M. Adrien Gouteyron

II. LE PROGRAMME 105 : « ACTION DE LA FRANCE EN EUROPE ET DANS LE MONDE »

Les crédits du programme 105 « action de la France en Europe et dans le monde » représentent 1,75 milliard d'euros d'autorisations d'engagements (AE) et 1,45 milliard d'euros de crédits de paiement, dont 506,2 millions d'euros de dépenses de personnel (titre 2). Les emplois, exprimés en ETPT, correspondant au montant inscrit au titre 2, s'établissent à 8.732, contre 8.812 pour l'exercice 2006, dont 3.122 recrutés locaux.

Les crédits des fonds de concours rattachés au programme 105 font l'objet d'une prévision de 12,3 millions d'euros. Le principal fonds de concours rattaché à ce programme, et qui est imputé sur l'action « soutien » est celui relatif aux prélèvements effectués sur les émoluments des personnels du ministère des affaires étrangères logés par l'Etat à l'étranger.

Les moyens du programme représentent près d'un tiers des crédits et des emplois du ministère des affaires étrangères et près des deux tiers, 64 %, de ceux de la mission « Action extérieure de l'Etat ».

La répartition des ETPT en poste à l'étranger souligne le poids des représentations françaises en Afrique et dans l'Union européenne.

Répartition des ETPT du programme 105 en poste à l'étranger

Source : ministère des affaires étrangères

A. LE PROGRAMME : FINALITÉS ET ACTIONS

1. Les finalités du programme

Le programme 105 rassemble les moyens des services centraux et déconcentrés (156 ambassades bilatérales, 17 représentations permanentes) qui assurent la conduite de l'action diplomatique de la France. Il assure le financement des contributions de la France aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix décidées par l'organisation des Nations Unies (ONU), et contient les crédits de la coopération militaire et de défense. Le responsable du programme 105 est le secrétaire général adjoint, directeur général pour les affaires politiques et de sécurité du ministère des affaires étrangères, M. Gérard Araud. L'exercice 2007 devrait s'avérer crucial pour choisir définitivement entre le maintien de cette responsabilité de gestion à un haut fonctionnaire dont les contraintes sont par ailleurs importantes ou de transférer la responsabilité du programme au directeur général de l'administration.

Le programme comporte quatre budgets opérationnels de programme 15 ( * ) (BOP), tous gérés en administration centrale : le BOP « cabinets ministériels », le BOP « coopération militaire et de défense », le BOP « contributions internationales » et le BOP « réseau diplomatique ». Ce dernier répartit ses crédits entre 11 unités opérationnelles (UO) centrales (direction générale de l'administration, direction des ressources humaines, immobilier etc...), et les 169 UO locales à l'étranger. Le BOP « coopération militaire et de défense » répartit également ses crédits au sein d'UO locales, dans des pays où existe une coopération militaire, mais ces UO locales ne sont pas les mêmes que celles du BOP « réseau diplomatique ».

Votre rapporteur spécial a regretté dans son rapport d'information 16 ( * ) intitulé « la LOLF peut-elle produire une modernisation des administrations ? Le cas des services de l'Etat à l'étranger » l'absence de budgets opérationnels de programme déconcentrés, le budget opérationnel de programme constituant l'unité de gestion au sein de laquelle la fongibilité des crédits peut être appliquée. Cette absence constitue un des facteurs pouvant expliquer pourquoi la LOLF a pu tarder à faire sentir ses effets dans les postes à l'étranger.

L'absence de BOP locaux tient à deux raisons :

- les applications informatiques, en particulier l'interface entre « Palier 2006 » et Corège empêchent la création d'un BOP local en absence de contrôle financier déconcentré ;

- l'absence de regroupement, à l'échelon interministériel, des crédits de fonctionnement sur l'action « soutien » du programme 105, en attendant la création d'un programme soutien, limite l'intérêt des BOP locaux. C'est en effet sur les crédits de soutien, au niveau local, que la fongibilité trouverait naturellement à s'appliquer.

2. Les actions

Le programme est structuré en six actions, dont une action « soutien », conformément aux grands objectifs politiques du Quai d'Orsay. Par rapport à l'exercice 2006, il faut noter deux novations :

- la création d'une action « réseau diplomatique », qui devrait simplifier la gestion quotidienne des crédits par les postes à l'étranger : cette action constitue une première avancée, conforme aux souhaits de votre rapporteur spécial de voir les postes gérer une dotation de fonctionnement interministérielle globalisée, regroupant les emplois de soutien (gardiens, chauffeurs, secrétaires) et les crédits de fonctionnement (achats, immobilier, informatique etc...) afin de mutualiser les coûts ;

- le regroupement des contributions internationales artificiellement séparées en 2006 entre « régulation de la mondialisation » et « contributions à la sécurité internationale » dans une action « contributions internationales » est actée dans le projet de loi de finances pour 2007.

