N° 242

SÉNAT

SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1972-1973

Annexe au procès-verbal de la séance du 2 avril 1973.

RAPPORT

FAIT

au nom de la Commission des Lois constitutionnelles, de Législation, du Suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale (1) :

Sur la proposition de résolution de M. André Diligent, tendant à compléter l'article 42, alinéa 7, du Règlement ;

Sur la proposition de résolution de MM. Jean Cluzel, Michel Chauty, Antoine Courrière, Louis Courroy, Jacques Duclos, Lucien Grand, Max Monichon et Roger Poudonson, tendant à modifier l'article 78 du Règlement du Sénat, relatif aux questions orales sans débat ;

Tendant à modifier les articles 36, 37, 42, 46, 48, 49, 64, 72 et 82 du Règlement du Sénat ,

Par M. Pierre MARCILHACY,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Léon Jozeau-Marigné, président ; Marcel Champeix, Baudouin de Hauteclocque, Jean Sauvage, vice-présidents ; Pierre de Félice, Léopold Heder, Louis Namy, Jacques Rosselli, secrétaires ; Jean Auburtin, Jean Bénard Mousseaux, Pierre Bourda, Philippe de Bourgoing, Robert Bruyneel, Pierre Carous, Félix Ciccolini, Etienne Dailly, Emile Dubois, Jacques Eberhard, André Fosset, Henri Fréville, Jacques Genton, Jean Geoffroy, Jean-Marie Girault, François Giacobbi, Paul Guillard, Pierre Jourdan, Pierre Mailhe, Pierre Marcilhacy, André Mignot, Lucien de Montigny, Gabriel Montpied, Jean Nayrou, Marcel Nuninger, Guy Petit, Pierre Schiélé, Jacques Soufflet, Fernand Verdeille, N...

Voir les numéros : Sénat : 142 et 230 (1972-1973).

Sénat. -- Règlement

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de résolution, qui modifie diverses dispositions de dix articles du Règlement du Sénat, a son origine dans l'examen, par votre Commission des Lois, de deux propositions de résolution : l'une, de M. Diligent, qui tend à résoudre certaines difficultés auxquelles, à plusieurs reprises, a donné lieu la procédure du vote unique, l'autre, de M. Cluzel et plusieurs de nos collègues, prévoyant que l'auteur d'une question orale sans débat (ou son délégué) est tenu, après l'appel en séance publique de sa question, d'en exposer lui-même brièvement l'objet.

Aux conclusions qu'elle vous présente à la suite de cette double initiative, votre Commission des Lois a décidé de joindre d'autres propositions de modification relevant, elles aussi, du souci d'améliorer la qualité, l'organisation, et, surtout, le rythme de nos travaux grâce à une plus stricte réglementation des temps de parole.

L'analyse des diverses dispositions constituant la proposition de résolution qui vous est aujourd'hui soumise est faite ci-après, dans le corps du tableau comparatif.

EXAMEN DES ARTICLES

Règlement du Sénat.

Art. 36.

1. -- Aucun Sénateur ne peut prendre la parole s'il ne l'a demandée au Président, puis obtenue.

Art. 37.

3. -- Sauf dans le cas où le Gouvernement ou la commission demande ou accepte la réserve d'une disposition, un Sénateur peut toujours obtenir la parole après l'un des orateurs prévus aux deux alinéas qui précèdent.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

Article premier.

I. -- L'alinéa premier de l'article 36 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1. -- Aucun Sénateur ne peut prendre la parole s'il ne l'a demandée au Président, puis obtenue, même s'il est autorisé exceptionnellement par un orateur à l'interrompre . »

II. -- Le troisième alinéa de l'article 37 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 3. -- Sauf dans le cas où le Gouvernement ou la commission demande ou accepte la réserve d'une disposition, un Sénateur peut toujours obtenir la parole, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, immédiatement après l'un des orateurs prévus aux deux alinéas qui précèdent. »

Observations . -- Cet article modifie, dans ses deux paragraphes, certaines dispositions des articles 36 et 37 du chapitre VI du Règlement consacré à la tenue des séances.

