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Rapport n° 133 (1999-2000) de M. Bernard SEILLIER , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 15 décembre 1999

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N° 133

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 15 décembre 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relative à la création d'un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC),

Par M. Bernard SEILLIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Jean-Pierre Vial, Guy Vissac.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1516 rect., 1836 et T.A. 365 .

Sénat : 19 (1999-2000).

Emploi .

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 15 décembre 1999 sous la présidence de M. Jean Delaneau, président , la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Bernard Seillier sur la proposition de loi n° 19 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, relative à la création d'un conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC).

M. Bernard Seillier, rapporteur, a tout d'abord rappelé l'historique de l'actuel conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts. Il a ainsi indiqué qu'un décret de 1966, modifié en 1976, avait créé le centre d'études des revenus et des coûts (CERC), qui était un centre autonome rattaché au commissariat général du Plan.

Il a précisé qu'en 1993, un double diagnostic avait été porté sur ce centre d'étude qui avait conduit la commission des affaires sociales à introduire, dans la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, une disposition afin de remplacer cet organisme par le conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts (CSERC) : il était apparu en effet que la réflexion sur les inégalités de revenus ne devait pas être détachée de l'analyse des effets du ralentissement de la croissance et de l'examen des conditions de la création d'emplois ; par ailleurs, le centre d'étude des revenus et des coûts présentait l'inconvénient d'être devenu une institution aux effectifs nombreux, où l'on faisait carrière au détriment du renouvellement des hommes et des idées.

M. Bernard Seillier, rapporteur, a présenté les caractéristiques du CSERC ; il a rappelé que la loi de 1993 avait élargi la mission de ce conseil à la connaissance des liens entre l'emploi et les revenus et avait souhaité mettre en place un organisme léger, destiné à évaluer les études existantes et à commander des travaux, plutôt que de les réaliser par lui-même.

Il a rappelé que l'audience des travaux du CSERC progressait après des débuts marqués par une transition difficile avec l'organisme qui l'avait précédé.

Il a indiqué que, par lettre de mission du 30 septembre 1997, M. Lionel Jospin avait demandé à Mme Marie-Thérèse Join-Lambert un rapport sur le réexamen de la situation du CSERC, qui avait été remis en janvier 1998.

Il a rappelé que, dans le cadre de la loi du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, un article tendant à la création d'un conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC), introduit en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale, avait été invalidé par le Conseil constitutionnel pour des raisons de procédure.

Après avoir indiqué que l'Assemblée nationale avait adopté, le 14 octobre dernier, une proposition de loi ayant le même objet, M. Bernard Seillier, rapporteur, a souligné que l'organisme que proposait d'instituer cette proposition de loi présentait, à bien des égards, des ressemblances avec le conseil supérieur mis en place en 1993.

Il a souligné que le texte de la proposition de loi constituait un cadre général qui renvoyait au pouvoir réglementaire le soin de constituer le nouvel organisme d'étude et a observé que la plupart des dispositions du texte n'étaient pas d'ordre législatif, mais réglementaire.

Il a remarqué que la seule disposition à caractère vraiment législatif, qui faisait obligation aux collectivités locales de transmettre des informations au CERC, pourrait appeler des réserves au regard du principe de l'autonomie des collectivités territoriales.

Il a considéré que le contenu des débats à l'Assemblée nationale pouvait faire craindre, en revanche, une possible " restauration " de l'ancien CERC et un rétablissement des dérives qui l'avaient caractérisé. Il s'est notamment inquiété des déclarations visant à prédéterminer les conclusions du nouvel organisme ou à reconstituer des équipes permanentes.

Il a estimé que le CERC ne méritait ni excès d'honneur, ni indignité, en soulignant qu'il s'agissait d'abord d'un organisme à vocation statistique qui n'appelait pas de long débat législatif.

Il a rappelé qu'en 1993 le recours au Parlement avait été nécessaire pour modifier le cours des choses et donner un " coup de boutoir " à l'égard de structures administratives menacées de blocages. Il n'a pas estimé anormal aujourd'hui que le Premier ministre puisse organiser les services placés auprès de lui et assumer ses responsabilités quant à leur indépendance et leur mode de fonctionnement.

Aussi a-t-il proposé à la commission un dispositif simple tendant à abroger l'article 78 de la loi du 20 décembre 1993 afin de permettre au Gouvernement de constituer rapidement, par voie réglementaire, le nouveau CERC.

Mme Marie-Madeleine Dieulangard a déclaré apprécier la tonalité du rapport, tout en remarquant quelques éléments de polémique à l'égard du bilan de l'ancien CERC. Elle a souligné l'importance et l'intérêt d'un organisme qui serait chargé d'observer les liens entre les revenus, l'emploi et la cohésion sociale. Elle a estimé que les collectivités territoriales pouvaient apporter des informations intéressantes dans les domaines de compétences d'un organisme comme le CERC, en particulier dans le domaine de la cohésion sociale.

M. Guy Fischer a considéré que la proposition du rapporteur de " renvoyer la balle dans le camp " du Premier ministre pouvait apparaître comme une solution possible. Evoquant les mesures prises par le Gouvernement lors d'un récent conseil interministériel des villes, il a estimé qu'il était extrêmement important d'être attentif à l'évolution des inégalités sociales et territoriales dans une société qui, à l'évidence, devenait de plus en plus duale.

M. Jean Chérioux a déclaré partager les conclusions du rapporteur qui permettaient de montrer où se situaient les responsabilités et de ne pas empiéter sur le pouvoir réglementaire.

M. Paul Blanc a souligné que la solution proposée par le rapporteur permettait d'agir avec rapidité pour mettre en place le nouveau CERC.

M. Jean Delaneau, président, a estimé que la proposition du rapporteur pourrait être reprise par l'Assemblée nationale et qu'elle présentait l'avantage de simplifier la procédure.

M. Bernard Seillier, rapporteur, a rappelé que les collectivités locales pouvaient effectivement être une source d'informations en matière d'observation des phénomènes d'exclusion sociale, qui relevaient plus précisément de l'Observatoire de la pauvreté et de l'exclusion sociale créé en 1998. En revanche, il a estimé qu'elles n'étaient pas particulièrement aptes à fournir des informations sur l'ensemble des revenus. Il a rappelé le rôle joué par l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la direction de l'animation, de la recherche, des études et des statistiques (DARES) et le service des statistiques, des études et des systèmes d'information (SESI) en matière de collecte statistique sur les revenus et les inégalités. Il a donc estimé inutile de prévoir une possibilité d'injonction aux collectivités locales.

Il a souligné que la démarche qu'il proposait à la commission procédait du constat que le CSERC rencontrait aujourd'hui de graves difficultés en raison du non-renouvellement de ses rapporteurs et ne " défigurait " pas la dynamique de mise en place d'un nouvel organisme que le Gouvernement pouvait constituer par décret.

Il a rappelé, par ailleurs, que le CERC aurait vocation à assurer une jonction entre le commissariat général du Plan, qui assurait l'animation du débat sur les questions relatives à la cohésion sociale, et les organismes statistiques chargés de recueillir les informations sur le terrain.

Puis la commission a procédé à l'examen des articles.

M. Guy Fischer et Mme Marie-Madeleine Dieulangard ont déclaré qu'ils souhaitaient réserver leur vote sur les amendements et le texte définitif pour réfléchir aux propositions du rapporteur.

A l'article premier , la commission a adopté un amendement prévoyant l'abrogation de l'article 78 de la loi du 20 décembre 1993 à compter du 1 er avril 2000.

Puis, par coordination, la commission a adopté six amendements de suppression des articles 2 à 7 .

Enfin, la commission a adopté un amendement modifiant l'intitulé de la proposition de loi par coordination avec l'amendement adopté à l'article premier.

La commission a enfin adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi amendé.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le 14 octobre dernier, l'Assemblée nationale a adopté une proposition de loi relative à la création d'un conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale dénommé CERC. Ce nouvel organisme se substituerait à l'actuel conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts (CSERC) lui-même mis en place par la loi quinquennale du 20 décembre 1993 afin de se substituer à l'ancien centre d'étude des revenus et des coûts (CERC).

