Rapport sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile

LEGRAND (Jean-François)

RAPPORT 264 (1999-2000) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

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Table des matières




N° 264

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 15 mars 2000

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile ,

Par M. Jean-François LE GRAND,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Léon Fatous, Louis Moinard, Jean-Pierre Raffarin, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Paul Vergès, Henri Weber.


Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2067 , 2159 et T.A. 467 .

Sénat : 254 (1999-2000).

Transports.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Adopté par l'Assemblée nationale, le 2 mars dernier, le présent projet de loi tend à élargir le conseil d'administration de la société Air France et à modifier les relations de cette société avec l'Etat.

Texte technique d'une portée limitée, il donne néanmoins l'occasion d'une réflexion sur l'avenir de la compagnie nationale Air France.

La libéralisation du transport aérien communautaire à imposé à Air France un plan de redressement qui porte aujourd'hui ses fruits. Au-delà des dispositions du présent projet de loi, le devenir d'Air France dépend de sa capacité à relever les défis qui s'imposent à elle.

Dans un marché de plus en plus concurrentiel, la compagnie Air France doit avoir les moyens de poursuivre la restructuration de son réseau, d'optimiser ses recettes et de développer une politique d'alliances et d'investissement ambitieuse.

Cela suppose qu'Air France dispose d'un actionnaire capable de l'accompagner financièrement dans son développement et d'assumer les décisions propres à favoriser son succès.

C'est à l'aune de ces objectifs que votre commission a examiné le présent projet de loi, qu'elle vous proposera d'adopter sans modification.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'ADAPTATION DE LA COMPAGNIE AIR FRANCE À UN ENVIRONNEMENT DE PLUS EN PLUS CONCURRENTIEL PASSE PAR SA PRIVATISATION

La compagnie Air France a, ces dernières années, dû mettre en oeuvre un plan de redressement pour s'adapter à la libéralisation du marché du transport aérien. La stratégie adoptée commence à porter ses fruits. Sa poursuite passe cependant par la privatisation de son capital.

A. LA LIBÉRALISATION DU TRANSPORT AÉRIEN COMMUNAUTAIRE A IMPOSÉ À AIR FRANCE UN PLAN DE REDRESSEMENT IMPORTANT AFIN D'AMÉLIORER SA COMPÉTITIVITÉ

Particulièrement réglementé depuis son origine, en raison d'impératifs liés à la défense nationale, aux fonctions économiques et sociales des lignes de transport et aux ressources fiscales tirées des droits de trafic, le marché des transports aériens a fait l'objet ces dix dernières années d'une politique active de libéralisation, d'abord aux Etats-Unis, puis en Europe.

La libéralisation du transport aérien communautaire

En Europe, la libéralisation de l'accès au marché communautaire et l'application des règles de la concurrence découlent de trois séries de mesures adoptées entre 1987 et 1992
.

Les modalités d'application du droit de la concurrence communautaire aux transports aériens entre Etats membres ont été établies par le règlement n° 3975/87, complété par le règlement n° 2410/92 pour ce qui concerne les transports intégralement effectués au sein d'un même Etat membre. L'accès aux marchés a, quant à lui, été libéralisé progressivement :

- le principe de la liberté des tarifs a été reconnu à compter du 1 er janvier 1993 (règlement n° 2049/92). L'intervention des Etats membres est limitée à des clauses de sauvegarde pour tenir compte des obligations de service public et des impératifs d'aménagement du territoire ;

- le principe de libre accès des entreprises communautaires aux liaisons intra-communautaires (règlement n° 2048/92) permet depuis le 1 er avril 1997 un libre accès aux liaisons intérieures à chaque Etat. Il en résulte la suppression des quotes-parts de capacité, l'exercice sans restriction de la " cinquième liberté ", (c'est-à-dire du droit pour une compagnie de transporter des passagers entre deux Etats membres autres que celui de son immatriculation) , ainsi que la liberté de cabotage national ;

- l'instauration de licences communautaires délivrées par les Etats membres sur la base de critères communs est intervenue en 1992 (règlement n° 2470/92 du 23 juillet 1992).

Cette libéralisation du marché des transports aériens a eu des conséquences aussi bien sur le nombre des transporteurs exploitant des lignes régulières et des liaisons desservies que sur la gamme des tarifs offerts ou la nature des stratégies commerciales adoptées.

Le nombre total de compagnies régulières est passé entre 1993 et 1998 de 132 à 164. Au cours de cette période, 139 compagnies ont été créées et 102 ont disparu. Ces évolutions traduisent une nouvelle dynamique d'un marché devenu concurrentiel.

L'apport de la libéralisation est également visible dans l'évolution du nombre de liaisons, qui est passé de 630 en 1992 à environ 830 en 1998.

Les recettes unitaires ont fortement baissé du fait du développement de la concurrence et de l'augmentation des capacités. En conséquence, les transporteurs aériens européens ont dû réduire leurs coûts sensiblement. Ceux-ci restent cependant encore élevés par rapport aux coûts des grands transporteurs américains ou asiatiques.

Pour les compagnies européennes, de profondes et parfois douloureuses remises en cause ont souvent été nécessaires pour s'adapter au nouveau contexte concurrentiel, impliquant pour les personnels de nouvelles conditions d'emploi et de rémunération . Les restructurations ont, pour la plupart, nécessité d'importants apports de capitaux, souvent de la part des Etats.

Ce processus de restructuration du transport aérien en Europe aujourd'hui largement engagé s'est traduit par de nouvelles stratégies d'entreprise .

La pratique traditionnelle d'affrètement a ainsi évolué vers la mise en place d'accords de franchise liant des compagnies régionales aux grandes compagnies européennes. Le phénomène, engagé initialement en Grande-Bretagne par British Airways, s'est développé rapidement sur le continent. Ainsi, Air France a conclu des accords de franchise avec Brit'Air, Proteus, Jersey European Airlines , City Jet et Gill Airways, Lufthansa avec Augsburg Airways, Iberia avec Canarias Regional Air. Parallèlement, les liaisons exploitées " en partage " de code se sont multipliées.

Dans le mouvement actuel qui voit se constituer de larges alliances " planétaires ", les compagnies européennes ont également dû élaborer des stratégies où se disputent des éléments d'alliance et de concurrence . Pour affronter une concurrence devenue mondiale, les compagnies ont constitué de vastes oligopoles à la même échelle. Lufthansa et SAS sont associées dans la " Star Alliance " avec la compagnie américaine United, Air Canada, Thaï Airways, Varig, Air New Zealand, Ansett et bientôt All Nippon Airways et Mexicana ; Swissair, Sabena, TAP Air Portugal, Austrian Airlines, Crossair, Lauda Air, AOM et Air Littoral, Turkish Airlines, Tyrolean et Air Europe dans le " Qualiflyer Group " de nature totalement européenne, mais dont certaines compagnies sont alliées avec Delta dans l'alliance mondiale " Atlantic Excellence " ; KLM et Alitalia sont associées dans le groupe " Wings " avec deux compagnies américaines, Northwest et Continental ; enfin British Airways, Finnair et Iberia forment l'alliance " Oneworld " avec American Airlines, Canadian, Cathay Pacific, Qantas et LAN Chile.

Par ailleurs, sont apparues des compagnies dites à " bas coûts " dont l'activité consiste à exploiter une flotte homogène court-courrier à partir d'aéroports secondaires sur des liaisons intérieures et intra-européennes. Ces compagnies, offrant des tarifs très compétitifs, ont connu ces dernières années un développement spectaculaire, qui a conduit les grandes compagnies à répliquer en créant des filiales spécialisées dans les voyage à prix réduits ; ainsi British Airways a lancé en mai 1998 une filiale de ce type, appelée " GO ", opérant depuis l'aéroport de Stansted. Pour la saison aéronautique d'hiver 1998/1999, l'offre totale hebdomadaire des 5 compagnies -Ryanair, Virgin Express, Easy jet, Debonair et GO- représentait 350.000 sièges, soit l'équivalent de 5 % de l'offre hebdomadaire de toutes les compagnies membres de l'AEA 1( * ) .

La compagnie Air France, entreprise publique a dû, à cette occasion, entamer un processus de restructuration d'autant plus important qu'elle y était mal préparée

Habituée à une situation de quasi-monopole, la compagnie Air France n'était pas préparée à la concurrence. Son mode de fonctionnement, en particulier, le fait que l'Etat puisse imposer des choix d'investissement qui se sont révélés ne correspondre que très partiellement aux intérêts de la compagnie et l'absence de dialogue social sont notamment apparus comme des handicaps importants.

La libéralisation du marché du transport aérien communautaire s'est, en effet, traduite par une perte de part de marché d'Air France, en particulier en France où cette part est passée entre 1992 et 1998 de plus de 90 % à 75 %, et en Europe où elle a diminué dans la même période de 8 % à 6,7 %.

La faible rentabilité de la compagnie a ainsi entraîné des pertes importantes, d'un montant cumulé de 14 milliards de francs .

Accumulant des résultats fortement déficitaires depuis 1989, Air France n'a pu procéder à cette restructuration qu'avec le soutien de l'Etat, qui a procédé en 1994 à une recapitalisation pour un montant de 20 milliards de francs.

