N° 113

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 15 novembre 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances de fin de gestion pour 2023,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

1818, 1822 et T.A. 177

Sénat :

88 (2023-2024)

EXPOSÉ GÉNÉRAL

PREMIÈRE PARTIE
L'EXERCICE 2023 DANS LA TRAJECTOIRE PLURIANNUELLE DES FINANCES PUBLIQUES

I. UN SCÉNARIO MACROÉCONOMIQUE INCHANGÉ PAR RAPPORT À CELUI PRÉSENTÉ DANS LE CADRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2024

A. LA CROISSANCE EN 2023 A ÉTÉ FREINÉE PAR LA FORTE INFLATION ET, EN RÉPONSE, PAR LA CONTRACTION MONÉTAIRE OPÉRÉE POUR LA RAMENER À 2 %

La prévision de croissance du PIB en volume retenue par le Gouvernement pour le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 s'établit à 1,0 % et reste, ainsi, inchangée par rapport à la prévision présentée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, mais également par rapport à la prévision retenue dans le projet de loi de finances pour 2023 et dans le programme de stabilité présenté en avril 2023.

L'inflation, mesurée par l'indice des prix à la consommation, est estimée par le Gouvernement à 4,9 % pour 2023. Cela correspond à une prévision relativement centrale - la moyenne retenue par le Consensus Forecasts en novembre 2023 est de 5 %, la borne basse de 4,8 % et la borne haute de 5,2 %. Elle s'est progressivement déportée de l'énergie et des biens alimentaires - dont la consommation augmente pour la première fois sur le troisième trimestre 2023 depuis huit trimestres1(*) - vers les services. Les prix de l'énergie restent toutefois particulièrement hauts.

Cette inflation a conduit à une diminution de la consommation des ménages, tirant la croissance vers le bas.

La contraction monétaire intervenue à partir de juillet 2022, et qui s'est traduite par une augmentation des taux directeurs de 450 points de base en 14 mois, soit le durcissement le plus sévère de l'histoire de la Banque centrale européenne, a entraîné une diminution de l'investissement des ménages, sans encore se répercuter sur l'investissement des entreprises.

Décomposition de la prévision de croissance du Gouvernement
entre 2022 et 2023

(en point de PIB - base 100 au PIB de l'année 2023 - en volume)

Source : calculs de la commission des finances du Sénat d'après les comptes nationaux trimestriels de l'Insee et les documents budgétaires

Selon l'OFCE, en 2023, le choc sur les prix de l'énergie aurait amputé la croissance de 0,7 point et le durcissement de la politique monétaire de 0,4 point en 2023 : sans ces deux chocs, la croissance serait donc plus élevée de 1,1 point.

Évaluation des chocs macroéconomiques sur la croissance du PIB en 2023

(en volume et en point de pourcentage)

Source : commission des finances, d'après OFCE

B. UNE PRÉVISION DE CROISSANCE CRÉDIBLE POUR 2023 : + 1 %

Au regard des prévisions des conjoncturistes et relevées par le Consensus Forecasts, l'estimation de croissance du Gouvernement pour l'année 2023 apparait très légèrement élevée. En effet, elle est égale à la borne haute des estimations (+ 1,0 %) alors même que la moyenne des prévisions du Consensus Forecasts s'élève à 0,9 % en novembre 2023.

Évolution des prévisions de croissance, en volume, pour l'année 2023

(en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat d'après les prévisions du Consensus Forecasts de janvier 2022
à novembre 2023

Toutefois, la prévision de croissance du Gouvernement pour 2023, restée inchangée depuis le dépôt du projet de loi de finances pour 2023, ne paraît contradictoire ni avec les derniers développements conjoncturels ni avec les révisions des estimations de croissance sur les deux premiers trimestres de 2023.

Ainsi, si les comptes nationaux trimestriels publiés par l'INSEE2(*) font état d'un ralentissement de l'activité économique au troisième trimestre 2023 (+ 0,1 %), ils opèrent une révision à la hausse de sa progression au deuxième trimestre 2023 (+ 0,6 % au lieu de + 0,5 %), s'expliquant par une consommation des ménages plus élevée - à la suite d'une correction liée aux dépenses des touristes résidents et non-résidents -un investissement plus marqué, en particulier dans la construction. La Banque de France a qualifié cette hausse de « surprise »3(*), tandis que l'Insee confirme que l'accélération marquée enregistrée au deuxième trimestre résulte « en partie de facteurs ponctuels, mais que la tendance de fond de l'économie française paraît plus modérée »4(*).

La croissance au premier trimestre s'élèverait à 0,1 % contre 0 % selon la note de conjoncture de l'Insee d'octobre 20235(*). Compte tenu d'un acquis de croissance de 0,9 point au troisième trimestre 20236(*), l'atteinte d'une croissance de 1 % ne nécessiterait qu'une très faible croissance au quatrième trimestre, et semble donc tout à fait réalisable. Il faut donc ici tempérer l'invitation à la nuance faite par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis sur le PLF de fin de gestion pour 2023 en raison de la dégradation des indicateurs conjoncturels. Ceux-ci, sans doute, se dégradent, mais dans la mesure où l'activité a davantage crû sur les deux premiers trimestres que ce qui avait été mesuré par l'Insee, il est probable que la croissance pour 2023 réussisse à atteindre 1 %. La prévision de croissance du Gouvernement pour 2023 est donc crédible.

L'estimation du Gouvernement apparaît d'ailleurs en ligne avec les prévisions des institutions publiques réalisées récemment, et situées à 0,9 ou 1 %.

Comparaison des prévisions de croissance
du PIB pour l'année 2023

(en pourcentage - en volume)

Source : commission des finances du Sénat d'après les prévisions de moyen terme de la Banque de France (septembre 2022), de la note de conjoncture d'octobre 2022 de l'INSEE et des prévisions d'été de la commission européenne

II. UN DÉFICIT PUBLIC QUI S'ALOURDIT ENCORE EN 2023 PAR RAPPORT À 2022, POUR S'ÉTABLIR À 4,9 % DU PIB

Le présent projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 prévoit que le déficit public s'établira à 4,9 % du PIB en 2023. C'est le même niveau que celui retenu dans le projet de loi de finances pour 2024 et dans le programme de stabilité présenté en avril 2023, mais il est inférieur de 0,1 point à la prévision établie à l'article liminaire de la loi de finances pour 2023, qui retenait un déficit de 5 % du PIB en 2023.

Le déficit public en 2023 n'en demeure pas moins supérieur à celui enregistré en 2022, puisqu'il s'établissait alors à 4,8 % du PIB, du fait du fléchissement du solde conjoncturel, la croissance en 2023 ayant été bien inférieure à celle enregistrée en 2022.

Dans ce contexte, le déficit structurel - qui est calculé en référence au PIB potentiel prévu par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 et selon la méthodologie qu'il prévoit - s'établirait à 4,1 %.

Décomposition de la prévision de solde public en 2023

(en point de PIB)

 

2022

2023

2023

Projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023

PLPFP
2023-2027

Ensemble des administrations publiques

 

Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel)

- 4,2

- 4,1

- 4,1

Solde conjoncturel (2)

- 0,5

- 0,7

- 0,7

Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel)

- 0,1

- 0,1

- 0,1

Solde effectif (1+ 2+ 3)

- 4,8

- 4,9

- 4,9

Dette au sens de Maastricht

111,8

109,7

109,7

Taux de prélèvements obligatoires (y.c UE, nets des CI)

45,4

44,0

44,0

Dépense publique (hors CI)

57,7

55,8

55,9

Dépense publique (hors CI, en Md€)

1 523

1 573

1 575

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) 1

- 1,1

- 1,4

- 1,3

Principales dépenses d'investissement (en Md€) 2

 

 25

25

Administrations publiques centrales

Solde

- 5,2

- 5,3

- 5,4

Dépense publique (hors CI, en Md€)

625

630

631

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

- 0,1

- 3,8

- 3,6

Administrations publiques locales

Solde

0,0

- 0,3

- 0,3

Dépense publique (hors CI, en Md€)

295

312

312

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

0,1

1,0

1,0

Administrations de sécurité sociales

Solde

0,4

0,7

0,7

Dépense publique (hors CI, en Md€)

704

730

730

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

- 2,4

- 0,5

- 0,5

1 À champ constant.
2 Au sens de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.
3 À champ constant, hors transferts entre administrations publiques.

Source : article liminaire du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 dans sa version issue de l'Assemblée nationale

L'identité entre la prévision de solde effectif pour 2023 présentée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024 et celle du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 masque des évolutions de prévision sur les dépenses et les recettes, qui s'annulent toutefois, à savoir :

- en premier lieu, un niveau de recettes légèrement inférieur (- 0,5 milliard d'euros) à la prévision de septembre 2023 ;

- et en second lieu, un niveau de dépenses un peu plus faible que prévu (- 1,7 milliard d'euros).

Évolution de la prévision de prélèvements obligatoires pour 2023
entre le PLF pour 2024 et le projet de loi de finances
de fin de gestion pour 2023

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après le rapport économique, social et financier du PLF pour 2024 et l'avis n° HCFP- 2023-9 du Haut conseil des finances publiques relatif au projet de loi de finances de fin de gestion pour l'année 2023

Cette baisse des recettes s'accompagne d'une baisse de dépenses du budget général à hauteur de 1,7 milliard d'euros. Toutefois, les nouvelles dépenses votées par l'Assemblée nationale, majorant les crédits de 377 millions d'euros, viennent minorer cette baisse. Présentées dans le détail dans la deuxième partie du présent rapport, ces ouvertures de crédit visent essentiellement à soutenir l'effort de guerre ukrainien, à rehausser les montants des prestations sociales versées aux familles monoparentales, à contribuer au financement des délégations de service public maritime et aérien en Corse et à compenser les pertes des agriculteurs dont les exploitations sont touchées par le mildiou. L'agrégat des dépenses des administrations centrales, prévues à 631 milliards d'euros dans le PLF 2024 puis révisées à hauteur de 629 milliards d'euros dans la version initiale du présent projet de loi de finances de fin de gestion, s'établira finalement à 630 milliards d'euros.

Au total, l'effet sur le solde public est donc positif, mais si faible qu'il ne se manifeste pas en pourcentage du PIB.

Évolution de la prévision de dépenses pour 2023
entre le PLF pour 2024 et le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 dans sa version issue de l'Assemblée nationale

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après l'article liminaire du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 et l'avis n° HCFP- 2023-9 du Haut conseil des finances publiques relatif au projet de loi de finances de fin de gestion pour l'année 2023

L'évolution des dépenses par rapport à l'évaluation du PLF pour 2024 concerne le seul champ de l'État, la prévision relative aux collectivités locales et aux administrations sociales demeurant inchangée.

Au total, la responsabilité du déficit public repose en 2023 sur l'État, dont la situation financière, avec un déficit 5,3 % du PIB, est très dégradée. Les administrations locales réussissent en revanche à équilibrer leurs comptes, avec un déficit limité à 0,3 % du PIB résultant pour l'essentiel des dépenses d'investissement de la Société du Grand Paris. L'excédent des administrations de sécurité sociale, à hauteur de 0,7 % du PIB, est loin d'être suffisant pour rattraper le déficit extrême de l'État.

Décomposition du solde public en 2023

(en point de PIB)

Note : la somme des arrondis n'est pas nécessairement égale à l'arrondi de la somme.

Source : commission des finances d'après l'article liminaire du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023

DEUXIÈME PARTIE
LE BUDGET DE L'ÉTAT

I. UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE L'ÉTAT SUPÉRIEUR DE 7,6 MILLIARDS D'EUROS AUX PRÉVISIONS DE LA LOI DE FINANCES INITIALE ET QUI RETROUVE LES NIVEAUX ATTEINTS PENDANT LA CRISE SANITAIRE

Selon le présent projet de loi de finances rectificative, le déficit budgétaire de l'État, tel qu'il résulte du tableau d'équilibre du budget7(*), s'établirait en 2023 à 172,5 milliards d'euros, en dégradation de 7,6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) où il était annoncé à 164,9 milliards d'euros.

Cette estimation est très proche de celle donnée à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2024, qui était de 172,1 milliards d'euros.

Lors de l'examen du texte par l'Assemblée nationale en première lecture, le déficit a été aggravé de 377 millions d'euros, pour atteindre 172,9 milliards d'euros.

Le déficit à financer, tel que comptabilisé dans le besoin de financement, serait de 171,4 milliards d'euros dans le texte initial et de 171,7 milliards d'euros dans le texte adopté par l'Assemblée nationale8(*).

A. L'AGGRAVATION DU DÉFICIT PAR RAPPORT À LA LFI PROVIENT DE MULTIPLES EFFETS AGISSANT EN SENS OPPOSÉS, EN RECETTES COMME EN DÉPENSES

La dégradation du déficit s'explique par plusieurs effets en recettes et en dépenses qui se traduisent globalement par moins de recettes et plus de dépenses que prévu.

S'agissant des recettes fiscales nettes, une importante plus-value de l'impôt sur les sociétés est attendue une nouvelle fois (+ 6,0 milliards d'euros), tandis que la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité, à l'inverse, produirait 9,5 milliards d'euros de moins que prévu.

Décomposition de l'évolution du déficit budgétaire de l'État en 2023

(en milliards d'euros)

LFI : loi de finances initiale. PLFFG : projet de loi de finances de fin de gestion. Contrib. rente infra électricité : contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires. Ouvertures et annulations de crédits hors remboursements et dégrèvements d'État

Le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne est révisé à la baisse (-1,1 milliard d'euros) à la suite de retards d'exécution en lien avec l'adoption du budget rectificatif de l'Union. 

S'agissant des dépenses nettes, l'augmentation de la charge de la dette (+ 3,8 milliards d'euros) et des ouvertures de crédits sur plusieurs missions, notamment la mission « Défense » (+ 2,1 milliards d'euros) sont partiellement compensées par des annulations de crédit soit mis en réverse, soit sous-consommés.

Les ouvertures et annulations de crédits seront présentées plus en détail infra.

Toutefois ces ouvertures et annulations n'expliquent pas la totalité de l'évolution des prévisions de dépenses et de déficit, puisque le déficit à financer prévisionnel, qui détermine les emprunts qui devront effectivement être souscrits, est de 171,4 milliards d'euros.

Si le déficit budgétaire, inscrit au tableau d'équilibre, résulte de la différence mathématique entre les prévisions de recettes et les crédits ouverts dans les lois de finances de l'année, nets des annulations réalisées dans les lois de finances rectificatives ou de fin de gestion de l'année, le déficit à financer repose sur une estimation des crédits qui seront réellement consommés et correspond aux montant qui devront être effectivement empruntés. La différence peut provenir notamment des crédits consommés sur des crédits reportés de l'année précédente (donc ouverts dans une loi de finances antérieure) ou, à l'inverse, de crédits ouverts par une loi de finances de l'année mais qui ne feront pas l'objet d'une annulation avant la fin de l'exercice (soit parce qu'ils seront reportés à l'exercice suivant, soit parce qu'ils seront annulés dans la loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année9(*)).

Ainsi, selon les éléments communiqués au rapporteur général au sujet de la différence entre le déficit budgétaire et le déficit à financer, le Gouvernement prévoit des moindres dépenses sur les comptes spéciaux, tout particulièrement le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » dont les dépenses seraient inférieures de 1,4 milliards d'euros au montant des crédits ouverts en loi de finances initiale. Les crédits correspondants ne sont pas annulés dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion et pèsent donc toujours sur le déficit budgétaire.

Par ailleurs, le Gouvernement a annulé 5 milliards d'euros de crédits par un décret pris le 28 septembre dernier10(*). S'il a présenté ce décret comme une mesure d'économie, il prenait surtout les devants sur le présent projet de loi de finances de fin de gestion, qui aurait pu proposer les mêmes annulations de crédit. Les crédits annulés consistaient pour l'essentiel en l'annulation de 700 millions d'euros affectés à la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles, dont le Sénat avait dénoncé le niveau très excessif lors de la discussion du projet de loi de finances initiale, et de 4 milliards d'euros non consommés sur le programme 134 » Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie », dont 3,2 milliards d'euros résultaient de crédits reportés de l'année 2022.

S'agissant des consommations de crédits reportés, au 30 octobre 2023, plusieurs programmes avaient d'ores et déjà consommé un montant de crédits supérieur au montant des crédits ouverts hors reports11(*) : le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » les programmes 364 « Cohésion » et 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance » et le programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », comme l'illustre le graphique ci-dessous.

Consommation de crédits reportés

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des données du système d'information Chorus au 30 octobre 2023

Le rapporteur général relève en outre que 36 programmes du budget général font l'objet, dans le projet de loi de finances pour 2024 transmis au Sénat, d'une demande de dérogation à la limitation à 3 % des reports de crédits de paiement, posée par la loi organique relative aux lois de finances, il est prévisible que, une fois de plus, le Gouvernement procédera à des reports massifs de crédits, d'ailleurs déjà décrits de manière partielle dans certains documents budgétaires.

B. CE NIVEAU DE DÉFICIT, BIEN QUE DÉJÀ CONSIDÉRABLE, POURRAIT ENCORE S'AGGRAVER

Le déficit budgétaire, prévu à un niveau de 172,9 milliards d'euros, serait proche de ceux observés en pleine crise sanitaire en 2020 (178,1 milliards d'euros) et en 2021 (170,7 milliards d'euros).

Évolution du solde budgétaire depuis 2012

(en milliards d'euros)

PLF 2024 : solde résultant du texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale. PLFFG : solde budgétaire tel que résultant du texte adopté par l'Assemblée nationale.

Source : commission des finances, à partir des lois et projets de loi de finances

Toutefois, les années récentes ont été caractérisées par un écart bien plus important qu'auparavant entre la prévision de solde budgétaire faite en fin d'année et le solde effectivement réalisé.

