M. Denis Badré

II. LE PROJET DE BUDGET DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES POUR 2008

Le projet de budget des Communautés européennes pour 2008 est le deuxième du cadre financier 2007-2013 acté par l'accord interinstitutionnel du 17 mai 2006.

S'il ne modifie pas profondément la structure du budget communautaire, ce cadre se caractérise néanmoins, en dépenses, par la rétrogradation de la PAC au deuxième rang des postes budgétaires et par la montée en puissance des financements orientés vers la réalisation de la stratégie de Lisbonne .

Cadre financier 2007-2013 et budget 2006 - Accord interinstitutionnel du 17 mai 2006

(en millions d'euros, prix 2004)

Crédits d'engagement

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Total

1. Croissance durable

51.267

52.415

53.616

54.294

55.368

56.876

58.303

382.139

1a. Compétitivité pour la croissance et l'emploi

8.404

9.097

9.754

10.434

11.295

12.153

12.961

74.098

1b. Cohésion pour la croissance et l'emploi

42.863

43.318

43.862

43.860

44.073

44.723

45.342

308.041

2. Conservation et gestion des ressources naturelles

54.985

54.322

53.666

53.035

52.400

51.775

51.161

371.344

Dont : Agriculture - Dépenses relatives au marché et aides directes

43.120

42.697

42.279

41.864

41.453

41.047

40.645

293.105

3. Citoyenneté, liberté, sécurité et justice

1.199

1.258

1.380

1.503

1.645

1.797

1.988

10.770

3a. Liberté, sécurité

600

690

790

910

1.050

1.200

1.390

6.630

3b. Citoyenneté

599

568

590

593

595

597

598

4.140

4. L'UE en tant que partenaire mondial

6.199

6.469

6.739

7.009

7.339

7.679

8.029

49.463

5. Administration

6.633

6.818

6.973

7.111

7.255

7.400

7.610

48.800

6. Compensation

419

191

190

800

Total crédits d'engagement

120.702

121.473

122.564

122.952

124.007

125.527

127.091

864.316

En part du RNB

1,10 %

1,08 %

1,07 %

1,04 %

1,03 %

1,02 %

1,01 %

1,05 %

Total crédits de paiement

116.650

119.620

111.990

118.280

115.860

119.410

118.970

820.780

En part du RNB

1,06 %

1,06 %

0,97 %

1 %

0,96 %

0,97 %

0,94 %

1 %

Marge sous plafond

0,18 %

0,18 %

0,27 %

0,24 %

0,28 %

0,27 %

0,30 %

0,24 %

Plafond ressources propres

1,24 %

1,24 %

1,24 %

1,24 %

1,24 %

1,24 %

1,24 %

1,24 %

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

A. LES PRINCIPALES ORIENTATIONS BUDGÉTAIRES EN 2008

1. L'avant-projet de budget 2008 de la Commission, traduction des nouvelles perspectives financières

L'avant-projet de budget de la Commission a été adopté le 2 mai 2007. Il constitue un budget de transition au cours duquel les derniers paiements liés au cadre financier 2000-2006 seront mis en, tandis que monteront progressivement en puissance les programmes du cadrage 2007-2013.

a) Les crédits d'engagement

Les crédits d'engagement s'inscrivent en augmentation de 2 % par rapport au budget 2007, s'élevant à un montant de 129,1 milliards d'euros. Cette augmentation témoigne des nouvelles priorités affichées dans le cadre du cadre financier 2007-2013, que sont l'atteinte des objectifs de la stratégie de Lisbonne , le renforcement de la politique extérieure de l'Union, de sa politique migratoire et de coopération policière et judiciaire . Elles conduisent :

1) à une forte hausse des montants affectés aux sous-rubriques « liberté, sécurité et justice » (+ 10,1 %), « citoyenneté » (+ 10 %) des crédits de la PESC (+ 28,5 %) ;

2) à une augmentation des crédits du 7 ème programme cadre de recherche et de développement (+ 10,7 %) ;

3) à une hausse des dépenses d'administration (+ 5,7 %) liée aux dépenses de pension et au nouveaux recrutement engagés notamment par la Commission (890 postes).

