des dépenses en capital et des dépenses ordinaires, ce qui est le propre de l'autorisation budgétaire. Je suis donc furieux et je le signale dans mon rapport spécial.

Pourriez-vous revenir sur la somme des autorisations de paiement non couvertes : de combien a-t-elle augmenté ? Quelle serait la dépense véritable si elle était couverte ?

Enfin, monsieur Bocquet, sur les 13,5 milliards d'euros d'augmentation de la dette, 12,9 milliards sont liés à l'inflation.

Mme Christine Lavarde. - Il est vrai que, dans nos collectivités, lorsque l'on présente un compte administratif, on dit souvent qu'il s'agit d'une photographie de la gestion, qui correspond à ce qui a été validé par le comptable public. Ce compte retrace les flux et la manière dont ils ont été exécutés.

La Cour des comptes a rejeté les comptes de certaines administrations de sécurité sociale, mais a certifié les comptes de l'État. Or la note d'exécution budgétaire de la Cour sur la mission « Écologie » fait place à de nombreuses critiques sur les opérations qui vont à l'encontre des autorisations budgétaires et de l'information du Parlement pour des montants souvent significatifs. Ces critiques sont-elles propres à cette mission, en raison des mouvements liés à l'énergie, ou d'autres missions en font-elles l'objet ? Vous avez cité trois ouvertures de crédits votées en loi de finances rectificative. Certes, ces crédits ne sont pas toujours les plus faciles à consommer.

Le groupe Les Républicains votera contre ce projet de loi de règlement, mais nous hésitons parfois à nous abstenir. Cette année, je voterai contre, car il semble y avoir un décalage important entre ce que nous décidons et ce que nous observons dans la réalité.

M. Didier Rambaud. - Il s'agit d'un projet de loi de règlement, de même que les comptes de gestion ou des comptes administratifs adoptés dans les collectivités permettent de vérifier si les recettes ont été encaissées et les dépenses faites conformément à ce qui a été décidé.

Je ne suis pas surpris d'entendre que vous ne voterez pas cette loi de règlement, puisque vous n'avez pas voté la loi de finances. Cependant, y a-t-il vraiment scandale à examiner cette loi de règlement, dès lors que la Cour des comptes n'a pas relevé d'erreurs ? Vous parlez de recettes estimées « avec une précision insuffisante » : tant mieux, c'est que l'économie se porte mieux que prévu ! Même si le taux de l'impôt sur les sociétés a été réduit, le rendement est supérieur. C'est donc bien sur l'assiette qu'il faut agir. Vous évoquez également des dépenses sur-exécutées : l'année 2022 a été particulière. Le contexte géopolitique et les mesures exceptionnelles comme le bouclier tarifaire l'expliquent facilement.

Il faut relever les contradictions de la classe politique : nous nous accordons tous à reconnaître qu'il faut maîtriser les dépenses et que nos déficits dérivent : mais par où commencer ? Le plus bel exemple peut d'ailleurs s'observer au Sénat, avec la loi de programmation militaire !

Mme Isabelle Briquet. - Ce projet de loi de règlement ressemble fort à celui de 2021, pour lequel nous avions émis un vote négatif. Il en ira de même cette année pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, les mêmes causes entraînant les mêmes effets.

Ce texte présente d'importantes annulations de crédits et un montant de report important. Entre 2013 et 2020, la moyenne s'élevait à 2,2 milliards : nous sommes désormais bien au-delà. La Cour des comptes relève elle-même une atteinte aux principes d'annualité et de spécialité budgétaires. Il y a donc bien un risque d'insincérité des comptes, qui ne nous permet pas d'y voir clair et de dresser les perspectives adéquates.

Par ailleurs, le PLR diffère d'un compte administratif : d'abord, parce que l'exécution ne correspond pas tout à fait à la prévision, ensuite, parce que ces projets de loi de règlement, aussi bien en 2021 qu'en 2022, sont les marqueurs d'une politique de l'offre, que nous ne soutenons pas. Nous ne voterons donc pas ces textes.

M. Stéphane Sautarel. - Ce projet de loi de règlement démontre le non-respect de l'autorisation parlementaire, ce qui pose une difficulté de fond réelle, et la dégradation de nos finances publiques, qui ne peut pas être satisfaisante.

