Rapport d'information n° 369 (2000-2001) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 12 juin 2001

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N° 369

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 12 juin 2001

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le débat d'orientation budgétaire pour 2002 ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Politique économique.

INTRODUCTION

Le débat d'orientation budgétaire doit être un moment privilégié pour la représentation nationale lui permettant de porter un regard rétrospectif sur l'évolution des finances publiques mais aussi, et surtout, de s'interroger sur la cohérence et la pertinence des orientations présentées par le gouvernement en matière budgétaire, sociale et fiscale.

Or ces orientations sont marquées pour 2002 et les années suivantes par de nombreuses incertitudes, qu'il s'agisse des conditions de la croissance, ou du contenu de la politique budgétaire que le gouvernement déclare vouloir appliquer.

Votre commission s'interroge tout d'abord sur l'impact qu'aura sur la croissance de notre économie le ralentissement enregistré aux Etats-Unis, et dont le gouvernement semble n'avoir tenu compte que de façon partielle.

De la même façon, le cap vertueux en apparence pour les finances publiques, qui a été tracé dans le programme pluriannuel pour les années 2002-2004 transmis aux instances communautaires, semble de plus en plus difficile à tenir au vu des engagements de dépenses qui s'accumulent, au premier rang desquels figurent tant la pérennisation des emplois-jeunes, que la politique suivie dans la fonction publique, ou le financement « acrobatique » des 35 heures.

Ainsi, les engagements pris, tant en matière de réduction du déficit budgétaire que de limitation du poids de l'endettement public, et en premier lieu des 4.500 milliards de francs de dette de l'Etat, apparaissent d'autant moins tenables que la procédure d'attribution des licences de téléphonie mobile UMTS ne peut plus se dérouler dans les conditions prévues initialement.

Face à la montée de ces aléas et aux « non-choix » du gouvernement qui a bénéficié d'une bonne conjoncture économique mais qui, faute de réformes structurelles, contribue à perpétuer « l'exception française » marquée par un niveau historiquement élevé des prélèvements pesant sur les Français, une absence de maîtrise de la dépense et un déficit insuffisamment contrôlé, votre commission s'inquiète de la « désorientation » actuelle de nos finances publiques.

CHAPITRE PREMIER :

UNE CROISSANCE MENACÉE PAR LE RALENTISSEMENT AMÉRICAIN ?

Le gouvernement a revu à la baisse au mois de mars de cette année sa prévision de croissance pour l'année 2001, passée de 3,3 % à 2,9 % (avec une fourchette de 2,7 % à 3,1 %). Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a par ailleurs estimé que la croissance en 2001 se situerait vraisemblablement dans le bas de la fourchette de prévisions, soit 2,7 %. Néanmoins, le gouvernement a, à l'heure actuelle, toujours maintenu inchangées ses prévisions de déficit public pour 2001 et 2002.

I. LA FIN D'UNE CONJONCTURE PARTICULIÈREMENT FAVORABLE

A. UNE CROISSANCE SOUTENUE DE 1998 A 2000

1. Une croissance forte tirée par la demande intérieure

L'économie française a connu de 1998 à 2000 une croissance soutenue, supérieure à son potentiel (qu'on estime généralement compris entre 2 % et 2,5 % en volume), comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB en France

(en points de PIB)

Source : INSEE

Cette croissance a été rendue possible par l'assainissement budgétaire effectué par les gouvernements précédents à partir de la récession de 1993 et par le desserrement de la politique monétaire à partir de 1995.

Elle s'est appuyée sur une demande intérieure dynamique. Celle-ci a en effet pris le relais de la demande extérieure, à l'origine de la reprise de l'année 1997. Le graphique ci-après permet de mettre en évidence cette évolution.

Contributions à la croissance : le dynamisme de la demande intérieure

(en points de PIB)

Source : perspectives économiques 2001-2002 (mars 2001)

2. Une croissance déjà vulnérable aux aléas extérieurs

Ainsi que votre rapporteur le soulignait il y a un an, cette croissance était vulnérable aux aléas extérieurs. Elle pouvait diminuer, notamment, du fait d'un ralentissement de l'économie américaine ou européenne. En particulier, le risque d'une accélération de l'inflation dans certains pays de la zone euro, avec ses conséquences sur la politique monétaire et sur la consommation des ménages, ne pouvait pas être écarté.

Cependant, le gouvernement semblait relativement optimiste à cet égard. Votre rapporteur insistait sur l'existence d'un réel contraste entre un environnement international très évolutif - même si le scénario du gouvernement reposait sur l'hypothèse d'un atterrissage en douceur (ou « soft landing ») de l'économie américaine - et le maintien sur une tendance stable du commerce extérieur français ainsi que des conditions financières et monétaires de la croissance.

B. LA DEGRADATION DE L'ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL PÈSE SUR LA CROISSANCE FRANCAISE

Les craintes de votre rapporteur sur une éventuelle dégradation de l'environnement international se sont malheureusement révélées fondées.

1. La dégradation de l'environnement international

a) L'augmentation du prix du pétrole

Tout d'abord, le prix du pétrole a atteint en septembre de l'année 2000 son maximum depuis 1991, avant de se stabiliser à un niveau élevé, comme l'indique le graphique ci-après :

Prix du baril du pétrole (Brent)

(en dollars)

Source : FERI

b) Le ralentissement de l'économie américaine

Ensuite, l'économie américaine connaît un net ralentissement depuis le dernier trimestre de l'année 2000, que le graphique ci-après permet de mettre en évidence.

Croissance du PIB aux Etats-Unis en rythme annualisé

(en points de PIB)

Source : Bureau of Economic Analysis

La croissance de l'économie américaine au quatrième trimestre de l'année 2000 et au premier trimestre de l'année 2001 a été, en rythme annualisé, de respectivement 1 % et 1,3 %, en rupture avec le rythme, de l'ordre de 5 %, observé auparavant.

c) Le ralentissement de la zone euro

Enfin, en partie à cause de ces deux phénomènes, la croissance des principaux pays de la zone euro a connu un ralentissement marqué au cours de l'année 2000, la croissance en l'an 2001 semblant par ailleurs mal assurée.

Tel est en particulier le cas de la croissance des économies allemande et italienne, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB en Allemagne et en Italie, en rythme annualisé

(en points de PIB)

Source : direction de la prévision

En effet, l'atterrissage de l'économie des Etats-Unis a surpris par son ampleur et sa rapidité. Par ailleurs, une inflation plus forte qu'anticipé au sein de la zone euro érode le pouvoir d'achat des ménages, tout en réduisant la probabilité d'un assouplissement de la politique monétaire.

2. Le ralentissement de l'économie française

En conséquence de ces phénomènes, l'économie française connaît un net ralentissement depuis le début de l'année 2000, après avoir augmenté au cours de l'année 1999, comme le montre le graphique ci-après.

Croissance du PIB en France en rythme annualisé

(en points de PIB)

Source : INSEE

a) Un ralentissement de l'économie française en l'an 2000, résultant de l'augmentation du prix du pétrole

En effet, des taux de croissance quasiment identiques du PIB français en 1999 et en 2000 (respectivement 2,9 % et 3,1 %) ne doivent pas dissimuler un ralentissement de la croissance en l'an 2000, que traduit son rythme d'évolution infra-annuelle.

Alors que la croissance, mesurée de trimestre à trimestre, est passée au cours de l'année 1999 de 3,2 % à 4,4 % en rythme annuel, elle a ensuite été inférieure ou égale à ces taux, pour atteindre 2 % au premier trimestre de l'année 2001.

Cette inflexion en l'an 2000 semble s'expliquer principalement par le renchérissement des produits pétroliers. En effet, celui-ci a affecté le pouvoir d'achat des ménages tout en les incitant à épargner davantage.

b) Une croissance française plus faible que prévu au premier trimestre de l'année 2001

• En outre, la croissance de l'économie française a été plus faible que prévu au premier trimestre de l'année 2001. Elle a alors été selon l'Insee de 0,5 %, soit 2 % en rythme annualisé.

A titre de comparaison, au mois de mars de cette année l'Insee prévoyait une croissance de 0,8 %, soit 3,2 % en rythme annualisé.

Si l'activité progressait de 0,5 % par trimestre d'ici à la fin de l'année, ce qui ne semble pas invraisemblable, la croissance en l'an 2001 serait de 2,4 %.

• Ce ralentissement s'explique par une dégradation du contexte international plus marquée que prévu. Celle-ci a notamment résulté en une faible croissance de l'investissement des entreprises, de seulement 0,4 % (après 3,2 % au dernier trimestre de l'année 2000), alors que l'Insee prévoyait un taux de 2,3 %.

Par ailleurs, on peut s'inquiéter de l'accélération de l'inflation : en avril, les prix à la consommation ont augmenté de 0,5 % par rapport au mois de mars, portant la progression de l'inflation sur un an à 1,8 %. La croissance du revenu disponible réel des ménages en sera d'autant plus faible, ce qui devrait avoir un impact négatif sur la consommation des ménages.

II. LE GOUVERNEMENT NE SEMBLE PAS PRENDRE EN COMPTE CET INFLÉCHISSEMENT

Le gouvernement a cependant décidé de ne pas modifier ses prévisions par rapport à celles du mois de mars de cette année.

Il estime en effet que la croissance en l'an 2001 se situera dans la fourchette de prévisions annoncée, entre 2,7 % et 3,1 %.

A. DES PERSPECTIVES OPTIMISTES EN 2001 POUR LE SOLDE PUBLIC

1. Des perspectives qui il y a deux mois pouvaient sembler optimistes en ce qui concernait le solde public

a) La révision à la baisse de la prévision de croissance en mars 2001

Il est vrai que le gouvernement a déjà revu à la baisse sa prévision de croissance, au mois de mars de cette année.

Celle-ci a alors été ramenée de 3,3 % à 2,9 % (avec une fourchette de 2,7 % à 3,1 %), du fait d'une révision à la baisse des perspectives de croissance de l'économie des Etats-Unis. Une prévision de 2,9 % était alors à peine supérieure à la moyenne de celles des organismes de conjoncture réunis au sein de la Commission économique de la Nation (2,8 % en mars 2001).

Une croissance de 2,9 % serait inférieure à l'objectif de la loi de finances pour 2001 (3,3 %) et de la programmation pluriannuelle des finances publiques à l'horizon 2004 (3 % par an).

b) Un solde public qui reste pourtant inchangé

De manière quelque peu paradoxale, le gouvernement n'a pas revu en même temps sa prévision de déficit public, de 1 % du PIB hors licences UMTS.

Selon les dernières estimations réalisées par l'OFCE à ce sujet, présentées en annexe au présent rapport, un écart de croissance de 0,4 point de PIB aurait un impact sur les recettes des administrations publiques de 0,17 point de PIB : cela signifie que si l'on prévoit un déficit public de 1 % du PIB avec une croissance de 3,3 %, on peut s'attendre à un déficit public de 1,17 % du PIB avec une croissance de 2,9 %, à dépenses publiques inchangées. Certes, le gouvernement peut « geler » certaines dépenses, voire transférer d'une année à l'autre certaines recettes (en particulier non fiscales), mais il peut a priori sembler difficile pour lui de respecter exactement le déficit annoncé, même avec une croissance de 2,9 %.

Le gouvernement continue pourtant d'affirmer que ses recettes seront conformes à ses prévisions, et que la programmation pluriannuelle des finances publiques sera respectée. Il justifie ce point de vue par le dynamisme des recettes sociales, soutenues par celui de la masse salariale, ainsi que par l'hypothèse que l'élasticité des recettes fiscales au PIB serait de 1,8, soit un niveau plus élevé qu'anticipé à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour l'année 2001 (1,4) 1 ( * ) . En effet, il estime que la réduction des rentrées de TVA, consécutive à une moindre croissance du PIB, serait compensée par un rendement plus élevé que prévu d'autres impôts, en particulier l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés. Ce chiffre est légèrement en retrait par rapport à l'évaluation avancée pour l'an 2000 (de l'ordre de 2).

2. Des perspectives devenues depuis moins favorables

Il semble désormais vraisemblable que la croissance en l'an 2001 se situera dans le bas de la fourchette de prévisions (de 2,7 % à 3,1 %), voire en-dessous. On peut en tirer deux conséquences.

a) Une prévision de croissance optimiste ?

On peut se demander si le gouvernement, qui se refuse à envisager une croissance inférieure à 2,7 %, ne serait pas trop optimiste.

• Le gouvernement justifie son point de vue par deux arguments.

- Tout d'abord, il estime que la demande intérieure demeurera suffisamment solide pour soutenir la croissance. Il considère que « sa robustesse devrait permettre d'absorber ce nouveau choc extérieur sans que la croissance n'en souffre exagérément ». En particulier, la demande des ménages resterait dynamique, du fait notamment d'une accélération des salaires réels et des baisses d'impôts. En effet, le gouvernement a maintenu sa prévision de croissance du pouvoir d'achat du revenu disponible brut des ménages inchangée depuis le mois de mars, à 3,1 % en l'an 2001 et 2,7 % en l'an 2002.

- Ensuite, il estime que la dégradation de l'environnement international pourrait être atténuée par une détente internationale sur les prix de certaines matières premières et sur les conditions monétaires.

Au total, selon le rapport d'orientation budgétaire, « la France devrait échapper à un ralentissement brutal de sa croissance ».

• Il ne semble pourtant pas improbable que la croissance soit inférieure à 2,7 % cette année.

On a vu que si l'activité continuait de progresser de 0,5 % par trimestre d'ici à la fin de l'année, la croissance en l'an 2001 serait de seulement 2,4 %.

Pour que la prévision du gouvernement soit vérifiée, la croissance devrait donc s'accélérer. Or, une telle accélération semble incertaine.

b) Une prévision de déficit public peu vraisemblable

La prévision de déficit public pour l'année 2001 en est d'autant moins vraisemblable. Celle-ci reposait sur l'hypothèse qu'une élasticité accrue des recettes fiscales à l'activité et un fort dynamisme des recettes sociales permettraient de compenser l'effet sur les recettes des administrations publiques de la révision à la baisse de la prévision de croissance (ramenée de 3,3 % à 2,9 %).

Même en retenant cette hypothèse, si la croissance était inférieure à 2,9 %, comme cela semble vraisemblable, l'objectif de réduction du déficit public pourrait ne pas être atteint.