I. -- L'article 36 du Règlement définit les conditions dans lesquelles la parole est accordée ou retirée aux Sénateurs par le Président de séance. L'alinéa premier de cet article pose le principe selon lequel aucun Sénateur ne peut prendre la parole s'il ne l'a demandée au Président puis obtenue. Il a paru utile à votre Commission de compléter cet alinéa premier par une disposition rappelant que le principe posé est également applicable aux interventions -- brèves, en principe -- qui interrompent un orateur dans son exposé, quand bien même cet orateur aurait-il acquiescé à la demande d'interruption.

II. -- L'article 37 du Règlement prévoit, dans ses deux premiers alinéas, que les Ministres, les Présidents et rapporteurs des commissions intéressées obtiennent de droit la parole quand ils la demandent, et que les Commissaires du Gouvernement peuvent également intervenir, à la demande du Gouvernement.

En vertu du troisième alinéa les Sénateurs sont en droit de demander et d'obtenir la parole pour répondre à l'un ou l'autre des orateurs précités. Or l'expérience montre que ce droit de réponse, en l'absence de référence réglementaire, peut être exercé au détriment du rythme souhaitable des débats et de l'ordre logique des interventions. Aussi, vous est-il proposé d'en préciser les conditions d'exercice par deux dispositions nouvelles s'insérant dans le troisième alinéa de l'article 37 : l'une fixant à cinq minutes la durée maxima de chaque intervention, l'autre situant chaque intervention immédiatement après celle du Ministre, du Président ou du rapporteur de la commission intéressée. La première de ces mesures fait application de la décision prise par la commission d'améliorer le rythme des diverses phases de la procédure en séance publique, la seconde tend à éviter que le droit de réponse puisse être exercé à un moment inopportun, notamment lorsqu'est close la partie du débat au cours de laquelle s'est produite l'intervention invoquée.

Règlement du Sénat.

Art. 46.

3. -- Les crédits budgétaires dont la modification n'est pas demandée soit par le Gouvernement, soit par un amendement régulièrement déposé , ne peuvent être l'objet que d'un

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

Art. 2.

I. -- Il est inséré, dans l'article 42 du Règlement, le nouvel alinéa 7 bis suivant :

« 7 bis. -- La parole n'est accordée, sur l'ensemble d'un article, qu'une seule fois à chaque orateur, sauf exercice du droit de réponse aux Ministres et aux rapporteurs et sous réserve des explications de vote ; la durée de chaque intervention ou explication de vote ne peut excéder cinq minutes . »

II. -- Le troisième alinéa de l'article 46 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 3. -- En dehors de la discussion des amendements , les crédits budgétaires ne peuvent être l'objet que d'un débat sommaire. Chaque orateur ne peut parler qu'une seule fois,

-

Règlement du Sénat.

débat sommaire. Chaque orateur ne peut parler qu'une fois, sauf exercice du droit de réponse aux Ministres et aux rapporteurs ; la durée de chaque intervention ne peut excéder dix minutes.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

sauf exercice du droit de réponse aux Ministres et aux rapporteurs et sous réserve des explications de vote ; la durée de chaque intervention ou explication de vote ne peut excéder cinq m inutes. »

Observations . -- Les articles 42 à 47 du Règlement constituent le chapitre VII, intitulé « Discussion des projets et propositions de loi. »

I. -- La première des deux dispositions soumises à votre examen s'applique à l'article 42 qui, dans ses quatorze alinéas, organise les principales phases de la procédure applicable à la discussion générale et à la discussion des articles. En particulier, aucune limitation n'est apportée aux interventions faites sur l'ensemble d'un article , d'où la possibilité, pour un même orateur, de demander et d'obtenir plusieurs fois la parole sur un article déterminé, et aussi longuement qu'il le souhaite. A l'expérience, cette possibilité s'est révélée préjudiciable au bon déroulement et à la clarté des débats. C'est pourquoi votre commission, s'inspirant des dispositions qui régissent actuellement la discussion des crédits budgétaires (art. 46, alinéa 3), vous propose d'insérer dans l'article 42 un nouvel alinéa selon lequel un même orateur ne pourrait intervenir qu'une seule fois sur l'ensemble d'un article , et pour une durée n'excédant pas cinq minutes. Il importe toutefois de préciser :