I. DU CERC AU CSERC

Avant d'examiner sur le fond le texte qui nous est transmis, il apparaît utile de procéder à un bref rappel historique sur l'évolution du CERC de 1966 à 1993 puis sur la mise en place du CSERC à compter de cette date.

A. LE CERC DE 1966 À 1993

Le CERC, sous sa première forme, a été une institution originale et utile, mais qui appelait une rénovation de ses méthodes de travail.

1. Un organisme créé en conseil des ministres

Par décret n° 66-227 du 18 avril 1966 (cf. annexe 1) , signé par le Général de Gaulle, Président de la République, ainsi que par MM. Georges Pompidou, Premier ministre, Michel Debré, ministre de l'économie et des finances et Jean-Marcel Jeanneney, ministre des affaires sociales, a été créé le centre d'études des revenus et des coûts (CERC), dans une période où se développait une réflexion sur la politique des revenus à la suite de la grève des mineurs de 1963.

Le CERC est alors un centre autonome rattaché au commissariat général du Plan, disposant d'un rapporteur général et de deux rapporteurs adjoints placés sous la responsabilité d'un conseil composé de six à huit personnalités nommées pour quatre ans par décret en conseil des ministres, et choisies à raison de leur compétence et de leur expérience.

En 1976, M. Raymond Barre étant alors Premier ministre, un nouveau décret n° 76-913 du 7 octobre 1976 (cf. annexe 2) signé par le Président de la République, M. Valéry Giscard d'Estaing, apporte trois séries de modifications : les travaux du CERC peuvent dorénavant être publiés même sans autorisation du Gouvernement ; un rapport de synthèse périodique est institué sur l'évolution et la répartition des différents revenus par rapport à l'évolution économique d'ensemble ainsi que sur les écarts de revenus avant et après prélèvements ; enfin, le nombre de rapporteurs adjoints au CERC n'est plus limité comme c'était le cas depuis 1966.

De 1966 à 1993, le CERC va réaliser de nombreuses études, notamment des rapports conjoncturels sur l'évolution des revenus des Français, qui le conduiront d'ailleurs à mettre l'accent sur l'accroissement des inégalités dans la société française au début des années 80.

S'agissant des travaux du CERC, deux périodes peuvent être distinguées :

De 1966 à 1976, l'économie est marquée par une croissance forte et un taux d'inflation élevé : le rapport du Gouvernement annexé au décret de 1966 rappelle ainsi qu'au-delà des mouvements de revenus et des prix, le CERC devait " examiner les facteurs externes qui ont pu influencer les décisions et les comportements des responsables de secteur ou d'entreprise " et " permettre de mieux situer les origines des diverses tensions inflationnistes qui menacent en permanence une économie en forte progression ".

Le CERC public alors vingt-deux études orientées principalement vers les mécanismes de formation des prix et de répartition des fruits de la croissance, à travers les comptes de surplus de productivité. Il présente aussi des études sur les inégalités de revenus, notamment dans le secteur des professions non salariées moins bien connues qu'aujourd'hui, assorties de comparaisons internationales.

De 1967 à 1986, il existe également un conseil particulier, le " CERC participation ", chargé d'analyser l'application de l'ordonnance du 17 août 1967 instituant la participation des salariés aux fruits de l'expansion des entreprises.

La seconde période s'étend de 1976 à 1993. Les études spécifiques du CERC sont complétées par la publication d'une étude de synthèse des revenus, à intervalle de quatre ou cinq ans, la première étude étant parue en 1977. A partir de 1983, le CERC présente également un constat annuel de l'évolution des revenus en France.

Simultanément, le CERC va connaître une forte progression de ses effectifs : composé à peine d'une dizaine de personnes à l'origine, il compte, en 1993, 42 emplois budgétaires, dont 27 sur des emplois de chargés de mission et 15 sur des emplois de personnel administratif, sans compter de nombreux vacataires.

Evolution des effectifs budgétaires du CERC

PÉRIODE

EFFECTIFS

1967

10

1968

19

1696

21

1970-1971

24

1972

28

1973-1976

29

1977-1981

41

1982

44

1983

45

1984

44

1985-1993

43

1994

42

2. Une nécessaire démarche de renouveau

En 1993, un double diagnostic peut être porté sur le CERC.

Tout d'abord dans un contexte de crise, la réflexion sur les inégalités de revenus n'a pas de sens si elle est détachée de l'analyse des effets du ralentissement de la croissance et si elle ne débouche pas sur l'examen des conditions de la création d'emploi.

En d'autre termes, le CERC semblait parfois privilégier, dans ses études reprises par les médias, la question des inégalités de revenus, appréciée de façon statique, en abandonnant la réflexion sur les charges diverses qui pèsent sur les facteurs de production, notamment le travail.

Or, chacun sait que le poids des prélèvements peut avoir un impact négatif sur la croissance, et donc l'emploi, et générer à ce titre de nouvelles inégalités.

Le second élément du diagnostic portait sur l'alourdissement du CERC qui était devenu, non plus l'équipe légère des origines, mais une sorte d'institution où l'on faisait carrière au détriment du renouvellement des hommes et des idées. Ainsi, en 1993, la moitié des personnels affichait une ancienneté de plus de quinze ans dans l'institution.

Pyramide d'ancienneté au CERC

1 er décembre 1993

< 2 ans

2 à 5 ans

5 à 10 ans

10 à 15 ans

15 à 20 ans

20 à 25 ans

> 25 ans

TOTAL

Total cadres

6

6

1

3

10

6

0

32

Total non-cadres

1

2

0

4

3

5

1

16

Total général

7

8

1

7

13

11

1

48

Face à l'approfondissement de la crise économique à partir de 1991 , il importait que le CERC retrouve un rôle de " veilleur " dans le domaine des revenus, de l'emploi et des coûts, sans consacrer son énergie à la collecte directe de statistiques, mission dont l'INSEE, par exemple, s'acquitte fort bien.

La loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle est apparue comme un support adéquat pour montrer que le Parlement lui-même souhaitait soutenir le Gouvernement afin de donner une nouvelle impulsion au CERC, élargir le champ de ses missions et moderniser ses méthodes de travail, dans le respect du principe d'une indépendance toujours garantie.

C'est pourquoi, à l'initiative de votre commission des Affaires sociales, par la voix de notre excellent collègue M. Louis Souvet, rapporteur de la loi quinquennale, un amendement a été adopté, le 10 novembre 1993, en première lecture par le Sénat, puis repris dans le texte élaboré en commission mixte paritaire, afin de remplacer le CERC par un nouvel organisme, le conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts (CSERC).

Dans son rapport, M. Louis Souvet rappelait que les niveaux de vie et du bien-être économique ne s'appréciaient pas " seulement à partir de l'évolution des revenus des ménages mais aussi en fonction de perspectives d'emploi qui s'ouvraient aux actifs ".

Il précisait que le nouveau CSERC permettrait, en se substituant au CERC : " d'en moderniser les méthodes de travail et d'en réorganiser les missions, de lui assurer une plus grande indépendance et de permettre sa saisine par le Parlement ainsi que de régler les problèmes de personnels actuellement sans possibilité de promotion et de mobilité " 1 ( * ) .

B. LES CARACTÉRISTIQUES DE LA NOUVELLE FORMULE DU CSERC

1. Un véritable " conseil supérieur "

La mission du CSERC est plus large que celle de l'ancien CERC : il contribue non seulement à la connaissance des revenus et des coûts de production mais également à celle des revenus, des coûts de production et des liens entre l'emploi et les revenus .

De plus, il est chargé d'une fonction nouvelle de proposition , plus précisément de " faire des recommandations de nature à favoriser l'emploi ".

Il comprend neuf membres, nommés suivant une procédure définie par décret en Conseil d'Etat, le législateur ayant précisé que devaient être garanties " l'indépendance et la qualité des travaux du conseil " . Le décret n° 94-414 du 25 mai 1994 ( cf. annexe n° 4 ) a défini la composition et les modalités de fonctionnement du CSERC. Il prévoit ainsi que le commissaire général au Plan et le directeur de l'INSEE sont membres de droit du Conseil. Quatre membres sont désignés respectivement par le Conseil d'Etat, la Cour des comptes, le Conseil national de l'information statistique et le Conseil national des universités . Les six personnes ainsi désignées cooptent, en outre, trois personnalités qualifiées en raison de leur expérience.