Au total, il ne semble pas possible d'exclure que le déficit public ne se réduise pas en l'an 2001.

B. QUE PENSER DES PERSPECTIVES POUR L'ANNÉE 2002 ?

1. Des perspectives de croissance qui demeurent discutables

La prévision de croissance du gouvernement pour l'année 2002, de 3 %, demeure incertaine.

a) Une forte dépendance par rapport à la croissance de l'économie des Etats-Unis

Tout d'abord, la croissance de l'économie française en l'an 2002 dépendra en grande partie de celle de l'économie des Etats-Unis.

• Le gouvernement conserve l'hypothèse d'une croissance de l'économie des Etats-Unis de 2,5 % en l'an 2002.

• Une croissance plus faible n'est cependant pas à exclure.

Alors que dans ses prévisions du mois de mars le gouvernement insistait sur le risque constitué par l'accentuation des fragilités financières de l'économie américaine (s'interrogeant en particulier sur la véritable santé financière des banques), il souligne désormais les enjeux essentiels que constituent les anticipations des ménages et des entreprises américains et la remontée du taux de chômage au mois d'avril. Une confiance durablement faible des ménages et des entreprises pourrait prolonger la durée du ralentissement. Comme il le souligne, « un retour immédiat de l'économie américaine sur les taux de croissance qu'elle a connus à la fin des années 1990 est incertain ».

L'impact sur l'économie française d'une croissance plus faible que prévu en 2002 de l'économie des Etats-Unis pourrait en effet être important, comme l'indique le tableau ci-après.


L'impact sur l'économie française d'une réduction de 1 point de la croissance du PIB des Etats-Unis, selon le gouvernement

Ecart au niveau du scénario de référence, en %

2002

2003

2004

PIB

-0,3/-0,4

-0,5

-0,3/-0,4

Emploi total (milliers)

-10/-15

-30/-40

-45

Prix à la consommation des ménages

-0,1

-0,1

0,0

Note : réduction de 1 point de la croissance du PIB américain intervenant au début de 2002.

Source : réponse du gouvernement au questionnaire adressé par votre rapporteur

• Inversement, certains prévisionnistes, optimistes sur l'évolution de la confiance des ménages et des entreprises, estiment que la croissance des Etats-Unis pourrait être supérieure à ce qui est généralement admis.

Ainsi, selon le Conference Board 2 ( * ) , le ralentissement observé concernerait essentiellement l'industrie, où il s'expliquerait par un simple ajustement des stocks. La production s'accélérerait progressivement au cours de l'année 2001. La croissance serait de 2,8 % en l'an 2001 et 2,9 % en l'an 2002 3 ( * ) .

b) Les incertitudes sur la croissance des économies de la zone euro

Ensuite, les perspectives de croissance des économies de la zone euro en l'an 2002 sont incertaines. Si l'inflation s'y installait de manière durable, la croissance des revenus réels des ménages s'en trouverait réduite, ce qui aurait un impact défavorable sur la croissance de la zone et n'inciterait pas les entreprises à y accroître leurs investissements.

c) Quelle évolution pour la demande intérieure française ?

Enfin, on peut s'interroger sur l'évolution de la demande intérieure de la France en l'an 2002. Selon le gouvernement, celle-ci conserverait le dynamisme dont elle a fait preuve de 1998 à 2000, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance de la consommation et de l'investissement en France

(en %)

Sources : Insee, prévisions du gouvernement (mars 2001)

Cependant, les perspectives d'évolution de la demande intérieure sont incertaines. On peut schématiquement distinguer deux cas de figure.

Il est possible que l'économie française connaisse actuellement un « trou d'air », dont elle pourrait sortir, par exemple, grâce à une reprise de l'activité économique aux Etats-Unis. La croissance de la consommation des ménages pourrait demeurer élevée, et l'investissement des entreprises redevenir dynamique.

Il n'est cependant pas exclu que la consommation des ménages ralentisse, ce qui rendrait plus difficile une accélération de l'activité. Un tel phénomène pourrait en particulier se produire si la diminution de la croissance se prolongeait, ou si l'inflation demeurait élevée, ce qui réduirait la croissance du revenu disponible réel des ménages.

2. Des prévisions optimistes en matière d'évolution du solde public

Si les perspectives de croissance pour l'année 2002 sont incertaines, la prévision du gouvernement en matière d'évolution du solde public peut sembler optimiste.

a) Un retour à l'équilibre annoncé pour 2004

Le gouvernement prévoit une capacité de financement des administrations publiques de - 0,6 % du PIB en l'an 2002 (hors UMTS). Ce chiffre correspond à l'objectif fixé par la programmation pluriannuelle des finances publiques à l'horizon 2004.

Ainsi, le gouvernement reviendrait à un rythme modéré de réduction du déficit public, en rupture avec celui observé de 1994 à 1997.

Evolution du déficit public

(en points de PIB)

Sources : Insee, prévisions du gouvernement (2001 à 2004)

Selon le gouvernement, la réduction de la part des dépenses publiques dans le PIB serait « solidement engagée », celle-ci passant de 53,2 points de PIB en l'an 2000 à 52,4 points en l'an 2001 et à 51,6 points en l'an 2002 4 ( * ) . Le gouvernement retient en effet l'hypothèse que les dépenses de l'Etat augmenteront de 1 % entre 2002 et 2004. En ce qui concerne la loi de finances pour l'année 2002, le Premier ministre a annoncé que les dépenses de l'Etat augmenteraient de 0,5 %.

En outre, les dépenses sociales resteraient globalement maîtrisées, malgré les dépenses supplémentaires résultant de la nouvelle convention UNEDIC.

b) Une prévision soumise à de fortes incertitudes

Il existe de fortes incertitudes quant à la validité de cette prévision.

Tout d'abord, une interruption de la réduction du déficit en l'an 2001 rendrait d'autant moins probable la réalisation des prévisions pour les années ultérieures.

Ensuite, on peut s'interroger sur la validité de l'hypothèse retenue en matière d'évolution des dépenses.

Enfin, l'élasticité des recettes fiscales à l'activité semble difficile à prévoir avec exactitude. Le gouvernement estime qu'elle connaîtrait un recul sensible en l'an 2002, passant à 1,2 (contre 1,8 en l'an 2001), du fait essentiellement du tassement de la croissance spontanée de l'impôt sur les sociétés 5 ( * ) .

On peut par ailleurs remarquer que, s'agissant du déficit budgétaire en 2002, le gouvernement n'a pris aucun engagement dans son rapport quant à une éventuelle diminution par rapport au niveau fixé dans la loi de finances initiale pour 2001.

III. UN BUDGET QUI NE PRÉPARE PAS L'AVENIR

A. UNE POLITIQUE DE RÉDUCTION DU DEFICIT PUBLIC INSUFFISANTE

1. Un objectif de croissance des dépenses sans cesse revu à la hausse

Après avoir été sans cesse revu à la hausse par les programmations pluriannuelles des finances publiques successives, l'objectif de croissance annuelle des dépenses publiques (1,5 %) est devenu légèrement supérieur au taux observé depuis 1994 (1,4 %), comme l'indique le graphique ci-après.

La maîtrise des dépenses publiques : un objectif de moins en moins ambitieux

(en %)

Sources : comptes nationaux, ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

La politique de « maîtrise » des dépenses publiques affichée par le gouvernement semble donc avoir pour objectif la stabilisation, et non la diminution de leur croissance.

2. Une maîtrise des dépenses insuffisante par rapport aux réductions d'impôts

Ainsi, la maîtrise des dépenses paraît insuffisante par rapport aux réductions d'impôts consenties par le gouvernement.

En effet, la politique de réduction du déficit structurel menée à partir de 1995 semble interrompue depuis l'année dernière :

Evolution du déficit structurel

(en points de PIB)

Source : rapport du gouvernement préparatoire au DOB 2002

Aussi, comme l'indique le gouvernement dans le rapport d'orientation budgétaire, l'amélioration du solde public prévue entre 1997 et 2002 serait imputable pour un peu moins des deux tiers au regain de croissance économique, et pour seulement un peu plus d'un tiers à la réduction du déficit structurel.

Elle peut donc sembler excessivement dépendante de la conjoncture.

B. UNE POLITIQUE DIFFICILEMENT SOUTENABLE ?

1. Une politique de baisse du taux de prélèvements obligatoires qui n'est pas à la hauteur des enjeux

La politique de baisse du taux de prélèvements obligatoires menée par le gouvernement ne semble pas à la hauteur des enjeux.

a) Des résultats décevants

Votre rapporteur déplore la modestie de la réduction du taux de prélèvements obligatoires observée l'année dernière.

Si le gouvernement se félicite de la baisse du taux de prélèvements obligatoires en l'an 2000, la première depuis 1992, on peut regretter que sa promesse de réduire ce taux de 0,5 point en l'an 2000 n'ait pas été entièrement tenue.

En 1999 et 2000, la France a en effet connu les deux taux de prélèvements obligatoires les plus élevés de son histoire, comme l'indique le graphique ci-après.

Prélèvements obligatoires

(en points de PIB)

Sources :Insee, rapport d'orientation budgétaire

Avec 45,2 % de taux de prélèvement en l'an 2000, la France reste le « mauvais élève » des pays du G 7, l'Allemagne se situant à 43,2 %, l'Italie à 42,7 % et le Royaume-Uni à 38,2 %.

On peut noter à cet égard que le gouvernement souhaite accélérer la diminution du taux de prélèvements obligatoires, qui passerait à 44,8 % en l'an 2001 et à 44,5 % en l'an 2002. En effet, les baisses d'impôts et allégements de charges sociales, de l'ordre de 1 point de PIB par an entre 2000 et 2002, seraient partiellement compensés par le dynamisme spontané des recettes fiscales et sociales.

b) Une réduction non durable ?

On peut cependant se demander si la politique de réduction du taux de prélèvements obligatoires affichée par le gouvernement serait soutenable, alors que les dépenses ne semblent pas suffisamment maîtrisées.

L'histoire a en effet montré que les baisses d'impôts non « gagées » par des économies de dépenses correspondantes étaient annulées quand la conjoncture devenait moins favorable.

c) La nécessité de réduire le taux de prélèvements obligatoires

Cette situation est d'autant plus regrettable qu'une réduction du taux de prélèvements obligatoires est plus que jamais nécessaire.

Comme votre rapporteur l'a indiqué il y a un an, une simulation commandée par le service des études du Sénat au Centre d'observation économique (COE) pour la commission des finances suggère qu'une diminution de 2,9 points du taux de prélèvements obligatoires, accompagnée d'un retour à l'équilibre des comptes publics en 2003, pourrait être neutre pour la croissance à moyen terme, si la diminution des prélèvements obligatoires portait sur les cotisations sociales et l'impôt sur le revenu.

2. Une politique procyclique

Faute de maîtrise suffisante des dépenses, la réduction des prélèvements obligatoires effectuée par le gouvernement peut s'analyser comme un simple relâchement de la politique de réduction du déficit public, par une politique budgétaire expansionniste venant à contre-temps.

Alors que le gouvernement aurait dû profiter du niveau élevé de la croissance entre 1998 et l'an 2000 pour réduire le déficit structurel, il a mené en 2000 une politique procyclique.

Le retour à l'équilibre des finances publiques en est rendu d'autant plus difficile, comme on s'en rend compte aujourd'hui, alors que la conjoncture semble moins favorable.

3. La nécessité de réduire le poids de la dette publique

Il est pourtant nécessaire de réduire le poids de la dette publique dans le PIB, qui est de 60 %.

En effet, la charge de la dette représente aujourd'hui 14 % du budget de l'Etat. Or, les prochaines décennies verront la nécessité de dégager des marges de manoeuvre pour l'action publique, en particulier pour financer le vieillissement de la population, alors qu'il semble exclu d'accroître davantage le taux de prélèvements obligatoires.

Le gouvernement reconnaît cette situation. Ainsi, dans le rapport d'orientation budgétaire, il indique que, pour ramener le poids de la dette publique à 20 % du PIB en l'an 2020, il faut avoir des finances publiques durablement équilibrées à partir de l'année 2004.

Votre rapporteur estime que la politique budgétaire actuellement menée ne permettra pas d'atteindre cet objectif.

CHAPITRE II :

POUR UNE RÉDUCTION COHÉRENTE ET SOUTENABLE
DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Votre commission des finances n'a cessé de dénoncé, depuis plus de trois ans, l'inaction du gouvernement en matière de réduction des prélèvements obligatoires, malgré ses discours convenus sur la nécessité de réduire la pression fiscale et sociale pesant sur nos concitoyens.

De fait, le pic historique de prélèvements obligatoires atteint en 1999 (45,6 % du PIB) a confirmé son analyse : 70,7 % de l'augmentation de la richesse nationale aura été prélevé par la sphère publique cette année, un taux exceptionnellement élevé comparé à ceux de 1998 (43,4 %) et de 1997 (50,8 %) et sensiblement plus élevé que les taux de nos principaux voisins européens 6 ( * ) .

Suite à ce constat d'échec, le gouvernement a été contraint de reconnaître - très tardivement - que la pression fiscale était devenue insupportable pour nos concitoyens, pour l'emploi et les entreprises qui sont le moteur de l'activité. La hausse exceptionnelle de 1999 a donc été en partie corrigée, avec des résultats modestes, puisque le taux de prélèvements obligatoires s'établit encore en 2000 à 45,2 % du PIB soit un niveau supérieur à ceux de 1998 et 1997 (44,8 % et 44,9 % du PIB). Toutefois, la part de l'augmentation de la richesse nationale prélevée par la hausse des prélèvements obligatoires s'est réduite à 34 % en 2000, témoignant d'un desserrement de la pression fiscale.

Ainsi, le gouvernement, qui se targue aujourd'hui de diminuer les impôts, s'efforce en réalité, avec un succès encore très relatif 7 ( * ) , d'atténuer les augmentations qu'il a lui-même engagées depuis 1997 dans la perspective très ciblée d'atteindre un niveau de prélèvements obligatoires en 2002 légèrement inférieur à celui de 1997.

Cependant, cet objectif, loin d'être acquis, pourrait être compromis par une évolution moins favorable de la conjoncture nationale et internationale et par la nécessité de ne pas laisser « filer » le déficit budgétaire.

