projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995

MARINI (Philippe)

RAPPORT 36 (98-99) - COMMISSION DES FINANCES

Table des matières




N° 36

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 27 octobre 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant règlement définitif du budget de 1995 ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale
( 11 ème législ.) : 33 , 933 , 996 et T.A. 176 .

Sénat : 527 (1997-1998).


Loi de règlement.

EXPOSÉ GÉNÉRAL
CHAPITRE PREMIER

1995 OU "COMMENT RESISTER

AUX CHOCS EXTERIEURS"

Le rapport économique, social et financier pour 1995 tablait sur une croissance de 3,1 % en France soit un rythme de développement de l'activité supérieur à la moyenne des pays de l'Union européenne (2,9 %) et de l'OCDE (2,7 %).

In fine , la croissance en volume ne fut que de 2 %.

Cette erreur de prévision, de 1,1 point de PIB, s'explique principalement par la survenance d'aléas difficilement prévisibles. Elle a suscité des réactions de politique économique qui ont certes pu, à court terme, participer au freinage de l'activité mais qui ont posé les bases d'une croissance saine et durable.

I. UNE ERREUR DE PRÉVISION, RÉSULTAT DE LA SURVENANCE D'ALÉAS PEU SOUPÇONNABLES

Le scénario proposé pour 1995 par le gouvernement reposait sur une reprise de la demande intérieure s'ajoutant à une progression soutenue de la demande étrangère.

Contributions à la croissance du PIB (prévisions)

(contributions à la croissance du PIB en points)

 

1994

1995

Demande intérieure hors stocks

1,4

2,9

dont :

 
 

Consommation des ménages

0,9

1,4

Consommation des administrations

0,3

0,3

FBCF

0,2

1,2

dont :

 
 

Entreprises

0,1

0,9

Ménages hors EL

0,1

0,2

Administrations

0,1

0,1

Variations de stocks

0,7

0,3

Commerce extérieur

0,0

- 0,1

Exportations

0,9

1,4

Importations

- 0,9

- 1,5

PIB

2,0

3,1

Source : INSEE, DP

L'accélération de la demande intérieure dont on estimait alors la croissance en 1994 à 2,1 % et dont on attendait, pour 1995, 3,2 % d'augmentation, devait provenir d'une augmentation de la consommation des ménages de 2,3 % consécutive à des gains de pouvoir d'achat et d'une nette amélioration de l'investissement, en particulier de celui des entreprises.

Le scénario imaginé pour la consommation des ménages était conditionné par une amélioration du marché du travail, une progression des revenus d'activité et du pouvoir d'achat de l'ordre de 2,2 % et une quasi-stabilité de leur taux d'épargne.

Quant à la reprise de la demande des entreprises, elle devait provenir moins d'une reconstitution de leurs stocks dont la variation était cependant appelée à contribuer positivement à la croissance que du dynamisme retrouvé de leurs investissements (+ 9,3 %). On estimait qu'après une reprise timide de l'investissement en 1994 (+ 1 %) succédant à un effondrement en 1993 (- 6,8 %), l'accélérateur d'investissement jouerait à plein, favorisé par l'amélioration de l'environnement financier des entreprises.

Ce scénario d'amplification du cycle haussier dessinait le paysage d'une sortie définitive de la crise de 1993 après le sursaut de 1994.

Conséquence attendue de la reprise, le solde des administrations publiques était appelé à s'améliorer de 1 point, passant de - 5,6 % à - 4,6 % du PIB dans un contexte de légère réduction des prélèvements obligatoires (- 0,2 point de PIB) et des dépenses publiques (- 0,2 point de PIB).

Ce scénario fut déjoué, le rythme de croissance, au lieu de s'accélérer, s'atténuant en 1995.

Il faut observer que cette erreur de prévision eut des conséquences moins fâcheuses qu'on n'aurait pu le redouter du fait d'une erreur de prévision en sens contraire commise pour l'année 1994. En effet, cette année-là, la reprise fut sensiblement plus vive qu'escompté (+ 2,6 % contre 2 % prévus au moment de l'exercice de cadrage économique du budget 1995).

Il n'empêche qu'au lieu de croître de 5,1 % en 1994 et 1995, l'économie française ne devait connaître qu'une dynamique de l'ordre de 4,6 % et que la croissance ne fut que de 2 % en volume en 1995.

Contributions à la croissance du PIB

(Taux de croissance annuel moyen en %)

Contribution à la croissance du PIB (aux prix de l'année précédente)

1995

Consommation des ménages

0,9

Consommation des administrations

0,0

Formation brute de capital fixe totale

dont sociétés et EI (1)

0,4

0,3

Variation de stocks

0,4

Commerce extérieur

dont : - exportations

- importations

0,3

1,3

- 1,0

PIB

2,0

(1) EI = entrepreneurs individuels

Source : INSEE, DP

L'ensemble des comportements de la demande intérieure a connu une croissance moins rapide qu'escompté. La consommation des ménages n'a apporté au PIB qu'un supplément de 0,9 point contre 1,4 point attendu, et l'investissement des entreprises n'a contribué à la croissance du PIB que de 0,3 point contre 0,9 point espéré. Finalement, le soutien de la croissance vint du commerce extérieur.

La consommation des ménages ne s'accrut que de 1,7 % alors que leur pouvoir d'achat connut une forte augmentation (2,8 %). Mais, leur taux d'épargne augmenta considérablement, passant de 13,6 à 14,5 % de leur revenu. Cette hausse du taux d'épargne, largement inexpliquée par les déterminants économétriques traditionnels, peut être analysée comme la conséquence d'un réflexe de "précaution", lui-même issu d'une montée de l'inquiétude devant la survenance d'aléas extérieurs défavorables et surtout de la peur du chômage.

Quant à l'investissement des entreprises, sa croissance ne fut que de 3,3 % dans un contexte d'amélioration de la situation des entreprises marquée par un renforcement de leur taux de marge et par une diminution de la charge d'intérêt supportée par elles.

L'absence de tensions sur leurs capacités de production, conséquence d'une faible dynamique économique et, probablement, d'une meilleure productivité du capital installé, n'a pas justifié en 1995 de sursaut de l'investissement. On peut en outre considérer que les anticipations des entreprises ont alors été sérieusement troublées par les crises qui ont marqué l'année 1995.

En tout état de cause, la croissance ralentie ne fut pas un événement "franco-français". Le phénomène a concerné l'ensemble des grandes économies de l'OCDE comme en témoigne le tableau ci-dessous.

Croissance de quelques grands pays de l'OCDE en 1994 et 1995

(En %)

 

Etats-Unis

Allemagne

Royaume-Uni

1994

3,5

2,7

4,3

1995

2

1,8

2,7

C'est d'ailleurs un événement international qui a induit les perturbations à la source du ralentissement de la croissance française.

La crise financière du Mexique et la dévaluation du peso mexicain le 22 décembre 1994 ont entraîné une dépréciation du dollar de plus de 17 % par rapport au mark. Cela a, à son tour, fortement perturbé les rapports de change entre monnaies européennes. Une appréciation du mark s'en est suivie que les autorités monétaires françaises ont tenté de contrecarrer par des relèvements successifs des taux d'intérêt. La fameuse asymétrie du système monétaire européen joue donc une fois de plus, notre pays étant doublement pénalisé par les coûts d'une politique monétaire orientée vers la stabilisation de la parité entre le franc et le mark et par l'appréciation consécutive de notre monnaie à l'égard des monnaies tierces du système.

Ces événements monétaires eurent pour effet de "brouiller" les anticipations des agents et, au premier rang, celles des chefs d'entreprise. La perspective d'une tension accrue des conditions monétaires renforça un pessimisme qui pouvait se nourrir en outre d'anticipations de demande défavorables. La croissance était cassée.

II. UNE RÉPONSE DE POLITIQUE ECONOMIQUE RIGOUREUSE MAIS RÉALISTE

Devant l'inflexion du rythme de croissance de l'activité économique perceptible dès le premier semestre, le gouvernement prit les mesures nécessaires pour atteindre son objectif d'assainissement des comptes publics, mais aussi, on l'oublie souvent, pour donner plus de dynamisme à une économie guettée par la langueur.

Ce dernier volet de la politique gouvernementale a poursuivi deux objectifs qui ont été inégalement atteints. Le premier consistait à alléger le coût du travail afin d'enrichir le contenu de la croissance en emplois à travers une baisse de 10 % du coût salarial aux alentours du SMIC et une réduction de 40 % pour les embauches de chômeurs de longue durée. Le second objectif était de soutenir la demande en revalorisant le SMIC et plusieurs prestations sociales.

Ces deux objectifs, partiellement contradictoires, n'ont pas connu le même succès. Si l'allégement du coût du travail peu qualifié a permis de contenir le chômage, la politique des revenus a certes accru le pouvoir d'achat des ménages appelés à profiter de ces mesures mais n'a pas eu les effets économiques attendus. Les revenus distribués n'ont pas été consommés, le taux d'épargne des ménages connaissant une hausse sans précédent.

Quant aux mesures de redressement des finances publiques, elles allaient se manifester principalement dans la loi de finances rectificative du 4 août 1995 avec une hausse de 2 points du taux normal de TVA, une majoration exceptionnelle de 10 % de l'impôt sur les sociétés et une suppression de la remise sur les cotisations d'assurance-vieillesse des salariés.

Ces mesures furent sans doute coûteuses à court terme puisque selon certaines estimations 1( * ) elles amputèrent la croissance du PIB de 0,2 point en 1995 et 0,5 point en 1996.

Mais, elles permirent d'atteindre l'objectif de réduction du besoin de financement des administrations publiques de l'ordre de 1 point du PIB en 1995.

Cette politique, dont les effets ont été mal ressentis par l'opinion publique, doit, rétrospectivement, être saluée comme particulièrement cohérente.

On l'a souvent, à tort, décrite comme excessivement restrictive. Un tout autre jugement s'impose pourtant. On doit rappeler que, par rapport à un objectif louable de politique budgétaire, la stabilisation du poids de la dette publique dans le PIB, le gouvernement d'alors, plutôt que de la rechercher en une seule fois, inscrivit sa politique budgétaire dans une trajectoire destinée à atteindre progressivement cet objectif.

Une telle démarche, cohérente avec nos engagements européens, s'imposait pour tout à la fois éviter un resserrement excessif de la politique budgétaire et parvenir à maîtriser le déficit et la dette publics.

Il faut seulement regretter que ce gage de bonne gestion budgétaire ayant été donné, la politique monétaire n'ait pas été suffisamment assouplie pour contrebalancer les effets d'une politique budgétaire responsable.

L'année 1995 rappelle ainsi à chacun que la politique économique forme un tout, et qu'une coordination des politiques budgétaire et monétaire s'impose, sans laquelle il n'est pas possible de rechercher un objectif global.

CHAPITRE II

DU BUDGET INITIAL À LA LOI DE RÈGLEMENT

L'élaboration de la loi de finances initiale a été, pour la seconde année, encadrée par les dispositions de la loi d'orientation quinquennale du 24 janvier 1994 relative à la maîtrise des dépenses publiques, mais également par les dispositions du traité de Maastricht. La réduction du déficit public, et partant, la nécessaire maîtrise des dépenses publiques ainsi que la réforme du système des prélèvements obligatoires, ont ainsi constitué autant de priorités pour les gouvernements.

I. LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 1995

A. LE POIDS DES CONTRAINTES

Le budget de l'Etat pour 1995 a été élaboré dans un contexte particulier, marqué par l'accumulation des déficits au cours des derniers exercices, la rigidité accrue des dépenses publiques, ainsi que la faible dynamique des recettes. Dans ce cadre, la voie était étroite entre le souci de ne pas entraver la reprise et celui de réduire le poids de la puissance publique.

Ainsi, la réduction du déficit, inscrite dans le double cadre des dispositions du traité de Maastricht et de la loi d'orientation quinquennale de maîtrise des finances publiques, est apparue comme une contrainte majeure et indispensable, car seule en mesure de permettre une véritable maîtrise des dépenses.

B. L'ÉQUILIBRE FIXÉ EN LOI DE FINANCES INITIALE

Equilibre du budget 1995

(en milliards de francs)

 

Loi de finances pour 1994

Loi de finances pour 1995

Variation en %

- Dette publique (hors remboursements et dégrèvements)

217,1

224,6

+ 3,45

- Budgets civils

 
 
 

. Pouvoirs publics

3,8

3,9

+ 3,40

. Moyens des services

494,5

511,8

+ 3,50

. Interventions publiques

406,4

417,5

+ 2,75

. Dépenses en capital

89,1

86,2

- 3,25

TOTAL

993,8

1.019,4

+ 2,60

- Budget militaire

 
 
 

. Dépenses de fonctionnement

147,6

148,5

+ 0,60

. Dépenses en capital

94,9

94,9

-

TOTAL

242,5

243,4

+ 0,40

TOTAL BUDGET GENERAL

1.453,5

1.487,4

+ 2,35

Charge nette des comptes spéciaux du Trésor

19,2

15,9

- 17,2

Total des charges

1.472,7

1.503,3

+ 2,10

Recettes nettes

1.171,3

1.228,2

+ 4,85

Solde général

- 301,4

- 275,1

 

Solde en % du PIB

- 4,1

- 3,55

 

L'équilibre de la loi de finances initiale, qui s'inscrivait dans le respect des dispositions de la loi d'orientation quinquennale précitée, présentait les caractéristiques suivantes :

- les charges du budget général progressent sensiblement plus que la hausse des prix prévisionnels, soit de + 2,35 %, contre + 1,8 %, et s'établissent à 1.487,4 milliards de francs ;

- les recettes progressent à un rythme inférieur à celui du PIB en valeur ; ainsi, les recettes nettes totales du budget général atteignent 1.228,2 milliards de francs, en augmentation de 4,85 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1994 ;

- le déficit est ramené de 301,4 à 275,1 milliards de francs, soit de 4,1 % à 3,55 % du PIB.

En effet, l'élaboration du budget pour 1995 s'est faite sous une double contrainte : alors que les recettes fiscales n'étaient pas encore au rendez-vous de la reprise économique, une large part des dépenses de l'Etat continuaient de croître sous le poids d'engagements passés et des dispositifs sociaux mis en place en période de crise.

Ainsi, la progression des ressources totales nettes (+ 4,85 %) était inférieure à celle du PIB en valeur (+ 5,1 %), les recettes fiscales augmentaient de 5,6 % alors que les ressources non fiscales (hors recettes d'ordre) diminuaient de 3,2 % et que les prélèvements sur recettes se stabilisaient à leur niveau de 1994.

L'évaluation des recettes fiscales nettes, s'élevait à 1.305,9 milliards de francs en 1995, en progression de 69,3 milliards de francs, et résultait, à hauteur de 16 milliards de francs environ d'une actualisation des recettes attendues pour l'année en cours et de 52 milliards de francs des effets de la croissance. Ceux-ci restaient relativement modérés, la croissance étant tirée par des composantes pauvres en plus-values fiscales. Evaluées à 156,4 milliards de francs (hors recettes d'ordre), les ressources non fiscales diminuaient de 3,2 %, principalement en raison de l'impact des mesures contenues dans le projet de loi de finances, consistant d'une part, en une modification dans l'affectation du produit des privatisations et, d'autre part, en l'extension des attributions du fonds de solidarité vieillesse.

La stabilisation des prélèvements sur recettes (+ 0,4 % par rapport au budget voté de 1994) correspondait à une certaine progression des prélèvements au profit des collectivités locales (+ 2,8 %) et à une diminution sensible (- 3 %) du prélèvement au profit des Communautés européennes.

Les charges du budget général étaient presque stabilisées en volume malgré une forte inertie de certaines dépenses :

- la charge de la dette publique nette augmentait de 3,45 % ;

- les moyens des services civils étaient en progression de 3,5 % ;

- les dépenses d'intervention s'accroissaient de 2,75 % ;

- les dépenses civiles en capital diminuaient de 3,25 %.

II. LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DU 4 AOÛT 1995

Ce projet de loi s'inscrivait dans une double perspective : maîtrise des déficits et priorité à l'emploi.

Dans ce cadre, le nouveau gouvernement s'était fixé cinq objectifs majeurs, appelant par ailleurs une présentation budgétaire spécifique.

Cette première loi de finances rectificative a ouvert au sein du budget général 59,8 milliards de francs de crédits nouveaux et annulé 15,8 milliards de francs de crédits.

A. LES OBJECTIFS FIXÉS PAR LE GOUVERNEMENT

1. La non comptabilisation des recettes de privatisation

La loi de finances pour 1995 escomptait 55 milliards de francs de recettes de privatisation, dont 47 affectés aux ressources du budget général et 8 aux dotations en capital aux entreprises publiques. Le retour à une présentation plus orthodoxe, et par ailleurs plus conforme à l'esprit des critères de convergence au sens du traité de Maastricht, s'est traduit par l'imputation de 40 milliards de francs à deux comptes d'affectation spéciale.

2. La remise à niveau des dépenses et des recettes

L'exposé des motifs du projet de loi de finances rectificative indiquait que l'exécution du budget 1995 laisserait apparaître une moins-value de 11,2 milliards de francs sur les recettes et une sous-estimation des dépenses de 37,8 milliards de francs.

3. La mise en oeuvre d'une politique en faveur de l'emploi et du logement

Pour mettre en oeuvre les orientations de son programme, le gouvernement a proposé des actions nouvelles, dont le montant global s'élevait à 14,5 milliards de francs pour 1995, en ouvertures nettes de crédits, et à 50 milliards de francs en année pleine.

Il s'agissait principalement, d'une part, du plan d'urgence pour l'emploi (10,4 milliards de francs) et, d'autre part, de mesures en faveur du logement (3,4 milliards de francs).

4. Un effort d'économie

Cet effort, prélude à une politique plus rigoureuse de réduction des dépenses publiques, consistait principalement en des annulations de crédits à hauteur de 15,8 milliards de francs, et en moindres dépenses sur les comptes spéciaux du Trésor pour 3 milliards.

5. Des mesures de redressement des recettes

Les recettes fiscales ont été augmentées de 31 milliards de francs dont 17,4 milliards de francs qui correspondent au relèvement de deux points du taux normal de la TVA et 12 milliards de francs au titre de la contribution de 10 % assise sur l'impôt sur les sociétés. Par ailleurs, l'exécution du budget mettait en valeur une moins-value de 10 milliards de francs au titre de la TVA et de l'impôt sur les sociétés.

Les recettes non fiscales baissaient de 28,9 milliards de francs, le changement de comptabilisation des opérations de privatisation (annulation de 47 milliards de francs de recettes) étant compensé à hauteur de 18,1 milliards de francs par des recettes diverses.

B. LA RATIFICATION DU DÉCRET D'AVANCES DU 31 MARS 1995

Le décret d'avances du 31 mars 1995 a ouvert 600 millions de francs au budget de l'industrie afin d'abonder le chapitre des primes à la reprise des véhicules de plus de 10 ans. Afin de ne pas remettre en cause l'équilibre initial de la loi de finances pour 1995, 600 millions de francs ont été annulés sur le chapitre 14-01 "Garanties diverses" au budget des charges communes, au titre de l'assurance-crédit.

III. LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DU 30 DÉCEMBRE 1995

Cette loi de finances rectificative a entraîné au titre du budget général une variation nette des crédits de 2,2 milliards de francs, tandis que les ressources nettes baissaient du même montant.

A. LES OUVERTURES DE CRÉDITS

Les ouvertures de crédits correspondent, soit à des remises à niveau des dotations telles qu'elles ressortent du collectif du 4 août 1995, soit à la traduction budgétaire de décisions prises en 1995.

Les charges définitives du budget général augmentent de 2,2 milliards de francs (18,9 milliards de francs d'ouvertures de crédits et 15,8 milliards de francs d'annulations) et se répartissent ainsi :

- les dépenses ordinaires civiles (nettes de remboursements et dégrèvements) augmentent de 5,04 milliards de francs. Ce solde correspond à 15,72 milliards de francs d'ouvertures nettes de crédits et à 10,67 milliards de francs d'annulation ;

- les dépenses civiles en capital diminuent de 1,41 milliard de francs, en raison de 1,09 milliard de francs d'ouverture de crédits et de 2,5 milliards de francs d'annulation ;

- les dépenses militaires baissent de 1,4 milliard de francs (2,1 milliards de francs d'ouverture de crédits et 3,5 milliards de francs d'annulation).

Par ailleurs, la charge nette des comptes spéciaux du Trésor baisse de 4,16 milliards de francs.

B. LES RÉÉVALUATIONS DE RECETTES

Les recettes nettes diminuent de 2,19 milliards de francs et s'établissent à 1.223,66 milliards de francs. Ces mouvements résultent notamment d'une baisse de 24,1 milliards de francs des recettes fiscales nettes, d'une progression de 19,8 milliards de francs des ressources non fiscales et d'un allégement de 2,1 milliards de francs des prélèvements sur recettes.

IV. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS OPÉRÉS PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE

En 1995, au sein du budget général, les modifications de crédits opérées par voie réglementaire ont représenté au total un solde net de 70,6 milliards de francs correspondant à 47,9 milliards de francs de reports de l'exercice précédent, au décret d'avances du 31 mars 1995, ainsi qu'au rattachement de fonds de concours pour 65,3 milliards de francs. En contrepartie, 43,1 milliards de francs de crédits ont été annulés.

A. LES REPORTS DE CRÉDITS

Les reports de crédits de 1994 à 1995 s'établissent à 47,9 milliards de francs, en diminution de 14,1 % sur ceux effectués en 1994.

B. LES FONDS DE CONCOURS

Le volume des fonds de concours rattachés en 1995 progresse de 3 % pour atteindre 65,27 milliards de francs.

C. LES ANNULATIONS DE CRÉDITS

Fixées à 43,1 milliards de francs, elles sont en progression de 48,5 % par rapport à 1994 et touchent principalement, hors titre I, le budget de la défense (11,9 milliards de francs), et celui de l'agricultre (2,3 milliards de francs).

V. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS CONTENUS DANS LA LOI DE RÈGLEMENT

Au titre du budget général, le projet de loi de règlement demande l'ouverture de 16,02 milliards de francs et l'annulation de 14,25 milliards de francs de crédits contre, respectivement, 11,86 et 18,68 milliards de francs en 1994.

Les ouvertures de crédits concernent presque exclusivement les dépenses ordinaires civiles (à hauteur de 16,01 milliards de francs), et pour 14,2 millions de francs, les dépenses ordinaires militaires.

Les annulations de crédits s'imputent pour 12,95 milliards de francs sur les dépenses ordinaires civiles, et pour 1,29 milliard de francs sur les dépenses ordinaires militaires.

CHAPITRE III

L'ÉVOLUTION DES RECETTES ET DES DÉPENSES

I. LES RECETTES EN 1995

A. L'ÉVOLUTION GLOBALE DES RECETTES EN 1995

Décomposition des augmentations de recettes en 1995

Nature des produits

Écart de recettes effectives entre 1994 et 1995
( en milliards de francs )

Écart
( en pourcentage )

Produit fiscal net

+ 47,2

+ 4 %

Recettes non fiscales (hors privatisations)


+ 14,7


+ 9,7 %

Prélèvements sur recettes

+ 1,9

- 0,8 %

Fonds de concours

+ 1,9

+ 3,3 %

Recettes du budget général (hors privatisations)


+ 65,7


+ 5,3 %

Les recettes budgétaires nettes (hors recettes de privatisations) ont progressé de 5,3 % en 1995, alors que le PIB augmentait en valeur de 3,9 %.

Cette progression, plus importante qu'en 1994 (+ 3 %), résulte largement de la progression du produit fiscal net, qui est passé de 1.254,4 milliards de francs en 1994 à 1.301,6 milliards de francs en 1995, soit une hausse de 4 %. Cette évolution ne révèle en rien un dynamisme des recettes fiscales, mais traduit les effets relativement mesurés des hausses d'impôts décidées lors de la loi de finances rectificative du 4 août 1995.

Par ailleurs, il faut noter la forte progression des recettes non fiscales (+ 9,7 %) qui ont contribué à assurer le respect des objectifs de recettes fixés par la loi de finances initiale, alors que dans le même temps, les prélèvements sur recettes étaient plus modérés (-0,8 %).

B. L'ÉVOLUTION DES RECETTES FISCALES EN 1995



 

1994

1995

Évolution 1995/1994
(en %)

Recettes fiscales brutes

1.465,2

1.523,9

+ 4,0

Remboursements et dégrèvements

- 210,8

- 222,3

+ 5,4

Produit fiscal net

dont :

- Impôt sur le revenu

- Impôt sur les sociétés

- TIPP

- TVA

- Divers

1.254,4

295,6

113,3

141,1

540,5

163,9

1.301,6

297,1

125,8

143,3

563,6

171,8

+ 3,8

+ 0,5

+11,0

+ 1,6

+ 4,3

+ 4,8

Prélèvements sur recettes

dont :

- Prélèvements au profit des Communautés européennes

- Prélèvements au profit des collectivités locales

- 236,8

- 82,6

- 154,2

- 234,9

- 78,2

- 156,6

- 0,8

- 5,2

+ 1,6

La prévision économique associée à la loi de finances pour 1995 escomptait une croissance de 5,1 % et un produit fiscal net de 1.305,9 milliards de francs en hausse de 4,1 % par rapport à 1994. Ces deux estimations étaient compatibles avec une élasticité du système fiscal 2( * ) égale à 0,80. " In fine " , la croissance aura été en 1995 de 3,9 % et les recettes fiscales nettes se seront accrues de 3,8 % au prix d'un alourdissement des prélèvements obligatoires.

Celui-ci a conduit à ajouter à l'évolution spontanée des recettes fiscales un supplément de recettes de l'ordre de 30 milliards de francs essentiellement au titre de la TVA (+ 17 milliards de francs) et de l'impôt sur les sociétés (+ 11 milliards de francs).

Sans ces mesures nouvelles, la variation des recettes fiscales aurait été de l'ordre de 1,4 %, soit une élasticité du système fiscal par rapport à la croissance de 0,35.

La progression des impôts ayant fait l'objet de majorations dans la loi de finances rectificative du 4 août 1995 est pourtant décevante.

La taxe sur la valeur ajoutée
nette progresse de 4,3 % par rapport à 1994, pour s'établir à 563,1 milliards de francs. Sans l'augmentation de deux points du taux de l'impôt, la progression aurait été limitée à 2,8 %, un niveau comparable à la progression des emplois taxables (+2,6 %). Rappelons qu'en 1994, le produit de cet impôt, avant la majoration évoquée, avait progressé de 7,2 %. La faible progression de l'assiette - consommation et investissement des ménages, consommation des administrations et importations - est la cause essentielle du médiocre rendement de l'impôt. La part de la TVA nette dans les recettes fiscales progresse toutefois sensiblement (de 42,3 % à 43,3 %).

L'impôt sur les sociétés net s'établit à 125,8 milliards de francs en 1995, en forte progression par rapport à 1994 (+11,1 %). Cette progression résulte essentiellement de la majoration de 10% instituée par la loi de finances rectificative du 4 août 1995 (10,4 milliards de francs sur 12,5 milliards de francs de produit supplémentaire), si bien qu'à législation constante, la progression n'aurait été que de 1,9 %. L'importance des remboursements d'impôts (25 milliards de francs, soit 4 milliards de plus qu'en 1994) contraste vivement avec la progression du revenu disponible brut des sociétés et quasi-sociétés en 1994 (+ 9,9 %) et 1995 (+ 5,4 %). Il s'explique en partie par l'importance des provisions passées dans le secteur financier pour faire face à la crise immobilière.

