SENAT

IV. DES INCERTITUDES PERSISTANTES

A. L'ABSENCE DE MESURES SIGNIFICATIVES EN FAVEUR DES BÉNÉFICIAIRES DE LA RETRAITE DU COMBATTANT

1. L'absence de revalorisation du point d'indice de la retraite du combattant

La loi de finances pour 2004, en l'absence de prévision de revalorisation des rémunérations publiques en 2004, prenait en compte le seul recalage de la valeur du point de pension militaire au 1 er janvier 2004. Dès lors, l'incidence financière du rapport constant sur les crédits alloués au financement de la retraite du combattant a été de 562.000 euros en 2004.

De même, en l'absence de prévision de revalorisation des rémunérations publiques en 2005, le présent projet de loi de finances prend en compte le seul recalage de la valeur du point de pension militaire au 1 er janvier 2005. L'incidence financière du rapport constant sur les crédits alloués au financement de la retraite du combattant devrait être de 597.000 euros en 2005.

Votre rapporteur spécial ne peut que regretter l'absence de revalorisation du point d'indice de la retraite du combattant cette année encore.

2. La question de l'âge d'attribution de la retraite du combattant

S'agissant de l'anticipation de l'âge de versement de la retraite du combattant , votre rapporteur spécial tient à rappeler que la modicité de cette allocation fait que cette mesure n'aurait véritablement de portée que pour les personnes disposant de faibles ressources, et qu'une telle disposition constitue en réalité une mesure de solidarité significative et fondée.

Votre rapporteur spécial a toujours considéré que cet abaissement pouvait se faire par étapes, parallèlement à l'extinction programmée du fonds de solidarité. Toutefois, il tient à souligner que cette solution risque bientôt de perdre de son intérêt dans la mesure où près de la moitié des anciens combattants potentiellement concernés a d'ores et déjà atteint l'âge de 65 ans.

Evaluation de l'effectif global concerné par une éventuelle mesure de généralisation du versement de la retraite du combattant à 60 ans

Age en 2004

Année de naissance

Contingent

Effectif du contingent

Effectif actuel

63 ans

1942

61/2

42.000

33.264

64 ans

1941

31/1

55.247

42.871

 
 
 

Total : 97.247

Total : 76.495

Source : ministère délégué aux anciens combattants

Cette évaluation est faite au 1 er janvier 2005 et concerne les anciens combattants qui auront de 60 à 64 ans en 2005 9 ( * ) .

L'article 128 de la loi de finances pour 2002 a prévu l'attribution à 60 ans de la retraite du combattant aux bénéficiaires d'une pension militaire d'invalidité au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, mesure évaluée à 12,2 millions d'euros pour 29.500 anciens combattants d'AFN pensionnés. En 2002, 6.236 retraites du combattant avaient été délivrées en application de cet article tandis que 2.169 retraites ont été accordées à ce titre en 2003.

L'évaluation du coût d'une mesure de généralisation du versement de la retraite du combattant à 60 ans, faite au 1 er janvier 2005 et concernant les anciens combattants qui auront de 60 à 64 ans en 2005, sur la base d'une retraite à 33 points d'indice PMI, d'une valeur du point PMI estimée au 1 er janvier 2005 à 12,89 euros, serait de 33 millions d'euros en 2005 .

Outre l'abaissement progressif de l'âge de versement de la retraite du combattant, votre rapporteur spécial est favorable à une augmentation de l'indice de pension. L'article L. 256 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dispose en effet que le montant de la retraite est déterminé par application de l'indice de pension 33 tel qu'il est défini à l'article L. 8 bis du même code.

Dès lors, une solution alternative à l'abaissement de l'âge de versement de la retraite pourrait être un passage de l'indice de pension de 33 à l'indice 48 pour le calcul du taux de la retraite versée. Cette augmentation de l'indice pourrait également se faire par étapes : plus 5 points par an en trois ans. Le coût total estimé de cette augmentation est de l'ordre de 230 millions d'euros.

B. L'ABSENCE DE REVALORISATION DU POINT D'INDICE DU PLAFOND MAJORABLE DE LA RENTE MUTUALISTE DEPUIS DEUX ANS : UNE INERTIE REGRETTABLE

1. Le régime de la rente mutualiste du combattant

La retraite mutualiste du combattant a été créée par la loi du 4 août 1923 qui a posé pour la première fois le principe du versement d'une majoration financée par l'Etat en plus de la rente normalement constituée par les anciens combattants et leurs ayants cause du conflit 1914-1918.

Après la seconde guerre mondiale, plusieurs dispositions législatives ont permis successivement aux anciens combattants de 1939/1945, des T.O.E., d'Indochine, de Corée, d'AFN, puis de nouveaux types de conflits, plus récents, définis par la loi n° 93-7 du 4 janvier 1993, de bénéficier des mêmes dispositions que leurs aînés pour se constituer une retraite mutualiste.

Le décret n° 95-410 du 18 avril 1995 a étendu le bénéfice de la retraite mutualiste du combattant à tous les titulaires du titre de reconnaissance de la Nation. L'article L. 222.2 du nouveau code de la mutualité a maintenu en vigueur ce dispositif spécifique en faveur des anciens combattants et victimes de guerre. La retraite mutualiste du combattant, devenue rente mutualiste du combattant, bénéficie par ailleurs du régime de majoration légale institué par la loi du 4 mai 1948.