Action n ° 1 : coordination de l'action diplomatique (84 millions d'euros)

Cette action regroupe les crédits des services politiques de l'administration centrale et l'essentiel des moyens des postes diplomatiques. Elle comprend notamment les crédits afférents aux cabinets du ministre, des ministres délégués, au secrétariat général, y compris les ambassadeurs en mission qui lui sont rattachés, à l'inspection générale, au centre d'analyse et de prévision.

Action n° 2 : action européenne (53,8 millions d'euros)

Figurent au sein de cette action les moyens de fonctionnement et d'intervention des services dont l'activité est directement liée à celle des institutions de l'Union européenne (Conseil, Commission, Parlement, Cour de Justice), et notamment la représentation permanente.

Il convient surtout de prendre en compte deux postes de dépenses significatifs 17 ( * ) : les contributions au Conseil de l'Europe (34 millions d'euros 18 ( * ) ) et les subventions à la desserte aérienne de Strasbourg (4,877 millions d'euros).

Action n° 3 : contributions internationales (544,95 millions d'euros)

Cette action regroupe toutes les contributions, obligatoires ou volontaires, aux organisations internationales dont la France est membre (sauf l'ensemble des contributions ressortissant à la sécurité internationale et les contributions volontaires concourant à l'aide publique au développement). Ces contributions sont libellées en euros ou en devises. La principale contribution est celle à l'ONU, évaluée dans le présent projet de loi de finances à 104,3 millions de dollars. Cette action fait l'objet d'une analyse plus approfondie lors de l'examen par votre rapporteur spécial de la justification au premier euro.

Action n° 4 : coopération militaire et de défense (106,4 millions d'euros)

Sont inscrits au sein de cette action les crédits correspondant à la mise en oeuvre par le ministère des affaires étrangères de notre coopération militaire et de défense, dont les orientations sont fixées en Conseil de défense et dont la conduite est partagée avec le ministère de la défense.

L'action regroupe les crédits afférents à la rémunération du personnel (en administration centrale et affecté à l'étranger), à la réalisation de stages (essentiellement en écoles militaires en France et à l'étranger), à la commande de matériels et d'équipements (50 % par l'administration centrale et 50 % sur crédits délégués à l'étranger) et à la réalisation de travaux d'infrastructure à l'étranger.

Action n° 5 : soutien (228,4 millions d'euros)

Les crédits de cette action correspondent aux fonctions support du ministère des affaires étrangères dans son ensemble, pour le compte des quatre programmes placés sous sa responsabilité (trois programmes de la présente mission et programme « solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « aide publique au développement »).

Action n° 6 : réseau diplomatique (433,2 millions d'euros)

Cette action regroupe l'ensemble des moyens des postes à l'étranger. Il s'agit de la totalité des crédits de fonctionnement des 156 chancelleries diplomatiques et des 17 représentations permanentes auprès de l'Union européenne et des organisations internationales. Par ailleurs, les moyens de fonctionnement des consulats généraux, consulats et sections consulaires et des services culturels et de coopération (à l'exception des frais de représentation et des frais de tournées) ont été regroupés au sein de la présente action afin de faciliter l'application du principe de fongibilité aux moyens de l'Etat à l'étranger.

Votre rapporteur spécial croit nécessaire d'aller encore plus loin. Sur le moyen terme, il s'agit évidemment de regrouper les moyens de fonctionnement de l'ensemble des services de l'Etat à l'étranger , au-delà du seul ministère des affaires étrangères, comme il l'a montré dans son rapport d'information précité. Sur le court terme, il est d'ores et déjà possible que les personnels de soutien (chauffeurs, gardiens etc...) des consulats soient, dans un nombre de postes que déterminerait le Quai d'Orsay, a priori ceux les moins concernés par le passage aux visas biométriques , transférés sur la présente action pour initier une nécessaire mutualisation des personnels de soutien. Tel est le sens d'un amendement que votre rapporteur spécial souhaite proposer au nom de la commission.

3. La ventilation des actions

Votre rapporteur spécial souligne la part grandissante des crédits du ministère des affaires étrangères consacrés aux actions multilatérales de préférence aux actions bilatérales. Les contributions internationales représentent , après ventilation des actions «  « soutien » 42 % des crédits du programme 105.

