II. UNE ÉCONOMIE ÉMERGENTE ENCORE EN CONVALESCENCE

A. UNE GESTION ORIGINALE DE LA CRISE

1. L'instauration d'un contrôle des changes et des capitaux

Après une année 1997 pendant laquelle la croissance économique était restée soutenue, la Malaisie a subi en 1998 les effets de la crise asiatique, qui a entraîné la chute des cours de bourse , la dépréciation de la monnaie nationale -le ringgit- et une contraction du PIB (- 7,5 %) , contrastant avec les très forts taux de croissance enregistrés pendant la précédente décennie (de l'ordre de 8 % par an en moyenne).

Le " choc externe " qu'a constitué cette crise, via l'effondrement du commerce intra-asiatique, a d'autant plus affecté l'économie malaisienne que celle-ci est particulièrement ouverte et tournée vers l'Asie du Sud-Est.

Au début de la crise, la Malaisie a appliqué une politique macro-économique proche de celle suivie dans les pays voisins (hausse des taux d'intérêt notamment). Mais elle s'est toutefois singularisée, dès août 1997, en limitant certaines opérations bancaires transfrontalières , et surtout, en septembre 1998, en instaurant un contrôle des changes et des capitaux visant à empêcher les transactions en ringgits malaisiens sur les places financières extérieures et à limiter les possibilités de sortie de capitaux :  un délai d'un an a été imposé avant que les investisseurs étrangers ne puissent rapatrier leurs fonds. Ces mesures ont été assouplies en février 1999, puis, de nouveau en septembre 1999 (l'interdiction de rapatriement des investissements de portefeuilles étrangers a été remplacée par une taxe au taux unifié de 10 %), sans provoquer de véritable fuite des capitaux. L'analyse faite par le gouvernement malaisien était, en effet, que la crise avait été causée par une absence de contrôle des mouvements de capitaux de court terme.

Parallèlement, les autorités ont arrimé le ringgit au dollar en définissant une parité fixe 21 ( * ) . L'objectif était d'enrayer la dépréciation du ringgit. La fixation de cette parité a permis à la Malaisie de faire baisser librement les taux d'intérêt (de 11 % à 5,5 %) et ce, afin de favoriser l'investissement et la consommation, dans un contexte de politique budgétaire expansionniste.

Cette stratégie d'isolement monétaire, initialement critiquée par les institutions internationales, n'a pas été dépourvue d'effets : le risque d'une éventuelle dépréciation incontrôlée de la monnaie a été écarté, en raison notamment de la quasi-disparition des transactions spéculatives qui s'opéraient auparavant sur les places financières " offshore " ; parallèlement, si les performances économiques se sont avérées globalement comparables à celles du reste de la zone, la Malaisie semble avoir évité une aggravation trop forte du chômage (300.000 chômeurs supplémentaires ont toutefois été enregistrés).

La Malaisie s'est donc illustrée par l'adoption d'une voie originale -ouvertement opposée à celle préconisée par certaines institutions financières comme le Fonds monétaire international- pour sortir de la crise . Au lieu de la mise en place d'une politique économique orthodoxe (basée sur la réduction des déficits publics et la hausse des taux d'intérêts), le gouvernement malaisien a privilégié la poursuite de ses propres objectifs économiques et sociaux (notamment au travers d'une politique budgétaire expansionniste).

Les exportations ont, en outre, bénéficié de la parité de change imposée -surtout depuis le début de 1999- puisque la réévaluation des monnaies asiatiques observée depuis lors a entraîné, de fait, une dévaluation relative du ringgit malaisien estimée entre 8 % et 13 %.

Cette politique de change et de contrôle des capitaux pourrait être, d'après les déclarations des autorités malaisiennes, assouplie dès que les réserves de change auront atteint le niveau estimé suffisant à la défense du ringgit sur les marchés de capitaux internationaux.

* 21 Un dollar américain pour 3,8 ringgits.

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