EXAMEN DES ARTICLES

La présente proposition de loi qui comportait douze articles initiaux, en compte désormais vingt-deux, répartis en cinq titres, intitulés respectivement, de la prestation spécifique dépendance, dispositions générales, de la prestation spécifique dépendance à domicile, de la prestation spécifique dépendance en établissement, de reforme de la tarification et dispositions diverses.

TITRE PREMIER - DE LA PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Le présent titre, qui comportait initialement six articles et en compte désormais onze, crée la prestation spécifique dépendance pour les personnes âgées concernées et définit ses principales caractéristiques et ses conditions d'attribution.

Article premier - Instauration de la prestation spécifique dépendance

En effet le présent article définit le principe du droit d'accès à une nouvelle prestation dite prestation spécifique dépendance pour toute personne remplissant un certain nombre de conditions.

Les conditions mentionnées sont au nombre de quatre : l'âge, le degré de dépendance, la résidence en France et le niveau des ressources, toutes fixées par voie réglementaire.

S'agissant de l'âge minimal requis pour l'obtention de cette prestation, s'il revient au décret de fixer celui-ci, on peut d'ores et déjà dire que celui accepté par le Gouvernement lors du dépôt du projet de loi n° 2 (1995-1996) instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, soit soixante ans, est apparu opportun à votre commission, dans la mesure où c'est l'âge où les départements font commencer leur politique en faveur des personnes âgées et où il faut préserver la cohérence de cette dernière, même si d'aucuns 5 ( * ) auraient souhaité le choix d'un âge plus élevé, soixante-dix voire quatre-vingts ans, dans un premier temps, âge qui aurait été abaissé progressivement en fonction des disponibilités financières.

Votre commission des Affaires sociales ne peut, à cet égard, que déplorer cette constante du droit social qui consiste à laisser au décret, et non à la loi, ce qui est pourtant un point essentiel dans un dispositif, à savoir le soin de fixer l'âge d'accès à telle ou telle prestation.

Le deuxième critère retenu par la proposition de loi initiale est le degré de dépendance de la personne âgée. Ce degré de dépendance sera évalué selon des critères fixés par voie réglementaire ainsi que cela est précisé dans la première phrase de l'article 4 de la présente proposition. Ces critères figureront donc dans une grille unique nationale, afin qu'il n'y ait pas de disparité dans l'appréciation de la dépendance sur l'ensemble du territoire. La grille AGGIR (Autonomie gérontologie - groupe iso-ressources) (cf. annexe n° 2), qui a été utilisée lors des expérimentations semble toute désignée pour remplir cet office même si elle est encore perfectible sur de nombreux points comme la prise en compte de l'environnement ou de l'incontinence, ainsi que l'ont souligné nombre de personnes auditionnées par votre rapporteur. Toutefois, il est apparu à votre commission que la notion de dépendance, qui conditionne l'attribution de cette nouvelle prestation, était insuffisamment définie. Elle vous propose donc de compléter cet article en précisant dans un nouvel alinéa que l'état de dépendance est défini comme la situation de la personne qui a, outre les soins qu'elle reçoit, besoin de recourir à une aide pour l'accomplissement des actes essentiels de la vie ou qui requiert une surveillance régulière. À cet égard, elle souhaite qu'aucune ambiguïté ne soit possible quant à la prise en charge des soins.

Le troisième critère est celui de la durée de résidence en France. Toutefois, la formulation ne semble pas tout à fait heureuse dans la mesure où il apparaît difficile de demander à un ressortissant français une durée de résidence identique à un étranger. De plus, demander une durée de résidence en France n'implique pas forcément que la personne, au moment où elle fait la demande d'une prestation spécifique dépendance, réside en France. Or, la condition de résider en France, pour bénéficier de cette prestation apparaît à votre commission fondamentale dans la mesure où ce seront les départements qui serviront et géreront cette prestation et où la notion de contrôle et celle d'affectivité de l'aide apparaissent essentielles. Une possibilité d'exporter la PSD à l'étranger rendrait, selon votre commission, toute possibilité de contrôle illusoire.