Répartition du programme 105 entre actions

avant et après ventilation analytique de l'action soutien

Source : ministère des affaires étrangères

Répartition du programme 105 par actions avant et après ventilation
des crédits de soutien du programme et des crédits polyvalents provenant d'autres missions 19 ( * )

Source : annexe au projet de loi de finances pour 2007 « action extérieure de l'Etat »

B. LA JUSTIFICATION DES CRÉDITS AU PREMIER EURO SOULIGNE L'INSUFFISANTE MAÎTRISE DE CERTAINES DÉPENSES

La justification des crédits au premier euro de la mission « action extérieure de l'Etat » a indéniablement progressé 20 ( * ) . Conformément aux recommandations de votre rapporteur spécial, le taux de change retenu pour le calcul des contributions en devises (dollar américain) est explicité. Les hypothèses change-prix sont ainsi connues. Elles doivent permettre d'établir une base pour la couverture du risque de change que le ministère des affaires étrangères devrait mettre en oeuvre, après une expérimentation limitée en 2006, à large échelle en 2007. La couverture du risque de change appliquée notamment aux contributions internationales libellées en devises avait été recommandée par votre rapporteur spécial lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2007 . Cette recommandation a été suivie d'effet dans le contrat de modernisation 2006-2008.

La justification au premier euro appelle quatre séries de remarques :

- l'utilité d'un « guichet unique » pour le programme personnalités d'avenir et celui d'invitation de journalistes ;

- la nécessité de tirer les conséquences de la spécificité actuelle de l'immobilier de l'Etat à l'étranger pour engager une politique immobilière plus dynamique ;

- l'absence de gestion, et le dérapage correspondant, des contributions internationales ;

- l'inflation préoccupante de la masse salariale des recrutés locaux.

1. La nécessité d'un « guichet unique » pour le programme personnalités d'avenir et celui d'invitation de journalistes

La justification au premier euro au sein de l'action n° 1 fait apparaître deux programmes d'invitation de personnalités étrangères. Le premier, dédié aux journalistes étrangers, géré par la direction de la communication et de l'information, nécessite 639.122 pour inviter environ 150 journalistes en 2007. Le second, consacré aux personnalités d'avenir, géré par le centre d'analyse et de prévision (C.A.P.) du ministère, prévoit en 2007 des crédits à hauteur de 1.155.500 euros, afin d'inviter environ 120 jeunes représentants des futures élites d'une quarantaine de pays.

Ces deux programmes sont appréciés de manière très positive par les postes à l'étranger , notamment ceux ayant fait l'objet d'un contrôle de la part de votre rapporteur spécial en 2006, en application de l'article 57 de la LOLF. Toutefois, à l'expérience, certains interlocuteurs de votre rapporteur spécial ont pu regretter l'absence de « fongibilité » entre les deux programmes, et leur relatif cloisonnement : une année, un poste peut souhaiter, compte tenu de l'analyse politique qu'il fait du pays dans lequel il se trouve, privilégier plutôt les personnalités médiatiques que les personnalités politiques, ou l'inverse . La séparation des deux programmes d'invitation, répartis entre deux services, ne facilite pas les arbitrages. En conséquence, votre rapporteur spécial préconise, tout en préservant les deux programmes, et les deux cibles prioritaires pour les invitations, de constituer un guichet unique, qui pourrait être confié à la direction de la communication et de l'information.

2. La nécessité de tirer les conséquences de la spécificité actuelle de l'immobilier de l'Etat à l'étranger pour engager une politique immobilière plus dynamique

Sur le plan budgétaire, le ministère des affaires étrangères, dans le cadre de son contrat de modernisation 2006-2008, a prévu d'autofinancer ses opérations immobilières grâce aux cessions des éléments de son patrimoine à l'étranger devenu inutile à ses besoins. Ceci devrait conduire le ministère des affaires étrangères à entreprendre des ventes d'immeubles d'un volume de 120 à 150 millions d'euros au cours de cette période. Si cet objectif ne pouvait être atteint, compte tenu de la complexité d'un certain nombre d'opérations de vente et de la durée nécessaire à leur réalisation, la programmation des opérations immobilières sera diminuée en conséquence afin de prévenir tout risque de crise de financement.

Recettes de cessions immobilières du Quai d'Orsay

(en millions d'euros)

Source : ministère des affaires étrangères

Compte tenu de ses ressources financières, le ministère a ramené le nombre de ses opérations immobilières de 700 opérations « ouvertes » en 2005 à 250 à 300.

