Proposition de loi visant à modifier l'article L. 255 du code électoral

DELEVOYE (Jean-Paul)

RAPPORT 208 (98-99) - commission des lois

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Table des matières




N° 208

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 10 février 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi de MM. Jacques OUDIN, Charles CECCALDI-RAYNAUD, Charles de CUTTOLI, Luc DEJOIE, Jean-Paul DELEVOYE, Patrice GÉLARD, Lucien LANIER, René-Georges LAURIN, Paul MASSON, Jean-Pierre SCHOSTECK et Alex TüRK visant à modifier l'article L. 255 du code électoral ,

Par M. Jean-Paul DELEVOYE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir le numéro :

Sénat : 303 (1996-1997).

Elections et référendums.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le 10 février 1999 sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Jean-Paul Delevoye, la proposition de loi visant à modifier l'article L. 255 du code électoral.

Elle a décidé de proposer le transfert du conseil général au préfet du pouvoir de décision en matière de sectionnement électoral d'une commune (en dehors du cas de fusion de communes), pour les élections municipales, afin de supprimer une tutelle d'une catégorie de collectivités territoriales sur une autre catégorie de collectivités territoriales, laquelle semble contraire aux principes ayant présidé aux lois de décentralisation.

Mesdames, Messieurs,

Le sectionnement électoral d'une commune est décidé par le conseil général, sauf dans le cas d'une fusion de communes.

La proposition de loi qui nous est soumise, présentée par M. Jacques Oudin et plusieurs de ses collègues, tend à transférer du conseil général au préfet le pouvoir de décision en matière de sectionnement (hormis le cas de fusion de communes) afin de supprimer un cas de tutelle d'une catégorie de collectivités territoriales sur une autre catégorie de collectivités, qui semble contraire à l'esprit des lois de décentralisation .

I. LES DISPOSITIONS EN VIGUEUR

Le principe suivant lequel l'élection des membres du conseil municipal se déroule dans une circonscription électorale unique (la commune elle-même) est affirmé :

- pour les communes de moins de 3.500 habitants, par le premier alinéa de l'article L. 254 du code électoral

- pour les communes de plus de 3.500 habitants, par le premier alinéa de l'article L. 261 de ce code.

La loi prévoit cependant deux hypothèses dans lesquelles la commune peut être divisée en sections ou secteurs dont chacun élit un nombre déterminé de conseillers :

- elle organise le sectionnement à Paris, Lyon et Marseille (deuxième alinéa de l'article L. 261 du code précité) ;

- elle permet, à des conditions qu'elle fixe, le sectionnement électoral dans les communes de moins de 30.000 habitants , en distinguant le cas général de celui plus particulier de la fusion de communes (articles L. 254 à L. 255-1 et L. 261, troisième alinéa, du code électoral).

Selon les informations communiquées à votre rapporteur par le ministère de l'Intérieur, 84 communes totalisant 741 308 habitants, ont fait l'objet d'un sectionnement électoral.

A. LA DIVISION D'UNE COMMUNE DE MOINS DE 30 000 HABITANTS EN SECTIONS ÉLECTORALES

Pour les communes de moins de 3 500 habitants, la procédure est décrite aux articles L.254 à L.255-1 du code électoral. Pour celles dont la population est comprise entre 3 500 et 30 000 habitants, l'article L. 261 de ce code renvoie aux mêmes articles.

1. Conditions de fond

Selon l'article L. 254 du code électoral, une commune peut être divisée en sections électorales, à la condition qu'elle se compose de plusieurs agglomérations d'habitants distinctes et séparées.

Chaque section doit être composée de territoires contigus.

2. Procédure

Aux termes de l'article L. 255 du code électoral, le sectionnement électoral peut être proposé par le préfet, un conseiller général, le conseil municipal ou des électeurs de la commune concernée.

La décision appartient au conseil général .

Aucune décision en matière de sectionnement ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de six mois à compter de la demande, pendant lequel une enquête est ouverte à la mairie de la commune intéressée et le conseil municipal consulté .

Le nombre de conseillers municipaux élus par chaque section est proportionnel à celui des électeurs inscrits, aucune section ne pouvant cependant avoir moins de deux conseillers à élire.

Les sectionnements ainsi opérés subsistent jusqu'à nouvelle décision. Un tableau de ces opérations est dressé chaque année par le conseil général au cours du dernier trimestre de l'année.

La décision du conseil général créant, maintenant, modifiant ou supprimant un sectionnement électoral peut être contrôlée par le juge administratif, qui vérifie, outre le respect des conditions légales, que les motifs de la décision ne sont entachés ni d'une erreur de droit, ni d'une erreur manifeste d'appréciation et qu'ils ne reposent pas sur des faits matériellement inexacts (Conseil d'Etat, 7 janvier 1991 : commune de Saint-Avold).

B. LES FUSIONS DE COMMUNES

En cas de fusion de communes, l'article L. 255-1 du code électoral permet à chacune des anciennes communes de constituer de plein droit, sur sa demande , une section électorale, sauf dans le cas particulier de la commune associée dont le conseil municipal a opté pour la création d'un conseil consultatif élu, dans les conditions fixées par les articles L.2113-21, L.2113-26 et L.2113-17 et suivants du code général des collectivités territoriales.

