MERCREDI 14 JUIN 2000

---

I. Audition de Mme Catherine Barbaroux,
Déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle

Le programme emplois-jeunes arrive maintenant dans une phase de professionnalisation et de pérennisation des activités. Près de 145.000 embauches ont été réalisées hors Education nationale. La pérennisation s'inscrit en fait dans une double perspective : il s'agit, d'une part, de maintenir des jeunes dans l'emploi et, d'autre part, de poursuivre les activités à l'avenir. Les deux approches convergent, mais ne se recouvrent pas entièrement : certains jeunes pourraient changer de statut et devenir des salariés ou des agents publics tandis que d'autres jeunes pourraient accéder aux emplois-jeunes pérennisés.

Un gros effort a été fait pour permettre à ces jeunes d'intégrer le marché du travail grâce à des formations adaptées et à la reconnaissance de leurs compétences professionnelles. Il convient toutefois de rappeler que le programme était ouvert à l'ensemble des jeunes sans condition de diplôme ou d'ancienneté dans le chômage ; son principal mérite a donc été de réinsérer des jeunes sur le marché du travail afin de leur donner une première expérience.

Les formations dispensées ont bénéficié de l'expérience de plusieurs organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), d'un effort des régions et d'un financement du fonds social européen (FSE). Le problème principal aujourd'hui consiste à organiser la formation des jeunes travaillant dans des petites structures. Compte tenu de la difficulté à territorialiser les politiques de l'emploi, l'enjeu réside avant tout dans le renforcement du maillage associant les différents intervenants, notamment dans le domaine public. Une circulaire du 30 mai 2000 prévoit à cet égard les modalités de mise en place de plans de formation.

Une trentaine de métiers pouvant être pérennisés a été identifiée. Ils sont soit spécifiques, soit transversaux. Il s'agit maintenant d'intégrer ces métiers dans des conventions collectives. Un dialogue devrait être ouvert à la rentrée avec les partenaires sociaux à ce sujet.

Le tutorat a joué un rôle particulier pour structurer les activités et inscrire durablement ces jeunes dans l'emploi. Sa mise en place a souvent fait l'objet d'une coopération étroite avec l'ANPE et l'AFPA.

La mise en commun des expériences afin de " capitaliser les bonnes pratiques " a mis du temps à se mettre en place. On note aujourd'hui des progrès sensibles grâce notamment à l'utilisation du réseau internet qui permet des échanges fructueux et la constitution d'une base de référence.

La question de la pérennisation des emplois ne se pose pas de la même façon pour l'ensemble des employeurs. Les grandes entreprises publiques ont toutes fait part de leur intention d'intégrer les jeunes de manière définitive. La situation est plus contrastée dans les collectivités locales où le sentiment de concurrence avec le personnel statutaire est plus prononcé.

Il convient aujourd'hui de ne pas assimiler automatiquement la professionnalisation à la question de la formation. En effet, dans nombre de cas, le besoin est avant tout celui d'un bilan de compétences et d'un renforcement de l'expérience professionnelle plutôt que du développement d'un surcroît de connaissances théoriques. A cet égard, la mise en place d'une attestation d'emploi s'est avérée particulièrement utile et a permis la pérennisation dans l'emploi de 50 % des emplois-jeunes, soit 65 % des jeunes entrés dans le programme depuis 1997 compte tenu des taux de départs. On peut observer que l'Éducation nationale a développé des actions conjointes avec de grandes entreprises privées comme ACCOR et VIVENDI afin d'organiser la " migration " de certains aides éducateurs vers le privé.

Il est devenu nécessaire aujourd'hui d'établir une " contrainte de créativité " à l'endroit des employeurs afin d'accompagner la sortie du dispositif avant d'envisager, le cas échéant, des mécanismes particuliers d'ordre financier permettant de solvabiliser les employeurs ou des délais supplémentaires permettant d'accompagner l'évolution de ces activités.

Il est clair aujourd'hui que nombre d'activités ont trouvé leur place dans la société ; on ne peut imaginer qu'on puisse y renoncer. Le problème est toutefois délicat en ce qui concerne les collectivités locales. Il apparaît que, compte tenu des tensions sur le marché du travail, de nombreuses branches professionnelles seraient prêtes à puiser dans " le vivier " des emplois-jeunes pour pourvoir à leurs besoins de recrutement en proposant, par exemple, des contrats de qualification. Des dispositions spécifiques d'accompagnement pourraient tout à fait compléter cette démarche afin de favoriser la mobilité géographique de ces jeunes ou encore l'accession à un logement indépendant.

Les emplois-jeunes bénéficient de l'assurance chômage lorsqu'ils sont embauchés par une association ; tel n'est pas le cas en revanche, lorsque l'emploi-jeune relève d'une collectivité locale ou d'un établissement public, sauf si l'organisme concerné a décidé d'assurer par lui-même l'ensemble de son personnel non statutaire. Une solution devra être trouvée avec l'UNEDIC. Le Gouvernement a fait des propositions qui devraient pouvoir être acceptées par cet organisme.

La sortie du programme emplois-jeunes demande aujourd'hui de privilégier des mesures qualitatives afin de proposer des solutions " sur mesure " aux jeunes et de permettre la pérennisation des activités qui ont démontré leur utilité.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page