Deux remarques doivent être faites au sujet des implantations immobilières du Quai d'Orsay :

- s'agissant de l'immobilier de l'Etat à l'étranger, la spécificité du régime qui lui est applicable, notamment parce qu'il s'agit de bâtiments diplomatiques, ayant parfois fait l'objet d'accords internationaux, ou de conventions juridiques originales avec les autorités publiques, est trop souvent méconnue lorsque la question des cessions immobilières est évoquée. A l'inverse, les accords internationaux ou les conventions s'appliquant à l'immobilier de l'Etat à l'étranger doivent être mieux négociés par nos diplomates à l'avenir, afin de permettre une réversibilité des choix d'implantation des services diplomatiques, consulaires et culturels 21 ( * ) . Les conventions internationales soumises pour ratification par le Parlement portant sur l'immobilier à l'étranger doivent comporter une fiche d'impact à caractère budgétaire, précisant le coût des travaux éventuellement supportés par la France, les charges d'entretien et de réparation du bâtiment concerné, et les clauses permettant la réversibilité du choix d'implantation.

- s'agissant de l'implantation parisienne du Quai d'Orsay, votre rapporteur spécial prend acte de l'abandon du projet de « site unique » et la perspective d'une structuration à terme de ses implantations parisiennes autour de 3 sites : le Quai d'Orsay, qui demeurerait le site « historique », le site de La Courneuve qui accueillera les archives diplomatiques ainsi que d'autres services et un autre site ayant vocation à regrouper l'ensemble des autres services de l'administration centrale. Afin de pouvoir déterminer le budget sur lequel le Quai d'Orsay peut compter pour reloger certains de ses services, votre rapporteur spécial croit nécessaire d'engager la vente des immeubles parisiens (hors Quai d'Orsay) dès maintenant, quitte à assortir cette vente d'une location pendant la durée de recherche du nouveau site.

3. L'absence de gestion, et le dérapage correspondant, des contributions internationales

L'an passé, votre rapporteur spécial constatait une erreur manifeste d'appréciation dans la justification au premier euro concernant les opérations de maintien de la paix (OMP) de l'ONU, dont la prévision de dépense s'établissait à 136,22 millions d'euros , « fixés de manière forfaitaire, au niveau des crédits de la loi de finances initiale pour 2005 ». En fonction des éléments transmis par le contrôleur financier, votre rapporteur spécial avait souligné qu'il manquait au minimum 75 millions d'euros à la justification au premier euro du programme 105. Le projet de décret d'avance transmis à votre commission des finances le 13 novembre dernier propose l'ouverture de 80 millions d'euros au titre des opérations de maintien de la paix...

Le contrat de modernisation 2006-2008 a prévu un rebasage progressif des opérations de maintien de la paix , avec une première tranche de 50 millions d'euros en 2007. A ce montant s'ajoute, toujours en 2007, une tranche complémentaire de 10 millions d'euros visant à réévaluer les autres contributions internationales, également notoirement sous-dotées.

Pourtant, la justification au premier euro 2007 n'est pas moins insincère que ne l'était celle de 2006. Ainsi, la dotation prévue au titre des contributions internationales s'établit dans le projet de loi de finances pour 2007 à 544,96 millions d'euros. Selon la « vraie » justification au premier euro que votre rapporteur spécial a obtenu, en application de l'article 57 de la LOLF, la dotation réelle s'établirait à 725 millions d'euros. Les impasses ne concernent pas seulement les opérations de maintien de la paix, mais aussi les autres contributions « obligatoires ». S'agissant en outre des contributions aux institutions européennes, les impasses sont également élevées : 48,4 millions d'euros dans la « vraie » justification au premier euro contre 41,7 millions d'euros dans la « fausse » justification au premier euro présentée dans le projet annuel de performances : la dotation au Conseil de l'Europe s'élèverait ainsi à 38 millions d'euros contre 34 millions d'euros affichés.

Au total, l'écart global entre « vraie » et « fausse » justification au premier euro s'établit à 187 millions d'euros, soit près de 13 % des montants du programme 105. Comme le souligne à juste titre une note de la direction des affaires financières du ministère des affaires étrangères en date du 26 janvier 2006 relative à la préparation du budget 2007 : « la lisibilité et la crédibilité constitueront les critères centraux du choix des déterminants. L'objectif premier est en effet de convaincre la direction du budget et les parlementaires de la pertinence de la dépense sollicitée. Plus une enveloppe reposera sur des bases juridiques obligatoires ou des engagements fermes et justifiés ainsi que sur un déterminant financier non négociable, moins elle sera discutée »...