I. MALGRÉ DE RÉCENTS EFFORTS, UN NIVEAU DE PRELEVEMENTS OBLIGATOIRES STRUCTURELLEMENT ELEVÉ

A. 1997-1999 : LE POIDS CROISSANT DE L'IMPÔT

1. Un accroissement conscient de l'impôt

De mai 1997 jusqu'à l'adoption du premier collectif budgétaire pour 2000, au mois de juillet 2000, c'est-à-dire pendant trois années entières, le gouvernement s'est attaché à réduire le déficit budgétaire, non par une véritable maîtrise de la dépense, mais par un accroissement conscient de l'impôt.

Le gouvernement reconnaît aujourd'hui lui-même que la politique qu'il a menée depuis 1997 tendait naturellement à accroître les prélèvements pesant sur les Français : d'après les éléments de son rapport sur l'évolution de l'économie nationale et des finances publiques, déposé pour le débat d'orientation budgétaire, le taux de prélèvements obligatoires après les mesures gouvernementales a toujours été supérieur au taux de prélèvements qu'il qualifie de « spontané » de 1997 à 1999 8 ( * ) .

Evolution des prélèvements obligatoires 1997-1999

(en points de PIB)

Source : rapport du gouvernement pour le DOB 2002

De fait, tous les impôts ont connu une forte augmentation depuis 1997, le « record » venant de l'impôt sur les sociétés, qui a enregistré, en quatre ans, une hausse de 72,7 %.

1996

1997

1998

1999

2000

2000/99

96/2000

Moyenne annuelle 1996/2000

Produit fiscal net

1359,6

1416,6

1452,3

1565,7

1574,6

0,6%

15,8%

3,7 %

Impôt sur le revenu

314,1

293,4

304,0

333,6

349,3

4,7 %

11,2 %

2,7 %

Impôt sur les sociétés

143,2

172,2

184,7

229,8

247,3

7,6 %

72,7 %

14,6 %

TIPP

148,4

150,8

153,9

161,7

159,2

-1,5 %

7,3 %

1,8 %

TVA nette

600,5

626,1

641,9

671,1

687,1

2,4 %

14,4 %

3,4 %

divers

153,4

174,1

167,8

169,5

131,7

-22,3 %

-14,1 %

-3,7 %

Source : Cour des comptes

2. L'exception française en matière de finances publiques

Une rétrospective sur les quatre dernières années montre que les administrations publiques ont pleinement profité des rentrées fiscales engendrées par la croissance économique. Cette « manne », qui a représenté 570 milliards de francs de produit fiscal supplémentaire sur quatre ans dont plus de 260 milliards de francs pour le seul impôt sur les sociétés, a pu, pour une grande part, contribuer aux nouvelles dépenses de l'Etat et, pour une trop faible part, entraîner une réduction du déficit budgétaire.

Comme le soulignait l'INSEE dans sa lettre sur les comptes des administrations publiques en 1999, « la réduction du déficit résulte d'une forte hausse des prélèvements obligatoires » confortant ainsi l'exception française en matière de finances publiques.

Ainsi, ce n'est que depuis le milieu de l'année 2000, et suite notamment à l'affaire dite de la « cagnotte » qui avait mis en évidence la volonté du gouvernement de masquer les plus-values fiscales pour ne pas avoir à les redistribuer, que le gouvernement a sensiblement changé d'orientation.

Le gouvernement dans son rapport préparatoire au présent débat se livre désormais à un plaidoyer contre l'impôt trop lourd : « l'observation montre que le poids des prélèvements a atteint un niveau tel qu'il a rendu l'impôt moins légitime aux yeux d'un grand nombre de nos concitoyens. Lorsque la résistance au prélèvement se généralise dans la société, lorsque le consentement à payer s'effrite, c'est sans doute le signe que les désagréments de l'impôt paraissent désormais plus lourds que les bénéfices des dépenses qu'il sert à financer. L'analyse économique confirme qu'un taux trop élevé de prélèvement peut entraîner des effets négatifs importants, en particulier sur le fonctionnement du marché du travail (...). La concurrence fiscale exercée par nos partenaires de la zone euro constitue désormais un enjeu important et incite à réduire comme eux les déficits publics plutôt par une maîtrise des dépenses que par des hausses d'impôts. La France est particulièrement exposée aux effets de la concurrence fiscale : elle a l'un des taux de prélèvements obligatoires les plus élevés de la zone euro, en partie parce qu'elle a privilégié, au milieu des années 90, un mode d'assainissement de ses comptes publics qui reposait sur la hausse des prélèvements obligatoires plus que sur la maîtrise des dépenses ».

Ce changement d'orientation apparaît toutefois fragile et conjoncturel.

B. 2000 : UN LEGER INFLÉCHISSEMENT SOUS LA CONTRAINTE ET SANS PERSPECTIVE

1. Un léger infléchissement de la politique du gouvernement

Comme le souligne l'INSEE les impôts perçus par les administrations ont augmenté moins vite en 2000 qu'en 1999 : ils ont augmenté de 2,9 % en 2000 après 5,4 % en 1999, malgré le dynamisme de la plupart des revenus et la croissance de la consommation sur laquelle sont en partie assis certains impôts. Les cotisations sociales ont augmenté de 3,4 % après une hausse de 5,1 % en 1999.

Dans son rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2000 la Cour des comptes confirme cette évolution et souligne que « le ralentissement de la progression des recettes est sensible ». Pour expliquer ce ralentissement, la Cour des comptes cite l'éventail de mesures fiscales prises par le gouvernement : « l'effet de la baisse du taux de la TVA à 5,5 % sur les travaux d'entretien intervenue à l'automne 1999, la baisse du taux normal de TVA de 20,6 % à 19,6 % d'avril 2000, le tarif de la TIPP sur le fioul domestique a baissé de 30 % et le mécanisme de stabilisation de la fiscalité pétrolière est entré en vigueur au 1 er octobre 2000. Quant à l'IR, les deux premières tranches ont baissé d'un point ».

Le problème est évidemment le caractère hétéroclite de ce que le gouvernement a voulu présenter comme un « paquet fiscal ».

2. Un programme d'allégements d'impôts en trompe l'oeil

A l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2001, le gouvernement a annoncé un plan de réductions d'impôts de 120 milliards de francs sur la période 2001-2003, en prédisant « des gains de revenu de grande ampleur pour les ménages comme pour les entreprises ».

Votre rapporteur général avait regretté la faible cohérence du programme fiscal gouvernemental et l'avait opposé, tant sur le fond que sur la forme, au programme allemand de réduction des impôts mis en place par le gouvernement social-démocrate de M. Gerhard Schroëder.

Votre commission avait fait procéder à une évaluation des mesures fiscales présentées dans le collectif budgétaire : cette évaluation montrait que les mesures fiscales ne concernaient que les ménages et contribuaient au soutien de la demande. Pourtant le contexte était déjà celui d'une bonne tenue de la demande intérieure, alors que des doutes subsistaient sur l'aptitude de l'économie française à accroître ses capacités de production et, en conséquence, à soutenir une croissance soutenue sans saturation de l'offre et sans risque inflationniste. Depuis, les récents indicateurs économiques montrent une diminution de l'investissement des entreprises, une réduction de leur stocks et les indicateurs de l'inflation à la hausse qui confirment cette analyse.

Les mesures fiscales décidées par le gouvernement depuis juillet 2000

Les allégements d'impôts inscrits dans la loi de finances rectificative pour 2000 étaient essentiellement au nombre de trois :

- une réduction de la taxe d'habitation pour un coût de 11 milliards de francs ;

- un allégement de l'impôt sur le revenu à hauteur de 11 milliards de francs (diminution d'un point de chacun des deux premiers taux d'imposition) ;

- la baisse d'un point du taux normal de la TVA pour 18,45 milliards de francs en 2000.

Les principales mesures fiscales de la loi de finances pour 2001 étaient les suivantes :

- l'impôt sur le revenu , avec un allégement de 23,4 milliards de francs en 2001 (28,7 milliards de francs compte tenu de l'indexation du barème) ;

- l'impôt sur les sociétés avec un dispositif d'imposition au taux réduit de 15 % ou 25 % pour les petites entreprises, pour un coût de 2,3 milliards de francs en 2001, une suppression sur trois ans de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés et l'aménagement de régimes fiscaux particuliers ;

- la fiscalité agricole , avec une série de mesures (déduction pour investissement dans les coopératives, abattement sur les bénéfices en faveur des jeunes agriculteurs, imputation des déficits agricoles sur le revenu global...) ;

- la fiscalité pétrolière : la loi de finances comprenait une baisse de la TIPP sur le fioul domestique pour un coût de 3,5 milliards de francs, et une série de mesures dont l'impact budgétaire est incertain : un nouveau dispositif de TIPP « stabilisatrice » ou « flottante » permettant normalement de restituer aux consommateurs les surplus de TVA consécutifs à la hausse des prix des carburants lorsque la hausse du « Brent daté » est supérieure à 10 %, un gel du plan d'augmentation de la TIPP sur le gazole, des mesures de remboursements de la TIPP aux transporteurs routiers (pour un coût de 1,6 milliard de francs) et une contribution exceptionnelle des grandes entreprises pétrolières (+ 5 milliards de francs);

- la vignette automobile : la loi de finances pour 2001 comportait une exonération de vignette pour les voitures particulières pour un coût de 12,5 milliards de francs ;

- un nouveau dispositif fiscal en faveur de l'investissement outre-mer qui « n'entraîne pas de coût pour les finances publiques et est destiné à contribuer de manière plus efficace au développement de l'économie et de l'emploi outre-mer » selon les termes mêmes du gouvernement.

Cette liste des mesures fiscales prises depuis juillet 2000 montre que le gouvernement a choisi le « saupoudrage » plutôt que la réforme.

De fait, le tableau contenu dans le rapport du gouvernement pour le présent débat d'orientation budgétaire, montre bien l'hésitation du gouvernement sur les arbitrages fiscaux à réaliser, avec la liste - non exhaustive - de tous les impôts concernés par des baisses et celle des objectifs poursuivis.

Le programme fiscal du gouvernement

Réduction des inégalités/distorsions

Soutien du pouvoir d'achat

Soutien de l'emploi

Soutien de l'investissement

TVA

x

X

x

IR

x

X

IS

x

Prime pour l'emploi

x

X

x

TP

x

x

TH

x

X

x

DMTO

x

x

x

Vignette

X

Source : rapport du gouvernement pour le DOB 2002

Dans des domaines plus précis, les hésitations du gouvernement sont manifestes . Il est possible de citer la fiscalité écologique comme emblème de l'improvisation fiscale du gouvernement.

La fiscalité écologique : un exemple d'incohérence fiscale

La fiscalité écologique apparaît comme étant :

- un dispositif anti-constitutionnel : l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux consommations intermédiaires d'énergie des entreprises a été censurée par le Conseil constitutionnel en décembre 2000 (décision n° 2000-441 DC du 28 décembre 2000) ; le gouvernement avait pourtant été alerté sur les graves défauts juridiques de son dispositif par un avis du Conseil d'Etat. Votre commission avait souligné lors du débat au Sénat que cette nouvelle taxation était « dangereuse au plan économique », « incertaine au plan environnemental » et « vulnérable au plan juridique » ;

- un dispositif non appliqué : le gouvernement a également mis en place en octobre 2000, un dispositif très complexe de modulation des tarifs de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) (article 12 de la loi n° 2000-1352 du 30 décembre 2000 de finances pour 2001) ; afin de rendre les effets de ce mécanisme plus visibles, le gouvernement avait alors instauré un « bonus » temporaire ; or, la loi prévoit que le ministre chargé du budget prend un arrêté supprimant ce bonus de TIPP dès que certaines conditions sont réunies ; celles-ci le sont depuis le 21 mai 2001 et l'arrêté prévu n'est pas intervenu pour autant : le gouvernement n'a pas souhaité appliquer le texte qu'il avait lui-même demandé au Parlement de voter afin de ne pas aboutir à augmenter les tarifs de la TIPP. Cette non-application de la loi fiscale conduit à des pertes de recettes « volontaires » pour l'Etat ;

- une politique incohérente : en 1998 le gouvernement a présenté un plan sur sept ans de réduction de l'écart de taxation entre le gazole et l'essence afin de rapprocher la situation française de l'écart moyen européen. Cet engagement ainsi que le Programme national de lutte contre l'effet de serre sont en contradiction avec diverses mesures prises par le gouvernement :

- « pause » dans la rattrapage en 2001 ;

- modulation de la TIPP ;

- instauration d'un dispositif de remboursement de la TIPP aux transporteurs routiers pour maintenir la paix sociale et implicitement compenser aux routiers le surcoût des 35 heures dans ce secteur (modifié quatre fois en deux ans).

Enfin, l'examen des programmes fiscaux des autres pays européens montre que ceux-ci sont souvent plus simples et ciblés que le programme français

Principales initiatives de politique budgétaire pour 2000 et 2001
dans un certain nombre de pays

Le coût des trains de mesures énumérés ci-après est estimé par l'OCDE
aux alentours de ½ point du PIB ou plus

Allemagne

2001

Réforme de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés incluant de nouvelles réductions des taux statutaires de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et des sociétés et une augmentation de la déduction fiscale de base. Elargissement de l'assiette fiscale.

France

2000

Réduction du taux de TVA d'un point ; réduction du taux de TVA pour les travaux d'amélioration de logements ; réductions des taux de l'impôt sur le revenu ; suppression d'une majoration de l'impôt sur les sociétés ; réduction des impôts fonciers. Ces mesures sont partiellement compensées par des augmentations de cotisations sociales prélevées sur les bénéfices et des taxes générales sur les activités polluantes.

2001

Réduction de l'impôt sur le revenu des personnes physiques ; réduction des cotisations de sécurité sociale pour les bas salaires ; réduction des taxes sur les produits pétroliers. Revalorisation des avantages sociaux et des retraites, créations d'emplois par les pouvoirs publics.

Italie

2001

Réduction d'impôts principalement pour les titulaires de faibles revenus ; réduction des cotisations de sécurité sociale ; réduction de l'impôt sur les sociétés. Augmentation des dépenses d'infrastructure et de transferts sociaux.