Cette aide n'a été autorisée par la Commission européenne qu'aux termes d'un accord qui prévoit :

- l'attribution de la totalité de l'aide à Air France, à l'exclusion de ses filiales ;

- la nécessité d'engager le processus de privatisation d'Air France ;

- la fixation d'objectifs précis en matière de gains de productivité ;

- l'engagement de l'Etat français à adopter un comportement d'actionnaire normal vis-à-vis d'Air France ;

- l'utilisation de l'aide uniquement pour la restructuration et non pour acquérir des participations nouvelles ;

- le gel du nombre d'avions pendant la durée du plan ;

- l'engagement de ne pas accroître l'offre en sièges sur les liaisons intra-communautaires ;

- la mise sous surveillance des tarifs, qui ne doivent pas être inférieurs à ceux des concurrents ;

- l'absence de traitement préférentiel pour Air France en ce qui concerne les droits de trafic ;

- le gel du nombre de lignes exploitées dans l'espace économique européen ;

- la limitation des sièges offerts sur la filiale Air Charter ;

- l'engagement d'opérer toute cession de biens et de services au profit d'Air Charter dans les conditions de marché ;

- l'engagement de cession des hôtels Méridiens ;

- la modification, en liaison avec Aéroports de Paris, des règles de distribution du trafic au sein du système aéroportuaire parisien ;

- l'optimisation de l'utilisation des aérogares d'Orly.

Cette recapitalisation s'est accompagnée de la mise en place d'un plan de redressement financier et commercial qui commence à porter ses fruits.

B. UN PLAN DE REDRESSEMENT FINANCIER ET COMMERCIAL QUI COMMENCE À PORTER SES FRUITS

L'exercice comptable 1998/1999 s'est, en effet, clos pour la quatrième année consécutive avec un résultat d'exploitation positif.

Comptes consolidés du groupe Air France (en MF)

1996/97 (1)

1997/98 (1)

1998/99

Chiffre d'affaires

55 602

58 830

59 692

Excédent brut d'exploitation

5 180

7 409

6 418

Résultat d'exploitation

161

2 547

1 755

Résultat financier

(1 071)

(1 106)

(827)

Résultat courant avant impôts

(870)

1 273

1 489

Résultat net consolidé - part du groupe

(147)

1 836

1 636

Capacité d'autofinancement d'exploitation

5 494

7 538

6 434

(1) à méthodes comptables identiques et périmètre comparable.

En 1998, Air France a conquis le troisième rang européen, derrière British Airways et Lufthansa et devant KLM, en termes de passagers transportés et le 4 e rang pour le transport de passagers internationaux, derrière United, British Airways et Lufthansa.

Ces résultats montrent que les actions structurelles mises en oeuvre par Air France depuis 1994 lui ont permis de profiter pleinement de la bonne conjoncture du transport aérien. Ces actions conjuguent à la fois des mesures de restructuration de son organisation et de son offre et des mesures spécifiques pour augmenter ses recettes et réduire ses dépenses d'exploitation.

La restructuration de l'organisation et du réseau d'Air France

Principale mesure structurelle, la fusion, en 1997, d'Air France et d'Air Inter conduit à la naissance de la compagnie nationale Air France dans sa configuration actuelle.


Parallèlement, la restructuration du réseau d'Air France s'est appuyée sur les axes suivants :

- fermeture systématique des escales n'ayant pas de perspective de rentabilité à court ou moyen terme ; plus de quarante escales ont ainsi été fermées en quatre ans, dont notamment les liaisons Orly-Perpignan, Orly-Toulon et Orly-Nantes, et plus récemment, sur l'exercice 1998/99, les escales de Nagoya, Pise, Ljubljana au départ de Paris pour le trafic passagers et celles de Cayenne, Harare, Johannesbourg, Niamey et Damas pour le trafic tout cargo ;

- simplification des structures de dessertes ; suppression des escales intermédiaires et mise en place de vols directs : en 1999, la proportion des dessertes sans escales est de 86 %, contre 80 % lors de l'exercice précédent ;

- densification du réseau par des augmentations de fréquence sur les lignes les plus porteuses et par un accroissement du nombre de destinations desservies par un vol quotidien ;

- développement du " hub " lancé en avril 1996 par une augmentation du nombre de vols en correspondance, en moins de deux heures, au départ du hub de Charles de Gaulle ; alors que ce nombre était déjà le plus élevé d'Europe en 1998, il a progressé de plus de 40 % en 1999. Le hub d'Air France a permis une augmentation continue du taux de remplissage des avions, qui a atteint 75,5 % sur l'exercice 1998/99 ;

- mise en place d'une desserte cadencée (La Navette) depuis 1996 sur les liaisons les plus porteuses Orly-Toulouse, Orly-Nice et Orly-Marseille. Ce service a permis à Air France de résister à la concurrence aérienne et ferroviaire sur le réseau intérieur. Depuis l'été 1999, la liaison Orly-Bordeaux bénéficie également des services de La Navette.

L'ensemble de ces mesures d'exploitation ont permis une réduction des coûts de gestion de la flotte et du personnel ainsi qu'une augmentation de la productivité.

L'accroissement des recettes

La poursuite de l'accroissement des recettes s'est tout d'abord traduite par de nouvelles méthodes de gestion.

A la fin de l'année 1996, Air France a mis en oeuvre un nouveau système de tarification des sièges dit de " yield management " qui vise à optimiser la recette de chaque vol en gérant la capacité offerte dans chaque tarif. La mise en oeuvre complète de cet outil a permis un accroissement de la recette unitaire au siège kilomètre offert de l'ordre de 6 % sur l'exercice 1997/98 ; la recette unitaire au passager kilomètre transporté augmentant d'environ 4 %, malgré l'impact négatif du développement plus rapide du réseau long-courrier moins rémunérateur au passager kilomètre transporté.

Sur l'exercice 1998/99, marqué par la crise asiatique et la grève des pilotes de juin 1998, la recette unitaire a reculé de 2,9 %. Le recul s'explique pour 1,5 point par l'évolution de la part du trafic long-courrier et pour 1,2 point par les variations de taux de change : corrigée de ces effets, la baisse est limitée à 0,2 point.

La recherche de nouvelles parts de marché s'est également accompagnée de la conclusion d'une " alliance globale " avec Delta Airlines.

Les accords de partage de code qu'Air France a conclus avec, notamment, Continental Airlines et Delta Airlines ont contribué à l'accroissement des parts de marché d'Air France sur les Etats-Unis et à l'amélioration du remplissage de ses avions.

Pour faire face à la montée en puissance commerciale des alliances déjà constituéees (Star Alliance avec notamment United/Lufthansa/SAS ; Oneworld, avec notamment British Airways/American Airlines et KLM/Northwest), Air France a décidé de bâtir à son tour une " alliance globale ".

Une telle alliance va au-delà de simples accords de partage de code et permet d'offrir aux passagers, sous une marque unique, un réseau mondial constitué par l'ensemble des réseaux de chaque partenaire. Les horaires, dessertes et fréquences sont coordonnés entre les compagnies de manière à proposer aux clients une offre globale dense et efficace. Les passagers se voient offrir un produit homogène d'un bout à l'autre du réseau. En outre, les politiques de fidélisation sont harmonisées à l'intérieur de l'alliance : les passagers peuvent accumuler et dépenser leurs " miles " indifféremment sur chacune des compagnies de l'alliance. Enfin, les salons aéroportuaires des compagnies membres sont rendus accessibles aux clients de l'alliance.

Dans cette perspective, Air France et Delta Airlines ont signé le 22 juin 1999 , un accord exclusif afin de créer avec d'autres partenaires une " alliance globale " dans le transport aérien d'ici la fin de l'année.

Le potentiel des deux compagnies représente un trafic de 149 millions de passagers transportés annuellement (contre 129 millions pour American/British Airways et 122 millions pour United/Lufthansa), une flotte de près de 800 avions et 127.000 salariés ; Delta est le premier transporteur domestique aux Etats-Unis. Air France estime que la future alliance devrait lui permettre d'améliorer son résultat d'environ un milliard de francs par an (700 millions de chiffre d'affaires supplémentaire et 300 millions de réduction des coûts) à une échéance de deux ou trois ans.

Les deux membres fondateurs ont été rejoints le 13 septembre 1999 par la compagnie mexicaine Aeromexico, partenaire actuel d'Air France sur la ligne Charles de Gaulle-Mexico et sur sept autres villes du Mexique à partir du 31 octobre 1999.

Enfin, le développement du programme de fidélisation a également contribué au redressement des recettes.

Créé en juin 1992, Fréquence Plus, filiale à 100 % d'Air France, gère le programme de fidélisation de la compagnie qui compte désormais 2,5 millions d'adhérents à travers le monde, dont un peu plus de la moitié réside en France.

Par le nombre d'adhérents, le programme de Fréquence Plus se place en troisième position parmi les programmes européens. Il constitue un levier déterminant pour le chiffre d'affaires d'Air France en fidélisant ses clients. L'objectif est de porter le nombre d'adhérents à 3 millions d'ici l'été 2000, dans le cadre de la nouvelle alliance globale qu'Air France souhaite mettre en place. Pour cela, Air France va développer un programme plus attrayant et faire évoluer son produit de fidélisation.

La réduction des dépenses

Pour assurer l'autofinancement de ses investissements, la compagnie s'est fixée pour objectif de dégager un excédent brut d'exploitation de 15 % du chiffre d'affaires. Pour cela, une politique de recherche de gains de productivité est mise en oeuvre, le but étant d'abaisser les coûts unitaires de 10 % en 3 ans, de l'exercice 1998/99 à l'exercice 2000/01. Air France table d'une part sur les gains de productivité " mécaniques " générés par sa croissance, d'autre part sur un plan de réduction des coûts structurels sur trois ans, qui doit apporter 3 milliards d'économies en valeur annuelle au terme de la troisième année.

