M. Serge DASSAULT

IV. L'OPTIMISATION DU MARCHÉ DU TRAVAIL

A. L'ACTION SUR L'OFFRE : UNE AMÉLIORATION QUALITATIVE ET QUANTITATIVE

1. L'amélioration qualitative

a) La formation en alternance
(1) La relance de l'apprentissage par le plan de cohésion sociale

La réforme de l'apprentissage portée par le plan de cohésion sociale repose sur un renforcement de l'attractivité de l'apprentissage pour les jeunes et les employeurs, ainsi qu'une mobilisation de ressources supplémentaires au profit de l'appareil de formation. L'objectif du plan est de passer de 350.000 à 500.000 apprentis par an de 2004 à 2009 . Cette relance paraît particulièrement opportune à votre rapporteur spécial compte tenu de l'importance du nombre d'emplois non pourvus, qui, de l'ordre de 300.000, concernent essentiellement les métiers.

L'apprentissage est financé par :

- les régions, compétentes pour la construction et le financement des centres de formation d'apprentis et pour octroyer une prime aux employeurs, de manière à encourager ce type de formation en alternance ;

- les entreprises, qui acquittent la taxe d'apprentissage au taux de 0,5 % de la masse salariale (sauf lorsque celle-ci est inférieure à six fois le SMIC et que l'entreprise emploie un apprenti) ;

- l'Etat, enfin, qui compense aux régions les dépenses engagées au titre de l'apprentissage au moyen d'une dotation générale de décentralisation (DGD), et finance les exonérations de charges sociales dont bénéficient les entreprises et les apprentis.

L'augmentation des moyens dévolus à l'apprentissage en 2005 ressort à 600 millions d'euros , par la combinaison des mesures suivantes :


• une augmentation de 0,06 point de la taxe d'apprentissage (prévue par l'article 20 du projet de loi de finances pour 2005), qui engendre un accroissement de son produit de 197 millions d'euros ;


• l'affectation de ce surplus de recettes aux régions, le montant des crédits décentralisés à destination de l'apprentissage étant réduits à due concurrence (cette mesure neutralise donc la précédente pour ce qui est des moyens dévolus à l'apprentissage) ;


• la suppression de diverses exonérations peu justifiées de taxe d'apprentissage, rehaussant encore le produit de la taxe d'apprentissage de 123 millions d'euros en 2005 (prévue à l'article 14 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale) ;


• enfin, la création d'un crédit d'impôt de 1.600 euros par apprenti (prévu à l'article 15 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale), procurant un gain évalué à 472 millions d'euros pour les entreprises en les incitant puissamment à développer l'apprentissage ; il résulte des mesures qui précèdent un allègement fiscal net de 152 millions d'euros pour les entreprises , qui, toutefois, supporteront par ailleurs une diminution des exonérations de charges sociales au titre des contrats d'apprentissage de plus de 32 millions d'euros (cf. article 75 rattaché).

Pour 2005, le bleu « emploi et travail » prévoit une légère augmentation du nombre d'apprentis, qui progresserait de 354.000 en 2004 à 358.000 en 2005 .

Votre rapporteur spéciale estime que le développement du préapprentissage à partir de quatorze ans constitue une piste méritant d'être étudiée en vue de garantir l'insertion professionnelle de certains jeunes. L'augmentation du nombre de jeunes en apprentissage, grâce aux mesures de développement de préaprentissage, serait probablement plus efficace que le recours ultérieur aux diverses formes de contrat aidé. Si, dans la concertation, une évolution dans le sens du développement du préapprentissage pouvait être entamée, il conviendrait alors de mener une vaste campagne d'information expliquant aux jeunes et aux parents les avantages de l'apprentissage.

(2) La rationalisation des autres formations en alternance

Conformément à l'accord national interprofessionnel du 5 décembre 2003, la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social a créé un contrat de professionnalisation , exonéré de charges sociales pour les jeunes de moins de 25 ans et les demandeurs d'emploi de plus de 45 ans. Le budget de l'Etat prend en charge la compensation de cette exonération, contribuant ainsi au financement de ce contrat. Le contrat de professionnalisation « jeune » (moins de 26 ans) se substitue au contrat de qualification , au contrat d'adaptation, ainsi qu'au contrat d'orientation, tandis que le contrat de professionnalisation « adulte » (plus de 45 ans) se substitue au contrat de qualification « adulte ».

La loi précitée procède également à la réforme du financement 18 ( * ) de la formation professionnelle, qui bénéficie notamment à l'alternance.

Alors que le bleu « travail » pour 2004 prévoyait 138.000 entrées dans les dispositifs (dont 125.000 pour les jeunes), le bleu « emploi et travail » pour 2005 prévoit 180.000 entrées , dont 160.000 pour les jeunes, les crédits progressant parallèlement de 386 millions d'euros à 472 millions d'euros.

(3) Un esprit rénové

Elément phare du programme présenté à son arrivée par le gouvernement, l'« assurance emploi » est un concept participant du nécessaire changement de perspective concernant la succession dans le temps de la formation et du travail. Il s'agit d'assurer la formation et l'employabilité tout au long de la vie.

La loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social vise ainsi à réduire les inégalités d'accès à la formation tout au long de la vie professionnelle, notamment grâce à la création d'un « droit individuel à la formation » (DIF) , en complément de l'obligation collective de l'entreprise. L'articulation avec la validation de l'expérience (VAE) , qui permet de favoriser la reconnaissance de l'expérience professionnelle acquise par les salariés en vue de l'obtention d'une certification professionnelle, doit être assurée dans le cadre d'un accompagnement individualisé.

b) La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC)

Dans le cadre de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, les moyens dévolus à la GPEC permettent d'appuyer la réflexion des entreprises sur leur gestion prévisionnelle des ressources humaines.

2. L'amélioration quantitative

Il s'agit, pour ces politiques, de restaurer l'offre 19 ( * ) de travail en évitant, pour l'ensemble de la population en âge de travailler, la constitution de « trappes à inactivité », et pour les plus âgés, les incitations à un retrait d'activité anticipé. Cette élévation du taux d'activité s'inscrit dans un processus européen : la « stratégie de Lisbonne ».

a) La stratégie de Lisbonne

Le Conseil européen de Lisbonne, en mars 2000, a assigné à l'Union un objectif ambitieux : faire de l'Union, d'ici à 2010, l'« économie de la connaissance » la plus compétitive et la plus dynamique du monde . Des objectifs chiffrés sont fixés à cette échéance, notamment le relèvement des taux d'emploi :

- taux d'emploi global porté à 70 %, taux d'emploi des travailleurs âgés de 55 ans à 64 ans porté à 50 % , et taux d'emploi des femmes porté à 60 % ;

- 3 % du PIB à consacrer à la recherche.

Les structures de décision et les outils de pilotage pour la mise en oeuvre des objectifs de Lisbonne

Les structures de décision et les outils de pilotage pour la mise en oeuvre des objectifs de Lisbonne sont les suivants :

- depuis 2000, chaque Conseil européen de printemps est consacré à l'examen de la stratégie économique et sociale de l'Union. Ils sont préparés par les travaux des différentes formations des Conseils des ministres de l'Union (Affaires étrangères, ECOFIN, Compétitivité, Emploi, Environnement) ;

- la Commission y apporte sa contribution par son rapport annuel de printemps qui fait le bilan des avancées du processus de Lisbonne et émet des recommandations sur la base des rapports de mise en oeuvre des Grandes Orientations de Politique Economique (GOPE), des lignes directrices pour l'emploi ainsi que de l'avis du Comité économique et social européen ;

- la Commission propose des règlements ou des directives (plus de 70 directives ont été adoptées dans le cadre de la stratégie de Lisbonne), oriente avec le Conseil l'allocation de financements communautaires (comme le Programme Cadre pour la recherche et le développement) ;

- le processus de Lisbonne, qui recouvre de nombreux domaines de compétence des Etats membres (emploi, protection sociale, éducation,...) a largement recours à la méthode ouverte de coordination (MOC). Les MOC correspondent à une mesure régulière des progrès réalisés par les Etats membres sur la voie d'objectifs communs et d'orientations communes. Elles constituent un moyen d'encourager la coopération et d'échanger des bonnes pratiques entre les Etats membres.

Source : site du ministère des affaires étrangères (http://www.diplomatie.gouv.fr)

Les résultats restent en deçà des attentes pour les taux d'emploi : dans l'UE 25, le taux d'emploi global a stagné à 62,9 % en 2003, avec un taux d'emploi des « travailleurs âgés » cantonné à 40,2 %.

Aujourd'hui, la France se trouve dans la moyenne de l'Union européenne pour le taux de l'emploi global et donc en retrait des objectifs de Lisbonne , elle se situe en dessous de la moyenne de l'Union européenne pour le taux d'emploi des « travailleurs âgés », elle-même en retrait des objectifs de Lisbonne, comme le montre le tableau suivant.

Le Conseil européen a initié en mars 2004 un processus de révision à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, qui devrait constituer un temps fort de l'intégra tion des nouveaux Etats membres.

b) La politique française

La politique suivie tend logiquement au renforcement de l'offre globale de travail et à favoriser l'emploi des plus âgés.

(1) La poursuite du renforcement de la prime pour l'emploi (PPE)

En 2003, l'augmentation de la PPE au profit des travailleurs à temps partiel visait à favoriser le retour à l'emploi dans un plus grand nombre de situations.

Pour 2004, une revalorisation de 4,5 % de la PPE hors indexation des seuils d'une part, et la création d'un acompte de prime pour l'emploi pour certains demandeurs d'emploi et titulaires de minima sociaux qui reprennent une activité professionnelle d'autre part, ont représenté un coût fiscal de 200 millions d'euros.

Pour 2005, l'article 3 du projet de loi de finances prévoit simplement de rehausser les limites et les seuils de revenus servant au calcul de la prime pour l'emploi afin de tenir compte de l'évolution des prix et des bas salaires.