Le budget alloué à Galileo augmente de 51 % (151 millions d'euros) et une marge sous plafond de 330,1 millions d'euros est préservée en vue de financer les interventions au Kosovo et en Palestine .

Par ailleurs, la rubrique « conservation et gestion des ressources naturelles », correspondant à la PAC, voit sa dotation se stabiliser. Les dépenses consacrées à l'emploi et à la croissance priment donc pour la première fois les dépenses agricoles.

b) Les crédits de paiement

Avec un montant de 121,5 milliards d'euros, les crédits de paiement connaissent une hausse importante de 5,2 % , 2008 étant à la fois la dernière année d'exécution des programmes 2000-2006 et le premier exercice de mise en oeuvre des dispositifs du cadre 2007-2013.

En cohérence avec les évolutions constatées pour les crédits d'engagement, les augmentations les plus importantes concernent le 7 ème PCRD (+ 54,5 %), le programme « réseaux de transport transeuropéens » (+ 88,8 %), et les crédits des rubriques « cohésion » (+ 7,5 %) et « actions extérieures » (+ 7,7 %).

2. L'examen par le Conseil et le Parlement

a) Un budget adopté en baisse au Conseil

Dans le projet de budget adopté par le Conseil, les crédits d'engagement ont vu leur montant global diminuer de 717 millions d'euros pour atteindre 128,1 milliards d'euros, soit une hausse par rapport à 2007 limitée à 1,5 %. Ces « coupes » ont prioritairement porté :

- sur les dépenses agricoles (notamment les aides directes et les soutiens aux marchés), pour 553 millions d'euros ;

- sur les dépenses de recherche : le 7 ème PCRD a vu sa dotation amputée de 164 millions d'euros, dans le but d'augmenter la marge sous plafond de la rubrique « compétitivité » et de faire face aux éventuels besoins de financement générés par Galileo et l'Institut européen de technologie (IET) ;

- sur les dépenses d'administration (- 96 millions d'euros).

260 millions d'euros ont enfin été mis en réserve afin de financer les interventions au Kosovo et en Palestine , considérées comme politiquement prioritaires.

De manière analogue, les crédits de paiement voient leur montant baisser de 3,4 %, pour s'établir à 119,4 milliards d'euros. Cette baisse se fonde notamment sur le postulat que les 11 bases légales nécessaires au démarrage des programmes 2007-2013 ne seront pas adoptées début 2008.

b) La recherche et la PESC, points d'achoppement pour le Parlement ?

La commission des budgets du Parlement européen a adopté le 9 octobre 2007 le projet de budget 2008 et porté le total des crédits de paiement à 0,99 % du RNB de l'Union . Ce pourcentage était respectivement de 0,97 % dans l'avant projet de budget de la Commission et de 0,95 % dans le projet de budget du Conseil.

Les principales modifications adoptées par la commission des budgets concernent :

1) le financement de Galileo : les 151 millions d'euros de crédits d'engagements prévus par le Conseil pour ce programme ont été portés à 890 millions d'euros. Les députés réclament par ailleurs une révision du cadre financier pluriannuel pour ce financement, ainsi que pour celui de l'Institut européen de technologie (IET) ;

2) la réduction de 20 % des crédits consacrés à la PESC (rubrique 4) et, en corollaire, le recours à l'instrument de flexibilité à hauteur de 87 millions d'euros pour financer l'aide au Kosovo et à la Palestine ;

3) le quasi doublement du budget de l'agence FRONTEX (gestion des frontières extérieures), porté à 70 millions d'euros, et la mise en réserve de 30 % de ses crédits pour frais administratifs dans l'attente d'informations sur les initiatives prises pour accroître l'efficacité opérationnelle de l'agence.

B. ANALYSE PAR RUBRIQUE BUDGÉTAIRE

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

1. Compétitivité pour la croissance et l'emploi (sous-rubrique 1A)

La sous-rubrique 1A regroupe les politiques de soutien aux objectifs définis par la stratégie de Lisbonne , et notamment le Programme cadre pour la recherche et le développement technologique (PCRD) et le Programme pour l'innovation et la compétitivité.

a) L'exécution en 2006 et 2007

L'exécution 2006 s'est caractérisée par une progression des taux de consommation des crédits d'engagement , à l'exception de la politique de l'énergie (89,2 % contre 94,2 % en 2005). L'exécution des crédits de paiement présente un profil plus contrasté : les politiques de l'énergie, des transports, du marché intérieur, de la formation et de la recherche connaissent une exécution globalement en hausse. Il n'en est pas de même des réseaux transeuropéens (- 1,9 %), de la politique du marché de l'emploi (- 0,6 %) et de la politique de l'information et de la communication (- 3,2 %).

