6. Audition de M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence

La commission a entendu le jeudi 23 janvier 1997 M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence, accompagné de M. Jacques Carles, chargé de mission.

M. Xavier Emmanuelli a tout d'abord présenté le rôle dévolu, en matière d'insertion, au rendez-vous citoyen qui devra permettre de toucher tous les jeunes en difficulté en associant l'ensemble des partenaires concernés. Soulignant la nécessité d'une information préalable par l'intermédiaire des associations et organismes qui travaillent au contact des jeunes, il a souhaité que les cas d'exemption soient très strictement limités afin qu'aucun jeune ne soit écarté du rendez-vous citoyen. Il a précisé que l'instauration de " médiateurs-citoyens " accessibles et à l'écoute des jeunes permettrait d'engager une démarche d'insertion qui devra se poursuivre après le rendez-vous citoyen.

M. Xavier Emmanuelli a ensuite présenté les cinq étapes du processus d'insertion qui devrait être mis en place autour du rendez-vous citoyen :

- la période de sensibilisation au rendez-vous citoyen, qui impliquera une communication permanente et qui devra notamment comprendre un volet pour les jeunes en difficulté ;

- l'intervention des médiateurs-citoyens, au nombre d'une dizaine par sites et par semaine, soit un total de 5.000 personnes sur l'ensemble du territoire et 10.000 à partir de 2003 (compte tenu de l'extension aux jeunes filles) ; précisant qu'ils seraient défrayés, mais pas rémunérés, et que leur temps de médiation serait compté comme temps de réserve, le secrétaire d'Etat a souhaité le recours à des personnes préalablement formées mais issues de la société civile, de préférence à l'institution d'un corps de médiateurs permanents ;

- le rendez-vous spécialisé, de nature facultative, se déroulera peu après le rendez-vous citoyen dans le département du jeune au sein d'organismes existants et permettra, en une journée, de définir avec le jeune une démarche d'insertion ;

- l'engagement citoyen, période d'adaptation préliminaire de deux mois devant permettre la mise à niveau des savoirs élémentaires et la pratique optionnelle d'activités d'utilité sociale ; le secrétaire d'Etat a souhaité qu'au cours de cette période, les jeunes soient indemnisés selon les principes retenus pour le volontariat ;

- enfin, l'entrée dans un volontariat s'exerçant, soit dans le domaine de la solidarité, de la sécurité ou de l'aide au développement, soit dans le cadre d'un " service national alterné " s'inspirant du service militaire adapté en vigueur dans les départements d'outre-mer et associant activités sociales et

M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence, après avoir souhaité une bonne coordination de tous les acteurs concernés, a estimé à 50 millions de francs par an le coût de ce dispositif.

Le secrétaire d'Etat a ensuite donné des indications sur les volontariats de cohésion sociale, de solidarité et d'aide humanitaire, en soulignant qu'en aucun cas ceux-ci ne devaient concurrencer des emplois permanents. Il a précisé que les organismes d'accueil seraient préalablement agréés et a insisté sur la nécessité d'assurer une cohérence d'ensemble du dispositif. Il a évoqué à ce sujet le rôle que pourrait jouer l'observatoire de lutte contre la précarité prévu par le projet de loi sur le renforcement de la cohésion sociale.

M. Xavier Emmanuelli a précisé que les volontariats de cohésion sociale et de solidarité s'exerceraient dans les domaines du repérage des problèmes sociaux, de la coordination des actions de solidarité et de l'urgence humanitaire. Il a souhaité une régulation locale et nationale efficace afin de prévenir tout danger d'appropriation des volontariats par des administrations ou de grands organismes, au détriment des petites associations et de l'esprit de " mission " qui doit animer les volontaires.

Il a enfin évoqué la nécessité de rénover, en liaison avec les organisations non gouvernementales, les modalités du volontariat d'aide humanitaire à l'étranger afin de privilégier le recours à des personnels formés et de garantir leur encadrement.

Un débat a suivi l'intervention de M. Xavier Emmanuelli.

Après avoir remercié le secrétaire d'Etat de son exposé qui démontrait l'intérêt du rendez-vous citoyen pour les jeunes en difficulté, M. Serge Vinçon, rapporteur du projet de loi, a souhaité obtenir des précisions sur la nécessité d'inscrire éventuellement dans la loi les différentes étapes qui ponctueront la démarche d'insertion proposée aux jeunes, sur l'accueil des handicapés moteurs et mentaux lors du rendez-vous citoyen et sur la nécessaire déontologie qui devra s'imposer aux médiateurs-citoyens.