La rente mutualiste des anciens combattants, majorée par l'Etat, est une rente viagère. Elle ne peut être considérée comme un titre de réparation, s'agissant d'une souscription individuelle à titre volontaire, et entraînant une rémunération. Ainsi est créé un lien de solidarité entre l'effort personnel d'épargne des anciens combattants et la reconnaissance de la Nation, par l'intermédiaire du concours financier de l'Etat .

Tous les contribuables anciens combattants peuvent, chaque année, déduire de leur revenu imposable, dans la limite d'un plafond, les versements effectués en vue de la constitution d'une rente donnant lieu à majoration de l'Etat. Lors du versement de la rente, les intéressés bénéficient en plus de la majoration légale attachée à toute rente viagère, d'une majoration spéciale de l'Etat égale, en règle générale, à 25 % du montant de la rente résultant des versements personnels. Une majoration supplémentaire est accordée par l'Etat en fonction de l'âge du demandeur.

Le total formé par la rente et la majoration spéciale de l'Etat est limité à un plafond, dit « plafond majorable ». La rente mutualiste se cumule avec toutes les autres pensions et retraites. Elle est exonérée d'impôt pour sa part inférieure au plafond légal. Au-delà de ce plafond, le régime fiscal est celui de l'assurance-vie.

2. Le mécanisme du plafond majorable de la rente mutualiste

D'abord fixé annuellement en valeur absolue, le plafond majorable est déterminé depuis 1998 par référence à un indice de point de pension militaire d'invalidité.

Après avoir été fixé à 95 points d'indice en 1998, le plafond donnant lieu à majoration par l'Etat des rentes mutualistes souscrites par les anciens combattants a été successivement fixé à 100 points en 1999, 105 points en 2000, 110 points en 2001 et 115 points en 2002. Enfin, la loi de finances initiale pour 2003 l'a augmenté de 7,5 points, le portant ainsi à 122,5 points d'indice (1.570 euros en 2003 et 1.579 euros en 2004).

Votre rapporteur spécial regrette le peu d'homogénéité, d'une année sur l'autre, s'agissant de l'augmentation du plafond majorable de la rente mutualiste. Même si les bénéficiaires de cette rente mutualiste restent minoritaires au sein du monde combattant, il conviendrait de prévoir un calendrier plus régulier .

C. L'INDEMNISATION DES INCORPORÉS DE FORCE DANS LES FORMATIONS PARAMILITAIRES ALLEMANDES (RAD - KHD)

Les engagements pris concernant l'indemnisation des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes (RAD-KHD) 10 ( * ) , par alignement sur la situation des incorporés de force dans l'armée allemande, n'ont toujours pas été tenus. Le recensement a pourtant été effectué depuis plus de deux ans (31 mars 1999), la quasi totalité des 10.000 demandes reçues, examinées, et la fondation « Entente franco-allemande » est prête à financer en grande partie cette indemnisation.

A ce jour, 6.000 dossiers de demandes concernent des personnes remplissant les conditions requises et 4.000 nécessitent une instruction, les justificatifs pour bénéficier d'une indemnisation n'ayant pas été produits. L'effectif des bénéficiaires potentiels peut être estimé à 8.500.

En 1998, le gouvernement, après avoir examiné attentivement ce dossier, a approuvé la décision prise le 25 juin 1998 par le comité directeur de la fondation Entente franco-allemande d'élargir à cette dernière catégorie d'incorporés de force le droit à l'allocation unique qu'elle est chargée de distribuer. C'est en effet dans le cadre de l'accord franco-allemand du 31 mars 1981 et des fonds qui ont été réservés pour l'application de cet accord que la solution doit être trouvée. Le conseil d'administration de l'Entente conditionnait le versement lui incombant à la participation de l'Etat mais celui-ci ne s'estimait pas tenu par cet engagement, l'accord du 31 mai 1981 n'ayant pas prévu une contribution de la France à une indemnisation qui relève de la responsabilité allemande.

Une réunion tenue à Strasbourg, sous la présidence du ministre délégué aux anciens combattants, le 12 mai 2003 en présence de la fondation et des parlementaires alsaciens et lorrains, a permis de relancer la réflexion sur un assouplissement des conditions de versement des indemnisations aux catégories d'incorporés de force qui n'en ont pas encore bénéficié (RAD-KHD) . Il s'agit d'un sujet délicat qui touche aux statuts de la fondation et pour lequel la concertation n'a pas encore abouti.

Une réflexion au plan juridique est actuellement en cours pour permettre à ce dossier de progresser rapidement.

Votre rapporteur spécial souhaiterait que cette question soit résolue dans les plus brefs délais.

L'estimation du coût d'une indemnisation des RAD / KHD

L'indemnisation consisterait dans le versement d'une indemnité équivalente à la moitié de celle versée aux patriotes résistants à l'occupation des départements du Haut-Rhin et de la Moselle, soit 693,64 euros.

Au total, en retenant l'hypothèse de 8.500 bénéficiaires potentiels, le coût de cette indemnisation s'élève donc à 5,9 millions d'euros.

* 9 L'effectif concerné est évalué à partir des données relatives aux contingents ayant servi en Afrique du Nord, en prenant en compte les classes d'âge entre 60 et 64 ans en 2004. Le contingent 61/2 est le dernier ayant servi en Algérie. En 2005, plus aucun effectif n'aura moins de 63 ans.

* 10 Reichsarbeitsdienst - Kriegshilfädienst.