Au premier semestre 2007 :

- les Réseaux transeuropéens, Sécurité nucléaire et Galileo présente des taux d'exécution de crédits d'engagement quasi nuls, en raison des retards pris dans l'adoption des règlements financiers qui les sous-tendent ;

- les volets entrepreneuriat et technologies de l'information du programme pour la compétitivité et l'innovation présentent des taux d'exécution également très faibles (9,5 % et 1,4 %) ;

- ces taux sont en revanche très élevés pour le volet énergie du programme pour la compétitivité et l'innovation (92,8 %), Marco Polo (98 %), et Education tout au long de la vie (75,6 %).

Au 31 juillet 2007, l'encours des restes à liquider (RAL) atteignait 10,75 milliards d'euros pour les principaux programmes de la rubrique.

b) Prévisions pour 2008

L'avant projet de budget 2008 de la Commission prévoit, pour la rubrique 1A, des crédits d'engagement à hauteur de 9,77 milliards d'euros et des crédits de paiement d'un montant de 9,54 milliards d'euros, soit une augmentation respective de 9,6 % et 35,4 % par rapport à 2007 .

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

La hausse des crédits d'engagement concerne surtout Galileo (+ 51 %), les agences décentralisées (+ 23,7 %), les programmes Douanes et fiscalité (+ 17,7 %), RTE (+14 %) et le PCRD (+ 10,7 %). Les plus fortes augmentations en crédits d'engagement sont quant à elles constatées pour le PCRD (+ 54,5 %), RTE (+ 88,8 %), Marco Polo (+ 50 %), Education tout au long de la vie et Erasmus mundus (+ 19,3 %) et les agences décentralisées (+24,9 %).

c) Où en est la politique européenne de recherche ?

Selon votre rapporteur spécial, les dissensions récentes entre institutions sur les dossiers Galileo et IET sont symptomatiques de l'absence de consensus sur ce que devrait être la politique européenne de recherche. En dépit de l'effort consenti à travers la programmation financière 2007-2013, la recherche européenne souffre 7 ( * ) :

1) d'une insuffisance d'investissements financiers : l'intensité de R&D 8 ( * ) de l'UE 25 a diminué de 0,04 % entre 2002 et 2005 pour se chiffrer à 1,85 % du PIB, de même que la part de l'Union à 27 dans l'ensemble des dépenses de R&D mondiales a chuté de 29 % à 25 % en dix ans ;

2) d'une insuffisance de « capital humain » (6 chercheurs pour 1.000 habitants contre 10 aux Etats-Unis), capital par ailleurs concentré dans le recherche publique à 50 %, contre 20 % aux Etats-Unis ;

3) d'une gouvernance fragmentée et insuffisamment coordonnée, ne protégeant pas suffisamment la propriété intellectuelle et ne favorisant pas la mobilité des chercheurs ;

3) d'un positionnement en retrait dans le processus d' internationalisation de la recherche.

A cet égard, le Livre vert de la Commission publié en avril 2007 9 ( * ) a eu le mérite de dégager des orientations encourageantes, visant à réaliser un marché unique pour les chercheurs, développer les infrastructures de dimension mondiale, améliorer l'excellence des institutions, mieux partager les connaissances, optimiser les programmes et priorités de recherche et ouvrir la recherche européenne au monde. Votre rapporteur spécial se félicite que l'espace européen de la recherche figure parmi les priorités définies par le Gouvernement pour la prochaine présidence française de l'Union et suggère que, dans ce cadre, une réflexion approfondie soit menée sur l'articulation, ou l'absence d'articulation, des activités et dispositifs français de recherche avec l'échelon européen. La valeur ajoutée d'une recherche européenne devrait en effet résider dans sa capacité à dégager des synergies entre dispositifs nationaux, et non dans le fait de les doublonner.

