II. UN CALIBRAGE DES SUBVENTIONS DICTÉ PAR DES IMPÉRATIFS POLITIQUES

A. AMORTIR LE CHOC POLITIQUE DE LA CRÉATION DE LA TGAP

Pour une part, l'excédent de crédits pour l'ADEME a correspondu à la volonté du ministère de l'environnement d'apaiser les parlementaires, échaudés par la création de la TGAP, les risques que courraient alors les redevances des agences de l'eau et la décision de l'ADEME d'abaisser le barème de ses aides aux collectivités locales.

Votre rapporteur spécial  estime donc que le maquillage budgétaire qu'il a constaté s'agissant des subventions votées par le Parlement pour l'ADEME s'explique notamment par la volonté pour le gouvernement de justifier l'augmentation de la taxe sur les déchets et la baisse des subventions de l'ADEME aux collectivités locales en matière de déchets ménagers : il fallait en effet faire apparaître en contrepartie de ces deux décisions, des masses de projets à financer et donc un financement " à la hauteur ".

C'est donc ici aussi une volonté d'affichage politique qui a prévalu sur le principe de sincérité et de bonne information de la représentation nationale.

B. GÉRER AU MIEUX LES AFFICHAGES D'AUGMENTATION DU BUDGET DE L'ENVIRONNEMENT

Votre rapporteur spécial estime que l'augmentation continue des crédits du budget de l'environnement s'inscrit moins dans une logique d'action en faveur de l'environnement que dans une logique de pouvoir et d'affirmation au sein du gouvernement du poids d'une composante de la " majorité plurielle ".

Les crédits consacrés au budget de l'environnement apparaissent en augmentation constante depuis trois ans, grâce au transfert vers ce budget de crédits existants :

- l'ADEME en 1999 et 2000 (+ 1,4 milliard de francs en remplacement de taxes affectées versées au budget général puis au FOREC),

- le Fonds national de solidarité pour l'eau (FNSE) en 2000 et 2001 (+ 500 millions de francs en provenance des agences de l'eau),

- l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) en 2001 (+ 1,3 milliard de francs en provenance du ministère de l'industrie).

Lorsque le budget de l'environnement augmente de cette façon, par simple transfert, le gain pour l'environnement est nul : l'augmentation des crédits n'est que pur affichage politique.

La gestion de la subvention du budget de l'environnement à l'ADEME s'inscrit dans ce contexte de recherche d'effets d'affichage de progression du budget de l'environnement.

Evolution des crédits de l'ADEME inscrits au budget de l'environnement (1996-2001)

Crédits votés (en millions de francs)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Chapitre 44-20 - Article 20
Soutien à l'ADEME

30

14

6,5

151,5

161,5

171,5

Chapitre 67-30 *
ADEME C.P.

15

104,9

90,1

1 682

1 717,6

491,7

Chapitre 67-30 *
ADEME A.P.

3

112

52

1 688

2 221,4

1 951,4

* au chapitre 67-20 - art. 50 avant 1999 ; en 1999, la subvention compensatrice a justifié la création d'un chapitre exclusivement dédié aux dépenses d'intervention de l'ADEME.

Or, si les dépenses de l'ADEME avaient été correctement évaluées, le profil du budget de l'environnement aurait été tout autre.

Le budget de l'environnement en 1999 et 2000, avec et sans évaluation correcte des crédits d'intervention de l'ADEME

(en millions de francs)

1999

2000

Budget de l'environnement hors ADEME (1)

2.275

Budget de l'environnement hors ADEME (1)

2.585

CP ADEME budgétés (2)

1.682

CP ADEME délégués (3)

789

CP ADEME budgétés (2)

1.718

CP ADEME délégués (3)

510

TOTAL (1) + (2)

3.957

TOTAL (1) + (3)

3.064

TOTAL (1) + (2)

4.303

TOTAL (1) + (3)

3.095

On remarque ainsi dans le tableau ci-dessus que le budget annoncé du ministère de l'environnement pour 2000 aurait été inférieur de plus de 28 % aux chiffres annoncés si la prévision des dépenses de l'ADEME avait été " parfaite ". Choisir une prévision réaliste pour 2000 aurait été bien gênant pour le ministère de l'environnement, soucieux de donner chaque année l'image d'une progression implacable : une correction simplement en 2000 aurait provoqué une diminution des crédits totaux du ministère de l'ordre de 22 % par rapport à 1999.

Dans ces conditions, la " remise à niveau technique " de 2001 s'est fort opportunément accompagnée pour le ministère d'un transfert de crédits en provenance du budget de l'industrie, celui de l'IPSN, à hauteur de 1,3 milliard de francs.

Votre rapporteur estime bien évidemment que la prévision " parfaite " est irréaliste, compte tenu de la marge de souplesse positive qu'il convient de laisser à l'établissement. Néanmoins, il considère qu'une marge de manoeuvre (ou d'erreur ?) de plus de 80 % est disproportionnée et ressort peut-être d'une tentative d'habillage budgétaire.

* *
*

Pour votre rapporteur spécial, la sous-consommation chronique des crédits de paiement de l'ADEME mise en évidence en 1999 et 2000 traduit une surévaluation ex ante des crédits de paiement par volonté d'affichage politique sans souci de sincérité budgétaire.

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