Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale, TOME III - Les moyens des services et les dispositions spéciales (deuxième partie de la loi de finances) Annexe n° 10 - Culture et communication : presse

BELOT (Claude), Rapporteur spécial

RAPPORT GENERAL 89-TOME III Annexe n° 10 (1999-2000) - COMMISSION DES FINANCES

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Table des matières




N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès verbal de la séance du 25 novembre 1999.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)


ANNEXE N° 10

CULTURE ET COMMUNICATION :

PRESSE


Rapporteur spécial : M. Claude BELOT

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1805 , 1861 à 1866 et T.A. 370 .

Sénat : 88 (1999-2000).


Lois de finances.

OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR

La dispersion des aides directes à la presse au départ un peu surprenante, s'agissant d'interventions dont l'unité de compte est parfois inférieure au million de francs, se justifie par la fragilité, si ce n'est du secteur dans son ensemble, du moins de certains titres et par la nécessité de préserver une diversité qui en font toute la richesse et le dynamisme.

Dix articles se partagent 260 millions de francs. Si l'on retire les remboursements à la SNCF et le plan social des NMPP, c'est 145 millions qui se répartissent sur huit postes ; soustraction faite de l'aide au portage qui constitue désormais le point de concentration de l'effort budgétaire, cela donne une moyenne par article inférieure à 12 millions de francs.

La diversité que ces aides tendent à perpétuer, est une condition de la démocratie . Et c'est dans cette perspective que votre rapporteur examine le présent budget sans oublier pour autant que la presse agit désormais dans un espace éminemment concurrentiel : elle est en concurrence avec des grands groupes internationaux et avec d'autres médias qu'il s'agisse de la télévision ou, peut-être, demain, d'Internet.

A. AIDES DIRECTES : UNE DISPERSION CONDITION DU PLURALISME

Le Gouvernement a fait " clairement le choix d'un plan de développement de la presse quotidienne ". Cette priorité se traduit par un effort particulier en faveur du portage mais aussi de l'investissement et de la modernisation par rapport au fonctionnement.

L'intention ne peut qu'être approuvée, même si appliqués de façon trop rigide, de tels principes peuvent aboutir à une répartition plus arbitraire voire ponctuellement contestable.

1. La priorité au portage

Il s'agit de relancer la vente de la presse quotidienne d'information politique et générale. Dans un monde saturé d'informations, les patrons de presse comme les responsables gouvernementaux ont pris conscience de l'importance d'un mode de distribution, qui seul peut fidéliser une clientèle qui veut des nouvelles au tout début de sa journée.

La diffusion par portage connaît de fortes disparités selon les familles de presse et les zones géographiques. Alors que dans l'Est et le Nord de la France, ce mode de diffusion est bien implanté, il demeure encore marginal sur le reste du territoire et peu développé pour la presse quotidienne nationale. La situation du secteur de la presse écrite au regard du portage est donc contrastée.

Une des questions qui fait l'objet de débats au sein de la presse et par voie de conséquence entre une partie de la presse et le gouvernement, porte sur les parts respectives qu'il faut accorder à l'aide au stock par rapport à celle favorisant l'effort à la marge. S'il faut bien admettre que la majeure partie de l'aide doit aller aux journaux qui font l'effort de développer un réseau de portage, il est paradoxal que l'aide ne concerne que marginalement la presse notamment dans l'Est où le portage est traditionnellement très développé et donc les marges d'expansion relativement faibles.

2. Le Fonds de modernisation : une mise en place laborieuse

C'est l'article 62 de la loi de finances pour 1998 qui a institué un compte d'affectation spéciale n°902-32 intitulé : "Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale " et l'a alimenté par une taxe de 1 % sur certaines dépenses de publicité " hors médias ".

La création de ce fonds procède d'une initiative parlementaire. C'est en effet à la suite d'un amendement de M. Le Guen que l'Assemblée nationale, a institué une taxe sur la publicité hors médias.

A la base de cette taxe, il y a une analyse : la pénurie de moyens dont souffre la presse résulte en partie de ce qu'elle doit faire face auprès des annonceurs à la concurrence du hors médias, prospectus distribués sans les boites aux lettres ou journaux gratuits .

En taxant le " hors médias " et en l'affectant à des aides à l'investissement, on ferait d'une pierre deux coups : d'un côté, on contribue à maîtriser une concurrence anormale ; de l'autre, on donne des moyens supplémentaires de modernisation à un secteur qui doit s'adapter à un environnement technologique mouvant et toujours plus concurrentiel.


Sur le plan des intentions, on ne peut que souscrire aux objectifs affichés par la ministre de la culture et de la communication lorsqu'elle a déclaré qu'il fallait " rompre avec la logique de compensation des charges au profit d'une logique d'incitation à la modernisation " et que " La presse d'information politique et générale a davantage besoin de restaurer son esprit entrepreneurial , ses performances éditoriales et économiques, plutôt que de se voir appliquer toujours les mêmes remèdes pour compenser ses déficits. "

Mais si l'idée était simple, l'application l'était beaucoup moins, tant au niveau du prélèvement de la ressource que des modalités de sa distribution. Cela explique largement le retard dans la mise en oeuvre de ce fonds , comme votre rapporteur l'a déjà souligné l'année dernière.

Les principales recettes du fonds sont constituées par le produit de la taxe instituée à l'article 302 bis MA du code général des impôts, ainsi que, ultérieurement, - et s'il y a lieu, car les bénéficiaires préfèrent les subventions aux avances remboursables... - par le remboursement des avances consenties par le fonds.

Aux termes de l'article 302 bis MA du code général des impôts, la taxe qui alimente le fonds de modernisation de la presse, est due par toute personne assujettie à la TVA dont le chiffre d'affaires de l'année civile précédente est supérieur à 5.000.000 F hors TVA.

Cette taxe, dont le taux est fixé à 1 %, est assise sur les dépenses hors taxes engagées au cours de l'année civile précédente et ayant pour objet :

1°) la réalisation ou la distribution d'imprimés publicitaires

2°) les annonces et insertions dans les journaux mis gratuitement à la disposition du public.

Sont exclues de l'assiette de la taxe :

a) les dépenses engagées par les associations à but non lucratif en application des dispositions des articles 256 B et 261 du code général des impôts ;

b) les dépenses afférentes à la réalisation ou à la distribution de catalogues adressés, destinés à des opérations de vente par correspondance ou à distance.

La surestimation de la base taxable, la nécessité de soustraire certaines activités (ventes par correspondance et organisations à but non lucratif) expliquent la faiblesse du produit annoncé.

Avec 139 millions de francs de produit annoncé pour 1998 et entre 155 et 160 millions de francs pour 1999, on est assez loin des espérances exprimées lors du vote du dispositif, qui se situaient plutôt aux alentours de 300 à 400 millions de francs.

Les recettes prévues pour 2000 sont maintenues au même niveau de 160 millions de francs, même si les 155 millions de francs déjà perçus au titre de 1999, laissent espérer un rendement supérieur proche de 200 millions de francs.

Les bénéficiaires du fonds sont :

a) les entreprises de presse éditrices d'au moins un quotidien ou d'une publication hebdomadaire régionale ayant obtenu la certification d'inscription délivrée par la commission paritaire des publications et agences de presse et relevant de la presse d'information politique et générale ;

b) les agences de presse inscrites sur la liste prévue à l'article l er de l'ordonnance n°45-2646 du 2 novembre 1945 portant réglementation provisoire des agences de presse.

Les aides accordées prennent la forme de subventions, d'avances remboursables ou de dépenses d'études. Les décisions d'attribution sont prises par le ministre chargé de la communication après avis d'un comité d'orientation.

Le décret n° 99-79 du 5 février 1999 relatif au fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale , modifié par le décret n° 99-356 du 7 mai 1999, définit les actions éligibles et les dépenses prises en compte pour le calcul des aides.

Ces critères sont présentés comme très ouverts et permettent tous les projets de modernisation, qu'il s'agisse des rédactions, des imprimeries, des services commerciaux ou des réseaux de distribution, à l'exception des investissements de simple renouvellement.