L'adoption d'un plan spécifique d'économies de 3 milliards de francs s'est traduite par la mise en place de plus de 500 mesures de réduction des coûts ou d'augmentation de productivité, qui couvrent l'ensemble des domaines d'activité de la compagnie , dont la diminution des coûts salariaux du personnel navigant technique, le regroupement des installations de fret sur une nouvelle aérogare, l'optimisation de l'utilisation des appareils et la poursuite de la rationalisation de la flotte. Sur l'exercice 1998/99, plus de 670 millions de francs d'économies structurelles ou améliorations de recettes ont ainsi été réalisées par la compagnie.

La réduction des dépenses a également été poursuivie par la réduction des coûts salariaux des pilotes.

Pour réduire les écarts de compétitivité avec ses principaux concurrents, en particulier British Airways et Lufthansa, la compagnie Air France a pris des mesures de réduction des coûts de ses personnels navigants techniques. Ces mesures, qui doivent permettre une économie de l'ordre de 500 millions de francs par an sur les coûts salariaux de ses 3.500 personnels navigants techniques (PNT) sont principalement constituées de l'introduction d'une double échelle des salaires pour les pilotes débutants et d'un échange de salaire contre des actions.

Après l'arrêt de travail des pilotes, du 1 er au 10 juin 1998, que l'annonce de ces mesures avait provoqué, les conditions de leur mise en oeuvre ont été précisées par un accord global pluriannuel entre le Syndicat national des pilotes de ligne et la direction d'Air France, signé le 29 octobre 1998 . Il définit notamment les principes d'organisation et de rémunération de la filière des pilotes cadets dont la formation initiale aura été assurée par Air France, ainsi que les modalités de l'opération d'échange de salaire contre des actions.

Cet accord a été rendu possible par la cession de 12 % du capital, des actions de la société Air France aux salariés qui ont consenti à des réductions de leur salaire . Cet échange, qui a eu lieu lors de l'ouverture du capital, reposait sur le volontariat. En contrepartie des actions reçues, les réductions de salaires, organisées en tranches, sont opérées sur l'ensemble de la carrière pour la tranche de base et sur une période de 7 ans pour les tranches complémentaires.

Air France estime les économies qui seront réalisées sur la masse salariale annuelle des PNT à près de 250 millions de francs par an en moyenne sur la durée de l'opération. A cet effet direct de l'échange " salaire contre actions " s'ajoutent l'impact estimé du gel des salaires et la baisse des coûts de formation des PNT liée à la mise en place de la filière des pilotes cadets.

La réorganisation des installations de traitement du fret a également permis d'utiliser pleinement les possibilités de correspondances du " hub " de Charles de Gaulle, de remédier à la dispersion de ses installations, de disposer d'une gare de fret performante et de résister à la concurrence grandissante. L'investissement, financé en totalité par Air France, est prévu en trois tranches, la première, d'un coût de 411 millions de francs, a été mise en service en octobre 1998. Les tranches suivantes seront réalisées en fonction des besoins de la compagnie. La mise en service de la nouvelle aérogare G1XL, qui a conduit à un gain de productivité de l'ordre de 20 %, s'inscrit dans le plan d'économies d'Air France sur 3 ans.

Enfin, la rationalisation de la flotte devrait permettre de renouveler les équipements.

Air France renoue avec une politique de croissance de l'offre, avec notamment la livraison sur la période 1998/2000 de 10 Airbus A340-300 et de 10 Boeing B777-200 pour rajeunir la flotte et suivre l'évolution favorable du trafic long-courrier. Parallèlement, la rationalisation de la flotte se poursuit avec l'extinction des sous-flottes de Fokker 100, Boeing 747-100 et Boeing 727-200. En outre, la compagnie a réorganisé la flotte court et moyen-courrier, avec la sortie des gros porteurs A330 ET A300, et vise un recentrage à terme autour de la famille monocouloir d'Airbus (A318, A319, A320 et A321) équipée de moteurs CFM. Ceci permet en effet de réaliser des économies d'échelle sur les opérations de maintenance, qui ne portent plus que sur un nombre limité de types d'avions et de moteurs. De même, la formation des pilotes se trouve simplifiée et leur mobilité accrue dès lors que certaines familles d'appareils requièrent une qualification unique (Airbus A319, A320 et A321 par exemple).

C. LA POURSUITE DE CETTE STRATÉGIE PASSE PAR LA PRIVATISATION D'AIR FRANCE

Elément de cette stratégie de redressement, l'ouverture du capital d'Air France a été un relatif succès.

L'opération d'échange " salaire contre actions " a été un succès. L'accord du 29 octobre 1998, certes difficilement atteint après une grève du personnel navigant technique qui a duré du 1 er au 30 juin 1998, prévoyait que cet échange serait mis en oeuvre sur une base volontaire et qu'il serait conditionné par la cotation du titre Air France sur le premier marché.

Après avoir été consultés par l'entreprise, les pilotes d'Air France ont choisi, pour 78,8 % d'entre eux, de réduire leurs salaires sur sept ans afin de recevoir des actions de leur entreprise pour un montant d'environ 1,4 milliard de francs. Leur participation s'élève donc à environ 6,8 % du capital dilué de l'entreprise.

Deux accords ont également été signés, l'un avec le personnel au sol et l'autre avec le personnel navigant commercial, qui détiennent désormais plus de 4,5 % du capital social de la société. Au total, plus de 72 % des salariés d'Air France et plus du quart des anciens salariés de la société ont acheté des actions dans le cadre de l'ouverture de son capital. Air France est ainsi devenue l'entreprise française cotée dont l'actionnariat salarié est le plus important.

Par ailleurs, l'ouverture minoritaire du capital de la société à des actionnaires autres que l'Etat et les salariés peut, elle aussi, être considérée comme un succès
: lors de sa première cotation sur le marché à règlement mensuel, la société comptait 2,4 millions d'actionnaires particuliers. Le succès de cet ouverture s'est confirmé auprès des investisseurs institutionnels dont la demande de titres a été quarante fois supérieure à l'offre.

Quant à l'Etat, il est resté actionnaire majoritaire de la société. Sa part devrait cependant se réduire dans les années à venir, sans pour autant descendre en-dessous du seuil de 53 % du capital d'Air France .

En effet, l'établissement de sa part à 62,8 % ne constituait qu'une étape transitoire, une dilution supplémentaire devant intervenir lors du dénouement de deux opérations : les droits ouverts par les obligations remboursables en actions prises par la BNP à hauteur de 1,3 milliard de francs et les bons de souscription d'actions accordés aux salariés en 1994 jusqu'à 1,7 milliard de francs pouvaient être exercés jusqu'au 1 er janvier 2000. A l'heure où le présent rapport est rédigé, la part de l'Etat s'élève à moins de 57 %. Enfin, il est prévu que des actions gratuites soient distribuées au plus tard jusqu'en 2003 aux employés et notamment aux pilotes d'Air France ; à l'issue de cette distribution, la part de l'Etat serait alors réduite à 53 % du capital de la société.

ESTIMATION DE LA RÉPARTITION DU CAPITAL
AU 1 ER JANVIER 2000

Etat : 56,7 %

Salariés identifiés dans des fonds ou par code Socovam : 9,9 %

Autres salariés : 1,3 %

BNP : 3,0 %

Autre flottant : 29,1 %

L'actionnariat d'Air France s'est donc ouvert à de nouveaux investisseurs ; cette évolution est allée de pair avec un redressement financier de la société. Ainsi, au premier semestre de l'exercice 1999-2000 (avril-septembre 1999), le résultat net du groupe a progressé de 52 % par rapport au premier semestre de l'exercice précédent ; le résultat d'exploitation a, quant à lui, augmenté de près de 85 % sur la même période.

La poursuite du redressement d'Air France passe par sa privatisation

Si la compagnie paraît aujourd'hui redressée, son devenir reste dépendant de sa capacité à relever les défis qui s'imposent à elle, à assurer sa croissance et son plein rétablissement financier dans le contexte de concurrence très vive qui est celui du transport aérien. Cela implique que l'entreprise soit en mesure d'être guidée par un actionnaire capable d'exercer entièrement les responsabilités d'un gestionnaire d'entreprise, c'est-à-dire d'accompagner financièrement son développement et d'assumer sans faiblesse les décisions propres à favoriser son succès.

En 1993, le Gouvernement de M. Edouard Balladur avait estimé qu'un tel objectif ne pouvait être atteint que par le transfert d'Air France dans le secteur privé. Dans cette perspective, le Parlement avait, lors de l'adoption de la loi de privatisation du 19 juillet 1993, fait figurer Air France parmi la liste des sociétés " privatisables " par décret.

La majorité actuelle issue des élections de 1997 n'a pas abrogé ces dispositions. Cette attitude dont il faut louer la sagesse, illustre la prise de conscience parmi l'ensemble des acteurs concernés de la nécessité d'ouvrir tôt ou tard plus largement le capital d'Air France aux investisseurs privés.

Si le gouvernement n'a pas souhaité se priver de la possibilité de privatiser, il n'a cependant pas procédé à cette privatisation. C'est la raison pour laquelle le Président d'Air France en 1997, M. Christian Blanc, estimant qu'en refusant la privatisation, le gouvernement ne lui donnait pas les moyens de redresser la compagnie avait alors démissionné.