Le CSERC n'est plus un " centre autonome " mais un conseil supérieur , c'est-à-dire un organisme léger, qui a vocation à évaluer les études existantes et à commander des travaux aux administrations de l'Etat plutôt que de les réaliser lui-même.

Au total, le CSERC ne comprend plus qu'un effectif de neuf personnes placées auprès des sept membres du conseil. La durée de présence des rapporteurs est limitée à trois ans, cette période pouvant être prolongée pour une durée qui ne peut dépasser un an. Ces rapporteurs sont désignés par le président du CSERC au sein de corps de fonctionnaires limitativement définis (fonctionnaires recrutés par la voie de l'ENA, administrateurs de l'INSEE ou recrutés par la voie de l'Ecole polytechnique, professeurs d'université, directeurs de recherche).

Ils sont placés sous l'autorité d'un rapporteur général nommé par arrêté du Premier ministre sur proposition du président du CSERC. Le mandat de rapporteur général est de trois ans, renouvelable une fois.

Les blocages de l'ancien CERC montraient qu'il était nécessaire que les rapporteurs ne restent pas en poste trop longtemps sauf à voir s'effilocher le réseau relationnel qu'ils avaient réussi à se constituer dans leur administration d'origine et à bloquer toute possibilité d'évolution des nouveaux recrutés.

Il est important de souligner que les personnels de l'ancien CERC ont été reclassés auprès du commissariat général du Plan, pour les personnels non cadres, et auprès de l'INSEE, pour les chargés de mission les personnels sous contrat à durée déterminée ont bénéficié de transfert de contrats.

Ces personnels ont été mis éventuellement à disposition auprès des organismes reprenant en charge les études antérieurement conduites et réalisées par le CERC, à savoir l'INSEE, la DARES et le SESI.

Ainsi, la revue Synthèses de l'INSEE présente régulièrement des travaux sur l'évolution des revenus et des patrimoines, l'évolution des salaires et des revenus non salariés ainsi que sur les revenus de transfert.

2. Une notoriété progressivement renforcée

Le contenu des travaux du CSERC ne peut être apprécié que sur une courte période puisque ces derniers n'ont commencé véritablement qu'en novembre 1994, date de nomination du président par le Premier ministre.

Six rapports ont été publiés, dont deux rapports qui dressent une analyse globale des évolutions de l'emploi et des revenus et quatre autres rapports à caractère thématique. Parmi ces derniers, le rapport intitulé " les minima sociaux entre protection et insertion " apporte des éléments de réflexion intéressants et novateurs sur les phénomènes de " trappe à pauvreté ".

L'audience des rapports du CSERC

TITRE

VENTES AU NUMÉRO

Inégalités d'emplois et de revenus. La Découverte, janvier 1996

835

Les allégements de charges sur les bas salaires. La Documentation française, juin 1996

329

Inégalités d'emploi et de revenus. Les années 90. La Documentation française, janvier 1997

1.401

Les minima sociaux. La Documentation française, octobre 1997

1.023

Durées du travail et emplois. La Documentation française, mai 1998

1.135

Le SMIC. La Documentation française, mai 1999

289

Source : CSERC.

L'audience des rapports du CERC peut s'apprécier à travers leur diffusion au numéro ; on peut noter avec M. Michel Dollé, le rapporteur général de cet organisme, que celle-ci tendait à s'améliorer après des débuts incertains.

Il reste que deux facteurs ont sans doute pu affaiblir à l'origine la notoriété du nouveau CSERC :

- tout d'abord, comme le souligne M. Michel Dollé, la transformation du CERC en CSERC a fait peser une sorte de " péché originel " sur les productions du nouvel organisme. L'existence de " CERC Association ", qui rassemble les personnels de l'ancien CERC et leurs amis, a pu évidemment contribué à faire peser un doute sur la légitimité des travaux du nouvel organisme ;

- ensuite, il apparaît que, du fait d'une présence insuffisante dans les médias, ni le président du CSERC, M. Pierre Cabanes, Conseiller d'Etat, ni les autres membres du conseil, ni le rapporteur général, n'ont réussi à se forger une image publique à une époque où, comme le fait remarquer M Jean-Michel Charpin, commissaire général au Plan, les médias sont réceptifs à une certaine personnalisation des débats dans un domaine où les sensibilités sont nombreuses à dialoguer et où les informations sont très diverses.

Pour autant le CSERC, qui travaillait sur des bases totalement nouvelles, est loin d'avoir démérité et semblait commencer à entrer dans un régime de croisière lorsque le Gouvernement a souhaité revenir en arrière.

II. LA " RESTAURATION " DU CERC

A. LA PROPOSITION DE LOI PORTANT CRÉATION DU CERC

Dès septembre 1997, M. Lionel Jospin, Premier ministre, envisageait un " réexamen de la situation " . C'est en définitive la voie de l'initiative parlementaire qui a été choisie.

1. Le rapport nuancé de Mme Join-Lambert

Par lettre du 30 septembre 1997, le Premier ministre -quatre mois après la nomination de son Gouvernement- confie une mission à Mme Marie-Thérèse Join-Lambert, inspecteur général des Affaires sociales.

Dans sa lettre de mission, M. Lionel Jospin, précise que " beaucoup ont regretté la disparition du CERC " et qu'il a été saisi de " demandes de réexamen de la situation " au regard du rôle qu'avait joué le CERC dans l'information et le débat économique et social.

Le Premier ministre ajoute dans sa lettre : " Il m'apparaît que cette question est importante et nécessite une réflexion approfondie ainsi que la consultation d'un assez grand nombre de partenaires (organisations syndicales, associations, administrations concernées, INSEE, instituts d'études et de recherche existants...). C'est pourquoi j'ai décidé de vous confier une mission à ce sujet avant de me déterminer, afin qu'après examen de la situation, vous me fassiez des propositions sur les évolutions souhaitables. "

A ce qui pourrait ressembler à une demande, à peine voilée, de " restauration " de l'ancien CERC, Mme Join-Lambert répond en janvier 1998 par un rapport nuancé.

Elle se prononce finalement en faveur d'un organisme nouveau, mieux dimensionné par rapport aux attentes des acteurs sociaux, centré sur l'étude de la répartition et des inégalités, " qui mêlerait le retour à ce qui faisait l'originalité et le succès de l'ancien CERC et le maintien de certains aspects du nouveau CSERC ", en particulier le maintien d'une équipe de petite taille inscrite dans une logique de réseau.

Elle précise que cet organisme n'aurait pas à émettre de recommandations, mission qui revient au commissariat général du Plan, mais qu'il serait chargé d'études spécifiques et d'un rapport, non pas annuel, mais périodique.

Elle indique enfin que le conseil du nouvel organisme devrait être composé " à l'image de l'ancien CERC " , c'est-à-dire comporter des personnalités représentatives de la société civile. Les rapporteurs n'appartiendraient pas nécessairement à l'INSEE ou aux grands corps ; leur nombre serait accru tout en restant dans la limite de douze à treize personnes. Leur durée de présence serait strictement limitée mais pourrait atteindre cinq ans. Le budget d'études serait augmenté et le champ des commandes élargi.

2. La tentative manquée lors du débat sur la loi de lutte contre les exclusions

On se rappelle qu'au cours du débat sur la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions , l'Assemblée nationale avait adopté, en nouvelle lecture, un amendement afin de reconstituer le CERC, faisant passer ainsi l'observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale , du niveau du Premier ministre, auquel il était initialement rattaché, à celui du ministre de l'emploi et de la solidarité.

Le Conseil constitutionnel a déclaré cette disposition contraire à la Constitution en constatant qu'il était irrégulier d'adopter, après la réunion de la commission mixte paritaire, une disposition nouvelle sans relation directe avec une autre disposition du texte en discussion ou sans nécessité d'assurer une coordination avec d'autres textes en cours d'examen.

Il est à noter, qu'à la suite de cette opération manquée, la procédure de renouvellement des membres du CSERC n'a pas été engagée à l'automne 1998 et que, comme l'indique M. Michel Dollé, le directeur de cabinet du Premier ministre a, en novembre 1998, " exprimé au Président Cabanes son souhait que le conseil continue d'animer, pendant la phase transitoire de quelques mois, les travaux du CERC avant le vote d'une loi créant le nouveau CERC " 2 ( * ) .