Le produit de l'impôt de solidarité sur la fortune progresse de 2,45 % pour s'élever à 8,5 milliards de francs. Cet accroissement est encore entièrement dû à la contribution de 10 % introduite par la loi de finances rectificative du 4 août 1995. En effet, une progression des bases imposables (+ 1 %) inférieure au relèvement des tranches du barème (+ 1,8 %) aurait fait diminuer l'impôt mécaniquement, en l'absence de la majoration décidée en cours d'année.

Les autres impôts connaissent également une évolution peu dynamique.

Le produit de l'impôt sur le revenu a progressé faiblement (+ 0,5 %) à 297 milliards de francs en 1995, si bien qu' il a régressé de 0,15 point de PIB, après une forte diminution en 1994 (- 4,6 %). La faible croissance de la base taxable - le revenu disponible brut des ménages avant impôt n'avait cru que de 1 % en 1994 - explique une partie du faible rendement de cet impôt en 1995. Mais des phénomènes d'optimisation fiscale de la part des ménages ont probablement joué pour expliquer l'évolution décevante du produit de l'impôt sur le revenu. D'une manière générale, la Cour des comptes note une faible corrélation entre l'évolution du produit de l'impôt sur le revenu et celle du PIB.

La taxe sur les salaires progresse de 8,9 % pour s'établir à 44,3 milliards de francs mais avec une grande inégalité dans la progression entre le secteur privé (26 milliards de francs, soit + 0,4 %) et le secteur public (18 milliards de francs, soit + 23,7 %). L'augmentation du produit de la taxe pour le secteur public s'explique largement par la suppression de l'exonération dont bénéficiait La Poste.

Les droits d'importation, la TIPP et les divers droits de douane progressent globalement faiblement (+ 1,6 %) pour s'établir à 152,3 milliards de francs. L'évolution de cette recette traduit de façon directe la déformation de la consommation des produits pétroliers. Dans un marché globalement stable, la composante la plus dynamique reste le gazole qui bénéficie d'une taxation allégée.

Les produits de l'enregistrement atteignent 68,3 milliards de francs, en baisse de 0,6 % par rapport à 1994.

Les produits du timbre et de l'impôt sur les opérations de bourse s'établissent à 11,8 milliards de francs, en diminution de 1,1 %. Les contributions indirectes et taxes assimilées atteignent 41,4 milliards de francs.

Les dégrèvements et remboursements d'impôts s'élèvent à 222 milliards de francs, en progression de 5,4 % par rapport à 1994.

les remboursements représentent 62,2 % du total : les remboursements de TVA sont stables (+ 0,6 % à 105,6 milliards de francs), alors que les remboursements d'impôts sur les sociétés augmentent fortement (+ 18,3 %).

les dégrèvements , qui représentent 31,4 % du total, progressent fortement (+ 9,5 %) essentiellement en raison de la forte augmentation des dégrèvements d'impôts locaux (50,4 milliards de francs en 1995, soit une progression de 12,7 %).

C. LES RECETTES NON FISCALES

Le recours à des recettes non fiscales a été largement utilisé en 1995. Ainsi, en dépit d'une réduction apparente de leur volume global -163,7 milliards de francs en 1995 contre 199,2 milliards de francs en 1994-, le montant des recettes non fiscales hors privatisation s'est accru de 14,7 milliards de francs l'an dernier, soit une progression de 9,7 %.

La Cour des comptes estime que " de telles hausses des recettes non fiscales ne paraissent pas pouvoir être escomptées de manière durable ".

Les recettes exceptionnelles, notamment les prélèvements sur trésoreries et réserves des organismes liés à l'Etat sont en hausse constante.

Les recettes non fiscales sont essentiellement constituées des retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat (25,2 milliards de francs), des taxes, redevances et recettes assimilées (19,9 milliards de francs), des produits des exploitations industrielles et commerciales et des établissements publics à caractère financier (18 milliards de francs) et des intérêts des avances, des prêts et des dotations en capital (9,9 milliards de francs). Cependant, le produit des "recettes diverses" (88 milliards de francs) représente plus de la moitié des recettes non fiscales.

Les produits des exploitations industrielles et commerciales et des établissements publics à caractère financier enregistrent une baisse de 17 %, en raison de la non-reconduction des versements exceptionnels de la Banque de France et du recul des dividendes de l'Etat actionnaire dans les entreprises financières. En revanche, les dividendes de l'Etat actionnaire d'entreprises non financières progressent fortement. Les prélèvements sur les jeux connaissent une très forte hausse (+ 26 %) pour atteindre 12,5 milliards de francs.

Le produit global des intérêts des avances, des prêts et des dotations en capital progresse de 19 %.

Les taxes, redevances et recettes assimilées restent stables.

Les produits et revenus du domaine de l'Etat progressent de 3,5 %, hors recettes de privatisation. En effet, le traitement budgétaire et comptable des opérations de privatisation a été profondément modifié par la loi de finances rectificative du 4 août 1995 qui a supprimé le mécanisme d'affectation dérogatoire d'une partie du produit des privatisations en recettes du budget général. Il en est résulté une diminution de 47 milliards de francs des recettes du budget général par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale.

Les recettes diverses progressent de 21 %, pour atteindre 88 milliards de francs :

- les recettes quasi-courantes sont en hausse, principalement les recettes en atténuation des charges de la dette et des frais de trésorerie (+21 %) ;

- les recettes exceptionnelles sont conformes aux prévisions de la loi de finances rectificative ;

- les recettes de la ligne 899, d'un montant global de 25,5 milliards de francs, progressent légèrement par rapport à 1994, mais sont surtout nettement supérieures aux évaluations de la loi de finances initiale (5,7 milliards de francs) en raison de la non-évaluation des prélèvements sur les fonds gérés par la Caisse des dépôts et consignations.

La Cour des comptes note que l'ensemble des prélèvements effectués au bénéfice du Trésor sur les différents fonds gérés par la Caisse des dépôts et consignations ou sur son résultat s'élève à 20 milliards de francs pour 1995 dont 15 milliards de francs de prélèvement sur les excédents de subvention des prêts de la Caisse de garantie du logement social, 2,8 milliards de francs sur le Fonds de réserve du financement du logement (seule ressource prévue en loi de finances initiale) et 2 milliards de francs sur le Fonds de réserve des livrets d'épargne populaire. S'interrogeant sur les conséquences de ces prélèvements, elle note que le ratio de réserves de chaque fonds, fixé à 2 %, est respecté. Toutefois, l'ampleur des prélèvements contraste avec l'absence de contribution au titre de l'impôt sur les sociétés.

D. LES PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES

Les prélèvements sur recettes diminuent pour la première fois en 1995, de 0,8%. Alors que les prélèvements au profit des collectivités locales progressent de 1,6% pour atteindre 156,6 milliards de francs, ce résultat s'explique par la diminution des prélèvements au profit de l'Union européenne (- 5,2 % soit 78,2 milliards de francs).

Les prélèvements au profit des collectivités locales comprennent les prélèvements à caractère compensatoire (53,4 milliards de francs), les subventions (101,4 milliards de francs) et les affectations de recettes (1,2 milliard de francs).

La progression des prélèvements compensatoires au profit des collectivités locales s'explique presque entièrement par la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale (+ 26,2 %). En revanche, les dotations du fonds de compensation de la TVA sont en régression (- 8,7 %), à 21,2 milliards de francs, traduisant le recul des investissements des collectivités locales en 1993.

Les subventions aux collectivités locales s'accroissent de 1,8 %, soit la simple indexation du montant de 1994 sur les prix à la consommation.

Les affectations de recettes, représentant 1,12  milliard de francs, sont en forte baisse (- 20 %) en raison des effets de la loi d'amnistie, qui a considérablement réduit le produit des amendes forfaitaires de la police de circulation.

Les prélèvements au bénéfice de l'Union européenne reculent de 5,3 % en raison de la diminution de la contribution de la France assise sur le PNB.

E. LES FONDS DE CONCOURS

Le produit des fonds de concours augmente de 3,3 % à 61,3 milliards de francs en 1995.

Les fonds de concours ordinaires et spéciaux représentent 47,5 milliards de francs dont 20,2 milliards de francs au titre du remboursement, par la Poste et France Telecom, des dépenses de pensions civiles et des allocations temporaires d'invalidité servies au personnel titulaire, rattachés au budget des charges communes.

Ces fonds de concours évoluent de manière très différenciée : les fonds rattachés au budget des routes diminuent de 3,1 % à 5,5 milliards de francs, ceux rattachés aux services financiers et au budget travail stagnent respectivement à 6,5 milliards de francs et 3,3 milliards de francs. Les fonds rattachés à l'industrie et à la défense progressent en revanche fortement (+ 11 % et + 9 %).

Les fonds de concours de la coopération internationale représentent 11,7 milliards de francs, en progression de 5,8 %. Les fonds européens connaissent une très forte progression, notamment le fonds social européen (+ 52,3 %, à 3,8 milliards de francs) et le fonds européen de développement de l'espace rural (+ 41,1 % à 2,5 milliards de francs), traduisant l'implication croissante de l'Union européenne dans les financements publics nationaux.

II. LES DEPENSES EN 1995

A. LE BUDGET GENERAL

Le total des crédits ouverts au budget général pour 1995, y compris les dégrèvements et remboursements d'impôts (220,9 milliards de francs), s'est élevé à 1.872,5 milliards de francs, en progression de 3 % par rapport à ceux ouverts en 1994.

Aux crédits prévus en loi de finances initiale s'ajoutent, en effet, les modifications induites par les lois de finances rectificatives de l'été et de l'automne 1995, ainsi que les reports de crédits de 1994 sur 1995 et les crédits ouverts sur fonds de concours 3( * ) .

Les dépenses effectives sont en augmentation de 3,2 % par rapport à 1994 et représentent 1.818,9 milliards de francs, soit un montant inférieur de 53,6 milliards de francs aux crédits ouverts. Hors remboursements et dégrèvements d'impôts, qui se sont élevés à 222,2 milliards de francs, la progression est de 2,9 % par rapport à 1994.

Les dépenses effectives du budget général en 1994 et 1995

(en millions de francs)

 

1994

1995

Variation (en %)

I.- Dépenses ordinaires

 
 
 

A. - Services civils

 
 
 

Titre I : Dette publique (a)

427.603,4

470.063,7

9,9 %

Titre II : Pouvoirs publics

3.826,4

3.963,3

3,6 %

Titre III : Moyens des services

579.690,2

599.529,7

3,4 %

Titre IV : Interventions publiques

455.166,7

463.759,5

1,9 %

Sous-total

1.466.286,7

1.537.316,2

4,8 %

B.- Services militaires

 
 
 

Titre III : Moyens des services

103.705,5

105.235,8

1,5 %

Total des dépenses ordinaires

1.569.992,2

1.642.552,0

4,6 %

II. - Dépenses en capital

 
 
 

A. - Services civils

 
 
 

Titre V : Investissements exécutés par l'Etat

25.453,1

24.862,7

- 2,3 %

Titre VI : Subventions accordées par l'Etat

79.438,3

76.803,7

- 3,3 %

Titre VII : Réparation des dommages de guerre

0,8

0,1

N.S

Sous-total

104.892,2

101.666,5

- 3,1 %

B. - Services militaires

 
 
 

Titre V : Investissements exécutés par l'Etat

87.748,1

73.907,1

- 15,8 %

Titre VI : Subventions accordées par l'Etat

727,6

822,5

13,0 %

Sous-total

88.475,7

74.729,6

- 15,5 %

Total des dépenses en capital

193.367,9

176.396,1

- 8,8 %

Total général

1.763.360,1

1.818.948,1

3,2 %

(a) Y compris les dégrèvements et remboursements d'impôts.

(Source : Cour des Comptes)

Les dépenses ordinaires ont progressé de 4,6 %.

Cette augmentation est particulièrement marquée pour les dépenses civiles (+ 4,8 %) et plus limitée pour les dépenses militaires (+ 1,5 %). Elle résulte principalement de la forte augmentation (+ 9,9 % soit 42,5 milliards de francs) des dépenses du titre I.

Les dépenses en capital diminuent à nouveau et, pour 1995, dans des proportions importantes : - 8,8 % par rapport à 1994.

1. Les dépenses du titre I

a) La charge de la dette

Après avoir connu un moindre accroissement en 1994, la charge de la dette publique a, compte tenu du niveau des taux d'intérêt, crû en 1995 de 12,6 % pour représenter 235,4 milliards de francs correspondant pour 92,5 % aux charges de la dette négociable.

b) Les dépenses de garantie

Celles-ci s'élèvent à 10,1 milliards en 1995, en progression de 90,7 % par rapport à 1994, où elles avaient diminué de près de 50 % par rapport à 1993. Cette augmentation provient pour l'essentiel des versements à la BFCE effectués au titre des " autres garanties " en raison de la mise en jeu de la garantie de l'Etat pour un accord militaire avec l'Irak (1,5 milliard), ainsi que d'arriérés de la BFCE s'élevant à 5,1 milliards sur plusieurs pays d'Afrique et en Yougoslavie.

c) Les dépenses en atténuation de recettes

Elles ont progressé de 5 % en 1995 pour représenter 224,6 milliards de francs contre 213,2 milliards de francs en 1994 :

- les remboursements au titre de la TVA sont à un niveau identique à 1994 (106 milliards de francs) notamment en raison de la progression du PIB limitée à 3,9 % en valeur ;

- en revanche, les crédits de restitution d'impôts sur les sociétés se sont élevés à 25 milliards de francs (+ 3,85 milliards) en raison de la dégradation de la situation des entreprises en 1994 et des provisionnements pour risques immobiliers ; les dégrèvements sur impôts locaux à la charge de l'Etat ont augmenté de 12,7 % (50,5 milliards de francs).

2. Les dépenses de fonctionnement

La progression des dépenses du titre II s'élève en moyenne à 3,6 % et se limite à 0,8 % pour la part des crédits concernant le Sénat.

L'ensemble des dépenses de personnel civil et militaire du titre III connaît une progression de 3,96 % contre 4,03 % en 1994 pour s'établir à 582 milliards de francs, dont 505 milliards de francs pour les seules dépenses civiles.

Evolution des dépenses civiles de personnel du Titre III

(en millions de francs)

 

Dépenses nettes

Evolution

Glissement annuel

Titre III

1994

1995

1995-1994

1994-1993

1992-1995

Rémunérations d'activité

273.718,8

284.801,4

4,05 %

3,29 %

4,23 %

Pensions et allocations (y compris pensions militaires)

150.033,5

158.052,4

5,34 %

3,56 %

4,92 %

Charges sociales

61.582,2

62.150,2

0,92 %

8,14 %

5,39 %

TOTAL

485.334,5

505.004,0

4,05 %

3,97 %

4,59 %

La hausse en 1995 des rémunérations civiles d'activité (+ 4,05 %) correspond à l'application de l'accord salarial de 1993, qui se traduit par une augmentation de 2,55 % de la valeur moyenne du point "fonction publique".

Les charges de pensions (y compris les pensions militaires) s'accroissent de 5,34 %, soit un montant supérieur tant à l'augmentation de 1994 (+ 3,56 %) qu'à l'augmentation moyenne sur la période 1992-1995 : + 4,92 %.

Aussi, ainsi que le souligne la Cour des Comptes " l'évolution de cette catégorie de charges [les pensions] constitue une hypothèque sévère sur les budgets futurs " dans la mesure où le rapport démographique, au sein du régime spécial des fonctionnaires civils et militaires de l'Etat actuellement favorable (2,5) devrait s'établir à 1,4 en 2015. De ce fait, "un besoin de financement supplémentaire annuel de 12 milliards (en francs 1996) est prévisible dès 2000".

Les charges sociales, y compris militaires, n'augmentent que de 0,8 % après un important rattrapage effectué en 1994 (+ 7,7 %). Pour les charges correspondant aux seules dépenses civiles, ces montants sont respectivement de 0,92 % et 8,14 %.

Les autres dépenses des services civils représentent 94,5 milliards de francs soit un niveau identique à celui de 1994 (+ 0,2 %) après deux années d'augmentation plus importante : + 3,9 % en 1994 et + 2,5 % en 1993. Seules les subventions de fonctionnement (47,8 milliards de francs) progressent de 4 % tandis que les dépenses de matériel et de fonctionnement, les travaux d'entretien et les dépenses diverses diminuent respectivement de 2,8 %, 4,5 % et 4,3 %.

3. Les dépenses d'intervention (titre IV)

Elles connaissent une progression de 1,9 % et s'établissent à 463,8 milliards de francs après deux années de très sensible augmentation (+ 5,2 % en 1994 et + 5,7 % en 1993).

Cette moindre progression des dépenses d'intervention est principalement imputable à la diminution de la subvention versée au BAPSA, qui est passée de 19,3 milliards en 1994 à 9,6 milliards de francs en 1995. Elle a été compensée par un relèvement de 0,3 point de la TVA affectée à celui-ci.

Les autres postes connaissent des augmentations importantes, et notamment :

+ 13,6 % pour les dépenses au titre du RMI (21,8 milliards de francs) ;

+ 7,3 % pour les aides à la personne pour le logement (29,9 milliards de francs) ;

+ 7,2 % pour les interventions en faveur de l'emploi (125,14 milliards de francs).

4. Les dépenses en capital

Les dépenses civiles et militaires en capital ont poursuivi en 1995 leur diminution dans la part des dépenses totales de l'Etat.

En exécution, ces dépenses (176,4 milliards de francs) diminuent en 1995 de 8,8 % par rapport à 1994, compte tenu d'un taux d'utilisation des crédits qui est passé de 84,7 % à 82,8 % soit le niveau le plus bas depuis plus de 10 ans.

En outre, la baisse initiale des crédits 4( * ) n'a pas été compensée en cours d'année par un accroissement de ceux-ci résultant de reports, d'annulations ou de virements.

La diminution des dépenses d'investissement est particulièrement importante pour les services militaires : - 15,5 % (soit 74,7 milliards de francs) contre - 3,1 % pour les dépenses civiles (101,7 milliards de francs). S'agissant du budget de la défense, la Cour des Comptes a ainsi tenu à soluigner que " la contraction des crédits disponibles et l'effet des mesures de régulation budgétaire ont provoqué une sérieuse aggravation des reports des charges qui, selon les estimations du ministère, atteignent environ 12 milliards de francs ".

B. LES BUDGETS ANNEXES

En 1995, le montant total des opérations définitives s'est élevé à 100,5 milliards de francs soit une progression de 5,1 % par rapport à 1994, résultant principalement de l'accroissement de 12,7 % des crédits ouverts au titre du budget annexe de l'aviation civile (7,6 milliards de francs) et de 4,7 % de ceux du budget annexe des prestations sociales agricoles (91,2 milliards de francs).

C. LES COMPTES SPECIAUX DU TRESOR

1. Le changement du mode de traitement des opérations de privatisation

A compter de la loi de finances rectificative du 4 août 1995, les recettes de privatisation n'ont plus été comptabilisées parmi les ressources du budget général 5( * ) permettant ainsi d'établir une distinction plus claire entre le budget général et les comptes spéciaux du Trésor.

2. Les comptes d'affectation spéciale

Au titre des opérations définitives, le montant effectif des dépenses s'est élevé à 40 milliards de francs contre 27,7 milliards de francs prévus en loi de finances. Cette différence résulte, outre l'augmentation des recettes de privatisation, du changement du mode de traitement des opérations de privatisation tel que décrit ci-dessus.

Compte tenu de 42,2 milliards de francs de ressources définitives, le solde positif s'est établi à 2,2 milliards de francs.

3. Les comptes de commerce

Les dépenses effectives des 11 comptes de commerce s'élèvent à 47,7 milliards de francs pour 45,2 milliards de francs de recettes.

4. Les comptes de prêts et d'avances, les autres comptes spéciaux

Les opérations du compte d'avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics se sont élevées à 1.418,7 milliards de francs, soit une multiplication par plus de 8 par rapport à 1994, compte tenu du renouvellement des avances faites à l'ACOSS qui a été rendu nécessaire par l'ampleur de ses difficultés de trésorerie. Le montant moyen mensuel des avances qui portent intérêt s'est élevé à 32,3 milliards de francs et s'est traduit en conséquence par le versement de 2,6 milliards de francs au Trésor, contre 160 millions de francs en 1994.

Toutes ces avances ont été intégralement remboursées en fin d'année. Elles n'ont donc eu aucun impact sur le solde budgétaire.

III. LE SOLDE D'EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES EN 1995

Le déficit budgétaire pour 1995 s'est établi en exécution à 323 milliards de francs. La loi de finances initiale prévoyait un déficit de 275,1 milliards de francs, mais de 322,1 milliards de francs si l'on tient compte des recettes de privatisation distraites du budget général par la première loi de finances rectificative. L'exercice 1995 a donc été marqué par une maîtrise satisfaisante de l'équilibre budgétaire, malgré une croissance économique en net fléchissement (2,2 % contre 2,8 % en 1994) et surtout moins vive que prévu initialement (3,1 %).

Par rapport à l'exercice 1994, l'amélioration du déficit budgétaire a été de 26,1 milliards de francs, soit un déficit de 4,2 % du PIB, permettant à la France de continuer son chemin vers l'union économique et monétaire, même si le déficit global des administrations publiques en 1995, 4,9 % du PIB (contre 5,75 % en 1994), ne permettait plus raisonnablement d'espérer une mise en place de l'Euro dès 1997.

De la fin de 1994 à la fin de 1995, la dette brute des administrations publiques (au sens du traité sur l'Union européenne) est passée de 3.572 milliards de francs à 4.021 milliards de francs, soit de 48,5 à 52,7 % du PIB.

Le passage du déficit budgétaire à la dette publique (réponse du gouvernement)

***

QUESTION

La Cour des Comptes fait apparaître un déficit de 382 milliards de francs comme "besoin de financement des administrations publiques" et un "découvert" de 322,7 milliards de francs pour le budget de l'Etat. En revanche, la progression de la dette publique est établie à 452,6 milliards de francs. Préciser les retraitements comptables qui permettent le passage d'une donnée à l'autre.

REPONSE

Du déficit budgétaire au besoin de financement public
aux sens français et européen

S'agissant du " déficit ", le traité de Maastricht se réfère au concept de " besoin de financement des administrations publiques ", tel que le définit le système européen de comptabilité nationale de 1979 précisé par Eurostat.

Celui-ci recouvre l'ensemble des administrations publiques : l'Etat, mais aussi les collectivités territoriales et leurs satellites (administrations publiques locales), les organismes de protection sociale (administrations publiques de sécurité sociale et hôpitaux) et des " organismes divers d'administration centrale " (ODAC), c'est-à-dire, pour l'essentiel, des établissements publics auxquels l'Etat a confié une compétence spécialisée au niveau national et dont les ressources principales sont des subventions de l'Etat ou des contributions obligatoires. En revanche, les " administrations publiques ", au sens du traité, ne comprennent pas les entreprises publiques, sauf si celles-ci sont financées majoritairement par des ressources publiques (elles entrent alors, comme le CEA ou le CNES, dans la catégorie des ODAC).

La notion de besoin de financement de l'Etat ne recoupe pas entièrement celle de déficit budgétaire. Elle ne prend pas en compte les opérations financières et budgétaires, mais intègre à l'inverse des " opérations non budgétaires non financières ".

Or, le budget de l'Etat comporte des opérations financières qui modifient la composition du patrimoine financier de l'Etat, sans a priori influencer sa valeur nette : prêts et avances des comptes spéciaux du Trésor, dotations en capital, produits des privatisations...

A l'inverse, le budget de l'Etat ne comprend pas, par définition, des " opérations non financières et non budgétaires " qui ont un effet sur le besoin de financement car elles modifient la valeur nette de son patrimoine (abandon d'une créance au profit d'un pays en voie de développement, par exemple).

Ainsi, le " découvert " (322,7 milliards de francs) mentionné par la Cour dans son rapport sur l'exécution des lois de finances, correspond au solde d'exécution des lois de finances pour 1995, hors FMI. Il figure également à l'article premier du projet de loi de règlement pour 1995.

Le déficit de 382 milliards de francs (révisé depuis à 379 milliards de francs) correspond au besoin de financement de l'ensemble des administrations publiques tel que défini ci-dessus, au sens des critères du traité de Maastricht.

Logiquement, le passage de l'un à l'autre s'effectue en deux étapes :

passage du solde budgétaire au besoin de financement de l'Etat.

Au sens français, ce passage fait l'objet d'une ventilation détaillée dans le rapport sur les comptes de la Nation pour 1996 (pages 192-193 des comptes et indicateurs économiques). Il aboutit à un montant de 335,9 milliards de francs.

Au sens européen, ce passage est explicité dans la notification à Eurostat sur les déficits excessifs. Il diffère notamment sur les traitements du crédit-bail, des avances aéronautiques et des recettes des coupons courus. Il aboutit à un montant de 312,5 milliards de francs.

Ajout des autres administrations publiques :

- ODAC : + 9,3 milliards de francs

- APUL : - 17,5 milliards de francs

- SECU : - 68,7 milliards de francs au sens français, - 58,7 milliards de francs au sens européen après prise en compte d'une correction de 10 milliards de francs sur les hôpitaux (erreur de base).

Il est utile de se reporter aux pages 181 et suivantes du rapport sur les comptes de la Nation pour 1996, afin d'y obtenir les principaux chiffres aboutissant au besoin de financement des administrations publiques.

A l'issue de ce passage, on obtient le besoin de financement de 379 milliards de francs (y compris FMI) au sens européen (412,8 milliards de francs au sens français).

Du besoin de financement à la dette publique

La Cour des Comptes reprend le chiffre de déficit des administrations publiques au sens du traité de Maastricht, pour l'année 1995, notifié en mars 1996. Ce chiffre est fondé sur la version provisoire du compte, revue depuis.

La progression de la dette publique au sens de Maastricht correspondante était évaluée à 449,7 milliards de francs, chiffre proche de celui cité par la Cour (452,6 milliards de francs).

L'écart entre le besoin de financement et la variation de la dette s'explique par des ajustements comptables provenant des différences de définition. Les plus importantes viennent de ce que la dette au sens de Maastricht ne comprend pas certains passifs financiers et est brute en valeur nominale.

La dette au sens de Maastricht est nette des décalages comptables, des crédits commerciaux et des opérations de crédit-bail. Or, ces opérations financières sont implicitement retracées dans le déficit public et il faut donc les prendre en compte pour passer de ce dernier à la variation de dette au sens de Maastricht.

La dette est brute : or, le besoin de financement est comptablement égal à la variation des dettes nettes des créances des administrations publiques. Pour passer de la variation de dette publique au besoin de financement, il faut donc rajouter à ce dernier les variations de créances.

La dette est en valeur nominale : la cohérence stricte entre le déficit public et la variation de la dette publique nette correspondante voudrait que la dette obligataire soit mesurée en valeur de marché. Or, la dette au sens de Maastricht est en valeur nominale. Il faut donc prendre en compte l'écart entre ces deux modes de valorisation.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE PREMIER

Résultats généraux de l'exécution
des lois de finances pour 1995

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter les résultats définitifs de l'exécution des lois de finances pour 1995.