Il est apparu opportun à votre commission d'indiquer au sein de cet article, qui est un article de principe, que les étrangers, résidant régulièrement en France, pourront également prétendre au bénéfice de cette prestation, s'ils remplissent les conditions d'accès prévues pour les ressortissants français et s'ils satisfont aux exigences de l'admission à l'aide sociale aux personnes âgées, en l'occurrence l'aide à domicile qui figure à l'article 158 du code de la famille et de l'aide sociale. Votre commission vous propose donc de demander aux étrangers qui souhaitent bénéficier de cette prestation la même durée de résidence que pour l'aide à domicile pour les personnes âgées, soit une période de quinze ans ininterrompue en France métropolitaine avant l'âge de soixante-dix ans.

La quatrième condition à remplir est celle du niveau de ressources. Ainsi que cela a été indiqué dans l'exposé des motifs de la présente proposition de loi, cette prestation doit permettre aux plus démunis d'être solvabilisés pour que soient prises en charge les conséquences de leur état de dépendance. Le niveau de ressources requis serait donc le même que pour l'allocation compensatrice pour tierce personne même si, comme pour l'âge, une telle disposition est du domaine du décret. Le plafond de ressources pour une personne seule devrait donc être de 40.384 francs (soit l'accès au minimum vieillesse) et de 81.668 francs pour un couple. Si le montant maximal accordé pour cette prestation devait être de 4.337,41 francs par mois qui est actuellement celui de l'allocation compensatrice, les ressources maximales mensuelles globales pour une personne seule ne devraient donc pas excéder 7.600 francs mensuels. Nombre de personnes auditionnées par votre rapporteur ont regretté ce niveau de ressources qui limite bien évidemment le nombre de bénéficiaires potentiels et qui apparaît en retrait tant par rapport aux expérimentations que par rapport au projet de loi portant institution d'une prestation d'autonomie où les ressources maximales pouvaient atteindre, au maximum, un minimum vieillesse et demi. D'autres personnes, plus maximalistes, ont estimé, devant votre rapporteur, que le niveau de ressources souhaitable pour englober les classes moyennes qui ne pouvaient ni prétendre à l'aide sociale ni bénéficier à plein des réductions d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile était de quatre « minimum vieillesse ».

Votre commission, suivant en cela les auteurs de la proposition de loi, a convenu qu'il fallait être réaliste et ne pas augmenter significativement, sans données prospectives fiables, les charges financières des départements qui connaissent déjà, pour la plupart d'entre eux, des difficultés d'ordre budgétaire.

Par ailleurs, votre commission a souhaité préciser, dès ce premier article, que la personne âgée dépendante doit faire la demande de cette prestation. Cela lui a semblé logique que, afin de bénéficier de ce nouveau droit, il faille le demander et qu'il n'y ait là aucun caractère d'automaticité.

Enfin, le présent article précise, ce qui apparaît essentiel aux yeux de votre commission, que la prestation spécifique dépendance est une prestation en nature et non en espèces comme l'allocation compensatrice. En effet, l'allocation compensatrice, le phénomène est désormais bien connu, a servi, dans une proportion non négligeable des cas, aux personnes âgées comme complément de ressources destiné à accroître leurs économies ou pour aider leurs petits-enfants. Avec une allocation en nature, qu'elle soit destinée à rémunérer du personnel ou à acheter des matériels techniques, le département aura l'assurance que la prestation ne sera pas détournée de son objet. Il pourra aisément en contrôler l'effectivité.

Compte tenu de l'ensemble de ces remarques, votre commission vous propose de réécrire le présent article et de l'adopter ainsi modifié.

* 5 et non des moindres puisque M. René Teulade, ancien ministre des Affaires sociales du Gouvernement de M. Bérégovoy, avait évoqué cette piste au cours du colloque qui s'est tenu le 20 mai 1996 au Sénat et était organisé par la société de gérontologie d'Ile-de-France.

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