Le comité d'orientation du fonds s'est réuni pour la première fois en juin dernier afin d'étudier les premières demandes au titre du " régime dérogatoire " permettant d'apporter une aide à des opérations d'investissement déjà engagées à la date de la réunion du comité d'orientation . Il a été indiqué à votre rapporteur que d'autres demandes au titre de ce régime dérogatoire, ainsi que des demandes au titre du régime normal doivent être examinées au comité d'orientation du mois de décembre 1999.

A ce jour, la part respective des demandes de subventions et celles des demandes d'avances remboursables représentent respectivement 95 % et 5 % des aides du fonds, alors que la proportion attendue était de 45 % / 55 %.

Il a également été précisé à votre rapporteur spécial qu'un " bilan de l'action de ce fonds doit par ailleurs être réalisé par le comité lui-même au printemps 2000 pour la gestion de l'année précédente " et qu'au " titre du régime dérogatoire environ 150 dossiers ont été déposés par une centaine d'éditeurs. Les investissements sont de natures très diverses montrant que les besoins des entreprises de presse sont eux-mêmes très diversifiés. Une partie des propositions concernent des actions de numérisation. "

A la connaissance de votre rapporteur aucune n'aide n'a été encore arrêtée et a fortiori versée au titre du fonds de modernisation. Les difficultés déjà signalées au niveau collecte se doublent de problèmes sur le plan de la distribution. Il faut en effet bien constater que le volontarisme qui marquait les premières déclarations, semble avoir laissé la place à une attitude réaliste conduisant les pouvoirs publics à ratifier au nom de l'urgence et de l'efficacité des projets déjà lancés du fait du jeu normal de la concurrence.

B. DISTRIBUTION : VERS UNE CONCURRENCE ACCRUE ?

La France se caractérise par un mode de distribution original, fondé sur un système coopératif, de façon à garantir le pluralisme. Ce système, mis en place en 1947 autour des Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne, est aujourd'hui en crise en dépit d'efforts d'adaptation appréciables encouragés par l'État.

Gérées par Hachette, très sensibles au puissant Syndicat du livre, aujourd'hui divisé - ce qui ne facilite pas la gestion des conflits dans un secteur où les mouvements sociaux sont fréquents -, les NMPP peuvent largement s'identifier à l'histoire de la presse depuis un demi siècle , même si le modèle de régulation qu'elles incarnent est aujourd'hui de plus en plus souvent contesté par les éditeurs eux-mêmes.

1. La montée des tensions

Les mouvements de grèves , dont le dernier date du 6 octobre dernier, perturbent régulièrement la distribution de la presse, tandis que la poussée de concurrence entre les NMPP et les Messageries Lyonnaises de presse - MLP - font craindre à certains l'amorce d'un processus de dérégulation sauvage .

Les principes "d'équité et d'égalité de traitement" et de "solidarité" entre les titres, institués par la loi Bichet, sont de plus en plus difficiles à appliquer et, notamment, la "péréquation" des coûts de distribution entre les différentes formes de presse , les magazines acceptant de plus en plus mal de supporter une bonne part des coûts d'un système conçu pour les quotidiens.

Le passage, en mai 1999, de l'hebdomadaire Point de vue, des NMPP aux MLP a créé la surprise et amorcé une certaine redistribution des cartes. En passant aux MLP dans des conditions jugées satisfaisantes, l'hebdomadaire aurait ainsi économisé 6 millions de francs. L'hebdomadaire Marianne envisage de lui emboîter le pas pour améliorer un compte d'exploitation fragile. Tandis que Le Point pourrait les imiter, sa filiale, le mensuel Historia vient de passer aux MLP. Dans le même temps , des publications du groupe Hommel - ont fait le chemin inverse pour rejoindre les NMPP.

Tandis que le chiffre d'affaires des NMPP varie relativement peu, puisqu'il est passé de 18,4 milliards de francs à 19,1 milliards de francs, pour 2,8 milliards d'exemplaires vendus , celui des MLP , bien que largement inférieur, a cru substantiellement passant de 1 milliard de francs en 1994 à 2,650 milliards de francs en 1998 .

De fait, en dépit de plusieurs plans de restructuration, qui leur ont permis de diminuer leur coût d'intervention de 14 % à 9 %, les NMPP ont du mal à faire face à la concurrence.

2. La poursuite des efforts de restructuration

Le premier plan quadriennal de modernisation des NMPP (1994-1997), présenté en juillet 1993, comprenait un ensemble de mesures couvrant tout le champ d'action des Messageries (gestion des invendus, organisation de la distribution des quotidiens, restructuration du réseau de dépositaires ... ), qui devaient permettre d'économiser 737 millions de francs sur la période. Le plan de restructuration comprenait un volet social, prévoyant 717 départs échelonnés sur la période parmi les ouvriers de l'entreprise.

Par le protocole d'accord du 27 décembre 1993, l'État a accepté d'apporter sa participation financière à ce plan social, au moyen d'une convention Fonds national pour l'emploi (FNE), dérogatoire à la règle commune et concernant au maximum 374 ouvriers. L'accord dont l'application était contrôlée, prévoyait l'engagement par l'État d'une somme de 136,4 millions de francs maximum sur l'ensemble de la période 1994-2001 (année de passage en retraite des ouvriers partis en 1997) visant à assurer le financement partiel des allocations spéciales FNE .

Toutefois, les économies réalisées - évaluées à 680 millions de francs, soit 57 millions de francs de moins que prévu -ont été redistribuées aux éditeurs et aux diffuseurs conformément aux termes de la convention entre l'État et les NMPP : sur 4 ans, ce sont donc 141,6 millions de francs qui ont été redistribués aux quotidiens. Les éditeurs de publications ont bénéficié d'une baisse encore supérieure, puisqu'elle atteint 4,25 %, soit une redistribution de 473,1 millions de francs en 4 ans.

Les NMPP ont engagé en 1998 un nouveau plan quadriennal de modernisation, dont elles attendent une économie supplémentaire de 300 à 350 millions de francs et, en conséquence, une nouvelle baisse de leur taux d'intervention qui passerait ainsi de 9 à 7 %.

Les principales réformes envisagées concernent le traitement des publications ( fusion des centres de Rungis Nord et de Centre Nord en un centre unique à Combs-la-Ville ), la distribution sur Paris transformation des 6 centres de diffusion parisiens en un centre de publication, à Lognes, travaillant le jour, et 4 centres de quotidiens situés à Paris et en proche banlieue. Enfin, le traitement des invendus doit être réorganisé.

Une baisse supplémentaire des effectifs est prévue qui portera sur 4 à 500 personnes entre 1998 et 2001 . Pour y parvenir, les NMPP ont sollicité l'octroi de mesures d'âge particulières : c'est ainsi que les ministres de l'emploi et du budget leur ont accordé la possibilité de procéder à des départs en congé de conversion à 55 ans suivis de départs " Allocation spéciale du Fonds National de l'emploi " à 56 ans étant entendu que la société financerait intégralement les congés de conversion.

Ce régime dérogatoire ayant expiré en juin 1999, les NMPP sont aujourd'hui soumises au droit commun des congés de conversion et ne bénéficient plus d'un soutien particulier de l'État pour leur reconversion. Il y a là un retrait de l'État qui intervient à un moment où il faudrait peut-être accélérer les mutations.

Au moment où le président du Conseil supérieur des messageries de presse lançait un appel à un " moratoire " et à une " trêve d'automne ", le Gouvernement qui a affirmé son attachement aux principes issus de la loi Béchet, a confié une mission d'étude et de réflexion à M. Jean-Claude Hassan, maître des requêtes au Conseil d'État.

C. AGENCE FRANCE PRESSE : UN PARI NÉCESSAIRE SUR L'AVENIR

En mars 1999, M. Eric Giuily, ancien directeur général d'Antenne 2, qui occupait précédemment le poste de directeur général du groupe de publicité BDDP Worldwide, a été désigné par le conseil d'administration de l'AFP pour succéder à M. Jean Miot. Le choix d'Eric Giuily était, à l'évidence, celui de l'État qui, sans être représenté au conseil d'administration, assure toujours l'essentiel des ressources de l'AFP.

Ce choix de personne, qui emporte un changement radical de style de gestion, a suscité un certain nombre de remous, préoccupants eu égard à l'importance de cet organisme pour le rayonnement de la culture française.