Ainsi, le déficit prévisionnel constaté en loi de règlement a-t-il été en 2020 de 178,1 milliards d'euros, contre 223,3 prévus dans la quatrième loi de finances rectificative de l'année 2020, soit un écart de 45,2 milliards d'euros. L'écart a été de nouveau très élevé les deux années suivantes, alors que, à cette période de l'année, les prévisions sont théoriquement très proches de l'exécution12(*).

Écart entre le solde budgétaire prévu en fin d'année
et le solde exécuté

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances

Ces écarts ne sont pas dus qu'à la situation de crises de grande ampleur qui a caractérisé ces dernières années. Ils témoignent également de la non-utilisation d'enveloppes de crédits très importantes ouvertes en loi de finances initiale, sans rapport avec les besoins de l'année, ou encore en fin d'année, ainsi que de la difficulté grandissante qu'éprouve apparemment le Gouvernement à prévoir le niveau des recettes fiscales. Une telle imprévoyance du Gouvernement interroge alors même qu'il ne cesse de communiquer sur un budget construit et exécuté « à l'euro près ».

Pour 2023, une source d'incertitude sur le niveau du déficit budgétaire en fin d'année demeure en particulier s'agissant de la date du versement attendu, à hauteur de 10,9 milliards d'euros, au titre du financement du plan de relance. Si ce versement n'avait pas lieu avant la fin de l'exercice, le niveau du déficit s'aggraverait d'autant, avec un effet inverse sur celui de l'exercice 2024.

II. DES RECETTES LÉGÈREMENT DIMINUÉES, À HAUTEUR DE 1,1 MILLIARD D'EUROS, MALGRÉ UN SURCROÎT D'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

Les prévisions de recettes du budget général sont diminuées de 1,1 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale.

Pourtant, les prévisions de recettes fiscales nettes sont revues à la hausse de 2,4 milliards d'euros, par plusieurs mouvements contraires.

Évolution des recettes de l'État en 2023

(en milliards d'euros)

Contrib rente élec. : contribution sur la rente infra-marginale de la production d'électricité. FRR : facilité pour la reprise et la résilience.

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, les recettes fiscales n'ont pas été modifiées, à l'exception d'une minoration des recettes nettes de TVA d'un montant de 1,3 million d'euros, résultant de l'affectation d'une part supplémentaire de cet impôt au compte de concours financiers » Avances à l'audiovisuel public » afin de rehausser le montant de la dotation complémentaire prévue par l'Institut national de l'audiovisuel.

S'agissant d'un projet de loi de finances de fin de gestion, il ne comprend pas de mesure modifiant les règles fiscales pour l'avenir. Il intègre toutefois les dernières estimations concernant le produit des impôts et des recettes non fiscales pour l'année en cours, qui restent proches de celles présentées à l'occasion du dépôt du projet de loi de finances pour 2024.

A. LES PRÉVISIONS DE RECETTES FISCALES NETTES SONT EN HAUSSE DE 2,4 MILLIARDS D'EUROS PAR DES MOUVEMENTS EN SENS CONTRAIRES ET GRÂCE À UN PRÉLÈVEMENT SUR L'UNÉDIC

Les recettes fiscales nettes seraient de 330,6 milliards d'euros, en hausse de 2,4 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale (328,2 milliards d'euros) et quasiment identiques à 2022 (330,2 milliards d'euros13(*)).

Le montant révisé lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2024 était de 332,1 milliards d'euros.

Évolution des prévisions de recettes fiscales nettes

(en milliards d'euros)

Révisé : produit prévu lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2024.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des projets de loi de finances pour 2024 et de fin de gestion pour 2023

L'évolution est donc limitée pour les grands impôts par rapport à l'estimation faite lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2024, dont les grandes lignes ont été présentées par le rapporteur général devant la commission des finances le 8 novembre 202314(*).

S'agissant de l'impôt sur les sociétés, un bénéfice fiscal des entreprises plus élevé que prévu en 2022 explique une partie importante de la hausse de 6,0 milliards d'euros du produit.

Son augmentation est compensée par le moindre produit perçu sur les recettes fiscales autres que celles provenant des quatre grands impôts. En particulier, la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité, instaurée par l'article 54 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 et concernant les revenus des producteurs d'électricité dépassant un seuil défini en fonction des coûts de production, produirait un rendement inférieur de 9,5 milliards d'euros à celui prévu en loi de finances initiale. La moins-value était prévue à 8,6 milliards d'euros lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2024.

Le surcroît d'impôt sur le revenu est une conséquence de la révision des hypothèses macroéconomiques.

Celui concernant la taxe sur la valeur ajoutée s'explique principalement par le prélèvement de 2 milliards d'euros sur le budget de l'Unédic réalisé par l'article 2 du présent projet de loi de finances de fin de gestion, qui se traduit par une réduction d'autant de la part de TVA qui lui est affectée.

B. LA PRÉVISION DE RECETTES NON FISCALES EST INFÉRIEURE DE 4,4 MILLIARDS D'EUROS AUX MONTANTS ANTICIPÉS

S'agissant des recettes non fiscales, leur niveau serait de 26,5 milliards d'euros, inférieures de 4,4 milliards d'euros au niveau prévu en loi de finances initiale (30,9 milliards d'euros). Cette diminution résulte principalement d'une révision à la baisse des dividendes et recettes assimilées (- 2,5 milliards d'euros) et du versement prévisionnel au titre du financement du plan de relance par l'Union européenne dans le cadre de la facilité pour la reprise et la résilience (FRR, - 2,1 milliards d'euros).

Ce versement n'ayant pas encore eu lieu, les prévisions de recettes non fiscales et, par conséquent, de solde budgétaire, sont conditionnés à son versement effectif d'ici à la fin de l'exercice 2023.

Évolution des estimations de recettes non fiscales

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, à partir des projets de loi de finances pour 2024 et de fin de gestion pour 2023

III.  DES OUVERTURES NETTES DE CRÉDITS DE 3,8 MILLIARDS D'EUROS SUR LE BUDGET GÉNÉRAL

En autorisations d'engagements, le texte initial du présent projet de loi de finances de fin de gestion, hors remboursements et dégrèvements, ouvre 10,5 milliards d'euros sur 29 programmes du budget général et annule 5,2 milliards d'euros sur 71 programmes.

En crédits de paiement, il ouvre 9,0 milliards d'euros sur 30 programmes du budget général et annule 5,2 milliards d'euros sur 73 programmes.

Les ouvertures nettes de crédits sont donc de 5,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3,8 milliards d'euros en crédits de paiement.

Au niveau des missions du budget général, 14 missions connaissent des ouvertures nettes et 15 missions des annulations nettes en autorisations d'engagement. 13 missions connaissent également des ouvertures nettes et 17 missions des annulations nettes en crédits de paiement.

Ouvertures nettes par mission, hors remboursements et dégrèvements,
en crédits de paiement (CP)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir de l'état B du projet de loi de finances rectificative (texte initial, avant examen par l'Assemblée nationale)

Sur la mission « Remboursements et dégrèvements », 12,5 milliards d'euros sont ouverts en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 200 » Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État (crédits évaluatifs) » et 15,0 millions d'euros, également en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, sur le programme 201 » Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux ». Pour mémoire, seuls les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux sont pris en compte pour le calcul des dépenses nettes du budget général, les remboursements et dégrèvements d'impôts d'État étant retranchés aussi bien des dépenses nettes que des recettes nettes.

Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, des crédits ont été ouverts ou annulés sur 21 programmes du budget général. Au total, 378,5 millions d'autorisations d'engagement et 376,5 millions d'euros de crédits de paiement ont été ouverts et 3,2 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 1,2 million d'euros de crédits de paiement ont été annulés, soit une augmentation nette de crédits de 375,3 millions d'euros en autorisations d'engagement » et en crédits de paiement.

Ces ouvertures nettes de crédit sont d'un montant particulièrement élevé. Sur les douze dernières années, seule l'année 2020, au moment le plus incertain de la crise sanitaire, a connu un montant d'ouvertures nettes de crédit plus élevé, ainsi que l'année 2022 pour les missions autres que « Remboursements et dégrèvements ».

Ouvertures de crédits dans le collectif budgétaire de fin d'année

(en milliards d'euros)

R&D : remboursements et dégrèvements. 2023 : texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

Source : commission des finances, à partir des lois de finances rectificatives de fin d'année et du présent projet de loi de finances de fin de gestion

A. DES OUVERTURES DE CRÉDITS DE 9,0 MILLIARDS D'EUROS SUR LE BUDGET GÉNÉRAL, HORS REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS

1. Mission « Administration territoriale de l'État » : une ouverture de crédits réduite mais peu documentée

Des crédits nouveaux sont ouverts sur le programme 354 « Administration territoriale de l'État » à hauteur de 5,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, et sur le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » à hauteur de 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Dans les deux cas, le projet de loi de finances de fin de gestion justifie cette ouverture de manière succincte, voire tautologique, par un surcroît d'activité des services.

2. Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » : un soutien de près de 1 milliard d'euros pour faire face aux crises

Des ouvertures de crédit de 912,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 831,3 millions d'euros en crédits de paiement sont demandées sur cette mission en réponse aux différentes crises survenues au cours de l'année (indemnisation économique liée aux crises de l'influenza aviaire, viticulture, agriculture biologique, etc.) :

- sur le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » pour 617,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 549,4 millions d'euros en crédits de paiement ;

- sur le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » pour 289,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 275,8 millions d'euros en crédits de paiement.

Sur le programme 381 « Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG) », 6,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement doivent permettre de financer les exonérations patronales pour l'emploi de travailleurs occasionnels agricoles au titre de l'année 2023.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté :

- un amendement de notre collègue député Jean-René Cazeneuve et plusieurs de ses collègues, tendant à abonder de 20 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement les crédits du programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt » afin d'accompagner les viticulteurs les plus en difficulté de trésorerie suite à l'épisode de mildiou ;

- deux amendements identiques de nos collègues députés Charles Fournier et plusieurs de ses collègues, d'une part, et Jérémie Iordanoff et plusieurs de ses collègues, d'autre part, tendant à augmenter de 5 millions d'euros les crédits du même programme, afin d'apporter une aide exceptionnelle forfaitaire aux exploitations biologiques les plus en difficulté.

3. Mission « Aide publique au développement » : un abondement exceptionnel du compte de réserve de l'Agence française de développement

Sur le programme 110 « Aide économique et financière au développement », 76,9 millions d'euros sont ouverts en crédits de paiement afin de financer un abondement exceptionnel du compte de réserve de l'Agence française de développement (AFD). Le compte de réserve constitue un mécanisme de provisionnement du risque souverain. Ce mouvement s'explique par l'augmentation importante des bonifications de prêts accordés par l'AFD du fait de la détérioration du risque souverain de certains prêts. Un tel abondement avait déjà eu lieu une première fois sur l'exercice 2022.

Dans le même temps, le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit l'annulation de 222,4 millions de crédits en autorisations d'engagement au titre de la réserve de précaution sur ce programme.

4. Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » : les conséquences de la revalorisation du point d'indice de la pension militaire d'invalidité

14 millions d'euros sont ouverts en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » afin de couvrir l'impact de la revalorisation du point de la pension militaire d'invalidité (PMI).

5. Mission « Cohésion des territoires » : un nouvel accroissement de plus de 200 millions d'euros des coûts de la politique d'hébergement

Sur le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », 212,0 millions d'euros de crédits en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sont demandés afin de financer le « desserrement » de l'Île-de-France, c'est-à-dire le transfert de personnes hébergées vers d'autres régions, les dispositifs d'accompagnement vers le logement des déplacés ukrainiens, le maintien du parc d'hébergement à hauteur de 203 000 places et l'ajustement des coûts des places pour prendre en compte l'inflation et les créations de places pour les femmes victimes de violence.

Le rapporteur général constate que, malgré l'augmentation considérable des crédits du programme 177 (1 963 millions d'euros en 2017, plus de 3 100 millions d'euros en 2023) et l'annonce par le Gouvernement d'un mode de gestion des crédits mieux planifié, la sur-exécution des crédits et l'ouverture de crédits en fin d'année paraissent encore et toujours impossibles à éviter.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de notre collègue députée Eva Sas et plusieurs de ses collègues, tendant à abonder de 6,7 millions d'euros supplémentaires les crédits du même programme afin de soutenir les acteurs de l'hébergement d'urgence.

6. Mission « Crédits non répartis » : l'ouverture de 100 millions d'euros de crédits pour le financement de la prime de pouvoir d'achat

100 millions d'euros sont ouverts en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques ». Ils sont destinés à compléter le financement de la prime de pouvoir d'achat créée par le décret n° 2023-702 du 31 juillet 2023.

7. Mission « Culture » : des ouvertures de crédits limitées, notamment pour le financement du Pass Culture

Une ouverture de crédits de 26,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » résulte notamment d'une consommation supérieure aux prévisions de la loi de finance initiale des crédits du Pass Culture. La commission des finances a mis en avant récemment les succès quantitatifs du Pass Culture15(*), qu'il s'agit désormais de transformer en une véritable plateforme en faveur de l'éveil artistique et culturel.

Une ouverture de 3,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 2,0 millions d'euros en crédits de paiement est également demandée sur le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture » afin de financer l'Alliance internationale pour la protection du patrimoine dans les zones en conflit (ALIPH), les états généraux de l'information et certains surcoûts immobiliers.

8. Mission « Défense » : des crédits nouveaux de 2,1 milliards d'euros afin, notamment, d'accélérer le déploiement de la loi de programmation militaire

La fin de gestion 2023 se caractérise par l'attribution au ministère des Armées d'une enveloppe de 1,5 milliard d'euros non prévus par la loi de programmation militaire (LPM) 2019-202516(*), annoncée publiquement au printemps par le ministre Sébastien Lecornu.

Cette enveloppe serait destinée :

- d'une part, à faire face au surcroît d'inflation constatée en 2023 et à permettre une diminution du report de charges ;

- d'autre part, à mener un effort sur certains équipements ne pouvant attendre ou de nature à améliorer les conditions d'entrée dans la nouvelle LPM 2024-203017(*) (munitions, maintien en condition opérationnelle, préparation aux Jeux Olympiques de 2024, lutte anti-drones...).

Outre cette enveloppe, le présent projet de loi de finances de fin de gestion prévoit notamment des ouvertures de crédits sur le programme 178 « Préparation opérationnelle et emploi des forces » destinées, comme lors de l'exercice précédent, à couvrir une partie des surcoûts constatés en 2023 au titre :

- des opérations extérieures et missions intérieures, dans un contexte marqué par le retrait du Niger ;

- des carburants opérationnels, dans un contexte marqué par une forte inflation ;

- des déploiements opérationnels liés au renforcement de la posture dissuasive sur le flanc Est de l'Otan ;

- du soutien aux forces armées ukrainiennes.

Le présent projet de loi de finances de fin de gestion ne précise pas le détail de la ventilation des ouvertures de crédits entre ces différents postes de dépenses ce qui, compte tenu de leur volume, est préjudiciable à la bonne analyse du schéma de fin de gestion de l'État par le Parlement.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté six amendements identiques18(*) tendant à abonder de 200 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits du programme 146 « Équipement des forces », afin de financer des acquisitions par l'État ukrainien d'équipements militaires ou de dépenses militaires (maintenance par exemple) directement auprès des entreprises de notre base industrielle et technique de défense (BITD).

9. Mission « Écologie, développement et mobilité durables » : des ouvertures de crédit limitées sur plusieurs dispositifs

Sur le programme 205 « Affaires maritimes, pêche et aquaculture », 37,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et 16,1 millions d'euros en crédits de paiement sont demandés pour couvrir la prolongation jusqu'au 15 octobre de l'aide carburant au bénéfice des pêcheurs, de la mise en oeuvre des mesures 2023 du plan d'action pour la protection des cétacés et des refus d'apurement sur le fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP).

En outre, 4 millions d'euros sont ouverts en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 355 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État », dont les crédits sont évaluatifs, au titre d'un ajustement technique de la charge de la dette reprise de SNCF Réseau par l'État.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de nos collègues députés Liliana Tanguy et Mathieu Lefèvre, tendant à rehausser de 6,8 millions d'euros les crédits du programme 205 précité afin de prolonger le soutien de la filière pêche fortement impactée par le coût des carburants extrêmement élevé entre le 15 octobre et le 4 décembre 2023.

10. Mission « Engagements financiers de l'État » : une augmentation de 3,8 milliards d'euros de la charge de la dette

Le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit une ouverture de crédits de 3,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État », au titre de la révision à la hausse de la charge de la dette. Prévue à 50,8 milliards d'euros en loi de finances initiale 2023, celle-ci est désormais estimée à 54,7 milliards d'euros.

Cette hausse est expliquée à parts égale par une inflation plus importante qu'anticipée en loi de finances initiale et par la hausse des taux d'intérêt de court terme.

La prévision d'inflation en moyenne annuelle du Gouvernement était de 4,3 % pour la France et de 4,6 % pour la zone euro. Finalement, les inflations s'établiraient respectivement à 4,9 % et 5,4 % en moyenne annuelle, ce qui a un impact sur le coût du stock de dette indexée.

S'agissant des taux d'intérêt, l'hypothèse pour les taux à 3 mois en fin d'année était de 2,1 % lors de la loi de finances initiale. Cette hypothèse est réévaluée à 3,9 % par le présent projet de loi de finances de fin de gestion.

11. Mission « Enseignement scolaire » : une ouverture de crédits pour des mesures salariales en faveur des assistants d'éducation et des accompagnants d'élèves en situation de handicap

Le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit l'ouverture de 60 millions d'euros en autorisations d'engagement et 82,7 millions d'euros en crédits de paiement sur le programme 230 « Vie de l'élève » afin de financer les mesures du rendez-vous salarial 2023 pour les assistants d'éducation (AED) et les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH).