Pourriez-vous nous indiquer le montant brut des recettes fiscales ? En effet, seuls les montants nets sont indiqués.

M. Jean-Claude Requier. - Quelles seraient les conséquences concrètes d'un rejet des lois de règlements, puisque nous semblons prendre cette direction ? Si ces rejets se répétaient durant plusieurs années, quels en seraient les effets à long terme ?

À quelques semaines de la fin de mon mandat, je souhaite ajouter quelques mots sur le déficit, dans la ligne des propos de Vincent Delahaye. Chacun se lamente sur le déficit, puis on n'en parle plus. Personne ne l'a évoqué pendant la campagne présidentielle. L'exécutif comme le législateur répètent qu'il y a trop de dépenses publiques, avant d'annoncer immédiatement après de nouvelles dépenses : c'est assez contradictoire.

Je me permets un rappel historique. Lorsque de Gaulle a été élu en 1958, les finances publiques ne se portaient pas bien. En 1959, il a décidé, pour envoyer un signal fort de rigueur budgétaire, de supprimer la retraite des anciens combattants. Bien sûr, cela a provoqué un tollé et d'immenses manifestations : il a été obligé de la rétablir, mais une telle mesure était fortement symbolique. Certes, nous n'en sommes pas là, mais il faudra peut-être un jour que nous nous décidions à agir et pas seulement de manière symbolique !

M. Patrice Joly. - Le niveau d'endettement nous inquiète pour la souveraineté financière du pays, mais également pour la soutenabilité de nos finances publiques. Qui détient la dette de la France ? Quelle part détiennent respectivement la Banque de France et la BCE ?

France Stratégie nous indique que pour financer les transitions, des montants de l'ordre de 60 milliards d'euros par an devront être réalisés en investissements. Ces investissements représentent aussi un enjeu de soutenabilité des finances publiques à terme : ce seront autant de coûts qui ne seront pas à assumer en matière de dommages climatiques, mais, en outre, ils nous garantiront une économie performante afin de tenir notre place dans la compétition internationale. Le financement doit-il passer par l'emprunt ou par l'impôt ? Monsieur le rapporteur général, quel est votre avis sur les suggestions du dernier rapport de France Stratégie sur le sujet et sur l'idée de M. Pisani-Ferry de procéder à une taxation exceptionnelle sur les revenus et sur le patrimoine ?

M. Jean-François Rapin. - Je souhaite citer un exemple précis sur lequel notre commission aura sans doute à se pencher : la réserve d'ajustement au Brexit. La France s'est battue pour obtenir 700 millions d'euros auprès de la Commission européenne pour compenser les effets du Brexit. Nous peinerons à en dépenser 200 millions, si bien que les 500 millions restants seront réorientés vers d'autres dispositifs. Certes, ce sera le moyen de ne pas les perdre, mais on ne sait pas encore comment ils seront dépensés. Ces mouvements de crédits, à force de centaines de millions d'euros, finissent par former des milliards : c'est une forme de « cavalerie budgétaire » sur laquelle j'appelle l'attention de la commission.

M. Daniel Breuiller. - On constate une baisse des recettes de TVA pour le budget de l'État, car une part croissante est aujourd'hui reversée aux collectivités ou bien sert à compenser la fin de la contribution à l'audiovisuel public. Au regard des déficits actuels, quelles privations de recettes pouvons-nous encore accepter ? La contribution à l'audiovisuel public et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sont supprimées, sans que l'on se soit interrogé sur les conséquences qui en découleraient.

M. Pisani-Ferry a proposé un impôt transitoire pour les plus aisés d'entre nous, qui sont les plus pollueurs ; Bruno Le Maire répond qu'il n'en est pas question. Pourtant, si j'étais libéral, il me paraîtrait incompréhensible de me priver d'un tel niveau de recettes !

Par ailleurs, je m'interroge sur la sincérité des comptes. Les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » ont augmenté de 11 milliards d'euros. Or ce montant comprend 8 milliards d'euros d'aide au carburant : qu'y a-t-il de durable là-dedans ? J'aimerais que l'on appelle les choses par leur nom et que les aides aux carburants fossiles ne soient pas intégrées à une mission dite « Écologie ».