Royaume-Uni

2000-01

Réduction du taux de base de l'impôt sur le revenu ; abaissement des impôts pour les petites et moyennes entreprises ; réduction des cotisations au régime d'assurance national. Les allégements seront partiellement compensés par l'introduction d'un nouveau prélèvement dénommée « changement climatique » et une augmentation des droits sur le tabac. Augmentation des dépenses consacrées à la santé publique. Elargissement de l'assiette fiscale et renforcement de la discipline fiscale.

Canada

2000-01

Indexation complète du régime d'imposition sur le revenu ; réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés.

Belgique

2000

Accélération de la réduction pluriannuelle des cotisations de sécurité sociale.

Finlande

2000-01

Réduction de l'impôt sur le revenu et des cotisations de sécurité sociale.

Irlande

2000

Réduction de l'impôt sur les revenus du travail ; avancées en faveur de l'application de taux unifiés d'imposition pour les secteurs liés aux échanges et ceux non liés aux échanges. Augmentation des dépenses générales d'infrastructure (1% du PIB).

2001

Poursuite de la réforme fiscale. Augmentation des dépenses générales d'infrastructures (1 % du PIB).

Pays-Bas

2001

Réduction des taux d'imposition et augmentation des crédits d'impôts au titre des revenus du travail. Ces mesures seront partiellement compensées par une réduction des possibilités de déductions d'impôts, une augmentation des taxes environnementales et des taux de TVA et un relèvement des impôts sur les revenus imputés de la fortune.

Suède

2000-01

Réduction de l'impôt sur le revenu.

Source : OCDE

C. DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES STRUCTURELLEMENT ÉLEVÉS

1. Une forte hausse pour les administrations de sécurité sociale

Sur la période 1997-2000, les prélèvements obligatoires ont augmenté au profit exclusif des administrations de sécurité sociale , alors que les prélèvements de l'Etat et surtout des administrations publiques locales ont diminué.

Les prélèvements obligatoires en France 1997-2000

(en points de PIB)

1997

1998

1999

2000

Etat

17,3

17,2

17,8

17,1

Dont cotisations sociales

0,4

0,4

0,4

0,4

ODAC

0,8

0,8

0,8

0,8

APUL

5,7

5,7

5,5

5,2

Sécurité sociale

20,5

20,5

20,9

21,4

Dont cotisations sociales

15,8

15,7

16,0

15,9

Union européenne

0,7

0,6

0,6

0,6

Total PO

44,9

44,8

45,6

45,2

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Par ailleurs, les recettes fiscales et non fiscales de l'Etat affectées à la sécurité sociale ont plus que doublé depuis 1997 .

(en milliards de francs)

1997

1998

1999

2000

2001 (e)

Recettes transférées

250,1

431,2

474,1

560,6

605,9

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

2. Des perspectives trop optimistes pour 2000-2002

Prévision d'évolution des prélèvements obligatoires 2000-2002

(en points de PIB )

Source : rapport du gouvernement pour le DOB 2002

Pour 2001 et 2002, le programme pluriannuel des finances publiques envisage une diminution de 0,7 point du taux de prélèvements obligatoires. Celui-ci passerait alors de 45,2 % en 2000 à 44,8 % en 2001 et 44,5 % en 2002.

Ces chiffres ne sont qu'une projection. L'expérience montre que les programmes pluriannuels n'ont, jusqu'à présent, jamais été respectés, mais infirmés par la réalité. Ainsi, malgré le léger infléchissement des prélèvements en 2000, le taux de prélèvements obligatoires 2000 s'établit à 45,2 % du PIB dans le compte provisoire publié au printemps 2001, soit 0,4 point de plus que dans le programme pluriannuel des finances publiques 2001-2003. Le niveau global de prélèvements obligatoires en 2000 aura été supérieur de 38 milliards de francs à la projection, dont 30 milliards de francs sur la base du seul écart enregistré pour l'année 1999.

Le taux de PO en 2000 : écarts entre la réalisation et le programme pluriannuel des finances publiques (PPFP) 2001-2003

1999

2000

PPFP 2001-2003

PO

4.008,2

4.122,5

PIB

8.839,9

9.205,3

Taux de PO

45,3 %

44,8 %

Compte provisoire 2000

PO

4.038,0 (+ 30)

4.160,5 (+ 38)

PIB

8.856,5

9.214,7

Taux de PO

45,6 % (+ 0,3)

45,2 % (+ 0,4)

Source : programme pluriannuel de finances publiques 2001-2003 ; INSEE, comptes nationaux

3. Un désavantage comparatif par rapport à nos principaux partenaires, qui s'amplifie

La France connaît l'un des taux de prélèvements obligatoires les plus élevés de l'Union européenne. Ainsi, en 1999, 50,4 % du PIB français était consacré aux recettes courantes des administrations publiques, contre 46,7 % dans la zone euro. La France se situe devant le bloc Italie, Allemagne, Pays-Bas (46,4 %) et loin devant la Grande-Bretagne (39,8 %).

Total des recettes courantes des administrations publiques (en % du PIB)

1999

2000

2001

Suède

60,2

58,3

57,5

Danemark

57,4

56,2

55,5

Finlande

51,8

51,5

50,9

France

50,4

49,5

48,9

Belgique

49,6

49

48,4

Autriche

49

48,5

47,6

Euro 11

46,7

46,1

45,2

Italie

46,4

45,7

45,4

Luxembourg

46,4

46

45,3

Pays-Bas

46,4

45,6

43,4

Allemagne

46,3

45,8

44,3

UE 15

46

45,4

44,6

Portugal

42,9

43,8

44,3

Grèce

41,6

41,4

41,1

Grande Bretagne

39,8

39,4

39,2

Espagne

38,8

38,8

38,8

Irlande

36,5

35,4

34,7

USA

33,3

33,1

33

Japon

31

31,3

31,5

Source : OCDE

Plus grave, le retard de la France sur les autres pays européens pourrait s'accentuer puisque son programme pluriannuel de réduction des prélèvements obligatoires, si tant est qu'il se réalisait, est moins ambitieux que celui de la plupart de ses concurrents européens.

Ainsi, les programmes de stabilité de la plupart des pays de la zone euro (à l'exception de l'Espagne et du Portugal) indiquent que sur 2000-2002 la part des recettes dans le PIB devrait se réduire. La réduction du poids des recettes dans le PIB traduit pour l'essentiel celle du poids des prélèvements obligatoires. On remarquera que la France se situe loin derrière l'Allemagne ou les Pays-Bas et même en dessous de la moyenne des pays de la zone euro pour son objectif de réduction des prélèvements obligatoires.

II. LA BAISSE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES DOIT ÊTRE TENUE MALGRE LES CONTRAINTES

A. LES INCERTITUDES DE LA CROISSANCE POURRAIENT PESER SUR LES RECETTES EN FIN D'ANNÉE

1. Des craintes invoquées lors de la discussion du PLF 2001

Dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2001, votre rapporteur général exprimait ses interrogations sur la tenue des recettes budgétaires de l'Etat en 2001 : « de fortes incertitudes pèsent sur l'hypothèse de croissance retenue par le gouvernement pour 2001 (3,3 %) en raison des aléas de la conjoncture internationale. Evidemment, tout essoufflement de la croissance aurait un impact direct sur les rentrées fiscales en 2001 » .

Il expliquait ce qui laissait penser que le gouvernement lui-même ne croyait pas à ses propres prévisions de croissance : « pour compenser la très forte hausse des recettes fiscales en 2000, le gouvernement a donc revu très fortement à la baisse les recettes non fiscales pour 2000 (- 18 milliards de francs), soit en chiffre révisé pour 2000, 180 milliards de francs. Ce mouvement marque un retour en arrière après la réévaluation de la loi de finances rectificative et traduit le choix de mettre en réserve des recettes pour l'exercice 2001, dont l'exécution s'annonce donc plus incertaine ».

Malheureusement, toutes ces craintes n'étaient pas infondées et, de fait, une faiblesse des recettes de l'Etat est enregistrée depuis le début de l'année 2001, avec au premier rang les recettes fiscales indirectes.

2000 (périmètre 2001)

1 er trimestre 2000 (périmètre 2001)

1 er trimestre 2001

IR (hors CRDB)

343,4

89,8

95,2

IS (hors CRDB) brut

293,5

48,4

52,5

R & D IS

- 48,8

- 6,4

- 7,2

IS net (hors CRDB)

244,7

41,9

45,3

TVA brute

874,2

218,6

221,1

R & D TVA

-187,0

-40,6

-50,9

TVA nette

687,1

178,0

170,1

TIPP

159,2

40,0

35,6

Autres recettes nettes

120,5

37,5

38,6

Total recettes fiscales nettes

1.555,0

387,3

348,9

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Comme le souligne le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, « le premier trimestre de l'année 2001 est marqué par la diminution de la TVA nette et de la TIPP. Ceci s'explique par, d'une part la progression des remboursements de crédits de TVA et, d'autre part, par le mécanisme de TIPP « stabilisatrice » qui a réduit le montant des recouvrements. La comparaison en matière de TVA brute est délicate du fait de l'abaissement au 1 er avril 2000 du taux normal de la TVA (de 20,6 % à 19,6 %) visible à partir des recouvrements de mai 2000. Ainsi, les recouvrements de TVA brute au premier trimestre 2000 contiennent de la TVA collectée au taux normal de 20,6 % alors que les recouvrements au premier trimestre 2001 contiennent de la TVA collectée au taux normal de 19,6 % ».

D'une manière générale, d'après l'étude réalisée pour votre commission par l'OFCE, une réduction de la croissance aurait l'impact suivant :

Impact de la croissance sur les recettes fiscales

En milliards de francs courants

Ecart de croissance

0,4 point de PIB

1,0 point de PIB

Etat

5

13

Administrations de Sécurité sociale

8

20

Administrations publiques locales

2

5

Total

15

38

Source : OFCE, e-mod.fr

Dans la mesure où l'hypothèse du gouvernement était une croissance de 3,3 % pour 2001, et que celle-ci a été ramenée à 2,7 % par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie le différentiel s'établirait à 0,6 point de PIB, soit un impact de 23 milliards de francs environ.

2. Une situation confirmée par les derniers résultats d'exécution budgétaire

Selon les dernières informations en possession de votre commission, à la mi-mai 2001, les recettes du budget général sont en très léger repli (- 0,9 %) par rapport à la situation budgétaire un an plus tôt.

S'agissant des recettes fiscales directes , l'impôt sur le revenu atteint un niveau comparable à celui de l'année précédente (158 milliards de francs) et l'impôt sur les sociétés est dynamique, malgré de très importants remboursements (l'impôt net s'élève à 102 milliards de francs, contre 91,5 milliards de francs l'année précédente). Pour ces deux impôts, il est encore trop tôt pour tirer des enseignements sur le reste de l'année, dans la mesure où d'importantes modifications de droits devraient prendre leur effet dans le deuxième semestre de l'année, mais il n'y a pas de signe - a priori - d'affaiblissement. La bonne tenue des revenus des ménages en 2000 pourrait d'ailleurs contribuer à compenser une partie des mesures d'allègement du barème de l'impôt sur le revenu.

S'agissant des recettes fiscales indirectes , les résultats sont beaucoup plus contrastés : les recettes nettes de TVA, qui s'élèvent à 194,3 milliards de francs, reculent de 8,1 % tant en raison de l'atonie de la TVA brute que de l'importance des remboursements (+ 25 %), liée en partie à l'incidence de la réduction d'un point du taux de TVA, qui avait pris effet en avril 2000. Les recettes de TIPP, qui s'élèvent à 56,5 milliards de francs, sont comparables aux recettes de l'année passée.

Les indicateurs en matière de fiscalité indirecte sont préoccupants dans la mesure où la loi de finances initiale pour 2001 prévoit une hausse de la TVA nette de 4,0 % sur l'année et une hausse de la TIPP de 4,3 %, soit des taux d'augmentation apparemment en contradiction avec les résultats des premiers mois d'exécution budgétaire. D'une manière générale, les recettes nettes totales du budget de l'Etat devraient progresser de 3,2 % sur l'année, alors qu'elles sont en recul de près de 1 % au 17 mai.

Toutefois, bien que l'exécution budgétaire depuis le début de l'année soit décevante, le gouvernement reste confiant sur l'exécution en fin d'année.

En réponse au questionnaire que lui a adressé votre rapporteur, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie précise que « la révision de la croissance économique pour 2001 ne conduit pas à revoir la prévision de recettes fiscales qui devraient continuer à croître vigoureusement. En effet, elle affectera essentiellement les rentrées de TVA mais cet effet devrait être compensé par un rendement plus élevé que prévu d'autres impôts : l'évolution favorable des revenus des ménages en 2000, soutenus par le dynamisme de l'emploi, et les excellents résultats enregistrés par les entreprises, constituent un socle solide pour les recettes d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés de 2001 » .

La « marge de manoeuvre » que le gouvernement s'est constitué en reportant 15 milliards de francs de recettes non fiscales de 2000 sur 2001, n'est certainement pas étrangère à cette confiance. Comme le souligne la Cour des comptes, « ces 15 milliards de francs, qui représentent moins d'un pour cent des recettes définitives de l'Etat (mais 8 % du déficit 2000) constituent de fait la marge de manoeuvre que se donne le gouvernement ; ils illustrent la difficile conciliation des principes de prudence budgétaire (il ne serait pas nécessaire d'encaisser toutes les recettes, si la conjoncture est satisfaisante) et de permanence des méthodes ( il n'est pas admissible d'encaisser à sa guise ) en l'absence de référentiel officiel de la comptabilité de l'Etat, même lorsque les opérations sont conduites dans la transparence comme en 2000 ; ils montrent enfin que le solde budgétaire reste un simple solde de « caisse » et non la traduction des créances et des dettes enregistrées au cours de la période comptable ».

Toutefois, si tant est que les recettes non fiscales disponibles en 2001 permettent effectivement de servir de « variable d'ajustement » en fin d'année, les tendances déjà perceptibles pour la présente année pourraient s'accentuer en 2002 et mettre en difficulté l'application des mesures fiscales décidées par le gouvernement.

B. DES INCERTITUDES ENCORE PLUS FORTES À MOYEN TERME

1. Des voix notamment au sein de la majorité plurielle

Dans les conditions d'une croissance fragilisée, on peut légitimement s'interroger sur la durabilité du plan de baisse d'impôts prévu par le gouvernement, sans compter l'absence de vision « stratégique » de la majorité gouvernementale sur la politique fiscale. En effet, d'ores et déjà, des voix s'élèvent pour remettre en cause le programme fiscal pluriannuel du gouvernement.