-- d'une part, que l'orateur, qui dans ces conditions aurait obtenu la parole, pourrait intervenir à nouveau, soit pour exercer son droit de réponse aux ministres et aux rapporteurs (pour cinq minutes, conformément au nouvel alinéa 3 de l'article 37), soit pour explication de vote sur l'article (pour cinq minutes, en application de la présente disposition) ;

-- d'autre part que, dans le cas d'un article modifiant plusieurs articles d'un texte en vigueur, c'est à chacun de ces derniers articles que s'appliquerait la nouvelle procédure.

II. -- L'article 46, alinéa 3, du Règlement concerne les interventions sur les crédits budgétaires, réserve faite de la discussion des amendements qui relève d'autres dispositions.

La procédure actuelle résultant de cet alinéa a directement inspiré celle que le I du présent article prévoit pour es interventions sur l'ensemble d'un article. Cependant, pour des raisons de forme et surtout d'harmonisation, une nouvelle rédaction vous est proposée, étant toutefois souligné que la durée maxima de chaque intervention ou explication de vote serait fixée à cinq minutes (au lieu de dix minutes).

On notera que, dans les cas visés par les paragraphes I et II, les explications de vote sont expressément admises alors qu'elles ne sont pas prévues dans le texte actuel.

Règlement du Sénat.

Art. 43.

1. -- Le Gouvernement et les Sénateurs ont le droit de présenter des amendements aux textes soumis à discussion devant le Sénat.

2. -- Il n'est d'amendements que ceux rédigés par écrit, signés par l'un des auteurs et déposés sur le Bureau du Sénat ; ils doivent être sommairement motivés ; ils sont communiqués par la Présidence à la commission compétente, imprimés et distribués. Le défaut d'impression et de distribution d'un amendement ne peut toutefois faire obstacle à sa discussion en séance publique.

3. -- Les amendements ne sont recevables que s'ils s'appliquent effectivement au texte qu'ils visent ou, s'agissant d'articles additionnels, s'ils sont proposés dans le cadre du projet ou de la proposition.

4. -- Dans les cas litigieux autres que ceux visés à l'article 45, la question de la recevabilité des amendements est soumise, avant leur discussion, à la décision du Sénat ; seul l'auteur de l'amendement, un orateur

Propositions de résolution.

PROPOSITION N° 142

Article unique.

L'alinéa 7 de l'article 42 du Règlement du Sénat est complété in fine par la phrase suivante :

« Le texte en discussion est celui sur lequel le Sénat délibère en application de l'alinéa précédent. »

( N. B. : Les dispositions du Règlement auxquelles se réfère cette proposition sont rappelées dans le commentaire ci-après.)

Propositions de la commission.

Art. 3.

I. -- Le début du deuxième alinéa de l'article 48 du Règlement est modifié comme suit :

« 2. -- Il n'est d'amendements que ceux rédigés par écrit, signés par l'un des auteurs et déposés sur le Bureau du Sénat ; un Sénateur ne peut, à titre individuel ou au titre de membre d'un groupe politique, être signataire ou cosignataire de plusieurs amendements identiques ; les amendements doivent être...

(le reste sans changement) ».

II. -- Le troisième alinéa de l'article 48 du Règlement est complété par la disposition suivante :

« En outre, les sous-amendements ne sont recevables que s'ils n'ont pas pour effet de dénaturer l'esprit ou de contredire le sens des amendements auxquels ils s'appliquent . »

III. -- Le début du quatrième alinéa de l'article 48 du Règlement est modifié comme suit :

« 4. -- Dans les cas litigieux autres que ceux visés à l'article 45, la question de la recevabilité des amendements ou sous-amendements est soumise,... (le reste de l'alinéa sans changement). »

-

Règlement du Sénat.