Souhaitant que la loi offre un cadre tout en préservant une grande souplesse, M. Xavier Emmanuelli a estimé qu'il convenait de privilégier l'expérimentation et une démarche empirique inspirée de la connaissance du terrain. Il a considéré qu'à la différence des handicapés mentaux, les handicapés physiques avaient naturellement vocation à participer au rendez-vous citoyen. En ce qui concerne les médiateurs-citoyens, il a souhaité que ceux-ci émanent de la société civile et puissent constituer, pour les jeunes, des tuteurs, des parrains ou des guides dans leur démarche d'insertion.

M. Bertrand Delanoë a considéré que les objectifs du projet de loi en matière d'insertion étaient peut-être trop ambitieux au regard des très nombreux instruments qui existent déjà pour réduire les fractures sociales et de la durée limitée du rendez-vous citoyen. Il a demandé si le Gouvernement amenderait son texte pour y faire figurer notamment les notions de médiateur-citoyen et d'engagement citoyen.

M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence, a jugé suffisante la durée du rendez-vous citoyen pour établir un contact avec les jeunes en difficulté et leur offrir la chance d'engager un processus d'insertion. Il a souligné que les démarches d'insertion se situant en aval du rendez-vous citoyen s'appuieraient sur des structures existantes. Il a jugé souhaitable que la notion de médiateur-citoyen puisse figurer dans la loi, les autres notions relevant de l'expérimentation.

M. Xavier de Villepin, président, a souligné que le Parlement devra être régulièrement informé des résultats observés sur le terrain au cours de la période d'expérimentation qui suivra la mise en place du rendez-vous citoyen.

M. Jacques Carles, chargé de mission, a ajouté que, par rapport aux organismes existants, les seuls éléments supplémentaires envisagés dans le cadre de la réforme étaient le médiateur-citoyen et l'engagement citoyen, formule innovatrice qui permettrait de former les jeunes tout en les responsabilisant.

M. André Boyer a interrogé le secrétaire d'Etat sur le suivi des jeunes par le médiateur-citoyen après leur retour dans leur département et sur la volonté de l'Etat de mobiliser ses moyens, dans les départements, autour du projet.

M. Xavier Emmanuelli a rappelé la cohérence entre l'instauration du rendez-vous citoyen et l'élaboration du projet de loi relatif au renforcement de la cohésion sociale, qui traduit l'engagement de l'Etat dans la politique d'insertion sociale.

M. Jacques Carles, chargé de mission, a précisé que chaque médiateur n'interviendrait qu'une semaine et serait en charge d'une dizaine de jeunes dont tous n'exigeraient pas un suivi prolongé. Il a ajouté que le recrutement des médiateurs s'opérerait dans l'ensemble des départements et non uniquement autour des sites du rendez-vous citoyen, ce qui favorisera le suivi des jeunes.

Mme Paulette Brisepierre et M. Xavier de Villepin, président, ont ensuite évoqué le cas des jeunes Français résidant à l'étranger. M. Xavier Emmanuelli a confirmé que ceux-ci seraient concernés, au même titre que tous les autres jeunes Français, par le rendez-vous citoyen.

M. Michel Caldaguès a considéré que le rendez-vous citoyen ne pourrait combler les carences de diverses institutions, dont l'éducation nationale, et a souhaité que ces dernières contribuent financièrement à la mise en place de la réforme envisagée. Il s'est interrogé sur la place accordée, au cours du rendez-vous citoyen, aux jeunes ne présentant pas de difficulté d'insertion.

M. Xavier Emmanuelli, secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence, a précisé que ces jeunes se verraient proposer des activités de volontariat.

M. Xavier de Villepin, président, a interrogé le secrétaire d'Etat sur le financement du rendez-vous citoyen et de ses suites et sur l'organisation des volontariats.

Rejetant toute idée de " service public au rabais ", M. Xavier Emmanuelli a précisé que les associations susceptibles d'accueillir des volontaires seraient choisies en fonction de leur capacité à les encadrer et à leur assigner des objectifs.

M. Jacques Carles, chargé de mission, a estimé à 50 millions de francs en année pleine, et 100 millions de francs après 2003, le coût de la formation des médiateurs-citoyens et de leur défraiement ainsi que l'indemnisation des jeunes qui participeront à l'engagement citoyen. Il a en outre estimé que 40.000 jeunes pourraient être concernés par le volontariat de cohésion sociale et de solidarité.

En conclusion, M. Xavier de Villepin, président, a souhaité que les ministères civils démontrent, dans la mise en oeuvre de la réforme, une capacité d'organisation équivalant à celle dont avait su faire preuve jusqu'alors le ministère de la défense.

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