Tout ralentissement de la croissance économique montrerait bien que la politique du gouvernement, inscrite dans une logique conjoncturelle, est fragile. De fait, la Cour des comptes conclut son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 : « l'exercice budgétaire 2000 se caractérise par une amélioration réelle de la situation budgétaire. Cependant, les risques d'évolution défavorable sont discernables ».

Baisser les impôts aujourd'hui, en l'absence de maîtrise des dépenses revient à les financer à crédit, en faisant payer par d'autres ces allégements. C'est ce que dénonce votre commission des finances. La baisse ne sera crédible que le jour où les charges baisseront et où la norme de progression des dépenses sera intangible.

2. Les interrogations des instances communautaires

Tout programme d'allégement d'impôt doit en effet s'appuyer sur une politique de rigueur budgétaire. Comme le souligne la Commission européenne dans sa communication au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social 9 ( * ) , « un budget proche de l'équilibre reste une condition préalable pour la stabilité macro-économique. Parallèlement, la réduction de la pression fiscale globale donne la possibilité d'éliminer des entraves à l'emploi, à l'activité des entreprises et à la croissance ».

Le gouvernement le reconnaît lui-même, lorsqu'il écrit dans son rapport sur le présent débat d'orientation budgétaire : « il serait en pure théorie envisageable d'augmenter les prélèvements pour réduire la dépense publique . Mais le meilleur chemin à suivre est de maîtriser la progression des dépenses publiques en les faisant progresser transitoirement moins vite que la croissance. Deux raisons nourrissent cette conviction : une hausse des prélèvements obligatoires n'est pas souhaitable et une évolution modérée des dépenses est compatible avec une amélioration de la qualité du service public ».

CHAPITRE III :

DE RÉELLES INQUIÉTUDES
SUR L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES

La politique budgétaire du gouvernement reposerait sur la maîtrise des dépenses publiques. Le recul très graduel du poids de ces dépenses dans le produit intérieur brut (PIB), prévu dans le programme pluriannuel de finances publiques 2002-2004, traduirait cette orientation.

Pourtant, il existe de nombreuses incertitudes et interrogations qui rendent votre commission sceptique quant à la capacité réelle du gouvernement de respecter cet engagement : dérive importante et régulière des dépenses de santé, rigidité accrue des dépenses de l'Etat, mauvaise exécution budgétaire, existence de « bombes à retardement » budgétaires, etc.

I. LE RELÂCHEMENT DE LA CONTRAINTE SUR LES DÉPENSES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

A. LA RÉVISION À LA HAUSSE DE L'OBJECTIF DE DÉPENSES PUBLIQUES

Le programme pluriannuel de finances publiques pour la période 2002-2004 repose notamment sur la définition d'un objectif de progression des dépenses de l'ensemble des administrations publiques. Ces dépenses progresseraient de 4,5 % en volume sur la période, soit 1,5 % par an.

Si le gouvernement, dans le programme de stabilité qu'il a présenté en décembre 2000 aux instances communautaires, indique que « l'actualisation de la programmation pluriannuelle [...] confirme le choix d'une évolution maîtrisée des dépenses publiques », il n'en pas moins vrai que « cette évolution est légèrement plus rapide que celle retenue dans la programmation précédente ».

Comme le note l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) dans l'étude réalisée pour le Sénat sur ce sujet, et annexée au présent rapport, « l'enveloppe a été relâchée par rapport aux programmes précédents ».

Ce « relâchement » est illustré par le tableau ci-dessous :

Croissance cumulée des dépenses en volume entre 2002 et 2004

En volume

Programmation 2001-2003

Programmation 2002-2004

Écart

Administrations publiques

4,0 %

4,5 %

+ 0,5 pt

Etat (en comptabilité budgétaire)

1,0 %

1,0 %

-

Administrations sociales

4,2 %

4,8 %

+ 0,6 pt

- dont maladie

4,5 %

5,5 %

+ 1 pt

- dont retraites

5,8 %

5,8 %

-

Administrations publiques locales

5,8 %

5,2 %

- 0,6 pt

Source : programmes pluriannuels de finances publiques

Le programme 2001-2003 supposait une augmentation de 1,3 % par an, et le programme 2000-2002 prévoyait une hausse de 1 % par an en volume. Il y a donc, au fil des programmes pluriannuels, un relâchement de la contrainte pesant sur l'évolution des dépenses, alors que le gouvernement ne cesse de proclamer que la « progression maîtrisée » de la dépense constitue la base de sa stratégie budgétaire.

La plus forte croissance programmée des dépenses résulte de l'absence de maîtrise des dépenses des administrations de sécurité sociale , dont la progression est portée de 4,2 % à 4,8 % sur la période, des dépenses de santé en particulier , dont l'évolution est révisée de 1 point à la hausse en un an, passant de 4,5 % à 5,5 %.

Les causes de la révision à la hausse des dépenses publiques selon le gouvernement

« Cette évolution [des dépenses des administrations publiques] est légèrement plus rapide que celle retenue dans la programmation précédente en raison de la mise en place de la convention UNEDIC qui se traduit par un ressaut important dans les prestations versées aux chômeurs en 2001 et 2002. Les dépenses maladie devraient également progresser légèrement plus rapidement qu'envisagé dans la programmation de l'an dernier, soit 1,8 % par an contre 1,5 %. Enfin, la montée en charge de la réforme du financement de la Communauté européenne rend les dépenses des administrations publiques plus dynamiques ».

Source : programme de stabilité français

B. LA RÉDUCTION DU POIDS DES DÉPENSES PUBLIQUES DANS LE PIB EST-ELLE CRÉDIBLE ?

1. Les doutes de votre commission

Le gouvernement, dans le même document, affirme que « la maîtrise des dépenses des administrations publiques permet de réduire leur poids dans le PIB », précisant que « la baisse du poids des dépenses publiques dans le PIB serait de 1,5 à 2,3 points de PIB sur trois ans suivant le scénario de croissance », ce dernier reposant, dans les prévisions du gouvernement, sur une croissance de 3 % qui est loin d'être certaine. Il convient de rappeler que, dans le programme de stabilité précédent, le poids des dépenses des administrations publiques dans le PIB devait se réduire de 2,6 points.

Evolution des dépenses d'administrations publiques de 1998 à 2004

Scénario de croissance à 3 %

(en points de PIB)

Source : programme pluriannuel de finances publiques

Le graphique ci-dessous retrace l'évolution de la part des dépenses dans le PIB pour chacun des sous-secteurs des administrations publiques :

Il convient pourtant de s'interroger sur la capacité du gouvernement à respecter ses engagements, non seulement en raison des incertitudes qui pèsent sur la croissance mais également du fait de la révision à la hausse, année après année, des programmations pluriannuelles.

2. Des comparaisons internationales défavorables à la France

Si le gouvernement se targue de faire passer le niveau des dépenses publiques en-dessous de 50 % du PIB, en 2004, il convient néanmoins de rappeler que l'Italie, longtemps considérée comme le mauvais élève de l'Union européenne en matière de finances publiques, est passé sous cette barre depuis 1997, et que la majorité de nos principaux partenaires ne l'a de toute façon jamais franchie , comme le montre le graphique ci-dessous :

Evolution des dépenses publiques

(en points de PIB)

Source : OCDE (INSEE pour la France)

*Estimation OCDE

II. LES DÉPENSES DE L'ÉTAT : UN RISQUE PERMANENT DE DÉRAPAGE

Le graphique ci-dessous compare la prévision et la réalisation en matière d'évolution des dépenses de l'Etat depuis 1998 :

Source : Cour des comptes

Il apparaît que, jusqu'à présent, le gouvernement a éprouvé d'extrêmes difficultés à respecter ses engagements : ceux-ci n'ont pas été tenus en 1998 ni en 1999, en dépit de manipulations comptables, et ne l'ont été en 2000, selon la Cour des comptes, qu'au prix de modifications de méthodes de comptabilisation.

Le tableau ci-après montre que le respect des engagements du gouvernement impose à ce dernier d'adapter la présentation de l'exécution à sa démonstration, comme ce fut le cas, par exemple en 1999, de la progression des dépenses calculée hors dépenses exceptionnelles :

A. « DES DÉPENSES DE L'ÉTAT QUI RÉSISTENT À LA BAISSE » EN 2000

L'année 2000 devait constituer une étape importante en matière d'évolution des dépenses de l'Etat. En effet, dans la loi de finances initiale pour 2000, le gouvernement s'est fixé un objectif à la fois clair et relativement ambitieux : la stabilisation en volume des dépenses de l'Etat, soit une progression des dépenses de 15 milliards de francs (17,5 milliards de francs hors dette), égale à l'augmentation prévisionnelle des prix hors tabac (+ 0,9 %).

Sa position officielle n'avait pas changé 10 ( * ) , en dépit de la présentation, dès le printemps, d'un projet de loi de finances rectificative 11 ( * ) dont l'objet était essentiellement de procéder à des baisses d'impôts d'un montant de 40,6 milliards de francs, grâce à la réévaluation des recettes de l'Etat à hauteur de 51,4 milliards de francs au total. Il décidait toutefois de consacrer le complément des surplus de recettes fiscales à de nouvelles dépenses, soit plus de 10 milliards de francs, et de laisser le déficit budgétaire à un niveau inchangé.

Le rapport préliminaire de la Cour des comptes portant sur l'exécution des lois de finances pour 2000 semble confirmer les engagements du gouvernement, mais lui apporte néanmoins plusieurs réserves.

Les réserves de la Cour des comptes sur la présentation par le gouvernement de la norme de progression des dépenses de l'Etat en 2000

Dans son rapport préliminaire relatif à l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour indique que « la hausse moyenne des prix ayant été de 1,6 %, la progression des dépenses brutes du budget général, soit 1,6 % en valeur, correspond à une stabilité en volume », et que « dans la présentation faite par le MINEFI 12 ( * ) , le calcul d'un montant de dépenses nettes conduit au même résultat ».

Ainsi, pour la première fois depuis 1998, le gouvernement aurait respecté la norme de progression des dépenses de l'Etat qu'il avait annoncée en loi de finances initiale.

Toutefois, la Cour des comptes, par ses trois observations, apporte de sérieux tempéraments à cette présentation faite par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie :

- elle s'interroge sur les recettes relatives à la dette, puisqu'il est procédé à une contraction entre des recettes et des dépenses, qui, le plus souvent, n'ont pas lieu au cours des mêmes exercices ;

- surtout, elle « note que c'est grâce à l'inflation que le résultat de 0 % en volume a pu être affiché », le taux d'inflation constaté en exécution, soit 1,6 %, étant « moins bon » que celui annoncé en loi de finances initiale, soit 0,9 % ;

- enfin, elle pose la question de la sincérité de la présentation retenue par le ministère : « les résultats peuvent être présentés de différentes manières, relativement techniques, avec des « ajustements » divers et variés, qui peuvent alimenter, au plan interne, le débat récurrent sur l'opacité des comptes de l'Etat, consolidés ou non », la Cour déplorant « l'absence dommageable d'un « référentiel » de normes comptables applicables à l'Etat, qu'il paraît impératif d'élaborer sans délai ».

Plus généralement, elle note que « la lenteur de l'amélioration [de la situation budgétaire] s'explique aussi par des dépenses de l'Etat qui résistent à la baisse », et souligne « la difficulté à diminuer structurellement les dépenses de l'Etat ».

B. UNE ÉVOLUTION PRÉVISIBLE INQUIÉTANTE DES DÉPENSES EN 2001

1. Les intentions affichées par la loi de finances initiale

La loi de finances initiale pour 2001 se fixe l'objectif d'une progression des dépenses de l'Etat de 0,3 % en volume , soit 1,5 % en francs constants, compte tenu d'une prévision d'inflation de 1,2 %.

Cette norme de progression des dépenses apparaît donc relativement modérée, même si la loi de finances initiale pour 2000 était construite sur la stabilité en volume des dépenses. Ce choix se traduira par une hausse de 25 milliards de francs des dépenses nettes du budget général.

Il convient toutefois d'insister sur un point : le choix de cette norme de progression des dépenses relativement modérée dissimule l'inflexion à la hausse de la politique budgétaire du gouvernement. En effet, l'Etat, non seulement, continuera de dépenser davantage en 2001, mais ses dépenses augmenteront également au cours des deux années suivantes, alors que, jusqu'à présent, le gouvernement avait alterné stabilisation et légère progression des dépenses.

2. Des intentions guère confirmées par les premiers résultats de l'exécution budgétaire

La norme de progression de 0,3 % des dépenses de l'Etat en 2001 semble particulièrement difficile à respecter au regard des premières informations sur l'exécution budgétaire communiquées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le graphique ci-après, qui retrace les résultas de l'exécution des quatre premiers mois des années 1999, 2000 et 2001, montre bien que, à la fin de chaque mois, les dépenses du budget de l'Etat sont plus importantes qu'à la même date de l'année précédente :

Situation mensuelle budgétaire : les dépenses à fin janvier,
février, mars et avril 1999, 2000 et 2001

(en milliards de francs cumulés)

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

En janvier , les dépenses du budget général se sont élevées à 138,6 milliards de francs en 2001, contre 123,8 milliards de francs en 2000, soit une progression de 12 % . Le ministère estime, dans son commentaire de la situation mensuelle budgétaire à la fin janvier 2001, qu' « une bonne part de la forte croissance apparente, portant au demeurant sur de faibles masses, est liée à des effets calendaires ».

Pourtant, ce phénomène continue d'être observé par la suite.

En février , le montant des dépenses s'établit à 252,3 milliards de francs, au lieu de 246,1 milliards de francs l'année précédente, soit une hausse de 2,5 % . Le ministère continue de mettre en avant « des effets dus à des calendriers de paiement différents entre 2000 et 2001 », notamment en ce qui concerne la charge de la dette et les dépenses miliaires en capital, ajoutant que « comme prévu, l'écart entre le rythme de dépenses constaté entre 2000 et 2001 se résorbe en partie en février ».