Le Gouvernement ne s'est malheureusement pas contenté de limiter l'ouverture du capital d'Air France, mais s'est engagé par la voix du Premier ministre et du ministre des transports à ne pas ouvrir aux investisseurs privés une deuxième tranche du capital de la compagnie. Cet engagement, destiné à satisfaire une composante minoritaire d'une majorité très plurielle fige, semble-t-il, la situation d'Air France jusqu'aux prochaines élections législatives et présidentielle.

Devant le refus d'aller plus loin dans un processus que l'ensemble des acteurs du secteur juge inéluctable, votre rapporteur a la naïveté de penser que l'opportunité de privatiser Air France ne devrait pas être apprécié au regard de motifs uniquement idéologiques.

Force est, en effet, de constater que dans un secteur marchand soumis à une concurrence de plus en plus active des différents opérateurs, les transporteurs aériens à statut public ne sont plus que des exceptions.

On observe, en effet, comme le montre le tableau suivant, un désengagement progressif de l'Etat dans l'ensemble des grandes compagnies aériennes européennes. Si British Airways et Lufthansa sont déjà privatisées à 100 %, l'Etat italien, par le biais du holding IRI, a annoncé sa volonté de se désengager partiellement d'Alitalia, de même, l'Etat espagnol a commencé à se désengager totalement d'Iberia.

Si l'on s'en tient aux seules compagnies aériennes européennes, où l'Etat a longtemps eu une présence majoritaire, Air France risque à la fin 2000 d'être la seule compagnie encore publique. Votre rapporteur estime que l'attachement louable du Gouvernement à l'exception française aurait pu trouver à s'exercer dans d'autres domaines, ou du moins autrement qu'en freinant une évolution qu'il sait, par ailleurs, nécessaire.

STATUT, ACTIVITÉ ET RÉSULTATS FINANCIERS DES PRINCIPALES COMPAGNIES EUROPÉENNES

 

STATUT

ACTIVITE

ANNEE CIVILE 1998

RESULTATS DU DERNIER EXERCICE

 

Répartition du capital au 31/12/98 sauf mention contraire

Passagers

(milliers)

98/97

%

Passagers-km Transportés

(millions)

98/97

%

Tonnes-km transportées Fret (millions)

98/97

%

Tonnes-km transportées total (millions) 2( * )

98/97

%

Recettes d'exploitation

(millions US$)

Résultat net

(millions US$)

Air France

56,6 % Etat, 39,3 % privé, 6,4 employés,
4 % BNP

33 498

+15,2 %

74 598

+9,8

4 596

-6,3 %

11 500

-4,6 %

9 695

266

Alitalia

53 % Etat (holding IRI), 20 % employés, 27 % privé

24 178

-1,5 %

35 561

-1,2 %

1 473

+2,3 %

4 709

-0,1 %

4 971

260

British Airways

100 % privé

36 593

+7,0 %

116 001

+9,7 %

4 047

+3,4 %

14 658

+7,8 %

14 360

332

Iberia

53 % Etat (holding SEPI), 10 % BA+AA

22 259

+38,5 %

32 496

+17,6 %

746

-4,9 %

3 708

+11,9 %

4 214

235

KLM

75 % privé,
25 % Etat

14 991

+3,8 %

57 279

+3,4 %

3 709

-1,8 %

9 017

+1,1 %

6 323

216

Lufthansa

100 % privé

38 503

+9,1 %

75 438

+5,7 %

6 221

+0,9 %

13 010

+2,1 %

10 167

764

Certes, l'appartenance au secteur public n'empêche en apparence ni la conclusion d'alliances stratégiques ni la mise en oeuvre de programmes d'investissement ambitieux. Si la majorité des compagnies ont cependant rejoint le secteur privé, c'est que l'appartenance au secteur public limite l'autonomie de gestion des entreprises. La double tutelle du ministère des finances et du transport pèse ainsi sur Air France, ralentit les décisions et parfois empêche les mesures d'adaptation qui se révéleraient nécessaires. Les choix industriels peuvent être biaisés et le dialogue social faussé, dès lors que les ministres apparaissent comme des recours d'autant mieux mobilisables que pèsent sur deux des contraintes électorales et politiques, étrangères aux enjeux de l'entreprise.

Le choix du secteur privé permettrait, en outre, de disposer de moyens financiers suffisants pour développer une entreprise fortement capitalistique qui se doit d'avoir un programme d'investissement ambitieux pour faire face à la concurrence internationale. L'Etat n'a pas les moyens financiers de cette ambition ; l'ouverture récente du capital aux investisseurs privés en est, à cet égard, un aveu.

Il faut, en outre, noter que l'Etat opérateur du transport aérien n'est pas en mesure de jouer pleinement son rôle de régulateur et d'arbitre dans un secteur où il est juge et partie. De ce point de vue, la privatisation permettrait également une clarification.

II. UN PROJET DE LOI TECHNIQUE QUI SE LIMITE À ADAPTER LE STATUT PUBLIC D'AIR FRANCE À L'OUVERTURE PARTIEL DE SON CAPITAL

A. SOCIÉTÉ COMMERCIALE CÔTÉE EN BOURSE, AIR FRANCE, ENTREPRISE PUBLIQUE, RESTE SOUMISE A LA TUTELLE DE L'ETAT

Air France nationalisée depuis 1948 est une entreprise publique à statut. Entreprise publique car détenue à majorité par l'Etat, Air France est une entreprise à statut à un double titre. D'une part, les conditions de travail du personnel de la compagnie Air France ne sont pas déterminées par des conventions collectives, mais par des dispositions statutaires soumises à l'approbation des ministres de tutelle. Ces dispositions apparaissent comme des éléments de l'organisation du service public exploité et présentent un caractère réglementaire.

D'autre part, Air France est assujettie à un statut spécifique défini par le code de l'aviation civile, dont l'article L.341-1 dispose que la compagnie est régie par le code précité et " dans tout ce qu'elles n'ont pas de contraire à celui-ci, par les lois sur les sociétés anonymes " . La société Air France est, en outre, partiellement soumise aux lois et décrets relatifs aux entreprises publiques, et notamment aux dispositions de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

Ce statut se traduit par un certain nombre de spécificités que le projet de loi se propose d'atténuer. Ces spécificités, qui sont détaillées ci-après dans l'examen des articles, concernent tant le fonctionnement de l'entreprise que l'organisation de son conseil d'administration.

Comme pour l'ensemble des entreprises publiques, ce statut se caractérise également par un contrôle de l'Etat. La société Air France est ainsi soumise à un contrôle technique et à un contrôle économique et financier.

Le contrôle technique, qui appartient au ministre des transports s'exerce sous la forme d'un commissaire du Gouvernement présent au sein de l'entreprise auprès de la direction et du conseil d'administration. Il se traduit également par un pouvoir d'approbation préalable institué par le décret n° 53-707 du 9 août 1953. Son domaine a été restreint depuis, mais il reste applicable aux aspects essentiels de la gestion : budget, statut du personnel, prises de participation financière.

Organisée par le décret n° 55-733 du 26 mai 1955, le contrôle économique et financière s'exerce a priori par le ministère des finances et a posteriori par la Cour des comptes. Le ministère de l'économie et des finances dispose d'un pouvoir d'appréciation préalable à l'égard des décisions les plus importantes de l'entreprise. Le ministre est représenté auprès de Air France par un contrôleur d'Etat. Ce dernier dispose de tous pouvoirs d'investigation sur pièces et sur place et a droit d'entrée, avec voix consultative, aux conseils d'administration. Il donne au ministre son avis sur les projets d'Air France lorsque ceux-ci sont soumis à approbation ministérielle tel que les projets de création ou de cession d'une entreprise et lui adressent un rapport annuel.

La Cour des comptes est, quant à elle, chargée, depuis la loi n° 76-539 du 22 juin 1976, d'un contrôle général de caractère administratif et financier des comptes et de la gestion.

Société commerciale cotée en Bourse, Air France n'en est donc pas moins soumise, pour des éléments essentiels de son fonctionnement, tels que le statut du personnel, le budget et les participations financières, à la tutelle de deux ministères.

B. UNE RÉFORME À MINIMA QUI SE CONTENTE DE TIRER LES CONSÉQUENCES JURIDIQUES DE L'OUVERTURE PARTIELLE DU CAPITAL D'AIR FRANCE

Le projet de loi soumis à votre examen comporte trois articles modifiant les dispositions du code de l'aviation civile relatives à Air France.

Les deux premiers articles tendent à supprimer certaines procédures relatives aux relations entre l'Etat et l'entreprise.

L'article 1 er prévoit ainsi :

- de supprimer les dispositions de l'article L.341-1 du code de l'aviation civile relatives aux conditions générales d'exploitation du transport aérien par Air France et aux subventions pour les lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien, dans la mesure où celles-ci relèvent désormais de règlements communautaires applicables à tous les transporteurs aériens communautaires ;

- de supprimer l'autorisation préalable des deux ministres de tutelle en matière de prise de participations d'Air France dans des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale.

L'article 2 prévoit d'abroger les dispositions relatives à la contrainte d'équilibre financier figurant à l'article L.342-2, superfétatoire au regard de l'objet même de l'entreprise, et, s'agissant des obligations devant faire l'objet de contrats préalables qui lui sont imposées dans l'intérêt général, de prendre en compte le cas spécifique des obligations de service public définies par le règlement (CEE) N° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aux liaisons aériennes intracommunautaires.