« contre », la commission -- chacun d'eux disposant de cinq minutes -- et le Gouvernement peuvent intervenir. Aucune explication de vote n'est admise.

Art. 49.

1. -- Les amendements sont mis en discussion avant le texte auquel ils se rapportent et d'une manière générale avant la question principale.

6. -- Sur chaque amendement, ne peuvent être entendus que l'un des signataires, le Gouvernement, le Président ou le Rapporteur de la commission et un Sénateur d'opinion contraire.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

IV. -- L'alinéa premier de l'article 49 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1. -- Les amendements sont mis en discussion après la discussion du texte qu'ils tendent à modifier, et aux voix avant le vote sur ce texte . »

V. -- Le sixième alinéa de l'article 49 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 6. -- Sur chaque amendement, sous réserve des explications de vote , ne peuvent être entendus que l'un des signataires, le Gouvernement, le Président ou le Rapporteur de la commission et un Sénateur d'opinion contraire. Les interventions de l'auteur et de l'orateur d'opinion contraire ne peuvent excéder dix minutes. Les explications de vote sont admises pour une durée n'excédant pas cinq minutes . »

Observations . -- Les articles 48 et 49 du Règlement, que modifie l'article 3 de la proposition de résolution, appartiennent au chapitre VIII relatif aux amendements (dépôt, recevabilité, discussion).

I. -- Il est en premier lieu proposé d'insérer dans le deuxième alinéa de l'article 48 une disposition interdisant à un même Sénateur d'être signataire ou cosignataire de plusieurs amendements identiques, et cela pour éviter le renouvellement d'un récent incident de procédure (séance du 4 décembre 1972) : en présence de deux amendements identiques, le Président de séance, après avoir constaté que tous les signataires du premier amendement se retrouvaient dans la liste, plus longue, des signataires du second, avait estimé que seul ce second amendement devait être délibéré, les signataires considérant au contraire que les deux amendements devaient être soumis à discussion commune et défendus dans l'ordre de leur dépôt. C'est donc à cette difficulté de procédure, qui n'avait pas trouvé sa solution dans le règlement actuel, que remédie la proposition qui vous est faite. Si, dans la nouvelle rédaction, il a été jugé utile de préciser que l'interdiction s'appliquait aux dépôts d'amendements faits « à titre individuel ou à titre de membre d'un groupe politique », c'est pour exclure le cas de l'amendement que déposerait un Sénateur et qui serait ensuite repris, identiquement, par la commission à laquelle ce Sénateur appartient. Il importe enfin de souligner que, pour votre Commission des Lois, les amendements visés sont ceux dont les termes (dispositif) -- et non pas seulement les motifs -- seraient identiques, précision qu'elle n'a pas cru devoir exprimer pour ne pas alourdir le texte proposé.

II et III. -- Les deuxième et troisième parties du présent article 3 résultent de l'examen de la proposition de résolution de M. Diligent.

1° La proposition de M. Diligent se réfère aux incidents de séance qui se sont produits chaque fois qu'en présence d'un amendement d'origine sénatoriale, tendant à insérer un article additionnel dans un projet, le Gouvernement a demandé un vote unique sur cet amendement après l'avoir assorti d'un sous-amendement qui le dénaturait ou le vidait de tout sens. Le Sénat ne pouvait manquer de protester contre un procédé qui, dans les faits, oblige l'auteur d'un amendement à retirer son texte, et qui, dans son principe, est contraire à l'esprit dans lequel la procédure du vote unique et la technique du sous-amendement doivent être utilisées.

Pour remédier à cette situation, M. Diligent entend modifier, ou plutôt préciser, la procédure du vote unique prévue par une disposition de l'article 42, alinéa 7, du règlement, elle-même reprise de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, et en vertu de laquelle « i le Gouvernement le demande, le Sénat se prononce par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion, en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement ». Aussi demande-t-il que le « texte en discussion » auquel il est fait référence dans cette disposition soit celui sur lequel le Sénat délibère en application de l'alinéa 6 de l'article 42 du Règlement, c'est-à-dire le texte présenté par le Gouvernement lorsqu'il s'agit d'un projet déposé en première lecture sur le Bureau du Sénat, le texte transmis par l'Assemblée Nationale lorsqu'il s'agit d'un projet (ou d'une proposition) que l'Assemblée Nationale a adopté ou encore le texte rapporté par la commission compétente en ce qui concerne les propositions présentées par les Sénateurs.