D'après les informations fournies au rapporteur général, le montant total des mesures du rendez-vous salarial sur le programme 230 serait de 79 millions d'euros en année pleine, soit un montant bien plus faible sur 2023. En conséquence, ces ouvertures de crédits doivent sans doute financer d'autres dispositifs, sur lesquels il est regrettable de n'avoir pas plus d'information.

12. Mission « Gestion des finances publiques » : une ouverture de crédits justifiée par des contentieux

Une ouverture de crédits de 1,4 million d'euros, en autorisations d'engagement uniquement, est demandée sur le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » afin de couvrir certains contentieux non prévus en programmation. En crédits de paiement, en revanche, 19,4 millions d'euros de crédit sont annulés au titre de sous-exécutions sur certaines dépenses du programme.

13. Mission « Immigration, asile et intégration » : des surcoûts de 340 millions d'euros pour l'accueil des personnes déplacées d'Ukraine

Sur le programme 303 « Immigration et asile », 339 millions de crédits sont ouverts en autorisations d'engagement et crédits de paiement. Cette hausse est expliquée par les surcoûts liés à l'accueil des personnes déplacées d'Ukraine.

Selon les éléments communiqués au rapporteur général, le coût de l'accueil en 2023 des réfugiés d'Ukraine sur ce programme est estimé à près de 340 millions d'euros, dont 175 millions d'euros pour le versement de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA) et 164 millions d'euros pour le financement des dépenses d'hébergement (hébergement collectif, accueil de jour et transport).

14. Mission « Investir pour la France de 2030 » : un redéploiement de crédits entre deux programmes

Sur cette mission, 9,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sont redéployés entre les programmes 421 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche » (annulation de crédits) et 422 « Valorisation de la recherche » (ouverture de crédits) afin de contribuer au financement du programme « Quartiers résilients » de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

15. Mission « Médias, livre et industries culturelles » : le soutien aux éditeurs de presse

Le programme 180 « Presse et médias » l'objet d'ouvertures de crédits de 1,4 million d'euros en autorisations d'engagement et 5,6 millions d'euros en crédits de paiement afin de compenser en partie les conséquences de l'inflation pour les éditeurs de presse. Le coût de l'aide au transport postal est également impacté par les prévisions actualisées de la Poste.

16. Mission « Outre-mer » : le financement, à hauteur de plus de 400 millions d'euros, de la hausse des exonérations de cotisations patronales

Le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit l'ouverture de 409,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 433,4 millions d'euros en crédits de paiement sur le programme 138 « Emploi outre-mer », essentiellement pour couvrir la hausse des exonérations de cotisations patronales. Pour rappel, ces dépenses sont des dépenses de guichet dont la budgétisation s'appuie sur les prévisions produites par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). Or, les dernières prévisions sont en hausse du fait des hypothèses d'évolution de la masse salariale des salariés des entreprises privées, en raison d'une hausse des salaires et du nombre d'employés.

Les variations constatées ces dernières années sur les crédits de cette action témoignent de la difficulté à établir des prévisions fiables, s'agissant de dépenses de « guichet » qui sont tributaires de la conjoncture économique et ne sont confirmées qu'à l'issue des exercices budgétaires.

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements identiques de nos collègues Sandrine Rousseau et plusieurs de ses collègues, d'une part, et Élie Califer et plusieurs de ses collègues, d'autre part, tendant à rehausser de 2 millions d'euros les crédits du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » afin d'étendre les mesures mises en place en matière de gestion des sargasses en Martinique à l'ensemble des territoires ultramarins concernés par ce phénomène.

17. Mission « Régimes sociaux et de retraite » : la hausse des besoins liés au régime de la Seita

Sur le programme 195 « Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers », des crédits de 2,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sont demandés afin de couvrir des besoins liés au régime de la Seita.

18. Mission « Recherche et enseignement supérieur » : une subvention exceptionnelle au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB)

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de notre collègue député Julie Laernoes et plusieurs de ses collègues tendant à rehausser de 3,8 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits du programme 190 « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables » afin d'allouer une subvention exceptionnelle au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), de manière à soutenir l'innovation dans la rénovation énergétique des bâtiments.

19. Mission « Relations avec les collectivités territoriales » : plusieurs dotations de soutien à certaines collectivités

S'agissant du programme 122 « Concours spécifiques et administration », une ouverture de crédits de 64,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 38,2 millions d'euros en crédits de paiement a pour objectif d'abonder un fonds créé pour aider les collectivités à reconstruire les bâtiments publics dégradés à la suite des violences urbaines de la fin juin. En effet, l'instruction du 7 juillet 2023 relative à l'accompagnement des collectivités pour la réparation des dégâts et dommages contre les biens des collectivités résultant des violences urbaines survenues depuis le 27 juin 2023 précise qu'un tel fond dédié à la reconstruction sera créé pour aider les collectivités.

D'après les informations obtenues par le rapporteur général, le montant du fonds de reconstruction est évalué à 100 millions d'euros en autorisations d'engagements et à 50 millions d'euros en crédits de paiement pour l'année 2023, et sera également financé par des crédits devenus sans emploi au sein du programme 122, à partir notamment d'une partie des crédits de la dotation de solidarité aux collectivités victimes d'événements climatiques ou géologiques (DSEC), soit 35,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 11,8 me » en crédits de paiement. Il est ainsi prévu un dégel intégral de la réserve de précaution sur le programme 122 (12 millions d'euros en autorisations d'engagement et 11,8 millions d'euros » en crédits de paiement).

L'ouverture de crédits sur le programme 122 est compensée par des annulations sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » à la même hauteur au titre du non-dégel d'une partie des crédits mis en réserve et non programmés à ce titre.

Si les subventions au titre de ce fonds ont vocation à être notifiées d'ici la fin de l'année 2023, le report des crédits pourra être nécessaire pour couvrir les paiements des subventions sur 2024.

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* *

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements identiques de nos collègues Laurent Marcangeli et plusieurs de ses collègues, d'une part, et Jean-Félix Acquaviva et plusieurs de ses collègues, d'autre part, tendant à rehausser de 40 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits du programme 122 précité, afin de reconduire, pour l'année 2023, la dotation budgétaire exceptionnelle au profit de la Collectivité de Corse instituée pour l'année 2022 par la loi n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022.

Il a également retenu deux amendements identiques déposés, pour l'un, par notre collègue député Éric Coquerel avec le soutien de la commission des finances, et, pour l'autre, par notre collègue Mickaël Bouloux et plusieurs de ses collègues, tendant à transférer 8 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » au programme 122 précité, afin de renouveler en 2023 une dotation exceptionnelle déjà versée en 2022 aux communes qui mettent en oeuvre une prime exceptionnelle ou une revalorisation des personnels employés dans les centres municipaux de santé (CMS) qui n'ont pas bénéficié de la prime dite « Ségur ».

20. Mission « Remboursements et dégrèvements » : une augmentation de plus de 12 milliards d'euros des crédits prévisionnels, liés notamment aux remboursements de TVA et d'impôt sur les sociétés

Pour mémoire, les crédits de cette mission sont évaluatifs et les ajustements de fin de gestion sont courants, pour des montants parfois très importants.

Dans le cas présent, l'ouverture de 12,5 milliards d'euros sur le programme 200 « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État » s'explique essentiellement par :

- d'une part la révision à la hausse de la prévision de remboursements et restitutions liés à la mécanique de l'impôt (+ 11,4 milliards d'euros) ;

- d'autre part, la prévision des remboursements et dégrèvements liés à la gestion des produits de l'État (+ 1,5 milliard d'euros).

Sur le premier point (+ 11,4 milliards d'euros), les ouvertures se justifient par :

- les remboursements de TVA aux entreprises en raison d'une exécution 2023 très supérieure (76 milliards d'euros) à la loi de finances initiale pour 2023 (68,6 milliards d'euros) sous l'effet de la dynamique actuelle de la TVA en raison de l'inflation, de la dynamique des demandes de remboursements de crédits de TVA et du rythme soutenu du traitement des demandes de remboursements par les services fiscaux ;

- les remboursements et restitutions d'impôt sur les sociétés (exécution prévue pour 2023 de 17,4 milliards d'euros pour des crédits ouverts en loi de finances initiale de 14,2 milliards d'euros) : cette sur-exécution s'explique par une faible évolution des bénéfices fiscaux entre 2021 et 2022 (+ 2 %) ainsi que par sa forte dispersion sur un nombre important d'entreprises de sorte que les acomptes versés, basés sur l'année N-1, année de rebond de l'activité et donc de bénéfices élevés, ont été trop élevés et qu'il est désormais nécessaire de rembourser aux sociétés les acomptes trop élevés perçus.

Sur le deuxième point (+ 1,5 milliard d'euros), les ouvertures se justifient par :

- les dégrèvements et restitutions de TVA (exécution prévue à 4 milliards d'euros pour des crédits ouverts en loi de finances initiale de 2,4 milliards d'euros) : cette sur-exécution s'explique essentiellement par un rythme de traitement des dossiers accéléré en 2023 ainsi que par le contexte d'inflation qui a généré une hausse des montants remboursés et dégrevés de TVA à des assujettis établis hors de France.

21. Mission « Santé » : une ouverture de crédits de 190 millions d'euros, en compensation à la Sécurité sociale

Le programme 379 « Compensation à la Sécurité sociale du coût des dons de vaccins à des pays tiers et reversement des recettes de la Facilité pour la Relance et la Résilience (FRR) européenne au titre du volet « Ségur investissement » du plan national de relance et de résilience (PNRR) » constitue un simple canal entre l'État et la sécurité sociale, qui permet d'assurer la traçabilité des fonds européens de la FRR en faveur du « Ségur investissement » et de compenser à la sécurité sociale les dons de vaccins à des pays tiers. En loi de finances initiale pour 2023, 1 930,4 millions d'euros avaient été budgétés sur la seule action « Ségur investissement », aucune dépense n'étant prévue au titre des dons de vaccins.

L'ouverture proposée dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion, de 190 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, correspond à l'activation de cette ligne budgétaire afin de compenser à la sécurité sociale les dons décidés dans le cadre de l'initiative Covax et dans des cadres bilatéraux.

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L'Assemblée nationale a adopté un amendement de notre collègue députée Véronique Louwagie, tendant à rehausser de 1 million d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », afin de lutter contre l'endométriose.

22. Mission « Sécurités » : des ouvertures de crédits justifiées par l'activité accrue des services de police et de gendarmerie

Le projet de loi de finances de fin de gestion prévoit, en crédits de paiement, des ouvertures de crédits de 45 millions d'euros sur le programme 176 « Police nationale » et de 40 millions d'euros sur le programme 152 « Gendarmerie nationale », justifiées par l'activité accrue des services pendant l'année, mais propose à l'inverse, en autorisations d'engagement, des annulations de crédits de 89,3 millions d'euros sur le premier programme et de 119,0 millions d'euros sur le second, au motif que des marchés ont été reprogrammés en 2024.

Selon les éléments obtenus par le rapporteur général, il s'agit de marchés relatifs à l'hôtel de police de Marseille pour le programme 176, à la reprographie et à l'habillement pour le programme 152.

23. Mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » : des ouvertures de crédits de plus de 500 millions d'euros pour financer plusieurs mesures sociales

Sur le programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes », les crédits ouverts, à hauteur de 330,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, doivent permettre de financer des dépenses de prime d'activité et de RSA recentralisé plus importantes que prévu.

En ce qui concerne la prime d'activité, le montant ouvert en loi de finances initiale pour 2023 s'élevait à 10,3 milliards d'euros ; or l'administration indique en réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux que l'impact anticipé de la revalorisation des prestations intervenue au 1er avril 2023 s'élève à 248 millions d'euros.

L'enveloppe allouée au financement du RSA recentralisé était de 1,6 milliard d'euros dans le projet de loi de finances pour 2023 ; or l'impact de la revalorisation des prestations intervenue au 1er avril 2023 s'élève à 39 millions d'euros. En outre, l'embellie de la situation de l'emploi dans les départements concernés est moindre qu'anticipée, portant le montant ouvert dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion au titre du RSA recentralisé à 43 millions d'euros.

Sur le programme 157 « Handicap et dépendance », les crédits ouverts, à hauteur de 130,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 129,8 millions d'euros en crédits de paiement, doivent permettre de financer des dépenses de relative à l'allocation pour adulte handicapé (AAH) plus importantes que prévu. La « déconjugalisation » de l'AAH est en effet entrée en vigueur au 1er octobre 2023. Ce changement du mode de calcul de la prestation et l'augmentation du nombre de bénéficiaires qui en résulte se traduit par une hausse des dépenses d'AAH de 6,6 % par rapport à 2022 - alors qu'une hausse de 3,4 % seulement était prévue dans la loi de finances initiale pour 2023.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de notre collègue député Boris Vallaud et plusieurs de ses collègues, tendant à rehausser de 70 millions d'euros les crédits du programme 304 précité, afin de créer une allocation exceptionnelle de fin d'année pour les parents élevant seuls des enfants et vivant sous le seuil de pauvreté.

Il a également retenu deux amendements identiques déposés par nos collègues députés Mickaël Bouloux et plusieurs de ses collègues, d'une part, et Véronique Louwagie et plusieurs de ses collègues, d'autre part, tendant à rehausser de 20 millions d'euros les crédits du même programme 304. Ces crédits sont destinés aux associations habilitées à l'aide alimentaire afin qu'elles puissent faire face à la forte hausse de leurs dépenses énergétiques et à l'accroissement du nombre de leurs bénéficiaires dans le contexte actuel de crise.

Le texte a enfin retenu un amendement de nos collègues députés Marina Ferrari et plusieurs de ses collègues, tendant à rehausser de 3 millions d'euros les crédits du programme 157 précité, afin de permettre aux soignants des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) qui relèvent de la convention de la branche de l'aide à domicile (BAD) de bénéficier pour l'année 2023 des revalorisations salariales actées en 2021.

24. Mission « Sport, jeunesse et vie associative » : l'accroissement de la participation de l'État au financement des Jeux olympiques et paralympiques

Une ouverture de crédits de 48 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement est répartie entre deux opérateurs.

À titre principal, 44,5 millions d'euros doivent revenir au comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (COJOP) : dans le cadre de la révision budgétaire de 2022 du COJOP, l'État a accru sa participation au financement des Jeux paralympiques afin de contribuer à l'équilibre budgétaire du comité d'organisation.

En outre, 3,5 millions d'euros sont attribués à Solideo, correspondants aux besoins complémentaires de cet établissement à la suite de la réactualisation de sa trajectoire de réduction d'effectifs, plus progressive que prévue.

25. Mission « Transformation et fonction publiques » : le financement d'une opération d'acquisition immobilière

Sur le programme 348 « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs », des crédits de 29,0 millions d'euros, en autorisations d'engagement uniquement, sont demandés afin de financer une opération d'acquisition immobilière.

26. Mission « Travail et emploi » : une ouverture de crédits de plus de plus de 1,2 milliard d'euros en autorisations d'engagement uniquement

Sur le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », le projet de loi de finances de fin de gestion propose d'ouvrir 1 251,8 millions d'euros en autorisations d'engagement uniquement, afin de contribuer à financer une sur-exécution de 2 187,3 millions d'euros au titre des aides à l'apprentissage, dont 1 443,7 millions d'euros pour les primes aux employeurs d'apprentis et 199,6 millions d'euros au titre des exonérations des cotisations des apprentis.

Cette ouverture de crédits inclut une enveloppe de 542,7 millions d'euros au titre des compensations d'exonération dans le champ des services à la personne, qui auraient été plus dynamiques qu'escompté en 2023. Concernant les aides aux employeurs d'apprentis, les entrées en apprentissage donnent lieu à l'engagement du montant total de l'aide, alors que son versement effectif est plus tardif et n'a lieu, bien souvent, que l'année suivante.

B. DES ANNULATIONS DE CRÉDITS DE 5,2 MILLIARDS D'EUROS SUR LE BUDGET GÉNÉRAL

Dans un grand nombre de cas, les annulations de crédits portent sur des crédits mis en réserve ou sur des sous-consommations de dispositifs. On peut toutefois s'étonner que le Gouvernement ne justifie l'annulation de ces crédits que par ces justifications formelles alors que la budgétisation initiale doit se conformer au principe de « justification au premier euro » et que le Parlement doit être informé du détail des dispositifs ou lignes budgétaires qui ont, en pratique, permis l'annulation de ces crédits mis en réserve ou sous-consommés.

1. Mission « Aide publique au développement » : une annulation de près de 300 millions d'euros de crédits portant sur des sous-consommations importantes

S'agissant du programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », le présent projet de loi de finances de fin de gestion propose l'annulation de 292,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 289,5 millions d'euros en crédits de paiement, que l'analyse par programme annexée au projet de loi de finances justifie au titre, principalement, des crédits mis en réserve.

Selon les éléments communiqués au rapporteur général, 194,6 millions d'euros relevaient de la mise en réserve initiale et 38,9 millions ont fait l'objet d'un surgel de 1 % effectué en septembre. Par ailleurs, 50 millions de crédits non consommés de la provision pour crises majeures du programme 209 ont été annulés du fait d'une sous-consommation de cette provision. Ce point est rassurant pour le Sénat, qui avait alerté sur la vigilance à adopter quant à cet instrument lors du projet de loi de finances 2023 : les rapporteurs spéciaux craignaient que cette réserve ne soit reportée sur d'autres actions.

En outre, 43 millions relevant de l'aide-projet gérée par l'Agence française de développement, qui devaient financer des projets au Niger et au Burkina Faso, ont également été annulés.

2. Mission « Crédits non répartis » : une annulation de 200 millions d'euros qui confirme le surdimensionnement de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles

La dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) fait l'objet d'une annulation de crédits de 200 millions d'euros. Cette annulation fait suite à une annulation de 700 millions d'euros par le décret précité du 18 septembre 2023.