Le présent article a pour objet de présenter, sous forme de tableau synthétique, les résultats définitifs de l'exécution de 1995, conformément à l'article 35 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 qui dispose que " le projet annuel de loi de règlement constate le montant définitif des encaissements de recettes et des ordonnancements de dépenses se rapportant à une même année ".

L'article premier fixe, d'une part, le résultat des opérations à caractère définitif du budget général ainsi que des budgets annexes et des comptes d'affectation spéciale, et d'autre part, le résultat des opérations à caractère temporaire en le présentant par catégorie de comptes spéciaux.

Le solde des opérations définitives de l'Etat est arrêté à - 301,91 milliards de francs (il était de - 275,89 milliards de francs en 1994).

Le solde des opérations temporaires est de - 20,77 milliards de francs (- 23,72 milliards de francs en 1994).

Le solde global hors opérations avec le FMI est de - 322,68 milliards de francs (- 299,61 milliards de francs en 1994).

Le solde global hors opérations avec le FMI et hors fonds de stabilisation des changes est de - 322,95 milliards de francs (- 299,08 milliards de francs en 1994).

Ce solde représente 4,10 % du PIB de 1995.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2

Recettes du budget général

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter le montant des recettes du budget général pour 1995.

Le montant des recettes du budget général est arrêté à 1.514,95 milliards de francs pour l'année 1995, soit une progression de 1,8% par rapport à 1994.

Ces recettes se décomposent comme suit :

- 1.523,86 milliards de recettes fiscales , soit une progression de 4 % par rapport à 1994.

- 164,68 milliards de recettes non fiscales , soit une diminution de 17,6 % par rapport à 1994.

- 61,32 milliards de fonds de concours et recettes assimilées , soit une progression de 3,2 % par rapport à 1994.

- 234,92 milliards de prélèvements sur recettes de l'Etat venant en déduction des recettes totales, soit une diminution de 0,8 % par rapport à 1994.

En prenant en compte les dégrèvements et remboursements d'impôts, les recettes nettes du budget général s'élèvent à 1.292,76 milliards de francs, soit une augmentation de 1,23 % par rapport à 1994.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Dépenses ordinaires civiles du budget général

Commentaire : Le présent article a pour objet d'arrêter le montant définitif des dépenses ordinaires civiles du budget général en 1995.

Le montant définitif des dépenses ordinaires civiles brutes s'établit à 1.537,32 milliards de francs, contre 1.466,29 milliards de francs en 1994, soit une progression de 4,8 %. Nettes des dégrèvements et remboursements, celles-ci s'élèvent à 1.315,13 milliards de francs, en hausse de 4,7 % par rapport à 1994.

Par titre, l'évolution de ces dépenses est la suivante :

pour le titre I : + 9,9 %, soit 470,06 milliards de francs ;

pour le titre II : + 3,6 %, soit 3,96 milliards de francs ;

pour le titre III : + 3,4 %, soit 599,53 milliards de francs ;

pour le titre IV : + 1,9 %, soit 463,76 milliards de francs.

Le présent article demande :

l'ouverture de crédits complémentaires à hauteur de 16,01 milliards de francs, essentiellement au profit du titre I (+ 8,52 milliards de francs) et du titre IV (+ 6,81 milliards de francs) ;

l'annulation de crédits non consommés pour 12,95 milliards de francs répartis principalement entre le titre I (3,84 milliards de francs), le titre III (3,77 milliards de francs) et le titre IV (5,33 milliards de francs), soit au total un solde positif de 3,06 milliards de francs.

L'ensemble des ouvertures de crédits complémentaires telles qu'elles sont détaillées dans le tableau B annexé à la présente loi, porte sur des crédits évaluatifs à deux exceptions près :

- un dépassement de 2.008,06 francs sur le chapitre 31-05 du budget des services du Premier ministre (services généraux) qui n'avait pas été doté en loi de finances initiale ;

- un ajustement de 3,33 francs sur l'ensemble des ministères correspondant au fait que si les crédits sont arrêtés en francs, les comptes publics sont, eux tenus en centimes.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 4

Dépenses civiles en capital du budget général

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter le montant définitif des dépenses civiles en capital du budget général en 1995.

Le montant définitif des dépenses civiles en capital s'établit à 101,67 milliards de francs contre 104,89 milliards de francs en 1994, soit une diminution de 3,1 %.

Pour des raisons comptables, la loi de règlement propose des ouvertures de crédits complémentaires à hauteur de 10,97 francs et des annulations de crédits non consommés pour 31,85 francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5

Dépenses ordinaires militaires du budget général

Commentaire : Le présent article a pour objet d'arrêter le montant définitif des dépenses ordinaires militaires du budget général en 1995.

Le montant définitif des dépenses ordinaires militaires du budget général s'établit, en 1995, à 105,23 milliards de francs, en progression de 1,5 % par rapport à 1994.

En outre, le présent article demande l'ouverture de crédits complémentaires détaillés dans le tableau D annexé à la présente loi, pour un montant de 14,2 millions de francs, correspondant à des crédits évaluatifs concernant des frais de contentieux (règlements des dommages et accidents du travail) ainsi qu'un ajustement comptable de 0,49 franc.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6

Dépenses militaires en capital du budget général

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter le montant définitif des dépenses militaires en capital du budget général pour 1995.

Le montant définitif des dépenses militaires en capital s'élève, en 1995, à 74,73 milliards de francs, soit une diminution de 15,5 % par rapport à 1994.

En outre, le présent article demande des ouvertures de crédits de 1,23 franc rendues nécessaires par la tenue en centimes et non en francs des comptes publics.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7

Résultat du budget général de 1995

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter, compte tenu des montants de recettes et de dépenses fixés aux articles précédents, le solde du budget général en 1995.

L'excédent des dépenses (1.818,95 milliards de francs) sur les recettes (1.514,95 milliards de francs) est arrêté par le présent article à 304,00 milliards de francs.

Ce résultat représente une augmentation de 10,1 % par rapport à 1994, mais une réduction de 6,6 % si l'on tient compte des recettes de privatisation inscrites au budget général de 1994.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 8

Résultats des budgets annexes

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter les résultats des budgets annexes et d'autoriser des ajustements de crédits sur ces budgets.

Les résultats des six budgets annexes pour 1995 sont arrêtés, en recettes et en dépenses, à 100,49 milliards de francs. Ils augmentent de 3,7 %.

Les ajustements demandés s'élèvent à :

- 1.324 millions de francs en ouvertures de crédits complémentaires dont l'essentiel au budget annexe des prestations agricoles ;

- 1.666 millions de francs en annulations de crédits non consommés, dont :

1.416 millions de francs au budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA),

196 millions de francs au budget annexe de l'aviation civile (BAAC).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 9

Comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 1996

Commentaire : cet article a pour objet, en application des dispositions de l'article 35 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, d'établir les profits et les pertes constatés dans l'exécution des comptes spéciaux du Trésor. Le solde des comptes d'affectation spéciale est, en application de l'article 24 de l'ordonnance, reporté en 1996.

Le paragraphe I de l'article
arrête les résultats des comptes spéciaux du Trésor dont les opérations se poursuivent en 1996. Il retrace les modifications de crédits (ouvertures de crédits complémentaires et annulations de crédits non consommés) et les autorisations de découverts complémentaires.

Les ajustements de la loi de règlement portent sur l'ouverture de 1420,4 milliards de francs de crédits complémentaires, l'annulation de 21,4 milliards de francs de crédits non consommés et une autorisation de découvert complémentaire de 42,8 milliards de francs (sur les comptes d'opérations monétaires).

L'ampleur des ouvertures de crédits complémentaires s'explique par le dépassement constaté du compte d'avances n°903-58 ("Avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics"), doté de crédits évaluatifs. Il concerne, à hauteur de 1396,1 milliards de francs, les avances faites à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), qui n'ont pas été évaluées correctement en loi de finances initiale. Les avances ont été remboursées dans l'année, mais l'autorisation de les consentir doit être validée.

Le paragraphe II de l'article arrête les soldes des comptes spéciaux du Trésor à la date du 31 décembre 1995. Les soldes débiteurs représentent un total de 280 milliards de francs, en augmentation par rapport à 1994, alors que le montant des soldes créditeurs est relativement stable, à 25,8 milliards de francs. Les soldes débiteurs proviennent essentiellement des comptes d'opérations temporaires (comptes de prêts et d'avances).

Le paragraphe III de l'article procède au report des soldes arrêtés au paragraphe II, à l'exception du solde débiteur du compte "pertes et bénéfices de change" de 197,9 millions de francs, et du solde créditeur de 1 milliard de francs figurant aux comptes de prêts, en raison de remises de dettes aux pays les moins avancés.

En application des dispositions particulières figurant dans le décret de répartition des crédits ouvert au titre de la loi de finances de l'année, le solde du compte "pertes et bénéfices de change" est porté en atténuation des découverts du Trésor (article 16 du projet de loi de règlement).

Le solde débiteur des comptes de prêts correspondant à des remises de dette aux pays les moins avancés est porté en augmentation des découverts du Trésor (article 16 du projet de loi de règlement).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 10

Pertes et profits sur emprunts et engagements de l'Etat

Commentaire : le présent article arrête le solde des pertes et profits à la somme de 15,22 milliards de francs au 31 décembre 1995.

Conformément au 5ème alinéa (c) de l'article 35 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, le projet de loi de règlement établit le compte de résultat de l'année qui comprend : " les profits ou les pertes résultant éventuellement de la gestion des opérations de trésorerie dans des conditions prévues par un règlement de comptabilité publique ".

Les opérations de gestion de trésorerie ont dégagé un solde négatif de 15,22 milliards de francs en 1995, contre 156,5 milliards de francs en 1994 6( * ) et 18 milliards de francs en 1993.

Au titre des dépenses, 10,63 milliards de francs sont imputables aux annuités non supportées par le budget général, ou un compte spécial du trésor, qu'il s'agisse du remboursement de créances de TVA (7,37 milliards de francs) ou du remboursement d'emprunts pris en charge par l'Etat (3,26 milliards de francs), et 9,15 milliards de francs correspondent à des pertes sur adjudications de titres.

Compte tenu de 5,46 milliards de francs de profits sur adjudications de titres, le solde s'établit, au total, à - 15,22 milliards de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11

Pertes en trésorerie sur devises

Commentaire : le présent article a pour objet d'apurer une perte en trésorerie correspondant à la contre-valeur de devises détenues par les régies auprès des ambassades de France en Irak, au Rwanda et en Georgie.

L'article 35 de l'ordonnance n°59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances dispose que le résultat de l'année comprend notamment "les profits et pertes résultant éventuellement de la gestion des opérations de trésorerie dans des conditions prévues par un réglement de comptabilité publique".

Le présent article propose le transport de pertes en trésorerie sur devises en augmentation des découverts du Trésor pour un montant total de 9.486,60 francs.


Poste

Montant en francs

Observations

Bagdad

4,22

billets démonétisés

Kigali

9467,25

billets démonétisés

Tbilissi

15,13

petites coupures de coupons georgiens non échangeables contre des laris

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12

Remise de dettes consentie au Vietnam

Commentaire : le présent article autorise une remise de dettes d'un montant en capital de 28,4 millions de francs restant dû par l'ancienne République du Vietnam.

Le prêt, de 70 millions de francs, accordé par la France à l'ancienne République du Vietnam, dans le cadre d'un protocole conclu le 24 mars 1960, constitue la partie la plus ancienne de la dette de l'ex-Vietnam du Sud.

Les arriérés de ce prêt s'élèvent au 31 décembre 1995 à 28,4 millions de francs en principal et 50,6 millions de francs en intérêts.

Suite à des négociations financières avec le gouvernement français, il a été conclu que la République socialiste du Vietnam honorerait l'ensemble des dettes de l'ancien Vietnam du Sud restant dues, à l'exception de ce prêt accordé en 1960.

Il est donc proposé d'apurer, par transport en augmentation des découverts du Trésor, la somme en principal de ce prêt, soit 28,4 millions de francs inscrits au compte n°903-07 "Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à la Caisse française de développement".

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 13

Abandon de créances détenues à l'encontre de l'ex-ORTF

Commentaire : le présent article autorise le ministre de l'Economie et des finances à procéder à la remise d'une somme en capital de 75 millions de francs, correspondant à deux avances accordées à l'Office de la Radiodiffusion Télévision Française.

Deux avances, d'un montant global de 75 millions de francs ont été accordées le 14 septembre 1974, à l'Office de la Radiodiffusion-télévision Française (ORTF).

Ces avances ont été consolidées sous forme de prêt imputable au compte spécial n° 903-15 "Avances du Trésor consolidées par transformation en prêts du Trésor" par la loi de finances rectificative pour 1978 (article 15).

En 1984, elles ont été consolidées par transformation en prêts remboursables en 10 annuités, avec un taux d'intérêt annuel de 8,75%.

Cependant, les établissements publics et sociétés nationales issus de l'ORTF ont contesté dès 1984 le montant et la nature de la créance de l'Etat, ainsi que le bien-fondé du remboursement d'une dette contractée par l'ex-ORTF.

A cette contestation de la réalité de la créance se sont ajoutées les modifications du paysage audiovisuel français. Ainsi, lors de la privatisation de TF1, cette dette à l'égard de l'Etat ne figurait pas au passif de la chaîne.

Aucun versement n'a donc été effectué selon l'échéancier prévu.

Aucun des organismes issus de l'ORTF n'ayant réglé les annuités de remboursement, le montant global dû s'élève aujourd'hui à 115,6 millions de francs, dont 75 millions de francs en capital et 40,6 millions de francs en intérêts comme le montre le tableau d'amortissement ci-dessous.

(en francs)

Dates d'échéance

Montant des annuités de remboursement

 

Capital

Intérêts

Total

31 décembre 1985

4.995.724

6.562.500

11.558.224

31 décembre 1986

5.432.850

6.125.374

11.558.224

31 décembre 1987

5.908.224

5.650.000

11.558.224

31 décembre 1988

6.425.194

5.133.030

11.558.224

31 décembre 1989

6.987.399

4.570.725

11.558.224

31 décembre 1990

7.598.796

3.959.428

11.558.224

31 décembre 1991

8.263.691

3.294.533

11.558.224

31 décembre 1992

8.986.764

2.571.460

11.558.224

31 décembre 1993

9.773.106

1.785.118

11.558.224

31 décembre 1994

10.628.252

929.972

11.558.224

Totaux

75.000.000

40.582.240

115.582.240

Source : Ministère de l'Economie et des finances

Il apparaît d'autant plus difficile de recouvrer cette créance aujourd'hui, que la diversité des statuts des organismes de l'audiovisuel ne permet pas de trouver une solution simple et équitable.

La diversité de statuts a en effet conduit à ne pas retenir la solution préconisée par la Cour des comptes. Celle-ci avait proposé d'utiliser une partie des crédits provenant de la redevance audiovisuelle, c'est-à-dire des crédits figurant au chapitre 05 "Dépenses diverses" du compte d'emploi de la redevance (compte 902-15).

Cette solution ne serait pas satisfaisante, car elle ne concernerait que les sociétés bénéficiant de la redevance, à l'exclusion d'autres chaînes concernées par la créance de l'Etat (TDF, la SFP, TF1), et pénaliserait des sociétés qui, bénéficiant de la redevance, ne sont toutefois pas concernées par la créance (La Cinquième, la Sept-ARTE).

Il apparaît donc, qu'à défaut d'avoir pris en compte les conséquences de l'éclatement de l'ORTF, par exemple pour transformer dès 1984 le prêt de l'Etat en subvention, aucune solution ne peut aujourd'hui être trouvée.

Il est donc proposé d'abandonner la créance détenue à l'encontre de l'ex-ORTF, pour un montant total de 75 millions de francs, les intérêts correspondant au prêt étant versés en recettes du budget général, au compte de prêt intéressé (compte n° 903-15), conformément aux dispositions de l'article 29 de l'ordonnance organique du 1959.

L'abandon de créance se traduira par un transport en augmentation des découverts du Trésor de 75 millions de francs (article 16 du présent projet de loi).

Bien qu'il soit devenu impossible de recouvrer aujourd'hui la créance, votre rapporteur ne peut que déplorer la mauvaise gestion de l'Etat sur ce dossier. Il aurait dû, soit admettre la transformation du prêt en subvention, compte tenu des difficultés financières des sociétés, soit assurer un suivi rigoureux de la créance après l'éclatement de l'ORTF, pour s'assurer de la continuité des contrats avec les sociétés qui en sont issues.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 14

Reconnaissance d'utilité publique de dépenses comprises
dans des gestions de fait

Commentaire : le présent article vise à reconnaître d'utilité publique des dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat.

I. LES TROIS GESTIONS DE FAIT CONCERNÉES


Cet article intervient dans la phase ultime de trois procédures juridictionnelles conduites devant la Cour des comptes et concernant des gestions de fait :

- la gestion de fait de la Société française d'études et de réalisations maritimes, portuaires et navales (SOFREMER) mettant en cause le chef du Service technique central des ports maritimes et des voies navigables (STCPMVN), l'ancien délégué général de SOFREMER jusqu'au 31 octobre 1987 et le directeur de SOFREMER à partir du 1 er novembre 1987 ;

- la gestion de fait du " Consulat général de France à Oran " pour laquelle la Cour des comptes a déclaré comptables de fait l'ancien consul général de France à Oran et conjointement et solidairement, l'ancien consul général adjoint de France à Oran, pour des opérations résultant de l'émission de trois mandats fictifs (n °1373 du 2 janvier 1989 et n °1024 et 1025 du 23 octobre 1989) ;

- la gestion de fait de l'Association " Carrefour du Développement " (ACAD) au titre de laquelle ont été déclarés comptables de fait ladite association ainsi que conjointement et solidairement avec le ministre de la coopération, le chef de cabinet et le chef de bureau de l'ordonnancement pour l'ensemble des opérations effectuées du 30 juin 1983 au 6 mai 1986.

Dans la première affaire, la STCPMVN et SOFREMER avaient décidé de mettre en commun leurs moyens pour effectuer des études portuaires et mener des actions de formation. Dans ce cadre, le STCPMVN avait mis à la disposition de SOFREMER certains de ses moyens en personnel et en matériel, la SOFREMER assurant en contrepartie l'organisation de missions des agents du STCPMVN, la prise en charge des frais de transport et de séjours correspondants et la souscription des assurances individuelles nécessaires en cas de mission hors de France.

Chaque année, un bilan financier devait être établi, faisant ressortir les prestations effectuées par chaque partie et dont le solde devait donner lieu à remboursement auprès de l'organisme concerné.

La Cour a considéré que la convention a eu pour effet de faire prendre en charge par SOFREMER des dépenses incombant au STCPMVN alors qu'elle aurait dû verser des honoraires pour la rémunération des prestations fournies par ce dernier. Dans la mesure où la rémunération des prestations qu'il effectue au profit d'un tiers constitue une recette de l'Etat que seul un comptable public a qualité pour recouvrer, la Cour a estimé que SOFREMER s'était ingérée dans le recouvrement des recettes destinées à l'Etat.

S'agissant de la deuxième affaire, la gestion de fait provenait de ce que des factures relatives à des travaux dans les cimetières de la région d'Oran et qui avaient donné lieu à paiement au moyen de crédits ouverts au budget du ministère des affaires étrangères ne correspondaient en réalité à aucun service rendu. Les fonds avaient été utilisés comme fonds de roulement dans l'attente d'autorisations de paiement futures et avaient servi à payer diverses dépenses, se rapportant tant à des travaux dans les cimetières qu'à d'autres usages (travaux et achats de matériel pour le consulat et la résidence du consul).

La troisième affaire concerne l'Association " Carrefour du développement ". Son retentissement particulier aussi bien dans la presse que dans la sphère politique est lié non seulement au fait qu'elle a impliqué un ministre, M. Christian Nucci et son chef de cabinet, M. Yves Chalier, mais également au montant élevé des sommes détournées, respectivement 20,5 millions de francs au profit du premier et 1,4 million de francs au profit du second.

L'association avait été créée en 1983 à l'initiative du ministre de la coopération. Son objet était double : d'une part, elle devait éditer et diffuser la revue " Actuel Développement ", publication traitant de différents sujets liés aux problèmes de développement ainsi que de l'action du ministère ; d'autre part, elle devait réaliser des opérations tendant à informer et à sensibiliser l'opinion sur les questions de développement et de relations avec les pays du " Sud ". Cette association fonctionnait à partir de versements imputés sur les crédits du budget du ministère de la coopération et disposait de deux comptes : un compte bancaire et un CCP.

Lors d'un contrôle effectué par la Cour des comptes au cours de l'année 1996, celle-ci a constaté maintes opérations étrangères à l'objet de l'ACAD et que l'utilisation abusive de la procédure de subvention, le versement d'avances et l'octroi de délais pour rapporter la preuve du service fait avaient permis à l'ACAD de recevoir des sommes importantes sans avoir à justifier de la réalité des prestations. En outre, il a été établi que l'ACAD a fait état de factures surévaluées ou dépourvues de tout objet réel et que des sommes ont été rétrocédées en espèces par les auteurs des fausses factures.

Le contenu détaillé de chacune de ces quatre affaires est rappelé aux pages 88 à 92 de l'exposé des motifs du projet de loi de règlement.

L'objet du présent commentaire se limite donc à souligner les grands traits de la procédure aboutissant à la reconnaissance de l'utilité publique des sommes mentionnées dans le présent article.

Il convient toutefois dès à présent de rappeler que la reconnaissance d'utilité publique des dépenses comprises dans les gestions de fait précitées se fonde sur les arrêts de la Cour des comptes qui, après enquête, est en mesure de définir le montant exact des sommes qui, bien que n'ayant pas été manipulées selon les règles de la comptabilité publique, ont toutefois le caractère d'utilité publique par leur destination. Quant aux sommes auxquelles la Cour a dénié le caractère d'utilité publique, elles sont soumises à une procédure de recouvrement parallèle qui peut conduire à une procédure contentieuse.

Le présent article a pour objet de donner valeur législative aux arrêts de la Cour.

II. DESCRIPTION DE LA PROCÉDURE

- Dans chacune des affaires susmentionnées, la Cour des comptes a tout d'abord été conduite à déterminer les éléments constitutifs de la gestion de fait en séparant, au sein des masses financières concernées, celles répondant à l'objet qui leur avait initialement été assigné et celles affectées, en-dehors du circuit comptable de l'Etat, à des dépenses à caractère budgétaire. Ces dernières sont seules constitutives de la gestion de fait.

En fonction de la gravité de l'irrégularité et de son caractère frauduleux, la Cour peut infliger des amendes aux gestionnaires de fait. Ainsi, dans la gestion de fait " Consulat général de France à Oran ", elle a condamné le consul général à une amende de 2.000 francs et à 1.000 francs le consul général adjoint, estimant que " la différence marquée entre l'emploi réel des fonds et celui qui était licite donne aux errements relevés un caractère de particulière gravité ".

Dans le cas de la gestion de fait Association " Carrefour du développement ", la Cour a condamné à des peines très lourdes les gestionnaires de fait afin de sanctionner la gravité de ce qui constitue un véritable détournement des fonds publics : 600.000 francs pour le ministre de la coopération, 500.000 francs pour le chef de cabinet et 10.000 francs pour le chef de bureau de l'ordonnancement 7( * ) .

- Conformément aux dispositions de l'article L. 131-2 du code des juridictions financières, la Cour des comptes a alors jugé les comptes que lui avaient rendus les personnes qu'elle avait déclarées comptables de fait.

Elle a ainsi été conduite à établir la ligne de compte de la gestion de fait et à enjoindre au comptable de fait de reverser auprès d'un comptable public l'excédent éventuel des recettes sur les dépenses.

En ce qui concerne la gestion de fait SOFREMER, la Cour, dans son arrêt du 12 juillet 1995, a rendu définitive la déclaration de gestion de fait et a ainsi fixé provisoirement la ligne de compte : 942.735 francs en recettes, provenant des prestations effectuées par le STCPMVN dont le paiement par SOFREMER aurait dû intervenir par un comptable public ; 834.652,37 francs en dépenses, après qu'ait été rejeté un montant de 20.326,34 francs. L'excédent de recettes est fixé à 108.082,63 francs dont le reversement dans la caisse du receveur général des finances a été constaté.

En ce qui concerne la gestion de fait " Consulat général de France à Oran ", la Cour a également fixé provisoirement la ligne de compte.

A propos du mandat du 2 janvier 1989, elle a admis 149.453,70 dinars en recettes et 124.349,70 dinars en dépenses. L'excédent de recettes (25.104 dinars) a été reversé au Trésor public.

A propos des mandats du 23 octobre 1989, elle a admis 67.250 dinars en recettes et en dépenses.

En ce qui concerne la gestion de fait " ACAD ", la Cour a distingué les opérations appropriées par le ministre de la coopération de l'époque et celles appropriées par le chef de cabinet et le chef du bureau de l'ordonnancement.

Ainsi, pour la première catégorie d'opérations, elle a admis 51.648.786,83 francs en recettes et 31.185.517,94 francs en dépenses, soit un excédent de recettes de 20.463.268,89 francs.

Pour la deuxième catégorie d'opérations, elle a admis 30.890.718,21 francs en recettes, 29.461.258,42 francs en dépenses, soit un excédent de recettes fixé à 1.429.459,79 francs.

- Ensuite, la Cour a fait application du troisième alinéa de l'article 60-XI de la loi n °63-156 du 23 février 1963 qui dispose que " les gestions irrégulières entraînent, pour leurs auteurs, déclarés comptables de fait par la Cour des comptes, les mêmes obligations et responsabilités que les gestions patentes pour les comptables publics ".

En d'autres termes, le comptable de fait a été reconnu responsable sur ses propres deniers de la régularité des opérations auxquelles il avait procédé.

En ce qui concerne la gestion de fait " ACAD ", la Cour a enjoint dans son arrêt du 7 décembre 1995 complété par l'arrêt des 24 septembre et 2 octobre 1996 aux gestionnaires de fait d'apporter, dans un délai de deux mois à compter du jour de la notification du dernier arrêt, la preuve du reversement au Trésor public de l'excédent resté entre leurs mains, soit 20.463.268,89 francs pour le ministre de la coopération et 1.429.459,79 francs pour le chef de cabinet et le chef du bureau de l'ordonnancement. Le non reversement entraîne l'ouverture d'une procédure contentieuse de recouvrement.

Il est à noter que pour le calcul de la dépense dans la gestion de fait SOFREMER, la Cour a rejeté un montant de 20.326,34 francs au motif qu'il ne correspondait à aucune dépense à caractère d'utilité publique.

Pour les mêmes raisons, elle a rejeté dans la gestion de fait " Consulat général de France à Oran ", un montant de 22.202 francs du consulat d'Oran. Ces deux sommes doivent donc être reversées au Trésor public.

Le Parlement doit ensuite statuer sur l'utilité publique des dépenses de la gestion de fait. En effet, lui seul est habilité, dans le cadre d'une loi de finances, à déterminer la nature, le montant et l'affectation des charges de l'Etat.

Ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 60-XI de la loi de finances pour 1963, la Cour a également enjoint les comptables de fait " de produire une décision du Parlement, prise en la forme constitutionnellement requise pour le vote des lois de finances, statuant sur l'utilité publique des dépenses de la gestion de fait ".

Le comptable de fait, muni des dispositions prises dans le cadre du présent article, pourra alors se retourner vers la Cour des comptes afin d'être définitivement déchargé de l'obligation de restituer les sommes correspondantes.