Dans son exposé des motifs M. Diligent explicite la portée de cette disposition interprétative en indiquant que le Gouvernement pourrait demander un vote unique :

-- soit sur un article, une partie d'article ou un groupe d'articles ayant des objets connexes, à l'exclusion de tout amendement ou article additionnel non accepté par le Gouvernement ;

-- soit sur une ligne de crédits budgétaires (états de dépenses annexés aux projets de loi de finances) à l'exclusion de tout amendement ou article additionnel non accepté par le Gouvernement ;

-- soit sur l'ensemble du texte en discussion à l'exclusion de tout amendement ou article additionnel non accepté par le Gouvernement ;

Il précise en outre que, dans cette énumération, le terme de sous-amendement doit être associé à celui d'amendement, qu'il ne saurait évidemment être question d'ôter au Gouvernement le droit de sous-amender un amendement sénatorial, et enfin qu'il s'agit simplement de préciser que, dans l'hypothèse où le Gouvernement recourt au vote unique, il faut qu'au moins un des éléments sur lesquels le Sénat est appelé à statuer globalement soit contenu dans le texte en discussion proprement dit ; c'est ainsi que le Gouvernement pourrait demander un vote unique sur un article d'un projet assorti d'un amendement sénatorial sous-amendé par le Gouvernement, ou sur l'ensemble d'un projet ou d'une proposition assorti d'un article additionnel proposé par le Sénat et sous-amendé par le Gouvernement.

Votre Commission n'a pas suivi M. Diligent dans ses conclusions. Elle a considéré que le texte proposé se traduisait par une limitation des cas dans lesquels le Gouvernement serait habilité à demander un vote unique, ce que, selon elle, l'article 44 de la Constitution, dans sa lettre, ne peut autoriser. En particulier, elle a constaté qu'échapperait à la procédure du vote unique tout amendement qui insérerait un article additionnel dans un projet ou une proposition de loi et que modifierait un sous-amendement dès lors que cet amendement ne serait pas rattaché, pour la circonstance, à une partie ou à l'ensemble du texte en discussion, tel que celui-ci est défini par l'article 42, alinéa 6 du Règlement. Cette exclusion, on le constate, s'applique très précisément aux situations qui sont à l'origine des incidents précédemment relatés.

D'autre part, faisant abstraction de l'argument d'inconstitutionnalité, votre Commission a considéré que la solution proposée n'était pas exempte de conséquences critiquables, notamment chaque fois que le Gouvernement, pour satisfaire à la réglementation du vote unique, serait conduit à rattacher un article additionnel sous-amendé par lui à une partie du texte en discussion, alors même que celle-ci serait sans lien avec ledit article ; ces « rattachements » artificiels, que l'on connaîtrait surtout à l'occasion de l'examen des projets à caractère financier, et auxquels la proposition de M. Diligent ne permettrait d'ailleurs pas de s'opposer, contraindraient en effet le Sénat à se prononcer par un seul vote sur des dispositions foncièrement différentes.

Pour ces raisons, votre Commission ne vous soumet aucune réglementation du vote unique. Elle s'est cependant montrée soucieuse d'apporter une solution au problème posé et à sa principale conséquence, à savoir l'obligation pratiquement faite au Sénateur de retirer son amendement. Elle a estimé que le procédé dénoncé trouvait sa cause dans la possibilité d'utiliser la technique du sous-amendement autrement que pour préciser ou infléchir le sens d'un amendement. Aussi vous propose-t-elle de compléter l'article 48, alinéa 3, du Règlement, relatif à la recevabilité des amendements, par une disposition prévoyant que les sous-amendements peuvent être déclarés irrecevables dès lors qu'ils ont pour effet de dénaturer l'esprit, ou de contredire le sens des amendements auxquels ils s'appliquent. De même qu'il est appelé à se prononcer sur la recevabilité des amendements autres que ceux, par exemple, ayant pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique (art. 48, alinéa 4), le Sénat serait, le cas échéant, invité à décider la recevabilité d'un sous-amendement d'origine gouvernementale, ou sénatoriale, qui ferait perdre toute signification au texte principal.