Votre rapporteur spécial observe cependant que l'effet de ces mesures sur l'offre d'emploi risque d'être réduit par la perception limitée qu'en peuvent avoir a priori les bénéficiaires potentiels, ceux dont on veut encourager le retour à l'emploi, compte tenu de la complexité du calcul de la PPE et de sa déconnexion du salaire versé. Il ajoute que le retour à l'emploi doit s'accompagner d'une politique d'offre d'emplois dynamique qui, aujourd'hui, est loin d'être assurée.

(2) La revalorisation du SMIC

L' augmentation du SMIC horaire programmée par la loi « Fillon » s'achèvera au 1 er juillet 2005, avec une nouvelle augmentation de plus de 5 %. Au total, en termes réels, l'augmentation du SMIC ressort à 11,4 % sur la période de convergence du SMIC et des garanties mensuelles de rémunération (GMR), du 1 er juillet 2003 au 1 er juillet 2005.

(3) La fin du « SMIC hôtelier »

Dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants, la suppression du « SMIC hôtelier », décidée par la profession et permise par les exonérations de charges mises en place par l'article 10 de la loi du 9 août 2004 relative au soutien à la consommation et à l'investissement, débouche sur une augmentation supplémentaire du salaire brut minimum du secteur de 128 euros par mois, représentant 5,8 % du revenu disponible pour les salariés.

(4) La fermeture progressive des dispositifs de préretraite

Le resserrement des conditions d'accès aux dispositifs de préretraites financés par l'Etat participe du souci de relever le taux d'activité des salariés de plus de 55 ans, qui est particulièrement faible en France.

L'objectif est de recentrer les mesures sur les salariés ayant connu des conditions de travail pénibles, ou situés dans les bassins d'emploi en difficulté.

B. L'ACTION SUR LA DEMANDE : LA BAISSE DU COÛT DU TRAVAIL DANS LE SECTEUR MARCHAND

1. Les allègements de charge sur les bas salaires

a) La problématique
(1) L'effet sur l'emploi

Le Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC) avait noté dans son premier rapport, paru en février 2001, l'intérêt de concentrer les allègements de charges sur les bas salaires .

L'intérêt de concentrer les allègements de charges sur les bas salaires

Pour un montant budgétaire donné, une réduction des taux de cotisations sociales patronales produit des effets d'autant plus favorables à l'emploi qu'elle est concentrée dans le bas de la distribution des salaires , cela pour deux raisons principales.

En premier lieu, un effet d'assiette : pour un montant budgétaire donné, la baisse du coût du travail est proportionnellement plus forte lorsqu'elle est ciblée sur les bas salaire s. Toutes choses égales par ailleurs, une baisse générale des cotisations employeurs produit donc toujours moins d'effets sur l'emploi qu'une baisse ciblée dans le bas de la distribution.

En second lieu, l'emploi est plus sensible au coût du travail pour les bas salaires que pour l'ensemble des travailleurs . Une baisse du coût du travail produit des effets d'autant plus favorables sur l'emploi que le travail est substituable au capital et que la demande de biens est sensible aux baisses de prix associées aux réductions des coûts de production. Par ailleurs, les possibilités de substitution entre catégories de main-d'oeuvre doivent être également prises en considération. Les études appliquées qui ont tenté de mesurer la sensibilité de l'emploi au coût du travail concluent à des possibilités de substitution importantes entre travail qualifié et travail moins qualifié.

Ces deux facteurs, indépendants l'un de l'autre, plaident en faveur d'une concentration des allégements de cotisations employeurs dans le bas de la distribution des salaires.

En revanche, en concentrant les allégements sur une zone très étroite de salaire, on introduit un frein aux carrières salariales : le coût du travail progresse plus rapidement que le salaire brut, et ce d'autant plus que la zone de dégressivité est étroite. Cela explique qu'une dégressivité des allégements de cotisations patronales sur une plage allant de 1 à 1,8 fois le  SMIC ait été retenue pour les lois « Aubry ». La loi « Fillon » retient une plage de 1 à 1,7 fois le SMIC. En la matière, il y a un arbitrage à trouver entre coût, efficacité sur l'emploi et dynamiques salariales individuelles .

Source : d'après le rapport du CERC, février 2001

Pour sa part, la DARES a pu montrer en janvier 2000 que le seuil de croissance pour obtenir des créations d'emploi serait passé de 2,3 % dans les années quatre-vingts, à 1,5 % à partir de la seconde moitié des années quatre-vingt-dix , ce qu'elle a, en partie, attribué aux politiques d'allègement de charges.

Ces allègements sont particulièrement favorables aux PME dans la mesure où les salaires y sont généralement moins élevés. D'une façon générale, les plus grands gisements d'emploi se situent aujourd'hui dans les services tels que la restauration ou les « services à la personne », secteurs au sein desquels l'augmentation de la productivité du travail, qui se heurte à des contraintes physiques évidentes, n'évolue pas proportionnellement au SMIC.

M. Pierre Cahuc, dans une contribution au rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) intitulé « Productivité et emploi dans le tertiaire » 20 ( * ) , posant la question du coût du travail, constate que « lorsqu'une personne ne dispose pas des capacités requises pour occuper un emploi rémunéré au moins au salaire minimum, deux stratégies sont possibles pour l'intégrer dans l'emploi : diminuer le coût du travail ou bien améliorer son efficacité en la formant ».