Le présent article propose de reconnaître d'utilité publique, pour un montant de 834.652,37 francs, 142.167,73 francs, 31.185.517,94 francs et 29.461.258,42 francs les dépenses comprises dans la gestion de fait des deniers de l'Etat respectivement au titre du ministère de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et du ministère des affaires étrangères. Pour le calcul de ces sommes, la Cour des comptes a pris en compte les éventuels reliquats à reverser au Trésor public dont le recouvrement constitue une procédure parallèle.

Toutefois, on peut craindre que les 27.847.781,20 francs de dépenses non justifiées résultant de la gestion de fait " Association Carrefour du Développement " ne soient jamais recouvrées. En effet, les sommes ont été dépensées à l'époque des faits et les intéressés sont à l'heure actuelle insolvables.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 15

Apurement du compte 427.9 "Ecart d'intégration des dépôts CCP de l'ex-budget annexe des PTT"

Commentaire : le présent article tend à apurer une distorsion comptable apparue lors de la clôture du budget annexe des PTT par l'article 65 de la loi de finances pour 1991.

Par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, La Poste a été transformée en exploitant public autonome.

Par conséquent, l'article 65 de la loi de finances pour 1991 a procédé à la suppression, à compter du 1er janvier 1991, du budget annexe des postes et télécommunications.

Depuis son changement de statut en 1991, La Poste est donc comptée parmi les correspondants du Trésor. Celui-ci a en dépôt les comptes courants postaux des personnes physiques et des personnes morales non dotées d'un comptable public.

La situation des avoirs des comptes chèques postaux (CCP) que La Poste est tenue de déposer au Trésor est retracée au compte 427 - Comptes au Trésor de la Poste.

Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances en vue du règlement du budget de l'exercice 1994, la Cour des Comptes a toutefois relevé "une importante anomalie au compte 427 - Comptes au Trésor de la Poste".

En effet, un sous-compte 427-9 "Ecart d'intégration des dépôts CCP, ex-budget annexe des PTT" a été ouvert en 1992 et débité, par opérations successives, de 18,16 milliards de francs.

La Cour estime que cet écart de 18,16 milliards de francs a "pour origine les pertes cumulées de La Poste sous le régime du budget annexe : en l'absence d'une gestion distincte des flux de trésorerie, des prélèvements sur les avoirs des CCP ont été opérés, pour ce montant, pour couvrir les besoins de financement courants de l'exploitation".

La Cour des Comptes note que "lors de l'établissement du bilan d'ouverture de La Poste..., cette situation a fait l'objet d'une analyse détaillée".

Malgré des demandes maintes fois réitérées, aussi bien auprès de La Poste que de son ministère de tutelle, votre rapporteur général n'a pu obtenir cette analyse détaillée, ni aucun autre document d'explication avant la rédaction du présent rapport.

En l'absence de toute information, et compte tenu du caractère succinct de l'exposé des motifs attaché au présent article, votre rapporteur général n'est donc pas en mesure de donner une justification précise à cet écart comptable, qui correspondait à 11% des avoirs des CCP portés au crédit du compte 427 fin 1994.


La situation déficitaire de l'exploitation de La Poste n'est pas un élément de justification suffisant.

En effet, jusqu'au 31 décembre 1990, le secteur postal et le secteur des télécommunications faisaient l'objet d'un budget annexe : les comptes étaient séparés, sauf en matière de trésorerie. Or, l'unicité de trésorerie dissimulait une situation financière différente entre les deux directions générales : celle des télécommunications était structurellement excédentaire et celle de La Poste était structurellement déficitaire, au moins jusqu'en 1996.

Le manque de clarté et de transparence induit, avant 1991, par cette trésorerie unique, avait fait l'objet de rapports de l'Inspection générale des finances, notamment en 1978 et en 1981.

Mais cette unicité de trésorerie n'explique pas la situation rencontrée à l'ouverture du compte d'exploitation de La Poste, car la Cour des comptes indique que des prélèvements ont porté sur les avoirs des comptes chèques postaux pour financer des charges de fonctionnement courant.

Il n'est pas suffisant de constater que la Poste était déficitaire : il faut savoir dans quelles conditions il a été possible d'effectuer des prélèvements sur les avoirs des comptes chèques postaux sans porter atteinte aux garanties dont devraient bénéficier les déposants.

Il s'agit également d'avoir la certitude que les règles budgétaires et comptables ont été correctement respectées. 8( * )


Le présent article met en oeuvre une solution retenue par la Cour des Comptes afin de remédier à une anomalie comptable, en opérant le transport de l'écart de 18,16 milliards de francs en augmentation des découverts du Trésor.

S'il est évidemment nécessaire de corriger une telle "anomalie", compte tenu de son montant, elle ne peut l'être sans justification.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article

ARTICLE 16

Transport aux découverts du Trésor

Commentaire : conformément à l'article 35 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, le présent et dernier article de la loi de règlement récapitule le compte de résultat de l'année et autorise son transfert (" transport ") au compte permanent des découverts du Trésor.

Le paragraphe I
porte en augmentation des découverts du Trésor les sommes mentionnées aux articles 7, 10, 11 et 15, soit :


l'excédent des dépenses sur les recettes du budget général de 1995


304,001 milliards de francs

les pertes et profits sur emprunts et engagements


15,219 milliards de francs

les pertes en trésorerie sur devises

9.486,60 francs

l'apurement du compte 427-9 " Etat d'intégration des dépôts des comptes chèques postaux de l'ex-budget annexe des PTT "


18,158 milliards de francs.

Le paragraphe II porte en atténuation des découverts du Trésor :


le résultat net du compte spécial du Trésor "Pertes et bénéfices de change"

0,198 milliard de francs

Le paragraphe III porte en augmentation des découverts du Trésor les sommes correspondant à diverses remises de dettes opérées par des lois de finances antérieures, au total 1.005,47 milliards de francs (dont la ventilation figure en annexe au projet de loi).

Le paragraphe IV transporte en augmentation des découverts du Trésor les sommes correspondant aux remises de dettes consenties au Viêt-nam (article 12) et à l'abandon de créances détenues envers l'ex-ORTF, soit 103,43 millions de francs.

Le paragraphe V régularise (en atténuation) une écriture transportée à tort aux découverts du Trésor au titre de la remise de dette consentie à la compagnie de chemin de fer franco-éthiopien, soit 1,53 millions de francs.

Après inscription du résultat de 1995, soit - 338,29 milliards de francs, le montant net des découverts du Trésor devrait s'élever à 2.927,53 milliards de francs.

Compte tenu de l'absence d'explication concernant l'apurement du compte 427-9 " Etat d'intégration des dépôts des comptes chèques postaux de l'ex-budget annexe des PTT " 9( * ) , il est proposé de ne pas porter en augmentation des découverts du Trésor la somme correspondante de 18,158 milliards de francs, ce qui ramènerait le montant net des découverts du Trésor à 2.909,372 milliards de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

EXAMEN EN COMMISSION

I. AUDITION DE M. PIERRE JOXE, PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES

Réunie le jeudi 22 octobre 1998, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'audition de M. Pierre Joxe, Premier Président de la Cour des Comptes, accompagné de M. François Logerot, Président de la Première Chambre , et de M. Bernard Cieutat, Rapporteur Général des lois de règlement, sur les projets de loi 527 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1995 et n° 528 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1996 et sur le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour l'année 1997 .

En réponse à M. Alain Lambert , président , qui l'interrogeait sur la contribution française au budget européen, M. Pierre Joxe a évoqué les crédits dont disposent les institutions de l'Union européenne, dont l'utilisation fait actuellement l'objet de critiques.

Il a tout d'abord fait valoir que la disparité des traitements entre les membres du Parlement européen se traduisait par des rémunérations allant du simple au quadruple, ce qui expliquait le recours à des frais de mission excessifs, et parfois fictifs, que des magistrats français de la Cour des Comptes et de Chambre régionale des comptes avaient critiqués.

Il a ensuite jugé indispensable de procéder à une harmonisation des contrôles sur l'utilisation des fonds européens. S'agissant notamment du fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), M. Pierre Joxe a indiqué que les pays de l'Union européenne avaient fait des choix différents en matière de contrôle de l'utilisation de ce fonds, confiant parfois cette tâche à leur Cour des comptes, parfois au ministère de l'agriculture ou même, comme c'est le cas en Grande-Bretagne, à un cabinet d'audit. Il a expliqué que, malgré leur progression très lente, les fonds européens représenteraient l'équivalent d'un grand ministère français d'ici cinq à dix ans, ce qui justifiait de prévoir, dès à présent, des contrôles adaptés.

Le Premier Président de la Cour des Comptes a ensuite abordé la question de l'exécution du budget en France.

Il a indiqué que les comptes de l'Etat étaient désormais arrêtés plus tôt, la période complémentaire, qui s'achevait auparavant au 7 février, ayant été ramenée au 31 janvier. A terme, il a souhaité que cette période complémentaire soit supprimée comme elle l'est déjà, par exemple, à Singapour.

M. Pierre Joxe a ajouté que le rapport préliminaire de la Cour des Comptes sur l'exécution des lois de finances était un élément important pour accroître le contrôle du Parlement sur l'exécution budgétaire, mais que ce contrôle avait plus d'impact quand le projet de loi de règlement était inscrit rapidement à l'ordre du jour des Assemblées.

M. Pierre Joxe a ensuite abordé deux points : l'amélioration de la situation budgétaire en 1995 et 1996 et la nécessité d'une transparence accrue des procédures comptables.

S'agissant du premier point, il a fait remarquer que le montant des déficits et des pertes de l'Etat avait diminué, pour revenir à 299 milliards de francs en 1996. Cette amélioration a été rendue possible par l'accroissement des recettes fiscales et par une moindre progression de la charge de la dette, grâce à une diminution des taux d'intérêt. Toutefois, les dépenses de personnel n'ont pas cessé d'augmenter sur cette période.

S'agissant du second point, M. Pierre Joxe a indiqué que des améliorations avaient été constatées en matière de transparence et de rigueur comptable. Il a pris comme exemple le nouveau mode de comptabilisation des recettes fiscales perçues par voie de rôles et la disposition du projet de loi de règlement pour 1995 concernant l'écart d'intégration des comptes chèques postaux. Il a ajouté que des progrès devaient toutefois être réalisés en matière de prélèvements sur recettes, et que l'ensemble des rémunérations accessoires devraient être réintégrées au budget de l'Etat.

En réponse à M. Alain Lambert , président , le Premier Président de la Cour des Comptes a ensuite évoqué l'enquête menée par la Cour depuis trois ans sur les effectifs et les rémunérations dans la fonction publique. Il a estimé légitime que l'Etat choisisse de rémunérer certains de ses agents au-delà de leur salaire déterminé par la grille indiciaire, mais il a souhaité que cette rémunération soit publique. Il a pris l'exemple des Pays-Bas, pays où les fonctionnaires sont rémunérés de manière transparente, suivant une échelle allant de 1 à 27. Il a ajouté que cette enquête permettrait de décrire la réalité des rémunérations dans la fonction publique, seul moyen d'effectuer des comparaisons utiles entre les agents publics.

Le Premier Président de la Cour des Comptes a ensuite répondu aux questions de M.  Philippe Marini, rapporteur général.

M. Pierre Joxe a indiqué que, s'agissant de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, un groupe de travail avait été mis en place à l'Assemblée nationale. Il a souhaité que les parlementaires s'impliquent dans cette réforme, dans la mesure où les administrations publiques étaient très réticentes au changement.

M. François Logerot, président de la première chambre de la Cour des Comptes, a précisé que la Cour n'avait pas procédé à un travail d'ensemble sur l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Il a cependant évoqué l'éventuelle révision de l'article 13 de l'ordonnance, qui autorise le ministre des finances à annuler par arrêté tout crédit devenu sans objet. Il a déclaré que, les hypothèses de croissance des recettes fiscales étant arrêtées au milieu de l'année, au plus tard au mois d'août ou septembre, la régulation budgétaire était en réalité devenue un outil d'ajustement aux évolutions de la croissance économique. Il a ajouté que la Cour des Comptes s'était exprimée à plusieurs reprises sur l'utilisation faite des dispositions de l'article 13 de l'ordonnance organique de 1959, et qu'elle souhaitait toujours que d'autres techniques budgétaires puissent être mises en place.

Le président de la première chambre de la Cour des Comptes a ensuite constaté que la comptabilité publique française restait rudimentaire. Il a indiqué qu'elle n'appliquait pas le principe des droits constatés, à la différence des autres pays européens, alors que l'application de ce principe permettrait de commencer l'élaboration d'une comptabilité patrimoniale de l'Etat. Il a ajouté que la Cour des Comptes avait noté que certaines pratiques traduisaient un changement de méthode d'un exercice budgétaire à l'autre. Il a regretté que certaines charges de structure ne soient pas correctement décrites dans les comptes de l'Etat, de même que les charges futures des opérations de défaisance. Il en a conclu que des réformes sur ces sujets permettraient d'apporter des clarifications dans les comptes publics et de donner une meilleure information au Parlement.

M. Bernard Cieutat, rapporteur général des lois de règlement, a évoqué la question de l'écart d'intégration entre le montant des avoirs des comptes chèques postaux et la somme déposée par la Poste au Trésor public.

Il a tout d'abord rappelé que la Cour avait soulevé ce problème il y a de nombreuses années. Le rapport public pour 1988 décrivait déjà la confusion existant entre la trésorerie de la Poste et la trésorerie de l'Etat. La Cour avait noté qu'il existait des discordances entre ce que la Poste déposait au titre des avoirs des comptes chèques postaux et ses engagements vis-à-vis des titulaires de ces mêmes comptes. M. Bernard Cieutat a fait observer que, sous le régime du budget annexe, la Poste était obligée de déposer les avoirs des comptes chèques postaux au Trésor public, mais que l'Etat, ne voulant pas la subventionner à hauteur de ses charges d'exploitation, l'avait autorisée à conserver une partie de ces avoirs. Si la Poste a effectivement puisé dans ces avoirs, il a estimé que l'Etat avait une part de responsabilité importante dans cette opération, d'autant qu'il avait effectué des prélèvements au détriment de la Poste de l'ordre de 4 milliards de francs par an pendant cette période.

M. Bernard Cieutat a ajouté qu'une commission avait été constituée, présidée par un magistrat de la Cour des Comptes, pour établir le bilan d'ouverture de la Poste. C'est à ce moment que l'écart entre les comptes de la Poste et ceux de l'Etat est ouvertement apparu. En 1992, le Gouvernement a pris la décision de ne pas faire apparaître cette dette dans les comptes de la Poste, pour que l'établissement public ne soit pas créé avec une situation nette négative.

M. Bernard Cieutat a conclu que l'article 15 du projet de loi de règlement pour 1995 apportait une solution comptable au problème évoqué, en inscrivant en pertes de trésorerie pour l'Etat l'écart de 18 milliards de francs constaté lors de l'établissement du bilan de la Poste. Il a estimé que, si l'autonomie de la Poste s'accroissait à l'égard de l'Etat, c'est-à-dire si elle était dispensée de déposer les avoirs des comptes postaux au Trésor, ou encore si tous les titulaires de ces comptes souhaitaient retirer leur argent, l'Etat s'engagerait à honorer ces 18 milliards de francs.

En matière de pensions, M. Bernard Cieutat a indiqué que l'étude menée par la Cour des Comptes était loin d'être achevée, mais que la Cour avait présenté des observations dans ses derniers rapports publics. Il a indiqué que les rémunérations principales, les indemnités, et surtout les pensions augmentaient à un rythme très rapide, puisqu'elles étaient passées de 139 milliards de francs en 1993 à 166 milliards de francs en 1997, soit une progression de 18 % sur 4 ans et de 4,2 % par an. Il a ajouté que cette moyenne était toutefois erratique, puisqu'en 1997 la progression n'avait été que de 3,6 %, en raison de l'absence du relèvement du point de la fonction publique. Il a estimé toutefois que l'hypothèse d'un accroissement de la charge des retraites de 12 milliards de francs par an à partir de l'an 2000 était sans doute excessive.

M. Bernard Cieutat a ajouté que la dégradation du rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités dans la fonction publique était très inquiétante pour l'avenir, car ce rapport devrait passer de 2,5 en 1995 à 1,4 en 2015. Ce chiffre est toutefois plus favorable que celui retenu pour le secteur privé, qui s'élèvera à 1,2. Quelle que soit l'hypothèse choisie, sur les 15 années à venir, la moitié des fonctionnaires partira en retraite, si bien que le nombre de pensionnés progressera de 10 % tous les deux ans et sera doublé en 2015.

M. Bernard Cieutat a expliqué que les mesures catégorielles accordées aux actifs étaient étendues aux retraités, notamment la progression des indices de la fonction publique, en application de l'article L 16 du code des pensions. De surcroît, le renforcement des emplois d'encadrement fera progresser la charge des pensions, alors qu'en sens inverse l'entrée plus tardive dans la fonction publique minorera cette charge.

M. Bernard Cieutat a conclu en indiquant que le commissariat général du Plan était désormais chargé d'une mission de prospection sur l'avenir des retraites et leur financement, ce qui permettra d'actualiser le rapport sur les retraites de 1995.

M. François Logerot a ensuite abordé la question des rebudgétisations. Il a fait observer qu'un certain nombre d'opérations de clarification introduites dans le projet de loi de finances pour 1999 avaient pour origine des observations de la Cour des Comptes, ou des études particulières menées par elle pour répondre aux questions des commissions des finances, et particulièrement à celle du Sénat. Concernant le problème des "crédits d'article" au budget des services financiers, il a indiqué qu'il s'agissait d'une incohérence de la présentation budgétaire dans la mesure où des dépenses n'étaient pas retracées dans le budget de l'Etat, alors que les recettes les finançant y figuraient. Il a ajouté que la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 1998 avait définitivement convaincu le Gouvernement de modifier sa présentation budgétaire. Il a par ailleurs indiqué que les opérations faites par voie de comptes de classe 4 (comptes de tiers) étaient réintégrées dans le budget pour 1999 pour 138 millions de francs.

M. François Logerot a estimé qu'il restait toutefois d'autres opérations extra-budgétaires qu'il convenait de réintégrer dans le budget de l'Etat. Il a cité les fonds d'honoraires du ministère de l'équipement pour 900 millions de francs, les fonds d'honoraires du génie rural pour 400 millions de francs, et les comptes de classe 4 du ministère des finances, tels les frais de service des comptables du Trésor, pour lesquels il n'existe aucune centralisation comptable nationale.

M. François Logerot a déclaré que les opérations de remboursement de la taxe à la valeur ajoutée aux entreprises, consécutives à la suppression du décalage d'un mois, sont traitées en opérations de trésorerie, alors qu'il s'agit d'opérations de caractère budgétaire. Il a également regretté que le remboursement à l'Etat de la dette de la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) soit intégralement retracé au budget général, alors que la partie en capital correspondant à 5,8 milliards de francs avait été intégralement traitée en opération de trésorerie. Concernant les opérations de défaisance, il a indiqué que les sommes versées à l'établissement public de financement et de réalisation (EPFR) ne lui avaient pas permis d'honorer les charges de l'emprunt contracté auprès du Crédit lyonnais, ce qui avait entraîné des pénalités de retard de 1 milliard de francs. Il a alors mis en évidence le paradoxe aux termes duquel l'établissement public de défaisance du Comptoir des Entrepreneurs avait, quant à lui, reçu une dotation supérieure à ses besoins réels. Enfin, il a regretté que des dépenses de fonctionnement des administrations de l'Etat, notamment du ministère de l'équipement, soient imputées sur les dépenses de certains comptes spéciaux du Trésor, en contravention avec les dispositions de l'ordonnance organique.

S'agissant des recettes attendues de la privatisation du Crédit lyonnais en 1999, il a fait observer que les recettes prévues au titre des privatisations s'élevaient à 17 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 1999. Cette somme correspond au complément de recettes dégagé par la privatisation du groupement des assurances nationales (GAN) et à l'extension de la mise sur le marché des actions de France Télécom. Il a convenu qu'aucune recette n'était inscrite pour la privatisation du Crédit lyonnais ou pour celle du Crédit foncier de France. Il a toutefois indiqué que l'affichage de prévision de recettes se révélait très difficile dans la mesure où la capitalisation boursière était fluctuante et surtout parce qu'il était dangereux d'afficher des prévisions trop excessives, qui pouvaient décourager des repreneurs ou, au contraire, des prévisions trop faibles qui pouvaient constituer un signe négatif pour les négociations à venir. Il a fait observer que les dotations inscrites sur la ligne correspondante n'avaient jamais été conformes aux réalisations : en 1995, 55 milliards de francs étaient prévus mais seulement 21 milliards de francs ont été réalisés, en 1996, 22 milliards de francs étaient inscrits mais seulement 13 milliards de francs ont pu être réalisés, en 1997, 27 milliards de francs étaient inscrits mais 59 milliards de francs ont finalement été réalisés. En 1998, l'objectif inscrit en loi de finances ne devrait pas être atteint.

M. Michel Charasse s'est félicité de l'étude menée par la Cour des Comptes sur la fonction publique, ses effectifs, ses rémunérations.

S'agissant du régime indemnitaire, il a tenu à préciser que les fonds de concours du ministère des finances, qui viennent d'être réintégrés dans le projet de loi de finances pour 1999, étaient clairement identifiés, à la différence de structures similaires existant au sein d'autres ministères. Il a également distingué les régimes indemnitaires correspondant à l'exercice effectif de responsabilités et à la prise de risques de ceux relevant de stratifications historiques. De même il s'est interrogé sur les modalités de gestion des effectifs de la fonction publique, et notamment sur l'utilisation de la mobilité dans l'intérêt du service. Il a enfin souhaité que l'étude de la Cour des Comptes soit étendue aux entreprises publiques.

S'agissant de la réforme de l'ordonnance du 2 janvier 1959, il a rappelé la nécessité de l'autorisation préalable du Parlement en matière des dépenses, l'importance de l'article d'équilibre et l'intérêt que présente le mécanisme dit de la " régulation budgétaire ", ainsi que la nécessaire distinction entre l'autorisation et l'obligation de dépense.

Enfin, évoquant, en sa qualité de rapporteur spécial des crédits de la Coopération, sa récente mission en Afrique, il a fait état de deux affaires, notamment en matière de livraison d'aide alimentaire à caractère humanitaire, qui pouvaient relever de la compétence de la Cour des Comptes.

M. Roland du Luart , après s'être félicité de la qualité des travaux de la Cour, s'est interrogé sur les suites effectivement données à ses conclusions. S'agissant de l'étude menée sur la fonction publique et ses rémunérations, il a souhaité en connaître la date de parution afin que celle-ci puisse clarifier le débat en la matière, trop souvent polémique et excessif.

Il a enfin souhaité obtenir des informations quant au niveau réel des primes versées à certains corps techniques de l'Etat.

Partant de la situation de l'EPFR et des modalités de sa mise en place, M. Yann Gaillard a souhaité que soient examinées les conditions dans lesquelles cette structure avait travaillé, ainsi que son coût financier. Il s'est par ailleurs interrogé sur la nature précise et l'évolution à venir des relations existant entre l'EPFR et le CDR (comptoir de réalisation) et il a souhaité, que la Cour des Comptes puisse apporter son éclairage en ce domaine.

M. Pierre Joxe , Premier Président de la Cour des Comptes, s'agissant du travail actuellement effectué par la Cour des Comptes en matière de rémunérations au sein de la fonction publique en a reconnu la difficulté technique, notamment en raison du nécessaire respect du caractère contradictoire de la procédure. Il a par ailleurs souhaité obtenir des précisions quant aux faits évoqués par M. Michel Charasse en sa qualité de rapporteur spécial pour mieux orienter l'action de contrôle de la Cour des Comptes.

Répondant à M. Roland du Luart, il lui a indiqué que, lorsque les pressions, qu'elles émanent du Parlement, du Gouvernement ou de l'opinion publique étaient fortes, les rapports et études de la Cour connaissaient des suites rapides, mais qu'en tout état de cause, la Cour ne disposait pas en principe de pouvoir de sanction propre. A ce titre, évoquant les auditions publiques menées en ces matières par le Parlement britannique, il a estimé qu'elles pouvaient constituer un exemple transposable en France, si le Parlement français le jugeait opportun.

S'agissant des rémunérations des ministres, il a rappelé que celles-ci étaient réglementées et prévues de façon très précise. De façon plus générale, il a indiqué que les travaux de la Cour permettraient de tracer un panorama clair et complet de la situation de l'ensemble des rémunérations publiques.

En réponse à M. Yann Gaillard, il a convenu de l'intérêt et de la nécessité, pour la Cour des Comptes, d'étudier la situation de l'EPFR, tout en soulignant la diversité, voire la complexité, des intérêts, notamment financiers, en cause.

Il a enfin souligné l'utilité, notamment pour apprécier l'effectivité des politiques publiques, des synergies pouvant exister entre le développement de la fonction de contrôle du Parlement et les travaux menés en ce domaine par la Cour des Comptes.

M. François Logerot, président de la première chambre de la Cour des Comptes , a apporté des précisions à M.  Roland du Luart sur les montants respectifs des indemnités perçues par les fonctionnaires du génie rural et ceux des ponts et chaussées.

S'agissant de la situation de l'EPFR, il a convenu de la justesse du propos de M. Yann Gaillard et souhaité, à ce titre, de façon plus générale, qu'une étude de synthèse soit menée par la Cour sur les opérations de défaisance.

M. Alain Lambert, président , a tenu à remercier M. Pierre Joxe pour l'intérêt et les perspectives ouvertes par son audition en matière de développement de la fonction de contrôle du Parlement.

II. EXAMEN DU PROJET DE LOI

Réunie le jeudi 22 octobre 1998, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen des projets de loi 527 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1995 et n° 528 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1996 , sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a souligné que l'examen de ces projets de loi était riche d'enseignements sur l'art de piloter les finances publiques dans un environnement de plus en plus incertain. A ce titre, il a souligné que, dans des conditions très difficiles, la France avait poursuivi son chemin vers la monnaie unique en 1995 et 1996.

Il a tout d'abord fait observer, s'agissant du cadrage macro-économique, que des écarts importants existaient entre prévisions et réalisations.

Il a indiqué qu'en 1995 le Gouvernement avait prévu une croissance de 3,1 % et qu'elle fut de 2 %, tandis qu'en 1996 la prévision fut encore davantage déjouée : 1,2 % réalisé pour 2,8 % prévu.

De même il a souligné qu'au cours de chacune des deux années, la demande intérieure n'avait pas atteint le niveau que l'on attendait, les ménages préférant épargner et les entreprises continuer à se désendetter.

Il a également fait remarquer que la croissance, qui avait repris vivement en 1994, avait marqué le pas en 1995 et 1996 dans la plupart des grandes économies de l'OCDE, notamment en raison de la crise financière mexicaine de la fin de 1994.

En conséquence, il est apparu nécessaire, pour la plupart des pays européens, d'adopter des politiques budgétaires rigoureuses pour entrer dans l'épure des critères du traité sur l'Union européenne, ce qui avait probablement accentué le ralentissement économique.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a ainsi rappelé que la politique rigoureuse et responsable menée avait alors permis à la France de faire ensuite partie des premiers accédants à l'euro.

Il a ensuite détaillé les principaux éléments de la gestion des finances publiques pour 1995 et 1996.