Nombreux sont ceux qui, comme votre rapporteur spécial, sont attachés à l'organisme au nom de la présence culturelle française dans le monde : l'AFP est un peu comme la voix et le regard de la France sur le monde, le porte-drapeau de l'exception française dans un monde de l'information sous influence anglophone .

1. Un statut hybride inadapté

Depuis sa création en 1944, l'AFP a toujours été considérée par le pouvoir comme un vecteur privilégié de l'influence sur la scène internationale. Dès le départ, son statut, adopté en 1957, lui assigne explicitement une mission d'intérêt général qui consiste à fournir une information " exacte " et " impartiale ", tout en lui conférant un " rayonnement mondial " .

Troisième agence derrière l'anglais Reuters et l'américain Associated Press (AP), l'AFP, qui était d'une taille comparable à celle de ses concurrents au début des années 60, est aujourd'hui largement distancée par eux car elle a manqué le " coche " de la diversification dans l'information économique : l'agence Reuters pèse maintenant vingt fois plus lourd que sa concurrente française .

Aujourd'hui, à ceux pour qui l'Agence France-Presse doit devenir une " entreprise comme les autres " , soumise aux lois du marché, s'opposent ceux qui dans une perspective souverainiste, dénoncent la " marchandisation de l'information " , en appellent à " l'exception culturelle " ou insistent sur son rôle comme "un des éléments de diffusion de la pensée française" .

En dépit de multiples plans de redressement, l'AFP s'est progressivement enfoncée dans ce que beaucoup considèrent comme une véritable crise morale et financière.

L'AFP fonctionne à la manière d'une coopérative où la presse française est à la fois cliente et administrateur. La dépendance financière à l'égard de l'État se double d'une lourdeur de fonctionnement liée à l'ambiguïté du statut de l'agence, soulignée par un rapport de l'inspection des finances remis en juin 1998.

Ce rapport, extrêmement critique, mettrait en évidence, selon des informations de presse, à la fois l'absence de politique commerciale, les erreurs d'acquisition de certaines filiales, l'organisation centralisée de l'entreprise, l'absence de contrôle de gestion.

Ni véritable service public ni société à but commercial, l'agence, qui emploie 2000 personnes (1200 journalistes dont 200 photographes), doit se satisfaire d'un statut législatif hybride qui date de 1957.

La particularité de ce statut, c'est qu'il fait de l'agence une société de droit privé, soumise aux règles du droit commercial, mais sans capital social, donc sans actionnaires . Elle compte ses clients parmi ses administrateurs mais, curieusement, pas l'État. Or celui-ci contribue, par le biais d'abonnements à couvrir 46 % du chiffre d'affaires de l'agence (1,2 milliard de francs).

2. Un plan stratégique contesté

Pour permettre à l'AFP de rattraper son retard et sortir de la crise, M. Giuily propose un ambitieux " plan stratégique " . Le nouveau président se propose de faire de l'AFP une agence mondiale multimédia, tournée vers Internet et les nouveaux supports technologiques .

Pour lui, L'AFP doit faire face à un défi historique, celui de la révolution technologique du monde de l'information . A travers Internet et les divers multimédias se développent des offres qui deviennent autant de concurrents potentiels des agences.

Pour parvenir à cette diversification de sa clientèle et au renforcement de ses services qui devrait se traduire par une croissance de plus de 50 % du chiffre d'affaires de l'entreprise en 5 ans, le nouveau président estime qu'il faut investir . Or les quelque 800 millions de francs dont il a besoin à cette fin, ne peuvent se trouver , selon lui, ni dans une augmentation massive des abonnements de ses principaux clients, ni par une aide directe de l'État .

Telle est l'analyse qui conduit le nouveau président de l'Agence France-Presse à proposer une " évolution " du statut de l'agence de façon à " associer à [son] développement 5 ou 6 entreprises publiques ou privées possédant des technologies " que n'a pas l'entreprise.

Les représentants des salariés accusent leur PDG de préparer la "privatisation rampante" de l'AFP . Ils voient dans son plan une menace pour l'indépendance et la spécificité de l'agence. Le partenariat proposé par M. Eric Giuily revient à faire dicter la politique rédactionnelle de l'agence en fonction des lois du marché.

Dans une lettre aux parlementaires, M. Eric Giuily affirme qu'il " ne s'agit nullement d'une privatisation, puisque ces nouveaux partenaires ne pourront accueillir plus de 49 % du capital de l'agence et ne pourront prendre le contrôle de fait ou de droit de celle-ci. Aucun d'entre eux ne pourra avoir une part supérieure à 10 % ou 15 % du capital. La loi modifiant le statut de 1957 devra le prévoir expressément. "

Après une période de tension au cours de laquelle on a vu le nouveau président bénéficier du soutien appuyé du conseil d'administration de l'agence et de l'État, diverses mesures d'apaisement ont été prises ; le conseil d'administration qui devait se prononcer sur le plan, a été reporté au mois de décembre, ce qui permettra au comité d'entreprise de faire procéder à une expertise du plan par un cabinet d'audit indépendant.

La ministre de la Culture et de la Communication a explicitement apporté son soutien au plan de M. Giuily en déclarant que le " renouveau de l'Agence France-Presse est une cause nationale " et que " c'est au Parlement qu'il incombera de recréer les fondements d'une agence moderne, pérenne, indépendante et ouverte au monde ". Madame Catherine Trautmann a estimé que "différer ou retarder la mise en oeuvre d'un plan de développement, c'est compromettre gravement la situation concurrentielle de l'agence sur des marchés aujourd'hui en pleine expansion" .

Votre rapporteur spécial n'a pas eu la possibilité de rassembler les éléments lui permettant de juger sur le fond le plan de développement du nouveau président. Sans doute pourrait-on s'interroger sur tel ou tel aspect de la stratégie proposée et notamment sur celle consistant à chercher à proposer des produits élaborés à destination du consommateur final, au risque d'entrer en concurrence avec la presse elle-même. Mais votre rapporteur spécial estime qu'il faut lui laisser le temps de mettre en place sa nouvelle organisation avant de porter un jugement sur la nouvelle politique .

La conviction de votre rapporteur spécial est qu'il fallait agir si l'on ne voulait pas assister impuissant à la marginalisation de l'AFP sur un marché de l'information désormais mondial . Sans capital social, sans assouplissement du carcan que constituent certaines règles statutaires comme l'équilibre des comptes, l'Agence ne peut résister à ses concurrents.

Ici comme dans le secteur audiovisuel, il faut donner au secteur public les moyens de lutter à armes égales.

La presse veut se moderniser. Elle ne cesse de se restructurer et affiche des ambitions dans le domaine du multimédias et même des télévisions locales qui témoignent de son dynamisme.

L'État se doit d'encourager de telles initiatives, à défaut desquelles la presse écrite pourrait bien finir par se marginaliser dans le nouveau paysage médiatique, qui va apparaître du fait de la généralisation des technologies numériques.

II. LA SITUATION DE LA PRESSE

On parle souvent de crise de la presse. Or, tous les observateurs avertis du secteur savent qu'il n'y a pas une presse mais plusieurs, dont la situation se présente de façon très contrastée.

En effet si les Français lisent peu de quotidiens - avec 153 exemplaires vendus par habitants la France se situe au 22 ème rang mondial - ils sont les premiers consommateurs : 34,5 millions de Français lisent chaque jour un magazine, ce qui fait que ce type de presse représente 47% du chiffre d'affaires total du secteur.

L'économie des entreprises de presse, déjà rendue complexe par sa dimension à la fois culturelle et industrielle, est aussi naturellement plus instable du fait qu'un journal est vendu deux fois, une première fois à son lecteur et une deuxième aux annonceurs.

Ces deux sources de revenus n'évoluent pas nécessairement de façon parallèle, les recettes de publicité ayant tendance à se révéler volatiles, indépendamment des menaces structurelles résultant de la concurrence de la télévision et, surtout du hors médias.

A. DIFFUSION ET CHIFFRE D'AFFAIRES DE LA PRESSE

La situation de chaque type de presse est donc très variable au-delà des tendances générales. On note depuis quinze ans des fluctuations importantes : une forte croissance du début des années 80 puis un net ralentissement au début des années 90. La reprise que l'on constate depuis le milieu de la décennie semble marquer le pas.

Selon l'enquête rapide menée par le département statistique du SJTI, le tirage total de la presse stagne en 1998.