Enfin, l'article 3 modifie l'article L.342-3 du même code en substituant aux dispositions relatives à la possibilité, pour la compagnie, d'émettre des emprunts pouvant bénéficier de la garantie de l'Etat, de nouvelles dispositions relatives à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France.

Ces dispositions porte le nombre des membres du Conseil d'administration de dix-huit à vingt-et-un, par dérogation à l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public, qui imposait dix-huit membres.

Selon l'exposé des motifs, cette extension permettra d'assurer l'entrée d'administrateurs représentant les nouveaux actionnaires aux côtés des représentants de l'Etat actionnaire et des salariés actionnaires ainsi que des administrateurs salariés élus.

La principale disposition du projet de loi est donc l'élargissement du conseil d'administration afin de tenir compte de l'entrée de nouveaux actionnaires privés et du renforcement de l'actionnariat des salariés. Les autres dispositions -semble-t-il- n'étaient pas indispensables au bon fonctionnement de l'entreprise.

Ainsi, l'alignement des dispositions du code de l'aviation civile sur le droit communautaire était certes nécessaire à la cohérence juridique des textes et au respect de la hiérarchie des normes. Dans la mesure où les règlements communautaires visés sont directement applicables et obligatoires dans tous leurs éléments, les dispositions actuelles du code de l'aviation civile qui leur étaient contraires ne peuvent recevoir une pleine application.

De même, l'allégement de la tutelle de l'Etat annoncée dans l'exposé des motifs relève pour une large part d'un toilettage technique de dispositions qui sont soit sans portée réelle -comme la contrainte d'équilibre financier- soit inappliquées, comme les dispositions relatives aux conditions d'exercice des transports aériens.

On ne saurait en tout cas identifier ce toilettage technique avec une réforme des relations entre l'Etat et Air France. De ce point de vue l'exposé des motifs est plus généreux que ne l'est le texte lui même. Ainsi la volonté affichée de recentrer la tutelle de l'Etat sur le conseil d'administration, s'accompagne du maintien du contrôle général et du contrôle économique et financier prévu par l'article L.342-1 du code de l'aviation civile.

Si le contrôle de l'Etat doit s'opérer à travers sa présence majoritaire au sein du conseil d'administration, comme le souligne l'exposé des motifs, on peut s'interroger sur la nécessité de maintenir ce type de tutelle économique et financière qui constitue un héritage de l'époque où les entreprises publiques étaient soumises pleinement à la tutelle administrative de l'Etat. Supprimer ce type de contrôle supposerait, il est vrai, de revoir les règles générales applicables aux entreprises publiques.

La portée juridique et pratique des deux premiers articles laisse donc à penser que leur vocation première était d'accompagner l'article trois, même s'il faut louer le souci du Gouvernement d'actualiser les dispositions d'un code qui, élaboré pour l'essentiel dans les année cinquante, mériterait sans doute une réforme d'ensemble.

Votre rapporteur observe toutefois que l'augmentation du nombre d'administrateurs, seule mesure relative au conseil d'administration qui exigeait le recours à la loi -la composition de ce conseil relevant du décret- n'était elle-même pas indispensable à l'introduction de nouveaux administrateurs représentant les actionnaires privés et au renforcement de la présence des salariés actionnaires.

Il était, en effet, possible d'atteindre cet objectif sans modifier le nombre global d'administrateurs. En diminuant le nombre des personnalités qualifiées à trois et en prévoyant un vote prépondérant du Président, l'Etat pouvait conserver la majorité du conseil d'administration avec neuf représentants dont trois personnalités qualifiées. Cette solution a semble-t-il été écarté en raison de la crainte que les personnalités qualifiées pourtant nommées par l'Etat ne manifestent à l'occasion de certains votes une trop grande indépendance.

Seule la volonté de l'Etat de conserver une large majorité au sein du conseil d'administration explique de ce fait l'augmentation du nombre d'administrateurs. Le projet de loi permet ainsi à l'Etat d'obtenir une majorité de 11 membres sur 21 et, au sein de sa majorité, de renforcer la présence des représentants en titre de l'Etat au détriment des personnalités qualifiés.

Cet objectif était-il suffisant pour que l'on modifie le code de l'aviation civile ? Il est sans doute naturel que l'actionnaire majoritaire souhaite s'assurer le contrôle effectif du conseil d'administration. On peut toutefois regretter que la voie empruntée par le gouvernement entraîne l'interruption du mandat d'administrateurs désignés il y a à peine trois ans. En effet, la continuité permet un suivi des dossiers propice au sérieux des travaux. La prorogation de l'actuel conseil d'administration avec l'adjonction des nouveaux membres aurait sans doute, de ce point de vue, été préférable.

Cette nouvelle réforme aura, en outre, pour conséquence de provoquer de nouvelles élections et un climat de campagne électorale qui, par le passé, a souvent été l'occasion de raviver les tensions entre les différentes catégories de personnels. Les dispositions du projet de loi permettant au Gouvernement de prévoir des élections au sein de deux sections de l'assemblée générale composées respectivement du personnel navigant technique (PNT) actionnaire et des autres salariés actionnaires traduisent les accords passés par la direction avec les pilotes. Elles ont néanmoins l'inconvénient de raviver le clivage entre les PNT et les autres catégories de personnels, qui ont déjà assez mal perçu leur faible représentation au sein du comité d'audit et de stratégie.

C. DE PORTÉE LIMITÉE, LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI S'INSCRIVENT NÉANMOINS DANS UNE LOGIQUE D'OUVERTURE DU CAPITAL ET D'ALLÉGEMENT DE LA TUTELLE DE L'ETAT QUI ENGAGE AIR FRANCE DANS UNE ETAPE VERS LA PRIVATISATION

La suppression de la procédure d'autorisation préalable en matière de création et de gestion des prises de participation d'Air France dans des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale, permettra, par exemple, à cette société d'engager sa parole dans des négociations sans devoir demander pour chaque opération l'approbation des services de l'Etat.

Votre commission partage la volonté de conforter l'autonomie de gestion d'Air France et de recentrer la tutelle de l'Etat sur le seul conseil d'administration. Elle se félicite de l'introduction d'un administrateur représentant les investisseurs privés au sein du Conseil d'administration et du renforcement de la représentation des salariés actionnaires.

Elle reste certes convaincue que la privatisation d'Air France est le moyen le plus efficace pour assurer l'avenir de la compagnie nationale. Mais elle ne saurait s'opposer à un texte technique qui permet une avancée dans la bonne direction .

Elle vous propose, en conséquence, d'adopter sans modification le présent projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er -
(article L.341-1 du code de l'aviation civile) -

Allégement de la tutelle de l'Etat sur Air France

1. Le droit en vigueur

Cet article modifie l'article L.341-1 du code de l'aviation civile, qui définit le statut de la compagnie nationale Air France et ses relations avec l'Etat.


Dans sa rédaction actuelle, l'article L.341-1 dispose que la société dite Compagnie nationale Air France est régie par le code de l'aviation civile et, dans tout ce qu'elles n'ont pas de contraire à celui-ci, par les lois sur les sociétés anonymes.

Il précise qu'Air France a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens dans les conditions fixées par le ministre chargé de l'aviation civile après accord, s'il y a lieu, des autres ministres intéressés. Il prévoit, par ailleurs, qu'aucune subvention ne peut lui être allouée pour les lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien.

Cet article dispose, enfin, qu'Air France peut, après autorisation, créer ou gérer des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale ou prendre des participations dans de telles entreprises. Il lui interdit toutefois de créer ou gérer des entreprises de fabrication de matériel aéronautique ou d'y prendre une participation.

2. Les dispositions du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale

Le I de cet article procède à une réécriture du deuxième alinéa de l'article L.341-1 . La rédaction proposée supprime, d'une part, la mention selon laquelle Air France a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens dans les conditions fixées par le ministre chargé de l'aviation civile après accord, s'il y a lieu, des autres ministres intéressés et, d'autre part, les dispositions interdisant les subventions aux lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien.

La suppression de la référence à une intervention ministérielle pour la fixation des conditions de l'exploitation du transport aérien par Air France correspond tout d'abord à la traduction juridique d'une situation de fait.

Les conditions réglementaires de l'exploitation des transports aériens, qu'elles soient d'ordre technique, financier ou statutaire, ne relèvent, en effet, plus exclusivement du ministère chargé de l'aviation civile. L'institution d'un espace aérien européen a notamment conduit le droit communautaire à jouer un rôle croissant dans des domaines aussi étendus que divers, comme l'illustre la liste ci-après des directives intervenues dans ce secteur.

LES PRINCIPAUX RÈGLEMENTS ET DIRECTIVES
RELATIFS À L'AVIATION CIVILE

- le bruit (directives [CEE] n° 80/51 du Conseil du 20 décembre 1979 et n° 89/629/CEE du Conseil du 4 décembre 1989, relatives à la limitation des émissions sonores de certains avions) ;

- règlement n° 3975/87 [CEE] du Conseil du 14 décembre 1987 déterminant les modalités d'application des règles de concurrence applicables aux entreprises de transport aérien ;

- règlement n° 3976/87 [CEE] du Conseil du 14 décembre 1987 concernant l'application de l'article 85, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords et de pratiques concertées dans le domaine des transports aériens), des domaines aussi divers que :

. les systèmes informatisés de gestion (règlement [CEE] n° 2299/89 du Conseil du 24 juillet 1989 instaurant un code de conduite pour l'utilisation de systèmes informatisés de réservation) ;

. les tarifs (règlement [CEE] n° 2409/92 du Conseil du 23 juillet 1992 sur les tarifs des passagers et de fret des services aériens) ;

. l'accès aux marchés (règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires).