Il a tout d'abord rappelé que les recettes avaient été marquées en 1995 et 1996 par un phénomène que les gouvernements de l'époque avaient appelé " déflation ". Non seulement la croissance économique était plus faible que prévu, mais encore les recettes ne suivaient pas cette croissance. Ainsi, en 1995, les recettes n'avaient progressé spontanément que de 1,4 % alors que la croissance nominale s'établissait à 3,4 %. La loi de finances rectificative d'août 1995 a donc permis de redresser la courbe des recettes, au prix d'un relèvement des prélèvements obligatoires, surtout sur la TVA (+ 17 milliards de francs) et l'impôt sur les sociétés (+ 11 milliards de francs), soit au total 30 milliards de francs.

Le relèvement des impôts a ensuite été beaucoup critiqué, mais s'il en avait été autrement, l'euro n'aurait pas pu être mis en place le 1 er janvier 1999.

Il a cependant souligné qu'en 1996, le phénomène n'avait pas été aussi accentué même si les recettes fiscales nettes avaient enregistré une moins-value de 1,6 % (- 22,8 milliards de francs) essentiellement concentrée sur la TVA (- 22,1 milliards de francs) et que le maintien du niveau des recettes n'avait été obtenu que grâce à une augmentation des recettes non fiscales : + 21,6 milliards de francs.

Néanmoins, il a relevé que, malgré le souhait des gouvernements successifs, les dépenses avaient été mal contenues en 1995 et 1996, essentiellement du fait de la forte progression des charges de la dette publique, mais aussi de certaines dépenses de transfert liées aux difficultés économiques et sociales, comme les aides personnelles au logement ou le revenu minimum d'insertion.

Ainsi, en exécution, les dépenses ont progressé en 1995 de 3,2 % par rapport à 1994, et encore de 4,6 % en 1996 par rapport à 1995.

Il a rappelé que ces deux exercices avaient également subi le vif emballement des charges de la dette publique : + 12,6 % en 1995 (235,4 milliards de francs) et que, même si la progression s'était ralentie en 1996  (+ 1,6 %), la charge brute de la dette publique qui représentait 240 milliards de francs était devenue l'un des postes essentiels du budget de l'Etat avec les crédits militaires et l'éducation nationale.

Par ailleurs, certaines dépenses d'intervention avaient également exercé une très forte pression au cours de ces deux années : le revenu minimum d'insertion (RMI) a augmenté de 13,6 % en 1995 pour représenter 21,8 milliards de francs, les aides au logement de 7,3 %, soit 29,9 milliards de francs et les aides à l'emploi, de 7,2 % en 1995 et 15,2 % en 1996, pour atteindre le chiffre record de 148,8 milliards de francs.

Néanmoins, M. Philippe Marini, rapporteur général, a souligné que, malgré un effet de ciseaux (déflation des recettes et pression des dépenses liées aux difficultés économiques), les gouvernements de 1995 et 1996 avaient maintenu la France sur les rails de la monnaie unique. Le déficit 1995 avait ainsi été maintenu au niveau prévu initialement : 323 milliards de francs en exécution pour 322,1 milliards de francs en loi de finances initiale.

Il a également indiqué que, si en 1996 le dérapage avait été moins bien contrôlé : 295,4 milliards de francs pour 287,8 milliards de francs prévus, les déficits avaient cependant continué de se réduire en proportion du produit intérieur brut (PIB) (4,2 % en 1995 et 3,8 % en 1996), et que le déficit global des administrations publiques avait atteint respectivement 4,9 %, puis 4,1 % du PIB, grâce à l'amélioration spectaculaire des comptes sociaux en 1996. De ce fait, si la monnaie unique n'était pas accessible pour 1997, la France était en bonne voie pour 1999.

En conclusion, il a tenu à souligner que les difficultés de l'exécution des lois de finances pour 1995 et 1996 permettaient de tirer deux leçons pour l'avenir, dont devraient s'inspirer les gouvernements dans la construction de la loi de finances, et qui seraient utiles pour l'analyse du projet de budget 1999.

D'une part, il lui apparaissait que la situation économique, sensible au moindre choc externe, était devenue d'une incroyable imprévisibilité. Cette donnée imposait donc de construire avec prudence des budgets ne prévoyant pas de dépenser, surtout sous forme de charges de structure, toutes les recettes que la prévision économique du moment pouvait laisser espérer. L'élaboration d'un budget sur la base d'une croissance nominale inférieure d'un point au consensus des prévisionnistes permettrait ainsi de garantir sans trop de dommages l'objectif initial de déficit budgétaire.

Par ailleurs, il a rappelé que le niveau des taux d'intérêt à court et long termes, qui était une donnée échappant totalement à la volonté des gouvernements, constituait une variable déterminante pour les charges de la dette publique. En conséquence, si l'on souhaitait que l'idée même de politique budgétaire puisse continuer à exister, il était impératif de réduire le fardeau de la dette publique, même si cela n'était pas toujours possible puisqu'il fallait, en effet, que la conjoncture économique s'y prête.

Néanmoins, lorsque c'était possible, il fallait le faire avec la plus extrême détermination, car le fait de dépenser les fruits de la croissance lorsque l'Etat est endetté constituait un gaspillage.

M. Bernard Angels , après avoir reconnu que la loi de règlement ne faisait que constater l'exécution d'une loi de finances, a regretté les retards pris dans leur examen.

Il a cependant contesté, s'agissant de la loi de règlement 1995, le qualificatif de "rigoureuse et réaliste" appliqué à la gestion gouvernementale. Ainsi le déficit fixé initialement à 275 milliards a été exécuté à un niveau de 323 milliards, soit 4,2 % du PIB. De même, il a souligné qu'en 1996, le budget s'inscrivait dans le cadre d'une "gestion calamiteuse des finances publiques", même si la dérive avait cependant été limitée de 288 à 295 milliards de francs.

S'agissant de l'objectif de réduction des dépenses publiques, il a relevé que celles-ci avaient évolué en 1995 au même niveau que le PIB et tenu à indiquer qu'elles diminueraient d'un point de PIB en 1999.

De même, il a tenu à souligner que le déficit budgétaire avait été peu réduit malgré des recettes fiscales supplémentaires et les ressources tirées des opérations de privatisation.

A titre liminaire, Mme Marie-Claude Beaudeau a tenu à rappeler que la majoration de TVA, en 1995, avait été accompagnée d'une diminution de l'impôt sur les sociétés. Elle a souligné l'importance pour l'exécution du budget de 1995 des effets du collectif budgétaire, ainsi que l'accroissement du niveau du déficit budgétaire. S'agissant du relèvement du taux de la TVA elle a tenu à indiquer que les craintes qu'elle avait alors exprimées s'étaient révélées justes, et ainsi démontré l'intérêt de diminuer le taux de celle-ci.

En réponse à M. Bernard Angels, M. Philippe Marini, rapporteur général , a fait état des graves aléas de conjoncture extérieure qu'avait connus la France en 1995, notamment du fait de la crise du Mexique en 1994 et de la baisse du cours du dollar, et de ses effets négatifs sur la progression des recettes. Dans ce contexte, après avoir rappelé le choix fait par le Gouvernement d'agir sur les recettes et non de diminuer les dépenses, il en a souligné l'intérêt et l'utilité pour limiter la progression du déficit et protéger l'avenir de la croissance en France dans un contexte économique très différent de celui qui avait été prévu initialement.

La commission a ensuite procédé à l'examen du projet de loi de règlement définitif du budget de 1995. Elle a adopté sans modification les quatorze premiers articles.

M. Philippe Marini, rapporteur général , après avoir présenté l'article 15 et l'écart d'intégration de 18 milliards de francs des dépôts des comptes chèques postaux que cet article visait à apurer, a souhaité, dans l'attente d'informations complémentaires et satisfaisantes de la part du Gouvernement, présenter un amendement "d'appel" visant à supprimer cet article. Cet amendement a été adopté par la commission.

A l'article 16 , il a présenté un amendement de coordination consécutif à l'adoption de l'amendement de suppression de l'article 15.

Puis, l'ensemble du projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995 ainsi amendé a été adopté.

La commission a ensuite adopté sans modification l'ensemble du projet de loi portant règlement définitif du budget de 1996.



RÉPONSES DE LA COUR DES COMPTES AUX QUESTIONS

POSÉES PAR LA COMMISSION DES FINANCES

QUESTION N° 1

LES DEPENSES FISCALES

La Cour fait souvent référence (notamment dans les monographies) au concept de dépense fiscale afin, notamment, d'apprécier l'ensemble des concours publics à tel budget ou à telle activité. Il semble que cette dépense fiscale, compte tenu du poids politique accordé aux indicateurs " dépenses " et " prélèvements obligatoires ", devienne un instrument de plus en plus fréquent de la politique économique de l'Etat. Les connaissances sur cette dépense fiscale (coût, efficacité) apparaissent en outre assez modestes. La Cour est-elle en mesure, peut-être à partir de quelques exemples, d'éclairer le Parlement sur ce sujet d'importance croissante ?

REPONSE

Définie comme l'exception par rapport à une norme fiscale, la dépense fiscale recouvre une gamme variée d'allégements de la charge de l'impôt en faveur de certaines catégories de bénéficiaires ou au service d'objectifs spécifiques de politiques publiques. Elle constitue donc, à côté de la dépense directe, un mode d'intervention souple qui a connu un développement rapide dans les dernières décennies. Le recours aux aides fiscales n'est pas toutefois sans poser différents problèmes : la définition des dépenses fiscales comprend des incertitudes, et pose le problème du classement des mesures ; surtout, l'évaluation de leur coût et de leur efficacité demeure insuffisante.

I - Un instrument d'intervention en développement rapide

1- La notion de dépense fiscale est devenue familière

La notion de dépense fiscale, qui remonte aux années 1960, est officialisée en France depuis 1980 à la suite de l'analyse des réductions d'impôt sur le revenu conduite par le conseil des impôts dans son rapport de 1979.

Est qualifiée de dépense fiscale toute disposition législative ou réglementaire dont la mise en oeuvre entraîne pour l'Etat une perte de recettes et pour le contribuable un allégement de charge fiscale par rapport à ce qui serait résulté de l'application de la " norme ", c'est-à-dire des principes généraux du droit fiscal français. Ces dispositions peuvent revêtir différentes formes : exonérations (revenus exclus de la base d'imposition), déductions (montants déduits du revenu brut pour obtenir le montant imposable), crédits (montants déduits de l'impôt dû), réductions de taux, report d'impôt (allégement sous forme de délai de paiement de l'impôt).

L'ensemble des pays développés s'est efforcé d'apprécier les meures fiscales avec une rigueur équivalente aux dépenses directes. Le comité des affaires fiscales de l'OCDE a ainsi consacré en 1995 un rapport 10( * ) aux expériences récentes en matière de présentation des comptes des dépenses fiscales.

La définition de la dépense fiscale comme exception à une norme est généralement reconnue, avec des variations selon l'étroitesse de la définition donnée de la norme. Différents critères en président l'interprétation : l'avantage fiscal bénéficie à un secteur, une activité ou une catégorie de contribuables particuliers ; il vise un objectif particulier (autre que l'efficacité du système fiscal) pouvant aisément être assimilé à un objectif susceptible d'être atteint à l'aide d'autres instruments ; le champ de l'impôt en cause est suffisamment large pour permettre de déterminer une valeur de référence appropriée à partie de laquelle l'avantage peut être évalué ; il est possible, d'un point de vue administratif de modifier le système fiscal pour éliminer la dépense fiscale ; enfin, il n'existe par ailleurs aucune disposition du système fiscal qui compense largement l'avantage offert par la dépense fiscale.

2- Les interventions sous forme d'aides fiscales se sont sensiblement développées

- une croissance rapide

Le tome II du fascicule " Voies et moyens " annexé au projet de loi de finances recense le nombre de dépenses fiscales. Leur total est ainsi passé de 342 dans le budget de 1983 à 445 dans celui de 1997, soit une augmentation de 30 %. Les évolutions positives et négatives, résultent de la prise en compte de nouvelles mesures fiscales, de la suppression de mesures temporaires venant à expiration, de la révision ponctuelle des critères d'appréciation de la norme. De fortes augmentations sont ainsi intervenues dans les budgets de 1988 (lois relatives à l'épargne et au mécénat), 1990 (rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune) 1992 et 1993. La disparition de plusieurs mesures dans le budget de 1991 résulte de l'application de la 6 ème directive européenne. Une décélération est à noter depuis le budget de 1994.

La personnalisation croisante de l'impôt sur le revenu a entraîné une progression des divers abattements et exonérations constitutifs de dépenses fiscales : près de la moitié des mesures touchent cet impôt. Un rapport récent 11( * ) a évalué leur coût à plus de 25 milliards en 1995, en ne retenant que les dispositions les plus importantes 12( * ) , à la fois en termes de nombre de contribuables concernés et de montants de la dépense fiscale.

Le montant des dépenses fiscales à vocation économique a ainsi considérablement augmenté entre 1982 et 1992, passant en francs courants de 11,7 milliards à 21 milliards, soit une croissance de près de 80 % et de 17 % en francs constants. Actualisée à 1996, la progression en francs courants et de 142 %, passant de 11,7 milliards à 28,44 milliards.

- l'importance des dépenses fiscales est variable selon les secteurs ou les types d'impositions.

Si les dépenses fiscales portent en majorité sur l'impôt sur le revenu, leur efficacité est limitée par l'étroitesse du champ d'application de cette imposition, qui ne touche que 50,4 % des contribuables. En matière de politique du logement par exemple, le BIPE estimait en 1987 leur part dans le total des aides publiques à 27 % en France, 42 % au Royaume-Uni, 53 % en Allemagne, 66 % en Espagne et 81 % aux Etats-Unis. Cet écart incitait le Conseil des impôts 13( * ) à conclure que la France utilise beaucoup moins l'instrument fiscal en matière de politique du logement que les autres pays développés et recourt davantage aux subventions. Cette singularité doit être appréciée relativement à la forte proportion d'exonérations de l'impôt sur le revenu constatée en France, qui réduit l'impact des aides fiscales aux seules catégories à revenus moyens ou élevés assujetties à l'impôt sur le revenu.

De même, la France est le seul pays développé à étendre l'application du régime du quotient familial à la prise en compte des enfants ; dans les autres pays, la politique familiale recourt dans une proportion plus limitée aux instruments fiscaux.

Ces évolutions liassent toutefois subsister de nombreuses incertitudes, tant dans la définition que dans les modes d'évaluation de la dépense fiscale.

II - L'appréhension du phénomène demeure insuffisante

1- La définition est sujette à controverses

Selon les études conduites par l'OCDE, il apparaît que tous les pays se heurtent à la difficulté de donner une définition formelle de la norme et appliquent des méthodes différentes pour différencier la norme de l'exception.

La définition retenue par la France soulève elle aussi le problème d'une définition stable de la norme, certaines exceptions pouvant, soit du fait de leur nature même soit par suite e leur pérennisation, devenir à leur tour la norme. Le as le plus souvent cité est le quotient familial, devenu un élément indissociable du barème progressif, l'impôt devant tenir compte de la taille du foyer pour appréhender correctement sa capacité contributive. Il en est de même pour des dispositions permanentes comme le régime d'amortissement établi pour favoriser l'investissement 14( * ) . En cas de difficultés, les critères utilisés pour qualifier une mesure de norme sont l'ancienneté de la mesure, son caractère général ou son rattachement à un principe considéré comme une norme par la doctrine.

La définition d'une fiscalité " normale " demeure toutefois malaisée, même si les mesures qui soulèvent des problèmes d'appréciation sont finalement peu nombreuses en pratique, et que la classification des dépenses fiscales conserve une certaine stabilité : une dépense fiscale disparaît généralement du document des Voies et moyens au moment de la mort naturelle de la mesure, plus rarement lors d'un changement de définition de la norme.

Les problèmes de définition apparaissent ponctuellement à travers l'examen de chacune des mesures appréciée u regard de la politique dans laquelle elle s'inscrit. Le secteur du logement, auquel la Cour 15( * ) et le conseil des impôts 16( * ) ont consacré deux enquêtes en 1992, en offre plusieurs illustrations.

Le Conseil considère que ne doivent pas être retenues comme dépenses fiscales les mesures qui sont assez générale, en termes d'opérations ou de contribuables, pour que l'on doive les considérer comme des normes et non des aides accordées par exception à une norme, les mesures qui sont assez anciennes pour s'être incorporées à l'ordre juridique fiscal, ou qui exonèrent une charge nécessaire à l'obtention d'un revenu.

C'est ainsi que la Cour comme le Conseil des impôts ne retiennent pas comme dépenses fiscales plusieurs mesures classées comme telles dans le fascicule " voies et moyens' :

- l'exonération des loyers fictifs des propriétaires occupants : l'occupation d'un logement par son propriétaire entraîne la jouissance gratuite d'un bien. Depuis 1964, une disposition permanente du CGI 17( * ) écarte l'imposition de cette jouissance, à l'instar des pratiques suivies par plusieurs pays développés. Dans un rapport de 1988 sur le financement du logement en milieu urbain, l'OCDE a refusé de prendre en compte ces absences d'imposition dans les évaluations internationales de dépenses fiscales. Cette mesure a de fait disparu de la liste des dépenses fiscales 18( * ) , au motif que 54 % des ménages sont désormais propriétaires de leur habitation et que rien ne justifie que la jouissance d'un appartement constitue un revenu imposable pour le propriétaire.

- la déduction de dépenses qui sont la condition de l'existence ou du maintien du revenu, comme la déduction forfaitaire de 35 et 25 % sur les revenus des propriétés urbaines neuves affectées à usage d'habitation principale, évaluée à 420 millions dans le projet de loi de finances pour 1997, qui couvre les frais de gestion et une partie seulement des charges d'amortissement.

- la Cour observe également que ne doivent pas être classées dans les dépenses fiscales les déductions des dépenses de grosses réparations du montant des revenus fonciers perçus par les propriétaires bailleurs (4,9 milliards dans le PLF pour 1997). De telles déductions, qui constituent une sorte de palliatif à l'absence ou à l'insuffisance de prise en compte fiscale de l'amortissement, qui existe notamment en Allemagne, correspondent à la logique économique puisqu'elles conditionnent le maintien de la valeur d'un actif et du revenu qu'il produit 19( * ) .

Le même raisonnement était conduit pour l'imputation des déficits fonciers sur le revenu foncier ou le revenu global. Cette imputation n'est plus considérée comme une dépense fiscale depuis 1997.

2- L'évaluation du coût des dépenses fiscales se heurte à des difficultés

- les méthodologies en usage

Le rapport de l'OCDE distingue trois méthodes de calcul du " coût " des dépenses fiscales :

- la méthode des pertes de recettes consiste à calculer ex post le montant du manque à gagner sur les recettes ;

- la méthode du gain de recettes, que la France a utilisée jusqu'en 1984, consiste à calculer ex ante l'augmentation de recettes attendue en cas de suppression de l'avantage ; cette méthode implique une estimation des comportements probables en réaction au changement apporté ;

- la méthode de l'équivalent dépenses calcule combien il en coûterait d'offrir un avantage monétaire équivalent à la dépense fiscale au moyen d'une dépense directe, en supposant, comme dans la méthode des pertes de recettes, que les comportements demeurent inchangés.

Tous les pays utilisent la méthode de la perte de recettes, à l'exception des Etats-Unis qui recourent à la méthode de l'équivalent dépenses.

Le calcul peut s'effectuer soit sur la base des recouvrements, soit sur la base des droits constatés.

- les modes d'évaluation appliqués en France

En application de l'article 32 de la loi de finances pour 1980, la liste des dépenses fiscales est publiée chaque année dans le tome II du fascicule " Voies et moyens " annexé au projet de loi de finances. Ce document indique le coût budgétaire des mesures, évalué sur la base des données disponibles pour les deux exercices précédents. Le projet de loi de finances pour 1997 indique ainsi les coûts pour 1995 et 1996. Les servies du ministère des finances estiment que les résultats relatifs à l première année, sans être des résultats constatés, présentent un bon degré de fiabilité Ceux fournis pour 1996 sont plus approximatif, notamment pour des impôts dont les remontées statistiques s'effectuent plusieurs mois après le dépôt des documents budgétaires ; c'est le cas de l'exploitation des déclarations de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés. Les estimations de la deuxième année sont néanmoins révisées dans le projet de loi de finances de l'année suivante.

L'estimation doit être complétée par la présentation dans le tome I des Voies et Moyens des mesures nouvelles qui évaluent les flux positifs et négatifs de recettes résultant des aménagements de droits liés aux mesures de l'année et de l'impact des législations antérieures ; le chiffrage de la variation d'une dépense fiscale d'une année à l'autre est effectué au titre de la mesure nouvelle correspondante.

L'examen de quelques méthodes d'évaluation illustre la variété des bases utilisées ;

- pour les mesures qui touchent l'impôt sur le revenu (emploi d'un salarié à domicile, quotient familial), l'évaluation se fait sur la base d'un échantillon statistique établi à partir des déclarations d'IR (400.000 contribuables pour le quotient familial), auquel sont appliquées des simulations ;

- l'abattement sur la taxe sur les salaires due par les associations et estimé par simulation à partir des données du fichier national de la taxe sur les salaires ;

- le coût de la détaxe applicable au supercarburant sans plomb est calculé sur la base des consommations de carburant, auxquelles est affecté le différentiel de tarif.

La qualité des informations souffre donc de deux limites : la fiabilité des données repose pour les impôts les plus importants sur une base statistique, seule disponible au moment de l'élaboration du projet de loi de finances, et non sur une exploitation exhaustive des recouvrements ; l'évaluation rectifiée pour l'année N n'est disponible que l'année suivante pour l'élaboration du budget de l'année N+2.

Les services du ministère des finances estiment toutefois que les incidences chiffrées des dépenses fiscales sont cohérentes avec le niveau des recettes fiscales constatées sur chacun des impôts et taxes concernés.

- les limites d'une évaluation globale

La totalisation de l'ensemble de ces aides, de l'ordre de 250 milliards, est également sujette à caution. Définie comme le supplément de recettes fiscales qu'aurait perçu le Trésor si la disposition avait cessé de produire ses effets, l'évaluation des dépenses fiscales n'intègre pas les effets secondaires des dispositions fiscales votées. Certaines de ces dispositions peuvent en effet inciter les contribuables à modifier leur comportement, ce qui entraîne d'une part un coût de la mesure plus important que celui chiffré initialement d'autre part un coût ou un gain indirect sur d'autres impôts (les réductions d'impôt au titre des dépenses d'isolation et de grosses réparations devraient entraîner une baisse de la consommation d'énergie et en conséquence réduire les recettes de TIP et de TVA, après avoir fait augmenter celles de TVA lors de la réalisation de ces travaux).

Les travaux de l'OCDE ont également mis en évidence l'interaction entre diverses dispositions fiscales, qui ôte toute fiabilité à l'addition des pertes de recettes spécifiques à chaque mesure ; dans le cas d'un impôt sur le revenu progressif, l'effet cumulatif de plusieurs déductions sera plus important que la somme des pertes de recettes découlant de chacune des mesures, puisque les contribuables bénéficient alors de taux marginaux supérieurs.

L'évaluation du coût des dépenses fiscales trouve une importante limite dans le fait que seule une faible majorité des mesures peut être chiffrée : sur 445 mesures recensées en 1997, seulement 236, soit 53 %, ont pu être évaluées 20( * ) .

Dans son rapport sur Les aides au logement, la Cour soulignait ainsi les incertitudes liées à l'évaluation des aides fiscales : le calcul de l'avantage consenti varie selon que l'on retient un taux moyen ou un taux marginal d'imposition des catégories bénéficiaires. Le Conseil des impôts a ainsi pu relever un écart de plus de 5 milliards en 1991, dû exclusivement à de telles divergences de modes de calcul, entre les évaluations fournies respectivement par la direction de la prévision et par une étude faite par le CEREVE pour le ministère de l'équipement. L'addition d'aides fiscales est également discutable, car certaines aides se chevauchent ou interagissent. Selon les services et les documents, des montants très divers sont ainsi publiés, selon l'extension de la notion de dépense fiscale ou le mode de calcul retenu pour évaluer son coût.

- la rareté des études de coût et d'efficacité

L'appréhension du coût et de l'efficacité des dépenses fiscales et partent nécessairement embryonnaire. Dans son XIème rapport relatif à L'impôt sur le revenu (1990),le Conseil constate l'absence d'évaluation de l'utilité économique et sociale des dépenses fiscales. Pour les aides fiscales à justification économique, le Conseil observe que ce chiffrage est malaisé la fiscalité n'est qu'un des éléments dans le comportement des agents économiques et il est difficile d'en isoler l'incidence ; d'autre part, le cumul des incitations dont le champ d'application se recoupe aboutit sans doute à en atténuer l'efficacité. Quant aux incitations fiscales à justification sociale, la plupart ont pour cible de vrais besoins. Le conseil relève néanmoins que l'outil fiscal et particulièrement inadapté puisqu'il ne touche que les catégories à revenus moyens ou élevés assujettis à l'impôt sur le revenu, soit la moitié de la population, alors même que l'impôt sur le revenu constitue le champ d'application privilégié des dépenses fiscales : les aides aux étudiants accordées sous cette forme ont été ainsi chiffrées à 9,3 milliards en 1996 21( * ) . Bien que moins onéreuses que les prestations et les aides directes, les aides fiscales sont donc contestables du point de vue de l'équité et de l'efficacité.

Seules des études sectorielles détaillées permettent d'approcher la réalité des coûts imputables aux dépenses fiscales. Certains des travaux de la Cour et surtout du Conseil des impôts fournissent des éléments d'information sur les aides liées à certaine taxes ou secteurs d'interventions.

3- Etude de cas : l'analyse des dépenses fiscales par la Cour ou le Conseil des impôts

- les aides au logement

Le Conseil a identifié près de 50 mesures recensées dans l'annexe au PLF. Regroupées par objectif, les aides fiscales touchent :

- les aides à l'accession à la propriété (réduction d'impôt au titre des intérêts d'emprunt, exonération des intérêts et primes des comptes et livrets d'épargne logement)

- les aides à l'investissement locatif (exonération de l'IS des organismes d'HLM, taux réduit de TVA sur les terrains à bâtir)

- les aides au maintien et à l'amélioration de l'habitat (déduction pour grosses réparations).

Le Conseil des impôts propose une totalisation des aides à méthodologie constante pour les années 1980 à 1991, sur la base de l'estimation retenue par la direction de la prévision, le Conseil et la Commission des comptes du logement, à deux suppressions près, l'exonération des intérêts des livrets de caisse d'épargne et la partie du coût de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties à la charge des collectivités locales. L'évaluation montre une relative stabilité en francs constants des dépenses fiscales de 1980 à 1986, puis une accélération ensuite, due probablement aux aides à l'accession à la propriété et à l'augmentation des intérêts exonérés de l'épagne-logement. Ces dépenses passent ainsi de 21,6 milliards en 1980 et 29,2 milliards en 1991 (soit en francs courants 11,4 et 29,2 milliards).

- la fiscalité des entreprises

Dans son IXème rapport consacré à La fiscalité des entreprises (1987), le Conseil des impôts analysait l'impact sur la création d'entreprises de la déduction des intérêts des emprunts contractés pour la souscription au capital des entreprises nouvelles et émettait des conclusions critiques sur cette mesure discriminatoire réservée aux sociétés dont les immobilisations satisfont à certains critères d'amortissement, dont l'effet de levier financier est limité et le coût budgétaire totalement ignoré 22( * ) .