Le tirage de la presse nationale d'information générale et politique est en nette diminution de -3,9%, en raison de la baisse du tirage des quotidiens , -2,8%, et de celle des magazines d'information, -7,4%, après il est vrai la forte augmentation en 1997.

Les autres catégories de presse, qui représentent près de 80% du tirage stagnent ou sont en légère progression : tandis que la presse régionale d'information politique et générale augmente de + 0,8%, la presse spécialisée grand public et la presse gratuite ne sont en croissance respectivement que de +0,6% et + 0,4%.

Toutes catégories de presse réunies, les recettes des ventes n'augmentent que de + 0,5% en 1998 . Elles représentent 60% des recettes totales, avec 36,4milliards de francs, qui se répartissent pour deux tiers à la vente au numéro et à un tiers pour les ventes par abonnement.

Comme en 1997, la croissance des ventes par abonnement qui est de +2,9 %, compense le tassement de - 0,8 % des ventes au numéro.

Par catégorie de presse les évolutions sont les suivantes en 1998 : -0,5% pour la presse nationale d'information politique et générale (contre + 4,1 %en 1997), +2,4% pour la presse locale (contre -1,3 % en 1998), 2,7% pour la presse spécialisée technique et professionnelle et - 0,5% pour la presse spécialisée grand public.

Au total, la croissance des recettes " presse " (+2,60%) est un peu plus élevée qu'en 1997, année qui avait été marquée par un ralentissement (+1,7%) après deux années plus favorables. Trois grandes catégories de presse ont des résultats globaux en nette progression : la presse nationale d'information générale et politique avec +4,2 %, la presse locale d'information générale et politique avec +4,3% et la presse spécialisée technique et professionnelle avec +5,1% ; en revanche, la presse gratuite progresse de + 1,4% et la presse spécialisée grand public reste stable, +0,2%.

B. LA PRESSE ET LE MARCHÉ PUBLICITAIRE

Alors que les dépenses publicitaires dans les médias augmentaient en moyenne de plus de 10% par an entre 1982 et 1990, le marché s'est retourné au début des années 90 pour reprendre à un rythme moyen de près de 4,5% à compter de 1993.

L'évolution n'est pas la même pour tous les médias : au cours de la période, les recettes de publicité de la presse ont cru de + 3,9%, à comparer à celles de la télévision qui ont connu un taux de croissance de plus de 7%.

Ces évolutions différenciées ont entraîné un resserrement progressif des parts de marché. Si la presse drainait 56,2 % des ressources publicitaires des médias en 1990 et 48,5 % en 1993, elle n'en attire plus que 47,2% en 1998 . C'est au profit de la télévision que s'est effectuée cette perte de part de marché. En effet, la part relative de l'affichage, de même que celle du cinéma, demeure stable. Celle de la radio a tendance à se tasser passant de 7,7% à 6,6% au cours de la période. Au contraire, celle de la télévision passait de 24,9 % en 1990 à plus de 31,2 % en 1993 et 33,9% en 1998.

Globalement, la croissance des recettes publicitaires reste dans la tendance orientée à la hausse depuis 1994. Mais, cette évolution positive est, en 1997, uniquement le fait de la croissance très forte des recettes de petites annonces, entraînée par l'amélioration de la conjoncture économique sur les marchés du travail et de l'immobilier.

Pour l'ensemble des recettes publicitaires, les évolutions enregistrées sont très variables d'une catégorie de presse à l'autre : trois catégories ont particulièrement bénéficié de cette conjoncture favorable : la presse nationale d'information générale et politique avec +1,9%, la presse locale d'information générale et politique avec +7,3% et la presse spécialisée technique et professionnelle avec +7,4%. Les recettes publicitaires de la presse spécialisée grand public et de la presse gratuite augmentent modérément, avec respectivement + 1,9% et + 1,4%.

C. LES ENTREPRISES DE PRESSE

Par delà les chiffes statistiques que l'on rappelle ci-après, il faut signaler que la presse connaît actuellement une très nette tendance à la concentration.

Selon la dernière enquête annuelle d'entreprise de la Direction générale des Stratégies Industrielles, en 1997, 97 entreprises de 20 personnes ou plus, dont l'activité principale est l'édition de journaux, employaient au total 28.537 personnes (contre 29.259 en 1996), dont 26.198 au titre de cette seule activité. En ajoutant à ce dernier effectif celui employé au titre d'une même activité "édition de journaux", mais exercée cette fois en tant qu'activité secondaire par d'autres entreprises des secteurs industriels, on obtient l'effectif total de la branche, soit 26.309 personnes (contre 26 253 en 1996).

Cette source indique également que, pour la même année, 311 entreprises de 20 personnes ou plus, dont l'activité principale est l'édition de revues et périodiques, employaient au total 20.998 personnes (contre 20.656 en 1996), dont 19.487 au titre de cette seule activité. En ajoutant à ce dernier effectif celui employé au titre d'une même activité " édition de revues et périodiques ", mais exercé cette fois en tant qu'activité secondaire par d'autres entreprises des secteurs industriels, on obtient l'effectif total de la branche, soit 19.992 personnes (contre 19.841 en 1996).





Depuis 1945, la presse française a connu un important mouvement de concentration. La régression du lectorat et partant du nombre de titres, l'importance des investissements nécessaires pour mener à bien la modernisation, les synergies qui se font jour entre les titres, ont eu pour conséquence de multiplier les rapprochements sans que le concentration en France atteigne et de loin le niveau atteint dans les autres grands pays industrialisés.

Certes, on a vu à partir de 1975, la montée en puissance des groupes multimédias, bien différents de l'empire Prouvost ou, plus récemment du groupe Hersant : les groupes " Vivendi ", " Bernard Arnault ", " Pinault ", " Matra-Hachette ", " Chargeurs ", " Dassault " prennent pied dans le secteur, tandis que des groupes familiaux, notamment dans la presse de province faisaient plus que résister. LVMH a repris la Tribune et Investir ; Pinault a acheté Le Point et Chargeurs 66% de Libération. Fin 1997, " Dassault " rachète les publications Valmonde, après avoir essayé de reprendre l'Express.

Ainsi en témoigne l'évolution récente du groupe Hersant, aujourd'hui partagé entre France Antilles et la Socpresse. Après la vente de France-soir, l'ouverture du capital du Figaro à des investisseurs étrangers, la cession des titres de l'Ouest (Presse Océan, Le Maine libre, le courrier de l'Ouest), on peut signaler le rachat de la Voix du Nord par le groupe belge Rossel dans lequel le groupe est présent à 40%, tandis que le rapprochement avec Nord Eclair fait naître des craintes au sein du titre.

Un autre exemple de l'adaptabilité de la presse est donné par le Parisien, ébranlé par la disparition accidentelle de son fondateur et par une grève longue au milieu des années 70, le groupe est repassé à l'offensive après s'être séparé de ses journaux féminins et de ses titres de l'Ouest, en créant " Aujourd'hui ", une édition nationale du Parisien et en envisageant notamment à partir du journal l'Equipe une expansion dans le domaine de la télévision.

La presse qu'on dit ainsi trop facilement en crise, est un monde qui bouge même si le secteur souffre du côté de l'offre d'un handicap dû à des contraintes sociales particulières et d'une fragilité financière qui lui interdit de se lancer dans de nécessaires programmes d'adaptation aux nouvelles technologies.

Tel est le rôle des crédits d'aide à la presse dont le rôle est à la fois de favoriser le maintien du pluralisme mais aussi d'inciter le secteur à se moderniser. Présentation DES CRédits

A structure constante, hors abonnements de l'État à l'AFP, les crédits inscrits au budget général consacrés directement aux aides à la presse, croissent de 3,2 % pour se monter, en 2000, à 266,8 millions de francs , soit une augmentation de 8,1 millions de francs par rapport à 1999.

Cette croissance de 3,2 %, nettement supérieure à la moyenne de celle des autres budgets de l'État -qui est de 0,9 % pour l'ensemble des dépenses et de 1,2 % pour les seules dépenses civiles - est sensible comparée à l'inflation prévue qui est de 0,9 %. Elle confirme un retournement de tendance par rapport aux années antérieures : la croissance des crédits est légèrement supérieure à celle du budget 1999 (+ 2,6 %), alors que 1998 s'était caractérisée par un léger recul de 1 % des dotations hors AFP et 1997 avait été marquée par d'importantes annulations de crédits (36 millions de francs sur près de 268 millions de francs).