- les règles techniques (règlement [CEE] n° 3922/91 du Conseil du 16 décembre 1991 relatif à l'harmonisation des règles techniques et de procédures administratives dans le domaine de l'aviation civile) ;

- les licences des transporteurs aériens (règlement [CEE] n° 2407/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant les licences des transporteurs aériens) ;

- l'assistance à escale (directive [CEE] n° 96/97/CE du Conseil du 15 octobre 1996 relative à l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports de la Communauté) ;

- le personnel navigant (directive [CEE] n° 91/670 du Conseil du 16 décembre 1991 sur l'acceptation mutuelle des licences du personnel pour exercer des fonctions dans l'aviation civile).

Cette suppression traduit ensuite, selon l'exposé des motifs, un changement de nature de la tutelle de l'Etat . La volonté de conforter l'autonomie d'Air France conduit, en effet, à supprimer la référence à une tutelle réglementaire pour recentrer l'action de l'Etat sur son rôle d'actionnaire.

Le recentrage de la tutelle de l'Etat sur le conseil d'administration est cependant très partiel. Il convient, en effet, de souligner que le projet de loi ne modifie notamment pas l'article L.342-1, qui prévoit que la compagnie Air France est soumise au contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile et à un contrôle économique et financier.

La portée du contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile prévu par l'article L.342-1, est définie plus précisément par les articles R.342-5 et R.342-15 et un arrêté du 16 février 1954.

L'article R. 342-5 renvoie à un arrêté, pris le 16 février 1954, pour la fixation des conditions d'exercice du contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile. Cet arrêté précise que ce contrôle est exercé, sous l'autorité du directeur général de l'aviation civile, par le directeur des transports aériens. Il porte " sur les opérations de toute nature " effectuées par la société Air France " qui doit communiquer à ces fonctionnaires, spontanément ou sur leur demande, tous documents et renseignements utiles et, d'une façon plus générale, leur donner toutes facilités pour leur permettre de se livrer aux investigations nécessaires à l'accomplissement de leur mission ".

Par ailleurs, l'article R.342-15 (décret n° 84-352 du 11 mai 1984) reprend les termes de l'article 1 er de l'arrêté du 16 février 1954, et dispose que " le directeur général de l'aviation civile et le directeur des transports aériens siègent, avec voix consultative, au conseil d'administration de la société Air  France, respectivement en qualité de commissaire du Gouvernement et de commissaire du Gouvernement adjoint ". Des fonctionnaires de la direction générale de l'aviation civile siègent également en tant que commissaires du Gouvernement au Conseil d'administration de filiales d'Air France.

Le contrôle économique et financier est, quant à lui, défini par les dispositions du décret n° 55-733 du 26 mai 1955, auxquelles Air France est soumis, l'Etat détenant plus de 50 % de son capital. Selon les termes de l'article 9 de ce décret, " le contrôle porte sur l'activité économique et la gestion financière de l'entreprise ; à cet effet, les contrôleurs d'Etat doivent faire connaître leur avis aux ministres chargés des Finances, des Affaires économiques et du Budget sur les projets de délibération ou de décision des organismes qu'ils contrôlent lorsque ces projets sont soumis à l'approbation de ces ministres. Ils rendent compte périodiquement de leur activité à ceux-ci et présentent un rapport annuel les informant de la situation économique et financière des établissements placés sous leur contrôle. "

La mission de contrôle auprès d'Air France est constituée de deux contrôleurs d'Etat disposant d'un pouvoir d'investigation étendu et présents à plein temps au sein du groupe ; le premier, qui exerce le contrôle économique et financier sur la société proprement dite, a entrée avec voix consultative aux séances du conseil d'administration ainsi qu'aux commissions et organes consultatifs d'Air France ; le second est chargé du contrôle des filiales de la société.

La suppression des dispositions interdisant les subventions aux lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aériens participe, quant à elle, d'un toilettage de dispositions aujourd'hui reprises et complétées par le droit communautaire.

L'article 4 du règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires dispose, en effet, que sur les liaisons intra-communautaires, ne peuvent donner lieu à subventions que les services aériens sur lesquels sont imposées des obligations de service public et pour lesquels, en l'absence de candidature de transporteur aérien, une compagnie peut être sélectionnée sur appel d'offres.

L'article L.341-1 dans sa rédaction actuelle ne visait en conséquence qu'un cas particulier parmi les liaisons visées par le règlement communautaire qui est, par ailleurs, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable sur le territoire français.

Le II de cet article supprime la procédure d'autorisation préalable pour toute participation d'Air France à des activités présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale de transports aériens .

Cette dernière disposition de l'article L.341-1 concerne les activités autres que l'activité de transport aérien au sens de l'article L.310-1 du code précité, c'est-à-dire l'acheminement par un aéronef de passagers, marchandises ou de poste.

Actuellement, les principales entreprises filiales d'Air France dont l'activité a un caractère annexe par rapport à son activité principale exercent dans les domaines suivants :

- le commissariat aérien avec le groupe Servair, détenu par Air France à 75 % ;

- l'informatique commercial avec une participation de 29,2 % dans le groupe Amadeus Global Travel Distribution et des participations majoritaires dans Amadeus France (66 %) et Esterel (57 %) ;

- la maintenance aéronautique avec la société Construction et Réparation de Matériel Aéronautique (CRMA), détenue par Air France à 100 % ;

- l'activité de transitaire de fret avec Sodexi (détenue par Air France à 60 %) et Sodetair (détenue à 100 %) ;

- le transport de fret postal sur les liaisons intérieurs françaises avec la Société d'Exploitation Aéropostale détenue à parité par Air France et La Poste.

Actuellement, l'exercice de telles activités annexes par création, gestion ou prise de participation dans une entreprise est soumise à une double autorisation préalable : celle donnée par le Conseil d'administration et celle donnée par arrêté conjoint du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des finances.

Cette procédure est un frein à la " réactivité " de la compagnie, qui est en situation de concurrence non seulement pour le transport de passagers, mais également pour sa croissance externe. Lorsqu'apparaît une opportunité de prise de participation pour l'entreprise, celle-ci est généralement en concurrence avec d'autres transporteurs européens. Ne pouvoir faire d'offres sans réserves relatives à l'autorisation de ses ministres de tutelle pose à la direction de l'entreprise un problème de crédibilité vis-à-vis de ses interlocuteurs. Il faut donc se féliciter de la suppression d'une disposition devenue inadaptée.

Votre rapporteur observe, par ailleurs, que les dispositions de l'article L.341-1 du code de l'aviation civile interdisant Air France de créer ou de gérer des entreprises de fabrication de matériel aéronautique ou de prendre une participation dans une telle entreprise, dont la justification semble échapper aussi bien aux services de l'autorité de tutelle qu'aux dirigeants d'Air France, sont maintenues.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

3. Position de la Commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 2 -
(article L.342-2 du code de l'aviation civile) -

Suppression des dispositions relatives à la contrainte d'équilibre financier d'Air France et prise en compte des obligations de service public

1. Le droit en vigueur

Dans sa rédaction actuelle, l'article L.342-2 du code de l'aviation civile prévoit tout d'abord que " la Compagnie nationale Air France doit couvrir par ses ressources propres l'ensemble de ses dépenses d'exploitation, l'intérêt et l'amortissement des emprunts, l'amortissement du matériel et des installations et les provisions à constituer pour couvrir les risques de tout ordre ".

Issue de la loi n° 48-976 du 16 juillet 1948, cette rédaction tend à rappeler une obligation d'équilibre financier qui apparaît aujourd'hui, alors qu'Air France côté en Bourse évolue dans un environnement pleinement concurrentiel, marqué d'obsolescence.

Cet article dispose ensuite que " les obligations qui sont imposées à Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la Compagnie, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part " . Cette disposition visait à l'origine à protéger les intérêts de la compagnie, afin que l'Etat ne puisse lui imposer des missions d'intérêt général sans que ces missions fassent l'objet d'un contrat précisant leur étendue et les compensations financières consenties à la compagnie en contrepartie.

2. Les dispositions du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale

L'article 2 du projet de loi procède à une réécriture de l'ensemble de l'article L.342-2 du code précité.

La rédaction proposée supprime la référence à une obligation d'équilibre financier qui, si elle avait une raison d'être lorsqu'Air France n'était pas soumise à la concurrence, ne semble plus aujourd'hui devoir figurer dans le code de l'aviation civile.

Cette nouvelle rédaction précise le cadre dans lequel des missions d'intérêt général et de service public peuvent être confiées à Air France, afin de tenir compte de l'évolution du droit communautaire .

La Communauté européenne a, en effet, défini dans le règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires, le cadre dans lequel les Etats membres peuvent imposer aux compagnies aériennes des obligations de service public. Ce texte étant, comme tous les règlements, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable, il convenait, pour les liaisons intra-communautaires, de faire explicitement référence aux règles communautaires en la matière.

La rédaction proposée par l'article L.342-2 répond à cet objectif en prévoyant que " sous réserve des dispositions applicables aux obligations de service public imposées sur les services aériens réguliers intra-communautaires, les obligations qui sont imposées à la société Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la société, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part " .

Cet article distingue ainsi les services aériens réguliers intra-communautaires, à qui il ne peut être imposé d'obligations de services publics qu'en application des règles fixées par le règlement n° 2408/92 et les autres services aériens extracommunautaires, à qui peuvent être imposées des obligations d'intérêt général dans les conditions fixées par le présent article, c'est-à-dire un contrat préalable assorti d'un cahier des charges.