La faiblesse en revanche de la dépense fiscale attachée à l'exonération de la rémunération des sommes inscrites sur les livrets d'épargne entreprise 23( * ) renforce l'intérêt de cette mesure qui draine une épargne importante au profit de la création d'entreprises.

S'agissant enfin des procédures d'incitation fiscale à l'investissement, le Conseil s'interrogeait sur " le bien-fondé de la tendance, observée en France comme à l'étranger, à préférer un allégement indifférencié de la fiscalité des entreprises à des dispositions spécifiques en faveur de l'investissement. (...). Les quelques études empiriques effectuées sur les effets des incitations fiscales à l'investissement en France et à l'étranger ne mettent pas en évidence un impact suffisamment important de ces procédures, au regard de leur coût budgétaire, pour qu'elles apparaissent de manière incontestable comme préférables à un abaissement du taux de l'impôt sur les sociétés ". Il apparaît en effet que les baisses du coût du capital, que ces mesures tendent à favoriser, ne jouent pas un rôle prépondérant dans la décision d'investissement et restent en tout état de cause inférieures aux variations du taux d'intérêt réel. Ces aides ne peuvent avoir un impact significatif que si elles sont massives, donc très coûteuses, et durables, alors qu'elles ont toujours eu en France un caractère conjoncturel.

Dans son XIIème rapport relatif à La fiscalité et à la vie des entreprises (1994), le Conseil des impôts fait une estimation du coût du régime 24( * ) d'exemption provisoire d'imposition des bénéfices des entreprises nouvelles défini aux articles 44 bis (qui disparaît à partir de 1991), 44 quater (jusqu'en 1992) et 44 sexies ; ce dernier dispositif est chiffré à 4 milliards en 1993. Le Conseil conclut que ce régime, souvent modifié, n'a pas trouvé son point d'équilibre et que l'insécurité fiscale qui en résulte est dissuasive pour les chefs d'entreprise. Le Conseil conclut que " l'efficacité de ces dispositifs n'a pu être démontrée, ce qui conduite à l'interroger sur sa pérennité au regard de son coût budgétaire important ".

- l'agriculture

Dans les monographies jointes au rapport annuel sur l'exécution des lois de finances, la Cour complète l'analyse des concours budgétaires par une appréciation des autres interventions, notamment les dépenses fiscales. Dans certains cas en effet, comme l'agriculture, le budget est peu représentatif de la dépense publique. L'annexe Voies et moyens du projet de loi de finances pour 1995 identifiait 32 mesures évaluées à plus de 7 milliards, le régime d'imposition du forfait collectif entraînant à lui seul une moins-values fiscale de 2,2 milliards (1,9 milliards en 1997). Il apparaît donc que des progrès doivent être recherchés non seulement pour évaluer le coût de toutes les mesures mais aussi pour étendre l'étude à l'ensemble du droit existant.

Un récent rapport de la Cour évalue à 364 millions de francs le coût pour l'Etat du régime des SAFER, dont 300 millions de francs du fait de l'exonération des droits d'enregistrement dont bénéficient les opérations foncières réalisées par les SAFER.

Les difficultés constatées dans l'évaluation du coût des aides fiscales pour les finances publiques et de leur impact sur les besoins économiques et sociaux auxquels elles s'adressent mettent en évidence les faiblesses de ces mesures par rapport aux interventions budgétaires directes. Un certain nombre d'effets pervers leur sont en effet attachés.

III- Le recours aux dépenses fiscales comporte des risques

1- Il compromet la maîtrise des finances publiques

La dépense fiscale représente une facilité dangereuse. Elle résulte souvent de décisions plus faciles à prendre que celles d'ouvertures de crédits expressément chiffrés et limitatifs. Elle n'oblige pas à mettre en place des mécanismes administratifs aussi compliqués que pour la distribution d'allocations. Mais les contreparties négatives de cette souplesse sont évidentes : l'absence de rigueur, voire l'impossibilité de leur évaluation, le risque de pérennisation ou de dérive, altèrent la qualité et l'efficacité d'un tel instrument d'intervention.

Le recours massif aux dépenses fiscales fausse l'évaluation des recettes fiscales, tant au stade de la prévision que de l'exécution, sans que l'impact réel de cette incidence puisse être correctement apprécié. Les estimations opérées sur le produit de l'impôt sur le revenu, sur la base de l'exploitation statistique d'un échantillon de contribuables, mettent en évidence le poids croissant des dépenses fiscales, qui progressent plu rapidement que l'assiette de l'impôt 25( * ) . La prévision s'en trouve donc perturbée, du fait d'une moindre corrélation entre l'évolution du revenu net imposable et de l'impôt et celle du PIB.

De même, l'appréciation des dépenses dans un secteur donné doit être complétée par la prise en compte des dépenses fiscales qui viennent compléter les aides budgétaires.

2- Il altère l'information sur les relations entre le budget de l'Etat et les collectivités territoriales

Les exonérations qui frappent certaines taxes locales sont en partie compensées par l'Etat. Mais la notion de dépense fiscale étant exclusivement réservée aux impôts et taxes de l'Etat, aucune évaluation ni recensement de ces mesures n'est opéré .Les exonérations de taxes locales ainsi compensées par l'Etat font l'objet de prélèvements sur les recettes budgétaires de l'Etat.

En 1995, la part des prélèvements à caractère compensatoire recensés dans le rapport sur l'exécution des lois de finances a atteint 53.395,8 millions, dont 10.356,1 millions de compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale, 18.840,9 millions de dotation, de compensation, de la taxe professionnelle et 21.175,3 millions au titre du fonds de compensation de la TVA.

Le XVe rapport du conseil des impôts consacré à La taxe professionnelle (1997) a évalué à 53,5 milliards le coût net pour l'Etat, en 1995, des dégrèvements 26( * ) (34,4 milliards) et des compensations (19,1 milliards) 27( * ) de taxe professionnelle.

Il en est résulté un doublement de la charge totale directe de la taxe professionnelle pour le budget de l'Etat, en francs constants, entre 1988 et 1994, explicable pour l'essentiel (90 %) par l'incidence croissante du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée.

3- Il prolonge et aggrave les insuffisances du système fiscal

Le Conseil des impôts observe ainsi que les mesures applicables à l'impôt sur le revenu contribuent à la complexité du système fiscal. Elles nuisent à la bonne compréhension par le contribuable des règles e taxation et sont, par là-même, source d'inégalités. Leur développement alourdit la gestion de l'impôt par l'administration fiscale, lorsque les obligations auxquelles les bénéficiaires doivent satisfaire sont étalées ans le temps 28( * ) . Enfin, les mécanismes d'incitation font l'objet de fréquentes modifications. L'instabilité législative accentue l'impression de complexité du dispositif que peuvent avoir les contribuables. La multiplication des déductions et réductions d'impôt constitue un facteur puissant de sédimentation législative et réglementaire qui pérennise des avantages qui ont perdu leur justification d'origine ou ne concernent plus qu'un nombre limité de bénéficiaires.

A coût budgétaire donné, l'allégement fiscal d'impôt sur le revenu constitue une technique d'intervention publique d'une efficacité douteuse pur atteindre un objectif économique et répondre à un besoin social.

Dans le secteur de l'immobilier urbain, le rapport du Conseil des impôts souligne la méconnaissance des catégories sociales réellement concernées par les avantages fiscaux, dont il critique la relative inéquité lorsque ces avantages prennent la forme de réductions d'impôts ou sont plafonnés. Le conseil préconisait donc de revenir à une approche restrictive de la dépense fiscale immobilière, d'en préciser les bénéficiaires, d'en évaluer les effets, de réexaminer périodiquement la pertinence de son maintien et de rendre publiques et contradictoires les analyses.

Le Conseil des impôts avait assorti la définition des dépenses fiscales de recommandations tendant à définir des critères pour y inclure ou non des mesures fiscales, à apprécier préalablement leur incidence prévisible et à assurer leur réexamen périodique. Si ce programme a été globalement respecté, des progrès restent à accomplir pour améliorer la connaissance des dépenses fiscales, contrôler leur croissance et améliorer l'information du Parlement, tant pour ce qui concerne les dépenses fiscales sur les impôts et taxes d'Etat que les exonérations de taxes locales compensées par des interventions budgétaires.

QUESTION N° 2

LES " JAUNES "

Les rapports de la Cour des comptes (loi de règlement, sécurité sociale, rapports particuliers) représentent les outils les plus fiables pour apprécier l'état des finances publiques au sens large. Le gouvernement y participe également par l'intermédiaire des " jaunes ". Toutefois, ces documents, non seulement ont été créés au coup par coup -sans vision d'ensemble- mais, de plus , ne semblent pas respecter une méthodologie uniforme. La Cour a été conduite à donner son appréciation sur le " jaune " " ville " mais, malgré les assurances du ministre de l'époque, peu de modifications semblent y avoir été apportées. Il est donc demandé à la Cour s'il est possible de mettre un peu d'ordre dans la présentation des " jaunes " (données en exécution, analyse des écarts prévision-réalisation, abandon du concept non opératoire d'AP + DO, précisions sur les modes de calcul du financement des actions).

REPONSE

Les documents adressés au Parlement en annexe à la loi de finances annuelle sous une couverture jaune répondent à des demandes des assemblées ayant donné lieu à des dispositions législatives qui obligent le gouvernement à les produire. Formulées année après année, portant sur une variété d'objets et concernant des administrations très diverses, ces demandes expriment nécessairement un grand nombre de points de vue. Il appartient aux services du ministère du budget, responsable de la communication des informations complémentaires réunies dans chaque jaune, d'assurer l'harmonisation des réponses transmises.

La Cour n'est qu'exceptionnellement conduite à donner son appréciation sur des documents : elle l'a fait, soit indirectement, en examinant les matières qui y sont traitées, par exemple, dans le rapport sur l'exécution des lois de finances, les informations concernant les rémunérations versées aux fonctionnaires, qui font l'objet du rapport biennal jaune prévu par la loi n° 83-834 du 13 juillet 1983, ou encore les crédits de recherche (la monographie " recherche " évoque en effet le document jaune relatif à l'effort de recherche et du développement), soit directement en en critiquant certains aspects, comme, au rapport public de 1995 dans l'analyse consacrée à l'état récapitulatif de l'effort financier en faveur de la ville et du développement urbain.

La question posée par le rapport général de la commission des finances du Sénat a été pour la Cour une occasion de recueillir auprès des services du ministère du budget une information qui permet une première analyse de l'utilité des jaunes et de la fiabilité des informations qu'ils comportent.

I - LES DOCUMENTS D'ACCOMPAGNEMENT DE LA LOI DE FINANCES, DESTINES A L'INFORMATION DU PARLEMENT, CONSTITUENT UN ENSEMBLE ASSEZ PEU HOMOGENE

A. L'INFORMATION DU PARLEMENT


Les annexes jaunes font partie des documents que le Parlement demande au gouvernement de produire pour son information. Le Parlement exerce ainsi le droit général à l'information (et au contrôle) sur la gestion des finances publiques que lui reconnaît la Constitution. Il est à noter que l'ordonnance du 2 janvier 1959, en son article premier, réserve exclusivement aux lois de finances 29( * ) la possibilité d'édicter " les dispositions législatives destinées à organiser (...) " ce droit 30( * ) . L'article 32 de la loi organique dispose que " le projet de loi de finances de l'année est accompagné (...) d'annexes générales destinées à l'information et au contrôle du Parlement ".

Ce son donc, le plus souvent, les assemblées parlementaires qui ,sur l'initiative d'un parlementaire ou d'un groupe de parlementaires, créent l'obligation de publication de ces documents. Mais il arrive qu'un " jaune " résulte d'une initiative gouvernementale : ainsi le premier ministre a décidé à compter du projet de loi de finances pou r19997 de recenser les moyens d'action extérieure de la France et a choisi le cadre d'un " jaune " budgétaire pour ce faire 31( * ) .

B. UN ENSEMBLE PEU HOMOGENE

Une liste des " jaunes " associés au projet de loi de finances pour 1997 est proposée en annexe. Elle montre que les informations demandées par le Parlement concernent les sujets les plus variés -reflétant parfois les préoccupations de l'heure. Leur périodicité est annuelle ou pluriannuelle. Elles sont à présenter sous différentes formes. On peut tenter de les classer de la manière suivante :

- Les rapports sont destinés à apporter des informations particulières sur un aspect précis du projet de loi de finances. Ce sont, par exemple, le " Rapport sur les taxes parafiscales " ou le " Rapport sur les rémunérations de la fonction publique " ou encore le " Rapport sur la gestion des autorisations de programme ".

- Les états récapitulatifs présentent de manière regroupée les crédits que l'Etat consacre à tel ou tel secteur d'intervention et qui se trouvent dispersés dans les annexes " bleues " de plusieurs budgets ministériels, y compris les charges communes. Ils ont pour objet d'éclairer le Parlement sur un aspect donné de la politique du gouvernement.

Ce sont aujourd'hui les plus nombreux, les plus demandés, susceptibles selon les sujets d'intéresser un public large. On y trouve par exemple le recensement des crédits consacrés à l'action extérieure de la France ou les états récapitulant l'effort financier de l'Etat dans des domaines aussi divers que la politique de la ville, la recherche, la formation professionnelle, les collectivités locales, l'outre-mer, l'environnement ou depuis 1997 les petites et moyennes entreprises.

- Enfin, les listes n'ont pas d'autre objet que de récapituler de la manière la plus exhaustive possible, des séries d'organismes qui entretiennent avec l'Etat les rapports les plus divers et qui ont mérité à un moment donné l'attention du Parlement. Ce sont, par exemple la " Liste des associations régies par la loi du 1 er juillet 1901 ", la " Liste des organismes à caractère privé ayant effectué pour le compte de l'administration des études de quelque nature que ce soit ", ou la récente " Liste des commissions et instances consultatives ou délibératives placées directement auprès du premier ministre ou des ministres ".

C. DES INFORMATIONS D'INEGALE QUALITE

Les informations sont établies par les ministères concernés et vérifiées quant à leur exactitude par la direction du budget quand la source est directement accessible.

La qualité des informations est donc très variable selon les cas. Certaines informations très fines sont peu fiables et l'exhaustivité lorsqu'il s'agit de listes, est difficile à vérifier.

II - UNE MODERNISATION DES DOCUMENTS A ETE ENTREPRISE MAIS L'INTERET DES DOCUMENTS ETABLIS DEMEURE INEGAL

A. UN CONTENU AMELIORE


La modernisation de la présentation des annexes informatives jaunes a été expérimentée en 1994, étendue en 1995 et généralisée à l'ensemble des documents de ce type en 1996.

La novation a consisté à associer à une présentation modernisée (format, graphisme, introduction de la couleur, etc...), une modification sensible des contenus (introduction d'indicateurs divers, de commentaires et d'analyses) pour une meilleure information, plus lisible. Les informations données traditionnellement sous la seule forme de tableaux chiffrés ont été assorties de développements et d'analyses.

La distinction entre " rapports " et " états récapitulatifs " tend de ce fait à s'estomper.

Les ministères responsables de l'élaboration d'un " jaune " rénové, qui implique de leur part une participation plus importante, paraissent s'être attachés à produire un document de meilleure qualité. Les données chiffrées sont vérifiées dans la mesure du possible par les bureaux sectoriels concernés de la direction du budget en liaison avec les bureaux budgétaires des ministères 32( * ) .

Sans attendre les résultats de l'amélioration entreprise, le Parlement a décidé l'adjonction à compter du PLF pour 1997, de trois nouveaux documents : " l'effort financier de l'Etat en faveur des PME ", la " liste des commissions et instances placées auprès du premier ministre ou des ministres " ainsi qu'un état récapitulant le " produit des impositions affectées à des organismes de sécurité sociale ".

B. TOUS LES " JAUNES ", CEPENDANT, NE PRESENTENT PAS LE MEME DEGRE D'INTERET ET L'ON PEUT S'INTERROGER SUR LA NECESSITE DE CERTAINS D'ENTRE EUX, DU MOINS SOUS LEUR FORME ACTUELLE

La qualité de documents tels que le jaune " Relations financières avec l'Union européenne " ou les jaunes " Ville ", " Action extérieure " ainsi que le jaune " Rémunérations de la fonction publique " -dont le " lectorat " ne se limite pas aux seules assemblées parlementaires- ne peut être mise en doute. Mais on peut s'interroger sur l'intérêt que présente, même pour un public restreint et très spécialisé, la publication sous la forme d'annexes budgétaires de documents tels que le " Rapport sur la gestion des AP ", le " Rapport sur la gestion du fonds de solidarité " ou le " Rapport sur l'imposition des plus-values ". Ces informations pourraient être fournies au Parlement sous une autre forme.

Certains documents jaunes " transversaux " sont utiles dans la mesure où ils présentent l'effort financier de l'Etat par domaine d'intervention, voire parce qu'ils proposent une vue différente de l'action de l'Etat complémentaire de celle apportée par les " bleus ". On peut s'interroger en revanche sur le bien-fondé de la publication sous forme d'annexe au projet de loi de finances d'une " Liste des associations " qui ne permet en aucun cas au lecteur d'avoir une vision claire de la réalité du financement public des associations.

Il serait enfin souhaitable d'examiner s'il est justifié de conserver certains documents créés en réponse à des sujets dont le caractère d'actualité a évolué.

*

* *

Conclusion : La diversité des annexes jaunes selon les questions traitées ne se prête guère à des prescriptions méthodologiques communes.

S'il est justifié de valoriser le contenu de certains " jaunes " en améliorant leur présentation, la même démarche ne paraît pas s'imposer s'agissant de documents de moindre intérêt destinés à l'usage d'un très petit nombre de personnes.

En première analyse, et à titre indicatif, plusieurs " jaunes " pourraient être remis en cause au moins dans leur forme avec l'accord des assemblées parlementaires :

- liste des organismes ayant effectué des études pour le compte de l'administration ;

- rapport sur la gestion des autorisations de programme ;

- état récapitulatif des crédits civils concourant à la défense de la Nation ;

- compte tendu d'activité des agences de l'eau ;

- liste des commissions et instances placées auprès du premier ministre ou des ministres ;

- effort social de la Nation et " Produit des impositions affectées à des organismes de sécurité sociale " 33( * ) .

Annexes informatives " jaunes " associées au PLF 1997

Intitulés

Relations financières avec l'Union européenne

Rapport sur les taxes parafiscales

Rapport sur le budget des Assemblées parlementaires

Rapport sur la gestion des autorisations de programme

Rapport sur la gestion du fonds de solidarité

Rémunérations de la fonction publique

Liste des commissions et instances auprès du premier ministre et des ministres 1

Etat récapitulatif des crédits civils concourant à la défense de la Nation

Etat récapitulatif de l'effort financier en faveur de l'outre-mer (deux fascicules)

Effort social de la Nation

Produit des impositions affectées à des organismes de sécurité sociale

Secteur public de la communication audiovisuelle

Etat récapitulatif de l'effort financier de l'Etat en faveur de l'environnement

Compte rendu d'activité des agences de l'eau

Etat récapitulatif de l'effort financier consacré à la ville et au développement social urbain

Etat récapitulatif de l'effort financier en faveur de l'aménagement du territoire

Formation professionnelle

Etat récapitulatif de l'effort financier en faveur des collectivités locales

Action extérieure de la France 1

Aide publique au développement (coopération)

Etat de la recherche et du développement technologique

Effort financier en faveur des PME 1

Etat récapitulatif des fonds de concours

Rapport sur l'imposition des plus-values

Liste des organismes ayant effectué des études pour le compte de l'administration

1 Nouveau

QUESTION N° 3

LES INDICATEURS D'EVOLUTION DES DEPENSES BUDGETAIRES

L'évolution des dépenses budgétaires d'une année sur l'autre fait l'objet de controverses fréquentes en raison de la multiplicité des indicateurs possibles (dépenses ou charges, brut ou net, solde ou masse de certains CST...). La Cour est-elle en mesure de proposer quelques indicateurs statistiques éprouvés au regard de sa compétence et de son expérience ? Dans l'affirmative, il serait demandé de les appliquer aux cinq derniers exercices connus et de mettre en évidence les différences essentielles entre les prévisions et les réalisations.

REPONSE

En matière d'évolution des dépenses budgétaires, les indicateurs éprouvés sont ceux qui, par définition, offrent la garantie d'une certaine permanence. Mais, comme le souligne la commission des finances du Sénat, la tentation existe de multiplier les indicateurs pour mieux saisir une réalité, au risque de ne pas pouvoir effectuer des comparaisons. A l'inverse, il est juste de reconnaître que certains indicateurs traditionnels n'ont jamais permis de véritable comparaison. Quant à la compétence de la Cour, sa dimension juridictionnelle la conduit à s'appuyer, de préférence, sur des indicateurs budgétaires ou comptables dotés d'une base juridique incontestable, plutôt que sur des indicateurs statistiques susceptibles d'interprétation.

Au fond, la question posée est celle de la norme de référence permettant d'apprécier les dépenses budgétaires et leur évolution.

La réponse diffère suivant qu'il s'agit de comparer la prévision ou l'exécution budgétaire.

1) La comparaison des prévisions budgétaires de dépenses d'une année sur l'autre ne concerne pas directement la Cour qui n'est pas chargée de son appréciation.

Tout au plus constate-t-elle qu'invariablement le problème se repose de savoir si la loi de finances initiale de l'année doit être comparée à la loi de finances initiale ou à la loi de finances rectifiée de l'année précédente.

La commission des finances de l'Assemblée nationale rappelle, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 1996, que " la base habituelle est la loi de finances initiale de l'année précédente. C'est la base juridique utilisée pour la confection des annexes bleues par ministère. C'est pourquoi l'analyse détaillée des mesures d'économie, par budget ou par mesure, s'appuie sur la comparaison avec la loi de finances initiale ".

Mais ce principe est remis en cause chaque fois que des changements politiques majeurs entraînent le vote de lois de finances rectificatives importantes comme ce fut le cas en 1993 et 1995. Le gouvernement invoque alors la nécessité d'un parallélisme des formes avec la transposition, en dépenses, de l'évaluation révisée des recettes qui est pratiquée régulièrement. Des solutions différentes ont été retenues dans les années récentes. En 1994, il a paru significatif de se référer au " budget tendanciel " de 1993, c'est-à-dire au budget après remises à niveau, mais avant mesures nouvelles. En 1996, le projet de loi de finances initiale est comparé à la loi de finances rectifiée en août 1995. Quant aux lois de finances initiales pour 1995 et pour 1997, les bases de comparaison retenues sont respectivement la loi de finances initiale de 1994 et celle de 1996, puisque les années en cause n'ont pas connu de collectif majeur.

Retenant donc des bases de comparaison différentes chaque année, les prévisions initiales de dépenses des lois de finances aboutissent ainsi à des indicateurs qui ne sauraient être rapprochés entre eux de manière significative. Ces changements de présentation en matière de dépenses sont sans doute explicables mais peuvent surprendre dans la mesure où on ne les retrouve pas dans les prévisions de recettes qui, elles, ont toujours été fondées sur l'évaluation révisée de la loi de finances antérieure.

La Cour s'étonne aussi que le cadre de présentation utilisé dans l'exposé général des motifs des projets de lois de finances, depuis vingt-cinq ans, continue à faire masse des dépenses du budget général et du solde de tous les comptes spéciaux du Trésor, au risque de neutraliser l'impact budgétaire de toute opération définitive financée sur un compte d'affectation spéciale (par exemple, les dotations en capital aux entreprises publiques), dès lors que, par construction, son solde est nul.

2) La mesure de l'évolution des dépenses budgétaires en exécution entre dans les attributions de la Cour.

En droit, le choix d'un indicateur éprouvé est simple. Il doit permettre, en rapprochant l'exécution du budget tant de la prévision budgétaire que de l'exécution du budget passé, de mesurer à la fois le respect de l'autorisation parlementaire et l'évolution du solde. Telle est d'ailleurs la signification première du rapport sur l'exécution du budget de l'Etat que la Cour produit à l'appui de la loi de règlement. Cette loi ayant pour but de constater et de valider les opérations budgétaires, la Cour, d'une part, commente les résultats obtenus et, d'autre part, examine la régularité des opérations par référence à la loi organique du 2 janvier 1959. Dans cette optique, les données chiffrées produites par la Cour, dans son rapport sur l'exécution du budget, constituent une série, homogène depuis plus de trente ans, sur laquelle le Parlement est invité à se prononcer quand il vote la loi de règlement. Par nécessité juridique de s'articuler avec le projet de loi qu'il accompagne, le rapport de la Cour s'efforce de présenter et de comparer le plus souvent des charges brutes et non des soldes.

Mais des obligations supranationales, comme celles du traité de l'Union européenne, peuvent amener à réviser la norme de référence. En l'occurrence, l'obligation de respecter les critères de convergence de Maastricht, conduit les pays membres à mener une politique d'assainissement et de maîtrise des finances publiques qui doit pouvoir être suivie pendant une durée pluriannuelle et sur une base qui se rapproche de celle de nos partenaires européens.

C'est pourquoi, le Parlement français a choisi de se doter d'un instrument législatif supplémentaire avec la loi d'orientation quinquennale du 24 janvier 1994. Or celle-ci poursuit des objectifs différents de ceux d'une loi de finances, même si son domaine d'application est comparable. En effet, la loi d'orientation quinquennale, contrairement à une loi de finances qui autorise annuellement les dépenses au niveau du chapitre et évalue les recettes ligne par ligne, a pour objet de retracer les grands traits d'un redressement du budget de l'Etat, sur une période de cinq ans, à partir de la stabilisation des prélèvements obligatoires et du freinage de l'évolution es charges budgétaires. De plus, alors qu'une loi de finances doit inscrire ses choix dans le cadre donné par la loi organique, la loi d'orientation quinquennale ne fixe pas de règle contraignante quant aux moyens à mettre en oeuvre au sein de chacune des grandes catégories retenues dans le tableau de projection figurant dans le rapport annexé à la loi.

Dans ce contexte, il ressort que la mesure de l'évolution des charges emprunte deux modes de calcul :

- celui dit " du gouvernement ", centré sur les dépenses du budget général, nettes des dépenses d'ordre relatives à la dette depuis 1994, auquel s'ajoute le solde de tous les comptes spéciaux du Trésor ;

- le mode de calcul retenu par la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui fait droit à la notion de dépenses du budget général, nettes des dépenses d'ordre relatives à la dette, mais qui comptabilise aussi les dépenses, et non le solde, des opérations définitives des comptes spéciaux du Trésor, avant de retenir le solde des seules opérations temporaires.

S'agissant de mesurer l'évolution des charges dans le cadre fourni par la loi d'orientation quinquennale de 1994, la préférence de la Cour va davantage vers cette seconde méthode, plus fidèle à la notion de charges définitives et moins sensible aux variations dans la structure du budget.

Il reste que les dépenses d'ordre venant en atténuation des charges de la dette constituent la notion la plus délicate à apprécier avec rigueur (voir réponse à la question n° 1 posée par l'Assemblée nationale à l'occasion du rapport sur l'exécution du budget de 1993. Assemblée nationale, 1995, n° 2118, page 181). Aussi, la Cour a-t-elle cru nécessaire, dans son rapport sur l'exécution du budget de 1995, page 76, d'établir le tableau des charges définitives de la dette de 1990 à 1995.