L'absence de consommation de cette dotation, fixée à un niveau très élevé de 1,074 milliard d'euros en loi de finances initiale, confirme l'analyse du Sénat qui avait réduit très fortement ses crédits lors de l'examen du projet de loi de finances pour 202319(*).

3. Mission « Écologie, développement et mobilité durables » : des annulations de crédits de 1,3 milliard d'euros, dont près de 800 millions d'euros résultant notamment de la sous-exécution des crédits de MaPrimeRénov'

Une annulation importante de 780,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 1 092 millions d'euros en crédits de paiement concerne le programme 174 « Énergie, climat et après-mines ».

Selon les éléments obtenus par le rapporteur général, , l'annulation des crédits correspond à l'annulation de la réserve de précaution (0,5 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement) et des reports de crédits actés en début d'année sur ce programme (0,3 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 0,6 milliard d'euros en crédits de paiement), essentiellement pour couvrir les restes à payer (notamment chèques fioul, bois) et faire face à d'éventuels aléas en cours de gestion, notamment sur les dispositifs exceptionnels au décaissement particulièrement incertain.

L'exécution du programme recouvre donc plusieurs mouvements qui se compensent en partie.

Exécution du programme 174 en 2023

(en milliards d'euros)

 

Loi de finances initiale pour 2023

Prévision d'exécution budgétaire

Écart à la loi de finances initiale

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 174

5,8

5,6

5,3

5,0

- 0,5

- 0,5

dont prime de transition énergétique (MaPrimeRénov')

2,5

2,3

2,1

1,3

- 0,4

- 1,0

dont chèques énergie

0,9

0,8

0,8

1,3

0,0

+ 0,5

dont Aides véhicules

1,3

1,3

1,7

1,7

+ 0,4

+ 0,4

dont indemnité carburant travailleurs (ICT)

0,7

0,7

0,4

0,4

- 0,3

- 0,3

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur général

S'agissant de MaPrimeRénov' et plus généralement des aides à la rénovation énergétique distribuées par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), des crédits ont été mobilisés sur le plan de relance et la trésorerie de l'Agence, ce qui contribue à expliquer une sous-exécution budgétaire de 0,4 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,0 milliard d'euros en crédits de paiement. Selon le Gouvernement, il ne s'agirait donc pas d'un retard sur les dépenses de rénovation énergétique.

En fait, cette sous-exécution budgétaire des crédits de MaPrimeRénov ne correspond pas au niveau effectif de dépenses en faveur de la rénovation énergétique. Les prévisions actuelles sur le dispositif MaPrimeRénov' font état d'une exécution à hauteur de 2 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, qui se situerait légèrement en deçà des crédits votés en budget initial en raison des effets de l'inflation sur le coût des rénovations énergétiques, de la hausse des taux de crédits immobiliers mais aussi du renforcement des contrôles pour lutter contre les fraudes.

Le rapporteur général prend acte de ces explications, qui dénotent comment l'attribution de crédits aussi importants à une agence, à laquelle s'ajoute la pratique de reports de crédits d'une année à la suivante, rendent l'exécution des crédits bien moins facile à tracer.

En tout état de cause, le rythme des dépôts de dossiers MaPrimeRénov' a ralenti en 2023 sous l'effet de plusieurs facteurs : effets de l'inflation sur la capacité des ménages à s'engager dans les travaux, durcissement des réglementations, découplage entre les aides MaPrimeRénov' et les certificats d'économie d'énergie, mais aussi le renforcement des actions de contrôle en matière de lutte contre les fraudes.

Au total, on comptait, au 22 octobre 2023, 442 732 rénovations pour un objectif de 721 957 et l'administration prévoit d'aboutir fin décembre à 550 000 rénovations environ, soit 76 % de l'objectif seulement. Le dispositif faisant l'objet d'une réforme globale dans le projet de loi de finances pour 2024, il conviendra de suivre l'an prochain si ces facteurs continuent à limiter le rythme de progression des rénovations énergétiques.

S'agissant du programme 181 « Prévention des risques », l'annulation proposée de 23 millions d'euros en autorisations d'engagement et 58 millions d'euros de crédits de paiement est motivée par une annulation portant sur une partie des crédits de la réserve de précaution. Or le montant mis en réserve sur ce programme n'était que de 49,3 millions d'euros. Selon les éléments obtenus par le rapporteur général, 11 millions d'euros annulés en crédits de paiement concernent l'Institution national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), qui seront imputés sur la trésorerie de l'opérateur. Les autres crédits annulés consistent notamment en crédits non utilisés sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », qui est sous-exécuté certaines années. Les restes à payer sur ce fonds demeurent d'ailleurs élevés (598,4 millions d'euros fin 2022).

4. Mission « Économie » : une nouvelle annulation de 400 millions d'euros sur les régimes d'aide aux entreprises, qui ont déjà fait l'objet d'une annulation de 4 milliards d'euros par décret

Le programme 134 « Développement des entreprises et régulation » a déjà connu une annulation de crédits de 4,0 milliards d'euros par le décret précité du 18 septembre 2023. Le rapport relatif à ce décret justifie l'annulation par une révision à la baisse de la prévision d'exécution de l'aide visant à compenser la hausse des coûts d'approvisionnement en énergie des entreprises particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine (guichet d'aide gaz et électricité). Il était également précisé que cette moindre consommation tenait notamment au fait que le prix de l'énergie était plus favorable qu'escompté au moment du calibrage du dispositif et que 543 millions d'euros d'aides avaient été versées aux entreprises depuis l'instauration du dispositif en juillet 2022 ; le dispositif est ouvert jusqu'à la fin de l'année 2023.

Le présent projet de loi de finances de fin de gestion prévoit pour le programme 134 une annulation supplémentaire de 321,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 422,8 millions d'euros en crédits de paiement du fait essentiellement, selon l'analyse par programmes annexée au projet de loi, d'une sous-exécution de la compensation carbone et du guichet en faveur des entreprises électro-intensives.

Pour mémoire, deux dispositifs de soutien ont été mis en place sur le programme 134 en 2022 afin d'aider les entreprises à faire face à la hausse des prix de l'énergie :

- 3 milliards d'euros ont été ouverts par la première loi de finances rectificative pour 2022, auxquels la loi de finances initiale pour 2023 a ajouté 4 milliards d'euros afin de financer le guichet « énergo-intensifs » visant à compenser la hausse des prix pour les entreprises grandes consommatrices d'énergie. Ce dispositif a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2023 ;

- par ailleurs, 80 millions d'euros ont été ouverts par la même première loi de finances rectificative pour 2022 afin de financer la mise en place d'une aide destinée aux entreprises du secteur des travaux publics, visant à couvrir la hausse du prix du gazole non routier (GNR). Cette aide n'a pas été prolongée en 2023.

L'annulation de crédits tire les conséquences de la très large sous-consommation des crédits ouverts : les crédits non consommés en 2022 et reportés à 2023, d'un montant de 3,2 milliards d'euros, n'auront donc pas été utilisés. À la mi-octobre 2023, 803 millions d'euros d'aides avaient été versées sur le guichet « énergo-intensifs ».

Les annulations proposées par le projet de loi de finances de fin de gestion permettent donc de conserver une marge de précaution suffisante pour la fin de gestion.

Sur le programme 367 « Financement des opérations patrimoniales en 2024 sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » », en revanche, aucune annulation de crédit n'est prévue.

Ce programme conserve pourtant 2 milliards d'euros de crédits, issus d'une ouverture de crédits de 12,7 milliards d'euros par la première loi de finances rectificative pour 2022. À la fin 2022, 4,1 milliards d'euros restaient disponibles sur ce programme, qui ont été pour partie reportés à 2023 (2 milliards d'euros) et pour partie proposés à l'annulation dans le projet de loi de règlement pour 2022 (2,1 milliards d'euros). Selon les éléments obtenus par le rapporteur général, ces crédits ouverts en 2022 seront donc reportés une nouvelle fois à 2024.

Cette pratique est emblématique du mode de gestion du Gouvernement qui, sur des montants extrêmement élevés, préfère reporter les crédits d'année en année, en vue d'une utilisation hypothétique, plutôt que de présenter en loi de finances de l'année le montant véritable des dépenses envisagées.

5. Mission « Engagements financiers de l'État » : un moindre coût des prêts garantis à hauteur de près de 500 millions d'euros

Sur le programme 114 « Appels en garantie de l'État », dont les crédits sont évaluatifs, 490,9 millions d'euros sont annulés en raison d'une sinistralité moindre qu'attendue des garanties instituées pendant la crise sanitaire, telles que les prêts garantis par l'État (PGE).

6. Mission « Immigration, asile et intégration » : des annulations de crédits liées au retard de déploiement d'un dispositif d'intégration des réfugiés

Les annulations de crédits prévues sur le programme 104 » Intégration et accès à la nationalité française », d'un montant de 18,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et 50,5 millions d'euros en crédits de paiement, sont déterminées selon les éléments communiqués au rapporteur général en fonction des besoins effectivement constatés, correspondent essentiellement à des sous-consommations de certains dispositifs d'intégration, en particulier au titre du programme d'intégration des réfugiés Accompagnement personnalisé dans le logement et l'emploi (AGIR), en cours de déploiement sur l'ensemble du territoire. Les annulations de crédit tirent les conséquences des difficultés de déploiement de ce programme, qui a vocation à se poursuivre et se généraliser en 2024 grâce aux crédits prévus par le projet de loi de finances.

7. Mission « Justice » : une annulation de crédits en autorisations d'engagements liée à des retards de projets informatiques

Sur le programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice », l'annulation de 117,7 millions d'euros en autorisations d'engagement va au-delà de la réserve de précaution et s'explique par des décalages dans les engagements sur les projets informatiques. L'annulation de 14,8 millions d'euros en crédits de paiement porte sur la réserve de précaution.

8. Mission « Recherche et enseignement supérieur » : une annulation de crédits de plus de 60 millions d'euros

Sur le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », il est procédé à une annulation de 90,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 64,6 millions d'euros en crédits de paiement qui, d'après l'analyse par programme annexée au projet de loi de finances de fin de gestion, correspond à une « annulation partielle de la réserve de précaution, permettant de financer, en parallèle une partie des surcoûts issus du rendez-vous salarial de juillet 2023 ». Cependant, d'après les informations du ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche, ces montants reviennent à annuler la quasi-totalité de la réserve de précaution, qui s'élève à 93,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 67,6 millions d'euros en crédits de paiement. Dans ces conditions, on peut s'interroger sur le montant des surcoûts salariaux pris en charge par redéploiement.

9. Mission « Régimes sociaux et de retraite » : un besoin de financement du régime SNCF minoré de près de 200 millions d'euros

Le programme 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres » fait l'objet d'une annulation de crédits de 188,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Selon les informations obtenues par le rapporteur général, le régime SNCF afficherait un besoin de financement minoré égal à ce montant par rapport à la loi de finances initiale pour 2023.

Cette minoration est majoritairement liée à des facteurs portant sur les recettes pour près de 130 millions d'euros, concernant aussi bien les compensations versées par la sécurité sociale que les cotisations issues de la hausse du taux T1 à la charge de la SNCF, encore plus dynamiques via les différentes mesures de revalorisations salariales récentes.

Elle est également liée à des facteurs portants sur de moindres dépenses de pensions pour près de 60 millions d'euros, liés principalement à une surestimation des effets de la revalorisation exceptionnelle de juillet 2022 sur les dépenses de 2023.

10. Mission « Santé » : une rectification de la prévision de consommation de l'aide médicale d'État

S'agissant du programme 183 « Protection maladie », les crédits annulés, à hauteur de 65,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, correspondent à une rectification de la prévision de consommation au titre de l'aide médicale d'État (AME). En projet de loi de finances pour 2023, il était prévu que les dépenses d'AME de droit commun augmentent de 133 millions d'euros, soit 12,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. La prévision a été revue à la baisse, d'où l'annulation de crédits dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion.

Cette annulation témoigne des difficultés du Gouvernement pour prévoir correctement les dépenses liées à l'AME et établit l'évolution des dépenses d'AME en 2024 à + 5,4 % par rapport à l'exécution attendue en 2023.

11. Mission « Travail et emploi » : une réduction de crédits de 750 millions d'euros liée à une réforme du mode de paiement par l'Agence de services et de paiement

Sur le programme 102 « Accès et retour à l'emploi », les annulations de crédits, à hauteur de 753,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 755,7 millions d'euros en crédits de paiement, correspondent notamment, pour 200 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, à la réforme de la facturation à l'Agence de services et de paiements (ASP). En effet, la généralisation de la facturation à terme échu entrainerait un décalage des paiements initialement prévus en 2023 vers l'exercice 2024.

En outre, il est indiqué que 80,7 millions d'euros font l'objet d'une annulation au titre de sous-exécutions diverses, qui concernent notamment le Contrat d'engagement jeune (CEJ).

Enfin, 475,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement font l'objet d'une annulation correspondant à 6,2 % en autorisations d'engagement et 6,3 % en crédits de paiement des crédits du programme. Ce montant correspond à une annulation de la réserve de précaution, fixée en cours de gestion à 486 millions d'euros en autorisations d'engagement et 175 millions d'euros en crédits de paiement, selon les réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux.

Sur le programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations au travail », les 13,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et 14,5 millions d'euros en crédits de paiement annulés correspondent à des annulations de 16,6 % (autorisations d'engagement) et 13,1 % (crédits de paiement) des crédits du programme. Selon l'analyse par programme annexée au présent projet de loi de finances de fin de gestion, il s'agit de crédits « mis en réserve et libres d'emploi », formule également employée pour une annulation de crédits mineure sur le programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail », ce qui ne constitue pas une description suffisamment claire de l'annulation proposée de la part du Gouvernement. Pour mémoire, la mise en réserve de précaution a été fixée sur ce programme à 8,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 5 millions d'euros en crédits de paiement.

IV. LES OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS SUR LES BUDGETS ANNEXES ET LES COMPTES SPÉCIAUX

A. DES OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS LIMITÉES SUR LES BUDGETS ANNEXES

Les budgets annexes font l'objet d'annulations de crédit mineures, d'un montant de 4,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 12,7 millions d'euros en crédits de paiement pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dont 2 millions d'euros de charges de personnel, et de 1,9 million d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement pour le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

Ces annulations sont liées à l'annulation de crédits mis en réserve ou de sous-exécutions.

B. LES MOUVEMENTS EN CRÉDITS ET EN RECETTES SUR LES COMPTES SPÉCIAUX

1. Compte d'affectation spéciale « Avances à l'audiovisuel public » : un financement accru pour combler l'impasse de trésorerie de l'Institut national de l'audiovisuel

Les programmes 842 « ARTE France » et 844 « France Médias Monde » font l'objet d'annulations de crédits, respectivement, de 26,7 millions d'euros et 1,5 million d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, afin de corriger des effets fiscaux résultant de la suppression de la contribution à l'audiovisuel public en 2022.

Une ouverture de crédits de 5,0 millions d'euros, en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, est demandée sur le programme 845 « Institut national de l'audiovisuel » afin de combler une rupture de trésorerie pour cet organisme dans un contexte de forte inflation.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de nos collègues députés Mathieu Lefèvre et Alexis Izard, tendant à rehausser de 1,3 million d'euros supplémentaires les crédits du programme 845 précité, dans le même objectif de faire face à la rupture de trésorerie à laquelle fait face l'Institut national de l'audiovisuel.

2. Compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » : la hausse du produit des amendes

La hausse du produit des amendes, qui est de 164 millions d'euros, conduit à des ouvertures de crédits de même montant.

En application de la clé de répartition de ce compte d'affectation spéciale, cette somme va, d'une part, au programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » pour 86,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement, et, d'autre part, au programme 755 « Désendettement de l'État » pour 77,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement.

3. Compte d'affectation spéciale « Pensions » : une conséquence de la revalorisation du point d'indice des pensions militaires d'invalidité

Sur le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions », une ouverture de crédits d'un montant de 14,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement est demandée afin de couvrir la sur-exécution qui doit résulter de la revalorisation du point d'indice des pensions militaires d'invalidité.

Cette ouverture de crédits est compensée par une augmentation identique des recettes, elle-même correspondant à l'ouverture de crédits réalisée sur le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » (voir supra).

4. Compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » : une augmentation des avances au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties

Sur le programme 833 « Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes », une ouverture de crédits d'un montant de 1 120,8 millions d'euros tire les conséquences d'une révision haussière des recettes fiscales de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB).

L'impact sur le solde est réduit par la constatation, dans les recettes du compte, d'un surcroît de recettes de 803,7 millions d'euros, qui s'explique principalement par les recettes attendues au titre de cette taxe.

5. Compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » : le report d'opérations de consolidation de dettes et des recettes de prêt supplémentaires

Sur le programme 852 « Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France », 116,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sont annulés en raison du report d'opérations de consolidation de dettes.

En outre, 336,6 millions d'euros de recettes supplémentaires sont attendues, principalement en raison du remboursement de prêts consentis à des États membres de la zone euro.

6. Compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des entreprises privées » : le faible niveau des prêts

Sur le compte de concours financier « Prêts et avances à des particuliers ou à des entreprises privées », 106,4 millions d'euros sont annulés en autorisations d'engagement et 122,8 millions d'euros en crédits de paiement.

Ces annulations portent essentiellement sur le programme 877 » Avances remboursables et prêts bonifiés aux entreprises touchées par la crise du covid-19 ou par le conflit en Ukraine » (106,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement), compte tenu d'un faible niveau de demandes de prêts.

Par ailleurs, la prévision de recettes du programme 876 « Prêts octroyés dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir » est abaissée de 439 millions d'euros. Cette réduction n'est pas justifiée, mais le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2024 indique que les remboursements au titre des programmes d'investissement d'avenir, hormis un prêt, sont désormais imputés au titre de recettes non fiscales de l'État, ce qui pourrait expliquer cette évolution en 2023.

7. Compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » : la transformation d'une avance en subvention

Sur le programme 821 « Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune », 1,3 milliard d'euros sont annulés en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, sans effet sur le solde car les recettes correspondantes sont minorées du même montant.

Sur le programme 829 « Prêts destinés au financement des infrastructures de transport collectifs du quotidien et la métropole d'Aix-Marseille-Provence », 100 millions d'euros de crédits de paiement sont annulés parce qu'ils sont transformés en subvention dans le cadre du plan de soutien de l'État aux projets de transports du plan « Marseille en grand ».

8. Comptes de commerce : une amélioration du solde de près de 1 milliard d'euros en raison d'un versement de Natixis

Le solde prévisionnel des comptes de commerce est revalorisé de 951 millions d'euros, ce que l'exposé général du projet de loi de finances de fin de gestion explique notamment par le versement de 800 millions d'euros de la part de Natixis dans le cadre du transfert des activités de garantie au commerce extérieur de stabilisation de taux de Natixis à Bpifrance Assurance Export. Ce transfert a été réalisé par l'article 151 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023, qui avait prévu le versement de cette avance de trésorerie prélevée sur des réserves extrabudgétaires.

Ce solde, qui n'est retracé que dans le tableau d'équilibre de l'article 4, ne fait pas à proprement parler l'objet de l'autorisation parlementaire. En effet, les comptes de commerce, prévus par l'article 22 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, retracent des opérations de caractère industriel et commercial effectuées à titre accessoire par des services de l'État non dotés de la personnalité morale. Les évaluations de recettes et les prévisions de dépenses de ces comptes ont un caractère indicatif et seul le découvert fixé pour chacun d'entre eux a un caractère limitatif.

Ce solde, comme celui des comptes d'opération monétaire, entre toutefois dans le solde des comptes spéciaux et a donc un effet sur le solde budgétaire.

C. LES EMPLOIS SONT ENCORE RÉÉVALUÉS DE 195 ÉQUIVALENTS TEMPS PLEIN TRAVAILLÉS

Le plafond des autorisations d'emplois de l'État, prévu à 1 961 094 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en loi de finances initiale, est augmenté de 195 ETPT pour atteindre 1 961 289 ETPT dans le présent projet de loi de finances de fin de gestion.

Les augmentations concernent :

- le ministère de la culture pour 15 ETPT, qui proviennent des opérateurs (voir infra) ;

- le ministère de l'intérieur et des outre-mer pour 110 ETPT, dont 100 pour les centres d'expertise et de ressources des titres (CERT), chargés d'instruire les demandes de documents officiels ;

- le ministère des solidarités et de la famille pour 75 ETPT, destinés à la prise en charge des déplacés ukrainiens.

Seul le plafond d'emploi du ministère de la justice est diminué de 5 ETPT, transférés à l'École nationale d'administration pénitentiaire (ENAP).

Évolution du plafond d'emploi des ministères

(en équivalents temps plein travaillé)

Source : commission des finances, à partir de l'article 8 du projet de loi de finances de fin de gestion

S'agissant des opérateurs, 15 ETPT sont transférés des opérateurs de la mission « Culture » vers l'État au titre de cette même mission. Le plafond d'emploi des opérateurs de trois autres missions est réévalué du même montant de 15 ETPT, de sorte que le solde est nul pour les opérateurs.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale n'a pas modifié les plafonds d'emploi de l'État et des opérateurs.

S'agissant de la masse salariale, les seules modifications concernant les crédits de personnel (titre 2) consistent en une ouverture de crédits de 100 millions d'euros sur le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » de la mission « Crédits non répartis » et à un mouvement de 2 millions d'euros sur budget annexe « Compte et exploitation aériens », décrites supra.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE LIMINAIRE

Prévision de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble
des administrations publiques pour l'année 2023

. Le présent article retrace la prévision de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble des administrations publiques au titre de l'année 2023.

Dès lors qu'il se borne à tirer les conséquences budgétaires de l'évolution de la conjoncture et des modifications proposées par le présent projet de loi de finances de fin de gestion sur le solde public, la commission propose d'adopter cet article sans modification.

Conformément à l'article 1 H de la loi organique n° 2001-692 du relative aux lois de finances, le présent projet de loi de finances de fin de gestion comporte un article liminaire qui retrace, dans un tableau synthétique, l'état des prévisions de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble des administrations publiques, l'état de la prévision, déclinée par sous-secteur d'administration publique, de l'objectif d'évolution en volume et de la prévision en milliards d'euros courants des dépenses des administrations publiques ainsi que l'état des prévisions de prélèvements obligatoires, de dépenses et d'endettement de l'ensemble des administrations publiques. L'article liminaire présente également, pour l'année en question, l'état des prévisions portant sur les principales dépenses des administrations publiques considérées comme des dépenses d'investissement.

Article liminaire du projet de loi de finances de fin de gestion
dans sa version issue de l'Assemblée nationale

 

2022

2023

2023

Projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023

PLPFP
2023-2027

Ensemble des administrations publiques

 

Solde structurel (1) (en points de PIB potentiel)

- 4,2

- 4,1

- 4,1

Solde conjoncturel (2)

- 0,5

- 0,7

- 0,7

Solde des mesures ponctuelles et temporaires (3) (en points de PIB potentiel)

- 0,1

- 0,1

- 0,1

Solde effectif (1+2+3)

- 4,8

- 4,9

- 4,9

Dette au sens de Maastricht

111,8

109,7

109,7

Taux de prélèvements obligatoires (y.c UE, nets des CI)

45,4

44,0

44,0

Dépense publique (hors CI)

57,7

55,8

55,9

Dépense publique (hors CI, en Md€)

1 523

1 573

1 575

Évolution de la dépense publique hors CI en volume (%) 1

- 1,1

- 1,4

- 1,3

Principales dépenses d'investissement (en Md€) 2

 

 25

25

Administrations publiques centrales

Solde

- 5,2

- 5,3

- 5,4

Dépense publique (hors CI, en Md€)

625

630

631

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

- 0,1

- 3,8

- 3,6

Administrations publiques locales

Solde

0,0

- 0,3

- 0,3

Dépense publique (hors CI, en Md€)

295

312

312

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

0,1

1,0

1,0

Administrations de sécurité sociales

Solde

0,4

0,7

0,7

Dépense publique (hors CI, en Md€)

704

730

730

Évolution de la dépense publique en volume (%) 3

- 2,4

- 0,5

- 0,5

1 À champ constant.
2 Au sens de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027.
3 À champ constant, hors transferts entre administrations publiques.

Le présent article fait l'objet d'une analyse détaillée dans le cadre de l'exposé général du présent rapport, auquel le lecteur est invité à se reporter.

Il a été modifié par l'Assemblée nationale en seconde délibération par un amendement du Gouvernement, à la suite des votes conduisant à rehausser le niveau de la dépense publique des administrations centrales de 629 milliards d'euros à 630 milliards d'euros. En conséquence, la dépense publique des administrations centrales ne diminuerait pas de 3,9 % en 2023, mais de 3,8 %.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

ARTICLE 1er

Ajustement des dispositions relatives
à l'affectation de ressources à des tiers

Le présent article modifie les plafonds d'affectation de trois taxes concernant l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi ou ARPE (- 0,5 million d'euros) et à France Compétences (+ 275 millions d'euros).

S'agissant de l'ARPE, il s'agit de rembourser progressivement une avance de trésorerie accordée par l'État. S'agissant de France compétences, le rehaussement des plafonds d'affectation correspond au rendement attendu des taxes en 2023.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA LOI DE FINANCES FIXE LES PLAFONDS D'AFFECTATION DES TAXES AUX ORGANISMES TIERS

La loi organique relative aux lois de finances (LOLF)20(*) soumet l'affectation d'une imposition de toute nature à une personne autre que l'État à une condition de fond et à une condition de procédure : l'affectation doit permettre à l'organisme d'accomplir des missions de service public (article 2) et ne peut être prévue que par une loi de finances (article 36).

L'affectation de recettes à un organisme tiers est une dérogation au principe d'universalité budgétaire et limite la portée du contrôle parlementaire. Elle concerne une part très importante de la fiscalité, même si le principe du plafonnement cherche à en limiter l'impact pour les organismes autres que ceux de sécurité sociale ou les collectivités territoriales.

Le plafonnement ne s'applique qu'aux taxes affectées aux tiers autres que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale.

La première partie de la loi de finances de l'année présente la liste et le produit prévisionnel de l'ensemble des impositions de toutes natures dont le produit est affecté à une personne morale autre que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et les organismes de sécurité sociale et décide, le cas échéant, d'attribuer totalement ou partiellement ce produit à l'État21(*).

Toutefois, jusqu'en 2023, les montants des plafonds d'affectation de taxes étaient inscrits à l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, modifié par chaque loi de finance initiale. À compter de 2024, l'ensemble des plafonds d'affectation de taxe seront inscrits dans la loi de finances de l'année22(*).

A. LA TAXE SUR LES PLATEFORMES ÉLECTRONIQUES AFFECTÉE À L'AUTORITÉ DES RELATIONS SOCIALES DES PLATEFORMES D'EMPLOI

L'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (ARPE), instituée par l'article L. 7345-1 du code du travail, est un établissement public national à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministre chargé du travail et du ministre chargé des transports. Elle a pour mission la régulation du dialogue social entre les plateformes qui mettent en relation des travailleurs indépendants et ces travailleurs, lorsque la plateforme détermine les caractéristiques de la prestation de service fournie ou du bien vendu et fixe son prix. La plateforme a dès lors une responsabilité sociale à l'égard des travailleurs.

L'article 300 bis du code général des impôts prévoit une taxe sur la fourniture, en France, de services de mise en relation des personnes par voie électronique en vue de la réalisation d'opérations économiques, lorsqu'elles portent sur le transport de passagers (au moyen d'une voiture avec chauffeur) ou de marchandises (au moyen d'un véhicule à deux ou trois roues) par un travailleur indépendant.

Cette taxe est affectée à l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi par l'article L. 7345-4 du code du travail, dans un plafond de 2 millions d'euros fixé par l'article 46 précité de la loi de finances initiale pour 2012.

B. LES TAXES AFFECTÉES À FRANCE COMPÉTENCES

Créée par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, France compétences est un opérateur de l'État chargé de la gouvernance nationale de la formation professionnelle et de l'apprentissage. À ce titre, il est affectataire de :

- la participation des artisans au financement de la formation des professions non salariées, instaurée par le 2° de l'article L. 6331-48 du code du travail, dans un plafond fixé à 80 millions d'euros ;

- la contribution unique à la formation professionnelle et à l'apprentissage (Cufpa), définie au a du 2° de l'article L. 6331-48 du code du travail, dans un plafond de 9,9 milliards d'euros fixé en 2011.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN AJUSTEMENT DE TROIS TAXES AFFECTÉES

Le présent article ajuste le plafond d'affectation des trois taxes précitées.

En premier lieu, selon l'exposé des motifs de l'article, l'ARPE a bénéficié lors de sa création en 2022 d'une avance de trésorerie de 1,5 million d'euros afin de lui permettre d'organiser les élections professionnelles du secteur, avant la perception de la taxe. Le présent article prévoit une réduction du plafond d'affectation de la taxe de 500 000 euros qui permettra à l'établissement de rembourser cette avance progressivement.

En second lieu, les plafonds d'affectation des deux taxes affectées à France Compétences sont ajustés au niveau de leur rendement prévisionnel, révisé en fonction des encaissements réels constatés par les organismes recouvreurs : + 250 millions d'euros pour la CUFPA et + 25 millions d'euros pour la contribution au financement de la formation professionnelle des non-salariés immatriculés au répertoire des métiers.

*

* *

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER CET ARTICLE SANS MODIFICATION

Le rapporteur général prend acte des révisions de plafonds d'affectation de taxe proposées par le présent article.

S'agissant des taxes affectées à France Compétences, il est possible de s'interroger sur le principe même du plafonnement. Il s'agit en effet de taxes prélevées spécifiquement au sein d'un secteur professionnel afin de financer la formation professionnelle selon un principe de mutualisation : ces taxes n'ont pas vocation à alimenter le budget général de l'État, contrairement à d'autres taxes pour lesquelles le montant d'affectation est déterminé en fonction des besoins constatés de l'établissement.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2

Relations financières entre l'État et la Sécurité sociale

Le présent article majore de 0,02 point, rétroactivement à compter du 1er février 2023, la fraction de TVA affectée à la branche maladie du régime général de sécurité sociale afin de compenser le rendement plus faible qu'attendu de la TVA et de relever la participation de l'État au financement de l'Établissement français du sang (EFS).

Il procède également à une reprise des excédents de l'Unédic, à hauteur de 2 milliards d'euros pour 2023.

Au total, la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale serait minorée de 1,98 milliard d'euros en 2023.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA TVA COMPENSE AUX ADMINISTRATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE LA MAJORITÉ DES MESURES D'ALLÈGEMENT DE COTISATIONS SOCIALES ET DE TRANSFERT DE CHARGES DÉCIDÉES PAR L'ÉTAT

A. LE PRINCIPE DE COMPENSATION PEUT ÊTRE SATISFAIT PAR L'AFFECTATION DE RECETTES FISCALES

L'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, introduit par la loi dite « Veil » de 1994 puis modifié en 200423(*), pose le principe de compensation à la sécurité sociale par l'État des mesures d'allègement de cotisations sociales et de transfert de charges décidées par lui. Ainsi, toute mesure de réduction ou d'exonération de cotisations de sécurité sociale ou de contributions sociales, toute mesure de réduction ou d'abattement de l'assiette de cotisations ou contributions sociales, tout transfert de charges entre l'État et la sécurité sociale donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés pendant toute la durée de son application.

D'autre part, l'article LO. 111-3-16 du code de la sécurité sociale dispose que seules les lois de financement de la sécurité sociale peuvent déroger à ce principe et créer ou modifier des mesures de réduction ou d'exonération de cotisations ou de contributions de sécurité sociale non compensées à ces régimes.

Si l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale pose le principe d'une compensation « à l'euro près », une partie des dispositifs d'exonération ou de réduction de cotisations sociale à fait l'objet, à partir de 2006, d'une compensation « pour solde de tout compte », prenant la forme d'une affectation d'un « panier » de ressources fiscales progressivement simplifié et recentré autour d'une fraction de TVA.

Actuellement :

les mesures générales d'allègement ou de baisse de taux sont compensées, « pour solde de tout compte », par l'affectation de recettes fiscales, essentiellement la TVA (branche maladie) et dans une moindre mesure la taxe sur les salaires (branches famille et vieillesse) ;

les exonérations compensées dites « ciblées », qui portent sur certains publics, certains secteurs économiques ou certains secteurs géographiques, font l'objet d'une compensation budgétaire (principalement par les missions « Travail et emploi » et « Outre-mer »).

B. LA TVA, PRINCIPALE IMPOSITION AFFECTÉE À LA SÉCURITÉ SOCIALE AU TITRE DES TRANSFERTS AVEC L'ÉTAT

La TVA constitue la principale recette fiscale affectée à la sécurité sociale. En 2022, dernière année pour laquelle nous disposons d'une exécution complète, elle abondait de 57,4 milliards d'euros les comptes sociaux : 28,3 % de son produit était ainsi affecté à la sécurité sociale.

Aux termes de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale (CSS), dans sa version en vigueur depuis le 1er février 2023, une fraction correspondant à 28,48 % du produit de la TVA est affectée à la sécurité sociale. De cette fraction :

23,30 points sont affectés à la branche maladie de la sécurité sociale (a du 9° de l'article L. 131-8 du CSS), principalement en compensation de la baisse de cotisations sociales consécutive à la mise en oeuvre du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) ;

les 5,18 points restant sont affectés à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), au titre des baisses de cotisations à l'Unédic et aux régimes obligatoires de retraite complémentaire (b du 9° de l'article L. 131-8 du CSS).

Répartition du produit de la TVA entre les différentes
administrations publiques en 2022

(en milliards d'euros, en comptabilité budgétaire)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses aux questionnaires budgétaires

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : NONOBSTANT UNE MAJORATION DE LA FRACTION ATTRIBUÉE À LA BRANCHE MALADIE, LA PART DE LA TVA AFFECTÉE À LA SÉCURITÉ SOCIALE DIMINUERAIT EN 2023 DU FAIT DE LA REPRISE D'EXCÉDENTS DE L'UNÉDIC

Le présent article prévoit, rétroactivement à compter du 1er février 2023 (II), une diminution de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale (1° du I).

Certes, d'un côté, la fraction affectée à la branche maladie augmenterait de 0,02 point (2° du I) et serait portée de 23,30 % à 23,32 %, mais, de l'autre, la fraction affectée à l'Acoss se verrait retrancher de 2 milliards d'euros en 2023 (3° du I).

A. UNE LÉGÈRE MAJORATION DE LA FRACTION DE TVA ATTRIBUÉE À LA BRANCHE MALADIE

Le 2° du I du présent article prévoit d'augmenter la fraction de TVA affectée à la branche maladie de 0,02 point, soit une augmentation d'environ 44,5 millions d'euros.

1. La compensation d'un rendement de TVA plus faible qu'attendu

Cette hausse correspond d'abord à un transfert à la sécurité sociale de 17 millions d'euros en compensation du rendement moindre qu'attendu de la TVA en 2023.

En effet, les prévisions actualisées de rendement de la TVA pour 2023 conduisent à anticiper l'insuffisance de la fraction affectée à la sécurité sociale pour compenser les allègements de cotisations intervenus en loi de finances initiale. L'actualisation correspond à la différence entre la valeur de 0,48 point de TVA selon les hypothèses du texte initial (1 026 millions d'euros) et selon les hypothèses révisées en fin d'année (1 009 millions d'euros).