Le régime communautaire relatif aux obligations de service public imposées aux services aériens réguliers intra-communautaires .

En droit communautaire, les obligations de service public imposées aux services intra-communautaires sont définis, aux termes de l'article 2 du règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires comme " des obligations imposées à un transporteur aérien en vue de prendre, à l'égard de toute liaison qu'il peut exploiter en vertu d'une licence qui lui a été délivrée par un Etat membre, toutes les mesures propres à assurer la prestation d'un service répondant à des normes fixes en matière de continuité, de régularité, de capacité et de prix, normes auxquelles le transporteur ne satisferait pas s'il ne devait considérer que son seul intérêt commercial ".

Ces obligations ne peuvent être, aux termes de l'article 3 du même règlement imposées par un Etat membre qu'à des services aériens réguliers desservant :

- " une zone périphérique ou de développement " situé sur son territoire ;

- " une liaison à faible trafic à destination d'un aéroport régional " situé sur son territoire.

Dans les deux cas, l'Etat doit justifier le fait que ces liaisons sont " vitales pour le développement économique de la région dans laquelle est situé l'aéroport ". En outre, les obligations de service public ne peuvent être imposées que " dans la mesure nécessaire pour assurer sur ces liaisons une prestation de service adéquate répondant à des normes de continuité, de régularité, de capacité et de prix auxquelles le transporteur ne satisferait pas s'il ne devait considérer que son seul intérêt commercial ". Le caractère adéquat du service doit être apprécié au regard de plusieurs critères : l'intérêt public, la possibilité de recourir à d'autres formes de transport et la capacité de ces formes de transport à répondre aux besoins considérés, les tarifs et les conditions de transport aérien qui peuvent être proposés aux usagers ainsi que l'effet de l'exploitation de la liaison par tous les transporteurs aériens l'exploitant ou comptant l'exploiter.

Le règlement précité prévoit que si d'autres formes de transport ne permettent pas d'assurer un service adéquat et continu, les Etats membres peuvent prévoir, dans le cadre des obligations de service public, que " tout transporteur qui compte exploiter la liaison doit garantir qu'il exploitera pendant une certaine période ". Si une liaison n'est exploitée par aucun transporteur aérien, l'Etat peut alors en limiter l'accès à une seule compagnie, pour une durée maximale de trois ans. Le droit d'exploitation est alors concédé après appel d'offres publié au Journal officiel des Communautés européennes. Il est également prévu que l'Etat puisse verser une compensation au transporteur aérien ainsi sélectionné, afin qu'il satisfasse aux normes précédemment citées et découlant des obligations de service public ; il est précisé que cette compensation doit tenir compte des dépenses et recettes engendrées par le service.

L'imposition d'une obligation de service public doit enfin, aux termes de l'article 4 du même règlement, respecter une procédure en plusieurs étapes : consultation par l'Etat des autres Etats membres concernés, c'est-à-dire ceux entre lesquels ou à l'intérieur desquels est exploitée la liaison aérienne visée par l'obligation de service public, information préalable de la Commission et des transporteurs aériens qui exploitent la liaison, imposition des obligations de service public à la compagnie aérienne et enfin publication de ces obligations par la Commission au Journal officiel des Communautés européennes.

Comme le montre l'encadré ci-avant, les conditions d'imposition d'obligation de service public sur les liaisons intra-communautaires prévues par le droit communautaire sont donc beaucoup plus précises que le régime prévu actuellement par l'article L.342-2 du Code de l'aviation civile.

Le texte proposé ne maintient en conséquence le régime actuel que pour :

- les obligations imposées sur des services aériens extracommunautaires (n'entrant pas dans le champ d'application du règlement CEE n° 2408/92 du 23 juillet 1992) ;

- toute autre obligation d'intérêt général portant sur la société ; par exemple pour les besoins relatifs à l'action internationale de la France (dans les domaines diplomatique, humanitaire ou relevant de la défense nationale).

Dans la mesure où aucune des liaisons d'Air France ne fait l'objet d'une telle obligation, il s'agit d'une hypothèse que le projet de loi n'a pas souhaité exclure.

Les liaisons extracommunautaires vers les territoires et collectivités territoriales d'outre-mer pourraient, en effet, faire l'objet d'obligations d'intérêt général. Les liaisons existantes vers ces territoires peuvent être dépendantes des relations aériennes bilatérales de la France ou de compagnies étrangères. Des liaisons directes pourraient dans certaines situations être considérées indispensables pour relier ces collectivités à la métropole, tout en ne pouvant, dans certains cas (Mayotte, Saint-Pierre et Miquelon, Wallis et Futuna...), générer qu'un trafic modeste ne permettant pas l'établissement de liaisons aériennes rentables avec la métropole ou d'autres points du territoire national... Des liaisons purement internationales, non rentables commercialement, ont également pu ou pourront apparaître comme indispensables ou répondre à des intérêts vitaux, comme ce fut le cas il y a quelques années de la ligne vers les Comores.

L'Assemblée nationale a adopté ce texte sans modification.

3. Position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 -
(article L.342-3 du code de l'aviation civile) -

Elargissement du Conseil d'administration de la société Air France

1. Le droit en vigueur

Cet article supprime les dispositions actuelles de l'article L.342-3 du code de l'aviation civile et les remplace par de nouvelles dispositions.


Dans sa rédaction actuelle, l'article L.342-3 dispose qu'en vue de financer ses immobilisations et d'augmenter son fonds de roulement, la société Air France est habilitée à émettre dans le public des emprunts qui peuvent bénéficier de la garantie de l'Etat. Cette disposition apparaît aujourd'hui clairement en contradiction avec les règles européennes proscrivant les aides d'Etat, et notamment avec l'article 92 du Traité instituant la Communauté européenne. En outre, l'Etat n'a pas apporté sa garantie à un emprunt émis par Air France depuis près de 25 ans. La suppression de ces dispositions permet en conséquence une mise en conformité du droit national avec le droit communautaire .

Le présent article propose de remplacer ces dispositions par des mesures précisant la composition du Conseil d'administration d'Air France.

Actuellement, les règles relatives à la composition et au fonctionnement du conseil d'administration d'Air France sont fixées par des dispositions de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et du code de l'aviation civile et, dans tout ce qu'elles n'ont pas de contraire au code et aux lois précitées, par la loi de 24 juillet 1966 sur les sociétés.

Comme le souligne le tableau suivant, les règles applicables à Air France diffèrent sensiblement du droit commun des sociétés.

CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE





 

Loi du 24 juillet 1966

Dispositions relatives à Air France de la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et du code de l'aviation civile

Composition

3 à 24 administrateurs actionnaires (leur nombre est fixé par les statuts de la société).

Les administrateurs élus par les salariés ne sont pas pris en compte pour la détermination du nombre des administrateurs liés à la société par un contrat de travail.

18 membres :

- 5 représentants de l'Etat ;

- 6 personnalités qualifiées en raison soit de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit de leur connaissance du transport aérien, soit de leur qualité de représentant des usagers ;

- 1 représentant des salariés actionnaires ;

- 6 représentants des salariés.

En outre, siègent avec voix consultative :

- 3 censeurs, nommés pour 5 ans ;

- le directeur général de l'aviation civile (en qualité de commissaire du gouvernement) ;

- le directeur des transports aériens (en qualité de commissaire du gouvernement adjoint).

Représentation des salariés

Leur nombre ne peut être supérieur à 4 ou, dans les sociétés cotées, à 5, ni excéder le tiers du nombre des autres administrateurs.

Lorsqu'il y en a plus de 2, les ingénieurs, cadres et assimilés ont un siège au moins (vote selon 2 collèges).

Ils doivent avoir un contrat de travail avec la société depuis au moins 2 ans, mais aucune condition d'ancienneté n'est exigée quand la société est constituée depuis moins de 2 ans.

Mandat incompatible avec un mandat de délégué syndical.

6 représentants des salariés sur 18 membres.

Durée du mandat

Déterminée par les statuts.

Ne peut excéder 6 ans en cas de nomination par les assemblées générales ou 3 ans en cas de nomination dans les statuts.

Renouvelable sans limite sauf stipulation contraire des statuts.

5 ans

Nomination des membres

Par l'assemblée générale ordinaire.

Les premiers administrateurs sont nommés dans les statuts.

Les 5 représentants de l'Etat : nommés par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile, dont :

- 1 sur proposition du Premier ministre ;

- 2 sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- 1 sur proposition du ministre chargé de l'économie ;

- 1 sur proposition du ministre chargé du budget.

Les 6 personnalités qualifiées : nommées par décret.

Le représentant des salariés actionnaires : désigné parmi ceux-ci par l'assemblée générale sur proposition d'une section de l'assemblée générale composée de ces seuls actionnaires.

Les 6 représentants des salariés : élus par les salariés d'Air France et de ses filiales dans le cadre de 3 collèges électoraux à raison de :

- 1 élu par le personnel navigant technique ;

- 1 élu par le personnel navigant commercial ;

- 4 élus, dont 1 représentant des cadres, par les autres salariés.

Parmi les 3 censeurs :

- 2 sont nommés par décret, l'un sur proposition du ministre chargé de la défense, l'autre sur celle du ministre chargé du tourisme ;

- le 3 ème est nommé par l'assemblée générale ordinaire.

Nomination du Président-directeur général

Par le conseil d'administration.