Parvenu au terme de sa réflexion, il avance qu' « on ne doit pas attendre des dépenses publiques de formation et d'éducation non ciblées sur des populations très particulières (en l'occurrence surtout des populations jeunes défavorisées) des conséquences miraculeuses. De telles dépenses ont des rendements très limités, vraisemblablement très inférieurs à ceux d'abaissements des charges sociales pour la majorité des travailleurs faiblement qualifiés dans la situation actuelle du marché du travail français. Pour intégrer ces personnes dans l'emploi, la solution consiste sans doute à concentrer les baisses de charges sur les bas salaires, éventuellement en ciblant les baisses sur une fourchette plus étroite que la fourchette actuelle, qui s'étend jusqu'à 1,7 SMIC ».

(2) Une entrave à la hausse des bas salaires ?

Ainsi que le rapport du CERC ( supra ) en formule l'avertissement, les mesures de resserrement doivent cependant faire l'objet d'un dosage circonspect, car les dynamiques salariales sortiraient pénalisées d'une trop forte concentration des allègements sur le bas de l'échelle salariale.

En effet, les entreprises peuvent chercher à optimiser le rendement de ces mesures en embauchant de nombreux travailleurs à bas salaires et en freinant leur progression salariale pour qu'ils restent sous le seuil de 1,2 ou 1,3 fois le SMIC. Les mesures d'allègement ciblées sur les bas salaires créeraient donc des « trappes à bas salaire ».

Une étude de MM. Audenis, Laïb et Roux 21 ( * ) appréhende cette question, en mesurant la « décote » de salaire entraînée par le fait d'avoir appartenu l'année précédente à la tranche des bas salaires. Or cette « décote » ne s'accentue pas à partir de 1993, date de mise en place des premières mesures d'allègement.

L'effet de trappe ne serait donc pas prépondérant . C'est qu'en tout état de cause, les perspectives salariales des « bas salaires » ne sont jamais favorables. A cet égard, la hausse programmée du SMIC par la loi « Fillon » paraît appréciable ( infra ).

b) La politique suivie
(1) Une politique bien acclimatée

La politique d'allègement des charges sociales pesant sur les emplois peu qualifiés a connu une montée en charge progressive, notamment à partir de la mise en place, en 1993 et en 1995, de la ristourne dégressive sur les bas salaires (jusqu'à 1,3 fois le SMIC), dite « ristourne Juppé ».

Cette politique a été poursuivie avec la diminution du temps de travail organisée par les lois « Aubry » de 1998 (allègement « Aubry I »)  et 2000 (allègement « Aubry II »). Il a ainsi été accordé aux entreprises ayant fixé leur durée collective de travail à 35 heures hebdomadaires (ou 1.600 heures annuelles) une ristourne dégressive jusqu'à 1,8 fois le SMIC, à laquelle s'ajoutait, le cas échéant, une ristourne forfaitaire par salarié pour celles ayant « anticipé » le passage aux 35 heures dans le cadre de la première loi « Aubry ».

(2) L'abandon de la référence à la durée du travail par la loi « Fillon »

La loi « Fillon » a instauré à partir du 1 er juillet 2003 un dispositif absorbant la « ristourne Juppé » et l'allègement « Aubry II », qui doit mener, à compter du 1 er juillet 2005, à un dispositif unifié de réduction de cotisations patronales, dans lequel le montant de la réduction sera une fonction unique de la rémunération horaire.

Cette mesure a été élaborée dans le contexte de la nécessaire « convergence des SMIC » programmée pour le 1 er juillet 2005, et dans le souci de tenir compte d'un double impératif économique : la restauration d'un SMIC horaire unique ne devait pas occasionner de perte pour les salariés déjà passés aux 35 heures, et la revalorisation substantielle du pouvoir d'achat des minima salariaux (+ 6,5 % en moyenne de 2003 à 2005) qu'impliquait cette convergence ne devait pas porter préjudice à la compétitivité des entreprises.

(3) La pleine appréhension du coût des exonérations par le budget du travail

En 2003, le coût de cette unification, de l'ordre du milliard d'euros, avait été sans incidence sur le budget du travail , le FOREC (fonds de financement de la réforme des cotisations de sécurité sociale patronale) assurant la compensation auprès des organismes de sécurité sociale des allègements de charges décidés dans le cadre de la réduction du temps de travail et en faveur des bas salaires.

En revanche, depuis 2004, le coût du dispositif « Fillon » a été pleinement assumé par le budget du travail ( infra ).

(4) Le resserrement des exonérations autour du SMIC pour 2005

En application de l' article 74 rattaché (cf. examen infra ), au 1 er juillet 2005, l'allègement unique sera dégressif jusqu'à 1,6 fois le SMIC, et non pas 1,7  fois le SMIC comme l'avait prévu la loi « Fillon ».

2. La suppression définitive de la part salariale de la taxe professionnelle

Afin de favoriser la compétitivité des entreprises dans un sens favorable à l'emploi, il a été décidé en loi de finances pour 2003 22 ( * ) de mener à son terme la suppression progressive de la part salariale de la taxe professionnelle qu'avait engagée le précédent gouvernement depuis 1999.