2. La participation de l'État au financement de l'Établissement français du sang

Une majoration de 0,01 point de TVA correspond à un abondement portant la participation de l'État au financement de l'Établissement français du sang (EFS) à 27,5 millions d'euros en 2023.

Selon les informations transmises au rapporteur général, l'EFS réalise un chiffre d'affaires annuel qui est en moyenne de 870 millions d'euros depuis 2012, avec des produits d'exploitation d'environ 1 milliard d'euros par an, principalement au titre de la cession de produits sanguins labiles (PSL), qui représentent 90 % de son chiffre d'affaires.

Toutefois, l'établissement a perdu, en 2019, le bénéfice du régime fiscal d'imposition à la TVA et à la taxe sur les salaires dérogatoires qui lui était applicable depuis sa création, faut d'être conforme au droit européen. Depuis, l'EFS ne perçoit plus les recettes de TVA sur les produits sanguins labiles destinés à des soins de santé ou à des fins thérapeutiques. Cette réforme a conduit à une dégradation de sa situation. En outre, les cessions de PSL, et notamment de concentré de globules rouges (CGR), ont diminué en 2023, aggravant la situation de l'établissement.

Ainsi, malgré des efforts en faveur de sa transformation, la situation de l'EFS demeure difficile. L'établissement a clôturé l'année 2022 avec un déficit de 40 millions d'euros et son compte de résultat fait apparaitre un résultat net de - 58,5 millions d'euros24(*) en 2023.

B. UNE PREMIÈRE REPRISE D'EXCÉDENTS DE L'UNÉDIC, QUI PRÉFIGURE CELLE À VENIR POUR 2024, RÉSULTANT EN UNE DIMINUTION DE LA PART DE TVA AFFECTÉE À LA SÉCURITÉ SOCIALE

Les réformes de l'assurance chômage entre 2019 et 2021, combinées à une orientation très favorable du marché de l'emploi en 2022, ont permis à l'Unédic de retrouver un excédent. Son solde de 2022 s'est établi à + 4,3 milliards d'euros, sa dette diminuant légèrement jusqu'à 60,7 milliards d'euros.

Cette amélioration de la situation financière du régime d'assurance chômage a incité le Gouvernement à opérer une reprise de 2 milliards d'euros d'excédents de l'Unédic sur la fraction de TVA affectée à l'Acoss (3° du I du présent article).

Ce n'est donc pas un montant de 60 milliards d'euros, correspondant à la fraction de 28,50 % du produit de la TVA, qui sera affecté à la sécurité sociale, mais le montant, minoré de 2 milliards d'euros, de 58 milliards d'euros. En définitive, une fraction minorante de - 1,982 milliard d'euros sera affectée à la sécurité sociale au titre des transferts avec l'État. Le solde budgétaire de l'État s'en trouve donc amélioré.

Incidences budgétaires de l'article 2 du PLFG 2023

(en millions d'euros)

Transferts financiers

+ 17,5

Dotation exceptionnelle à l'EFS

+ 17,5

Autres compensations

- 2 000,0

Reprise des excédents de l'Unédic

- 2 000,0

Montant supplémentaire de TVA à affecter à la Sécurité sociale en 2024

- 1 982,5

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'évaluation préalable de l'article 2 du PLFG 2023

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE DIMINUTION DE LA FRACTION DE TVA AFFECTÉE À LA SÉCURITÉ SOCIALE QUI TRADUIT L'IMPUISSANCE BUDGÉTAIRE D'UN GOUVERNEMENT AUX ABOIS

A. UNE AFFECTATION DE TVA À LA BRANCHE MALADIE CONFORME AUX PRINCIPES PROTECTEURS DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

1. La compensation « pour solde de tout compte » implique que la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale compense effectivement la perte de cotisation pour l'année en cours

Le principe de compensation, lorsqu'il est appliqué par l'affectation d'une fraction de TVA « pour solde de tout compte », nécessite la compensation effective à la sécurité sociale des charges transférées ou des exonérations décidées par l'État. Toutefois, une fois le montant de la compensation établi en année N, la compensation est réputée effective pour l'avenir.

Ainsi, les transferts de TVA à la branche maladie réalisée « pour solde de tout compte » ne donneront pas lieu à révision après l'année 2023.

2. L'augmentation de la dotation de l'EFS donne en principe lieu, en 2023, au dernier transfert de TVA à ce titre

En 2019, lors de la suppression du régime fiscal dérogatoire accordé à l'établissement, la dotation versée à l'EFS par l'assurance maladie avait donné lieu à une compensation par l'État par l'affectation d'une fraction de TVA pour un montant d'environ 40 millions d'euros.

Devant la persistance des difficultés de l'établissement, une nouvelle dotation de 55 millions d'euros lui a été accordée en 2023, soit 45 millions d'euros supplémentaires par rapport au montant prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. La participation de l'État à cet effort, à hauteur de 27,5 millions d'euros, soit la moitié de la dotation versée à l'EFS.

Selon les réponses apportées par l'administration au questionnaire du rapporteur général, le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 procède à un tel transfert et pour la dernière année. En effet, l'article 31 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une réforme du financement de l'EFS, qui sera à l'avenir fondé, d'une part, sur les cessions de produits, à hauteur de 850 millions d'euros- avec une revalorisation des tarifs de 20 % - et, d'autre part, sur une dotation de l'assurance maladie, à hauteur de 100 millions d'euros.

B. LA REPRISE D'EXCÉDENTS DE L'UNÉDIC : FAUTE DE POUVOIR ÉQUILIBRER SON BUDGET, LE GOUVERNEMENT SE RÉSOUT À PONCTIONNER LES EXCÉDENTS DES PARTENAIRES SOCIAUX

1. Contrairement à ce qui est soutenu, la situation financière de l'Unédic ne lui permet que difficilement de contribuer au financement des politiques de l'emploi

Le rapport annexé n° 8 au PLFSS 2024 indique que le solde du régime d'assurance chômage resterait excédentaire en 2023 et en 2024, ce qui permettrait au régime « d'augmenter sa contribution au financement des politiques de l'emploi tout en poursuivant son désendettement » 25(*).

Toutefois, le régime d'Assurance chômage doit composer avec un endettement important, de 60,7 milliards d'euros en 2022. Minorer les excédents de l'Unédic, comme le propose le Gouvernement, pourrait donc conduire à une altération de la trajectoire de résorption de sa dette. De fait, après avoir diminué de 10,2 % entre 2022 et 2023, la dette de l'Unédic ne diminuerait que de 2,0 % entre 2023 et 2024.

En outre, les projections économiques du Gouvernement, qui sous-tendent son choix d'opérer une reprise sur les recettes affectées à l'Unédic, sont caractérisées par un optimisme excessif. Il est par exemple fait mention d'une embellie du marché de l'emploi - alors même que l'INSEE note un ralentissement de la dynamique de l'emploi fin 202326(*).

Entendus par la rapporteure générale de la commission des affaires sociales du Sénat, les représentants de l'Unédic ont affirmé qu'un apurement de 50 % de la dette de l'assurance chômage à horizon 2026 était possible sans reprise d'excédent, mais qu'en tenant compte de la diminution programmée de ses recettes, cette perspective d'amortissement serait réduite de moitié à horizon 2026.

Enfin, la reprise d'excédents prévue par le présent article s'inscrit dans un contexte où l'Unédic est fortement mis à contribution en faveur des politiques de d'emploi, notamment au moyen d'une subvention de l'Unédic à France Travail, fixée à hauteur de 11 % de ses recettes et versée à compter de 2024, avec une montée en charge jusqu'en 2026.

Dette et solde du régime d'assurance chômage
en comptabilité de trésorerie

Source : Unédic (exécuté) et direction générale du Trésor (prévisions)

2. Un Gouvernement sans solution pour financer sa politique de l'emploi

Il est indiqué dans l'exposé des motifs et dans l'évaluation préalable du présent article que le montant de 2 milliards d'euros repris par l'État sur la fraction de TVA affectée à l'Acoss au bénéfice de l'Unédic vise à faire contribuer le régime d'assurance chômage à la politique de l'emploi, en particulier par le financement de l'opérateur France Compétences.

a) L'impasse financière de la mission « Travail et emploi »

Il est vrai que l'attribution de financements conséquents et pérennes à France Compétences, qui répond notamment à une recommandation de la Cour des comptes, vise à combler un besoin de financement important, dû à un déséquilibre structurel des ressources et des charges de l'opérateur : en 2022, pour couvrir des charges de 16,2 milliards d'euros, les ressources de France Compétences ne représentaient que 10,3 milliards d'euros.

Jusqu'ici, l'État a ouvert des dotations « exceptionnelles » en urgence pour combler ce déficit : 2,78 milliards d'euros en 2021, 4 milliards d'euros en 202227(*). Prévoir une dotation renforcée dans le budget de l'État n'est donc pas illogique ; cela répond même à une recommandation de la Cour des comptes.

Dans le même rapport, la Cour des comptes avait toutefois souligné que la situation de France Compétences, le financement de l'apprentissage, et par extension la situation de la mission « Travail et emploi » relevaient de « l'impasse financière »28(*).

b) Plutôt que de réduire son déficit budgétaire abyssal, le Gouvernement se laisse aller à un véritable effet d'aubaine

Pour le Gouvernement, la reprise des excédents de l'Unédic n'a pas vocation à se borner à combler le déficit de France Compétences, ni même le déficit budgétaire plus généralement. Car s'il est vrai que cette ponction a pour effet d'améliorer de presque 2 milliards d'euros le solde budgétaire de l'État, les efforts demandés à l'Assurance chômage n'ont pas pour corollaire de quelconques efforts en dépenses de l'État, dont le solde budgétaire sera déficitaire de plus de 170 milliards d'euros en 2023.

C'est même l'inverse qui est constaté. En réponse aux questions du rapporteurs général sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023, le Gouvernement indique que les crédits correspondant aux 2 milliards d'euros repris à l'Unédic « soutiennent le financement des politiques en faveur du développement des compétences et de l'accès à l'emploi (...) conformément à la logique de co-investissement dans ces politiques » décidée par le Gouvernement lui-même.

Ainsi, les crédits du programme 103 « Adaptation aux mutations économiques et développement de l'emploi » de la mission « Travail et emploi » font l'objet, dans le présent projet de loi, d'une importante ouverture de crédits, à hauteur de 1,25 milliard d'euros en AE, pour financer la hausse des dépenses liées à l'apprentissage du fait de la fusion des aides aux employeurs d'apprentis en une aide de 6 000 euros la première année. La création de cette aide unique, décidée à la toute fin de l'année 2022, n'avait pas été prise en compte dans la budgétisation initiale.

Déjà habitué à financer ses politiques à crédit, le Gouvernement se résout désormais à financer ses politiques par la ponction des excédents des partenaires sociaux. Le rapporteur général regrette qu'aucune trajectoire de réduction des dépenses publiques ne soit définie par le Gouvernement. Il ne peut que prendre acte de ces choix délétères.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Rectification du montant de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée
du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public »
au titre de l'année 2023

Le présent article prévoit de diminuer de 20 millions d'euros le montant de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée à l'audiovisuel public. Cette baisse est un simple ajustement technique qui découle d'une compensation des effets fiscaux de la suppression de la contribution à l'audiovisuel public inférieure à celle anticipée.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE AFFECTATION ANNUELLE D'UNE FRACTION DE TVA À L'AUDIOVISUEL PUBLIC QUI TIENT COMPTE DE LA COMPENSATION DES EFFETS FISCAUX DE LA RÉFORME

L'article 6 de la première loi de finances rectificative pour 202229(*) a supprimé, dès 2022, la contribution à l'audiovisuel public (CAP). Aux termes de la nouvelle rédaction du 2° du 1 du VI de l'article 46 de la loi n° 2005-1719 de finances pour 2006, la dotation affectée par l'État à l'audiovisuel public est constituée d'une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) déterminée chaque année par la loi de finances de l'année. Ce montant était fixé par l'article 120 de la loi de finances pour 202330(*) à 3,815 milliards d'euros.

Comme la contribution à l'audiovisuel public, la fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée est versée sur un compte de concours financiers (CCF), tel que prévu à l'article 24 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 (LOLF)31(*).

La contribution à l'audiovisuel public était soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) depuis 196932(*), et bénéficiait d'un taux dit « super-réduit » de 2,10 %.

Le remplacement de la CAP par une fraction de TVA a donc eu pour conséquence d'entraîner l'assujettissement des sociétés de l'audiovisuel public concernées à la taxe sur les salaires, ainsi qu'une remise en cause du droit à déduction des entreprises. La fraction de TVA accordée inclut donc en retour une part supplémentaire destinée à compenser la hausse des prélèvements des entreprises.

Le Gouvernement s'est engagé à compenser ces charges nouvelles lors de la fixation de la trajectoire financière du secteur. Au total, le coût de la neutralisation des effets fiscaux devrait atteindre 78,6 millions d'euros en 2023. Le montant prévu pour 2023 était uniquement assis sur le second semestre 2022, les sociétés de l'audiovisuel public ayant reversé de la TVA sur la dotation publique perçue de janvier à juillet 2022.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE BAISSE DE 20 MILLIONS D'EUROS DE LA FRACTION DE TVA

Le présent article fixe le montant de la fraction du produit de la TVA affecté à l'audiovisuel public à 3 795 549 552 euros pour 2023. Il modifie à cet effet le 2° du VI de l'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 au sein duquel est inscrit le montant versé annuellement.

Cela correspond donc à une baisse de 20,2 millions d'euros par rapport au montant prévu par la loi de finances initiale pour 2023 précitée.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UNE MINORATION DE LA BAISSE AFIN D'ABONDER LE BUDGET DE L'INSTITUT NATIONAL DE L'AUDIOVISUEL

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté le présent article modifié par un amendement de notre collègue Mickaël Bouloux, prévoyant de diminuer la baisse prévue en 2023 de 1,3 million d'euros, afin d'augmenter d'autant le budget de l'Institut national de l'audiovisuel (INA).

Le montant global accordé aux sociétés de l'audiovisuel public serait donc de 3 795 549 552 euros.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LA PRISE EN COMPTE DES EFFETS FISCAUX DE LA SUPPRESSION DE LA CONTRIBUTION À L'AUDIOVISUEL PUBLIC ET UNE DOTATION POUR L'INA

Contrairement à ce qui avait été anticipé, la mise en place d'un financement via la TVA n'aboutit pour aucune société, à l'exception de France Médias Monde, à un changement de statut vis-à-vis de leur régime de droit à déduction de cette taxe.

Ainsi, dans le cadre des procédures de rescrit menées l'année dernière, il a pu être confirmé que seule France Médias Monde qui, suite à cette détaxation, ne conserve qu'un très faible niveau de recettes commerciales soumises à la TVA (moins de 10 % de leurs ressources totales) voit se réduire sa possibilité de déduire la TVA.

En loi de finances initiale pour 2023, la fraction de TVA calculée pour les différentes sociétés incluait un montant spécifique pour les entités ayant vocation à voir leur situation en matière de droits à déduction évoluer en vue de neutraliser une éventuelle baisse de ces droits. Si Arte France semblait initialement être concernée par la perte de ses droits à déduction de TVA, les documents budgétaires indiquent que l'administration fiscale a finalement tranché dans le sens d'un maintien des droits à déduction. Cette décision a entraîné un retraitement de la compensation d'ARTE France à hauteur de 18,8 millions d'euros.

En conséquence, le présent article diminue à hauteur de 7,9 millions d'euros au titre de 2022 et 18,8 millions d'euros au titre de 2023 la fraction de TVA affectée à Arte, ces montants étant devenus sans objet dès lors qu'ARTE France continuera de bénéficier d'un droit à déduction de TVA.

Décomposition de la baisse prévue

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les documents annexés

Inversement, la dotation de TVA 5 Monde est augmentée de 1,5 million d'euros, afin de tenir compte de la perte de son droit à déduction.

En conséquence, le présent article met en place une correction d'ordre essentiellement technique.

S'y ajoute également une hausse de 5 millions d'euros à destination de l'INA, en raison d'une rupture de trésorerie sur l'exercice 2023 dans un contexte de forte inflation. Ainsi, la dotation de l'INA pour 2023 s'élèverait à 99 millions d'euros, contre 90 millions d'euros en 2022 et 108 millions d'euros demandés pour 2024. La baisse de la dotation publique de l'INA s'était élevée à 2,2 millions d'euros sur la période 2018-2022. Cette hausse a été complétée lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale par un abondement de 1,3 million d'euros supplémentaires, portant l'ensemble des ressources nouvelles de l'établissement à 6,3 millions d'euros.

Les efforts de l'INA en matière de diffusion devant être soulignés, il faut espérer que ces moyens renforcés contribueront au redressement de sa situation financière.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

ARTICLE 4

Équilibre général du budget, trésorerie
et plafond d'autorisation des emplois

Le présent article traduit l'incidence, sur l'équilibre prévisionnel du budget de l'année, des réévaluations opérées et des dispositions proposées par le présent projet de loi de finances de fin de gestion.

Dans le texte initial du présent projet de loi, le déficit budgétaire de l'État s'établirait à un niveau de 172,5 milliards d'euros, en dégradation de 7,6 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2023.

Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, le déficit est augmenté de 0,4 milliard d'euros pour atteindre 172,9 milliards d'euros.