Ainsi, à l'avenir, dans des circonstances analogues à celles qui sont à l'origine de la proposition de M. Diligent, le Gouvernement pourrait se voir opposer l'irrecevabilité d'un sous-amendement, qu'il y ait d'ailleurs demande ou non de vote unique, et serait normalement conduit à utiliser celle des procédures habituelles -- dont le vote unique -- qui lui paraîtrait la mieux adaptée à ses intentions.

Telle est la portée des dispositions des paragraphes II et III du présent article. Elles peuvent être présumées constitutionnelles dans la mesure où elles ont leur correspondance dans le Règlement de l'Assemblée Nationale.

Il importe enfin de souligner qu'aucune restriction n'est apportée au droit d'amendement qui est seulement réglementé dans ses modalités d'exercice.

IV -- Le quatrième paragraphe de l'article 3 modifie l'alinéa premier de l'article 49 qui, dans sa rédaction actuelle, ne traduit pas parfaitement l'ordre dans lequel, en pratique, les amendements sont mis en discussion puis aux voix par rapport aux textes qu'ils tendent à modifier. D'autre part, la notion de « question principale » n'a plus, aujourd'hui, le sens précis qu'elle avait sous les III e et IV e Républiques.

V -- Sur chaque amendement, seuls l'auteur ou l'un des auteurs de l'amendement, et un orateur d'opinion contraire, sont autorisés à demander et à obtenir la parole. Le souci déjà exprimé d'accélérer le rythme des débats conduit votre commission à vous proposer de limiter à dix minutes la durée maxima chacune de ces deux interventions, et à cinq minutes la durée maxima des explications de vote qui, le cas échéant, peuvent être présentées par d'autres orateurs.

Règlement du Sénat.

Art. 64.

1. -- La délégation doit être écrite, signée et adressée par le délégant au délégué. Elle ne vaut que pour les scrutins publics et pour les votes en commission.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

Art. 4.

I. -- L'alinéa premier de l'article 64 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1. -- La délégation doit être écrite, signée et adressée par le délégant au délégué. Elle vaut pour les scrutins publics et pour les votes en commission. Elle n'est pas valable pour les scrutins secrets . »

II. -- L'article 64 du Règlement est complété par le nouvel alinéa suivant :

« 7. -- Les dispositions des alinéas 2 à 6 ci-dessus s'appliquent dans tous les cas, qu'il s'agisse de délégation de vote en matière de scrutins publics ou de votes en commission . »

Observations . -- Les dispositions du présent article s'appliquent à l'article 64 du Règlement, l'un des deux articles du chapitre X consacré à la délégation de vote.

I. -- Dans sa rédaction actuelle, le premier alinéa de l'article 64 pose notamment le principe que la délégation de vote « ne vaut que pour les scrutins publics », à l'exclusion donc des scrutins secrets (nominations en séance plénière), ainsi « que pour les votes en commission ». Or, cette dernière expression n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle laisse entendre qu'en commission la délégation est valable en toutes circonstances, en particulier pour les nominations personnelles qui ont obligatoirement lieu au scrutin secret (art. 61), et quels que soient les modes de votation. Aussi, dans une nouvelle rédaction, vous est-il proposé de préciser que la délégation de vote est interdite pour toutes les nominations personnelles, aussi bien en assemblée plénière qu'en commission.

Certes, votre Commission n'a pas manqué d'évoquer la possibilité inverse, c'est-à-dire l'extension de la délégation de vote à tous les scrutins secrets, mais elle a rejeté unanimement cette idée, considérant que, dans une assemblée parlementaire, la délégation de vote, si elle n'altère en aucune manière la nature de l'acte politique que constitue la participation à un scrutin public, n'est en revanche pas acceptable pour un scrutin secret qui engage la responsabilité de l'homme autant que celle de l'élu.