Si l'on tient compte de l 'AFP , dont les dotations devraient s'accroître de 1,2 % en 2000 pour atteindre 607,4 millions de francs , ce budget paraît encore relativement favorisé par rapport aux autres budgets de l'État.

En dépit d'une mise en oeuvre, semble-t-il décevante, le Fonds de modernisation de la presse alimenté par une taxe parafiscale sur le "hors médias", vient encore renforcer le sentiment que la presse est un secteur auquel les pouvoirs publics restent attentifs.

D. LES AIDES DU BUDGET DES SERVICES GÉNÉRAUX DU PREMIER MINISTRE

Les aides budgétaires à la presse sont inscrites au chapitre 41-10 et, pour ce qui concerne l'AFP, au chapitre 34-95 du budget des services généraux du Premier Ministre.

1. Les aides à certaines formes de presse

Elles devraient augmenter, en 2000, de 19,7 % : 43,8 millions de francs contre 36,6 millions de francs dans le précédent budget. On note que cette forme d'aide, inscrite au chapitre 41-10, a sensiblement augmenté depuis 1997, puisque l'on se situe à plus de 13 millions au-dessus des dotations de cette année-là.

a) Le fonds d'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 sont en croissance de 33 %, ce qui, après le rattrapage intervenu l'année dernière, place ce poste avec 26,6 millions de francs de crédits, à un niveau supérieur de 10 millions de francs à celui de 1997.

On peut rappeler qu'instaurées par un décret du 12 mars 1986, les règles d'attribution du fonds ont été modifiées par un décret du 17 août 1997. La principale mesure de ce nouveau texte est la scission en deux sections du fonds d'aide.

La première section, dont la dotation ne peut être inférieure à 85 % du montant total de la dotation du fonds, bénéficie aux quotidiens qui remplissent les conditions définies à l'article 2-1 du nouveau décret, peu différentes de celles contenues dans celui du 12 mars 1986. Deux quotidiens, "La Croix" et "L'Humanité", entrent dans cette catégorie et bénéficient régulièrement de cette aide. "La Croix" a reçu 9,4 millions de francs en 1997 et 10,9 millions de francs en 1998 ; sur les mêmes périodes, "L'Humanité" a reçu respectivement 6,2 millions de francs et 7,99 millions de francs.

La deuxième section, totalement nouvelle, vise les quotidiens à prix très faible, comme "Mon quotidien" ou d'autres titres pour les jeunes, jugés très intéressants sur le plan de la diffusion de la pensée, mais qui n'ont naturellement pas un prix facial élevé. L'aide que ces titres recevront, est très faible (0,5 % du fonds en 1998), mais leur affiliation à cette section leur permet de bénéficier du tarif postal préférentiel prévu par l'article D19-2 du code des postes et des télécommunications.

RÉCAPITULATIF DES CRÉDITS DU FONDS D'AIDE AUX QUOTIDIENS NATIONAUX A FAIBLES RESSOURCES PUBLICITAIRES :

 

Exercices budgétaires

1994

1995

1996

(après mise en réserve de crédits)

1997

1998

1

La Croix

7.046.041

6.964.588

8.860.374

9.483.505

10.908.592

2

L'Humanité

5.282.548

4.948.588

6.076.313

6.213.169

7.991.408

3

Mon Quotidien

-

-

-

-

100.000

4

Présent

641.734

603.187

748.168

-

-

 

sans emploi

 
 
 
 
 
 

Dotation du chapitre

43-03 (art.20)

12.970.323

12.516.362

15.684.855

15.696.674

19.000.000

Votre rapporteur ne dispose d'aucune information pour l'exercice 1999, dans la mesure où la répartition des 20 millions de francs est "en cours". Il lui a été également indiqué de façon pour le moins elliptique que pour l'an 2000, "il est également envisagé de tenir compte de la faiblesse du tirage dans les critères de répartition", ce qui concerne a priori le fonctionnement de la deuxième section évoquée ci-dessus.

Le fonds d'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces.

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000 se montent à 8,5 millions de francs, soit une augmentation de 300.000 francs par rapport à l'année 1999.

L'élargissement des conditions d'accès, instauré par le décret du 20 novembre 1997, a permis de limiter les conséquences de la hausse des tarifs postaux.

En 1998, on comptait 12 bénéficiaires de l'aide avec des subventions s'étageant de 189.000 francs pour la Dordogne libre à 1,184 million de francs pour la Marseillaise.

RECAPITULATIF DEPUIS 1994 DES CREDITS DU FONDS D'AIDE AUX QUOTIDIENS REGIONAUX, DEPARTEMENTAUX ET LOCAUX D'INFORMATION POLITIQUE ET GENERALE A FAIBLES RESSOURCES DE PETITES ANNONCES

 

Exercices budgétaires

1994

1995

1996

1997

1998

1

Echo du Centre

712.562

552.581

788.292

801.873

767.946

2

La Marseillaise

1.043.970

797.095

1.159.603

1.191.111

1.184.877

3

Nord Littoral

268.062

198.692

292.740

283.282

272.275

4

Petit Bleu du Lot et Garonne

422.282

314.733

452.959

466.510

460.865

5

La Liberté de l'Est

1.079.769

822.510

1.190.099

1.156.438

1.094.548

6

Eclair Pyrénées

320.190

245.693

344.145

340.973

324.455

7

Libération Champagne

391.478

280.657

384.499

374.550

347.972

8

Le Journal de la Haute-Marne

1.014.943

755.350

1.078.260

1.083.236

1.020.809

9

Charente-Maritime/Le Journal

127.245

93.518

-

-

-

10

La République des Pyrénées

-

781.617

1.122.744

1.142.320

1.101.962

11

La Dordogne Libre

-

-

-

191.714

189.565

12

Centre Presse Rodez

-

-

-

496.257

470.456

13

L'Echo Républicain

-

-

-

285.074

309.544

 

Chapitre 43-03 (article 30)

5.380.501

4.847.501

6.813.346

7.813.346

7.800.000

b) Le fonds d'aide à la presse régionale d'information générale et politique

Ce fonds a été créé à l'occasion de la loi de finances pour 1996 et doté de 5 millions de francs. Ses modalités ont été précisées par le décret du 10 mai 1996. Le fonds qui disposait de 7 millions de francs dans la loi de finances pour 1997, 8 millions en 1998 et 8,4 millions de francs en 1999 voit sa dotation pour 2000 augmenter de + 300.000 francs pour être portée à 8,7 millions de francs .

2. Les autres aides directes

Elles ont été regroupées après divers changements de nomenclature sur le chapitre 41-10 des crédits des services généraux du Premier Ministre.

a) Le fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger

Les crédits de ce fonds passent de 22 millions de francs à 23 millions de francs pour 2000, soit une augmentation de 4,55 %. On note qu'en dépit de cette augmentation, on reste encore loin des montants du début des années 1990 et notamment de 1996, où les crédits s'étaient montés à 37 millions de francs.

b) L'aide au portage

Cette aide, d'un montant total de 58 millions de francs est répartie en deux postes :

•  un article 42, Aide au portage ; bénéficiant de 2,4 millions de francs en 1996 et 1997, cette aide, instituée en 1995, avait culminé à 8 millions de francs en 1998 plafonne désormais à 7,5 millions de francs en 1999 et 2000. Ces crédits visent à compenser intégralement pendant cinq ans (1995-1999) le coût des charges sociales liées au portage des quotidiens nationaux. 9 quotidiens nationaux bénéficient du fonds : Les Echos, France Soir, L'Humanité, International Herald Tribune, Paris Turf, La Tribune, Le Figaro, Libération et Le Monde ;

•  par ailleurs, a été créé, en 1997, un fonds d'aide au portage . Doté de 15 millions de francs à l'article 35, ce fonds a bénéficié d'une augmentation rapide de ses crédits ; ceux-ci sont passés à 45 millions de francs pour 1998, 49,5 millions de francs en 1999 et 50,5 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2000, soit une augmentation de 2 %. Elle est répartie, à hauteur de 25 %, au prorata de la diffusion globale par portage et, à hauteur de 75 %, au prorata de sa progression au cours des deux dernières années. Un certain nombre de titres bénéficient ainsi d'une aide supérieure au million de francs : Le Figaro, Libération et Le Monde pour les quotidiens nationaux et le Courrier de l'Ouest, le Courrier Picard, La Dauphiné Libéré, L'Est Républicain, le Midi Libre, la Montagne, Nice Matin, la nouvelle République du Centre Ouest, Ouest France, le Parisien, le Progrès de Lyon, Sud Ouest, le Télégramme de Brest, L'Union, L'ardennais et la Voix du Nord. L'Est républicain, avec 4,511 millions de francs, Ouest France, avec 4,5 millions de francs et le Dauphiné libéré avec 3,636 millions de francs obtiennent les aides les plus importantes en 1999 dans la mesure où ils bénéficient tout particulièrement de l'aide au développement.