La commission propose d'adopter l'article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE AGGRAVATION DU DÉFICIT DE 7,6 MILLIARDS D'EUROS PAR RAPPORT À LA LOI DE FINANCES INITIALE

Le I du présent article présente la construction du solde budgétaire de l'État comme la somme de trois soldes, tous présentés en écart par rapport aux montants figurant dans la loi de finances initiale pour 202333(*), aucune loi de finances rectificative n'ayant été prise en cours d'année :

le solde du budget général se dégrade de 4,6 milliards d'euros, en raison de l'augmentation des dépenses nettes (effet de - 3,8 milliards d'euros sur le solde) et de la diminution des recettes non fiscales prévisionnelles (- 4,4 milliards d'euros), partiellement compensées par l'augmentation des prévisions de recettes fiscales nettes (+ 2,4 milliards d'euros) et la diminution des prélèvements sur recettes (effet de + 1,1 milliard d'euros sur le solde) ;

le solde des budgets annexes s'améliore de 0,1 milliard d'euros ;

le solde des comptes spéciaux se dégrade de 3,0 milliards d'euros.

Le déficit budgétaire inscrit au tableau d'équilibre, qui ne prend en compte que les crédits ouverts en lois de finances (initiale, rectificatives ou de fin de gestion), s'aggraverait donc de 7,6 milliards d'euros et atteindrait désormais 172,5 milliards d'euros dans la version initiale du projet de loi.

Le II de l'article présente dans un tableau le besoin de financement de l'État, exprimé en montant absolu et non en différences par rapport à la loi de finances initiale. Ce besoin de financement s'établit à 309,6 milliards d'euros, contre 304,9 milliards d'euros en loi de finances initiale, et résulte pour l'essentiel :

- de l'actualisation de la prévision de déficit exécuté à financer (171,4 milliards d'euros) ;

- du montant de dette existante à moyen et long terme qui arrive à échéance cette année et doit être renouvelée (149,6 milliards d'euros, dont 144,5 milliards d'euros de remboursement du nominal à valeur faciale et 5,0 milliards d'euros de suppléments d'indexation versés à l'échéance pour les titres indexés, ce dernier poste étant en augmentation de 0,1 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale).

Le déficit à financer inscrit au tableau de financement n'est pas strictement l'opposé du solde budgétaire résultant du tableau d'équilibre, car il repose sur une estimation des dépenses et non, comme le tableau d'équilibre, sur le seul jeu des ouvertures et des annulations de crédit. Les différences entre ces deux grandeurs sont présentées dans l'exposé général du présent projet de loi.

Le même tableau indique les ressources utilisées pour combler ce besoin, à savoir :

- les émissions de dette à moyen et long terme, nettes des rachats (270,0 milliards d'euros). Ce montant est identique à celui prévu dans la dans la loi de finances initiale, correspondant à un programme d'émissions défini à l'avance par l'Agence France Trésor ;

- les ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement (6,6 milliards d'euros), qui correspondent aux crédits du programme 369 « Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 » de la mission « Engagements financiers de l'État » ;

- la variation nette de l'encours des titres d'État à court terme (20 milliards d'euros, contre 3,3 milliards d'euros en loi de finances initiale). Ce poste constitue généralement la variable d'ajustement en cas de modification du déficit à financer ou de variation des autres ressources de trésorerie ;

- la variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État (28,6 milliards d'euros, contre 24,5 milliards d'euros prévus en loi de finances initiale) ;

- les autres ressources de trésorerie, pour - 15,6 milliards d'euros, contre + 0,5 milliard d'euros dans la loi de finances initiale. L'exposé des motifs de l'article explique la différence par les décotes, nettes des primes, décaissées sur les émissions et les rachats réalisés depuis fin septembre.

Comme dans la loi de finances initiale, il n'est pas prévu de variation des dépôts des correspondants.

Le même paragraphe, en application du 9° du I de l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances, prévoit que la variation nette de la dette négociable de l'État d'une durée supérieure à un an est plafonnée à 125,5 milliards d'euros, montant identique à celui fixé par la loi de finances initiale.

Enfin, le III porte le plafond d'autorisation des emplois rémunérés par l'État à un niveau de 1 961 289 équivalents temps plein travaillés (ETPT), contre 1 961 094 ETPT en loi de finances initiale. Les déterminants de cette évolution sont présentés dans l'article 7 du projet de loi de finances de fin de gestion (voir infra), ainsi que dans l'exposé général du présent rapport.

II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN ACCROISSEMENT DU DÉFICIT DE 373 MILLIONS D'EUROS

Lors de l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion par l'Assemblée nationale, le déficit budgétaire de l'État a été accru de 377 millions d'euros, pour atteindre 172,9 milliards d'euros.

D'une part, les dépenses du budget général ont été augmentées de 375 millions d'euros, par l'adoption de plusieurs amendements portant sur les crédits des missions.

D'autre part, les recettes fiscales nettes ont été diminuées de 1,3 million d'euros, par l'adoption d'un amendement résultant de l'affectation d'une part supplémentaire de cet impôt au compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public « afin de rehausser le montant de la dotation complémentaire prévue par l'Institut national de l'audiovisuel

Ces évolutions sont présentées dans l'exposé général du présent rapport.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER UN ARTICLE DE RÉCAPITULATION

Les déterminants de l'évolution du solde budgétaire ont été présentés par le rapporteur général dans l'exposé général du présent rapport.

Cet article tire les conséquences des votes effectués et n'appelle pas d'autres observations.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE PREMIER
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2023 - CRÉDITS DES MISSIONS

I. - AUTORISATION DES CRÉDITS DES MISSIONS

ARTICLE 5

Budget général : ouvertures et annulations de crédits

Le présent article prévoyait, dans sa version initiale, au titre du budget général, l'ouverture de 23,0 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 12,4 milliards d'euros en crédits de paiement, ainsi que l'annulation de 6,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 6,1 milliards d'euros en crédits de paiement, selon la répartition par missions et programmes figurant à l'état B annexé au présent projet de loi de finances de fin de gestion.

L'Assemblée nationale a ouvert 378,5 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement et de 376,5 millions d'euros en crédits de paiement. Elle a également annulé 3,2 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement et de 1,2 millions d'euros en crédits de paiement.

La commission propose d'adopter cet article sous réserve de cinq amendements de crédits tendant à :

- ouvrir une enveloppe supplémentaire de 25 millions d'euros au profit de la rénovation des ponts des collectivités territoriales ;

- accorder 100 millions d'euros supplémentaires aux collectivités territoriales pour l'entretien de leurs routes ;

- abonder de 100 millions d'euros les crédits destinés à la remise en état du réseau d'eau ;

- fournir une aide d'urgence de 20 millions d'euros à l'Arménie pour l'accueil des réfugiés du Haut-Karabagh ;

- enfin, abonder l'enveloppe de crédits d'aide alimentaire de 30 millions d'euros supplémentaires.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : DES OUVERTURES DE CRÉDITS NETTES DE 3,8 MILLIARDS D'EUROS

Le présent article prévoit l'ouverture de 23,0 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 21,5 milliards d'euros en crédits de paiement, ainsi que l'annulation de 5,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 5,2 milliards d'euros en crédits de paiement, dont une ouverture de 12,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement au titre des remboursements et dégrèvements.

Les ouvertures de crédits, nettes des annulations, sont donc, hors remboursements et dégrèvements, de 5,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3,8 milliards d'euros en crédits de paiement.

Les ouvertures et annulations de crédits sont présentées plus en détail dans l'exposé général du présent rapport.

II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN ACCROISSEMENT DES DÉPENSES NETTES DE 375,3 MILLIONS D'EUROS

Lors de l'examen du projet de loi de finances de fin de gestion en première lecture, l'Assemblée nationale a adopté des amendements tendant, par rapport au texte initial, à ouvrir 378,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 376,5 millions d'euros en crédits de paiement, et à annuler 3,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 1,2 million d'euros en crédits de paiement.

Les ouvertures de crédits nettes sont, par rapport au texte initial, de 375,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Le texte transmis au Sénat présente ainsi des ouvertures de crédit nettes, par rapport à la loi de finances initiale, de 5,7 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 4,1 milliards d'euros en crédits de paiement.

Ces ouvertures et annulations de crédits sont également détaillées dans l'exposé général du présent rapport.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER L'ARTICLE TEL QU'IL RÉSULTERA DES VOTES DU SÉNAT

Cet article tire les conséquences des votes effectués sur les missions et n'appelle pas d'autres observations que celles qui ont été formulées dans l'exposé général du présent rapport.

La commission a adopté cinq amendements :

l'amendement n°2 (FINC.1) visant à abonder de 25 millions d'euros les crédits du programme ponts, piloté par le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), qui vise à soutenir la rénovation des ponts routiers des collectivités.

Les ponts routiers des collectivités territoriales (90 % des ponts routiers en France) sont aujourd'hui dans un état préoccupant et cette situation est exacerbée pour les ponts des plus petites communes. 23 % des ponts routiers du bloc communal seraient en mauvais état structurel. Bien souvent, les plus petites communes n'ont pas les moyens non seulement de les entretenir et de les réparer mais également de mener les études et expertises nécessaires pour diagnostiquer leur état.

Le plan de relance a permis de lancer un programme national « ponts ». Il a pour objet de soutenir les plus petites communes dans le recensement, les diagnostics, les études et de financer des expérimentations permettant de réduire les coûts de surveillance et d'entretien de leurs ouvrages d'art. Ce programme est mis en oeuvre par le Cerema. Au 31 décembre 2022, 11 500 communes avaient pu bénéficier de visites de recensement et d'évaluation de leurs ouvrages. Près d'un quart des ponts ainsi expertisés présentent des défauts significatifs. Un panel d'ouvrages parmi les plus sensibles à l'échelle nationale doit bénéficier d'une deuxième phase d'évaluation plus approfondie. Cette deuxième phase du programme a été lancée en avril 2023 pour environ 20 000 communes.

À l'initiative de la commission des finances du Sénat, qui avait fait adopter par le Sénat un amendement en ce sens, 50 millions d'euros de crédits supplémentaires avaient été alloués au programme ponts du Cerema dans le cadre de la loi n° n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022.

Dans un rapport de mars 2022 sur l'entretien des routes nationales et départementales, la Cour des comptes soulignait que la sécurité des ponts, qui font face à « un vieillissement généralisé », ne peut se targuer que d'» avancées limitées » ces dernières années. Elle considérait dans ce même rapport que le programme ponts « n'a pas été l'occasion de mettre en chantier le plan Marschall ni même le recensement exhaustif réclamé par certains ». Elle ajoutait qu'il « ne règle pas la question des travaux apparaissant nécessaires ».

En septembre dernier le Gouvernement a annoncé que le programme pont serait abondé de 35 millions d'euros supplémentaires. Cette enveloppe doit servir à accompagner les collectivités à réaliser les travaux de réparations de leurs ouvrages les plus dégradés et notamment ceux présentant un enjeu majeur vis-à-vis de la sécurité des usagers et de la continuité des dessertes locales.

Ce nouveau programme national ponts travaux pourra subventionner jusqu'à 60 % des travaux de reconstruction, de réparation, de restauration, ainsi que les études techniques et réglementaires nécessaires à leur bonne réalisation.

Ce nouveau programme susceptible de financer des travaux effectifs et non plus seulement des recensements, évaluation et autres diagnostics était absolument indispensable. Si l'enveloppe qui doit lui être consacrée est une première étape louable, elle n'est bien évidemment pas à la hauteur des besoins des collectivités et il est nécessaire d'accentuer dès à présent cet effort pour le porter à 60 millions d'euros en ajoutant 25 millions d'euros à l'enveloppe prévue.

l'amendement n°3 (FINC.2) visant à consacrer 100 millions d'euros à l'entretien des réseaux routiers gérés par les collectivités territoriales.

Cette somme devra être allouée aux collectivités dotées de la mission voirie qui gèrent à ce titre des réseaux routiers locaux. Il convient tout d'abord de rappeler qu'à l'initiative de la commission des finances du Sénat, la loi n° n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022 avait déjà prévue d'allouer 50 millions d'euros à l'entretien du réseau routier géré par les collectivités territoriales.

Or, en gestion, cette autorisation parlementaire exprimée très explicitement lors de la commission mixte paritaire parvenue à un accord sur le texte a été réorientée pour financer l'entretien des ouvrages d'art du réseau routier national non concédé et non du réseau local.

Le rapporteur général de la commission des finances s'étonne d'un Gouvernement qui pense pouvoir s'exonérer ainsi de l'application de la loi.

Parce que les besoins des collectivités en la matière sont toujours aussi criants, il est plus que jamais nécessaire de leur apporter un soutien effectif. Celui-ci doit se traduire par la répartition d'une enveloppe de 100 millions d'euros entre les collectivités qui gèrent des réseaux routiers, et en fonction notamment de la longueur de voirie à entretenir.

l'amendement n°4 (FINC.3) visant à majorer de 100 millions d'euros les ouvertures d'autorisations d'engagement (AE) de crédits de paiement (CP) prévues pour le programme 113, « Paysages, eau et biodiversité «, afin de réduire le taux de fuite du réseau d'eau et à accélérer sa rénovation.

Les sécheresses de 2022 et 2023 ont endommagé les infrastructures du réseau d'eau. Elles ont également révélé l'ampleur et la gravité du taux de fuite du réseau : on estime que chaque année, 20 % du volume d'eau potable distribué chez les usagers est perdu, ce qui représente 1 milliard de mètres cubes d'eau. À cela s'ajoute le fait que la capacité d'absorption du sol est réduite en période de sécheresse.

Avec le changement climatique, les sécheresses deviendront de plus en plus fréquentes. Or, moins de 1 % des 878 000 kilomètres de canalisation d'eau est changé chaque année, ce qui conduit à un vieillissement du réseau d'eau français, qui est particulièrement préoccupant pour les communes rurales.

L'année dernière, 50 millions d'euros ont été ouverts à l'initiative du Sénat pour les agences de l'eau. Sur cette somme, 48,3 millions d'euros ont été affectés à la rénovation des réseaux d'alimentation en eau potable, et 1,7 million d'euros ont été attribués à l'Office français de la biodiversité. L'effort doit être poursuivi.

l'amendement n°5 (FINC.4) visant à apporter une aide exceptionnelle de 20 millions d'euros à l'Arménie.

En septembre 2023, l'Azerbaïdjan, en violation de l'accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020 conclu avec l'Arménie, a mené une offensive-éclair contre le territoire à population majoritairement arménienne du Haut-Karabagh. La prise de contrôle du Haut-Karabagh par les forces azéries a conduit les autorités de l'enclave à dissoudre leurs institutions et sa population arménienne à fuir vers l'Arménie via le corridor de Lachin.

Depuis lors, l'Arménie est confrontée à un afflux massif de réfugiés sur son territoire. Le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) estime que 120 000 personnes ont trouvé refuge en Arménie. Or, pour cet État de 2,8 millions d'habitants, le total de ces nouveaux réfugiés représente l'équivalent de 4 % de sa population. Le gouvernement arménien manque drastiquement de moyens pour faire face à cette crise humanitaire sans précédent.

Pour cette raison, le rapporteur général propose un soutien d'urgence de 20 millions d'euros sur la provision pour crises majeures de l'action 02 « Coopération bilatérale » du programme 209.

Cette réserve constitue un outil de réaction rapide à des crises humanitaires graves et soudaines, liées à des catastrophes naturelles ou des conflits. Elle a été initialement dotée de 270 millions d'euros en loi de finances pour 2023 et a été consommée à hauteur de 220 millions d'euros sur l'exercice.

La mobilisation de la provision pour crises majeures en faveur de l'Arménie semble aujourd'hui indispensable. Cette enveloppe de 20 millions d'euros pourra être rapidement décaissée au gouvernement arménien et aux ONG qui oeuvrent pour la prise en charge des réfugiés du Haut-Karabagh.

- enfin, l'amendement n°6 (FINC.5) visant à abonder de 30 millions d'euros l'action 14 « Aide alimentaire » du programme 304 « Inclusion sociale et protection des personnes » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

En effet, la forte inflation des prix alimentaires, qui a atteint + 14,3 % en mai 2022 et s'est maintenue à + 13,7 % en juin 2023 selon l'Insee, a conduit à un important « effet ciseau » pour les associations d'aide alimentaire :

- d'une part, une augmentation des personnes demandant à bénéficier de l'aide alimentaire : les Restos du Coeur ont ainsi enregistré une augmentation de 25 % de leurs files actives, et la Fédération française des banques alimentaires (FFBA) enregistre de son côté plus de 200 000 personnes supplémentaires ayant demandé à être accueillies par les associations ;

- d'autre part, l'accroissement du coût des denrées qui impacte particulièrement les associations, dont l'approvisionnement s'appuie sur une part d'achat importante. C'est particulièrement le cas des Restos du Coeur dont le budget d'achats alimentaires, qui était de moins de 54 millions d'euros sur l'exercice budgétaire 2021-2022, est quasiment multiplié par deux pour la période 2023-2024.

Alors que les associations d'aide alimentaire enregistrent une baisse des dons, la réponse de l'État n'apparaît pas à la hauteur. Si les crédits de l'action 14 « Aide alimentaire » sont en augmentation, cette hausse concerne principalement les refus d'apurement à FranceAgriMer et la montée en charge du programme « Mieux manger pour tous ».

Lors de l'examen de la loi de finances rectificative du 16 août 2022, une enveloppe supplémentaire de 40 millions d'euros avait été adoptée, à l'initiative de la commission des finances du Sénat, pour soutenir les associations d'aide alimentaire face à la hausse des prix. Plus récemment, lors de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023, une enveloppe de 20 millions d'euros a été adoptée.

Il apparaît nécessaire de compléter l'enveloppe votée à l'Assemblée nationale pour la porter à nouveau à 50 millions d'euros.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

ARTICLE 6

Budgets annexes : ouverture et annulations de crédits

Le présent article prévoit l'annulation de 6,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et 14,6 millions d'euros en crédits de paiement sur les budgets annexes. Il ne prévoit aucune ouverture de crédits.

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

La commission propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article prévoit l'annulation de 6,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 14,6 millions d'euros en crédits de paiement au titre des budgets annexes pour l'exercice en cours. Il ne prévoit aucune ouverture de crédits.