3. La proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale

Ce n'est que le 31 mars 1999 qu'une proposition de loi, présentée par M. Jean Le Garrec et les membres du groupe socialiste et apprentés 3 ( * ) , a été déposée en ce sens à l'Assemblée nationale, examinée le 6 octobre en commission 4 ( * ) puis le 14 octobre en séance publique.

Le Gouvernement a, semble-t-il, été très désireux d'accélérer le passage au Sénat qui devrait avoir lieu le mercredi 26 janvier prochain dans le cadre d'une inscription à l'ordre du jour prioritaire de ses travaux, conformément à la décision prise en conférence des présidents.

L'empressement du Gouvernement contraste avec le peu d'enthousiasme de l'Assemblée nationale pour examiner les propositions de loi adoptées par la commission des Affaires sociales du Sénat.

Cette précipitation semble liée au fait que le CSERC, en phase transitoire prolongée, se vide, peu à peu, de sa substance : aucun nouveau recrutement n'est effectué par le conseil intérimaire, chargé " d'expédier les affaires courantes ", et les rapporteurs qui sont en place quittent l'organisme les uns après les autres, transformant le CSERC en une " coquille vide ".

L'organisme créé par la proposition de loi ne se situe pas en rupture complète avec celui auquel il doit succéder.

Le CERC " nouvelle formule " est toujours un conseil et non pas un centre autonome. Il faut y voir le souci de maintenir le principe d'une équipe de petite taille en mesure d'utiliser le potentiel des organismes existants plutôt que de recueillir ses propres statistiques.

Sa mission est étendue, outre la connaissance des revenus, à celle des inégalités sociales. Le principe d'une réflexion sur les liens entre l'emploi et les revenus est conservé, en ajoutant toutefois la notion de cohésion sociale.

Le conseil est toujours composé d'un nombre réduit de membres. Celui-ci serait de sept au lieu de neuf actuellement, les deux membres de droit n'ayant pas vocation à être maintenus dans le nouveau dispositif. Il est précisé par M. Jean Rouger, rapporteur à l'Assemblée nationale, que le nouveau conseil sera " en priorité ouvert sur la société civile ".

Les propositions de loi du Sénat en instance à l'Assemblée nationale

Les propositions de loi, adoptées par le Sénat sur le rapport de votre commission des Affaires sociales, qui sont en instance, voire en déshérence, à l'Assemblée nationale, sont extrêmement nombreuses.

Ainsi en est-il de :

-  l'utile proposition de loi de M. Louis Souvet, tendant à diminuer les risques sanitaires liés à l'exposition de la musique amplifiée (adoptée le 15 janvier 1998 sur le rapport de M. Jean-Louis Lorrain) ;

- la proposition de loi judicieuse de M. Jean Delaneau, tendant à élargir les possibilités d'utilisation des crédits du RMI (adoptée le 5 mars 1998 sur le rapport de M. Bernard Seillier) ;

- l'excellente proposition de loi de MM. Christian Poncelet, Jean-Pierre Fourcade, Josselin de Rohan, Maurice Blin et Henri de Raincourt, tendant à alléger les charges sur les bas salaires (adoptée le 26 juin 1998 sur le rapport de M. Louis Souvet) ;

- la pertinente proposition de loi de M. André Jourdain relative au multisalariat en temps partagé (adoptée le 11 mars 1999 sur le rapport de l'auteur) ;

- la proposition de loi équilibrée et raisonnable visant à prévenir les conflits collectifs du travail et à garantir le principe de continuité dans les services publics (adoptée le 11 février 1999 sur le rapport de M. Claude Huriet) ;

- l'ambitieuse proposition de loi de MM. Jean Arthuis, Guy Cabanel, Henri de Raincourt et Josselin de Rohan, relative à la famille (adoptée le 15 juin 1999 sur le rapport de M. Jean-Louis Lorrain) ;

- les importantes propositions de loi de MM. Charles Descours et Jean Arthuis sur le développement de l'épargne retraite (adoptées le 14 octobre 1999 sur le rapport de M. Charles Descours) ;

- les très récentes et complètes propositions de loi de MM. Jean Chérioux et Jean Arthuis tendant à favoriser le partenariat social par le développement de l'actionnariat salarié (adoptées le 16 décembre 1999 sur le rapport de M. Jean Chérioux).

En revanche, le Sénat, peu soucieux en l'espèce d'une stricte réciprocité, n'a pas hésité, sur le rapport de votre commission, à adopter conforme la proposition de loi de l'Assemblée nationale visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs, il est vrai largement inspirée par les travaux de notre collègue, M. Lucien Neuwirth.

De même a-t-il examiné avec la plus grande attention, toujours sur le rapport de votre commission, tant la proposition de loi de l'Assemblée nationale tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans que la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale relative à la substitution de l'expression " aux opérations effectives en Afrique du Nord " par l'expression " à la guerre d'Algérie et aux combats en Tunisie et au Maroc ".

B. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

La proposition de loi qui, par certains aspects, rend hommage à la réforme voulue en 1993, comporte une volonté symbolique de " restauration ", que l'exposé des motifs n'explicite pas.

1. Un texte à caractère principalement réglementaire

La volonté de restauration ne ressort pas directement du texte de la proposition de loi qui constitue un cadre très général renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de constituer un nouvel organisme d'étude.

A cet égard, l'article 2 renvoie la nomination du président et des six membres du conseil à un décret, c'est-à-dire à une décision du Premier ministre, sans précision particulière. A vrai dire, cette délégation très large du Parlement au Gouvernement traduit bien le caractère réglementaire du dispositif.

a) Des dispositions essentiellement réglementaires

D'une manière générale, il est frappant de constater, en effet, que les dispositions de la proposition de loi, ne sont pas d'ordre législatif, mais plutôt d'ordre réglementaire.

L'article 3 précise que les rapports sont transmis au Parlement. De fait, dès lors que les rapports du CERC sont rendus publics, ce qui est obligatoirement le cas depuis 1976, il est bien clair que les parlementaires y ont accès. La procédure de publication des études du CERC, assortie d'une transmission au Premier ministre et aux présidents des assemblées parlementaires, peut être organisée par décret.

Il est indiqué, en outre, que le président du CERC peut être entendu par les commissions parlementaires. Il convient de rappeler à cet égard que l'article 5 bis de l'ordonnance du 17 novembre 1958 prévoit déjà qu'une commission spéciale ou permanente peut convoquer toute personne dont l'audition est nécessaire. La précision de l'article 5 apparaît donc superflue, à moins qu'elle n'ait pour objet de restreindre les droits du Parlement.

Quant à l'article 4 interdisant aux membres du CERC de solliciter ou d'accepter des instructions extérieures, il est le strict décalque d'une disposition déjà prévue à l'article 4 du décret du 26 mai 1994 relatif au fonctionnement de l'actuel CSERC (cf. annexe n° 4) .

b) Une disposition législative contestable

Au fond, la proposition de loi ne comprend que deux dispositions vraiment de nature législative, l'une concernant les collectivités locales, l'autre relative à la nouvelle dénomination de l'organisme.

L'article 5 de la proposition de loi dispose que le CERC peut se faire communiquer tout élément nécessaire par les administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics.

Il convient de rappeler que, pour ce qui concerne l'Etat et ses établissements publics sous tutelle, le Premier ministre est parfaitement en droit de s'adresser directement à ces derniers pour leur imposer des obligations d'information statistique. Au demeurant, l'article 8 du décret du 25 mai 1994, actuellement en vigueur, prévoit déjà une telle obligation (cf. annexe n° 4) .

En revanche, depuis les lois de décentralisation, une loi est effectivement nécessaire pour imposer une obligation d'information statistique aux collectivités locales.