• Pourtant, en mars , cet écart se creuse de nouveau : les dépenses progressent de 3,3 % entre la fin mars 2000, soit 391 milliards de francs, et la fin mars 2001, soit 403,9 milliards de francs. Sur la même période, la hausse des dépenses avait été de 2,1 % de 1999 à 2000. Cette fois, le ministère invoque deux arguments pour expliquer cette croissance des dépenses : outre « la modification du calendrier des dépenses militaires en capital », il souligne également que « des changements de structure commencent à faire sentir leurs effets », en particulier les versements au profit des collectivités locales suite à la suppression de la part régionale de taxe d'habitation et de la suppression de la vignette.

En avril , les chiffres ne sont pas meilleurs, puisque les dépenses à la fin du mois passent de 577,3 milliards de francs en 2000 à 608 milliards de francs en 2001, soit une progression de 5,3 % , alors que, à la même époque l'année dernière, les dépenses avaient reculé de 1,8 %. Le ministère estime que cette évolution est « le reflet de la modification du calendrier des dépenses militaires en capital », à laquelle s'ajoutent des changements de périmètre. Dès lors, « un ralentissement de la hausse apparente des dépenses devrait se produire à partir de l'été ».

3. L'apparition de besoins nouveaux

Le début de cette année a été marqué par des intempéries, des inondations en particulier, ainsi que par des crises affectant le monde agricole, encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), dite « maladie de la vache folle », et épizootie de fièvre aphteuse.

Le coût précis de ces crises n'est pas encore bien connu, mais le gouvernement a d'ores et déjà publié un décret d'avance, le 21 mai 2001.

Ce décret ouvre des crédits à hauteur de 3.055 millions de francs sur les dépenses ordinaires, et, sur les dépenses en capital, de 320 millions de francs au titre des autorisations de programme et de 65 millions de francs au titre des crédits de paiement.

Trois budgets sont concernés par les ouvertures de crédits au titre des dépenses ordinaires :

- le budget de l'agriculture et de la pêche bénéficie d'une ouverture de crédits d'un total de 2.205 millions de francs, dont 2.040 millions de francs sur le chapitre 44-53 « Interventions en faveur de l'orientation et de la valorisation de la production agricole » ;

- le budget des charges communes est abondé de 600 millions de francs, soit 450 millions de francs au titre des dépenses accidentelles (chapitre 37-95), destinés à accorder des subventions aux collectivités locales victimes des inondations, et 150 millions de francs pour l'indemnisation des préjudices subis dans le secteur du tourisme suite au naufrage de l'Erika (chapitre 44-93) ;

- enfin, le budget de la santé et de la solidarité voit les crédits du chapitre 46-81 « Action sociale de lutte contre l'exclusion et d'intégration » croître de 250 millions de francs.

En ce qui concerne les dépenses en capital :

- les autorisations de programme accordées, d'un montant de 320 millions de francs, se répartissent de la façon suivante : 240 millions de francs sur le budget de l'enseignement supérieur (chapitre 56-10 « Investissements. Enseignement supérieur et recherche »), 20 millions de francs sur le budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (chapitre 57-91 « Travaux de sécurité et expropriations sur les sites miniers »), et 60 millions de francs sur les crédits de l'intérieur et de la décentralisation (chapitre 67-54 « Subventions d'équipement aux collectivités pour les réparations des dégâts causés par les calamités publiques ») ;

- les crédits de paiement ouverts, soit 65 millions de francs, sont répartis en 60 millions de francs sur le chapitre 56-10 du budget de l'enseignement supérieur, et en 5 millions de francs sur le chapitre 57-91 du budget de l'économie, des finances et de l'industrie.

Ce décret d'avances est gagé intégralement par des annulations de crédits, d'un montant de 3.120 millions de francs au titre des crédits de paiement et de 1.354,8 millions de francs au titre des autorisations de programme.

La quasi-totalité du budget est concernée par ces annulations, souvent pour des montants relativement faibles, de quelques dizaines de millions de francs.

Les principales annulations sont les suivantes (en crédits de paiement) :

- 490 millions de francs sur le dispositif emplois-jeunes du budget de l'emploi, le gouvernement démontrant ainsi, une fois de plus, la surestimation de ces crédits ;

- 450 millions de francs sur le budget de l'agriculture et de la pêche ;

- 305 millions de francs sur le budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dont presque la moitié (150 millions de francs) sur les moyens de fonctionnement des services ;

- enfin, 300 millions de francs sur le budget de la défense, traditionnelle variable d'ajustement budgétaire du gouvernement.

Les annulations de crédits sur le budget de la défense

Les 300 millions de francs annulés sur le budget d'équipement de la défense représentent près de 10 % du total du décret d'avances.

L'essentiel des économies est supporté par les programmes affectés aux systèmes d'information et de communication, dont les lacunes ont pourtant été soulignées sur le terrain du Kosovo.

Il faut en particulier souligner la réduction de 13 % des crédits affectés aux moyens de télécommunication des bases aériennes, qui n'avaient pourtant fait l'objet d'aucune mesure nouvelle dans la loi de finances pour 2001, ou encore l'annulation de 8,5 millions de francs sur les 10 millions de francs de mesures nouvelles prévues pour la construction de casernes de gendarmerie.

Enfin, on soulignera l'annulation quasi-totale (63 millions de francs sur 85 millions de francs) des mesures nouvelles accordées par la loi de finances pour 2001 pour le programme d'armement anti-char (AC3G-MP) de l'armée de terre. On rappellera que ce programme important a été remis en cause par nos partenaires britannique et néerlandais et que le système français d'armes antichar fait aujourd'hui l'objet d' « une réflexion de fond » qui se traduit par un retard important de notre équipement, notamment par rapport au Royaume-Uni. Ces nouvelles annulations montrent sans doute que cette « réflexion » n'a pas encore abouti.

Inversement, on pourra s'étonner que la dotation d'aide à la reconversion de l'économie polynésienne (622,5 millions de francs, dont 122,5 millions de francs de mesures nouvelles), pourtant vivement contestée par plusieurs intervenants à l'occasion du débat budgétaire, ne fasse l'objet que d'une annulation de « l'épaisseur du trait » : moins de 4 millions de francs, soit environ 0,5 % de la dotation.

Il apparaît qu'une part non négligeable des annulations de crédits résulte d'une sous-consommation, ce qui pose le problème de la budgétisation initiale des dotations budgétaires lors de la préparation du projet de loi de finances.

Ces divers mouvements de crédits seront ratifiés au cours de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2001, en fin d'année. Toutefois, il conviendra de rester vigilant sur la neutralité des nouvelles ouvertures de crédits qui risquent fort de se produire à cette occasion, lorsque sera mieux connu le montant de ces « dépenses exceptionnelles » : la probabilité qu'elles ne soient pas entièrement gagées par des annulations de crédits d'un montant équivalent est bien réelle.

III. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE 2002 À 2004 : ENTRE « FAUSSE GÉNÉROSITÉ » ET VRAI LAXISME

A. L'ILLUSIONNISME BUDGÉTAIRE : « LE BUDGET 2002 DOIT ÊTRE UN BUDGET DYNAMIQUE »

1. Le gouvernement entretient l'illusion de la bonne gestion

La lettre de cadrage que le Premier ministre adresse aux membres du gouvernement à l'occasion de la préparation de la loi de finances est transmise, depuis l'année dernière, aux commissions des finances du Parlement, mesure de transparence dont votre commission se félicite.

Celle pour le budget 2002, en date du 13 avril dernier, constitue néanmoins en quelque sorte un exercice d'« illusionnisme budgétaire ». Elle entretient en effet le credo de la maîtrise des dépenses de l'Etat , pourtant démenti à la fois par votre commission à l'occasion du rapport que, investie des prérogatives des commissions d'enquête, elle a publié en septembre dernier 13 ( * ) , et par la Cour des comptes, comme il a été rappelé plus haut.

Cette lettre de cadrage indique ainsi que la croissance que connaît la France depuis quelques années « a été favorisée par une politique budgétaire maîtrisée » grâce à la fixation et au respect d'une norme de progression des dépenses. Le chef du gouvernement ajoute que « la gestion de la dépense a été active », estimant que « le gouvernement a procédé à une sensible ré-allocation des ressources publiques en faveur de nos priorités, en surmontant l'inertie habituelle de la dépense », et concluant : « comme l'ont été tous les budgets depuis 1997, le budget 2002 doit être un budget dynamique ».

Le rapport que le gouvernement a déposé en vue du présent débat d'orientation budgétaire précise ses intentions, la gestion dynamique et l'évolution maîtrisée des dépenses - clef de voûte de la stratégie du gouvernement en matière de finances publiques - constituant une « démarche essentielle pour que la sphère publique dépense mieux ».

Votre commission se réjouit donc de ce que le gouvernement, se ralliant à la position défendue par le Sénat, cherche en apparence à « dépenser mieux » plutôt que « dépenser plus ».

2. Un objectif paradoxal en matière de dépenses

Alors que le programme pluriannuel de finances publiques 2002-2004 prévoit une progression des dépenses de l'Etat de 1 % en volume sur trois ans, l'année 2002, à elle seule, devrait les voir croître de 0,5 % en volume , soit une progression de 1,7 % en valeur compte tenu d'une hypothèse d'inflation hors tabac de 1,2 %.

L'objectif que le Premier ministre a fixé dans sa lettre de cadrage pour les dépenses en 2002 apparaît dès lors paradoxal : en effet, pourquoi utiliser le maximum de la marge de manoeuvre budgétaire eu égard aux engagements pris auprès des institutions communautaires, si les dépenses ont été gérées de façon aussi rigoureuse par le passé, et si les normes de progression des dépenses antérieures, pourtant raisonnables, ont bel et bien été respectées ? Ainsi la moitié de l'objectif triennal d'augmentation des dépenses de l'Etat en volume se trouve engagée sur un an, soit 29,1 milliards de francs supplémentaires par rapport à 2001. Il convient d'y ajouter les « économies » et redéploiements réalisés par le gouvernement, preuve de sa « gestion dynamique de la dépense ».

Les économies et redéploiements réalisés par le gouvernement sur le budget général posent la question de la qualité des autorisations budgétaires

Le gouvernement, qui se targue d'une « gestion dynamique de la dépense », indique avoir réalisé depuis 1998 132 milliards de francs d'économies et de redéploiements, ainsi répartis :

- 29 milliards de francs en 1998 ;

- 31 milliards de francs en 1999 ;

- 34 milliards de francs en 2000 ;

- 38 milliards de francs en 2001.

Ces économies et redéploiements « contribuent à financer les mesures nouvelles souhaitées par le gouvernement ».

Votre commission ne peut dissimuler sa perplexité devant cette affirmation.

Elle souhaite d'abord rappeler qu'une économie se traduit par une diminution nette du montant des dépenses, ce qui ne s'est jamais produit depuis 1998, et qu'elle ne sert pas à financer des priorités. En outre, ces économies sont avant tout des économies de constatation, résultant de la bonne tenue de la conjoncture : il s'agit donc en réalité de moindres dépenses, telles que celles apparues sur les aides à l'emploi ou la charge de la dette.

Surtout, il convient de s'interroger sur la qualité des conditions de la budgétisation initiale : est-il normal que, chaque année depuis quatre ans, plus de 30 milliards de francs ne soient pas utilisés conformément au vote du Parlement ? Cette préoccupation est d'ailleurs partagée par la Cour des comptes, qui lui consacre quelques développements dans son rapport préliminaire portant sur l'exécution des lois de finances : « au-delà du taux réel d'évolution des dépenses du budget de l'Etat, l'ensemble des engagements pris par les pouvoirs publics pose le problème de la sincérité des inscriptions de crédits dans les lois de finances ».

Tel est le cas des reports de crédits ou des annulations : « les reports de crédits récurrents favorisent les affichages flatteurs, mais illusoires » : ainsi 11 % des crédits votés au titre du budget du MINEFI ont-ils été reportés de 1999 sur 2000, 26,6 % de ceux de la culture, 37 % de ceux de l'environnement. De même, « le secteur de l'emploi, dont certaines dotations ont fait l'objet de fortes annulations en 2000, représente un autre domaine où la vérité des besoins doit encore progresser » : sur ce budget, en effet, 7,30 milliards de francs ont été annulés du fait de moindres besoins de financement des emplois-jeunes et des différents dispositifs d'aide au retour à l'emploi.

La Cour des comptes estime ainsi que « la constatation de reports de crédits récurrents conduit à s'interroger sur la réalité des priorités des missions affichées en lois de finances, compte tenu du cadre des finances publiques et des engagements pris devant les instances européennes, le Parlement ou l'opinion publique ».

En fait, le gouvernement, de façon implicite, semble annoncer dès maintenant qu'il ne se sent plus lié par les engagements en matière de finances publiques allant au-delà de 2002.

Bien plus qu'un léger desserrement de la contrainte sur les dépenses, c'est d'un renoncement à la maîtrise de la dépense publique qu'il s'agit.

3. Des priorités budgétaires gouvernementales à relativiser

Dans son rapport précité, le gouvernement présente l'évolution des budgets prioritaires depuis 1997, reproduite ci-après :

En fait, une telle présentation n'a guère de pertinence. En effet, si le budget de l'environnement croît de 43 %, cette augmentation ne représente que 1 milliard de francs 14 ( * ) , alors que le budget de l'éducation a vu ses dotations progresser de 14 %, ce qui représente 47 milliards de francs (des dépenses de rémunérations pour l'essentiel). En revanche, la sécurité n'est pas aussi prioritaire que le gouvernement le prétend, puisque la croissance de 10 % du budget de l'intérieur est la plus faible des six départements ministériels « prioritaires ».

Il convient plutôt de rappeler les propos de la Cour des comptes s'agissant dans la réalité des priorités budgétaires du gouvernement : « pour tenir dans le cadre des contraintes existantes et des annonces faites, les « affichages » actuels manquent de vraisemblance ».

B. LA RÉALITÉ DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE DU GOUVERNEMENT

Dans son rapport précité, le gouvernement semble reconnaître implicitement le caractère peu crédible de ses affichages budgétaires , en particulier eu égard aux contraintes fortes qui pèsent sur les dépenses de l'Etat : « le budget 2002 devra être un budget de mouvement et de redéploiements. Compte tenu des évolutions probables des charges de la dette et des dépenses de fonction publique, le montant des mesures nouvelles devrait être sensiblement égal à celui des redéploiements réalisés ».