2. Cohésion pour la croissance et l'emploi (sous-rubrique 1B)

Second instrument au service des objectifs de la stratégie de Lisbonne et deuxième poste de dépenses du budget communautaire, la politique de cohésion est dotée d'une enveloppe de 347,41 milliards d'euros sur la période 2007-2013 . Cette politique s'articule autour des trois objectifs suivants :

1) « Convergence », au profit des régions dont le PIB par habitant est inférieur de 75 % de la moyenne communautaire 10 ( * ) (81,5 % de l'enveloppe) ;

2) « Compétitivité régionale et emploi », visant à renforcer la compétitivité et l'attractivité des territoires non couverts par l'objectif « Convergence » (16 % de l'enveloppe) ;

3) « Coopération territoriale européenne », nouvel objectif tendant à encourager la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale en matière de recherche, de développement, de société de l'information, d'environnement, de prévention des risques et de gestion intégrée de l'eau (2,5 % de l'enveloppe).

Les instruments financiers au service de ces objectifs ont été simplifiés et font l'objet du tableau qui suit.

a) L'exécution en 2006 et 2007

L'exécution 2006 est marquée par une forte sous-exécution des crédits de paiement (taux d'exécution de 91 %) et des annulations de crédits en cours d'exercice. Cette sous-exécution concerne principalement l'objectif 1 et le Fonds de cohésion et résulte du blocage de demandes de paiement formulées par l'Espagne.

Les mêmes causes pourraient produire les mêmes effets en 2007, s'agissant cette fois d'une demande de paiement du Royaume Uni, dont le blocage affecte l'objectif 2. Par ailleurs, le Fonds de cohésion présente une sous-exécution massive par rapport à 2006 à la même période (60,83 % de crédits exécutés contre 49,45 % en 2006).

b) Prévisions pour 2008

Les crédits d'engagement s'élèvent à 46,89 milliards d'euros dans l'avant projet de budget 2008, soit une augmentation de 3,1 % par rapport à 2007 11 ( * ) .

Les crédits de paiement augmentent de 7,5 %, passant de 37,79 à 40,62 milliards d'euros. Au sein de ce montant, 24,27 milliards d'euros (soit 60 %) correspondent à la mise en oeuvre de la programmation 2007-2013, et 16,35 milliards d'euros (40 %) serviront à épuiser les RAL de la programmation 2000-2006.

Certains Etats membres ayant souhaité une budgétisation « au plus juste » des crédits de la politique de cohésion, le projet de budget du Conseil a porté les crédits de paiement de 40,62 à 40,12 milliards d'euros. Cette diminution se fonde notamment sur le fléchissement constaté de la consommation des crédits des programmes 2000-2006 et sur l'hypothèse que tous les programmes opérationnels ne seront pas adoptés dans les délais.

3. Conservation et gestion des ressources naturelles (rubrique 2)

Cette nouvelle rubrique regroupe les dépenses relatives à la gestion des marchés agricoles, au développement rural, à la pêche et à l'environnement. Elle s'appuie sur cinq fonds dédiés 12 ( * ) .

95 % de l'enveloppe de 404,7 milliards d'euros consacrée à cette rubrique pour 2007-2013 reviennent à la politique agricole commune (mesures de marché et développement rural).

a) Exécution en 2006 et 2007

Le taux d'exécution des crédits disponibles en 2006 atteint 98,6 %. Il résulte toutefois de l'annulation de 780 millions d'euros en budget rectificatif , sans laquelle il serait de 97,6 %, contre 99,1 % en 2005.

Une sous-exécution est attendue en 2007 pour les crédits du deuxième pilier (développement rural), ces crédits n'étant consommés qu'à hauteur de 24 % au 30 juin 2007, faute d'adoption de l'ensemble des programmes. Il n'en sera pas de même des crédits de paiement dévolus aux dépenses de marché et aides directes (premier pilier), dont le taux à la même date avoisinait les 81 %.

b) Prévision pour 2008

L'avant projet de budget 2008 affecte à la rubrique 2 56,275 milliards d'euros de crédits d'engagement et 54,77 milliards d'euros de crédits de paiement, soit une marge sous plafond de 2,527 milliards d'euros , essentiellement imputée sur les aides directes et les dépenses de marché.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

Les crédits d'intervention sur les marchés diminuent de 612 millions d'euros par rapport à 2007, compte tenu des conditions de marché favorables escomptées et des réformes en cours (OCM fruits et légumes, fin des interventions en faveur du maïs, financement des stockages notamment). Les aides directes augmentent en revanche de 334 millions d'euros, consécutivement à l'introduction d'aides en faveur des nouveaux Etats membres et, pour la première fois en 2008, de la Bulgarie et de la Roumanie.