La « vraie » et la « fausse » justification au premier euro
en ce qui concerne les contributions internationales

(en millions d'euros)

Source : ministère des affaires étrangères

Ces impasses ne prennent pas en compte les opérations de maintien de la paix non encore budgétées par l'ONU , qui peuvent être estimées de manière très prudente aux montants suivants :

- FINUL renforcée : 50 millions d'euros ;

- extension de la MINUS au Darfour : 83 millions d'euros ;

- création de la MINUT (Timor) : 14 millions d'euros.

Au-delà des aspects majeurs de sincérité budgétaire, deux points appellent de fortes critiques s'agissant des contributions internationales.

Il s'agit tout d'abord de « l'inventaire à la Prévert » des contributions internationales financées par le ministère des affaires étrangères . Votre rapporteur spécial en publiera la liste dans son rapport spécial. Parmi quelques exemples, on peut citer :

- l'association pour la conservation des albatros et des pétrels (ACAP) : 60.200 euros ;

- commission internationale pour la conservation des thonidés de l'atlantique (CICTA) : 260.000 euros ;

- centre international de recherche sur le cancer et union internationale contre le cancer : 1.100.000 euros ;

- organisation mondiale des douanes : 610.000 euros

- commission internationale permanente pour l'épreuve des armes à feu portatives : 2.300 euros ;

- office international des épizooties : 343.000 euros ;

- office international de la vigne et du vin : 593.000 euros ;

- accord relatif à la protection des chauves souris en Europe : 52.000 euros

- etc...

Les contributions « obligatoires » versées à ces organisations internationales font-elles l'objet d'un suivi attentif de la part des gestionnaires du Quai d'Orsay ? Rien n'est moins sûr compte tenu de la « modestie » des sommes en jeu. Les budgets de ces organismes font-ils l'objet d'un examen par nos diplomates lorsqu'ils sont votés ? Leur évolution est-elle maîtrisée ? Rien n'est moins sûr. Or la France est membre d'un peu plus de 150 organisations.

Dans ces conditions, votre rapporteur spécial recommande que chaque projet de loi de ratification d'une convention créant un organisme international comporte une étude d'impact budgétaire affichant le budget prévisionnel de l'organisme créé, et son évolution prévisible .

Un tri s'impose pour réaffecter à des ministères disposant des compétences pour les suivre les contributions de la France aux organismes internationaux dans leur champ d'intervention.

Le ministère des affaires étrangères a la charge de dotations parfois lourdes, comme celle allouée à l'institut du monde arabe (9,46 millions d'euros) dont chacun connaît la situation financière délicate.

Sont ainsi principalement en cause en première analyse les ministères de l'agriculture, de la culture, de l'écologie et de la santé pour reprendre certaines contributions internationales. Votre rapporteur spécial vous proposera un amendement de suppression des dotations aux organismes cités plus haut afin d'inciter le gouvernement à inscrire ces crédits sur les missions idoines .

La conséquence de cette absence de suivi par le Quai d'Orsay de la multitude de contributions internationales qu'il devrait gérer consiste en un dérapage des crédits . Manifestement, les diplomates français ne parviennent pas, si jamais ils le tentent vraiment, à inciter les organisations internationales à maîtriser leur budget, comme la France s'efforce d'y parvenir avec le budget de l'Etat en général, et avec celui du Quai d'Orsay en particulier. Pourtant, le multilatéralisme est inséparable de la bonne gestion des crédits qui lui sont alloués .

Il s'ensuit une dérive préoccupante des dotations aux organisations internationales sur la période récente, et ce même sans intégrer les opérations de maintien de la paix.

Evolution des contributions internationales avec et sans les OMP

(en millions d'euros)

Source : ministère des affaires étrangères

Comme le reconnaît le ministère des affaires étrangères, il existe un besoin de « sensibilisation plus marquée de l'ensemble des négociateurs, à l'administration centrale et dans les postes, aux aspects budgétaires des programmes d'action de chaque organisation ». Votre rapporteur spécial se propose d'inciter à cette prise de conscience nécessaire en proposant un amendement de réduction de crédits correspondant à 0,5 % du montant des contributions payables en devises, afin que soit ralentie l'irrésistible ascension des coûts des organisations internationales. Si nos diplomates ne sont évidemment pas seuls autour de la table au moment de l'établissement des budgets des organisations internationales, ils ont le devoir de faire passer leur message de soutien au multilatéralisme dans un souci de modération budgétaire.