La suite de ses propos en constitue même en quelque sorte l'aveu quand il indique que le cadrage retenu pour 2002 « n'est synonyme ni de relâchement ni d'immobilisme budgétaire », même s'il « invite à analyser la pertinence de la dépense publique et à procéder à des redéploiements internes ».

Or, les bonnes intentions affichées ne se vérifient pas.

1. La volonté de « dépenser à bon escient » !

Dans son rapport précité, le gouvernement indique vouloir « dépenser à bon escient pour le présent » et « améliorer les comptes pour préparer l'avenir ». Or, votre commission ne considère pas qu'il dépense « à bon escient ».

La gestion gouvernementale aboutit à accentuer la rigidité de la dépense publique , qui, selon la Cour des comptes, « reste préoccupante : les moyens des services (36 % des dépenses ordinaires) continuent leur progression », et, si « les investissements civils augmentent de 3,6 % », « seule une gestion active de la dette dont l'impact est cependant très marginal et une redéfinition du domaine des interventions, notamment sociales, permettent de desserrer un peu la contrainte » en 2000.

Par ailleurs, la diminution de certains postes de dépenses , comme les dotations du titre IV, en retrait de 5,1 % en 2000, avec tout de même 485 milliards de francs, n'est qu'apparente , comme le souligne la Cour des comptes : « jusqu'à maintenant, [ce titre] a connu des changements de structures nombreux et des redéploiements significatifs », en particulier les transferts liés à la mise en place, toujours virtuelle, du FOREC 15 ( * ) . La Cour note du reste que, « en réintégrant au budget général les dépenses transférées au FOREC, les dépenses du titre IV auraient progressé de 2,6 % au lieu de baisse de 5,1 % ».

Le jugement de la Cour des comptes sur la capacité du gouvernement à « dépenser à bon escient »

Dans son rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances en 2000, la Cour des comptes souligne la rigidité de la dépense publique et l'immobilisme du gouvernement sur la gestion de ladite dépense.

Quelques phrases concises suffisent à apprécier l'affirmation du gouvernement selon laquelle il dépenserait « à bon escient » :

- « les charges de la dette sont difficiles à maîtriser » ;

- « les dépenses d'intervention restent stables sur moyen terme, alors qu'elles sont en principe plus flexibles, par nature » ;

- « les dépenses de personnel augmentent continuellement, et les perspectives d'alourdissement des charges de retraite de la fonction publique de l'Etat dans les années à venir sont préoccupantes » ;

- « le fonctionnement - hors personnel - et l'investissement sont à l'étiage ».

2. La dynamique des dépenses reste forte

Dans son rapport précité, la Cour des comptes indique que « l'examen rétrospectif des dépenses sur la période 1996-2000 permet d'apprécier la portée des orientations du gouvernement pour les années à venir ». Or, il apparaît que cette portée est extrêmement réduite.

Le tableau ci-dessous présente l'évolution des dix premiers postes des dépenses de l'Etat depuis 1997 :

De 1997 à 2001, à champ constant de 1998, les dépenses du budget général ont augmenté de 104 milliards de francs. Or, au cours de ces quatre années, si la plus forte progression concerne les transferts sociaux, en hausse de 16,4 %, soit 18 milliards de francs supplémentaires, ce sont les dépenses relatives à la fonction publique qui ont le plus crû en valeur, passant de 636,8 milliards de francs en 1997 à 709,8 milliards de francs en 2001, soit une progression de 73 milliards de francs (+ 11,5 %). Plus de 70 % de la hausse des dépenses sur la période 1997-2001 sont imputables aux dépenses de fonction publique.

Les causes de l'évolution des dépenses du budget général de 1997 à 2001

L'analyse des deux premiers postes du budget général - les dépenses de fonction publique et la charge de la dette - permet de relativiser les propos du gouvernement qui se targue de « dépenser à bon escient ».

a) Le poids croissant des dépenses de fonction publique dans le budget

Dans son rapport préliminaire précité, la Cour des comptes estime que « la fonction publique constitue la difficulté majeure ». Elle ne cache pas son inquiétude sur l'évolution de ce poste de dépenses : « une augmentation de près de 3 % en valeur, par an, en cinq ans, depuis 1996, se concilie mal avec une augmentation maîtrisée en volume dams les années qui viennent pour l'ensemble des dépenses, d'autant que la pression est forte pour procéder nombre pour nombre aux remplacements des nombreux départs en retraite prévus ».

Le gouvernement souligne, lui aussi, cette évolution préoccupante, dans son rapport précité : la progression des dépenses de fonction publique « a été plus rapide que celle du budget global (+ 11,5 %, contre + 6,7 % en valeur) si bien que leur part dans le budget de l'Etat a augmenté à structure constante de deux points entre 1997 et 2001 ».

Le graphique ci-dessous retrace cette évolution :

Part des dépenses de fonction publique dans le budget général

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

La part des dépenses de fonction publique dans le budget général a progressé constamment depuis 1997, passant de 40,7 % à 42,5 %, ce qui traduit bien la rigidité grandissante de la dépense publique. Cette rigidité est encore accentuée par le caractère largement automatique de la progression de ce poste de dépenses, comme le montre le graphique suivant :

Les différents facteurs d'évolution des dépenses de fonction publique
entre 1997 et 2001

(en milliards de francs)

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Ainsi, sur les 73 milliards de francs supplémentaires au titre des dépenses de fonction publique depuis 1997, 32 milliards de francs, soit moins de la moitié, résultent de décisions du gouvernement, à savoir 23,6 milliards de francs au titre des mesures générales, les créations nettes d'emplois et les titularisations d'effectifs ne se traduisant « que » par 8,4 milliards de francs supplémentaires, soit 12 % du total. L'essentiel de ces dépenses provient de facteurs progressant de façon spontanée , comme l'augmentation du nombre de pensionnés, qui sera plus forte encore à l'avenir, le paramètre glissement-vieillesse-technicité (GVT).

La coûteuse politique salariale du gouvernement dans la fonction publique

Après l'échec des négociations salariales dans la fonction publique, ouvertes en janvier 2001, le gouvernement a décidé de revaloriser de manière unilatérale les traitements des personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des établissements publics d'hospitalisation.

Des mesures de revalorisation ont été annoncées le 23 avril dernier :

+ 0,5 % au 1 er mai 2001 ;

+ 0,7 % au 1er novembre 2001 ;

+ 0,5 % au 1er mars 2002 ;

+ 0,7 % au 1er décembre 2002.

Ces mesures emportent, pour la fonction publique de l'Etat, un coût de 19,4 milliards de francs sur la période 2001-2003. Elles concernent 3,9 millions de fonctionnaires, dont 2,2 millions d'actifs et 1,7 million de retraités. Par ailleurs, a été annoncée l'attribution au 1 er mai 2001 de points différenciés jusqu'à l'indice nouveau majoré 350, soit l'équivalent de 1,4 SMIC.

Toutes fonctions publiques confondues, le coût de l'ensemble des mesures annoncées est évalué par le gouvernement à environ 34 milliards de francs sur 2001-2003.

Cette politique salariale dans la fonction publique est à l'origine de la révision de la norme de progression des dépenses de l'Etat de 0,3 % à 0,5 % pour 2002, comme le reconnaît le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie dans sa réponse à une question de votre rapporteur général : « les principales contraintes qui pèsent sur le budget 2002 sont liées [...] aux mesures salariales prises par le gouvernement en avril 2001, dont le coût arrivera en année pleine en 2002 ».

Le gouvernement n'en est pas moins conscient de cette évolution inquiétante, puisqu'il note dans le rapport qu'il a présenté à l'occasion du présent débat d'orientation budgétaire : « le contexte est propice à un ajustement des effectifs de la fonction publique du fait des nombreux départs en retraite attendus dans les dix années à venir ». Les prochains arbitrages diront si le gouvernement a eu le courage de procéder à ces ajustements.

b) La croissance continue de la charge de la dette

Dans son rapport, le gouvernement note que « la période 1997-2001 est marquée par une évolution très modérée grâce à la diminution des taux d'intérêt qui s'est diffusée progressivement au stock de dette grâce à une gestion active qui a permis de réaliser des gains de refinancement ». Si ce poste de dépenses n'a effectivement progressé que de 7 milliards de francs depuis 1997, il n'en reste pas moins le deuxième poste du budget général, relativement « loin » devant le troisième, c'est-à-dire l'emploi (14,4 %, contre 8,9 %).

La Cour des comptes note du reste que « la charge de la dette a recommencé à augmenter en 2000, compte tenu de la hausse des taux : après l'interruption de 1999 - diminution de 2,7 % succédant à plus de 15 ans de croissance continue -, la charge brute de la dette a progressé de 3,8 % ». Elle conclut : « l'objectif de maîtrise de la dette n'est pas réellement atteint ». Cette analyse est illustrée par le graphique ci-dessous, relatif à la charge de la dette nette :

Evolution de la charge nette de la dette depuis 1997 (à structure constante)

(en milliards de francs)

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

En réalité, il semble bien que la diminution observée en 2000 constitue une exception au sein d'une tendance longue à la croissance des charges de la dette.

Comme le note la Cour des comptes dans son rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances en 2000, les charges de la dette représentent une contrainte « évidente » sur les finances publiques.

c) Une évolution des dépenses échappant de plus en plus au pouvoir politique

Les dépenses de fonction publique et les charges de la dette présentent une dynamique telle qu'elles constituent à elles seules la quasi-totalité de la progression des dépenses du budget général depuis 1998, comme le montre le graphique ci-après :

Evolution des dépenses du budget général

(en milliards de francs)

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

En 1998 et en 2000, les dépenses de l'Etat auraient diminué si l'on ne prenait pas en compte les dépenses de fonction publique et les charges de la dette. Elles auraient augmenté dans des proportions bien moindres en 1999 et 2001. Ainsi, si les dépenses de l'Etat augmentent aujourd'hui, c'est essentiellement du fait de deux catégories de dépenses -la fonction publique et la charge de la dette- qui ne sont pas maîtrisées et qui ôtent toute marge de manoeuvre budgétaire aux gouvernements.

3. Un objectif de retour à l'équilibre des finances publiques pour 2004 compromis

Dans son rapport précité, le gouvernement indique que sa stratégie budgétaire « suppose l'équilibre des finances publiques à partir de 2004 ». L'équilibre serait atteint par la fixation, dans le programme pluriannuel de finances publiques, d'un objectif de progression de l'ensemble des dépenses publiques (Etat, organismes divers d'administration centrale, collectivités locales, régimes de sécurité sociale) de 4,5 % en volume entre 2002 et 2004, soit une hausse de 1,5 % par an.

Le respect de cet engagement serait facilité par au moins deux éléments :

- les contraintes imposées par l'Union économique et monétaire : « la concurrence fiscale exercée par nos partenaires de la zone euro constitue désormais un enjeu important et incite à réduire comme eux les déficits publics plutôt par une maîtrise des dépenses que par des hausses d'impôts » ;

- la réforme de l'Etat : « la maîtrise des dépenses est compatible avec une amélioration de la qualité du service public. La réforme de l'Etat doit permettre d'améliorer la qualité de service rendu aux usagers tout en adaptant les moyens mobilisés » ; « cette démarche suppose de passer d'une logique de moyens à une logique de résultats ».

Or, votre commission craint que cet objectif d'équilibre par la maîtrise de la dépense publique ne soit gravement compromis.

En effet, non seulement les dépenses ne sont pas maîtrisées, ne serait-ce que parce qu'elles sont « poussées à la hausse » par leur dynamique propre, mais aussi la réforme de l'Etat ne constitue pas une véritable priorité pour le gouvernement, la France étant largement en retard sur ce point par rapport aux principaux pays développés 16 ( * ) .

A cet égard, la conclusion du rapport préliminaire précité de la Cour des comptes ne manque pas d'inquiéter votre commission : « le risque de dérapage des finances publiques de l'Etat n'est pas exclu, si la croissance n'apportait pas les recettes nécessaires, et si la pression à la hausse des dépenses publiques ne pouvait être maîtrisée, voire si elle était encouragée ».

Or, ce risque de dérapage est d'autant moins exclu qu'une véritable « épée de Damoclès budgétaire » est suspendue au dessus du budget de l'Etat.

C. DES « BOMBES À RETARDEMENT » BUDGÉTAIRES

1. Les retraites de la fonction publique

Les fortes évolutions démographiques affectant la fonction publique - la moitié des fonctionnaires actuellement en poste va partir à la retraite d'ici 2012 - et l'immobilisme dangereux du gouvernement sur ce dossier sont à l'origine de l'explosion programmée du coût des pensions.

Cette année, 50.500 fonctionnaires civils devraient partir à la retraite, puis 55.100 en 2002, soit une progression de plus de 9 % en un an, cette tendance allant s'accentuer par la suite puis se stabiliser pendant plusieurs années. La charge budgétaire correspondante va donc très fortement augmenter.

Cette évolution explique déjà en partie la forte dynamique propre des dépenses de fonction publique. Ainsi, en supposant inchangé le rythme moyen des créations d'emplois depuis 1997, la charge supplémentaire d'ici 2005 par rapport à 2001, serait proche de 46,2 milliards de francs, dont 21,6 milliards de francs au titre de la progression de la masse salariale, et 24,7 milliards de francs au titre de la progression des pensions. D'ici 2010, la charge supplémentaire serait de 111 milliards de francs, soit 44,8 milliards de francs au titre de la progression de la masse salariale, et 66,2 milliards de francs au titre des pensions. Pour chacune de ces projections, les pensions expliquent, et dans une proportion croissante dans le temps, la progression des dépenses de fonction publique. Une stabilisation des effectifs civils à leur niveau de 2001 ne changerait rien à la hausse prévue des dépenses de pension : elle est donc d'ores et déjà programmée.

2. Les emplois-jeunes : que deviendront-ils ?

Les emplois-jeunes représentent un coût budgétaire considérable, passé de 8 milliards de francs en 1998 à plus de 22 milliards de francs en 2001.

Comme le note le gouvernement dans son rapport pour le présent débat d'orientation, « les économies [sur les crédits de l'emploi] ont contribué au financement des emplois-jeunes [...] pour un stock moyen de 238.000 contrats prévu en LFI 2001 », qui est en-dessous de l'objectif initial de 350.000, soit des dépenses potentielles supplémentaires de plus de 10 milliards de francs.