11,382 milliards d'euros sont consacrés au développement rural (+ 4,5 % par rapport à 2007) , dont 82,7 % financeront les nouveaux programmes du FEADER, le solde servant à apurer les RAL issus des lignes budgétaires des programmes 2000-2006.

Votre rapporteur spécial note enfin que l'inscription de la lutte contre le changement climatique parmi les priorités transversales pour 2008 fait passer de 273 à 298 millions d'euros les crédits consacrés à l'environnement (principalement LIFE +), dans le but d'encourager les projets novateurs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de technologies propres, de qualité de l'air et de modélisation de l'impact du changement climatique.

c) Le « bilan de santé » de la PAC

L'année 2008 devrait être celle du « bilan de santé » de la politique agricole commune, c'est-à-dire de l'évaluation des effets produits par la réforme de 2003. Les pistes avancées par Mme Mariann Fischer Boel pour une nouvelle évolution de la PAC devraient être précisées le 20 novembre 2007. Elles concernent la simplification des outils de gestion de marché, l'assouplissement des règles de conditionnalité des aides, l'évaluation du dispositif des quotas laitiers 13 ( * ) et la montée en puissance de la politique de développement rural.

Dans la mesure où le « bilan de santé » pourrait conditionnera vraisemblablement l'avenir de la PAC à l'issue de la programmation 2007-2013, votre rapporteur spécial estime utile de rappeler qu'il convient de préserver une des rares politiques réellement communautaires face aux velléités de renationalisation exprimées par certains Etats membres. Il y a en particulier lieu de contester la logique selon laquelle le démantèlement de la PAC, considérée comme une politique privilégiant indûment la France, constituerait la « monnaie d'échange » de l'abandon du chèque britannique .

Cette approche, qui a sous-tendu les négociations sur les perspectives 2007-2013, pourrait connaître une actualité nouvelle à l'occasion du bilan de santé. Dans ces conditions, votre rapporteur spécial considère que la France doit mettre à profit l'exercice présidence de l'Union au second semestre de 2008 pour influencer les débats.

La pérennité de cette politique passera notamment par une réorientation de ses priorités en direction de la sécurité sanitaire et alimentaire, de la compétitivité de filière agro-alimentaire, de la protection de l'environnement, de la promotion des énergies vertes et du développement rural. Défenseur du rétablissement d'un mécanisme de préférence communautaire , votre rapporteur spécial se félicite en outre de ce que cet objectif figure parmi les principes récemment énoncés par le Président de la République comme devant inspirer la réforme.

4. Les autres rubriques budgétaires

a) Liberté, sécurité, justice

La sous-rubrique 3A voit sa dotation progresser de plus de 160 % de 2007 à 2013 , signe de la priorité accordée à cette politique, et singulièrement à la gestion des flux migratoires. Elle s'articule autour des trois programmes suivants :

1) « Solidarité et gestion des flux migratoires », incluant quatre fonds thématiques gérés de manière décentralisée : les réfugiés, les frontières extérieures, l'intégration et les ressortissants des pays tiers ;

2) « Sécurité et protection des libertés », comprenant deux programmes intitulés « Prévenir et combattre la criminalité » et « Préparation et gestion des conséquences du terrorisme » ;

3) « Justice et droits fondamentaux », regroupant, sans grande cohérence, des actions de la programmation antérieure (justice pénale, justice civile, programme Daphné de lutte contre les violences à l'encontre des enfants et des femmes, prévention de la consommation de drogue et information du public, droits fondamentaux).

