II. OBSERVATIONS

A. DEUX SUPPRESSIONS CRITIQUABLES

Plusieurs articles du projet de loi de finances, l'article 30 de sa première partie et l'article 44 rattaché aux comptes spéciaux du Trésor comportant des aménagements critiquables : la suppression du fonds d'aménagement de la région Ile de France (FARIF) et celle du fonds national du livre.

1. La suppression du FARIF

La suppression du FARIF qui contraste singulièrement avec l'abondement de ses ressources réclamé avec obstination l'an dernier manifeste la volonté de revenir au budget général comme principal support d'intervention de l'Etat dans la région Ile-de-France.

Cette réintégration n'est toutefois que partielle puisque l'article 30 du projet de loi de finances maintient le principe de l'affectation d'une partie du produit de la taxe sur les bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage à la région Ile-de-France au titre de la compensation accordée à cette région du fait de l'extinction de sa DGF. La suppression du FARIF a pour effet de conférer à cette affectation un caractère direct puisque, par hypothèse, elle ne transiterait plus par le fonds.

La réintégration entreprise se traduit, du côté recettes, par l'affectation au budget général de la portion du produit de la taxe qui ne serait pas versée directement à la région Ile-de-France. La quote-part versée au budget général serait au minimum de 50 % du produit de la taxe et pourrait dépasser cette proportion dès lors que la taxe rapporterait davantage que 1.400, 1.680, 1.920, 2.160 et 2.400 millions de francs en 2000, 2001, 2002, 2003, 2004 et au-delà respectivement.

On doit souligner que si les conditions de l'affectation directe à la région Ile-de-France du produit de la taxe s'inspirent du système de compension organisé par le II de l'article 73 de loi n° 95-119 du 4 février 1995 et par la loi de finances pour 1995, -en particulier, au delà de 2004 la compensation est gelée et à l'inverse de la DGF ne bénéficie d'aucune indexation-, le mécanisme proposé comporte une différence importante par rapport à celui de la loi précitée.

La garantie d'un versement supplémentaire à la région Ile de France de 120 millions de francs année jusqu'à 2004 disparaît en droit au profit d'un dispositif qui, pour avoir la même portée suppose que la taxe qui en est le support atteigne un rendement suffisant. L'affectation à la région Ile de France est en effet organisée par référence à une fraction - 50 % - du produit de ladite taxe dans la limite de plafonds annuels qui correspondent au programme de compensation prévu par la loi de 1995.

Cette disposition d'apparence anodine introduit une modification du système de compensation adopté en 1995 qui, compte tenu des incertitudes sur l'avenir d'une taxe dont la conception est pour le moins imparfaite, comporte le risque d'une réduction de sa portée.

Ce risque pour la région Ile de France s'ajoute aux risques associés à la suppression du FARIF proposée dans le précédent projet de loi.
Celle-ci aboutirait à l'extinction de la procédure d'affectation du produit d'une taxe spécifique à l'Ile de France à des dépenses réalisées sur le territoire de celle-ci et destinées à résoudre des problèmes spécifiques à l'Ile de France. La suppression de l'affectation ne s'accompagne pas de celle de la taxe spécifique et ouvre ainsi la liberté d'utiliser son produit, plus précisément, la partie de ce produit qui ne serait pas directement versée à la région, à des fins étrangères à sa cause première.

Du reste, les conditions dans lesquelles sont réintégrées au budget général les crédits auparavant pris en charge par le FARIF dans le présent projet de loi n'assurent pas le maintien du niveau d'intervention qui était celui du FARIF.

Du côté dépenses, cette réintégration a pour contrepartie un abondement des crédits de divers budgets qui prennent en charge les dépenses, variables dans leur nature, jusqu'alors réalisées à partir du FARIF.

Les conditions dans lesquelles sont inscrits au budget général les crédits du FARIF conduisent en l'état à une économie budgétaire reflet d'une réduction de l'intensité de l'effort de l'Etat dans la région Ile de France et contribuent à l'amélioration du déficit public.

Du premier point de vue, il faut relever que si, pour les autorisations de programme, le transfert respecte l'enveloppe qui aurait été disponible dans les écritures du FARIF, tout en apportant quelques aménagements au regard de la répartition de l'objet des crédits 125( * ) , il n'en va pas de même en matière de crédits de paiement. Pour ces derniers, seuls 622,5 millions de francs de crédits sont inscrits au budget général, soit près de 900 millions de moins que la dotation théorique du FARIF.

On doit souligner incidemment que fixer la dotation des crédits de paiement à cette somme a pour effet, compte tenu de la recette inscrite au titre de la taxe, d'améliorer le solde budgétaire de 900 millions de francs.

La suppression du FARIF ne peut ainsi s'analyser que comme la suppression d'une procédure d'affectation d'une ressource spéciale -la taxe prélevée sur les bureaux, les locaux commerciaux et de stockage dans la région Ile-de-France- à des interventions elles-mêmes spéciales puisque destinées à résoudre les problèmes d'infrastructure particuliers à l'Ile-de-France.

En effet, la taxe spécifique qui alimentait le fonds est quant à elle maintenue. La suppression de la procédure d'affectation apporte ipso facto un certain doute quant à la destination future du produit d'une taxe, qui, elle, reste spécifique à l'Ile-de-France. La suppression du FARIF laisse en effet à l'Etat une totale liberté d'utilisation de la fraction de la taxe qui ne sera pas directement versée à la région et qui, décroissante dans un premier temps, devrait augmenter après 2004.

Il est évidemment à craindre que cette liberté ne soit mise à profit pour modifier l'affectation de la taxe dans un sens qui l'éloignerait de sa logique initiale.

Le maintien de la taxe appelle le maintien de son affectation et donc du FARIF.

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