3. Une nouvelle aide au profit de l'hôtellerie restauration

Grâce à la mise en oeuvre d'une aide à l'emploi d'un coût estimé à 549,5 millions d'euros pour 2005, les professionnels du secteur ont décidé de supprimer le mécanisme dit de « SMIC hôtelier » en application duquel 260.000 salariés de la branche se trouvaient rémunérés à un montant inférieur de 5,2 % au SMIC de droit commun.

La mesure de l'impact de cette aide présentera un intérêt particulier, à l'heure où il apparaît très nettement que les gisements d'emploi se situent dans les services, où il existe souvent un décalage entre salaire proposable et salaire attendu.

En effet, le rapport précité du Conseil d'analyse économique intitulé « Productivité et emploi dans le tertiaire » 23 ( * ) part du constat suivant : si la France comportait proportionnellement autant de personnes dans le commerce, l'hôtellerie et la restauration que les Etats-Unis, elle aurait 3,4 millions d'emplois supplémentaires. Et si la proportion observée en Allemagne ou au Danemark était constatée en France, 1,2 million d'emplois supplémentaires seraient créés.

Il n'est pas fortuit que M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale envisage de présenter, pour Noël, un « plan de développement du service à la personne ».

C. LA RENCONTRE DE L'OFFRE ET DE LA DEMANDE : UN SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI RÉNOVÉ PAR LE PLAN DE COHÉSION SOCIALE

Constituant un des axes du plan de cohésion sociale, la rénovation du service de l'emploi s'inspire notamment de certaines recommandations du rapport rendu par M. Jean Marimbert , conseiller d'Etat, au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, portant sur le rapprochement des services de l'emploi.

1. Les mesures inscrites dans le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale

a) Les nouveaux contours du service public de l'emploi

Traduisant le premier programme du plan de cohésion sociale, intitulé « Fédérer les acteurs pour un nouveau contrat avec les demandeurs d'emploi », le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale entend d'abord remédier à l'éclatement du dispositif français d'intervention en direction des chômeurs (Etat, UNEDIC, ANPE, AFPA) par la création des « maisons de l'emploi », qui seront le « lieu de l'anticipation des besoins privés, publics, (...) de l'adaptation de la formation, et de la relation entre le demandeur d'emploi et l'entreprise », associant tous les partenaires de la politique de l'emploi et de la formation.

Par ailleurs, le projet met fin au « monopole du placement » de l'ANPE, du reste fortement érodé. Ainsi, son article premier définit le contenu de l'activité de placement en vue de faciliter son ouverture à de nouveaux opérateurs, gage d'une efficacité renouvelée.

Il est toutefois précisé que l'activité de placement devra obéir à un principe général de gratuité et de non-discrimination pour les personnes à la recherche d'un emploi. En contrepartie de l'ouverture de l'activité de placement, l'ANPE pourra créer des filiales pour l'exercice de ses missions.

En cohérence avec ces avancées, le « pilotage » du service public de l'emploi doit être facilité par la conclusion d'une convention pluriannuelle tripartite entre l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC .

Une nouvelle dynamique conventionnelle

Instrument de mutualisation des moyens des acteurs locaux, les maisons de l'emploi constituent le pivot d'une redéfinition des contours et des missions du service public de l'emploi. Cette redéfinition dont l'objectif est d'améliorer le pilotage de la politique de l'emploi et de renforcer la qualité de service offerte aux demandeurs d'emploi et aux entreprises se déclinera au plan national comme au plan local.

Au plan national, l'Etat, l'ANPE et l'UNEDIC seront désormais tenus de conclure une convention pluri annuelle définissant notamment :

- des objectifs communs ;

- les critères d'évaluation des actions menées pour parvenir à ces objectifs, ainsi que les modalités de publication de cette évaluation et des bonnes pratiques identifiées au plan local ;

- les modalités de recueil des besoins prévisionnels de main d'oeuvre des bassins d'emploi ;

- les modalités de mise en commun des informations permettant un suivi individualisé de chaque demandeur d'emploi et une meilleure adaptation des services de placement aux besoins de chaque personne ;

Cette convention pluri annuelle sera déclinée au plan territorial par des conventions de développement de l'emploi pouvant associer l'ensemble des acteurs concourant au service public de l'emploi : services déconcentrés de l'Etat et de l'ANPE, ASSEDIC, mais aussi, à titre facultatif, les collectivités territoriales, les entreprises, les organismes consulaires, les organismes de formation et les services sociaux.

Cette dynamique de mobilisation des acteurs au plan local s'appuiera sur les maisons de l'emploi qui présentent la caractéristique d'être des instruments de coopération à la fois très souples et dotés de moyens importants. Les maisons de l'emploi pourront en effet, selon les besoins propres à chaque situation, prendre la forme de structures nouvelles telles qu'un groupement d'intérêt public ou résulter de la labellisation de structures de coopérations déjà existantes, ayant fait leurs preuves et qui recevront par ce biais un appui financier.