On peut rappeler que l'aide est réservée aux journaux d'information politique et générale, de langue française, paraissant au moins 250 fois par an et imprimés sur papier journal. 25 % de la dotation sont destinés à aider le stock d'exemplaires portés, 75 % sont destinés à récompenser la progression sur les deux années antérieures à l'année d'attribution de l'aide.

2.375.000 francs ont été répartis au titre de l'aide au stock. Les subventions ont été calculées sur la base d'un taux unitaire de subvention résultant du rapport entre cette dotation et le nombre d'exemplaires total portés par les candidats en 1998 (712.387.550). Le taux obtenu, 0,0174 F, est alors multiplié, pour chaque bénéficiaire, par le nombre d'exemplaires qu'il a portés en 1998.

37.125.000 francs ont été alloués en fonction des exemplaires supplémentaires portés entre 1996 et 1997 d'une part, entre 1997 et 1998, d'autre part, conformément au décret, 40%de la progression 1996-1997 et l'ensemble de la progression 1997-1998 ont été pris en compte pour le calcul des aides.

Au total, soixante journaux ont bénéficié de l'aide en 1999, à savoir :

7 quotidiens nationaux ont bénéficié de 7.242.012 F (14,6 % du total) ;

30 quotidiens régionaux ont reçu 36.587.066 F (73,9 % du total). Trois d'entre eux n'ont pas émargé sur la 2 ème part (Centre Presse Poitiers, Nord littoral, et La Presse de la Manche).

c) Le fonds d'aide au multimédia

Ce fonds, annoncé en 1996, avait été créé en 1997 mais non doté, car son financement devait provenir d'un transfert. Géré par l'Institut pour le Financement du Cinéma et des Industries Culturelles (IFCIC) ; il a pour objet d'accorder aux entreprises de la presse écrite une avance partiellement remboursable, à hauteur de 30 %, afin de permettre de développer des projets offrant au public des accès aux contenus des journaux, magazines et revues sur les nouveaux supports numériques.

Doté en 1998 de 15 millions de francs à l'article 36, ce fonds n'a bénéficié que du maintien de sa dotation en 1999 en francs courants dans le projet de loi de finances pour 2000.

d) Les allégements de charges de télécommunication

L'article 10, " Communications téléphoniques des correspondants de presse ", des services généraux du Premier Ministre, constitue un poste sensible. On peut rappeler que les crédits avaient été présentés dans le projet de loi de finances pour 1998 en diminution de près de 50 % ; l'importance attachée par la presse à ce type d'aide, avait conduit les assemblées à augmenter les crédits prévus pour les porter à 26 millions.

Dans le projet de loi de finances 1999, cette dotation, désormais affectée au remboursement des charges de fac-similé, avait enregistré une forte baisse (-51,7 %) en passant de 21 à 6,6 millions de francs. Cela résulte du décret n° 98-793 du 4 septembre 1998, qui a instauré une aide aux fac-similé, suivant des modalités compatibles avec le régime de concurrence entre opérateurs téléphoniques entré en vigueur le 1 er janvier 1998. Le fonds de remboursement des charges fac-similé reprend ainsi une partie du périmètre de l'aide à l'allégement des charges téléphoniques. Il est doté de 6,6 millions de francs pour 1999, somme ramenée à 6,5 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2000. On note que ce type d'aide bénéficie plus à la presse nationale qu'à la presse régionale.

3. Les aides indirectes inscrites au budget des SGPM

a) Le remboursement à la SNCF des réductions de tarif accordées à la presse.

Comme l'on sait, la SNCF accorde des réductions de tarifs aux publications inscrites à la commission paritaire, réductions qui font l'objet d'une compensation financière inscrite au présent budget.

Depuis le 1 er janvier 1998, les taux de prise en charge s'établissent à 70 % pour les quotidiens et à 22 % pour les périodiques.

L'article 10, "Réduction de tarif SNCF pour le transport de presse", des crédits des services généraux du Premier Ministre, est doté pour 101 millions de francs de crédits dans le projet de loi de finances pour 2000 contre 102 millions de francs en 1999 et 95 millions de francs en 1998. On note que la baisse est considérable par rapport aux crédits inscrits en 1996 et 1997, qui s'étaient élevés respectivement à 119 et 140,4 millions de francs.

Pour l'exercice 1998, la très forte augmentation du tonnage des quotidiens - +53 %- et de leur coût de transport, non prévus en début d'année aurait dû se traduire par une augmentation substantielle de l'indemnité. " Les explications fournies par l'opérateur pour justifier ces progressions n'ayant pas semblé satisfaisantes, les pouvoirs publics ont résilié la convention de 1998 et demandé au Sernam de prendre à sa charge le différentiel constaté en 1998 entre les besoins - environ 104,4 millions de francs - et la dotation budgétaire de 95 millions de francs. "

La SNCF a, de son côté, fait valoir à votre rapporteur spécial les efforts effectués conjointement par les distributeurs de presse et la SNCF entre 1994 et 1997 pour rendre possible une baisse de l'aide de l'État. La très forte diminution du nombre des dépositaires de presse, qui sont passés de 1200 à 350, a ainsi permis de faire passer l'aide de l'État de 206 à 140 millions de francs . Le SERNAM met aussi en avant le décalage entre la baisse modérée des tonnages entre 1999 et 1997, -8,7 % et le fort recul de 36 % du montant de la subvention.

La SNCF fait en outre remarquer que pour l'année 1998 première année d'application de la forfaitisation de l'aide, sur les 95 millions de francs de dotations budgétaires, il en était prélevé 5 millions pour le remboursement de l'arriéré, qui se montait à 47 millions de francs fin 1997 .

De même en 1999, sur 102 millions de francs de crédits inscrits en loi de finances, 90 millions de francs étaient affectés au transport et 12 millions de francs au remboursement de la dette de l'État.

Votre rapporteur estime que les rapports entre la SNCF et l'État doivent à cet égard être remis à plat et qu'il convient de trouver rapidement un accord débouchant sur une nouvelle convention tenant compte des coûts effectifs mais aussi du trafic réel traité par la SNCF.

b) La contribution au plan social de la presse parisienne

Dotée de 26 millions de francs en 1996, cette aide a vu ses crédits réduits de presque 50 % dans les projets de loi de finances pour 1997 et 1998. Avant de se stabiliser en 1999 au niveau de 13,5 millions de francs , montant maintenu en francs courants dans le projet de loi de finances pour 2000.

c) Les abonnements à l'Agence France Presse

Le chapitre 34-95, abonnements souscrits par les administrations au service d'informations générales de l'AFP , des crédits des services généraux du Premier Ministre, est doté, en 2000., de 607,4 millions de francs contre 600,2 millions de francs en 1999 (et 588,7 millions en 1998), soit une croissance de 1,19 %. Ce budget de reconduction intervient à un moment où la nomination d'un nouveau président et d'une nouvelle stratégie suscite un certain nombre de remous au sein de l'organisme.

E. LE FONDS DE MODERNISATION

Créé par l'article 62 de la loi de finances pour 1998, ce fonds, dont le support est le compte d'affectation spéciale n°902-32, est abondé par le produit de la taxe de 1 % sur certaines dépenses de publicité hors médias, instituée par l'article 23 de la même loi de finances.

Le produit de cette taxe devrait se situer entre 130 et 140 millions de francs pour l'année 1998 et sans doute à un niveau un peu supérieur en 1999. Les crédits non utilisés en 1998, actuellement estimés à 140 millions de francs, seront reportés sur 1999.