Compte tenu du périmètre du programme 105, les tensions inflationnistes sur les crédits dédiés aux contributions internationales conduisent à des arbitrages douloureux sur le réseau diplomatique, fongibilité oblige ! Or, sur la période 1998-2002, selon les termes du Quai d'Orsay, le « jeu des fermetures, des ouvertures et des transformations s'est traduit par un solde négatif de 1,83 million d'euros sur l'enveloppe globalisée de fonctionnement ».

4. L'inflation préoccupante de la masse salariale des recrutés locaux.

La masse salariale des agents de droit local employés par les ambassades dans les pays de l'OCDE augmente d'environ 5 % par an (hors prise en compte de la variation des effectifs), ce qui pourrait représenter une hausse d'au moins 36 % en 2013, et qui pourrait même aller jusqu'à 54 % « si l'on tient compte de la pluralité des facteurs pouvant contribuer à l'augmentation de la masse salariale (ancienneté, mérite, protection sociale, réforme des grilles, tous paramètres ayant fait l'objet d'une politique volontariste depuis les années 90) », selon les termes d'un audit de modernisation sur le sujet.

L'évolution de la masse salariale des agents de droit local du Quai d'Orsay est très supérieure au rythme de progression des rémunérations dans la fonction publique en France. La forte augmentation constatée intervient au moment où les indemnités de résidence des agents titulaires au Quai d'Orsay sont fortement contraintes.

La politique de l'emploi local dans les pays de l'OCDE se révèle être un pari budgétaire hasardeux. Alors que le nombre de recrutés locaux a globalement diminué, la masse salariale consacrée à ces personnels n'a cessé d'augmenter pour s'élever aujourd'hui à environ de 100 millions d'euros (82 millions d'euros en 2000), sous l'effet conjugué de l'évolution de la structure des emplois de recrutement local (accroissement des emplois de bureau et diminution du nombre des emplois de service) et de la mise en place d'un plan d'action visant à valoriser la situation des recrutés locaux ( intégration systématique d'un ou plusieurs niveaux supérieurs de rémunération dans les nouvelles grilles, d'une progression plus rapide entre les échelons afin d'assurer un véritable déroulement de carrière et de l'amélioration de la couverture maladie/accident du travail et retraite.

En outre, sur l'ensemble des recrutés locaux du réseau diplomatique et consulaire, on identifie près de 1.500 Français, soit environ un quart du total des effectifs. Ces Français ont le plus souvent un statut plus favorable que les autres recrutés locaux.

Manifestement, au moins en termes de coût, la transformation d'emplois de titulaires du ministère des affaires étrangères en emplois de recrutés locaux ne constituent pas une complète réussite. Il faut donc se féliciter que le ministère des affaires étrangères « explore en liaison avec d'autres administrations présentes à l'étranger les diverses voies qui permettront de définir de nouvelles règles non inflationnistes de rémunération de ces agents ».

Dans les pays de l'OCDE en outre, la complexité des droits du travail locaux, et l'insuffisante maîtrise de ces questions par nos postes, conduisent à des surcoûts importants en cas de contentieux sociaux. L'exemple le plus récent concerne la suppression des cours de français de l'institut français de Vienne, qui a conduit au terme d'un contentieux coûteux au paiement de 200.000 euros d'indemnités de licenciement au personnel concerné.

Selon le Quai d'Orsay, pour le monde entier, 263 contentieux seraient en cours. Le ministère des affaires étrangères estime à 1.050.000 euros le montant auquel il sera condamné au titre de ces contentieux.

Dès lors, votre rapporteur spécial a le sentiment que, au moins dans les pays de l'OCDE, du moins certains, le recrutement de contrats locaux aboutit à des rigidités supérieures à celui de fonctionnaires titulaires, rendant les choix d'implantation de la France à l'étranger difficilement réversibles . Les redéploiements doivent sans doute être mieux préparés. De plus, la substitution de personnels locaux aux titulaires du ministère n'a plus vocation à être systématiquement encouragée, sauf compétences particulières. Compte-tenu des perspectives de départ à la retraite au ministère des affaires étrangères (40 % des titulaires devraient quitter leurs fonctions d'ici 2016, soit 3.000 personnes), les redéploiements de personnels titulaires en cas de fermetures d'un poste diplomatique, consulaire ou culturel devraient être plus simples à mettre en oeuvre que le licenciement de recrutés locaux.

C. LES OBJECTIFS DU PROGRAMME

Le programme 105 présente cinq objectifs , qui sont ceux des principaux axes stratégiques de la mission « Action extérieure de l'Etat » :

- défendre et représenter à l'étranger les intérêts de la France ;

- construire l'Europe ;

- renforcer la sécurité internationale ;

- promouvoir le multilatéralisme ;

-assurer un service diplomatique efficient et de qualité.

