D. AUDITION DE M. FRANÇOIS DE PAILLERETS, PRÉSIDENT DE LA CONFÉRENCE NATIONALE DE LA SANTÉ EN 1999, ET M. MARC BRODIN, PRÉSIDENT DE CETTE CONFÉRENCE POUR 2000

Enfin, elle a entendu M. François de Paillerets, président de la Conférence nationale de la santé en 1999, et M. Marc Brodin, président de cette Conférence pour 2000 .

M. François de Paillerets a d'abord exposé les grandes lignes du rapport établi par la Conférence nationale de la santé en 1999. Celle-ci a notamment étudié les questions sanitaires induites par le vieillissement, en tentant de repérer les obstacles qui avaient conduit à ce que des idées très répandues ne parvenaient pas à déboucher sur des mesures concrètes.

M. François de Paillerets a estimé que la France devait mettre à profit le répit démographique de cinq années dont elle bénéficiait pour apporter une réponse aux principales difficultés qui seraient induites par le vieillissement de la population. Il a particulièrement insisté sur la nécessité de réhabiliter l'image de la personne âgée, de soutenir les démarches sanitaires entreprises dans le cadre de réseaux de soins et de mieux prendre en charge la dépendance des personnes âgées.

Evoquant la résorption des inégalités inter et intra-régionales de répartition de l'offre de soins, il a affirmé que la Conférence nationale de santé renouvelait sa proposition d'instituer des enveloppes financières régionales transversales dont pourraient bénéficier l'hospitalisation comme la médecine de ville et, surtout, les réseaux.

M. François de Paillerets a ensuite dressé le bilan du fonctionnement de la Conférence nationale de santé instituée voici quatre ans par les ordonnances portant réforme de la sécurité sociale. Il s'est félicité que la Conférence nationale de santé ait pu constituer le cadre d'un véritable dialogue entre des professionnels venant de secteurs très différents qui ne sont pas habitués à échanger et estimé que ce dialogue avait permis la diffusion d'une véritable culture de santé publique. Il a également affirmé qu'un nombre significatif de propositions formulées par la Conférence avait reçu une traduction législative ou budgétaire.

M. François de Paillerets a toutefois reconnu que les membres de la Conférence nationale de santé, comme les parlementaires, ressentaient une indéniable frustration de n'avoir pas su trouver une bonne articulation entre leurs travaux respectifs. Citant l'exemple de la prise en charge du diabète qui avait fait l'objet de propositions de la part de la Conférence nationale de santé, il a ainsi regretté qu'elle n'ait pas disposé des instruments nécessaires pour en chiffrer le coût, ni pour donner une argumentation chiffrée concernant les économies importantes que leur mise en oeuvre aurait pu induire à terme.

M. François de Paillerets a toutefois affirmé que la Conférence nationale de santé, unanime, avait décidé de retenir désormais une approche médico-économique pour ses travaux et qu'elle avait ainsi décidé d'étudier la question de la définition du panier de soins remboursable par l'assurance maladie. Il a indiqué que cette nouvelle orientation nécessitait, pour être valablement retenue, le renforcement des capacités d'expertise de la Conférence nationale de la santé. Il a enfin affirmé que celle-ci devrait être capable de définir à la fois ce qui était souhaitable, ce qui était faisable et, enfin, ce qui était acceptable financièrement par la Nation.

M. Charles Descours, rapporteur pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie, a d'abord rappelé qu'il avait été très favorable, depuis 1996, à la création d'une Conférence nationale de la santé. Il a déclaré avoir été frappé, à la lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du rapport qui lui est annexé, de l'absence de toute référence aux travaux, et même à l'existence de la Conférence. Il a observé que le rapport de la Conférence nationale de santé n'avait été remis au Parlement, selon la procédure officielle de dépôt qu'une seule fois, en 1996, et a regretté que, cette année, la commission des affaires sociales ait dû demander une transmission du rapport au ministère des affaires sociales. Il a estimé que ces carences reflétaient le peu de cas que faisait le Gouvernement des travaux de la Conférence nationale de santé. Il a fait siens les propos de M. François de Paillerets sur la nécessaire médicalisation de l'ONDAM. Evoquant les propos du président de la Conférence nationale de santé sur la prestation spécifique dépendance ou sur les inégalités inter-régionales, il a indiqué qu'ils confirmaient ce que pensaient déjà les parlementaires. Il a en revanche déclaré apprécier les propositions de la Conférence nationale de santé sur la prise en charge du diabète et estimé qu'elles correspondaient à l'attente des parlementaires.

M. Jean Delaneau, président, a rappelé que le Gouvernement avait annoncé une loi de modernisation du système sanitaire et que la commission des affaires sociales solliciterait la Conférence nationale de la santé pour en préparer la discussion.

M. Jean-Louis Lorrain a souhaité attirer l'attention des représentants de la Conférence nationale de la santé sur les insuffisances de la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou sujettes à des pratiques additives.

M. Francis Giraud a déclaré son opposition à une approche exclusivement comptable des questions de santé. Il a estimé nécessaire de définir une politique de santé et indiqué que, dans ce cadre, les experts devaient s'engager afin que le politique puisse prendre les meilleures décisions. Il s'est également interrogé sur la nécessité de réformer la formation initiale des médecins.

M. Guy Fischer a rappelé qu'il avait bien accueilli la mise en place de conférences régionales de santé, institutions qui pourraient permettre d'aider à la satisfaction de nouveaux besoins de santé. Faisant référence aux conditions d'adoption des schémas régionaux d'organisation sanitaire et sociale (SROSS), il a toutefois regretté l'insuffisante prise en considération des propositions formulées.

Répondant aux intervenants, M. François de Paillerets s'est d'abord déclaré très déçu par l'absence de transmission au Sénat du rapport de la Conférence nationale de santé. Il a fait siens les propos de M. Jean-Louis Lorrain et a affirmé, comme l'avait fait M. Francis Giraud, que la France avait un retard considérable dans la définition d'une politique de santé. A titre personnel, il a estimé regrettable que les universitaires médecins soient uniquement recrutés sur des critères scientifiques.

M. Marc Brodin a estimé que la Conférence nationale de santé avait assuré la promotion d'une analyse des questions de santé par ses déterminants. Il a constaté, environ les deux tiers des membres de cette Conférence étant des professionnels de santé, qu'une telle approche ne reflétait pourtant pas celle par laquelle ils envisageaient habituellement les questions de santé. Il a indiqué que la Conférence nationale de la santé étudierait la question du panier de soins remboursable par l'assurance maladie qui détermine, avec les comportements et les facteurs environnementaux, l'état sanitaire de la population. Il a déclaré que pendant environ deux années, la Conférence analyserait la situation actuelle, en France et en Europe, et étudierait les critères actuels d'admission dans ce panier de soins. Il a aussi annoncé son intention de travailler sur la prévention, le tiers des actes en médecine de ville pouvant être considéré comme relevant d'une démarche de prévention secondaire, c'est-à-dire de dépistage.

Evoquant la question de l'expertise, M. Marc Brodin a affirmé que la Conférence nationale de la santé avait demandé de pouvoir s'adresser à d'autres équipes que celles du Haut comité de santé publique. Il a ainsi cité des organismes, comme l'INSERM, qui, au fil des années, avait peu à peu cessé de travailler sur des sujets médico-économiques.

M. Marc Brodin a enfin estimé qu'il appartenait au Gouvernement et au Parlement, plutôt qu'à la Conférence nationale de la santé, de définir les priorités sanitaires.