M. Bernard Delcros. - Nous pensions pour notre part que le contexte n'était pas favorable à la suppression de la CVAE dans ce délai, ni de la redevance audiovisuelle de manière sèche : c'est la raison pour laquelle nous avions voté contre ces propositions.

À la page 12 de la présentation, un graphique présente l'évolution des recettes de l'État. L'impôt sur les sociétés progresse fortement, alors que le taux a diminué dans le même temps de 33 % à 25 %. Il serait intéressant de connaître l'évolution des bases d'imposition : en effet, si la recette augmente alors que le taux a baissé, c'est que les bases ont fortement augmenté.

M. Albéric de Montgolfier. - Pour une fois, je suis d'accord avec Éric Bocquet. La plupart des grands États sont endettés : le stock de dette ne me semble donc pas former un sujet d'inquiétude immédiat. En revanche, la charge de la dette annuelle est en effet inquiétante : quand elle deviendra, à brève échéance, le premier poste du budget de l'État, et que son montant sera équivalent à celui de l'impôt sur le revenu, ce seront autant d'hôpitaux, de postes de policiers ou de routes en moins, et ce sera une dépense en pure perte. Sur quels résultats d'inflation le montant de 14 milliards s'appuie-t-il ? Le rapporteur général peut-il confirmer que le coût annuel de la dette deviendra le premier poste de dépenses ? Quand les Français sauront que la totalité de l'impôt sur le revenu sert à payer nos créanciers, je pense qu'ils s'interrogeront sur cette dette...

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Nous l'avions dit dans le programme de stabilité : la charge de la dette sera le premier poste de dépenses. J'entends dans le débat général un certain nombre d'interlocuteurs dire que la dette n'est pas un problème : mais que l'on parle de dette financière, économique, sociale ou écologique, cela reste une dette. Il ne faut surtout pas laisser nos concitoyens croire que ce n'est pas un problème. Cette situation créera assez rapidement des tensions à la tête de l'Europe : il suffit de regarder les efforts fournis par l'Allemagne, quand la France est toujours à la dérive budgétaire. Certains arbitrages sont rendus au détriment de la France, car il est difficile d'être écoutés lorsque l'on n'est pas dans les meilleures dispositions budgétaires.

S'agissant de l'avis du FMI, le chiffre qu'il avance est agrégé au niveau mondial, et la contribution des salaires dans le niveau de l'inflation est plus importante depuis un semestre.

Lorsque l'économie est tirée vers le haut par une dépense publique abondante, comme on l'a observé lors de la crise de 2008-2009, il en résulte des recettes exceptionnelles et l'État n'est pas toujours le premier perdant.

En 2022, le taux de marge des sociétés non financières a reculé à 31,7 % de la valeur ajoutée contre 34 % en 2021. Ces sociétés n'ont pas toutes augmenté leurs marges.

L'augmentation de la charge de la dette est mécaniquement due à l'inflation. En revanche, la question de la hausse des taux va se poser dans les années à venir.

Monsieur Delahaye, le graphique de la page 9 n'inclut pas les budgets annexes et les comptes spéciaux, d'où la différence avec le déficit budgétaire global. Par ailleurs, le rapport précise que le total des mesures pour soutenir le pouvoir d'achat s'élève à 31,8 milliards d'euros.

Le plan France 2030 contient 19,7 milliards de restes à payer ; pour la défense, ce montant s'élève à 7,7 milliards, et à 4 milliards pour l'écologie, avec le maintien de plusieurs dispositifs d'aides en 2023.

Madame Lavarde, les critiques de la Cour des comptes portent sur un grand nombre de missions, les rapporteurs spéciaux l'ont remarqué. Le décalage entre le vote en loi de finances initiale et l'exécution a tendance à dériver et à atteindre des proportions considérables, ce qui n'est pas rassurant, avec des reports de crédits massifs. Nous avons à la fois de mauvaises estimations des recettes et des dépenses sur-exécutées, tandis que le décret d'avance avait été financé par l'annulation de crédits reportés de l'année précédente.

Monsieur Requier, les conséquences d'un rejet sont surtout comptables. Des procédures spécifiques sont mises en oeuvre. Si les exécutions budgétaires se passaient mieux, il serait peut-être plus simple de voter dans l'esprit qui prévaut lors de l'adoption des comptes administratifs dans les collectivités locales.