Votre rapporteur spécial se félicite des réelles avancées réalisées dans le projet annuel de performances en matière d'indicateurs 22 ( * ) . Le progrès est important par rapport à l'exercice 2006, alors même que l'action politique du ministère des affaires étrangères se prête difficilement à l'évaluation et que l'impact du réseau diplomatique en termes d'influence est peu mesurable.

1. Le principe retenu pour l'action politique : l'auto notation

Pour cette raison, la volonté du Quai d'Orsay d'évaluer le coeur de son action, le traitement des principales crises en fonction des intérêts poursuivis par la France ou les progrès des intérêts français concernant les principaux dossiers européens ou encore les principales négociations dans les enceintes multilatérales en fonction des objectifs poursuivis par la France , mérite d'être encouragée. Cette évaluation est réalisée sous la forme d'une auto notation, sur une échelle de 1 à 5, ce qui paraît pertinent. Votre rapporteur spécial partage toutefois la proposition de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur spécial des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat » pour la commission des finances de l'Assemblée nationale, de confier cette notation au conseil des Affaires étrangères nouvellement créé. Si la démarche proposée est la bonne, sans doute les notes que s'est décerné le Quai d'Orsay sont-elles en effet un peu indulgentes.

Selon les indicateurs proposés dans le projet annuel de performances, le ministère affiche, sans surprise, des résultats moyens dans le traitement des crises en Afghanistan, en Iran et s'agissant du processus de paix au Proche-Orient. De manière plus étonnante, le Quai d'Orsay s'octroie une « bonne note » s'agissant la gestion de la crise en Côte d'Ivoire. Au-delà des objectifs que se fixe la France pour chaque crise, une explicitation de la notation serait susceptible de la rendre plus crédible.

Parmi les points noirs de l'année 2006 figure l'échec relatif d'une convention universelle d'interdiction du seul clonage reproductif, seule une « déclaration aux termes ambigus a été adoptée à une courte majorité » selon le Quai d'Orsay.

Il importe évidemment d'en tirer les conséquences lorsque les objectifs fixés ne sont pas au rendez-vous. Ainsi, au titre de l'indicateur « présence des Français et usage du français dans les organisations internationales et l'Union européenne » figure, dans le projet annuel de performances pour 2007, le sous-indicateur « taux d'élections remportées par la France ou des français » dont l'objectif était de 100 % en 2006. L'échec de la candidature de M. Bernard Kouchner à la direction générale de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ne permettra pas d'atteindre l'objectif : il importe de tirer les conséquences de l'échec précité pour aborder de meilleure manière l'année 2007... ou fixer un objectif plus réaliste.

2. Aucun indicateur qualitatif ne concerne le réseau

Comme l'an passé, et dans son rapport d'information précité 23 ( * ) , votre rapporteur spécial regrette l'absence d'indicateur qualitatif relatif au réseau diplomatique. Certes, les modalités de contrôle de gestion ne sont pas toutes encore définies. Un chantier informatique est en cours à ce sujet.

Néanmoins, votre rapporteur spécial considère que, puisqu'il est possible d'évaluer l'action politique du département dans une perspective multilatérale, il doit être également possible, en retenant un échantillon représentatif des dix postes les plus importants pour notre diplomatie (Allemagne, Etats-Unis, pays émergents BRIC 24 ( * ) , Afrique du Sud...) de pratiquer pour ces chancelleries le même type de travail d'auto notation que celui décrit plus haut, à partir d'objectifs politiques prédéfinis, et mis en oeuvre sous l'autorité de l'ambassadeur.

3. Un indicateur de réduction du réseau en Europe

En coordination avec les engagements pris dans le contrat de modernisation 2006-2008, le projet annuel de performances affiche un objectif de réduction du nombre d'implantations immobilière, intitulé indicateur de dispersion immobilière. Hors de France, le Quai d'Orsay disposait de 1.313 locations ou propriétés en 2005 : l'objectif est de passer à 1.297 en 2006 et à 1.284 en 2007. S'agissant de l'Union européenne, le nombre d'implantations était de 310 en 2005 : l'objectif est de passer à 304 en 2006 et à 294 en 2007. L'effort de réduction des implantations immobilières, qui cache sans doute une réduction légère du réseau, est plus marqué en Europe, ce qui est cohérent avec les décisions du comité interministériel de l'Etat à l'étranger de faire évoluer le réseau vers les pays émergents.