Source : plaquette de présentation du budget du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale pour 2005

Enfin, en gage de l'amélioration des prestations offertes aux demandeurs d'emplois, l'obligation de recherche active d'emploi et son contrôle font l'objet d'une redéfinition .

Il doit être noté qu'une démarche de ce type n'est pas sans précédent. Depuis le 1 er juillet 2001, l'ANPE est chargée de la mise en oeuvre du programme d'action personnalisé pour un nouveau départ (PAP-ND) qui, dans le cadre du plan d'aide au retour à l'emploi (PARE) conclu à l'occasion du renouvellement de la convention de l'assurance chômage, généralise une démarche individualisée pour tous les demandeurs d'emploi, depuis le début du chômage jusqu'au retour à l'emploi.

Ce dispositif a connu une montée en charge rapide : à partir de juillet 2001, tous les nouveaux inscrits ont bénéficié du PAP, et depuis septembre 2002, la totalité des demandeurs se le sont vu proposer. Dans le même temps, il a été mis fin la dégressivité de l'indemnisation des chômeurs , l' aide au retour à l'emploi (ARE) remplaçant l' allocation unique dégressive (AUD), ce qui pu être présenté comme la « contrepartie » d'une nouvelle implication des chômeurs dans leur retour à l'emploi au travers du PAP-ND.

b) La « programmation » de la dépense concernant la création de 300 « maisons de l'emploi »

L'article 38 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale prévoit que le coût des maisons de l'emploi passera de 120 millions d'euros en 2005 à 300 millions d'euros en 2009, avec un pic à 530 millions d'euros en 2007, dans la perspective de mettre en place 300 maisons.

Aide apportée par l'Etat aux maisons de l'emploi programmée par le I de l'article 38 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale

(en millions d'euros valeur 2004)

Fonds « maisons de l'emploi »

2005

2006

2007

2008

2009

Autorisations de programme

300

330

50

0

0

Dépenses ordinaires et crédits de paiement

120

405

530

375

300

Naturellement, cette programmation est purement indicative, seuls les montants repris en loi de finances autorisant véritablement la dépense. Il s'agit uniquement d'un engagement politique.

2. Les incidences budgétaires en 2005

Outre les 120 millions d'euros de dépenses ordinaires et crédits de paiement programmés et inscrits pour 2005, la mobilisation pour l'emploi se trouvera également soutenue par un accroissement des moyens dévolus à l' ANPE , dont la subvention de fonctionnement versée par l'Etat s'accroît de 2,7 % pour s'établir à 1,214 milliard d'euros en 2005. Cette mesure nouvelle a pour objet de financer la mise en place des « plate-formes de vocation » destinées à orienter les jeunes vers les métiers où le potentiel de recrutement est avéré.

Par ailleurs, le ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale précise que « l'AFPA se trouve confortée tant dans ses moyens (avec une subvention de fonctionnement de 720 millions d'euros stable par rapport à 2004) que dans ses missions et ses structures puisque le projet de loi de programmation relatif à la cohésion sociale propose de réaffirmer sa pleine appartenance au service public de l'emploi et que l'AFPA demeurera une association nationale exerçant des missions d'intérêt général au profit des personnes salariées ou des demandeurs d'emploi .

« Ce soutien financier et politique est la condition de l'adaptation de l'AFPA à un environnement en pleine mutation (demande croissante de formation, en lien notamment avec les dispositions de la loi du 4 mai 2004 qui prévoit un droit à la formation tout au long de la vie, besoins de formation de plus en plus individualisés, évolution accélérée des contenus de la formation, décentralisation aux régions d'ici à 2008 d'une large part du financement de l'association). Pour mener à bien cette adaptation, l'agence s'appuiera sur un plan d'entreprise (2004-2008) qui à l'issue des concertations avec les représentants de son personnel la conduira à élaborer un nouveau contrat de progrès avec l'Etat pour une période de quatre ans ».

D. LA LUTTE CONTRE LES RIGIDITÉS QUI PÉNALISENT L'EMPLOI ET FAVORISENT LES DÉLOCALISATIONS

Votre rapporteur spécial a acquis la conviction que, pour créer des emplois et lutter contre les délocalisations, la baisse du coût du travail au travers de la politique d'exonérations -la plus coûteuse des politiques de l'emploi- ne constitue pas la « panacée » . Seul un assouplissement drastique du droit du travail permettrait de relancer les embauches et d'améliorer l'attractivité de la France, y encourageant l'investissement productif étranger, et freinant les délocalisations, qui constituent un phénomène extrêmement préoccupant.

La perspective d'une accélération des délocalisations

Le mouvement des délocalisations est une tendance lourde dont certains estiment qu'il est appelé à une accélération forte dans les années qui viennent. Ainsi, lors de leur audition, MM. Laurent Petizon, vice-président du cabinet de conseil ATKearney, et Olivier Delrieu, directeur, ont fait observer au groupe de travail que la masse salariale américaine délocalisée, qui était estimée à 4 milliards de dollars en 2000, serait de 24 milliards en 2005 et pourrait être de 65 milliards en 2010. Ils considéraient en outre que l'Europe avait environ trois ans de retard sur les Etats-Unis, évoquant notamment, à titre illustratif, le fait que 20 % des budgets informatiques américains étaient délocalisés en 2003 contre seulement 5 % en Europe.

