B. RESPECTER LES PARTENAIRES SOCIAUX

La création des lois de financement de la sécurité sociale a eu pour objet de permettre le débat des grands enjeux du financement de notre protection sociale. En revanche, les lois de financement ne peuvent servir de prétexte à l'étatisation de notre protection sociale, gérée au quotidien par les partenaires sociaux. La " crise du paritarisme ", dont le Gouvernement est seul responsable, a eu pour effet positif de faire prendre conscience de l'importance de cette " exception " française.

Votre commission vous propose de réaffirmer le paritarisme, en refusant :

- la confusion entre la politique de l'emploi et le financement de la sécurité sociale ;

- l'affectation anticipée des excédents de la sécurité sociale.

1. Eviter la confusion entre la politique de l'emploi et la sécurité sociale

Votre commission regrette la " pollution " du rendez-vous annuel consacré à notre protection sociale, par l'intrusion d'un débat sur le financement de la politique de l'emploi du Gouvernement.

Elle vous propose, en cohérence avec les choix effectués lors de l'examen en première lecture du projet de loi sur la réduction négociée du temps de travail de rejeter les articles 2, 3 et 4 du présent projet de loi.

Elle estime qu'il est nécessaire de supprimer l'ensemble de ces mécanismes de prélèvements et de transferts : impôts nouveaux sur les entreprises (CSB et TGAP), spoliation des salariés (taxation des heures supplémentaires), ou transferts aux dépens de la sécurité sociale (détournement du droit sur les alcools et du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine).

En conséquence, elle vous propose de supprimer le " fonds de financement de la réforme des cotisations patronales " .

Votre commission a, en effet, fait le choix de la réduction du temps de travail négociée et non imposée . Il n'y a pas, en conséquence, à compenser l'augmentation des coûts du travail -résultant d'une réduction imposée- par des allégements supplémentaires. Les financements affectés (tabacs, alcools, TGAP, contribution sociale sur les bénéfices, taxe sur les heures supplémentaires) ne sont pas acceptables et ne correspondent à aucune logique.

La confusion entre la politique de l'emploi et la sécurité sociale doit être absolument évitée. Des réductions de charges sociales doivent être financées et compensées à la sécurité sociale intégralement par l'Etat, dans le cadre de la politique d'emploi. Leur coût doit apparaître en loi de finances.

Votre commission constate que la " réforme d'ampleur de l'assiette des cotisations patronales " destinée à " consolider le financement de la protection sociale " a débouché sur l'affectation, à la compensation des exonérations de charges, d'une collection hétérogène et sans fondement d'impôts nouveaux et de recettes de poches.

2. S'assurer des excédents de la sécurité sociale avant de les affecter

Votre commission souhaite réaffirmer avec force le principe de la séparation des branches, mis à mal par l'article 10 du projet de loi.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, a d'ailleurs reconnu à l'Assemblée nationale : " Je rappelle que le Gouvernement avait dit à plusieurs reprises qu'une partie des excédents de la sécurité sociale devaient prioritairement aller vers le fonds de réserve des retraites. Il s'y était engagé l'année dernière. Cette année, une fois de plus, cet engagement a été respecté. " 48( * )

Cette déclaration de principe ne manque pas de saveur quand on se souvient que la branche maladie reste déficitaire.

Votre commission des Affaires sociales constate que le Gouvernement met en place, dans la confusion et l'opacité, des mécanismes de transferts au détriment de la sécurité sociale dans son ensemble mais qui visent particulièrement la branche famille.

Aussi propose-t-elle de supprimer l'ensemble de ces mécanismes de prélèvements et de transferts et de prévoir, dans le respect de l'autonomie des branches de la sécurité sociale, que celles-ci bénéficient des excédents qu'elles créent (CNAF- CNAV) ou assument a contrario des dettes qu'elles génèrent (CNAM).

Il y va de la clarté dans laquelle doit se poursuivre le redressement des comptes sociaux et de la responsabilisation de chacun.

Les réserves que la branche famille peut accumuler aujourd'hui lui permettront demain d'éviter une remise en cause des fondements de notre politique familiale, comme la mise sous condition de ressources des allocations familiales, décidée par le Gouvernement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 pour des raisons " financières ".

De même la branche vieillesse est dans l'oeil du cyclone à la veille du choc démographique de 2005. Dans cette attente, il est sain qu'elle puisse constituer des réserves productives d'intérêts. Et il est prudent que ces réserves restent en son sein plutôt que de migrer vers un fonds de réserve dont les missions sont aussi incertaines.

A terme, si la sécurité sociale présente des excédents durables, au-delà des cycles conjoncturels, il importera d'ouvrir dans la transparence et dans le respect des partenaires sociaux un débat sur l'affectation de ces réserves : amélioration des prestations, diminution des prélèvements d'aujourd'hui ou encore remboursement anticipé de la dette sociale, c'est-à-dire diminution des prélèvements qui pèsent sur les générations à venir jusqu'en 2014.

Pour votre rapporteur, le débat doit rester ouvert.

Pour ces raisons, votre commission vous propose d'adopter un article additionnel précisant que chaque branche affecte son résultat, une fois l'exercice clos, à une section comptable de réserve.

3. Adopter des comptes du régime général excédentaires

Au total, votre commission vous propose d'adopter des comptes de la sécurité sociale excédentaires.

- les comptes de la CNAMTS seraient quasiment à l'équilibre, grâce au maintien de la fraction du prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine ;

- les comptes de la CNAF et de la CNAVTS connaîtraient des excédents.

Le régime général en 2000


 

Compte tendanciel calculé par la commission des Affaires sociales

Mesures correctrices acceptées par la CAS

Nouveau compte proposé par la CAS

CNAMTS maladie

 
 
 

Recettes

630.705

+ 1.200 (contribution labos)

631 905

Dépenses

632.074

+ 1.350
(remboursement contribution labos : + 1.200
pensions : + 50
fonds cliniques : + 100

baisse dépenses maladie :

- 1.200)

632 224

Variation fonds de roulement

- 1.369

+ 1.050

- 319

CNAMTS accidents du travail

 
 
 

Recettes

47.916

Moindre diminution cotisations : + 400

48.316

Dépenses

47.202

+ 120

(baisse dépenses : - 340

dépenses nouvelles : + 400)
(pensions : + 60)

47.322

Variation fonds de roulement

714

+ 280

994

CNAVTS

 
 
 

Recettes

416.019

 

416.019

Dépenses

407.734

+ 950
( pensions : + 950)

408.684

Variation fonds de roulement

8.285

- 950

7.335

CNAF

 
 
 

Recettes

268.194

 

268.194

Dépenses

262.141

+ 1.140
(BMAF : + 340
Aide au logt 21 ans : + 220
Cplt familial 21 ans : + 330
Fonds action sociale : + 250)

263.281

Variation fonds de roulement

6.053

- 1.140

4.913

ENSEMBLE RG

 
 
 

Recettes

1.362.834

+ 1.600

1.364.434

Dépenses

1.349.151

+ 2.360

1.351.511

Solde

13.683

- 760

12.923