Les principales observations de votre rapporteur spécial
sur le programme 105 « action de la France en Europe et dans le monde »

- Les conventions internationales, dont l'autorisation de ratification est soumise au Parlement, portant sur l'immobilier à l'étranger doivent comporter une étude d'impact à caractère budgétaire, précisant le coût des travaux éventuellement supportés par la France, les charges d'entretien et de réparation du bâtiment concerné, et les clauses permettant la réversibilité du choix d'implantation.

- Votre rapporteur spécial recommande que chaque projet de loi de ratification d'une convention créant un organisme international comporte une étude d'impact budgétaire affichant le budget prévisionnel de l'organisme créé, et son évolution prévisible.

- Le recrutement de contrats locaux aboutit à des rigidités supérieures à celui de fonctionnaires titulaires, rendant les choix d'implantation de la France à l'étranger difficilement réversibles

- La volonté du Quai d'Orsay d'évaluer le coeur de son action, le traitement des principales crises en fonction des intérêts poursuivis par la France ou les progrès des intérêts français concernant les principaux dossiers européens ou encore les principales négociations dans les enceintes multilatérales en fonction des objectifs poursuivis par la France , mérite d'être encouragée. Cette évaluation est réalisée sous la forme d'une auto notation, sur une échelle de 1 à 5, ce qui paraît pertinent.

- Il doit être également possible, en retenant un échantillon représentatif des dix postes les plus importants pour notre diplomatie (Allemagne, Etats-Unis, pays émergents BRIC, Afrique du Sud...), de pratiquer pour ces chancelleries une auto notation, à partir d'objectifs politiques prédéfinis, et mis en oeuvre sous l'autorité de l'ambassadeur.

- L'objectif pour le « taux d'élections remportées par la France ou des Français » était de 100 % en 2006. L'échec de la candidature de M. Bernard Kouchner à la direction générale de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ne permettra pas d'atteindre l'objectif : il importe de tirer les conséquences de l'échec précité pour aborder de meilleure manière l'année 2007... ou fixer un objectif plus réaliste.

- Les programmes d'invitation de personnalités d'avenir ou de journalistes sont appréciés de manière très positive par les postes à l'étranger. Toutefois, à l'expérience, certains interlocuteurs de votre rapporteur spécial ont pu regretter l'absence de « fongibilité » entre les deux programmes, et leur relatif cloisonnement. En conséquence, votre rapporteur spécial préconise, tout en préservant les deux programmes, et les deux cibles prioritaires pour les invitations, de constituer un guichet unique, qui pourrait être confié à la direction de la communication et de l'information.

* 15 Les caractéristiques des BOP du ministère des affaires étrangères sont les suivantes : il n'y a que des BOP centraux et a contrario aucun BOP déconcentré ; la fonction du BOP consiste à mettre à disposition les crédits vers les UO (centrales ou locales), un seul BOP par programme peut déléguer des crédits aux UO locales. Par ailleurs, les UO locales correspondent à une logique pays.

* 16 Rapport d'information n° 272 (2005-2006).

* 17 Les indemnités des parlementaires européens figurent désormais au sein de la mission « pouvoirs publics ».

* 18 33,1 millions d'euros en 2006.

* 19 En logique analytique, les crédits des actions 5 et 6 sont ventilées entre programmes du ministère des affaires étrangères, y compris le programme 209 de la mission interministérielle « aide publique au développement », pour 148 millions d'euros.

* 20 A l'exception de celle des contributions internationales comme on le verra plus loin.

* 21 Votre rapporteur spécial garde en mémoire l'inertie, pour motifs de complexité juridique, qui a conduit à ne pas céder jusqu'à présent la « maison de France » à Rio de Janeiro, alors que celle-ci est surdimensionnée par rapport aux besoins d'un consulat général et de la mission économique associée, que notre ambassade a été transférée à Brasilia depuis plusieurs décennies et que les coûts de fonctionnement associés au bâtiment sont élevés.

* 22 S'agissant des indicateurs relatifs aux sites internet du ministère des affaires étrangères et au taux de dématérialisation des procédures (dont les objectifs sont très satisfaisants), votre rapporteur spécial renvoie à ses propositions contenues dans son récent rapport d'information n° 10 (2006-2007) : « Ambassades et consulats virtuels. Accroître et diversifier la présence française à l'étranger ».

* 23 Rapport d'information n° 272 (2005-2006). « La LOLF peut-elle produire une modernisation de la gestion des administrations. Le cas des services de l'Etat à l'étranger ».

* 24 Brésil, Russie, Inde, Chine.