Ces annulations de crédit ont été présentées dans l'exposé général du présent rapport.

La répartition par mission et programme est précisée dans l'état C annexé au présent projet de loi de finances de fin de gestion.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

II. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER L'ARTICLE TEL QU'IL RÉSULTERA DES VOTES DU SÉNAT

Cet article tire les conséquences des votes effectués sur les budgets annexes et n'appelle pas d'autres observations que celles qui ont été formulées dans l'exposé général du présent rapport.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

ARTICLE 7

Comptes spéciaux : ouvertures et annulations de crédits

Le présent article prévoit, s'agissant des comptes d'affectation spéciale, l'ouverture de 178,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, sans prévoir d'annulations de crédits. S'agissant des comptes de concours financiers, il prévoit l'ouverture de 1 127,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, ainsi que l'annulation de 1 549,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 1 665,7 millions d'euros en crédits de paiement.

L'Assemblée nationale a augmenté de 1,3 million d'euros les crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », en lien avec une augmentation du même montant des recettes.

La commission propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

S'agissant des comptes d'affectation spéciale, le I du présent article ouvre 178,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

S'agissant des comptes de concours financiers :

- le II ouvre 1 127,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement ;

- le III annule 1 549,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 1 665,7 millions d'euros en crédits de paiement.

Au total, les crédits des comptes spéciaux diminuent de 243,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 360,1 millions d'euros en crédits de paiement.

Ces modifications de crédits ont été présentées dans l'exposé général du présent rapport.

II. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : UN ACCROISSEMENT DES DÉPENSES DE 1,3 MILLION D'EUROS

Comme il a été indiqué dans l'exposé général du présent rapport, l'Assemblée nationale a accru de 1,3 million d'euros les crédits du programme 845 « Institut national de l'audiovisuel » de la mission « Avances à l'audiovisuel public », afin d'aider cet établissement à faire face à une situation de rupture de trésorerie.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER L'ARTICLE TEL QU'IL RÉSULTERA DES VOTES DU SÉNAT

Cet article tire les conséquences des votes effectués sur les comptes d'affectation spéciale et n'appelle pas d'autres observations que celles qui ont été formulées dans l'exposé général du présent rapport.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article tel qu'il résultera des votes du Sénat.

II. - PLAFONDS DES AUTORISATIONS D'EMPLOIS

ARTICLE 8

Plafonds des autorisations d'emplois de l'État

Le présent article accroît de 195 équivalents temps plein travaillés (ETPT) le plafond d'autorisations d'emplois de l'État.

S'agissant d'un article de régularisation, la commission propose d'adopter l'article sans modification.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'AJUSTEMENT DES PLAFONDS D'AUTORISATIONS D'EMPLOIS DE L'ÉTAT

L'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) prévoit que la loi de finances de l'année fixe le plafond d'autorisation des emplois rémunérés par l'État, qui sont spécialisés par ministère et par budget annexe.

Le présent article ajuste les plafonds d'autorisations d'emplois fixés en loi de finances initiale, pour une augmentation au total de 195 équivalents temps plein travaillés (ETPT).

Ces mouvements, qui représentent 0,01 % du plafond d'autorisation des emplois fixé en loi de finances initiale, ont été présentés dans l'exposé général du présent rapport.

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER L'ARTICLE SANS MODIFICATION

Les principales évolutions des emplois ont été présentées par le rapporteur général dans l'exposé général du présent rapport.

Cet article constitue un article de régularisation des mouvements intervenus en cours de gestion.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 9

Plafond d'autorisation des emplois des opérateurs de l'État

Le présent article réduit de 15 équivalents temps plein travaillés (ETPT) du ministère de la Culture et augment d'un nombre égal d'ETPT le plafond d'autorisations d'emplois des opérateurs de l'État, avec un bilan global nul.

S'agissant d'un article de régularisation, la commission propose de l'adopter sans modification.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'AJUSTEMENT DES PLAFONDS D'AUTORISATIONS D'EMPLOI DES OPÉRATEURS DE L'ÉTAT

L'article 64 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 prévoit que le plafond des autorisations d'emplois des opérateurs de l'État est fixé chaque année par la loi de finances.

Le présent article ajuste les plafonds d'autorisations d'emplois des opérateurs de l'État fixés en loi de finances initiale pour 2023, avec au total une stabilité des plafonds d'emploi des opérateurs, par équilibre entre :

- d'une part, une réduction de 15 ETPT du plafond d'emploi des opérateurs du ministère de la Culture, qui sont transférés vers le plafond d'emploi de la mission « Culture » ;

- d'autre part, une augmentation des plafonds d'emploi des opérateurs des ministères de l'écologie, du développement et des mobilités durables (+ 2 ETPT), de la justice (+ 5 ETPT) et du sport, de la jeunesse et de la vie associative (+ 8 ETPT).

*

* *

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : ADOPTER L'ARTICLE SANS MODIFICATION

Cet article constitue un article de régularisation des mouvements intervenus en cours de gestion.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE II
AUTRES DISPOSITIONS -
RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

ARTICLE 10

Instauration de primes exceptionnelles
au sein de la dotation titres sécurisés (DTS)

Le présent article prévoit d'instituer trois dispositifs de primes exceptionnelles de la dotation pour titres sécurisés (DTS) en faveur des communes équipées d'une ou plusieurs stations d'enregistrement des demandes de passeports et de cartes nationales d'identité électroniques qui se sont particulièrement mobilisées pour renforcer leur activité en 2023.

Les majorations prévues auraient pour effet de porter l'enveloppe prévue au titre de la DTS en 2023 de 72 à 100 millions d'euros.

Le renforcement de la DTS est une nécessité pour accompagner les communes faisant face, depuis la fin de la crise sanitaire, à un afflux massif de demandes et pour raccourcir les délais de délivrance, encore insatisfaisants à ce jour.

La commission des finances propose d'adopter le présent article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA DOTATION TITRES SÉCURISÉS, UN DISPOSITIF DE SOUTIEN AUX COMMUNES ÉQUIPÉES DE STATIONS D'ENREGISTREMENT DE PASSEPORTS ET DE CARTES NATIONALES D'IDENTITÉ

Instituée par la loi de finances initiale pour 200934(*) et régie par l'article L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales, la dotation pour les titres sécurisés (DTS) est une dotation budgétaire annuelle de fonctionnement en faveur des communes équipées d'une ou plusieurs stations d'enregistrement des demandes de passeports et de cartes nationales d'identité électroniques (CNI).

Elle est financée sur les crédits du programme n° 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Jusqu'en 2022, cette dotation se décomposait en deux parts :

- une part forfaitaire versée à toutes les communes qui disposent d'une station d'enregistrement (également appelée dispositif de recueil de données biométriques - DR), à hauteur de 8 580 euros par an et par station en fonctionnement dans la commune au 1er janvier de l'année en cours ;

- une part variable versée aux communes pour chaque station ayant enregistré plus de 1 875 demandes de passeports et de cartes nationales d'identité au cours de l'année précédente. Cette majoration s'élevait à 3 500 euros par DR et ciblait les DR qui fonctionnent à plus de la moitié de leur capacité.

La loi de finances initiale pour 202335(*) a ensuite réformé les règles de fonctionnement de la DTS, dans l'objectif de rendre celle-ci plus incitative.

À compter de 2023, sa part variable est désormais attribuée pour chaque station, en fonction du nombre de demandes de passeports et de cartes nationales d'identité enregistrées au cours de l'année précédente.

Le montant versé n'est plus fixé par la loi mais renvoyé à un décret36(*), qui en a renforcé les montants :

le montant de la part forfaitaire est fixé à 9 000 euros par station ;

le montant de la part variable est fixé selon un barème allant de 0 à 12 500 euros (voir tableau ci-dessous).

Barème de la part variable de la dotation pour titres sécurisés

(en euros)

Nombre de demandes de titres

Montant de la part variable de la dotation pour les titres sécurisés

1 875 demandes ou moins

0 euro

De 1 876 demandes à 2 500 demandes

5 000 euros

De 2 501 demandes à 3 999 demandes

8 500 euros

4 000 demandes ou plus

12 500 euros

Source : code général des collectivités territoriales

Par ailleurs, une majoration de la dotation est désormais attribuée aux communes pour chaque station inscrite, au 1er janvier de l'année en cours, à un module dématérialisé et interopérable de prise de rendez-vous. Par dérogation, en 2023, il est précisé que cette majoration est attribuée aux communes pour chaque station inscrite au 1er juillet 2023. Cette majoration, d'un montant de 500 euros, a pour objectif d'inciter les communes à passer au travers de plateformes permettant l'annulation automatique d'un rendez-vous si un autre a été obtenu dans une autre commune, et ainsi fluidifier les demandes et limiter les doublons.

En 2022, 2 524 communes avaient perçu une attribution au titre de la DTS, dont :

- 2 372 communes au titre de la part forfaitaire ;

- 1 270 communes au titre de la part variable ;

- 1 877 communes au titre d'une majoration exceptionnelle de 4 000 euros instituée par la première loi de finances rectificative pour 202237(*), destinée à accompagner les efforts réalisés par les communes en 2022 pour installer de nouvelles stations et accroître le taux d'utilisation de leurs stations existantes.

En loi de finances initiale pour 2023, un montant de 52 millions d'euros en autorisations d'engagements (AE) et en crédits de paiements (CP) a été inscrit. En gestion, cette enveloppe a été abondée de 20 millions d'euros de crédits 2022 reportés sur 2023, portant le total prévu en 2023 à 72 millions d'euros.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'INSTAURATION DE PRIMES EXCEPTIONNELLES AU SEIN DE LA DOTATION TITRES SÉCURISÉS

Le I du présent article énonce son objet : l'instauration de trois primes exceptionnelles au sein de la DTS au titre de l'année 2023.

En premier lieu, le II prévoit une prime destinée à rémunérer les actions réactives des communes consistant en l'installation, dans des centres temporaires d'accueil (CTA), de lots de cinq ou dix DR pour une durée de quatre mois en 2023. Son montant est fixé :

- à 50 000 euros pour chaque commune ayant accueilli cinq DR temporaires ;

- à 150 000 euros pour chaque commune ayant accueilli dix DR temporaires.

Une majoration de 50 % est appliquée si la durée de fonctionnement des CTA est prolongée et atteint six mois en 2023 (portant son montant à respectivement 75 000 ou 225 000 euros).

En deuxième lieu, le III prévoit une majoration destinée à rémunérer les « contrats urgence titres « (CUT) conclus entre les préfets et les communes volontaires pour accroître sensiblement l'utilisation de leurs dispositifs de recueil (DR). Son montant est fixé à 4 000 euros pour chaque DR installé au 1er janvier 2023 lorsque le nombre de demandes de passeports et de cartes nationales d'identité électroniques enregistrées sur le territoire de la commune entre le 1er mai et le 2 juillet 2023 est supérieur de plus de 20 % à ce même nombre constaté entre le 2 janvier et le 26 février 2023.

Enfin, en troisième lieu, le IV et le 1° du V visent à instituer une majoration de 1 000 euros de la prime prévue par l'article L. 2335-16 du code général des collectivités territoriales pour chaque station inscrite, au 1er juillet 2023, à un module dématérialisé et interopérable de prise de rendez-vous. Par dérogation, en 2023, il est précisé que cette majoration est attribuée aux communes pour chaque station inscrite au 1er juillet 2023. Son montant est ainsi porté en 2023 à 1 500 euros. Le 2° du même V étend en outre le versement de la prime de 500 euros aux communes inscrites à un tel module entre le 1er janvier et le 30 juin 2023.

Le VI prévoit l'application du présent article dans les collectivités territoriales d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE 

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté le présent article modifié par trois amendements rédactionnels du rapporteur général de la commission des finances et un amendement du Gouvernement corrigeant l'oubli de la mention de la Polynésie française au VI.

IV. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN DISPOSITIF BIENVENU, ALORS QUE LES DÉLAIS DE DÉLIVRANCE DES TITRES

Le renforcement de la DTS est une nécessité pour accompagner les communes faisant face, depuis la fin de la crise sanitaire, à un afflux massif de demandes et pour raccourcir les délais de délivrance afin d'améliorer le service rendu aux citoyens.

D'après l'évaluation préalable du présent article, la réforme des modalités d'attribution de la DTS a montré des premiers résultats encourageants puisque le délai moyen d'obtention d'un rendez-vous pour la délivrance des passeports et CNI est passé de 77 jours en juin 2022 à 32 jours selon les estimations les plus récentes.

Ces délais restent importants et il convient de continuer à se donner les moyens de les réduire. Les trois primes proposées sont bienvenues à cet égard.

L'adoption du présent article aurait pour effet d'augmenter de 27,7 millions d'euros les crédits de la DTS au titre de 2023, portant son montant global à près de 100 millions d'euros, soit une hausse de 46 % par rapport à l'exécution 2022 (54 millions d'euros).

Il est à noter que le projet de loi de finances pour 2024 en cours d'examen au Parlement prévoit de reconduire une enveloppe de 100 millions d'euros au titre de la DTS.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 15 novembre 2023 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Jean-François Husson, rapporteur général, sur le projet de loi de finances de fin de gestion pour 2023 (n° 88, 2023-2024).

Le compte rendu de la réunion peut être consulté sur le site du Sénat : http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/finances.html

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl23-088.html


* 1 « Le PIB progresse modestement au troisième trimestre 2023 (+0,1 % après + 0,6 %) ». Insee, Informations Rapides, 31 octobre 2023, n° 275.

* 2 Comptes nationaux trimestriels au 3eme trimestre 2023, INSEE, 31 octobre 2023.

* 3 Projections macroéconomiques de la Banque de France, septembre 2023.

* 4 Note de conjoncture de l'Insee, octobre 2023 : « Croissance modeste, sur fond d'incertitudes géopolitiques ».

* 5 Croissance modeste, sur fond d'incertitudes géopolitiques. Note de conjoncture, 12 octobre 2023.

* 6 Cela signifie que, si le PIB stagnait au quatrième trimestre par rapport au troisième, la croissance pour 2023 serait de 0,9 %.

* 7 I de l'article 4 du présent projet de loi de finances de fin de gestion.

* 8 La différence entre le déficit budgétaire résultant du tableau d'équilibre et celui indiqué au tableau de financement est précisée infra.

* 9 La loi relative aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l'année correspond, à compter de l'exercice 2023, à l'ancienne loi de règlement des comptes.

* 10 Annulation de 4,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 5,0 milliards d'euros en crédits de paiement ( décret n° 2023-883 du 18 septembre 2023 portant annulation de crédits). Deux autres décrets d'annulation de crédits ont été pris les 19 juin et 6 juillet, mais ils portaient sur des crédits issus de fonds de concours pour des montants plus limités.

* 11 Les crédits ouverts hors reports comprennent les crédits ouverts en loi de finances initiale ainsi que les crédits ouverts ou annulés en loi de finances rectificative ou par décret d'avance (ce qui ne s'applique pas en 2023), ainsi que les crédits résultant de mouvements divers sans impact sur le solde budgétaire (virements, transferts) ou encore résultant de fonds de concours.

* 12 Si le projet de loi de finances rectificative de fin d'années était déposé vers la fin novembre jusqu'en 2017, il est déposé depuis 2018 au début du mois de novembre, de sorte que l'avancement du calendrier ne peut être qu'une explication partielle aux écarts constatés.

* 13 Les recettes fiscales nettes de 2022 sont ici retraitées afin d'y inclure les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux, conformément à leur définition en vigueur à compter de l'exercice 2023.

* 14 Examen des principaux éléments de l'équilibre, rapport provisoire présenté le 8 novembre 2023 par Jean-François Husson, rapporteur général.

* 15 Le Pass culture, rapport d'information n° 866 (2022-2023) présenté par Vincent Éblé et Didier Rambaud, déposé le 11 juillet 2023.

* 16 Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

* 17 Loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

* 18 Ces amendements ont été déposés respectivement, comme premier signataire, par nos collègues députés Jean-Charles Larsonneur, Anne Genetet, Josy Poueyto, Julien Bayou, Isabelle Santiago et Jean-Louis Thiériot.

* 19 Amendement II-7 présenté par Albéric de Montgolfier et Claude Nougein, rapporteurs spéciaux, au nom de la commission des finances. Cet amendement, qui réduisait les crédits prévus de 1 milliard d'euros, avait été partiellement repris par le Gouvernement en nouvelle lecture (réduction des crédits de 700 millions d'euros).

* 20 Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 21 Article 34 de la loi organique relative aux lois de finances, rédaction résultant de la loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.

* 22 Voir l'article 28 du projet de loi de finances pour 2024.

* 23 Loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale (article 5) et loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie (article 70).

* 24 Annexe n° 2 au projet de loi de finances de la sécurité sociale pour 2024 - Établissement français du sang.

* 25 PLFSS 2024, Annexe n° 8, Perspectives financières du régime d'assurance chômage et des régimes de retraite complémentaire.

* 26 INSEE, « Croissance modeste, sur fond d'incertitudes géopolitiques », Note de conjoncture, octobre 2023.

* 27 MM. Emmanuel Capus et Daniel Breuiller, Rapport n° 771 (2022-2023), Annexe n° 32, 28 juin 2023.

* 28 Cour des comptes, La formation professionnelle des salariés. Après la réforme de 2018, une stratégie nationale à définir et un financement à stabiliser, juin 2023.

* 29 Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

* 30 Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 31 Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

* 32 3° du III de l'article 257 du code général des impôts.

* 33 Loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 34Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

* 35 Article 201 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.

* 36 Décret n° 2023-206 du 27 mars 2023 relatif à la dotation pour titre sécurisés, codifié à l'article D. 2335-23 du code général des collectivités territoriales.

* 37 Article 39 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

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