B. LES EFFETS PRATIQUES D'UNE MODIFICATION LÉGISLATIVE TELLE QUE CELLE PROPOSÉE

1. Les conséquences actuelles de la jurisprudence

L'acceptation par la jurisprudence de la faculté pour l'avocat d'examiner les copies des pièces avec son client permet à la défense, ou à la Partie civile, d'avoir en pratique accès à l'ensemble du dossier dans la plupart des cas.

Les avocats peuvent ainsi discuter avec leur client, copies de pièces en mains, le fondement des conclusions des rapports d'expertise ou la validité des témoignages. Ils peuvent retranscrire des passages et les commenter pour leur client.

En revanche, ils ne peuvent les leur faire parvenir en prison, hors de leur présence, ni remettre ces copies à des tiers, seraient-ils experts.

Certains barreaux estiment pourtant que, s'agissant particulièrement des rapports d'expertise, « les dispositions de l'article 114 ne font pas obstacle à ce que l'avocat dispose de la possibilité, s'il l'estime opportun et nécessaire, de remettre cette copie en communication à son client ».

Ainsi, l'usage exclusif imposé par cet article devrait-il « s'entendre comme visant le seul exercice des droits de la défense, laissé à la libre appréciation et à la prudence de l'avocat auquel on ne saurait prétendre imposer les moyens par lesquels il entend organiser sa défense » (conseil de l'ordre des avocats à la Cour de Paris, 20 juillet 1994).

Leur argumentation renvoie en outre très expressément à l'article 11 du code de procédure pénale et au décret de 1991 qui prévoient que le secret de l'instruction s'entend sans préjudice des droits de la défense.

Elle néglige en revanche de préciser quel usage le client, qui n'est pas soumis au secret de l'instruction, peut faire de ces copies.

2. Les propositions ciblées de modification

Plusieurs propositions de loi ont été déposées depuis les arrêts de juin 1995 pour modifier la législation sur ce seul point.

A l'Assemblée nationale, celle de MM. Marsaud et Voisin (n° 2146, dixième législature) propose la communication à la personne mise en examen des pièces et actes du dossier « strictement nécessaires à sa défense ». Celle de M. Michel Hunault (n° 2286, dixième législature) suggère que les parties puissent se voir délivrer les copies dans les mêmes conditions que l'avocat mais que n'apparaisse dans les deux cas ni le nom, ni les coordonnées des témoins.

La présente proposition de M. Michel Dreyfus-Schmidt et des membres du groupe socialiste prévoit la délivrance gratuite des copies aux avocats, ou aux parties elles-mêmes en l'absence d'avocat. Elle ne prévoit de restriction ni sur l'usage, ni sur la reproduction.

Ces propositions ignorent donc la difficulté d'articulation entre la communication des copies et la protection de la présomption d'innocence et du secret de l'instruction.

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