II. -- La deuxième partie de cet article 4 précise que la procédure de la délégation de vote prévue par les alinéas 2 à 6 de l'article 64 (notification au Président du Sénat, contenu de cette notification, accord du Bureau, retrait, transfert, cas d'urgence) est applicable aux votes en commission. On pouvait penser, jusqu'à présent, qu'elle ne s'appliquait qu'aux scrutins publics.

Règlement du Sénat.

Art. 72.

Lorsque le texte établi par la commission mixte est soumis au Sénat par le Gouvernement, le Sénat procède à l'examen de ce texte dans les formes ordinaires, réserve faite des dispositions de l'article 45, alinéa 3, de la Constitution et de l'article 42, alinéa 11, du présent règlement.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

Art. 5.

L'article 72 du règlement est complété par le nouvel alinéa 2 suivant :

« 2. -- La commission saisie au fond du projet ou de la proposition de loi est compétente pour donner son avis sur les amendements

-

Règlement du Sénat.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

recevables en vertu des articles visés à l'alinéa précédent, ou pour demander un scrutin public en application de l'article 60. » (En conséquence, faire précéder les

dispositions de l'actuel article 72 du

chiffre 1.)

Observations . -- L'article 72 du Règlement, dans son unique alinéa, précise les conditions d'examen des textes élaborés par les commissions mixtes paritaires.

Le nouvel alinéa qui vous est proposé tend à améliorer ces conditions d'examen, On sait, en effet, que lorsque le Gouvernement dépose ou accepte un amendement, le rapporteur de la commission mixte paritaire n'a pas qualité pour exprimer un avis puisque, par hypothèse, ladite commission n'a pas eu à connaître de l'amendement. Pour remédier à ce « vide » dans la discussion en séance publique, il vous est proposé d'habiliter la commission saisie au fond du projet ou de la proposition de loi à se réunir en vue de donner un avis au Sénat, qui, rappelons-le, ne peut se prononcer que par un seul vote sur l'ensemble du texte ainsi modifié. Il faut souligner que cette procédure a déjà été instituée par l'Assemblée Nationale.

Une seconde disposition prévoit que cette même commission est également habilitée à demander au Sénat de se prononcer par un scrutin public sur un texte de commission mixte paritaire, modifié ou non par un amendement.

Règlement du Sénat.

Art. 73.

1. -- Le Président appelle les questions dans l'ordre fixé par la Conférence des Présidents. Après en avoir rappelé les termes, il donne la parole au Ministre.

Propositions de résolution.

PROPOSITION N° 230

Article unique.

L'alinéa 1 de l'article 78 du Règlement du Sénat est ainsi modifié :

« 1. -- Le Président appelle les questions dans l'ordre fixé par la Conférence des Présidents et donne la parole à l'auteur de chaque question qui dispose d'un délai n'excédant pas trois minutes pour en rappeler brièvement l'objet. Le Ministre compétent y répond. »

Propositions de la commission.

Art. 6.

I. -- Le premier alinéa de l'article 78 du Règlement est remplacé par les dispositions suivantes :

« 1. -- Le Président appelle les questions dans l'ordre fixé par la Conférence des Présidents. Il donne la parole à l'auteur de chaque question pour en rappeler les termes, puis au Ministre. L'auteur peut désigner l'un de ses collègues pour le suppléer. »

-

Règlement du Sénat.

« 2. -- L'auteur de la question, ou l'un de ses collègues désigné par lui pour le suppléer , peut seul répondre au Ministre ; il doit limiter strictement ses explications au cadre fixé par le texte de sa question ; ces explications ne peuvent excéder cinq minutes. »

Art. 82.

1. -- L'auteur d'une question orale avec débat dispose de trente minutes pour développer sa question. Les orateurs inscrits disposent d'un temps de parole de vingt minutes.

Propositions de résolution.

Propositions de la commission.

