M. Paul GIROD

III. LES DÉGRÈVEMENTS ET REMBOURSEMENTS D'IMPÔTS27 ( * )

Les remboursements et dégrèvements 28 ( * ) sont inscrits aux chapitres 15-01 et 15-02 du budget des charges communes. Ils ont pour objet de venir en déduction des recettes fiscales et présentent la particularité de figurer à la fois en dépenses et en recettes du budget général.

Ils ont quatre origines possibles :

- les remboursements d'excédents de versement , comprenant notamment les restitutions d'impôt sur les sociétés et les remboursements de crédits de TVA ;

- les dégrèvements liés à la situation du contribuable : restitutions au titre de la prime pour l'emploi, dégrèvements ordonnancés au titre des impôts locaux résultant de dispositions législatives qui prennent en compte, d'une part, les situations personnelles des redevables, notamment pour la taxe d'habitation des personnes modestes et pour les taxes foncières, et, d'autre part, la valeur ajoutée des entreprises pour le plafonnement de leur cotisation de taxe professionnelle.

- les régularisations d'anomalies , dont la source peut provenir d'erreurs de déclaration de la part des contribuables, notamment en matière d'impôt sur le revenu, ou d'une mauvaise prise en compte des éléments déclarés et des situations personnelles de la part de l'administration ;

- les admissions en non-valeur et autres régularisations comptables : la procédure des admissions en non-valeur, au titre des impôts d'Etat comme des impôts locaux, permet de lever la responsabilité des comptables sur des opérations, souvent anciennes, considérées comme définitivement irrécouvrables ;

A. RÉPARTITION DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS ENTRE ETAT ET COLLECTIVITÉS LOCALES

Les remboursements et dégrèvements concernant les contribuables locaux sont constitués pour l'essentiel par des dégrèvements législatifs tandis que ceux concernant les impositions d'Etat sont très largement constitués par des remboursements. Les remboursements et dégrèvements concernant les collectivités locales restent relativement stables depuis 2000. Ceux concernant l'Etat enregistrent une croissance plus forte.

Entre 2004 (évaluation révisée) et 2005, les dégrèvements et remboursements d'impôts progresseraient de 2,6 %.

Remboursements et dégrèvements répartis entre Etat et collectivités locales

(en millions d'euros)

 

2001

2002

2003

2004

PLF 2005

Collectivités locales

10.106

9.693

10.159

10.355

11.111

Etat

50.665

51.679

52.404

56.256

57.214

Total

60.771

61.372

62.563

66.611

68.325

Les remboursements et dégrèvements concernant l'Etat sont 5 fois plus importants que ceux concernant les collectivités locales, mais cette comparaison est sans grande signification économique. Les dégrèvements législatifs d'impôts locaux constituent aux yeux de votre rapporteur spécial de véritables dépenses de l'Etat figurant à juste titre dans le jaune « effort financier en faveur des collectivités locales » 29 ( * ) alors que les remboursements d'impôts d'Etat sont évalués dans le cadre du bleu « voies et moyens » avec les recettes fiscales de l'Etat dont ils sont un élément constitutif.

B. LA RELATIVE STABILITÉ DES DÉGRÈVEMENTS ET REMBOURSEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX

Les dégrèvements concernant les contribuables locaux sont inscrits aux paragraphes 16, 17, 18 et 32 du chapitre 15-01 des charges communes à hauteur de 11,11 milliards d'euros pour 2005. Votre rapporteur se félicite que depuis 1998 les dégrèvements d'impôts locaux soient clairement identifiés au sein du chapitre 15-01 ; il regrette cependant, comme l'année passée, que les admissions en non valeur du § 32 ne soient pas ventilées entre les différents impôts.

Evolution des dégrèvements d'impôts locaux

(en millions d'euros)

Si l'on fait abstraction de l'incidence de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation qui prit provisoirement en 2000 la forme de dégrèvements, la relative stabilité des dégrèvements d'impôts locaux sur la période récente est due à la baisse des dégrèvements de taxe professionnelle. Le principal dégrèvement de taxe professionnelle correspond au plafonnement des cotisations des entreprises en fonction de la valeur ajoutée ; il représente environ 90 % des ordonnancements de la direction générale de impôts. Il subit les effets de deux évolutions de sens contraire. D'abord, la suppression progressive de la part des salaires dans les bases d'imposition de la taxe professionnelle réduit le montant des cotisations. Mais, en sens inverse, le ralentissement économique fait croître le rapport entre les bases imposables (notamment celles des entreprises à forte intensité capitalistique utilisant beaucoup d'outillages) et la valeur ajoutée et accroît en conséquence la fréquence de l'éligibilité au plafonnement. La part de l'Etat dans les recettes des collectivités locales liées à la taxe professionnelle ne cesse pas pour autant de croître : la légère baisse des dégrèvements est compensée par une forte augmentation des compensations d'exonérations liées à la suppression progressive de la part des salaires dans les bases d'imposition.

