2. Les moyens d'un changement encore sous contrainte

Investi de la totalité des pouvoirs dont disposait son père, le nouveau chef de l'Etat est désormais appelé à apporter sa marque propre aux destinées de son pays. Quelles seront les orientations du nouveau président ? Il est encore sans doute trop tôt pour le dire.

En outre, Bachar a jusqu'à présent privilégié la réflexion avec ses plus proches collaborateurs, aux déclarations publiques. Par ailleurs, les instances de décision ont toujours été caractérisées, en Syrie, par une certaine opacité. Dès lors, il n'est pas toujours aisé d'interpréter les initiatives de la présidence. Pour éclairer l'avenir, il est toutefois possible de retenir les éléments suivants.

a) Une image de modernisateur

En premier lieu, le nouveau chef de l'Etat a incontestablement une image de modernisateur. Il est l'un des rares dirigeants à avoir séjourné durablement en occident. Par ailleurs, il s'est forgé une image positive en luttant contre la corruption. Enfin, sa jeunesse lui permet d'incarner les aspirations d'une population âgée, pour les deux tiers, de moins de 35 ans. Il est donc possible de créditer le nouveau président d'une volonté de réformes. Le ministre d'Etat au plan a d'ailleurs indiqué à votre délégation qu'il avait eu avec le chef de l'Etat de longs entretiens consacrés à la réforme de la planification et au développement économique du pays.

Cependant, dans ses déclarations publiques, encore peu nombreuses, le chef de l'Etat s'est montré soucieux d'inscrire son action dans la continuité des orientations fixées par son père. Il n'y a donc pas encore de " discours de la réforme ".

b) Un renouvellement partiel de la classe politique

La mise en oeuvre d'une politique de réformes dépend, pour une large part, du soutien qui pourrait lui être apporté par la classe dirigeante. Aussi n'est-il pas indifférent, à cet égard, de prendre en considération les changements intervenus dans la classe politique au cours de la période récente. Le renouvellement est intervenu, dès le printemps dernier, avec la désignation d'un nouveau premier ministre, M. Moustapha Miro. Après le décès du président Hafez al-Assad, la réunion du congrès du Baas a permis le renouvellement de la moitié des 21 membres de la direction régionale et la désignation, au sein de cette instance, de personnalités telles que le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères.

Par ailleurs, plus des deux tiers des membres du comité central n'ont pas été reconduits dans leurs fonctions. Le poids des militaires au sein du parti a cependant été préservé (ils représentaient près d'un tiers des 950 délégués au Congrès) et il a même été légèrement renforcé au Comité central où leur nombre est passé de 10 à 16.

Deux considérations conduisent cependant à tempérer la portée de ce renouvellement. En premier lieu, le nouveau chef de l'Etat n'a pas modifié son gouvernement. Certes, celui-ci avait été formé au mois de mars 2000. Mais à l'exception du premier ministre, M. Mohamed Miro, ancien gouverneur d'Alep et considéré comme un bon connaisseur de l'économie, il n'avait intégré que peu de personnalités nouvelles.

En outre, les réformes de caractère politique pourraient impliquer un partage des responsabilités et la remise en cause de certains avantages ou rentes de situation. Or, le nouveau chef de l'Etat doit encore conforter son pouvoir et il n'a pas d'autre alternative, pour l'heure, que de s'appuyer sur les soutiens traditionnels du régime mis en place par son père.

Il semble d'ailleurs que la campagne contre la corruption, conduite à l'initiative de M. Bachar al-Assad, alors qu'il n'était pas encore parvenu au pouvoir, marque aujourd'hui le pas.

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