II. L'ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE

La délégation a ensuite été saisie de la proposition de loi n° 258 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, à l'initiative de Mme Catherine Génisson et plusieurs de ses collègues, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

La saisine est intervenue le 15 mars 2000 par lettre du président de la commission des Affaires sociales.

Sur le rapport de M. Gérard Cornu, la délégation a adopté le 17 mai 2000 les recommandations suivantes :

" - Constatant que la loi Roudy a été peu ou mal appliquée, votre délégation s'interroge sur l'opportunité de légiférer à nouveau sur l'égalité professionnelle alors même que celle-ci doit être prochainement examinée dans le cadre paritaire de la " refondation sociale ". Estimant que les partenaires sociaux disposent d'ores et déjà, en la matière, d'un arsenal législatif et réglementaire assez complet, elle regrette qu'ils n'y recourent pas suffisamment et observe à cet égard qu'aucune législation nouvelle ne saurait être efficace si elle n'est pas " prise en charge " et utilisée par ses bénéficiaires.

Toutefois, considérant que l'Etat doit être tout particulièrement exemplaire dans le domaine de l'égalité professionnelle, votre délégation se félicite que la proposition de loi de Mme Catherine Génisson traduise le souci d'aligner ses obligations sur celles des entreprises.

- Votre délégation n'est pas hostile à l'idée d'assortir d'une sanction l'obligation de négocier sur l'égalité professionnelle, mais elle est tout à fait défavorable à l'application d'une sanction pénale, jugeant peu pertinent de chercher à faire progresser l'égalité professionnelle par l'instauration de nouveaux délits. Elle estime en outre qu'il serait sans doute opportun de retenir un mécanisme de sanctions progressif.

- Votre délégation prend acte des dispositions de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson tendant à accroître la présence des femmes dans les jurys de concours, tout en n'étant pas convaincue que cette féminisation puisse être regardée comme une garantie absolue au regard de la valorisation recherchée des jeunes filles.

Extrêmement favorable à la mixité des métiers et des professions, elle préconise de faire porter l'effort sur l'orientation scolaire et universitaire des filles afin d'améliorer l'adéquation de leur formation aux débouchés du marché du travail et d'accroître leur présence dans des filières aujourd'hui " monopolisées " par les garçons. Elle croit particulièrement utile de dénoncer à cet égard le déséquilibre observé dans des filières d'avenir comme celles des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

- Il paraît indispensable à votre délégation de s'interroger davantage sur le poids des arbitrages que les jeunes filles sont amenées très tôt à faire entre la vie professionnelle et les perspectives de la vie familiale.

La principale source d'inégalité professionnelle entre les deux sexes est, en effet, pour les femmes, la contrainte du temps. Elle rend moins disponible, restreint les possibilités de formation, freine la mobilité, et, partant, interdit souvent la promotion. Beaucoup des problèmes posés dépassent largement le champ de la loi ou du règlement et sont d'ordre culturel. Il en est ainsi, notamment, du " rapport à l'enfant " qui, dans ses répercussions en termes d'organisation, n'apparaît pas le même pour la mère et pour le père.

Qu'il s'agisse d'aides matérielles ou d'organisation du travail, votre délégation considère qu'au-delà de l'amélioration des dispositifs existants, il convient d'être inventif, toutes les solutions n'ayant pas été, selon elle, explorées. Plus généralement, elle souhaite voir réexaminer la politique familiale dans le sens d'une meilleure prise en compte de l'objectif de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Le but doit être de donner aux femmes tous les moyens d'exercer un libre choix : choix de travailler, choix du métier, choix en outre, pour celles qui le souhaitent, de l'engagement politique ou syndical.

- Votre délégation souhaite que l'on améliore la protection juridique, sociale et financière des conjoints de travailleurs indépendants, en privilégiant autant que faire se peut l'approche globale, préférable à un traitement catégoriel qui peut être générateur d'inégalités entre les intéressés.

Elle estime en outre nécessaire d'améliorer l'information de ces conjoints en matière statutaire. Elle suggère à cette fin la mise en place d'une campagne de médiatisation en direction des couples de commerçants et d'artisans.

- Votre délégation est favorable à la reprise de la suggestion du rapport Génisson visant à moduler les crédits de formation accordés par l'Etat aux syndicats en fonction de la prise en compte de l'objectif de mixité.

- Enfin, et peut-être surtout, votre délégation recommande que les femmes puissent bénéficier d'une représentation dans les comités d'entreprise proportionnelle à leur effectif dans l'entreprise. Une " juste représentation " des femmes dans ces instances, comme celle que garantit par exemple la loi allemande de 1972 sur l'organisation interne de l'établissement, serait de nature à faire davantage prendre en compte leurs préoccupations dans le cadre de l'entreprise, à mieux faire appliquer la législation sur l'égalité professionnelle et à enrichir le dialogue social ".

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