Toutefois, on peut s'étonner de voir ainsi envisagée la possibilité d'enquête auprès des collectivités locales, alors qu'il est souhaité par ailleurs que le CERC conserve vocation, non pas à collecter des statistiques, mais à les commander auprès des organismes extérieurs. Surtout, il apparaît essentiel de ne pas multiplier de saisines, à des fins statistiques, des collectivités territoriales sans coordination d'ensemble : dans un régime décentralisé, il appartient logiquement au rapporteur général du CERC de prendre contact avec les associations d'élus pour déterminer dans quelles conditions des traitements statistiques sur échantillon peuvent être conduits. La seule disposition vraiment législative du texte apparaît donc contestable.

Avec humour, on peut observer que la deuxième novation législative de ce texte est d'ordre sémantique : il s'agit dans l'intitulé de la proposition de loi de rétablir l'acronyme CERC.

Le retour vers le passé s'effectue ici au prix d'un petit artifice qui est de ne pas retenir l'initiale du dernier mot de l'intitulé de l'organisme, à savoir le mot " social ". Cette initiative extrêmement symbolique montre bien le sens de la démarche voulue par nos collègues députés.

c) Des débats parlementaires équivoques

Le sentiment d'une possible " restauration " du CERC " à l'ancienne " transparaît plus nettement en revanche des débats à l'Assemblée nationale.

La notion d'indépendance est invoquée à de multiples reprises mais en même temps les déclarations de certains orateurs laissent à penser qu'ils souhaitent " prédéterminer " les conclusions du CERC.

Ainsi, M. Yves Cochet, après avoir rappelé que le CERC serait " un pôle d'information indépendant ", souligne que " le CERC se doit d'accompagner les politiques de l'emploi et, en particulier, la mise en oeuvre des 35 heures " ou encore que " la réussite de la réduction du temps de travail doit être garantie par les bons diagnostics du CERC ".

Votre rapporteur ne développera pas davantage la notion de " bon diagnostic " pour un organisme censé contribuer à la meilleure connaissance de la réalité économique et financière.

Par ailleurs, bien que l'on semble s'en tenir à l'idée d'un organisme léger qui évite de " s'enfermer dans une logique de superposition de compétences " pour reprendre la formule de M. Jean Rouger, rapporteur à l'Assemblée nationale, un autre orateur, M. Daniel Paul, cite longuement une contribution de l'ancienne équipe du CERC lors d'un colloque en 1994, qui met l'accent, au contraire, sur la mise en place d'une institution composée d'experts qualifiés sur une longue durée :

" Une information de qualité repose sur l'accumulation d'un savoir-faire rempart contre la passion du court terme et contre la tentation du jugement à l'emporte-pièce.

" Ce savoir-faire nécessite le développement de méthodes et l'acquisition progressive d'une expérience qui ne peut être capitalisée que dans la durée.

" Il ne saurait être remplacé par des expertises ponctuelles conduites par des équipes de passage. "

Au-delà d'une rhétorique séduisante, il faut éviter de retomber dans les travers reprochés à l'ancien CERC qui semblait peu à peu avoir perdu sa capacité d'innovation.

Les débats à l'Assemblée nationale illustrent bien les pressions qui s'exerceront pour un retour vers l'ancien CERC avec certains de ses défauts ; la loi semble de peu de poids si la volonté du Gouvernement ne s'exprime pas fermement en faveur d'un organisme qui assure la synthèse entre l'ancien CERC et le nouveau CSERC.

2. Le CERC ne mérite ni excès d'honneur, ni indignité

Afin de définir sa position sur la proposition de loi, votre commission a estimé que le nouveau CERC ne méritait " ni excès d'honneur, ni indignité " .

Il ne méritait pas un excès d'honneur , parce qu'il s'agit au fond d'un organisme qui a vocation à rassembler des statistiques, à les commenter et à les mettre en perspective. Il ne présente pas de recommandations mais " contribue à la connaissance " D'une certaine manière, on peut espérer que le traitement des statistiques se fera toujours de façon scientifiquement rigoureuse et objective.

En tout cas, le CERC ne peut être considéré comme une autorité administrative indépendante apte à trancher des litiges ou à prendre des décisions, comme le fait, par exemple, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) dont les membres sont nommés par le Président de la République, par le Président de l'Assemblée nationale et par celui du Sénat. Une telle forme de désignation des membres du CSERC serait à l'évidence disproportionnée par rapport à la mission de l'organisme.

S'agissant des règles de fonctionnement, entrer dans le détail des obligations de mobilité ou limiter les effectifs des rapporteurs ou la durée de leur mise à disposition serait sans doute excéder les limites des compétences du Parlement.

Aussi, votre commission n'a pas cru opportun d'aller excessivement dans le détail en fixant des bornes et des garanties plus précises à propos de la composition et du mode de fonctionnement du nouvel organisme, d'autant que, dans ce type d'organisme, l'indépendance repose plus sur la qualité des hommes que sur le formalisme de la procédure.

Votre Commission a estimé également que le sujet du CERC ne méritait pas davantage l'indignité d'une guerre législative.

Sur le principe, on ne saurait s'opposer à l'amélioration de la connaissance en matière de revenus et d'inégalités sociales. Il n'y aurait pas grand sens à engager, sur ce thème, un vaste débat législatif avec l'Assemblée nationale au cours de deux lectures dans chaque Assemblée, d'une commission mixte paritaire éventuellement infructueuse, suivie d'une nouvelle lecture dans chaque Assemblée et d'un dernier mot à l'Assemblée nationale. Le choix de légiférer par proposition de loi ne permet pas, en effet, au Gouvernement, pourtant largement à l'origine de ce texte, de déclarer l'urgence.

Quoi qu'il en soit, il serait peu compréhensible pour l'opinion publique que le Parlement se lance dans une guerre picrocholine sur l'avenir du CERC.

3. Une démarche raisonnable de retour du CERC vers le domaine réglementaire

La solution que votre commission vous propose de suivre est de ne pas donner à ce texte symbolique plus d'importance qu'il n'en mérite.

Aujourd'hui, il convient de replacer le CERC dans le domaine qui a été le sien et dans lequel il doit revenir, c'est-à-dire le domaine réglementaire.

En 1993, l'intervention législative était nécessaire et légitime. A cette époque, il s'agissait de réorienter l'action d'un organisme qui avait près de 30 ans d'existence et qui comprenait des personnels dont plus de la moitié était en place depuis plus de 15 ans.

Face au risque d'obstruction administrative, le Gouvernement et le Parlement devaient marquer clairement leur volonté de changement et envoyer un " signal fort " à l'égard de la structure administrative appelée à une réforme radicale : il fallait donner un " "coup de boutoir " pour modifier le cours des choses.

Aujourd'hui, la situation n'est plus la même et le diagnostic semble partagé tant sur le souci d'éviter l'alourdissement et le vieillissement de la structure que sur la nécessité de lier la réflexion sur les revenus à celle sur l'emploi.

Lorsqu'il a constitué le Conseil d'analyse économique (CAE), le Premier Ministre n'a pas estimé nécessaire de solliciter le Parlement. De fait, il n'est pas anormal de laisser le Premier Ministre organiser à sa guise les services placés auprès de lui et assumer la responsabilité de leur évolution et de leur efficacité. La responsabilité propre de l'exécutif comporte, au demeurant, la maîtrise des demandes de divers groupes de pression qui ne manqueront pas de lui être adressées et, particulièrement, de celles qui s'inspireront des errements antérieurs.

C'est pourquoi, votre commission a adopté un dispositif d'une parfaite simplicité consistant à abroger l'article 78 de la loi quinquennale du 20 décembre 1993 à compter du 1 er avril 2000.

Dans l'intervalle des trois mois à venir, le Gouvernement sera à même de prendre le décret nécessaire et d'agir avec rapidité pour mettre fin au délitement progressif de l'actuel CSERC. Eventuellement, votre commission pourrait être sensible à un amendement du Gouvernement qui repousserait au 1 er juillet la date de l'abrogation, si celui-ci estimait nécessaire un délai supplémentaire.

Bien sûr, l'Assemblée nationale pourrait regretter que la " re-création " du CERC ne soit pas effectuée par la loi ; mais elle devrait comprendre que la position de votre commission -qui consiste à réaffirmer la pleine responsabilité du Gouvernement dans son champ de compétence- est plus conforme à l'esprit de la Constitution de la V ème République et vaut mieux que de se focaliser sur une revanche dont l'enjeu symbolique est largement virtuel.