QUESTION N° 4

DIFFICULTES D'ARTICULATION ENTRE LE PROJET DE LOI DE FINANCES ET LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SECURITE SOCIALE

La Cour est-elle en mesure de présenter un premier bilan des difficultés d'articulation entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale ?

REPONSE

Il est prématuré de prétendre tirer, à ce stade, un premier bilan des difficultés d'articulation entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. On notera toutefois que les deux projets, bien que préparés selon un calendrier différent, sont pour l'essentiel établis sur les mêmes bases en ce qui concerne les hypothèses macro-économiques.

En outre, le rapprochement entre le projet de loi de finances et le projet de LFSS appelle une particulière attention pour ce qui concerne les dépenses imputées au budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), les dépenses afférentes aux pensions de retraite de la fonction publique et la compensation par l'Etat des exonérations de cotisations sociales pour des motifs divers. Conformément aux dispositions de l'article 6 de la loi du 25 juillet 1994, la Cour vérifie avec une vigilance accrue les conditions dans lesquelles l'Etat s'acquitte envers les régimes sociaux de ses obligations d'employeur. Il est encore trop tôt pour tirer de ces contrôles des diagnostics assurés quant à la fiabilité des prévisions budgétaires concernées.

Cependant, dans son rapport sur l'exécution de la loi de finances pour 1995, la Cour estimait que les efforts de clarification entrepris pour les cotisations patronales d'assurance maladie dans le budget 1995 devaient permettre une bonne prévision des crédits à ouvrir aux budgets ministériels. Elle invitait à les prolonger en matière de cotisations d'allocations familiales qui sont restées quant à elles, déterminées par une méthode forfaitaire.

Pour les compensations d'exonérations de cotisations sociales, les chiffres inscrits tant dans le projet de loi de finances que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale résultent d'un travail effectué en commun par la direction du budget et les services du ministère du travail, remarque étant faite que la direction de la sécurité sociale n'y est pas associée. Une démarche comparable est retenue pour le BAPSA : les chiffres établis par la direction du budget avec le ministère de l'agriculture et la direction de la sécurité sociale pour le projet de loi de finances sont repris dans le projet de LFSS.

QUESTION N° 5

LES REMISES DE DETTES AUX ETATS ETRANGERS

Préciser l'impact budgétaire et comptable des annulations et remises de dettes consenties aux Etats étrangers débiteurs, et en particulier, indiquer l'incidence des transports au découvert du Trésor sur la capacité de financement des administrations publiques.

REPONSE

Le précédent bilan global de l'impact budgétaire et comptable des remises de dettes accordées par la France aux Etats étrangers a été réalisé par la Cour en 1992 et remis au Parlement au titre du règlement du budget de 1990 34( * ) .

Le rapport de la Cour sur l'exécution du budget de l'Etat consacre néanmoins des développements importants dans son chapitre sur les dispositions diverses 35( * ) , sur les remises de dettes consenties dans l'année et qui font l'objet d'articles spécifiques 36( * ) dans la loi de règlement du budget présentée au vote du Parlement.

La multiplication des dispositifs de remises de dettes qui sont passés de 3 en 1990 à 7 aujourd'hui conduit à mesurer leur impact sur les finances publiques. Il s'agit d'examiner la façon dont elles sont retracées dans les comptes de l'Etat au regard de la diversité des procédures budgétaires et comptables mises en oeuvre et de leur incidence sur les différents résultats affichés en termes budgétaire, patrimonial et de comptabilité nationale.

La multiplicité des dispositifs de remises de dettes

Les décisions de remises de dettes par la France qu'elles soient d'origine multilatérale ou bilatérale, son introduites dans le droit français par les lois de finances initiale ou rectificatives puis sont constatées en loi de règlement.

Les 7 dispositifs en vigueur résultent :

- de la résolution 165 S9 du conseil du commerce et du développement de la CNUCED (loi de règlement du budget de 1978) ;

- du sommet du G7 réuni à Toronto en juin 1988 (article 40 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1988) complété par les accords dits Termes de Londres et de Naples ;

- du sommet franco-africain de mai 1989, dit Dakar I (article 125 I de la loi de finances initiale pour 1990, complété par la Conférence de Paris (article 68 I de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1990) ;

- du sommet franco-africain de la Baule en juin 1990 (loi de finances initiale pour 1991 au titre des crédits ouverts au chapitre 44-98 du budget des charges communes) ;

- de la décision du " Club de Paris " du 10 septembre 1990 dite de Conversion de dettes (article 68 III de la loi de finances rectificative pour 1990 complétée par l'article 49 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 1994) pour les pays à revenu intermédiaire dans le cadre de la dette publique bilatérale. La décote affectant la créance se traduit par une annulation partielle de dette ;

- du sommet franco-africain de Libreville d'octobre 1992 visant les pays à revenu intermédiaire de la zone franc dans le cadre d'un fonds e conversion de créances (article 95 de la loi de finances rectificative de décembre 1992) ;

- de la conférence de Dakar de janvier 1994 traitant des problèmes de parité du Franc CFA, dite Dakar II (article 51 de la loi de finances rectificative u 29 décembre 1994) ;

A ces dispositifs s'ajoutent des abandons de créances faisant l'objet d'articles spécifiques de la loi de règlement pour les pays n'entrant dans aucun des accords, multilatéraux ou bilatéraux mentionnés ci-dessus, comme le Mali et le Burkina - Faso en 1994 et le Vietnam en 1995.

L'ensemble des opérations de remises de dettes depuis l'origine, soit 1980, est décrit dans le tableau ci-joint qui recense, pour chacun des accords intervenus, les montants annulés annuellement.

Il ressort de ce tableau un manque d'homogénéité des procédures budgétaires qui varient selon la nature de la créance ou le rôle de l'établissement financier. Ainsi, les opérations sont suivies à la fois ou exclusivement à des comptes spéciaux du Trésor (comptes de prêts) et en dotations budgétaires. Selon les cas et notamment qu'il s'agisse du capital remis ou des intérêts, elles affectent directement ou indirectement le résultat budgétaire. Les comptes de bilan retracent également les remises de dettes qui influent sur le résultat patrimonial. Enfin, elles font l'objet d'un retraitement en comptabilité nationale en vue de la détermination du besoin de financement de l'Etat.

L'impact budgétaire

L'attribution du prêt d'origine, soit directement par le Trésor ou pour son compte par un intermédiaire financier, soit par l'organisme financier à ses propres risques, détermine le suivi budgétaire des remises de dettes.

La nature juridique de la créance et les pays bénéficiaires sont en règle générale précisé dans l'accord qui fixe la date à partir de laquelle l'encours en capital et intérêts est gelé. Les échéances ultérieures figurant au tableau d'amortissement du prêt sont dès lors annulées soit annuellement, soit en fonction du passage devant des instances appréciant les critères d'éligibilité du pays débiteur au rééchelonnement de sa dette (Fonds monétaire international, " club de Paris " des créanciers publics).

L'annulation est étalée dans le temps jusqu'à l'extinction de la dette prévue initialement dans le tableau d'amortissement ou selon un pourcentage fixé dans l'accord (1/3, 50 % ou 2/3 pour l'accord de Toronto modifié par les Termes e Londres et de Naples, puis 80 % à la suite du sommet de Lyon), voire même totale (Dakar).

Mais seul un plafond de dépenses peut être inscrit en loi de finances en ce qui concerne le dispositif Toronto qui prévoit le passage des pays débiteurs devant le Club de Paris. Or, le rythme aléatoire rend les dates de consolidation incertaines alors que le dispositif Dakar, où l'annulation est totale et définitive, ne requiert pus le renouvellement de l'autorisation législative.

Afin d'étalier le coût budgétaire de l'annulation de prêts initialement consentis pour 30 ans, les remises de dettes se traduisent dans les comptes à mesure de la venue des échéances des annuités et seront constatées dans les lois de règlement des budgets jusqu'en 2002 au titre du dispositif CNUCED et 2018 au titre de Dakar I.

Les prêts du Trésor sont retracés au compte 903-07 " prêts du Trésor à des Etats étrangers et à la Caisse française de développement " et au compte 903-17 " Prêts du Trésor à des Etats étrangers pour la consolidation de dettes envers la France " pour les prêts déjà refinancés.

Les opérations suivies au compte 903-07 37( * ) correspondent à des prêts directs du Trésor ou à des prêts gérés aux risques du Trésor par des intermédiaires financiers. Les opérations suivies au compte 903-17 sont gérées par la Banque de France.

En revanche, les prêts accordés par les intermédiaires financiers, non garantis par le Trésor ou sous leur propre responsabilité, font l'objet de dotations ouvertes au budget des charges communes au titre de l'indemnisation d'une annulation décidée par la France.

Ces indemnisations sont retracées :

- pour la Banque française du commerce extérieur (BFCE) 38( * ) au chapitre 14-01, article 90, § 21 " Garanties diverses - BFCE - Annulations de dettes " ;

- pour la Caisse française de développement (CFD, ex Caisse centrale de coopération économique) 39( * ) au chapitre 44-98, article 36, § 13 " Participations de l'Etat au service d'emprunts à caractère économique - CFD - Indemnisations au titre des annulations de dettes ". En effet, l'Etat a statué en lieu et place de l'ex-CCCE en annulant des créances non garanties. D'où l'insertion d'un deuxième alinéa à l'article 40 de la loi de finances rectificative pour 1988 autorisant l'application du dispositif Toronto, renouvelé à l'article 125 III de la LFI pour 1990 selon lesquels " lorsque les prêts ont été consentis sans garantie de l'Etat par la CCCE, celle-ci et indemnisée à hauteur des montants remis ".

L'indemnisation versée à la CFD au titre de la réduction des taux d'intérêts des prêts aux pays à revenu intermédiaire décidée au sommet de la Baule est suivie au § 14 du chapitre 44-98 article 36.

Inscrites aux Titres I et IV du budget des charges communes, les indemnisations, représentatives du capital et de intérêts des dettes annulées, pèsent directement sur le résultat d'exécution budgétaire.

Le montant constaté en 1995 s'élève globalement à 3.820,68 millions dont 3.354,26 millions au chapitre 44-98 et 466,42 millions au chapitre 14-01.

Depuis l'origine les montants atteignent 22.070,41 millions dont 18.616,68 millions au chapitre 44-98 et 3.453,73 millions au chapitre 14-01.

L'appréciation de l'impact budgétaire des opérations enregistrées sur les comptes spéciaux du Trésor est pus délicate à opérer en ce qu'elle n'affecte pas directement le résultat d'exécution budgétaire.

En effet, la remise des échéances de prêts, tant en capital qu'en intérêts, se traduit par une moins value de recettes sur les exercices budgétaires ultérieurs qui auraient dû enregistrer les recouvrements correspondants. Les comptes de prêts 903-07 et 903-17 ne sont pas crédités des remboursements en capital annulés 40( * ) et les recettes non fiscales du budget général ne sont pas davantage crédités des versements d'intérêts annulés.

Il convient néanmoins de constater l'absence de ressources consécutive à la décision de remise de dettes. Elle s'inscrit dans les comptes de l'Etat par le transfert du résultat de l'année au compte permanent des découverts du Trésor autorisé par le Parlement lors du vote de la loi de règlement du budget 41( * ) .

Or, l'article 35 alinéa 2 de la loi organique du 2 janvier 1959 définit le compte de résultat de l'année comme suit :

- le solde du budget général ;

- les profits et les pertes constatés dans l'exécution des comptes spéciaux par application des articles 24 et 28 ;

- les profits et les pertes résultant éventuellement de la gestion des opérations de trésorerie (...).

La remise de dettes, constitutive d'une perte de ressources, entre dans le cadre des dispositions de l'article 24 de la loi organique, alinéa 2 aux termes duquel " sauf dispositions contraires prévues par une loi de finances, le solde de chaque compte et reporté d'année en année. Toutefois, les profits et pertes constatés sur toues les catégories de comptes, à l'exception des comptes d'affection spéciale, sont imputés aux résultats de l'année dans les conditions prévues à l'article 35 ".

Ainsi, parmi les comptes spéciaux dont l'activité e poursuit sur les exercices suivants, les pertes et bénéfices de changes et les remises de dettes ne sont pas reportés. Le solde " comptable " est minoré du montant transporté aux découverts du Trésor.

Le montant des remises de dettes, pour la partie exigible du capital, qui a été transporté aux découverts du Trésor en 1995 s'élève à 1.005,46 millions ; le montant cumulé depuis l'origine s'établit à 3.906,15 millions.

L'impact des remises de dettes sur le résultat patrimonial

Le résultat patrimonial est affecté par les remises de dettes pour la partie en capital.

Faisant suite aux recommandation formulées par la Cour 42( * ) , et conformément à l'article 35 alinéa 2 précité, le montant annulé dot être porté en pertes au compte 678 " Autres charges exceptionnelles " de l'année concernée, dès lors que la loi de finances les a autorisées, avant de proposer le transport aux découverts du Trésor.

En contrepartie, l'actif du bilan qui retrace l'encours des prêts doit être minoré du montant en capital de l'annulation de la créance de la France sur les pays étrangers.

Toutefois, la dispersion sur différents comptes de prêts rendait malaisé le suivi des annulations qui étaient de surcroît confondues avec les autres opérations les affectant. Le regroupement et l'isolement des opérations de remises de dettes dans le bilan de l'Etat fut également recommandé par la Cour.

Ainsi, d'un suivi éclaté aux comptes 251 " Prêts du FDES ", dont 251-1 " Prêts aux risques du Trésor - Prêts par l'intermédiaire d'établissements " et 251-4 " Prêts aux risques des établissements intermédiaires ; au compte 253 " Prêts à l'extérieur " et ses sous coptes et au compte 258 " autres prêts ", l'encours des prêts ayant fait l'objet d'une décision d'annulation et porté depuis 1992 à un nouveau compte 257 intitulé " Prêts inclus dans des accords de remises de dettes au pays étrangers ". Trois comptes divisionnaires doivent retracer l'annulation des créances en application des décisions de la CNUCED, de Toronto et de Dakar.

Le solde du compte au 31 décembre décrit l'encours restant à annuler, soit 4,86 milliards en 1995. Mais ce montant ne reflète qu'une partie de la dette annulable puisque seuls les prêts faisant l'objet d'un échéancier précis et dont l'annulation est certaine ont été portés au compte 257. Ainsi, le regroupement des opérations n'a pas été réalisé dans son intégralité, de même que les remises effectuées dans le cadre des accores de Toronto n'y sont pas retracées. Or, l'aléa que constitue notamment le passage en club de Paris n'est pas un obstacle dirimant au suivi des opérations dès lors que la décision de remise a été prise.

En ce qui concerne les intérêts, leur annulation n'a pas d'impact sur le résultat patrimonial dans la mesure où ils ne sont pas pris en charge dans la comptabilité de l'Etat. Il sont dès lors considérés comme abandonnés, sans écriture comptable.

Les intérêts sur prêts autrefois accordés au titre du FDES étaient pris en charge. La remise de dettes avait pour effet d'annuler la prise en charge à la ligne 404 du compte de recettes non fiscales du budget général 901-540 " intérêts des prêts du FDES. Mais les prêts accordés à la Caisse française de développement sur les crédits du FDES dont le solde a été repris à compter du 1 er janvier 1993 au compte 903-07 " Prêts aux gouvernements étrangers " 43( * ) , ne font plus l'objet de prise en charge, au titre des intérêts, au bilan de l'Etat.

L'impact sur le résultat patrimonial résulte de la constatation de la perte exceptionnelle au compte 678 et de la diminution de l'actif aux comptes 25 " prêts ". Toutefois, les créances de la France sur les pays étrangers dont le principe de l'annulation a été retenu, continuent de figurer à l'actif du bilan de l'Etat en l'absence de comptabilisation de provisions pour pertes comme en comptabilité privée.

L'impact des remises de dettes sur la capacité de financement de l'Etat

L'analyse des remises de dettes aux pays étrangers en termes de comptabilité nationale est confrontée à des difficultés d'interprétation de nature économique.

En effet, les normes de comptabilité nationale, bien qu'autonomes dans la présentation es résultats procèdent néanmoins d'un retraitement des opérations budgétaires. Ainsi, bien que la comptabilité nationale privilégie une optique patrimoniale, la détermination de la capacité de financement de l'Etat dépend de l'articulation opérée avec la comptabilité budgétaire.

Le principe retenu en comptabilité nationale est cohérent avec celui qui prévaut pour l'élaboration de la balance des paiements 44( * ) . Il consiste à enregistrer l'engagement global de la France correspondant à l'encours en capital de sa créance au moment de la décision de remise de dettes puis à constater son annulation pour sa totalité, en une seule fois. Elle est considérée comme un transfert en capital avec le reste du monde.

Les montants des remises de dettes intégrés dans les comptes nationaux correspondent :

- aux accords de Dakar I pour 16,77 milliards en 1990 ;

- aux accords de Dakar II pour 21,37 milliards en 1994.

Le besoin de financement de l'Etat est aggravé d'un égal montant.

Il en résulte selon l'INSEE 45( * ) que, " par rapport aux inscriptions budgétaires qui suivent les échéances de remboursement, les résultats des comptes nationaux font ainsi apparaître dans les dépenses de l'Etat un écart de 22 milliards de francs, correspondant à la partie de la dette qui aurait dû être honorée après 1994 " pour ce qui concerne Dakar II, comme ce fut le as pour Dakar I.

L'ensemble des mécanismes recensés par l'INSEE fait apparaître un montant global de remises de 39 milliards pour les dettes visées par les deux dispositifs " Dakar ".

Leur traduction en une seule fois dans les comptes nationaux dès l'année de la décision de remise, donne une évaluation de l'étalement des charges opéré sur 30 ans en opérations budgétaires.

L'ampleur des remises semble toutefois porter ses fruits puisque l'amélioration des résultats de la Coface consécutive aux accords conclus dans le cadre du fonds monétaire international et du Club de Paris d'une part, la diminution des prêts sur accords de consolidation et des remboursements accrus sur les comptes de prêts d'autre part, attestent la meilleure santé financière des pays à revenus intermédiaires d'Afrique après la dévaluation du Franc CFA et d'Amérique latine comme le Brésil.

HISTORIQUE DES REMISES DE DETTES AUX PAYS ETRANGERS

(en millions de francs)

Année de comptabil.

Remises de dettes CNUCED

Remises de dettes -
Sommet de Toronto

 

Remises de dettes -
Sommet de Dakar I

 
 

Prêts Trésor

Prêts

Trésor

Chap 44-98

Chap 14-01

Prêts

Trésor

Chap 44-98

Chap 14-01

 

Capital

Intérêts

Capital

Intérêt

Cap + int

Cap + int

Capital

Intérêt

Cap + int

Cap + int

1980

75,46

48,88

 
 
 
 
 
 
 
 

1981

37,00

19,70

 
 
 
 
 
 
 
 

1982

37,17

17,70

 
 
 
 
 
 
 
 

1983

41,88

15,93

 
 
 
 
 
 
 
 

1984

121,92

40,21

 
 
 
 
 
 
 
 

1985

51,89

14,12

 
 
 
 
 
 
 
 

1986

46,04

11,65

 
 
 
 
 
 
 
 

1987

40,53

9,44

 
 
 
 
 
 
 
 

1988

38,77

7,49

 
 
 
 
 
 
 
 

1989

50,92

28,38

11,32

0,48

299,79

226,36

26,13

48,17

967,97

 

1990

54,30

22,07

137,38

119,99

72,25

379,50

33,64

180,86

1.760,24

289,21

1991

21,17

3,53

2,10

35,73

27,33

302,05

69,40

146,53

1.832,52

189,03

1992

10,37

2,63

4,03

21,10

8,10

156,70

100,91

140,94

1.835,35

181,18

1993

6,55

2,28

34,76

44,41

12,90

115,28

135,69

135,43

1.859,66

145,13

1994

5,66

2,06

74,23

324,25

4,37

880,46

164,77

129,27

1.863,41

122,41

1995

5,54

1,86

370,37

129,69

0,38

117,93

182,39

122,82

1.775,95

64,53

TOTAL

645,17

247,93

634,19

675,65

425,12

2.178,28

712,93

904,02

11.895,10

991,49

HISTORIQUE DES REMISES DE DETTES AUX PAYS ETRANGERS

Année de comptabil.

Remises de dettes -
Sommet de Dakar II

 

Sommet de la Baule

Conversion de dettes

Sommet de Libreville

 
 

Prêt

Trésor

Chap 44-98

Chap 14-01

Chap 44-98

 

Prêts du Trésor

 

TOTAL

 

Capital

Intérêts

Cap + Int

Cap + Int

 
 

C/903-07&17

Intérêts

C/903-17

 
 

1980

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

124,34

1981

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

56,70

1982

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

54,87

1983

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

57,81

1984

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

162,13

1985

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

66,01

1986

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

57,69

1987

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

49,97

1988

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

46,26

1989

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

1.659,52

1990

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

3.049,44

1991

 
 
 
 

242,90

 
 
 
 
 

2.872,29

1992

 
 
 
 

261,50

 

114,88

 
 
 

2.837,69

1993

 
 
 
 

244,60

 

0,00

 

479,00

 

3.215,69

1994

57,09

449,08

3.733,93

 

235,60

 

791,73

18,98

24,00

 

8.881,30

1995

289,19

75,96

1.405,95

283,96

171,98

 
 

13,00

157,97

 

5.169,47

TOTAL

346,28

525,04

5.139,88

283,96

1.156,58

 

906,61

31,98

660,97

 

28.361,18

QUESTION N° 6

LES RESSOURCES NON FISCALES DE L'ETAT

La liste des ressources non fiscales du budget de l'Etat est-elle exhaustive et dressée de manière pertinente au regard de son intitulé ?

En particulier, la ligne 0309 répond-elle à la définition d'une recette non fiscale.

REPONSE

Les ressources permanentes de l'Etat sont décrites à l'article 3 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Elles comprennent :

- les impôts ainsi que le produit des amendes ;

- les rémunérations de services rendus, redevances, fonds de concours, dons et legs ;

- les revenus du domaine et des participations financières ainsi que la part de l'Etat dans les bénéfices des entreprises nationales ;

- les remboursements des prêts et avances ;

- les produits divers.

La rémunération des services rendus par l'Etat et les autres ressources non fiscales de l'Etat peuvent être instituées par le pouvoir réglementaire Cependant, ces recettes sont prévues et évaluées par la loi de finances de l'année, selon l'article 52 ème alinéa de l'ordonnance.

L'état des recettes non fiscales de l'Etat, bien que développé avec un degré de détail assez fin dans l'état A - Tableau des voies et moyens annexé à la loi de finances, comporte des lacunes : il ne retrace pas certaines recettes extrabudgétaires inscrits ans les comptes de classe 4 des trésoriers-payeurs-généraux, dont l'article 110 de la loi de finances pour 1996 a prévu l'intégration dans le budget de l'Etat.

D'autres recettes, résultant de prélèvements pour frais d'assiette et de recouvrement des impôts et taxes établis ou perçus au profit des collectivités locales et de divers organismes, posent par ailleurs des problèmes de définition. Tel est le cas de la recette inscrite à la ligne 0309.

I- Le recensement des ressources non fiscales de l'Etat

1- Classification

La classification des recettes non fiscales de l'Etat qui figure dans l'évaluation des Voies et moyens annexée au projet de loi de finances distingue 8 catégories de recettes :

- les exploitations industrielles et commerciales et établissements publics à caractère financier,

- les produits et revenus du domaine de l'Etat 46( * ) ,

- les taxes, redevances et recettes assimilées,

- les intérêts des avances, des prêts et dotations en capital,

- les retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat,

- le recettes provenant de l'extérieur,

- les opérations entre administrations et services publics,

- une rubrique divers.

Chaque catégorie comprend différentes recettes individualisées à des lignes spécifiques.

2- Exhaustivité

L'exhaustivité du recensement trouve de sérieuse limites dans l'existence de recettes extrabudgétaires qui viennent alimenter différents budgets (services financiers, agriculture, équipement) et leur permettent de prendre en charge diverses dépenses de rémunération et de fonctionnement.

L'article 110 de la loi de finances pour 1996 a prévu qu' " à compter du projet de loi de finances pour 1997, les recettes et dépenses extrabudgétaires de toutes les administrations d'Etat sont réintégrées au sein du budget général. Dans les budgets précédents, ces ressources transitaient par divers comptes de classe 4 dans la comptabilité des trésoriers-payeurs-généraux, sans être retracées au budget général. Pour la plupart d'entre elles, ces ressources s'assimilent à des redevances pour services rendus et devraient être comptabilisées à ce titre dans la catégorie correspondante des recettes non fiscales.

Ces recettes retracent les contributions des collectivités locales ou de divers organismes tirs pour rémunérer les missions d'ingénierie publique accomplis par les fonctionnaires des ministères de l'agriculture et de l'équipement.

A la demande de la commission des finances de l'Assemblée nationale, la Cour a entrepris une étude sur les dotations extrabudgétaires dont bénéficient ces ministères, ainsi que le ministère de l'économie et des finances.

Pour ce qui concerne le ministère de l'économie et des finances , qui a déjà fait l'objet d'un premier examen par la Cour, plusieurs types de recettes viennent alimenter différents comptes. Les ressources brutes, y compris les mouvements entre comptes, ont représenté, pour les derniers exercices, les montants suivants :

En MF

1992

1993

1994

Compte 466-17

1 401,20

1.652,10

1 735,7*

Compte 466-21

24,22

24,36

38,49

Compte 466-223 et 224

48,29

61,40

65,38

Compte 466-226

130,10

134,56

148,54

Compte 466-24

116,25

118,54

120,96

Total

1 720,06

1.990,96

2 109,07

* dont 869,5 millions en provenance de crédits budgétaires.

1°- le compte 466-17 " Frais de service des comptables du Trésor " est alimenté par des recettes résultant de services rendus, prévues par arrêtés ministériels ou par conventions et provenant, notamment :

- de la gestion comptable de certains organismes, comme les contributions versées par les OPHLM au titre de la tenue de leur comptabilité par un comptable du Trésor et par diverses associations de remembrement et autres associations syndicales relevant du secteur public local ;

- de la réalisation de la paye à façon, sur conventions avec divers organismes, notamment des établissements publics nationaux ;

- d'autres contributions pour services rendus prévues par arrêtés ministériels (frais de recouvrement de produits revenant à l'ONF, paiement de pensions pour le compte de la Caisse autonome de la sécurité sociale dans les Mines, contributions à titre de frais d'exécution du service prélevées sur les taxations de la Caisse des dépôts et consignations, sur les produits provenant des dépôts de fonds des particuliers et des disponibilités courantes des notaires) ou par conventions (avec les caisses de crédit municipal ou la Caisse nationale de prévoyance par exemple).

Le montant de recettes non budgétaires brutes inscrit à ce compte en 1994 a atteint 399,6 millions.

2°- Le compte 466-21 " Opérations d'encaissement et de répartition de remises et commissions sur emprunts et émission de correspondants nationaux " enregistre en crédit les recettes résultant des commissions versées aux trésoreries générales lors de chaque émission ; son solde correspond aux sommes reçues qui n'ont pas encore fait l'objet d'une répartition entre les différents bénéficiaires 47( * ) . Le montant des commissions sur émissions obligatoires placées par le réseau du Trésor public s'est élevé à 38,49 millions en 1994.