Le nombre des élus de chaque commune associée est proportionnel à sa population, chacune d'entre elles étant représentée par au moins un conseiller. Dans le cas d'une commune associée dotée d'un conseil consultatif, le nombre des membres de ce conseil est déterminé selon les mêmes critères de population que pour un conseil municipal.

La procédure de droit commun, décrite ci-dessus, n'est pas applicables aux communes associées et le conseil général n'a donc pas de décision à prendre dans ce cas .

Aussi, la proposition de loi ne s'appliquerait-elle pas en cas de fusion de communes.

II. LA PROPOSITION DE LOI : SUPPRIMER UNE TUTELLE D'UNE COLLECTIVITÉ TERRITORIALE SUR UNE AUTRE COLLEC-TIVITÉ TERRITORIALE

A. LA MOTIVATION DE LA PROPOSITION DE LOI

Le pouvoir de décision du conseil général en matière de sectionnement électoral était déjà inscrit à l'article 12 de la loi du 5 avril 1884 sur l'organisation municipale.

Ce pouvoir n'a pas été remis en cause par les lois de décentralisation, la rédaction en vigueur de l'article L. 255 précité du code électoral (deuxième et troisième alinéas) procédant de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions.

Pourtant, une intervention, même indirecte, du conseil général dans les conditions d'élection des membres d'un conseil municipal apparaît contraire à l'esprit des lois de décentralisation, dans la mesure où elle semble donner, de fait, à une collectivité territoriale un pouvoir de tutelle sur une autre collectivité territoriale .

Aussi, la proposition de loi tend-elle à transférer la décision de sectionnement électoral du conseil général au préfet et comporte-t-elle un aménagement de la procédure en conséquence .

L'Assemblée des présidents de conseils généraux et l'Association des maires de France ont exprimé un avis favorable au principe de ce transfert de compétence.

B. LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI INITIALE

La proposition de loi ne concerne pas le sectionnement électoral résultant d'une fusion de communes.

Son article unique ne modifierait pas les conditions de fond fixées par l'article L. 254 du code électoral mais seulement la procédure de décision (article L. 255 du même code).

Le sectionnement serait décidé par le préfet , au lieu du conseil général.

La proposition pourrait en être formulée par un conseiller général, le conseil municipal, des électeurs de la commune, le préfet lui-même, comme actuellement, mais aussi par le conseil général, son pouvoir de décision étant remplacé par un droit d'initiative.

Le délai minimum de six mois entre la demande et la décision, ainsi que l'enquête ouverte à la mairie de la commune et la consultation du conseil municipal, seraient maintenus.

De même, les sectionnements opérés subsisteraient jusqu'à une nouvelle décision et un tableau des opérations de sectionnement serait, tout comme dans le droit en vigueur, établi au cours du dernier trimestre, par le préfet, et non plus par le conseil général.

C. LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Votre commission des Lois a approuvé le principe du transfert du pouvoir de décision au préfet, considérant qu'il s'agirait d'actualiser un texte pour tenir compte des principes ayant présidé aux lois de décentralisation.

Elle a cependant apporté quelques précisions à la proposition de loi initiale :

1. Il n'est pas apparu nécessaire à votre commission des Lois de maintenir une intervention du conseil général dans une procédure concernant l'élection des conseillers municipaux. Le conseil général n'aurait donc ni pouvoir de décision, ni capacité d'initiative.

2. Le délai de six mois avant la prise de décision partirait de la date à laquelle le conseil municipal concerné aurait été consulté (au lieu de celle de la demande).

3. L'article L. 3216-1 du code général des collectivités territoriales faisant obligation au conseil général de dresser chaque année un tableau des révisions des sections électorales deviendrait redondant .

En effet, l'obligation de dresser ce tableau, transférée au préfet, figurerait, comme dans la proposition de loi initiale, dans le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 255 du code électoral.

Il conviendrait donc d' abroger l'article L.3216-1 du code précité, ainsi que le chapitre VI du titre 1er du livre II de la troisième partie de ce code dont il constitue le seul article.

Votre commission des Lois vous propose, à cet effet, l' adjonction d'un article 2 à la proposition de loi .

4. Enfin, votre commission des Lois a adopté une modification rédactionnelle de l'intitulé de la proposition de loi.

Sous le bénéfice de ces observations, elle vous propose d'adopter les conclusions qu'elle  vous soumet  pour cette proposition de loi et  qui sont reproduites ci-après.

TEXTE PROPOSÉ PAR LA COMMISSION

Proposition de loi tendant à modifier l'article L. 255 du code électoral

Article 1er

L'article L. 255 du code électoral est ainsi rédigé :

" Art. L. 255. - Le sectionnement est fait par le préfet, à son initiative, sur celle du conseil municipal ou d'électeurs de la commune intéressée .

" Une enquête est ouverte à la mairie de la commune intéressée et le conseil municipal est consulté par les soins du préfet. Aucune décision en matière de sectionnement ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de six mois à compter de la date à laquelle le conseil municipal a été consulté .

" Le délai étant écoulé et les formalités observées, le préfet se prononce sur chaque projet. Les sectionnements ainsi opérés subsistent jusqu'à une nouvelle décision. Le tableau de ces opérations est dressé chaque année par le préfet au cours du dernier trimestre. Ce tableau sert pour les élections intégrales qui doivent avoir lieu dans l'année. "

Article 2

Le chapitre VI du titre 1er du Livre II de la troisième partie du code général des collectivités territoriales est abrogé.




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