EXAMEN DES ARTICLES

La proposition de loi transmise à votre commission comprend sept articles, l'article 8 prévoyant un gage en cas de dépenses supplémentaires ayant été supprimé en séance publique à l'Assemblée nationale, à la demande du Gouvernement.

Article premier
Création et mission du CERC

Cet article crée un nouvel organisme auprès du Premier ministre. Il en précise le nom -Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale- ainsi que sigle (CERC). Il définit également la mission de cet organisme qui est de " contribuer à la connaissance " dans trois domaines : les revenus, les inégalités sociales et les liens entre l'emploi, les revenus et la cohésion sociale.

Pour mémoire, le CSERC actuel a une mission d'amélioration de la connaissance en matière de revenus, de coûts de production et des liens entre l'emploi et les revenus. Il est en outre habilité à formuler " des recommandations de nature à favoriser l'emploi " .

Pour les raisons exposées dans l'avant-propos supra , votre commission a estimé que le CERC pouvait être opportunément créé par une décision d'ordre réglementaire.

Elle a donc adopté un amendement abrogeant, à compter du 1 er avril 2000, l'article 78 de la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 qui est actuellement la disposition législative en vigueur concernant le CSERC : celui-ci, qui s'est à l'époque substitué à l'ancien CERC, cessera donc de fonctionner à cette date.

D'ici au 1 er avril 2000, le Gouvernement est donc habilité à prendre un décret constituant le nouveau CERC qui entrera en fonctionnement à compter de la disparition de l'actuel CSERC.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Art. 2
Composition du CERC

Cet article dispose que le CERC est composé d'un président et de six membres nommés par décret.

Par sa brièveté, cette rédaction montre que le nouvel organisme est fondamentalement un organisme d'ordre réglementaire dont la composition donne nécessairement lieu à une délégation de pouvoir très large du Parlement au Premier ministre.

Par coordination avec la position adoptée à l'article premier, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Art. 3
Publicité des travaux du CERC

Le premier alinéa de cet article dispose que les rapports du CERC sont transmis au Premier ministre ainsi qu'aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Les rapports sont ensuite rendus publics par le Conseil.

L'article 78 de la loi du 20 décembre 1993 précitée prévoit que les rapports du CSERC sont transmis au Premier ministre et au Parlement puis rendus publics.

La méthode retenue aujourd'hui est la suivante : les rapports sont envoyés simultanément aux représentants des pouvoirs publics et à l'impression.

Ainsi, lorsque le rapport est officiellement publié et diffusé, les représentants des pouvoirs publics ont donc eu un délai raisonnable pour en prendre connaissance et sont à même de réagir dès que la presse en rend compte.

La proposition de loi semble a contrario pencher vers la simultanéité de la transmission et de la publication. Il convient dès lors de s'interroger, sauf considérations protocolaires, sur la nécessité de prévoir explicitement une transmission au Premier ministre et au Parlement.

L'Assemblée nationale a adopté, à cet article, un amendement de M. François Goulard, député du Morbihan, afin de préciser que le président du Conseil économique et social est également destinataire des rapports du CERC.

Le second alinéa de cet article porte sur l'audition du président du CERC par les commissions parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Il est intéressant de rappeler que l'article 12 du décret n° 94-414 du 25 mai 1994 (cf. annexe n° 4) prévoit déjà la liste des destinataires du rapport de l'organisme et précise les conditions dans lesquelles le président du CSERC est entendu par les commissions parlementaires et peut " recueillir leur avis sur le programme des travaux du conseil " .

De fait, le principe de l'audition en commission n'a pas à être limité par un texte spécifique dans la mesure où les dispositions applicables en matière de fonctionnement des assemblées parlementaires sont suffisamment explicites en ce domaine.

Par coordination, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article .

Art. 4
Autonomie du CERC dans la poursuite de ses travaux

Cet article interdit au président et aux membres du CERC de solliciter ou d'accepter aucune instruction d'aucune autorité.

Le texte vise les autorités publiques mais aussi les autorités responsables d'un organisme de droit privé, qu'il s'agisse d'une entreprise, d'une association ou d'un syndicat.

Il convient de rappeler que l'article 4 du décret du 25 mai 1994 précité (cf. annexe n° 4) prévoit une disposition identique à celle-ci.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article .

Art. 5
Obligation de communication d'informations au CERC

Cet article dispose que les administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics sont tenues de communiquer au CERC les éléments nécessaires à l'exercice de ses missions sous réserve des dispositions légales en matière de secret.

Pour ce qui concerne l'Etat et ses établissements publics, le Premier ministre, en tant que source du pouvoir réglementaire, est parfaitement habilité à donner toutes instructions utiles en matière d'obligation d'information applicable aux services de l'Etat ou aux établissements publics sous tutelle.

D'ores et déjà, l'article 8 du décret du 25 mai 1994 (cf. annexe n° 4) dispose que les services en question doivent communiquer " les éléments d'information et études dont ils disposent et qui apparaissent nécessaires au Conseil pour l'exercice de ses missions " .

En revanche, comme votre rapporteur l'a souligné dans son avant-propos, cette disposition n'apparaît pas utile pour les collectivités locales qui ne sont pas des organismes à vocation statistique mais des collectivités décentralisées qui doivent être consultées pour tout traitement d'information de masse ou avant toute étude sur échantillon.

Par coordination, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Art. 6
Modalités d'application par décret en Conseil d'Etat

Cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser la composition et les modalités de fonctionnement du CERC.

Par coordination, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article .

Art. 7
Mesures de coordination

Cet article précise que le CERC, créé par la présente proposition de loi, se substitue à l'actuel CSERC et abroge en conséquence l'article 78 de la loi du 20 décembre 1993.

Cet article est satisfait par la nouvelle réduction proposée par votre commission pour l'article premier. Votre commission observe au demeurant qu'il n'est jamais bon de subordonner l'entrée en vigueur d'une disposition législative, fusse-t-elle d'abrogation, à la publication d'un décret.

Par coordination, votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Art. 8
Compensation financière

Les auteurs de la proposition de loi avaient prévu que les dépenses résultant éventuellement de sa mise en oeuvre donneraient lieu à compensation par une majoration des droits sur les tabacs.

A la demande du Gouvernement, cette disposition a été supprimée.

Votre commission observe que l'aggravation d'une charge publique ne saurait, en application de l'article 40 de la Constitution, être gagée par une augmentation de ressources. Elle souhaite au demeurant que cette suppression soit le gage d'une réforme à coût constant.

Votre commission vous propose la suppression conforme de cet article.

Intitulé de la proposition de loi

Enfin, concernant l'intitulé de la proposition de loi, votre commission vous propose d'adopter un amendement modifiant celui-ci, par coordination avec l'amendement adopté à l'article premier, afin de préciser que le présent texte a pour objet d'abroger l'article 78 de la loi quinquennale du 20 décembre 1993 susvisé.

*

* *

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de la proposition de loi ainsi amendée.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte en vigueur

___

Texte de la proposition
de loi

___

Texte adopté par l'Assemblée nationale

___

Propositions
de la commission

___

Proposition de loi relative à la création d'un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC)

Proposition de loi relative à la création d'un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC)

Proposition de loi portant abrogation de l'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative à l'emploi et à la formation professionnelle

(Art. 78 de la loi n° 93-1313. - cf page suivante)

Article premier.

Il est créé auprès du Premier ministre un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) chargé de contribuer à la connaissance des revenus, des inégalités sociales et des liens entre l'emploi, les revenus et la cohésion sociale.

Article premier.

Sans modification

Article premier.

L'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle est abrogé à compter du 1 er avril 2000.

Art. 2.

Le conseil est composé d'un président et de six membres, nommés par décret.

Art. 2.

Sans modification

Art. 2.

Supprimé

Art. 3.

Les rapports du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale sont transmis au Premier ministre ainsi qu'aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. Ils sont rendus publics par le conseil.

Art. 3.

Les rapports ...

... l'Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique et social. Ils sont ...

... conseil.

Art. 3.

Supprimé

Le président du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale est entendu par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat, à la demande de leur président, pour leur présenter les rapports du conseil.

Alinéa sans modification

Art. 4.