La mise en oeuvre laborieuse de ce fonds fait l'objet d'observations de votre rapporteur spécial dans la première partie de ce rapport.

F. BILAN DES AIDES INDIRECTES A LA PRESSE

Les aides indirectes peuvent être évaluées à près de 7,5 milliards de francs en 1999 , et sont à la charge :

- de deux entreprises publiques (La Poste et la SNCF), à hauteur des deux tiers,

- des collectivités locales , pour plus de 16 %, en raison de l'exonération de la taxe professionnelle,

- de l'État , pour le solde, soit 16 %, également, en raison d'une fiscalité adaptée à la presse.

Les aides publiques à la presse en 1997, 1998 et 1999 (en millions de francs)

 

1997

1998

1999

I- Dépense fiscale de l'État en faveur de la presse

 
 
 

1- Taux super réduit de TVA (1)
(art. 298 septies du CGI)

1000

1200

1200

2- Régime spécial de provisions pour investissement
(art. 39 bis du CGI)

210

150

150

II- Dépense fiscale des collectivités locales
exonération de taxe professionnelle (article 1458 du CGI)

1 190 (e)

1 235 (e)

1 206 (e)

III- Aides indirectes des entreprises publiques

 
 
 

1- Coût du transport postal supporté par La Poste

3350

3252

3104

2- Contribution de l'État au service obligatoire de transport de presse par la poste

1900 (3)

1850 (3)

1850 (3)

TOTAL

7 750 (e)

7 687 (e)

7 510 (e)

(1) Dépense fiscale calculée par rapport au taux réduit de TVA de 5,5 %.

(2) estimation

Les chiffres 1999 sont semblables à ceux fournis pour 1998. La différence par rapport aux chiffres de l'an dernier résulte d'un léger ajustement à la baisse du coût du transport postal, ainsi que de la baisse de la contribution de l'État au service obligatoire, qui passe de 1.900 à 1.850 millions de francs .

On note, en ce qui concerne l'aide postale, que celle-ci a été réévaluée - comptablement - à la suite d'un rapport de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des postes et télécommunications de 1996. Elle s'élèverait ainsi à 3.292 millions de francs en 1995 et 3.498 millions de francs en 1996 et 3.350 seulement en 1997 . Pour 1997 et 1998, elle était estimée respectivement à 3.252 et 3.104 millions de francs, chiffre maintenu pour l'année 1999.

Les prévisions tiennent compte de la revalorisation tarifaire et de l'effort de productivité, mentionné dans les accords État/presse/Poste du 4 juillet 1996 et du 10 janvier 1997.

Ces accords État/presse/Poste ont permis de mettre en place une nouvelle grille tarifaire : la grille précédente, outre les subventions croisées qu'elle générait, était considérée par La Poste et la presse comme peu incitative, notamment dans la mesure où elle ne tenait pas suffisamment compte du niveau de préparation des dépôts et du degré d'urgence.

Il faut également rappeler, que, conformément aux accords de la table ronde, un observatoire des tarifs postaux a été mis en place en juin 1997. Il pourrait permettre aux publications les plus fragilisées par l'application du nouveau dispositif tarifaire de bénéficier de mesures particulières. Le financement du dispositif sera assuré par la Poste à hauteur de 10 millions de francs et 5 millions de francs en 1999 et 2000.

*

Au total, si, pour récapituler l'ensemble des aides de l'État, l'on additionne, d'un côté, les crédits budgétaires et, de l'autre, les aides indirectes (qui résultent en partie d'estimations), on aboutit, pour 1999, au total de 8.363 millions de francs.

III. LES ENJEUX À MOYEN TERME

La presse, qu'elle soit nationale ou locale, générale ou spécialisée, se développe dans un milieu ouvert, évolutif. La diffusion croissante d'Internet, l'accélération de la convergence avec le passage rapide au " tout numérique " changent les données de la concurrence pour la presse.

On a dépassé le stade où l'on pouvait opposer la presse à la télévision, l'écrit à l'image. Les uns comme les autres ne peuvent concevoir leur avenir que comme naturellement multimédias.

D'où sans doute des revirements stratégiques qui résultent de ce que la presse a compris qu'elle ne pouvait pas se replier sur son seul marché traditionnel et qu'elle devait passer à l'offensive pour mettre en valeur tout le savoir faire qu'elle a acquis dans l'écrit.

1. Les télévisions locales : un débouché naturel pour la presse ?

Longtemps les relations entre la presse et la télévision ont été conçues de façon simple voire simpliste comme un affrontement frontal dans le cadre d'un processus de sélection quasi - darwinien : compétition pour l'audience mais aussi compétition pour les recettes publicitaires.

L'évolution réglementaire liée à la mise en place d'un véritable espace audiovisuel européen va faire sauter les barrières censées protéger les recettes publicitaires de la presse.

A l'heure actuelle, la grande distribution n'a pas accès aux écrans de télévision - avec la presse elle-même et le livre -. Ces réglementations, qui n'existent pas dans les autres pays européens, devront à l'évidence évoluer. Or la grande distribution représente 40% des recettes publicitaires de la presse quotidienne de province.

Longtemps, la situation a paru bloquée jusqu'à ce que, sous la pression des télévisions locales, dont l'économie est particulièrement fragile comme en témoigne notamment le sort de Télé Mont Blanc, on ait abordé la question d'une évolution de la réglementation. Les esprit ont évolué comme en témoignent les conclusions du rapport présenté par MM. Michel Francaix et Jacques Vistel à l'automne 1998, qui a estimé que la meilleure voie d'entrée de la presse quotidienne régionale dans l'audiovisuel est constituée par les télévisions locales et juge souhaitable que le CSA examine avec une attention particulière les projets de télévisions locales qui associeront la presse quotidienne régionale, dans le respect du pluralisme.

En effet, l'intérêt qu'un nombre croissant de télévisions locales portent désormais à des développements dans les télévisions locales, change les données de la question.

L'avènement annoncé du numérique terrestre devrait faciliter la solution du problème en offrant à la presse des possibilités de diffusion accrues.

La plupart des grands journaux régionaux ont fait connaître récemment leur souhait d'être opérateurs d'un service de télévision hertzien. Ils ont compris que dans un contexte de concurrence intense, la télévision représentait un champ nouveau dans lequel ils pouvaient mettre en valeur leurs compétences.

Dans son rapport au Conseil économique et social sur les effets des nouvelles technologies sur l'industrie de la presse, M. Jean Miot, estime qu'un vingtaine de chaînes locales pourraient être créés par la presse quotidienne régionale. Mais, ajoute-t-il, elles ne pourront vivre qu'à la condition d'avoir " accès au marché national de la publicité. "

Cette évolution soulève deux questions :

•  le développement multimédias des journaux de la presse quotidienne de province met-elle en question le pluralisme de l'information au niveau local ? Votre rapporteur spécial estime que, sous réserve de cas particuliers, le numérique va entraîner une prolifération des chaînes qui ne peut que faire considérer ce risque comme limité 1( * ) ;

•  l'économie des chaînes locales est-elle assurée compte tenu du potentiel restreint des dépenses locales, eu égard aux coûts d'une chaîne de télévision locale ? Votre rapporteur spécial considère à cet égard, d'une part que la technologie permet de produire des émissions à faible coût - et que les frais facturés par TDF sont bien souvent exorbitants - et d'autre part que les système de syndication publicitaire comme celui préconisé autour des projets portés par le Parisien est de nature à accroître les ressources globales des chaînes locales.

Le rapport conclut sur ce sujet en affirmant : " C'est en se diversifiant, comme elle l'a déjà fait avec les gratuits et les radios locales, que la presse régionale pourra conserver son marché publicitaire, sur les télévisions de proximité comme sur les sites Internet. "

2. Internet une nouvelle frontière pour la presse ?

Le rapport du conseil économique et social déjà cité démontre que la presse est en train de trouver dans Internet une nouvelle frontière de développement.

La presse doit apprendre à s'insérer dans un espace, le cyberspace, dans lequel chacun peut être consommateur et producteur d'information. L'article est une sorte de planète qui, lorsqu'on l'explore, renvoie à tout un ensemble d'autres planètes, base de données, images, bande son vidéo, forum de discussion...