S'agissant des dégrèvements de taxe d'habitation, leur montant est dû à la réforme de 2000 qui a modifié sensiblement les règles de plafonnement des cotisations de taxe d'habitation en fonction du revenu des contribuables au titre de leurs résidences principales. Notre collègue Yves Fréville a, de ce fait, estimé utile de développer son analyse sur les dégrèvements de taxe d'habitation dans un rapport d'information 30 ( * ) .

C. RÉPARTITION DES REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS DE L'ETAT ENTRE IMPOSITIONS DIRECTES ET INDIRECTES

Le chapitre 15-01 regroupe les remboursements et dégrèvements d'impôts concernant les impôts directs : impôt sur les sociétés et impôt sur le revenu, et les restitutions au titre de la prime pour l'emploi.

Les crédits au titre de la prime pour l'emploi (PPE) sont suivis dans le paragraphe 42 du chapitre 15-01 et sont évalués pour 2005 à 1,989 milliard d'euros. Ils ne correspondent pas au coût global de la prime pour l'emploi. Selon que le contribuable est imposable ou non, la prime pour l'emploi prend la forme d'une réduction de la cotisation d'impôt (en matière budgétaire, il s'agit alors d'une moindre recette, décrite dans le fascicule « voies et moyens ») ou d'une restitution d'impôt, qui correspond juridiquement à un dégrèvement. Les crédits liés à la prime pour l'emploi figurant au budget des charges communes sont donc les dégrèvements.

La prime pour l'emploi a été attribuée en 2003, au titre des revenus 2002, à 8,4 millions de foyers fiscaux pour un montant de 2.221 millions d'euros, dont 534 millions d'euros imputés et 1.687 millions d'euros restitués.

Répartition des foyers bénéficiaires de la prime pour l'emploi par déciles de revenu fiscal de référence 31 ( * )

(coût de la prime pour l'emploi en millions d'euros)

Montant du revenu fiscal
de référence

Nombre de foyers bénéficiaires

Montant de la PPE 32 ( * )

Moins de 4.916 euros

823.000

201

De 4.916 à 6.507 euros

823.000

237

De 6.507 à 7.675 euros

823.000

260

De 7.675 à 8.590 euros

823.000

269

De 8.590 à 9.506 euros

823.000

226

De 9.506 à 10.515 euros

823.000

161

De 10.515 à 12.772 euros

823.000

151

De 12.772 à 16.078 euros

823.000

194

De 16.078 à 20236euros

823.000

242

Plus de 20 236 euros

823.000

220

Total

8.230.000

2.160

Par ailleurs, les dégrèvements au titre de la redevance audiovisuelle qui figuraient auparavant sur le compte d'affectation spéciale 902-15 (compte d'emploi de la redevance audiovisuelle) sont inscrits sur le budget des charges communes pour 440 millions d'euros en 2005 en raison de l'adossement de cette redevance sur la taxe d'habitation.

Le chapitre 15-02 concerne les remboursements sur produits indirects.

Pour 2005, il a été estimé que les remboursements de crédits de TVA progresseraient de 7 % par rapport à 2004 (révisé). Ils passeraient en 2005 à 36.678 millions d'euros contre 35.480 millions d'euros prévus en 2004.

* 27 Ceux-ci figurent au sein de l'agrégat 32 « dépenses en atténuation de recettes » qui concerne aussi, pour des montants plus limités (270 millions d'euros pour 2003) les frais de poursuite et de contentieux des administrations fiscales et les décharges de responsabilité et remise de débets des comptables publics non détaillés dans la présente note.

* 28 Les remboursements au profit des contribuables correspondent à un débit au titre d'un impôt ou d'une taxe déjà versée par la contribuable. Les dégrèvements et les admissions en non-valeur se rattachent à des sommes faisant partie intégrante de la cotisation d'impôt inscrite sur les rôles d'imposition mais qui ne donneront pas lieu à recouvrement. L'enregistrement comptable d'un dégrèvement se matérialise aussi par la constatation d'une recette d'ordre d'égal montant.

* 29 C'est ainsi qu'il aurait été imaginable dans la perspective de la LOLF d'intégrer ses dégrèvements pour impôts locaux dans la mission « relations avec les collectivités territoriales ».

* 30 Rapport d'information n° 71 (2003-2004).

* 31 Ce chiffrage est réalisé à partir d'un échantillon de 500.000 déclarations d'impôt sur le revenu 2002, représentatif de l'ensemble des déclarations déposées en métropole et taxées jusqu'à la 4 ème émission.

* 32 Montant imputé ou restitué.