Dans l'exercice de ses activités, le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, en la personne de son président ou de l'un de ses membres, ne peut solliciter ni accepter d'instructions d'aucune autorité.

Art. 4.

Sans modification

Art. 4.

Supprimé

Art. 5.

Les administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics sont tenues de communiquer au Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale les éléments qui lui sont nécessaires pour l'exercice de ses missions, sous réserve de l'application des dispositions législatives imposant une obligation de secret.

Art. 5.

Sans modification

Art. 5.

Supprimé

Art. 6.

Un décret en Conseil d'Etat précise la composition et les modalités de fonctionnement du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale.

Art. 6.

Sans modification

Art. 6.

Supprimé

Loi n° 93-1313 du 20 Décembre 1993

Art. 78. - Un organisme dénommé Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est chargé, à compter du 1er janvier 1994, de contribuer à la connaissance des revenus, des coûts de production et des liens entre l'emploi et les revenus et de formuler des recommandations de nature à favoriser l'emploi.

Art. 7.

Le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale se substitue au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts institué par l'article 78 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.

Art. 7.

Sans modification

Art. 7.

Supprimé

Ce conseil se substitue à tout organisme existant chargé de missions similaires à celles définies ci-dessus.

Cet article est abrogé à la date de la publication du décret mentionné à l'article 6.

Il établit un rapport annuel qui est transmis au Premier ministre et au Parlement, puis rendu public.

Un décret en Conseil d'Etat détermine la composition et le fonctionnement du conseil institué au présent article, dans des conditions de nature à assurer son indépendance et à garantir la qualité de ses travaux.

Art. 8.

Les dépenses résultant pour l'Etat de la présente loi sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Art. 8.

Supprimé

Art. 8.

Suppression maintenue

ANNEXE N° 1
-
DÉCRET N° 66-227 DU 18 AVRIL 1966 PORTANT CRÉATION D'UN CENTRE D'ÉTUDE DES REVENUS ET DES COÛTS

Article premier. - Il est créé auprès du commissariat général du Plan d'équipement et de la productivité un centre d'étude des revenus et des coûts.

Art. 2. - Le centre d'étude des revenus et des coûts a pour mission générale de contribuer, dans le cadre des orientations générales du Plan de développement économique et social, à une connaissance plus rapide et plus complète de tous les revenus et de tous les éléments constitutifs des coûts de production, et en premier lieu des conditions de formation et de distribution des revenus de toutes catégories.

Art. 3. - Le Gouvernement fixe chaque année, sur proposition du commissaire général du Plan, un programme d'études portant sur les évolutions précédemment observées dans certains secteurs d'activités, dans certaines entreprises publiques ou dans certaines catégories de revenus.

Il saisit, en outre, le centre de toute question particulière qui lui paraîtrait exiger un examen prioritaire en cours d'année.

Le Conseil économique et social peut adresser des propositions au Gouvernement en vue de la saisine du centre d'étude des revenus et des coûts.

Art. 4. - Les rapports du centre d'étude des revenus et des coûts sont adressés au Gouvernement, qui peut en ordonner la publication.

Art. 5. - Le conseil du centre d'étude des revenus et des coûts se compose d'un président et de cinq ou sept membres, choisis à raison de leur compétence et de leur expérience dans les domaines d'étude du centre. Ces personnalités sont nommées par décret en conseil des ministres pour quatre ans. Le conseil du centre d'étude des revenus est renouvelé par moitié tous les deux ans. Il sera procédé par tirage au sort, à la désignation de celles de ces personnalités dont le mandat devra être renouvelé pour la première fois à l'expiration de la deuxième année.

Le conseil du centre est assisté d'un rapporteur général et de deux rapporteurs adjoints. Il peut, en outre, faire appel aux membres du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes, de l'Inspection générale des finances, des inspections de la Banque de France et du Crédit national, ainsi qu'aux fonctionnaires de l'institut national de la statistique et des études économiques.

Art. 6. - Le centre d'étude des revenus et des coûts peut, avec l'accord du Gouvernement, demander une étude ou leur collaboration aux administrations et aux entreprises publiques.

Toutes les administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics sont tenues de communiquer au centre les éléments d'information dont elles disposent et qui apparaissent nécessaires au centre pour la poursuite de ses travaux, sous réserve de l'application des dispositions législatives imposant une obligation de secret.

Le président, les conseillers et les collaborateurs du centre d'étude des revenus et des coûts sont tenus au secret sur les faits et informations de tous ordres dont ils sont appelés à connaître dans l'accomplissement de leur mission.

Art. 7. - Le budget de fonctionnement du centre d'étude des revenus et des coûts est rattaché à celui du commissariat général du Plan d'équipement et de la productivité.

Art. 8. - Le Premier ministre, le ministre de l'économie et des finances et le ministre des affaires sociales sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

ANNEXE N° 2
-
DÉCRET N° 76-913 DU 7 OCTOBRE 1976 RELATIF AU CENTRE D'ÉTUDE DES REVENUS ET DES COÛTS

Article premier - Le centre d'étude des revenus et des coûts, placé auprès du commissariat général au Plan, a pour mission générale de contribuer, dans le cadre des orientations générales du Plan de développement économique et social, à une connaissance plus rapide et plus complète de tous les revenus et de tous les éléments constitutifs des coûts de production, et en premier lieu des conditions de formation et de distribution des revenus de toutes catégories.

Art. 2 - le centre d'étude des revenus et des coûts établit périodiquement un rapport de synthèse sur :

- l'évolution et la répartition des différents revenus par rapport à l'évolution économique d'ensemble ;

- les écarts de revenus et leur évolution avant et après prise en compte des prélèvements sociaux et fiscaux et après versement des prestations sociales ;

- les améliorations susceptibles d'être apportées aux informations sur les revenus collectées notamment par les administrations.

Le centre d'étude des revenus et des coûts effectue en outre les études sur le niveau et l'évolution des revenus, des prix et des coûts qui figurent au programme régulièrement arrêté par le Gouvernement sur proposition du conseil du centre. Le Gouvernement peut également saisir le centre de toute question particulière qui lui paraîtrait exiger un examen prioritaire.

Le Conseil économique et social peut adresser des propositions au Gouvernement en vue de la saisine du centre d'étude des revenus et des coûts.

Art. 3 - Les rapports du centre d'étude des revenus et des coûts sont adressés au Gouvernement et publiés.

Art. 4 - Le conseil du centre d'étude des revenus et des coûts se compose d'un président et de cinq ou sept membres, choisis à raison de leur compétence et de leur expérience dans les domaines d'étude du centre. Ces personnalités sont nommées par décret en conseil des ministres pour quatre ans. Le conseil du centre d'étude des revenus et des coûts est renouvelé par moitié tous les deux ans. Il sera procédé, par tirage au sort, à la désignation de celles de ces personnalités dont le mandat devra être renouvelé pour la première fois à l'expiration de la deuxième année.

Le conseil du centre est assisté d'un rapporteur général et de rapporteurs adjoints. Il peut en outre faire appel à des experts issus de l'administration et des entreprises publiques.

Art. 5 - Le centre d'étude des revenus et des coûts peut demander une étude ou leur collaboration aux administrations, aux entreprises publiques, aux différentes organisations syndicales, professionnelles et sociales ainsi qu'aux organismes d'études internationaux.

Toutes les administrations de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics sont tenues de communiquer au centre les éléments d'information dont elles disposent et qui apparaissent nécessaires au centre pour la poursuite de ses travaux, sous réserve de l'application des dispositions législatives imposant une obligation de secret.

Le président, les conseillers et les collaborateurs du centre d'étude des revenus et des coûts sont tenus au secret sur les faits et informations de tous ordres dont ils sont appelés à connaître dans l'accomplissement de leur mission.

Art. 6 - Le budget de fonctionnement du centre d'étude des revenus et des coûts est rattaché à celui du commissariat général du Plan.

Art. 7 - Le décret n° 66-227 du 18 avril 1966 est abrogé.

Art. 8 - Le Premier ministre, le ministre d'Etat chargé du Plan et de l'aménagement du territoire, le ministre délégué auprès du Premier ministre chargé de l'économie et des finances et le ministre du travail sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal Officiel de la République française.