Pour le Conseil économique et social, " La presse survivra à condition qu'elle s'adapte. Les journaux continueront d'exister si les éditeurs comprennent que le multimédia n'est pas un support de substitution mais de complément. Le transfert du papier à l'écran est voué à l'échec, sauf en matière d'archives et de banques de données ".

C'est également l'avis de professionnels, qui ne manquent pas de rappeler qu'on ne peut se contenter de transposer un journal tel quel sur Internet. " Aujourd'hui la presse en ligne n'a pas pour vocation de capter un lectorat nouveau, ni même de prolonger le contenu du support sur le Net, mais bien d'apporter une prestation de service dynamique et qualitative ", note l'enquête réalisée par Zenith Digital (Zenith Media), intitulée " Quand la presse écrite fait de l'Internet ", citée par le rapport du conseil économique et social...

La presse nationale s'est résolument lancée sur Internet : Libération a lancé un site d'accès gratuit conçu comme un moyen supplémentaire de développer les recettes publicitaires du titre, Le Monde, en ligne depuis quatre ans, a investi 30 millions de francs dans sa filiale multimédia et vient de restructurer totalement son site, quant au Parisien, il privilégie les services pratiques " on line ", avec notamment 200.000 articles consultables sur abonnement, une revue de presse payante et un programme Cityguide, outil pratique destiné à aider les internautes dans leurs choix de sorties en Ile-de-France. Chaque mois, le site du Parisien enregistre 600.000 pages vues.

Les magazines ne sont pas en reste ; Elle, avec un million de pages vues par mois, crée sans cesse de nouvelles fonctions destinées à renforcer le lien de proximité créé avec ses lectrices en développant notamment les forums de discussion, et en offrant également la possibilité à chaque internaute de créer sa page personnelle, Paris-Match, a lancé, à l'occasion de son 50 ème anniversaire, une nouvelle version de ses pages Web (700.000 pages vues par mois), qui s'appuie sur un concept de télévision en ligne avec pour objectif de prolonger l'actualité autour d'un programme au contenu exclusif

La presse française va devoir changer de méthodes commerciales : pour retenir l'internaute, il lui faut compléter le contenu éditorial par des services pratiques. C'est donc un vrai changement de métier. Il va falloir apprendre à investir dans le marketing pour retenir l'internaute " zappeur ".

L'accès étant gratuit, la rémunération ne peut se faire que par le trafic commercial généré par le site : la cible n'est plus seulement le lecteur mais le " consommateur ".

Les professionnels de l'information vont sans doute devoir se transformer en commerçants électroniques et développer la vente de services rattachés aux différentes rubriques du journal comme les spectacles, les voyages ou les livres.


Le site Web offre des possibilités de ciblage, de personnalisation, d'interactivité, incomparables avec le support papier. La fidélisation sera celle attachée à la marque du titre.

*

Ce qui est certain c'est que les perspectives offertes par Internet mais aussi le défi concurrentiel qu'il constitue, va obliger la presse à regrouper ses forces.

On l'a vu avec PQR 66 pour la syndication publicitaire, on le voit aujourd'hui pour les petites annonces. Vingt-trois quotidiens régionaux vont unir leurs petites annonces sur un même site, via la société " France P. A. Presse ", permettant leur commercialisation et leur exploitation. La société anonyme " France P. A. Presse " est en cours de constitution. Son capital sera réparti entre les différents groupes éditeurs en fonction de l'audience de leurs publications 2( * ) .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 23 novembre sous la présidence de M. Alain Lambert, président , la commission a, après que le président eut salué la présence de MM. Louis de Broissia et Jean-Paul Hugot, rapporteurs pour avis de la commission des affaires culturelles, respectivement pour les crédits de la presse et de la communication audiovisuelle procédé à l'examen des crédits de la presse pour 2000 , sur le rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial .

Après avoir indiqué que le système d'aide à la presse donnait, dans l'ensemble, satisfaction à la profession et que ses modalités répondaient au souci de garantir le pluralisme, le rapporteur spécial a voulu, sans entrer dans une analyse détaillée des dotations, insister sur trois questions.

Il a souligné que l'État continue de se comporter comme s'il était possible de ponctionner les entreprises publiques, en oubliant de les rémunérer au juste prix pour les services qu'elles rendent : en l'occurrence, il s'agit de la SNCF - dont on connaît les difficultés qu'elle rencontre pour équilibrer les comptes du Sernam - qui se voit imposer par l'État un remboursement forfaitaire déconnecté des quantités transportées, indépendamment de l'arriéré de paiement dû par l'État à ce titre.

Il a également attiré l'attention sur la laborieuse mise en route du fonds de modernisation de la presse, à la fois parce que le rendement de la taxe sur le hors médias qui le finance est plus faible que prévu, et parce qu'il semble que l'État et la profession aient rencontré quelques difficultés à se mettre d'accord sur une politique et, en particulier, pour définir des critères d'accès aux aides : finalement, près de deux ans après le vote de la loi instituant la ressource et le fonds de modernisation, aucune aide n'avait encore été distribuée.

Le rapporteur spécial a, en dernier lieu, évoqué la situation de l'Agence France Presse. Il a rappelé que cette agence, qui pesait il y a vingt ans le même poids que ses concurrents anglo-saxons, Associated Press, et Reuters, ne représente plus que 5 % du chiffre d'affaires de cette dernière, faute d'avoir su se diversifier dans l'information économique.

Il a insisté sur le fait que son statut actuel constituait un mélange des genres qui rendait l'agence inadaptée à la compétition économique : tandis qu'on trouve, au sein de son conseil d'administration, les clients de l'agence que sont les journaux, l'État, qui assure pourtant directement ou indirectement près de la moitié des recettes, n'y figure pas, même s'il est évident que le nouveau président de l'AFP a bénéficié de son appui pour être élu.

Pour le rapporteur spécial, l'agence se comporte comme un navire à la dérive, au point que l'accomplissement de la mission fondamentale de l'AFP, qui est d'apporter un regard français sur le monde, paraît menacé.

Après que M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour les crédits de la presse, fut intervenu pour indiquer qu'il partageait les orientations manifestées par le rapporteur spécial, M. Claude Belot a, en réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, indiqué qu'il avait l'intention en sa qualité de rapporteur spécial de se pencher sur la situation de l'AFP, compte tenu des craintes que suscite l'avenir de cet organisme chez tous ceux qui sont attachés à une certaine idée du service public.

A l'issue du débat, le rapporteur spécial a émis un avis favorable aux crédits de la presse .

Réunie le mardi 23 novembre 1999 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a examiné les crédits du budget de la Presse , sur le rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial.

A l'issue de cet examen, elle a confirmé sa proposition de rejeter les crédits des services généraux du Premier ministre.

Elle a, à nouveau, confirmé cette position lors d'une réunion tenue le jeudi 25 novembre 1999, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.



1 Ces interventions sont encadrées par le dispositif anti-concentration prévu par l'article 41-2 de la loi du 30 septembre 1986 relatif à la prohibition du cumul multimédia régional ou local. Dans une même zone géographique déterminée, un groupe de presse local éditeur d'un quotidien d'information politique et générale ne peut se trouver dans plus d'une des situations suivantes :

- être titulaire d'une ou plusieurs autorisations relatives à des services de télévision, à caractère national ou non, diffusés par voie hertzienne terrestre dans la zone considérée ;

- être titulaire d'une autorisation relative à un service radiophonique dont l'audience potentielle est supérieure à 10 % des audiences potentielles cumulées dans la même zone de l'ensemble des services, publics ou autorisés, de même nature ;

- être titulaire d'une ou plusieurs autorisations relatives à l'exploitation de réseaux distribuant par câble à l'intérieur de cette zone des services de radiodiffusion sonore et de télévision.

2 L'Alsace, Le Bien public, Le Journal (le Saône-et-Loire, Le Dauphiné libéré, La Dépêche du Midi, Les Dernières Nouvelles d'Alsace, l'Est républicain, La Montagne, Le Populaire du Centre, Le Journal du Centre, Le Berry républicain, Midi-Libre, L'indépendants Nice-Matin, La Nouvelle République du Centre-Ouest, Le Parisien, Le Progrès, La Provence, Le Républicain lorrain, Sud-Ouest, Charente libre, Le Télégramme de Brest, et La Voix du Nord



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