Par décret, sur proposition du conseil d'administration.

Révocation :

des membres actionnaires

du PDG

des représentants des salariés

A tout moment, par l'assemblée générale ordinaire

A tout moment, par le conseil d'administration

Rupture du contrat de travail, ou faute dans l'exercice du mandat, par décision du président du tribunal de grande instance rendue en la forme des référés à la demande de la majorité des membres du conseil.

Les membres du conseil doivent être remplacés lorsqu'ils ont perdu la qualité en raison de laquelle ils ont été nommés, ou qu'ils ne remplissent plus les conditions d'éligibilité.

Les membres nommés par décret peuvent être révoqués par décret.

Le PDG peut être révoqué par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile.

L'article 4 de la loi du 24 juillet 1983 prévoit que les conseils d'administration des sociétés énumérées dans son annexe II, dont Air France, comprennent 9 à 18 membres. Il dispose également que les conseils d'administration concernés comprennent des représentants des salariés dont le nombre peut être fixé par la loi ou en l'absence de disposition législative par décret. Il est précisé que ce décret pourra si les spécificités de l'entreprise le justifie organiser la représentation de catégorie particulière de salariés au moyen de collèges électoraux distincts.

En application de ces dispositions, l'article R.342-1 du code de l'aviation civile, issu du décret n° 97-755 du 21 août 1997, prévoit un conseil d'administration de 18 membres répartis en quatre catégories comme indiqué ci-après.

COMPOSITION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE

Cinq représentants de l'Etat , nommés par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile, dont :

- un sur proposition du Premier ministre ;

- deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- un sur proposition du ministre chargé de l'économie ;

- un sur proposition du ministre chargé du budget ;

six personnalités qualifiées , nommées par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien, soit en raison de leur qualité de représentant des usagers ;

un représentant des salariés actionnaires désigné, parmi ceux-ci, par l'assemblée générale sur proposition d'une section de l'assemblée générale composée de ces seuls actionnaires. Aux termes des statuts d'Air France, il peut être procédé, en vue de la nomination de ce représentant, à la désignation des candidats par une consultation écrite des salariés actionnaires. Les trois salariés actionnaires ayant recueilli le plus grand nombre de voix à l'issue de cette consultation sont seuls autorisés à présenter leur candidature à la section de l'assemblée générale ;

six représentants des salariés , élus par les salariés d'Air France et de ses filiales, dans le cadre de trois collèges électoraux distincts, à raison de :

- un élu par le personnel navigant technique ;

- un élu par le personnel navigant commercial ;

- quatre élus, dont un représentant des cadres, par les autres salariés 3( * ) .

2. Les dispositions du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale

La rédaction proposée par cet article prévoit une augmentation du nombre des membres du conseil d'administration, qui passe de 18 à 21 :


" Art. L.342-3. - Par dérogation à l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public, le conseil d'administration de la société Air France compte ving-et-un membres ".

L'augmentation du nombre d'administrateur est destinée, selon l'exposé des motifs du projet de loi, à permettre l'arrivée au sein du Conseil d'administration de représentants d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés et d'accroître la représentation des salariés actionnaires afin de tenir compte de la nouvelle structure de son actionnariat résultant de l'ouverture du capital d'Air France.

L'ouverture du capital d'Air France a, en effet, modifié l'équilibre de son actionnariat. Alors que l'Etat détenait début 1998 94,5 % du capital d'Air France, il n'en détient au 1 er janvier 2000 qu'environ 57 %, les salariés en détenant 11 % et les autres investisseurs privés 32 %. Cette évolution imposait donc une modification de l'équilibre du Conseil d'administration.

Le maintien à 18 du nombre d'administrateurs de la société Air France permettait d'attribuer deux postes d'administrateurs aux nouveaux actionnaires de la société (personnels navigants techniques dans le cadre de l'échange salaire contre actions et investisseurs privés et institutionnels), mais supposait la diminution du nombre de personnalités qualifiées.

Mais le nombre ainsi obtenu d'administrateurs représentant les actionnaires autres que l'Etat ne refléterait guère la nouvelle structure de l'actionnariat née de l'ouverture du capital d'Air France et donnerait un poids très important aux salariés, qui détiendraient au total 8 sièges d'administrateurs (un nouvel administrateur représentant les personnels navigants techniques venant s'ajouter aux 6 administrateurs élus par l'ensemble des salariés ainsi qu'à l'administrateur représentant l'ensemble des salariés actionnaires), contre un siège pour les actionnaires autres que l'Etat et les salariés : or, les actionnaires " privés " représentent désormais plus de 30 % du capital contre environ 11 % pour les salariés actionnaires.

En outre, le nombre de voix délibératives que détiendrait l'Etat dans ces conditions (administrateurs représentant l'Etat et personnalités qualifiées) deviendrait identique à celui des autres administrateurs. L'Etat ne détiendrait donc la majorité absolue des voix que dans la mesure où celle du Président est prépondérante. Ce choix a cependant été écarté par le gouvernement, qui souhaitait que l'Etat puisse disposer d'une majorité plus large.

Outre l'augmentation du nombre d'administrateur , le présent article tend également à inscrire dans la loi les différentes catégories d'administrateurs auparavant prévues par décret . Ainsi, le texte proposé prévoit : " indépendamment des représentants de l'Etat, des salariés, des salariés actionnaires ainsi que des actionnaires autres que l'Etat et les salariés, le conseil peut comprendre des personnalités choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou économique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien " .

Par rapport à l'article R.342-1 du code, cette rédaction introduit au sein du conseil d'administration des actionnaires autres que l'Etat et les salariés .

On peut, en outre, observer parmi les critères présidant au choix des personnalités qualifiées, la suppression de la référence à la compétence technologique au profit d'une connaissance économique . Cette modification serait motivée par la volonté de renforcer le poids de l'analyse économique dans les choix stratégiques d'une société qui évolue dans un marché de plus en plus concurrentiel. Il faut également relever la suppression de la référence aux personnalités choisies " en raison de leur qualité de représentant des usagers ".

La répartition des sièges entre les différentes catégories d'administrateur n'est pas précisée dans la rédaction proposée qui, de ce fait, laisse au décret le soin de préciser la composition exacte du conseil d'administration.

Le Gouvernement a cependant tenu à préciser à votre rapporteur ce que devrait être la structure du nouveau conseil d'administration si le texte était adopté.


COMPOSITION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE

Composition actuelle

Composition envisagée

Cinq représentants de l'Etat , nommés par décret, dont :

- un sur proposition du Premier ministre ;

- deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- un sur proposition du ministre chargé de l'économie

- un sur proposition du ministre chargé du budget ;

Six représentants de l'Etat , nommés par décret, dont :

- un sur proposition du Premier ministre ;

- deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

- un sur proposition du ministre chargé de l'économie

- un sur proposition du ministre chargé du budget ;

- un sur proposition du ministre chargé du tourisme.

Six personnalités qualifiées , nommées par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile.

Cinq personnalités qualifiées , nommées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé de l'économie ;

 

Deux représentants d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés, nommés par l'assemblée générale ;

Un représentant des salariés actionnaires ;

Deux représentants des salariés actionnaires ;

Six représentants des salariés élus dont :

- un élu par le personnel navigant technique ;

- un élu par le personnel navigant commercial ;

- quatre élus, dont un représentant des cadres, par les autres salariés

Six représentants des salariés élus dont :

- un représentant du personnel navigant technique ;

- un représentant du personnel navigant commercial ;

- quatre représentants du personnel au sol, dont un cadre

Si ce projet était confirmé, la composition du conseil d'administration ne serait en conséquence modifiée qu'à la marge . La réforme permettrait , en effet, outre les modifications précitées, d'introduire deux administrateurs représentant les investisseurs privés autres que les salariés, d'ajouter un administrateur -représentant les salariés actionnaires et un représentant de l'Etat, en l'occurrence un représentant du ministre du tourisme- et de réduire de 6 à 5 le nombre des personnes qualifiées nommés par L'Etat.

En ce qui concerne le mode de désignation des salariés actionnaires
, le présent article précise, en outre, que la " représentation des salariés actionnaires peut se faire par catégories. Elle peut être subordonnée à la détention par l'ensemble des salariés actionnaires ou par chaque catégorie d'une part minimale du capital social " .

Sur le fondement de ces dispositions, le Gouvernement envisagerait, d'après les informations communiquées à votre rapporteur, d'organiser un premier tour d'élection au sein de deux sections de l'assemblée générale composées respectivement du personnel navigant technique actionnaire et des autres salariés actionnaires, les candidats détenant le plus grand nombre de voix au sein de chaque section étant proposés à l'assemblée générale à laquelle il reviendra de désigner les deux représentants.

La représentation des salariés actionnaires devrait, en outre, être subordonnée à la détention par chaque catégorie d'au moins 2 % du capital social de la société. Si elle était confirmée, cette disposition devrait permettre la présence au sein du conseil d'administration d'un représentant des pilotes et d'un représentant des autres salariés, ces catégories détenant respectivement 7 % et 6 % du capital selon les dernières estimations.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

3. Position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


1 Association des compagnies européennes.

2 Tonnes kilomètres transportées totales = tonnes kilomètres transportées fret + 0,09 passagers kilomètres transportés (1 passager = 0,09 t) + tonnes kilomètres transportées courrier

3 Assistent au conseil d'administration, avec voix consultative, deux censeurs nommés par décret respectivement sur le rapport du ministre chargé du tourisme et sur le rapport du ministre chargé de la défense.



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