Les recettes fiscales brutes s'élevaient à 426 milliards d'euros en 2021 et à 456 milliards d'euros en 2022. Cette augmentation est comparable à celle des recettes nettes.

Vous m'interrogez sur le moyen de financer les besoins liés à la transition énergétique : faut-il passer par l'emprunt, l'impôt ou des taxations exceptionnelles ? Pour ma part, j'estime qu'une évolution générale de tous les acteurs - l'État, mais aussi les collectivités - sera nécessaire. La transition sera donc plus facile à réaliser si l'on s'appuie sur une concertation. Je ne suis pas un fervent défenseur du secrétariat général à la planification écologique, mais il faut effectivement poser clairement la situation afin de déterminer quelle part doit être dévolue à l'État, aux collectivités et au monde économique, y compris à la finance réellement verte. Néanmoins, nous devons rester réalistes : la transition ne doit être ni trop douce ni trop brutale. Rappelez-vous, en effet, la taxe carbone, qui, bien que justifiée, a dû être abandonnée. De même, vous évoquez des recettes nouvelles : je nous souhaite bonne chance, car le niveau des prélèvements obligatoires reste bien plus élevé en France que chez nos partenaires européens. Nous devons agir avec conviction et avec ambition, en suscitant l'envie des Français d'être acteurs de cette phase de transition.

Jean-François Rapin nous a envoyé un message clair : je l'entends.

Monsieur Breuiller, vous comprendrez que je ne suis pas partisan d'une augmentation du niveau global de prélèvements.

Comme vous, je m'interroge sur la sincérité des comptes. Les reports, les autorisations d'engagement non couvertes doivent en effet susciter notre vigilance. Cependant, prenons garde aux injonctions contradictoires. Nous avons en effet tendance à produire des lois de programmation à n'en plus finir, mais, dès lors qu'il faut les mettre en oeuvre, les problèmes apparaissent. Nous devons nous en tenir au principe de réalité, car nous ne pourrons rester indéfiniment en queue de peloton sur un certain nombre d'indicateurs financiers importants.

Enfin, ce sont plutôt les banques centrales nationales que la BCE qui détiennent notre dette.

Pour conclure, je rappelle que je propose de rejeter les deux projets de lois de règlement.

M. Claude Raynal, président. - Je propose de passer au vote.

La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2021. En conséquence, elle décide de ne pas adopter chacun des articles du projet de loi.

La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter le projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2022. En conséquence, elle décide de ne pas adopter chacun des articles du projet de loi.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl22-683.html


* 1 Il semble même que la non-adoption d'un projet de loi de règlement des comptes n'était pas survenue depuis les années 1830.

* 2 L'exposé général du projet de loi, qui n'a pas de portée juridique, a également connu de légères adaptations.

* 3  Rapport n° 792 (2021-2022) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement pour 2021, déposé le 19 juillet 2022.

* 4 Voir le commentaire de l'article 6 du premier projet de loi de règlement pour 2021 dans le rapport précité réalisé au nom de la commission des finances.

* 5 Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

* 6  Rapport n° 792 (2021-2022) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement pour 2021, déposé le 19 juillet 2022.

* 7 Les ressources mises à disposition du Fonds et retracées, à titre d'information uniquement, dans le compte de commerce « Opérations avec le Fonds monétaire international » sont assimilées à un prêt, dont la créance est rachetée par la Banque de France. En conséquence le solde de ce compte de commerce n'est pas inclus dans le solde budgétaire et il n'a pas non plus d'effet sur la trésorerie de l'État.

* 8  Rapport n° 792 (2021-2022) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement pour 2021, déposé le 19 juillet 2022.

* 9  Rapport n° 792 (2021-2022) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement pour 2021, déposé le 19 juillet 2022.

* 10 Les états financiers et l'annexe sont publiés dans un même document, intitulé « Compte général de l'État » et accompagné de présentations plus synthétiques, sur : https://www.budget.gouv.fr/documentation/comptes-de-letat.

* 11  Rapport n° 792 (2021-2022) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement pour 2021, déposé le 19 juillet 2022.

* 12  Rapport n° 792 (2021-2022) de Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de règlement pour 2021, déposé le 19 juillet 2022.

* 13 Voir le dossier législatif sur le projet de loi de règlement pour 2021.

Les thèmes associés à ce dossier