II. -- Le début du deuxième alinéa de l'article 78 du Règlement est modifié comme suit :

« 2. -- L'auteur de la question, ou son suppléant , peut seul répondre... (le reste de l'alinéa sans changement). »

III. -- La dernière phrase du premier alinéa de l'article 82 du Règlement est modifiée comme suit :

« Les orateurs inscrits disposent d'un temps de parole de vingt minutes ; cependant, la Conférence des Présidents peut décider que les dispositions de l'article 29 bis s'appliqueront aux interventions des orateurs inscrits . »

Intitulé de la proposition de résolution.

Proposition de résolution tendant à modifier les articles 36, 37, 42, 46, 48, 49, 64, 72, 78 et 82 du Règlement

du Sénat .

Observations . -- Les articles 78 et 82 du Règlement, visés par le présent article, sont compris dans le chapitre XII, intitulé « Questions écrites et orales ».

I et II. -- L'article 78 du Règlement a trait à la procédure applicable, en séance publique, aux questions orales sans débat. Les modifications à cet article que vous soumet votre Commission résultent de la proposition de résolution déposée par M. Cluzel.

Soucieux d'orienter la procédure des questions orales sans débat vers un dialogue concret et direct entre l'auteur de la question et le représentant du Gouvernement, notre collègue suggère que l'auteur expose lui-même brièvement l'objet de sa question (pendant trois minutes au maximum) ; la possibilité serait ainsi offerte à l'auteur d'exprimer sa préoccupation essentielle et, le cas échéant, lorsque le problème posé est complexe, de préciser sa question. Cet exposé se substituerait ainsi à la lecture que le Président de séance donne actuellement des termes de la question.

Votre Commission a marqué de l'intérêt pour cette procédure -- en vigueur à l'Assemblée Nationale -- qui semble effectivement de nature a atténuer « l'académisme » actuel, et surtout à encourager le dépôt de questions orales sans débat. Les aspects positifs de la proposition de M. Cluzel n'ont cependant pas emporté la pleine adhésion de la Commission, qui a surtout craint que la présentation orale ne reflète qu'imparfaitement la présentation écrite, voire qu'elle conduise à poser de nouveaux problèmes, qu'elle incite enfin à moins de clarté et de concision dans le libellé du texte déposé et diffusé. Il a été en outre souligné que, dans les faits, les précisions résultant de l'exposé oral, ne se traduiraient pas par une nouvelle orientation de la réponse dans la mesure où celle-ci est toujours préparée, jamais improvisée.

En définitive, la Commission s'est prononcée pour une solution intermédiaire susceptible, néanmoins, de donner à la procédure des questions orales sans débat un caractère plus personnel, plus incisif, que celui qu'elle a actuellement. Aussi, vous demande-t-elle de décider que c'est à l'auteur et non plus au Président de séance, qu'il appartiendra de rappeler les termes (et non pas l'objet) de la question, l'auteur pouvant, pour cette lecture, comme pour la réponse au Ministre, se faire suppléer par l'un de ses collègues en cas d'empêchement.

III. -- L'article 82 du Règlement fixe essentiellement le temps de parole dont disposent, d'une part, l'auteur d'une question orale avec débat pour développer sa question (trente minutes), d'autre part, les orateurs inscrits sur cette question (vingt minutes par orateur).

L'importance particulière d'une question, ou de questions jointes, se traduit tout naturellement par un nombre élevé d'orateurs inscrits, et, le cas échéant, par un débat exagérément long. Or, aucune disposition du Règlement ne permet à la Conférence des Présidents d'organiser un tel débat, alors qu'elle est habilitée, par l'article 29 bis , adopté en avril 1971, à organiser la discussion générale de textes soumis au Sénat, c'est-à-dire essentiellement à fixer la durée globale du temps de parole des orateurs des divers groupes, à répartir ce temps de parole entre les groupes, ainsi qu'à déterminer l'ordre des interventions. Aussi votre Commission vous propose-t-elle, dans ce III de l'article 6, de rendre possible l'application de l'article 29 bis précité aux interventions des orateurs inscrits sur une question orale avec débat.

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