3°- Les comptes 466-223 et 466-224 " Rémunérations accessoires de certains agents de l'Etat-Cadastre "

Dans chaque département, la délivrance des extraits et de reproductions de documents cadastraux des communes à cadastre rénové est réalisée par les agents gestionnaires des bureaux du cadastre 48( * ) . Sur ces produits, le Trésor effectue un prélèvement dont le taux et e 80 % ou de 50 % selon qu'il s'agit du produit de la vente de reproductions de plans et images photographiques et de la fourniture du livret cadastral, ou de documents à établir par les agents du service du cadastre.

Une partie du produit des extraits cadastraux est versée au budget général au moment de la perception des droits. Le surplus est porté au crédit du compte de tiers : en 1994, 90 millions ont été versés au budget général sur un produit total de 155 millions. En 1995, 88 millions ont été versés au budget général sur une recette totale de 151 millions.

4°- Le compte 466-226 " Hypothèques "

Les recettes comptabilisées à ce compte proviennent d'une partie des " salaires " perçus par les conservateurs des hypothèques pour les formalités accomplies et les renseignements délivrés en matière de publicité foncière 49( * ) . Est également portée en recette à ce compte la majoration de 50 % du barème des salaires perçue pour la délivrance des renseignements sommaires urgents 50( * ) .

Ces recettes servent à financer des dépenses de rémunérations. Les sommes inemployées sont versées au budget général. En 1994, la part reversée au budget général a atteint 75,3 millions pour un total de ressources de 148,5 millions.

5°- Le compte 466-24 " Masse des douanes "

L'origine de la " masse des douanes ",qui sert à financer des logements pour les agents des douanes, remonte à la Révolution française. Les ressources (120,96 millions en 1994) proviennent de redevances d'occupation, de redevances diverses, de la première mise de masse (droit d'entrée versé par les agents lors de l'attribution d'un premier logement), d'une partie du fonds de concours alimenté par le " revenu du Travail Supplémentaire ", du produit de la vente de biens mobiliers et immobiliers apprenant à la Masse et du revenu du boni général de la masse placé à la Caisse des dépôts et consignations, selon une loi du 16 juillet 1908.

Le rapport sur l'exécution des lois de finances de 1995 a évalué l'ensemble des dépenses extrabudgétaires alimentées par les comptes ci-dessus à 460,75 millions. Les recettes brutes ont atteint, en 1994, 2.109,07 millions.

Il faut cependant signaler que certaines catégories de dépenses non budgétaires de nature indemnitaire qui ne transitent pas par les comptes mentionnés ci-dessus et dont le montant n'est pas connu par la Cour ne sont pas comprises dans les analyses précédente. Parmi ces dépenses, on peut citer :

- la part des " salaires " encaissés par les conservateurs des hypothèque qui est conservée par ceux-ci pour leur rémunération avant affectation du fonds au compte 466-226 ;

- la part des rémunérations à caractère indemnitaire versées aux comptables du Trésor à partir du compte 451, qui ne transitent ni par le compte 466-17 " Frais de service " ni pas le compte 466-21 " Remises et commissions sur emprunts " ; ces rémunérations sont versées au titre de l'ensemble des activités d'épargne des services extérieurs du Trésor, aussi bien au titre de l'activité de préposé de la Caisse des dépôts que dans le cadre de la gestion des fonds particuliers ; ces dépenses représentent une grande partie des rémunérations indemnitaires des comptables du Trésor ;

- des rémunérations au titre de conseil aux collectivités locales (environ 140 MF) ;

- les indemnités versées aux agents-huissiers du Trésor au prorata des actes exécutés (environ 30 MF).

II- Les frais d'assiette et de recouvrement des impôts et taxes établis ou perçus au profit des collectivités locales et de divers organismes (ligne 309)

Les modalités de rémunération de l'Etat, collecteur d'impôts pour le compte de tiers, ont été décrits à l'annexe I du rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1993.

1. Composition des recettes inscrites à la ligne 309

L'essentiel des recettes perçues à ce titre est portée à la ligne 309. Cette recette est composée de plusieurs éléments :

1) Les frais d'assiette et de recouvrement des quatre principaux impôts locaux (taxe d'habitation, taxes foncières et taxe professionnelle). L'Etat assure la collecte des impôts pour le compte des collectivités locales ; en rémunération des frais ainsi supportés, l'Etat, en vertu du code général des impôts (article 1641-II), perçoit un forfait représentatif des frais d'assiette et de recouvrement.

Ce forfait est égal à 4,4 % 51( * ) du montant des impôts dus, y compris la taxe d'habitation, lorsqu'elle concerne l'habitation principale. Le prélèvement est supporté par le redevable, en sus de l'impôt ou de la taxe due ; il ne s'impute d'aucune façon sur le produit revenant aux collectivités ou organismes intéressés, qui perçoivent l'intégralité du produit fiscal voté 52( * ) .

Dans le cas des impôts émis par voie de rôle, et revenant aux collectivités locales, l'Etat assure de plus à celles-ci le recouvrement de la totalité de l'impôt dû et prend donc à sa charge la perte résultant soit des restes à recouvrer, soit des exonérations consenties par le législateur. A ce titre, l'Etat perçoit un forfait complémentaire, représentatif des frais de dégrèvement et de non-valeur. Ce forfait est porté en recettes au budget général sous forme de recette fiscale.

2) Les frais d'assiette et de recouvrement de la taxe locale d'équipement.

L'article 1647-I institue un forfait représentatif des frais d'assiette et de recouvrement sur le montant de la taxe locale d'équipement 53( * ) , fixé à 4 % du montant des recouvrements.

Ce prélèvement s'impute donc sur le produit revenant aux collectivités , et peut s'assimiler à un prélèvement sur recettes. Son produit est porté en recette non fiscale à la ligne 309.

3) Le forfait portant sur la taxe différentielle sur les véhicules à moteur 54( * ) .

L'article 1647-Vb du code général des impôts crée un forfait représentatif des frais d'assiette, de recouvrement, de dégrèvement et de non-valeur, arrêté à 2,5 %. Ce taux a été porté à 3 % à compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1 er décembre 1993 (article 50 de la loi de finances initiale pour 1993).

Ce forfait s'ajoute au montant de la taxe 55( * ) et ne pèse donc pas sur le produit revenant aux collectivités locales.

Le produit encaissé est porté en recette budgétaire à la ligne 309 et vient d'autre part alimenter le fonds de concours 07.2.2.515 des services financiers.

4) Le forfait représentatif des frais d'assiette et de recouvrement des droits d'enregistrement et de la taxe foncière.

L'article 1647 Va du code général des impôts crée un forfait représentatif des frais d'assiette, de recouvrement, de dégrèvement et de non-valeur des impositions transférées aux départements à compter du 1 er janvier 1984 cotées à l'article 1594 A du code général des impôts 56( * ) .

Le forfait est égal à 2,50 % du montant des taxes et droits départementaux ; il s'ajoute au produit de ces impositions et il est recouvré en négligeant les centimes.

Le produit encaissé est porté à la ligne 309.

5) Les forfaits relatifs à la collecte de certaines ressources des organismes sociaux.

L'article 1647 III du code général des impôts institue un prélèvement sur les cotisations sociales perçues au profit des organismes soumis au contrôle de la Cour des comptes, dans les conditions déterminées par les articles L. 154-1 et L. 154-2 du code de la sécurité sociale. Le taux de ce prélèvement et les modalités de remboursement sont fixés par arrêté du ministre de l'économie et des finances 57( * ) .

Le produit de ce prélèvement est inclus dans les montants inscrits à la ligne 309.

2. Qualification des recettes inscrites à la ligne 309

La réponse à la question de savoir si la ligne 309 répond bien à la définition d'une recette non fiscale appelle plusieurs types d'observations.

1) La qualification de la recette comme taxe ou rémunération pour service rendu

Selon une jurisprudence abondante du Conseil constitutionnel, la rémunération de services rendus par l'Etat se distingue de l'imposition, et notamment de la taxe, par plusieurs caractéristiques :

- elles trouvent leur contrepartie directe dans les prestations fournies par le service ;

- il existe une corrélation entre le montant de la rémunération ou de la redevance et la valeur du service rendu. Ce critère dit de l'équivalence a été consacré par le Conseil d'Etat (Syndicat des transporteurs aériens, 21 novembre 1958) et par le Conseil constitutionnel (92 L : droits de port et de navigation).

Le Conseil constitutionnel a ainsi qualifié de rémunération pour services rendus :

- les droits et taxes perçus à l'occasion de la visite des musées nationaux (décision n° 38 L du 10 mars 1966) ;

- les revenus tirés de la publicité par l'ORTF (décision n° 68-50 L du 30 janvier 1968) ;

- le remboursement des frais de scolarité à l'Ecole polytechnique (décision n° 69-57 L du 24 octobre 1969) : ce remboursement trouve sa contrepartie directe dans des prestations fournies par le service ;

- le prélèvement pour frais d'administration, de vente et de perception sur le montant des sommes et produits de toute nature recouvrés par le service des domaines pour le compte d'établissements ou de tiers (décision n° 80-118 L du 2 décembre 1980) ; ce prélèvement a pour objet de couvrir les dépenses afférentes aux prestations fournies par le service des domaines et a ainsi le caractère d'une rémunération pour services rendus ;

- la redevance d'assainissement de l'eau : son assiette est directement liée au volume d'eau prélevé par l'usager du service d'assainissement et son produit est exclusivement affecté aux charges de fonctionnement et d'investissement du service ; ces particularités confèrent à l'élément de la redevance d'assainissement le caractère d'un prix versé en contrepartie d'un service rendu (décision n° 83-166 DC du 29 décembre 1983).

En revanche, les redevances perçues par les agences financières de bassin sont des impositions (décision n° 82-124 L du 23 juin 1982) de même que la redevance affectée aux dépenses résultant du contrôle exercé par l'administration sur les offices d'habitation à loyer modéré (décision n° 77-100 du 16 novembre 1977).

Selon la jurisprudence du Conseil, les critères qui distinguent une taxe sont les suivants :

- la taxe peut être perçue même sur celui qui s'abstient de profiter du service ;

- son montant est sans rapport avec le coût du service (60 DC du 11 août 1960).

Par ailleurs, les procédures particulières prévues pour le recouvrement et la répartition d'une redevance sont des mécanismes financiers et comptables sans influence sur sa nature juridique de taxe parafiscale (DC 80-126 du 30 décembre 1980).

En l'espèce, la question se pose de la nature exacte du service rendu par l'Etat aux collectivités, qui dépasse la simple opération technique de collecte pour s'étendre à des opérations d'assiette et de contrôle qui mettent en jeu l'égalité des citoyens devant l'impôt. Conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel (décision n° 77-100 du 16 novembre 1977), qui a classé comme imposition la redevance affectée aux dépenses résultant du contrôle exercé par l'administration sur les offices d'habitation à loyer modéré, considérant que le produit de cette redevance n'est pas uniquement la contrepartie d'un service rendu, la rémunération des opérations d'assiette et de recouvrement peut être considérée comme une imposition et non comme une redevance pour service rendu.

En cas d'assimilation à une redevance, le critère de la corrélation entre le montant de la rémunération ou de la redevance et la valeur du service rendu serait en revanche plus difficile à établir, puisque cette rémunération est assise sur la base d'un pourcentage du produit de l'impôt et non sur les coûts de gestion supportés par l'Etat dans ses opérations de collecte d'impôts pour le compte de tiers. Cette base est rendue encore plus incertaine par le mode de répartition forfaitaire entre impôts d'Etat et impôts locaux en vigueur jusqu'au budget de 1995.

Toutefois, le Conseil constitutionnel a bien reconnu comme rémunération de services rendus le prélèvement pour frais d'administration, de vente et de perception sur le montant des sommes et produits de toute nature recouvrés par le service des domaines pour le compte d'établissements ou de tiers (décision n° 80-118 L du 2 décembre 1980). En l'absence de données comptables sur les coûts de gestion des administrations rapportés à leurs différents types d'action, une autre base est difficilement envisageable.

2) L'incidence du mode d'imputation des frais sur la nature de la recette

La plupart des recettes qui alimentent la ligne 309 résultent de forfaits qui s'imputent en plus du produit de la taxe, à l'exception du forfait perçu sur le recouvrement de la taxe locale d'équipement, issue d'un prélèvement sur le produit de la taxe. C'est donc le contribuable qui en supporte la charge, les collectivités et organismes percevant l'intégralité du produit fiscal voté. La notion de redevance s'en trouve donc vidée de son sens, puisque le bénéficiaire du service rendu n'en supporte pas la charge. On se rapproche dès lors de la définition d'une taxe, perçue selon le Conseil constitutionnel même sur celui qui s'abstient de profiter du service, alors que les caractéristiques de la redevance, qui doit trouver sa contrepartie directe dans les prestations et respecter une corrélation entre son montant et la valeur du service rendu, sont perdues de vue.

3) L'incidence du mode d'affectation des recettes

Une partie des sommes ainsi prélevées est affectée à la prise en charge de frais de rémunérations et de fonctionnement des services financiers, par la voie de l'assimilation de certaines recettes de caractère non fiscal à des fonds de concours pour dépenses d'intérêt public, sur le fondement de l'article 19, 2 ème alinéa, de l'ordonnance du 2 janvier 1959. Cette assimilation résulte de la loi n° 49-1034 du 31 juillet 1949, dont l'article 6 établit que " les sommes retenues aux collectivités locales depuis le 1 er janvier 1949 au titre des frais d'assiette et de perception sont affectées, dans les conditions qui seront déterminées par arrêté du ministre des finances et des affaires économiques, au remboursement des dépenses de matériel et à la rémunération des travaux spéciaux accomplis par les agents chargés de l'assiette, du contrôle et du recouvrement des taxes locales ".

Les sommes ainsi affectées trouvent donc la qualification de recettes de caractère non fiscal par le dispositif législatif qui les assimile à des fonds de concours. Cette affectation ne touche cependant qu'une partie des recettes inscrites à la ligne 309. La part de la recette liée aux frais d'assiette et de recouvrement des impôts locaux fait en effet l'objet d'une réfaction, plafonnée à 40 % du montant de la recette, destinée à alimenter le fonds de concours des services financiers.

Le tableau ci-après récapitule les montants totaux encaissés et la part du prélèvement au profit du fonds de concours des services financiers.


 

1994

1995

Frais liés aux quatre impôts locaux

13.101,98

13.799,74

Prélèvement au bénéfice du fonds de concours

50295,66

5.148,82

Autres frais

1.101,64

1.015,68

Total (hors prélèvement)

8.907,96

9.666,69

Ces observations mettent en évidence les incertitudes attachées à la nature exacte des recettes inscrites à la ligne 309, qui semblent relever plutôt d'impositions que de redevances pour services rendus.



1 Lettre de l'OFCE n° 142 - 17 juillet 1995.

2 Rapport entre la variation des recettes fiscales et la variation du PIB

3 A ce titre, votre commission des finances a souhaité obtenir de la Cour des comptes des " indicateurs statistiques éprouvés " retraçant l'évolution des dépenses budgétaires (voir réponse à la question n° 3)

4 En loi de finances initiale pour 1995, 11 budgets connaissaient une diminution de leurs crédits supérieure à 5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1994, et 5 budgets une réduction de 10 % et plus. Au total, les crédits ouverts pour les budgets civils s'élevaient, en loi de finances initiale, à 86,2 milliards de francs, soit une diminution de 3,3 %.

5 Sur l'ensemble de ces questions, se reporter au rapport de votre rapporteur général (n° 391 - 1994-1995) et notamment aux pages 162 à 166 du tome I.

6 Cette perte très significative dans son ampleur résultait d'une part, à hauteur de 19 milliards de francs, de la suppression du décalage d'un mois dans le remboursement de la TVA et, d'autre part, pour 110 milliards de francs, de la prise en charge par l'Etat de la dette de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

7 L'amende de M. Nucci est en cours de versement, par mensualités, les demandes en décharge de responsabilité et en remise gracieuse de l'intéressé ayant été rejetées par décision ministérielle du 10 avril 1997. S'agissant de M. Chalier, aucun recouvrement n'a pu être opéré, en raison de sa totale insolvabilité. Quant à l'ancien chef du bureau de l'ordonnancement, il a obtenu une remise gracieuse par décision ministérielle du 10 avril 1997.


8 A ce titre, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances en vue du règlement du budget de l'exercice 1995, la Cour constate qu'en application du contrat de plan 1995-1997 entre l'Etat et La Poste, la rémunération allouée à la Poste pour la collecte des fonds des comptes chèques postaux est "diminuée de 0,4% en rémunération de la garantie de l'Etat aux dépôts sur les comptes courants postaux". La Cour estime qu'il s'agit d'une contraction irrégulière et qu'un texte réglementaire permettrait de confirmer l'existence d'une garantie de l'Etat sur la totalité des avoirs des déposants et la perception d'une rémunération. La Cour ajoute que ceci permettrait de trouver une solution d'ensemble à l'écart existant entre les comptes de l'Etat et ceux de La Poste.

9 Voir com mentaire de l'article 15 du présent projet de loi

10 Ce rapport, qui constitue une actualisation d'une étude précédente de 1984, compare les pratiques des pays membres en matière de définition et de chiffrage des dépenses fiscales et examine la couverture, la présentation et l'utilisation des comptes de dépenses fiscales dans 14 de ces pays : Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Irlande, Italie, Pays-Bas, Portugal et Royaume-Uni.

11 Etudes des prélèvements fiscaux et sociaux pesant sur les ménages rapport au ministre du budget de B. Ducamin, R. Braconnier et R. Briet ,la documentation française, Paris, 1996.

12 Ont été retenues pour l'évaluation, sur la base des données fournies par le service de la législation fiscale :

- 6 mesures de soutien au bâtiment, pour 12,5 milliards en 1994 (dont les réductions d'impôt au titre des intérêts d'emprunt pour l'habitation principale, des grosses réparation et de l'investissement locatif),

- 3 mesures liées aux dons aux oeuvres et à des activités d'intérêt général (1,57 milliard),

- 5 mesures de soutien à la création d'entreprises ou à l'emploi, soit 3,36 milliards (dont la souscription au capital de sociétés nouvelles et l'emploi d'un salarié à domicile),

- 5 mesures de soutien à une zone ou à une activité spécifique (1,97 milliard) , concernant les DOM-TOM, les parts de SOFICA et l'adhésion à un centre de gestion agréé,

- 5 mesures d'incitation à l'épargne financière (5,8 milliards).

13 XIIème rapport relatif à la fiscalité de l'immobilier urbain 1992.

14 IXème rapport du Conseil des impôts relatif à la fiscalité des entreprises, 1987.

15 Les aides au logement dans le budget de l'Etat (1980-1993), 1994 Annexe II : Note sur la fiscalité du logement.

16 XIIème rapport relatif à la fiscalité de l'immobilier urbain Chapitre IV : les dépenses fiscales immobilières.

17 L'article 15 dispose que " les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu ".

18 Cette exonération a disparu de la liste des dépenses fiscales à compter du projet de loi de finances pour 1996. Elle était évaluée ans le PLF 1995 à 13,7 milliards.

19 Le service de la législation fiscale considère au contraire que ces dépenses, qui contribuent dans la généralité des cas à revaloriser le patrimoine immobilier, devraient dès lors être amorties par le biais de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers Leur déduction immédiate constitue donc une dérogation à la norme.

20 En 1983, 165 mesures sur un total de 342 étaient évaluées, soit une proportion de 48 %.

21 Ces aides prennent dans le budget de 1996 4 formes :

- majoration du quotient familial pour enfants étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents : 6.400 millions,

- réduction d'impôt pour frais de scolarité des enfants poursuivant des études supérieures : 850 millions,

- déduction d'une pension alimentaire versée à un enfant majeur étudiant : 2.000 millions,

- avantage minimum en impôt (au titre de la réduction d'une pension alimentaire) : 80 millions.

22 Cette mesure n'est pas chiffrée dans l'annexe au projet de loi de finances.

23 Cette dé "pense, bien que non chiffrée dans le projet de loi de finances, a été évaluée par le Conseil à 19 millions en 1987 : sur la base du taux de rémunération des livrets au 1 er janvier 1987, le montant des intérêts exonérés ne représente que 3 % de celui de l'épargne moyenne annuelle, le manque à gagner au titre de l'impôt sur le revenu étant encore bien inférieur.

24 Cette estimation du coût est calculée forfaitairement à partir d'hypothèses aléatoires du nombre annuel d'entreprises bénéficieras et du coût moyen d'un dossier. Le résultat n'est donc qu'indicatif.

25 En 1995, les traitements et salaires de 1994, qui constituent l'essentiel de l'assiette de l'impôt, augmentent de 1,7 %, tandis que l'ensemble des abattements spéciaux et charges déductibles progresse de 5,2 % et les réductions d'impôts de 5,4 % (Rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1995).

26 Le mécanisme le plus coûteux (31,2 milliards) est celui du dégrèvement lié au plafonnement en fonction de la valeur ajoutée qui conduit l'Etat à devoir prendre en charge 50 % de tout augmentation d`un point de taxe professionnelle.

27 L'Etat assume le coût des compensations dues aux diminutions de bases (18 milliards) dans le cadre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (les principales mesures concernées sont l'abattement général des base de 16 % et la réduction pour embauche et investissement).

28 Par exemple l'engagement de louer un logement nu à usage de résidence principale pendant 9 ans.

29 Y compris la loi de règlement.

30 Le Conseil constitutionnel censure les " cavaliers " législatifs autant que les " cavaliers " budgétaires. C'est ainsi qu'il juge (CC. Décision du 26 janvier 1995) que le législateur ordinaire a empiété sur le domaine du législateur financier lorsque le premier a introduit dans la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire un article prévoyant qu'il serait transmis au Parlement à l'occasion du débat budgétaire " un état récapitulatif des dépenses de l'Etat consacrées à la mise en oeuvre de sa politique d'aménagement ".

31 L'actuel " jaune " " Action extérieure de la France " se substitue aux quatre " jaune " : " Action extérieure ", " Action culturelle ", " Action européenne ", " Francophonie ".

32 Dans le même temps, les tâches d'élaboration et de vérification des documents " blancs " dits " présentation du budget sous forme de budgets de programme " ministériels paraissent avoir été dans beaucoup de cas allégées ou abandonnées.

33 En vertu des textes actuellement en vigueur, " l'effort social de la Nation " est aujourd'hui d'abord une annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale ; mais le budget de l'Etat continue à y contribuer.

Existent par ailleurs un " jaune " concernant le " Produit des impositions affectées à des organismes de sécurité sociale " et un rapport " blanc " dit " Contribution de l'Etat au financement de la sécurité sociale " établi en application de l'article 33 de la loi de finances rectificative pour 1995 (n° 95-885 du 4 août 1995) modifié notamment par l'article 3-V de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

Les problèmes soulevés par la coordination des documents seront évoqués dans le rapport présenté en 1997 par la Cour des comptes sur la sécurité sociale.

34 Cf. Rapport n°2786 du 11 juin 192 de la commission des finances de l'Assemblée nationale portant règlement définitif du budget de 1990. Réponse à la Cour à la question n° 11, page 247.

35 Cf. Rapport de la Cour sur l'exécution des lois de finances pour 1995, page 571.

36 Cf. Projet de loi portant règlement définitif du budget de 1995 : articles9.III et 15 ; Annexe VII à l'exposé des motifs.

37 Le fonctionnement des comptes 903-07 et 903-17 est décrit dans la réponse n° 12 à l'Assemblée nationale sur le budget 1990 et dans la réponse n° 9 au Sénat sur le budget 1992.

38 Cf. Article 30 de la loi de finances rectificative n° 81-784 du 3 août 1981 qui a autorisé le Trésor à garantir les prêts accordés par la BFCE aux Etats étrangers ans le cadre d'accords de consolidation signés avec les Etats.

39 Décret n° 92-1176 du 30 octobre 1992 portant création de la CFD.

40 L'article 29 alinéa 2 de la loi organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances précise : " Le montant de l'amortissement en capital des prêts de l'Etat est pris recettes au compte de prêts intéressé ".

41 Cf. dernier alinéa de l'article 35 de la loi organique précitée.

42 Cf. Rapport de la Cour des comptes sur l'exécution du budget de 1990, pages 217 & 218.

43 Cf. article 80 III de la loi de finances initiale pour 1993.

44 Conformément aux dispositions préconisées par le fonds monétaire international (4 ème manuel).

45 Cf. Rapport sur les comptes de la Nation 1994. Tome II du PLF pour 1996, page 10.

46 Le titre II a été profondément modifié à partir du budget de 195 avec l'intégration des produits de la privatisation auparavant affectés au budget général.

47 Les mécanismes d'allocation des remises et commissions sur emprunts du Trésor résultent d'un arrêté du ministre des finances du 10 novembre 1960 et d'une instruction de la comptabilité publique du 5 janvier 1961.

48 Cette activité donne lieu, en application du décret n° 46-1949 du 5 septembre 1946 à un paiement par l'usager dont les tarifs sont fixés par décision ministérielle.

49 Ce régime a une origine ancienne, remontant à la loi du 21 ventôse an VII et plus récemment à une loi du 30 avril 1921.

50 Décrets n° 66-357 du 8 juin 1966 et 92-155 du 20 février 1992.

51 La majoration de 0,4 ù instituée par l'article 59 de la loi du 30 juillet 1990 au titre de la révision des évaluations cadastrales s'est appliquée aux impositions établies au titre des années 19991 à 1995. Cette disposition a été pérennisée par l'article 19 de la loi de finances initiale pour 1996.

52 Article 1644 du code général des impôts. Les sommes à percevoir par l'Etat en vertu de l'article 1641 sont ajoutées au produit des impositions directes devant revenir aux collectivités locales et organismes divers.

53 La taxe locale d'équipement est établie sur la construction, la reconstruction et l'agrandissement des bâtiments de toute nature. Elle est instituée de plein droit dans les communes de plus de 10.000 habitants et les communes de la région parisienne précisée par décret ; elle est instituée par délibération du conseil municipal dans les autres communes. Elle a le caractère d'une recette extraordinaire.

54 Taxe perçue au profit des départements autres que la Corse (article 1599 C) et au profit de la collectivité territoriale de Corse (article 1599 nonies).

55 Sous réserve des corrections résultant de l'arrondissement au franc pair le plus proche (véhicules de plus de cinq ans et de moins de vingt ans) et en négligeant les centimes (véhicules entre vingt et vingt-cinq ans). Les différences résultant de l'arrondissement des tarifs viennent en augmentation ou en diminution du produit des sommes revenant à l'Etat pour frais d'assiette et de recouvrement (article 1599 I du code général des impôts).

56 - Les droits d'enregistrement ou la taxe de publicité foncière exigibles sur les mutations à titre onéreux d'immeubles ou de droits immobiliers situés sur leur territoire ;

- La taxe de publicité foncière perçue en application de l'article 663 lorsque les inscriptions, décisions, actes, attestations ou documents mentionnés à cet article concernent des immeubles ou des droits immobiliers situés sur leur territoire.

57 Par arrêté du 9 avril 1991, le taux de prélèvement pour frais d'assiette et de perception opéré sur le produit de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine affectée à la Caisse nationale d'allocations familiales a été fixé à 0,5 %.



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