Source : rapport d'information n° 374 (2003-2004) de notre collègue Francis Grignon, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 23 juin 2004

1. La « viabilisation » des 35 heures à défaut de leur suppression

Un décret du 15 octobre 2002 avait d'abord rehaussé le contingent d'heures supplémentaires de 130 heures à 180 heures, puis la loi « Fillon » a apporté un certain nombre d'assouplissements supplémentaires aux 35 heures concernant, notamment, le régime des heures supplémentaires, le contingent d'heures supplémentaires 24 ( * ) , le repos compensateur obligatoire et le compte épargne temps.

Dans un récent rapport d'information 25 ( * ) intitulé « La France des 35 heures : une économie fragilisée, une société divisée ? », nos collègues députés Patrick Ollier et Hervé Novelli ont notamment proposé (outre la mise en place d'un « Code du travail spécifique pour les PME »), des allègements de charges sociales sur les heure supplémentaires, et la possibilité pour les entreprises de déroger aux accords de branche existant sur la durée du travail.

Si M. Gérard Larcher, ministre délégué aux relations du travail, a pu marquer ses distances vis-à-vis de certaines des orientation de ce rapport, trois pistes sont néanmoins étudiées aujourd'hui par le gouvernement pour poursuivre l'« assouplissement » des 35 heures : la mutualisation des heures supplémentaires à l'échelle des entreprises, l'assouplissement du compte épargne temps (CET), et l' extension à toutes les entreprises du régime des heures supplémentaires applicable aux entreprises de vingt salariés et moins , qui permet de les rémunérer 10 % de plus, au lieu de 25 %.

En tout état de cause, le 31 décembre 2005, ce régime des heures supplémentaires dérogatoire prendra fin, ce qui devrait obliger le gouvernement à légiférer avant cette échéance.

Votre rapporteur spécial est hautement favorable à l'ensemble des mesures susceptibles de « viabiliser » les 35 heures pour les entreprises, à défaut d'une suppression pure et simple, dont il pourrait être raisonnablement attendu une diminution du coût des exonérations de charges de l'ordre de 10 milliards d'euros ( infra ). Il s'agit en effet de rendre aux entreprises la souplesse nécessaire concernant leur niveau d'activité. Il est certain qu'un renforcement du potentiel d'accroissement transitoire de la production de biens ou de services est de nature à favoriser, à terme, des embauches durables si le volume de travail requis est amené à se stabiliser à un niveau plus élevé.

2. La fin des errements de la loi de modernisation sociale

Dans la même optique, un certain nombre des dispositions de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale destinées à rendre plus rigide la procédure de licenciement économique, ont été « gelées » par la l'article 1 er de la loi du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques, aux fins de permettre aux partenaires sociaux de conclure un accord interprofessionnel concernant les procédures de licenciements économiques avant d'adapter, au vu des résultats de cet accord, la législation applicable.

Dans l'attente , cet assouplissement était des plus opportuns. En effet, il y a vraisemblablement plus à attendre, en terme d'impact sur l'emploi, du renoncement à un dispositif propre à décourager certains entrepreneurs d'embaucher, que de sa mise en oeuvre dans la perspective de retarder des licenciements économiques inéluctables. Pour faire face aux évolutions d'une société moderne, il semble en effet plus sûr d'accroître les possibilités de formation tout au long de la vie ( supra ).

La loi du 30 juin 2004 26 ( * ) , modifiant l'article 1 er de la loi du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques, a prolongé de six mois la suspension de certaines dispositions de la loi de modernisation sociale précitée.

Le « gel » des dispositions précitées parvenant à son terme le 3 janvier 2005, et compte tenu du désaccord persistant entre les partenaires sociaux, il revenait au gouvernement de déposer, avant cette date, un projet de loi sur la révision des procédures de licenciement.

C'est l'objet de la lettre rectificative du 20 octobre 2004, complétant le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale.

Exposé des motifs de la lettre rectificative au projet de loi de programmation pour la cohésion sociale

La loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciement économique a suspendu pour une durée de dix-huit mois, durée qui a été prolongée de six mois par la loi n° 2004-627 du 30 juin 2004, les principales dispositions introduites dans le code du travail par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale. Elle a renvoyé à un accord national interprofessionnel le soin de définir les règles applicables en la matière.

Dans l'intervalle, les entreprises avaient été incitées à négocier des accords de méthode définissant la procédure applicable en cas de licenciement collectif pour motif économique, au besoin en adaptant le socle de règles de droit commun défini par le code du travail.

Si les négociations interprofessionnelles n'ont pu aboutir, plus de cent quatre-vingt accords de méthode ont été signés et mis en oeuvre, démontrant ainsi qu'il était possible de parvenir à une gestion négociée, à froid, des restructurations auxquelles peuvent être conduites les entreprises en cas de difficultés économiques.

