D. L'AMBIGUÏTÉ DES MISSIONS EFFECTIVEMENT EXERCÉES

Selon la loi du 16 octobre 1997, seules peuvent donner lieu à la conclusion des contrats emplois-jeunes " les activités créatrices d'emplois répondant à des besoins émergeants ou non satisfaits et présentant un caractère d'utilité sociale, notamment dans les domaines des activités sportives, culturelles, éducatives, d'environnement et de proximité ".

Pour pouvoir bénéficier de l'aide, l'employeur doit passer avec l'Etat, avant la signature du contrat, une convention pluriannuelle précisant notamment les activités créées. Le préfet décide alors de signer -ou non- la convention, après avoir vérifié la compatibilité entre le projet soumis et les activités prévues par la loi.

1. Des activités parfois en contradiction avec la loi

Or, il semble que les activités exercées par les emplois-jeunes ne correspondent pas toujours, loin s'en faut, aux exigences posées par la loi.

On distingue en effet deux types de dérives.

a) Les " coquilles vides "

Il semble d'abord que certains emplois-jeunes n'exercent en définitive aucune réelle activité. Leur emploi se résume alors à une simple " coquille-vide ".

C'est notamment le cas dans certaines entreprises publiques ou certaines collectivités locales où le recrutement de nombreux emplois-jeunes reposait avant tout sur le souci de " faire du chiffre " sans avoir pourtant de réel besoin à satisfaire.

b) Les " emplois de substitution "

A l'inverse, d'autres emplois-jeunes exercent une réelle activité professionnelle, sans pour autant que celle-ci corresponde effectivement à des " besoins émergents ou non satisfaits ".

Deux études mettent en lumière de telles pratiques.

Une enquête du CREDOC 9 ( * ) montre qu'à la question " avant l'arrivée de l'emploi-jeune, une autre personne exerçait-elle des tâches proches de celles occupées par les jeunes ? " , 39 % des employeurs de l'Education nationale, 90 % des employeurs de la Police nationale, 29 % des collectivités territoriales, 46 % des établissements publics et 56 % des associations répondent par l'affirmative.

Un sondage de la SOFRES 10 ( * ) montre, lui, qu'à la question " une autre personne assurait-elle vos activités avant votre arrivée ? " , 21 % des emplois-jeunes de l'Education nationale, 46 % de ceux de la Police nationale, 37 % de ceux des collectivités locales, 34 % de ceux des établissements publics et 42 % de ceux des associations répondent par l'affirmative.

Ces " emplois de substitution " peuvent prendre une triple forme.

D'abord, il peut simplement s'agir d'emplois existants mais " relookés " sous une appellation nouvelle : agent de médiation, animateur en nouvelles technologies, agent du cadre de vie. En définitive, il s'agit alors ni plus ni moins de surveillants ou de contrôleurs, d'informaticiens et de cantonniers.

Ensuite, l'activité affichée est souvent factice, l'emploi-jeune exerçant d'autres fonctions que celles prévues par la convention et qui sont généralement déjà existantes. L'effet d'aubaine joue ici à plein, l'employeur embauchant au SMIC avec l'aide de l'Etat un salarié pour un emploi souvent très qualifié.

Enfin, l'emploi-jeune peut constituer une " solution de dépannage " une alternative à la création d'emplois statutaires.

A titre d'exemple, on rappellera que l'Etat a approuvé, par lettre du 11 février 2000, la décision de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) d'embaucher 500 emplois-jeunes pour assurer le traitement des dossiers des assurés sociaux afin de compenser les effets de la mise en place de la CMU.

Votre commission ne peut que regretter ces dérives, liées à l'incontestable effet d'aubaine que représentent les emplois-jeunes. Et elle déplore plus encore que l'Etat cautionne, voire accompagne, ces pratiques.

* 9 Enquête du CREDOC menée en 1998 par entretien en face à face avec 412 employeurs.

* 10 Sondage de la SOFRES mené en 1998 par entretien téléphonique avec 2.000 emplois-jeunes.

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