ANNEXE N° 3
-
ARTICLE 78 DE LA LOI QUINQUENNALE N° 93-1313
DU 20 DÉCEMBRE 1993 RELATIVE AU TRAVAIL,
À L'EMPLOI ET À LA FORMATION PROFESSIONNELLE

NB : Ce texte est repris également dans la première colonne du tableau comparatif portant sur le texte en vigueur ; par commodité, il a semblé utile de le reprendre également en annexe.

Art. 78. - Un organisme dénommé " Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts " est chargé, à compter du 1er janvier 1994, de contribuer à la connaissance des revenus, des coûts de production et des liens entre l'emploi et les revenus et de formuler des recommandations de nature à favoriser l'emploi.

Ce conseil se substitue à tout organisme existant chargé de missions similaires à celles définies ci-dessus.

Il établit un rapport annuel qui est transmis au Premier ministre et au Parlement, puis rendu public.

Un décret en Conseil d'Etat détermine la composition et le fonctionnement du conseil institué au présent article, dans des conditions de nature à assurer son indépendance et à garantir la qualité de ses travaux.

ANNEXE N° 4
-
DÉCRET N° 94-414 DU 25 MAI 1994 RELATIF AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'EMPLOI, DES REVENUS ET DES COÛTS

Article premier. - Le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est composé de neuf membres, nommés dans les conditions suivantes :

1° Un membre du Conseil d'Etat, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;

2° Un magistrat de la Cour des comptes, désigné par le premier président de la Cour des comptes ;

3° Un membre du Conseil national de l'information statistique, désigné par le bureau de ce conseil ;

4 o Un professeur des universités des disciplines juridiques et économiques, désigné par le Conseil national des universités ;

5 o Deux membres de droit : le commissaire au Plan et le directeur général de l'Institut national de la statistique et des études économiques ;

6 o Trois membres choisis par les six membres précédents parmi les personnalités connues en raison de leur expérience dans les domaines de compétence du conseil.

Art. 2. - Le président du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est nommé par décret du Premier ministre parmi les membres autres que ceux désignés au 5 o de l'article précédent. Son mandat de président expire en même temps que son mandat de membre.

Art. 3. - Le mandat des membres, autres que les membres de droit, est de quatre ans ; il est renouvelable une fois.

Ceux des membres qui perdent la qualité à raison de laquelle ils ont été désignés ou dont le mandat est interrompu, pour quelque cause que ce soit, sont dans un délai de deux mois remplacés dans leurs fonctions pour la durée du mandat restant à courir. Le mandat du membre remplaçant est renouvelable une fois s'il a été exercé pendant une durée supérieure à un an et deux fois s'il a été exercé moins d'un an.

Art. 4. - Dans l'exercice de ses activités, le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts, en la personne de son président ou de l'un de ses membres, ne peut solliciter ni accepter d'instructions d'aucune autorité.

Art. 5. - Le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est assisté d'un rapporteur général, nommé pour une durée de trois ans, renouvelable une fois, par arrêté du Premier ministre sur proposition du président du conseil. Il peut être mis fin à ses fonctions par le Premier ministre sur proposition du président du conseil.

Art. 6. - Le président du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts désigne des rapporteurs choisis parmi les fonctionnaires des corps recrutés par la voie de l'Ecole nationale d'administration, les administrateurs de l'Institut national de la statistique et des études économiques et les fonctionnaires des autres corps recrutés par la voie de l'Ecole polytechnique, les professeurs des universités des disciplines juridiques et économiques et les directeurs de recherche des établissements publics, scientifiques et techniques. Ces rapporteurs sont désignés pour une durée maximale de trois ans, qui peut être prolongée pour une durée qui ne peut excéder un an par décision du président.

Art. 7. - Pour l'exercice de ses attributions, le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts évalue et utilise toutes études existantes et fait réaliser des travaux statistiques et des études, notamment par les administrations de l'Etat. Le conseil fait connaître à celles-ci ses besoins afin qu'elles les prennent en compte dans leurs programmes de travaux statistiques et d'études.

Art. 8. - Sauf dispositions législatives contraires, les administrations de l'Etat et les établissements publics de l'Etat sont tenus de communiquer au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts les éléments d'information et les études dont ils disposent et qui apparaissent nécessaires au conseil pour l'exercice de ses missions.

Art. 9. - Le président, les membres et les collaborateurs du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts sont tenus au secret sur les faits et les informations de tous ordres dont ils sont appelés à connaître dans l'accomplissement de leurs missions.

Art. 10. - Le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts se réunit sur convocation de son président. Celui-ci fixe l'ordre du jour.

Le conseil édicte un règlement intérieur fixant ses modalités de délibération.

Art. 11. - Le rapport annuel du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts a pour objet de contribuer à la connaissance des revenus, des coûts de production et des liens entre l'emploi et les revenus, ainsi que de formuler toutes recommandations de nature à favoriser l'emploi.

Le rapport comporte notamment une analyse de l'évolution de l'emploi, des coûts et des revenus, avant et après redistribution, pour les différentes catégories de population. Il peut également comprendre des études particulières, dans le domaine de compétence du conseil, réalisées à son initiative ou à la demande du Premier ministre. Ces analyses et ces études peuvent comporter des comparaisons internationales, notamment européennes.

Art. 12. - Le rapport annuel est transmis au Premier ministre et aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, puis rendu public par le conseil. Le président du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est entendu par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat, à la demande de leur président, pour leur présenter le rapport annuel et recueillir leur avis sur le programme des travaux du conseil.

Art. 13. - Le président du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts est entendu par les sections du Conseil économique et social, à leur demande, pour leur présenter le rapport annuel et recueillir leur avis sur le programme des travaux du conseil.

Le Conseil économique et social peut adresser des propositions d'études au Premier ministre afin que celui-ci en saisisse le Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts.

Art. 14. - Les emplois et les crédits attribués au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts pour son fonctionnement sont inscrits au budget des services du Premier ministre (Commissariat général du Plan). Des agents publics peuvent être mis à sa disposition. Le conseil peut faire appel à des experts français ou étrangers.

Art. 15. - Les membres du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts et, sur décision du président du conseil, les personnes qui collaborent à ses travaux peuvent percevoir des indemnités liées à l'exercice de leurs fonctions dans des conditions fixées par arrêté du Premier ministre et du ministre chargé du budget.

Les membres du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts qui n'auraient pas la qualité de fonctionnaire ou d'agent de l'Etat sont assimilés, pour le remboursement de leurs frais de mission, aux fonctionnaires exerçant des fonctions de niveau comparable.

Art. 16. - Les chargés de mission contractuels à durée indéterminée hors échelle ou de niveau I et les chargés de mission contractuels à durée déterminée de niveau A du Commissariat général du Plan, employés au Centre d'étude des revenus et des coûts à la date du 1er janvier 1994, sont rattachés à l'Institut national de la statistique et des études économiques et gérés par celui-ci. Ils exercent des fonctions d'étude correspondant à leurs qualifications au sein de l'Institut national de la statistique et des études économiques ou, sur décision du directeur général de celui-ci, auprès d'autres services d'études et de statistique des ministères chargés du travail et des affaires sociales.

Les autres agents du Commissariat général du Plan employés au Centre d'étude des revenus et des coûts à la date du 1er janvier 1994 peuvent exercer, dans les services d'études et de statistique des ministères chargés du travail et des affaires sociales, des fonctions correspondant à leurs qualifications, sur décision du commissaire au Plan.

Art. 17. - Le ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, le ministre de l'économie, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, le ministre du budget, porte-parole du Gouvernement, et le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

* 1 Rapport n° 57 (1993-1994) fait au nom de la commission des Affaires sociales par MM. Louis Souvet et Jean Madelain, sur le projet de loi quinquennale adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.

* 2 In " Le CSERC, leçons d'une expérience " par Michel Dollé, rapporteur général du CSERC (30.09.99), document communiqué à votre rapporteur.

* 3 Proposition de loi AN n° 1516 (rectifié) du 31 mars 1999 relative à la création d'un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC).

* 4 Rapport AN n° 1836 du 6 octobre 1999, fait au nom de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales sur la proposition de loi de M. Jean Le Garrec, relative à la création d'un Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC).

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