L'avant-projet de budget 2008 prévoit une augmentation de 10,8 % des crédits d'engagement et de 4,8 % des crédits de paiement par rapport à 2007. 2008 devrait en outre être la première année de mise en oeuvre du Fonds européen pour le retour , destiné à aider le financement par les Etats membres d'actions dans le domaine du retour (transport, hébergement, accompagnement des personnes en situation irrégulière). Ce fonds est doté de 56 millions d'euros de crédits d'engagement et de 27,3 millions d'euros de crédits de paiement.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

Une fois de plus, le projet de budget adopté par le Conseil s'est appuyé sur une prévision moins « optimiste » de l'état d'achèvement des négociations sur les règlements d'application , et en particulier s'agissant du programme cadre « Solidarité et gestion des flux migratoires ». Les crédits de paiement ont ainsi été réduits de 18,3 millions d'euros et les crédits d'engagement de 4,3 millions d'euros. Ces « coupes » affectent principalement les agences et le programme PRINCE (stratégie d'information pour une meilleure compréhension des actions de l'UE).

b) Citoyenneté

La sous-rubrique 3B ne présente pas de réelle cohérence , sauf à donner au concept de citoyenneté une acception si large qu'il ne fasse plus réellement sens. Elle regroupe ainsi des actions relatives à la culture, la santé, la protection des consommateurs, la jeunesse, les médias, ou la communication de la Commission.

Dans l'avant-projet de budget, à périmètre constant 14 ( * ) , les crédits d'engagement augmentent de 10 % et les crédits de paiement de 11,1 % par rapport à 2007. Le projet de budget du Conseil réduit respectivement ces progressions à + 7,7 % et + 1,2 %, en procédant à des réductions portant principalement sur les agences.

c) Actions extérieures

La rubrique 4 regroupe les actions extérieures de l'Union et s'appuie principalement sur cinq instruments financiers (cf. tableau).

Références de différents textes adoptés avec, pour chaque instrument, les objectifs qui lui ont été assignés

Nom de l'instrument

Texte réglementaire

Objectifs de l'instrument

Instrument d'aide de pré-adhésion (IPA)

Règlement CE
n° 1085/2006 du Conseil du 17 juillet 2006

- Pays concernés : candidats (Turquie, Croatie, ancienne République yougoslave de macédoine (ARYM)) et candidats potentiels (Serbie. Monténégro, Bosnie-Herzégovine, Albanie) ;

- Soutenir un éventail large de mesures de renforcement des institutions : renforcer les institutions démocratiques et l'Etat de droit, entreprendre une réforme de l'administration publique, procéder à des réformes économiques, promouvoir le respect des droits de l'homme et des minorités, favoriser l'égalité entre les sexes, soutenir le développement de la société civile et promouvoir la coopération régionale ainsi que la réconciliation et la reconstruction, contribuer au développement durable et à la réduction de la pauvreté.

Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP)

Règlement CE
n° 1638/2006 du Parlement européen
et du Conseil
du 24 octobre 2006

- Fournir une assistance communautaire en vue de l'établissement d'une zone de prospérité et de bon voisinage couvrant l'Union européenne ainsi que les pays et territoires partenaires ;

- Promouvoir la coopération transfrontalière et transrégionale ;

- Soutenir les valeurs de liberté, de démocratie, de respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'Etat de droit auprès des pays voisins au travers du dialogue et de la coopération.

Instrument financier pour la promotion de la démocratie et des droits de l'homme (IDDH)

Règlement CE
n° 1889/2006 du Parlement européen
et du Conseil
du 20 décembre 2006

- Renforcement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, renforcement et promotion de la démocratie et des réformes démocratiques dans les pays tiers, soutien aux défenseurs des droits de l'homme et aux victimes de la répression ou d'exactions, renforcement de la société civile qui oeuvre dans le domaine de la promotion des droits de l'homme et de la démocratie ;

- Soutien et renforcement du cadre international et régional qui oeuvre dans ce domaine ;

- Promotion de la confiance dans les processus électoraux, en renforçant leur fiabilité, au moyen notamment de missions d'observation électorale et du soutien aux organisations de la société civile locale impliquées dans ces processus.

Instrument de financement de la coopération au développement (ICD)

Règlement CE
n° 1905/2006 du Parlement européen
et du Conseil
du 18 décembre 2006

- Atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement ;

- Eradiquer la pauvreté dans les pays et régions partenaires dans le cadre du développement durable ;

- Promouvoir la démocratie, la bonne gouvernance, le respect des droits de l'homme et l'Etat de droit ;

- 90% des dépenses prévues dans le cadre de l'ICD devront satisfaire aux critères applicables à l'aide publique au développement (APD).