Prenant acte de l'échec des négociations et compte tenu des délais impératifs impartis par la loi du 3 janvier 2003 modifiée, le gouvernement a décidé d'introduire dans le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale huit articles visant :

- à encourager, au sein des entreprises et des branches, le développement d'une gestion prévisionnelle de l'évolution des emplois et des compétences ainsi que l'anticipation des mutations ;

- à clarifier et à sécuriser les règles relatives au licenciement économique en privilégiant la voie de l'accord collectif ;

- à renforcer les garanties de reclassement offertes à l'ensemble des salariés, en particulier dans les petites et moyennes entreprises, en cas de licenciement économique ;

- à remédier aux effets déstabilisateurs que peuvent avoir certaines opérations de restructuration à l'échelle d'un bassin d'emploi.

Les partenaires sociaux croient, à tort, que l'emploi est mieux protégé en empêchant les licenciements et, sur ce point, il semble donc difficile de parvenir à un accord permettant leur libéralisation. Ainsi, votre rapporteur spécial constate qu'il revient au gouvernement et au Parlement de prendre une telle initiative.

3. La simplification et l'assouplissement nécessaires du droit du travail

Parmi les cinquante préconisations du rapport 27 ( * ) rendu par la commission présidée par M. Michel de Virville , intitulé « Pour un droit du travail plus efficace », figuraient notamment, outre le renforcement de la négociation collective, la rupture négociée de la relation de travail, ainsi que la création d'un « contrat de projet » qui pourrait excéder 18 mois 28 ( * ) .

Dans un récente rapport intitulé « Le sursaut, vers une nouvelle croissance pour la France » 29 ( * ) , M. Michel Camdessus , soulignant qu' « alors même que les transferts sociaux atteignent les niveaux des pays nordiques, le taux de pauvreté français se rapproche plus de celui du Royaume-Uni » inventorie les moyens de parvenir à ce « sursaut » :

- la création d'un contrat à durée indéterminée unique (remplaçant CDD et CDI) au sein duquel « les droits à la protection sociale et à l'indemnisation se renforceraient progressivement »,

- une assurance chômage plus généreuse « mais plus incitative » ,

- la création d'un « bonus-malus sur les cotisations sociales tenant compte du nombre d'embauches et de licenciements » inspirée du modèle américain,

- la possibilité de cumuler emploi et retraite sans restriction,

- la création d'une nouvelle catégorie d'heures supplémentaires, individuelles et non obligatoires, afin que ceux qui veulent travailler plus puissent gagner plus.

Par ailleurs, le rapport préconise, avec le renforcement de la prime pour l'emploi, eune modération de l'évolution du SMIC en supprimant les « coups de pouce ».

A l'exception de cette dernière proposition, M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, s'est estimé « très frappé » par ce soutien au plan de cohésion sociale .

Il est exact qu'une pleine acclimatation de la « flex-sécurité » ( supra ) , dont le plan de cohésion sociale entend s'inspirer, impose de porter la plus grande attention à l'ensemble de ces propositions, avec laquelle elles se situent en cohérence.

Le rapport Camdessus montre bien qu'il faut accélérer notre mutation, ce qui signifie d'abord et surtout travailler plus à un coût maîtrisé, et revenir sur les 35 heures. Tout ce qui favorisera la flexibilité du travail est bon pour l'emploi.

Quoiqu'en disent ses détracteurs, cette politique appliquée par exemple aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et au Danemark fonctionne. C'est un fait : de même qu'on ne peut s'opposer aux lois de la pesanteur, on ne peut s'opposer à une politique qui marche, qu'il convient ainsi d'appliquer au plus vite.

* 18 Pour les entreprises de 10 salariés et plus, les obligations financières des employeurs sont portées de 1,5 % à 1,6 % de la masse salariale ; pour les entreprises de moins de 10  salariés, la contribution est portée de 0,25 % à 0,55 % de la masse salariale.

* 19 Au sens économique, c'est-à-dire l'offre des travailleurs (sur le marché du travail), qui se trouvent, au sens habituel, être « demandeurs d'emploi ».

* 20 Rapport du CAE n° 49, juillet 2004.

* 21 Audenis C., Laïb N. et Roux S., « L'évolution de l'emploi faiblement rémunéré au cours des dernières années », in l'Economie Française 2002-2003, Le Livre de Poche (2002).

* 22 Tous effets confondus, la diminution des ressources du budget général correspondant à la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle ressortait, pour 2003, à 1,83 milliard d'euros.

* 23 Rapport du CAE n° 49, de juillet 2004.

* 24 Le contingent réglementaire de 180 heures demeure applicable à titre subsidiaire en l'absence d'accord de branche étendu.

* 25 Rapport n° 1544, XII ème législature, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 avril 2004.

* 26 Loi n° 2004-627 modifiant les articles 1 er et 2 de la loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques et relative au recouvrement, par les institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage, des prestations de solidarité versées entre le 1 er janvier et le 1 er juin 2004 aux travailleurs privés d'emploi dont les droits à l'allocation de retour à l'emploi ont été rétablis.

* 27 Rapport remis à M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité le jeudi 15 janvier 2004.

* 28 La durée d'un contrat à durée déterminée (CDD) ne peut excéder, dans le cas général, 18 mois.

* 29 Rapport remis le 9 octobre 2004 à M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.