Instrument de stabilité (IdS)

Règlement CE
n° 1717/2006 du Parlement européen
et du Conseil
du 15 novembre 2006

- Garantir des conditions stables pour le développement humain et économique, et la promotion des droits de l'homme, de la démocratie et des libertés fondamentales ;

- Réagir à des situations d'urgence, de crise ou de crise émergente, constituant une menace pour la démocratie, l'ordre public, la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou la sécurité et la sûreté des personnes, ou à une situation menaçant d'évoluer en conflit armé ou de déstabiliser gravement le ou les pays tiers concernés ;

- Permettre la mise en oeuvre des politiques de coopération de la Communauté dans les pays tiers.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

Dans l'avant projet de budget 2008, les crédits d'engagement augmentent de 1,4 % par rapport à 2007 . Des hausses très importantes sont en particulier constatées au profit de l'assistance macroéconomique (+ 58,1 %), de l'instrument de stabilité (+ 28,7 %) et de la PESC (+ 25,8 %). Les crédits de paiement progressent de 7,7 % et cette progression bénéficie peu ou prou aux mêmes instruments.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

Le projet de budget du Conseil maintient une hausse des crédits de paiement de l'ordre de 2,7 %. Les crédits d'engagement sont fortement majorés. En effet, le Conseil a souhaité manifester l'importance qu'il attachait aux interventions en Palestine et au Kosovo en mettant en réserve 260 millions d'euros à leur profit et en réduisant à due concurrence la marge sous plafond laissée par la Commission.

d) Dépenses administratives

La rubrique des dépenses administratives comprend les crédits de fonctionnement des sept institutions européennes et les dépenses afférentes aux agences.

Les perspectives financières ont fixé le plafond de la rubrique 5 sur la période à 50,3 milliards d'euros en prix constants de 2004, dont 60 % de dépenses de personnel. Les pensions connaissent une progression dynamique, et la charge des retraites devrait doubler d'ici 2020.

L'avant projet de budget de la Commission prévoit une augmentation de 5,7 % des crédits d'engagement et de paiement, correspondant notamment à la création de 890 postes à la Commission, consécutivement à l'élargissement 15 ( * ) . Cette progression est ramenée à + 3,6 % dans le projet de budget.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

* 7 Cf. Jean-Louis Sangaré, Jean-Loup Loyer, « Un espace européen de recherche compétitif au service de la société européenne », Note de veille 76, Centre d'analyse stratégique, 8 octobre 2007.

* 8 Soit la part de PIB consacrée à la recherche.

* 9 L'espace européen de la recherche : de nouvelles perspectives.

* 10 Un régime transitoire dégressif dit de « phasing out » est en outre prévu pour les régions qui auraient été éligibles à l'aide si le seuil était resté fixé à 75 % du PIB moyen de l'UE-15.

* 11 Pour cette rubrique, les crédits d'engagement sont votés à hauteur du montant inscrit dans les plafonds déterminés par les perspectives financières. Cette exception est la contrepartie de la règle du dégagement d'office, qui veut que la part d'un engagement qui n'a pas été réglée par un acompte ou pour laquelle aucune demande de paiement recevable n'a été présentée à la Commission à l'issue de la deuxième année d'engagement est dégagée d'office.

* 12 Le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) pour les dépenses relatives au marché agricole, le Fonds européen de développement agricole et rural (FEADER) pour le développement rural, le Fonds européen de la pêche (FEP) pour le secteur de la pêche, le second instrument financier pour la pêche (actions de contrôle et accords internationaux) et l'instrument financier pour l'environnement (LIFE+) pour les actions environnementales.

* 13 Dont l'expiration est prévue en 2014.

* 14 C'est-à-dire compte tenu de la facilité transitoire en faveur de la Roumanie et de la Bulgarie et des dépenses effectuées au titre du Fonds de solidarité de l'Union européenne.

* 15 640 postes pour les Etats de l'UE-10 et 250 postes pour la Bulgarie et la Roumanie.