Ce phénomène est illustré par le tableau ci-dessous :

Évolution des interventions en faveur de l'emploi
à structure constante 2001

(en milliards de francs)

1998

1999

2000

2001

Variation
1998-2001

Insertion des publics en difficulté
(CES, CEC, CIE)

38,4

35,1

31,4

29,4

-23,4%

Emplois jeunes

8,1

13,9

21,3

22,0

171,6%

Formation professionnelle

21,1

22,9

22,6

23,1

9,5%

Fonds national de l'emploi
(ASS, Al)

8,9

9,1

9,2

8,3

-6,7%

ANPE

5,2

5,8

6,4

6,9

32,7%

Préretraites

15,6

10,7

8,6

6,3

-59,6%

Exonérations de cotisations sociales

2,9

2,9

2,9

4,0

37,9%

Investissements

0,4

0,5

0,5

0,4

0,0%

Interventions en faveur de l'emploi

100,6

100,9

102,9

100,4

-0,2%

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Ce que le gouvernement appelle les « redéploiements » au sein du budget de l'emploi se traduit par le fait que, comme l'indique l'OFCE dans l'étude réalisée à la demande de votre commission des finances, « depuis le retour au pouvoir de la gauche, les dispositions d'aide à l'emploi dans le secteur privé ont été fortement réduites, au profit d'emplois dans le secteur non marchand ».

Combien y a-t-il d'emplois-jeunes selon l'OFCE ?

Dans l'étude susmentionnée, l'OFCE tente de comptabiliser le nombre d'emplois-jeunes effectivement en poste, ce qui n'est guère aisé, comme le Sénat l'avait du reste relevé à l'occasion de l'examen du dernier projet de loi de finances.

« Fin avril 2001, 277.000 emplois-jeunes avaient été créés : 35 % des postes étaient des emplois de l'Etat, 30 % dans les associations et 35 % dans les collectivités locales et les entreprises publiques. Au total, 312.000 jeunes étaient passés par le dispositif, plusieurs personnes pouvant s'être succédées sur un même poste. L'objectif du gouvernement est d'atteindre 350.000 fin 2001. Au milieu de l'année 2000, les emplois effectivement occupés (« présents en fin de mois ») comptabilisés par le bulletin mensuel des statistiques du travail représentaient seulement 75 % des emplois créés. Si l'objectif de 350.000 embauches était atteint fin 2001, on peut donc penser que cela correspondrait à 240 à 250.000 postes occupés. Un chiffre de 215 à 220.000 paraît plus réaliste : fin avril 2001, les postes effectivement créés peuvent être estimés à 208.000 et les créations d'emplois ont fortement ralenti au début de l'année (augmentation de 2,6 % sur les trois derniers mois). Compte tenu des statistiques disponibles, il est impossible de connaître la répartition des postes effectivement occupés. On a supposé que la répartition était la même que celle des emplois créés. Fin 2001, on peut donc faire l'hypothèse qu'il y aura environ 75.000 postes occupés dans la fonction publique d'Etat et 140.000 dans les associations, collectivités locales et entreprises publiques ».

Votre commission éprouve de légitimes inquiétudes quant au devenir des emplois-jeunes. Le gouvernement a très récemment présenté son plan de pérennisation des emplois-jeunes - ou de « consolidation » selon la dénomination qu'il a retenue - pour lequel il a subi de fortes pressions de sa majorité mais aussi des syndicats afin d'en intégrer le plus grand nombre possible dans la fonction publique. Il apparaît que les craintes de votre commission sont avérées, puisque le dispositif va coûter plus longtemps que prévu au budget de l'Etat.

Des emplois-jeunes « consolidés », des dépenses pérennisées

Le 6 juin 2001, la ministre de l'emploi et de la solidarité, Mme Élisabeth Guigou, a annoncé le plan de consolidation des emplois-jeunes. « Ce programme doit continuer sur sa lancée » a-t-elle affirmé, estimant qu'il avait rempli les deux objectifs qui lui avaient été assignés : la réduction du chômage des jeunes et la création d'activités nouvelles d'utilité sociale. La ministre a également annoncé la création de 10.000 nouveaux postes d'emplois-jeunes en 2002 dans les collectivités territoriales et les associations.

Par ailleurs, le gouvernement affirme vouloir assurer une perspective professionnelle aux jeunes sortant du dispositif, et consolider les emplois créés. Les mesures permettant de réaliser ces objectifs -prolongation des contrats, formation plus importante, préparation à des concours administratifs dits « de troisième voie », aide à certaines associations et collectivités territoriales- se traduiront par un coût de 105 milliards de francs sur les 5 prochaines années (2002-2006) , alors que la reconduction du dispositif actuel coûterait 65 milliards de francs sur cette même période, soit des dépenses supplémentaires à hauteur de 40 milliards de francs .

Enfin, si, selon le gouvernement, les intégrations d'emplois-jeunes « n'engendreront pas de créations d'emplois budgétaires supplémentaires », l'OFCE indique dans son étude précitée que « la titularisation de 75.000 emplois-jeunes de la fonction publique d'Etat correspondrait à 4,4 % d'augmentation des effectifs et coûterait 9 milliards de francs ».

3. Le coût exorbitant des 35 heures : le budget de l'Etat sera-t-il mis à contribution ?

En 2000, le coût des 35 heures s'est élevé à 71,2 milliards de francs, au lieu des 64,5 puis 67 milliards de francs. Il devrait s'établir à près de 100 milliards de francs en 2001, pour une prévision de 85 milliards de francs.

Ainsi donc, comme le Sénat l'avait anticipé - et redouté -, le financement de la réduction du temps de travail n'a pas été assuré en 2000, ne l'est pas non plus cette année, et ne le sera pas moins à l'avenir.

Telles sont en effet les conclusions auxquelles a abouti notre collègue Charles Descours, rapporteur des lois de financement de la sécurité sociale au nom de la commission des affaires sociales, à l'occasion du contrôle sur le fonds de financement de la sécurité sociale (FOREC) qu'il a effectué en février dernier.

Il a ainsi montré que, en raison de recettes initialement surévaluées et finalement « amputées », ainsi que de dépenses « sciemment sous-estimées », le non-financement des 35 heures se traduit, outre le reniement de tous les engagements initiaux du gouvernement, par :

- un déficit de plus de 13 milliards de francs en 2000 ;

- un déficit situé entre 16 et 20 milliards de francs pour 2001 ;

- la mise à contribution de la sécurité sociale, qui, en l'absence de création effective du FOREC, supporte le coût des exonérations de charges sociales, ce qui n'est pas conforme aux dispositions de la loi Veil du 25 juillet 1994 faisant obligation à l'Etat de compenser intégralement toute nouvelle exonération de charges sociales.

Votre commission s'inquiète, dès lors, des éventuelles conséquences du non-financement des 35 heures sur le budget de l'Etat : en effet, si des négociations sont en cours afin de trouver une solution à cette impasse de financement, il n'est pas exclu, en application de la loi Veil précitée, que le budget de l'Etat soit mis à contribution afin d'assurer l'équilibre financier du FOREC, qui est une obligation légale, dont le gouvernement ne semble guère soucieux.

Par ailleurs, le coût des 35 heures dans les autres fonctions publiques (fonction publique territoriale et hospitalière) reste, pour l'instant, totalement inconnu. Le gouvernement a certes indiqué à plusieurs reprises que, dans la fonction publique de l'Etat, la réduction du temps de travail s'effectuerait à effectifs constants. Toutefois, il convient d'observer que de fortes pressions de sa majorité comme des organisations syndicales de fonctionnaires s'exercent sur lui pour que les 35 heures s'accompagnent de créations d'emplois. C'est du reste, la situation que l'on rencontre dans la fonction publique hospitalière.

Le coût des 35 heures dans la fonction publique d'Etat : une estimation de l'OFCE

L'OFCE, dans l'étude qu'il a réalisée pour le Sénat, et qui est annexée au présent rapport, consacre des développements à une simulation du coût du passage de la fonction publique d'Etat aux 35 heures :

« On peut évaluer le coût de la réduction du temps de travail si elle se traduit par des embauches nettes. [...] La première loi Aubry prévoyait 6 % de créations d'emplois. Si tel était le cas dans la fonction publique d'Etat, le coût de la réduction du temps de travail serait de 12 milliards de francs », avec une hypothèse de rémunération moyenne de 10.000 francs bruts mensuels, soit les 2/3 de la rémunération mensuelle des agents de l'Etat.

CHAPITRE IV :

L'ETAT SEULE COLLECTIVITÉ PUBLIQUE DÉFICITAIRE

Comme les années précédentes, le gouvernement se félicite dans le rapport préparatoire au présent débat de ce que la « robustesse » actuelle de la croissance « entraîne une amélioration des comptes publics, qui ménage des marges de manoeuvre pour l'action publique future » .

La réalité de ce constat et sa traduction concrète sont néanmoins doublement sujettes à discussion.

D'une part, le déficit du budget de l'Etat exécuté en 2000 représente toujours des montants très élevés, proches de 200 milliards de francs, ce qui portera le niveau total de la dette de l'Etat à près de 4.500 milliards de francs. D'autre part, la situation des finances de l'Etat reflète de profondes différences par rapport à celle des autres collectivités publiques : l'Etat est en effet depuis 1999 la seule collectivité déficitaire, son endettement continuant de croître tant en valeur absolue qu'en proportion du PIB.

A l'évidence, la situation d'ensemble des finances publiques reste toujours déséquilibrée, en raison de l'absence de réforme des structures de l'Etat, au moment même où celle de nos principaux partenaires européens s'améliore très substantiellement.

I. UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE TOUJOURS TROP IMPORTANT

Dans son programme pluriannuel 2002-2004, le gouvernement indique qu'il entend parvenir à l'équilibre global des finances publiques à l'horizon 2004 17 ( * ) . Pour atteindre cet objectif, il table sur le scénario suivant : l'Etat conserverait un besoin de financement significatif (qui passerait de - 1,6 point de PIB en 2002 à -1,1 point de PIB en 2004) tandis que l'excédent des autres administrations publiques serait consolidé. La gestion vertueuse de ces dernières, et notamment des collectivités locales, exonèrerait donc l'Etat de certains efforts.

La situation actuelle de l'Etat seul ne lui permet en effet pas de s'approcher de l'équilibre en 2004. Il connaissait en 2000 un besoin de financement (au sens de la comptabilité nationale) évalué par l'INSEE à 221 milliards de francs et un déficit budgétaire en exécution de 191,2 milliards de francs.

Evolution de la capacité de financement des administrations publiques

Scénario du Programme pluriannuel de croissance à 3 %

(en points de PIB)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

Administrations publiques

- 2,7

- 1,8

- 1,4

- 1

- 0,6

- 0,4

0,2

APU y.c. UMTS

0,1

- 0,6

- 0,4

0,3

Etat

- 3

- 2,5

- 2,3

- 1,9

- 1,6

- 1,6

- 1,1

Organismes divers d'administration centrale

0,1

0,2

0,2

0,1

0,1

0,2

0,2

Administrations publiques locales

0,3

0,4

0,3

0,4

0,4

0,4

0,4

Administrations de sécurité sociale

- 0,1

0,2

0,4

0,5

0,5

0,6

0,8

A. UNE DIMINUTION DU DÉFICIT FAIBLE EN 2000 ET INCERTAINE POUR 2001 ET 2002

1. Une diminution pas assez significative du déficit budgétaire en 2000

Lors de l'examen du collectif du printemps 2000, votre rapporteur avait déploré que la réévaluation des recettes à laquelle le gouvernement avait alors procédé, à hauteur de 51,4 milliards de francs ne soit affectée que pour 0,098 % à la réduction du déficit perpétuant ainsi « l'exception française » en matière de finances publiques.

En fin d'année, en intégrant les résultats du second collectif budgétaire, le déficit s'établit pour 2000 à 191,2 milliards de francs contre 206 milliards de francs en 1999, et 247,5 milliards de francs en 1998, soit un niveau qui reste très supérieur au meilleur résultat de la décennie, enregistré en 1991 avec 133,6 milliards de francs (hors recettes de privatisation).

Ainsi que le relève la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000, « la situation des finances publiques continue de s'améliorer en 2000, mais de manière moins rapide que par le passé » : elle note ainsi que le rythme de diminution du déficit est passé de 41 milliards de francs en 1999 à 15 milliards de francs en 2000 soit l'amélioration relative la plus faible depuis 1997, et qui est inférieure à la moyenne enregistrée depuis cette date, c'est-à-dire une vingtaine de milliards de francs par an.

Solde général d'exécution des lois de finances (hors FMI-FSC)

(en milliards de francs)

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Loi de finances initiale

165,4

301,4

275,1

287,8

284,8

257,9

236,5

215,3

Collectif de fin d'année

317,6

301,2

321,9

288

270,7

254,6

225,9

209,5

Exécution

315,6

299,1

323

295,4

267,7

247,5

206

191,2

Evolution par rapport à l'année précédente

+ 89,3

-16,5

+ 23,9

-30,6

-27,7

-20,2

-41,5

-14,8

Evolution comparée du déficit budgétaire et du besoin de financement de l'Etat

(en milliards de francs)

Source : INSEE

2. Un besoin de financement en hausse en 2000 par rapport à 1999

En 2000, le solde d'exécution budgétaire s'est amélioré par rapport à 1999, passant de 206 milliards de francs à 191,2 milliards de francs.

Toutefois, le besoin de financement de l'Etat, au sens de la comptabilité nationale, s'est quant à lui dégradé de 1,4 milliard de francs en 2000, passant de 219,6 milliards de francs à 221 milliards de francs. L'INSEE explique cette situation principalement, pour près de 16 milliards de francs, par les corrections dues à l'application du principe d'enregistrement en droits constatés de la TVA : cette correction est négative cette année du fait de la baisse du taux normal et contribue à accroître ledit besoin de financement.

Capacité ou besoin de financement des administrations publiques

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

En milliards de francs

Ensemble des administrations publiques

- 414,5

- 426,9

- 324,3

- 249,2

- 228,9

- 142,5

- 125,6

Administration centrale

- 358,6

- 360,8

- 293,9

- 232,6

- 245,4

- 198,8

- 205,1

Etat

- 362,6

- 320,3

- 296,0

- 293,1

- 255,5

- 219,6

- 221,0

ODAC

4,0

- 40,5

2,0

60,6

10,1

20,8

15,9

Administrations locales

- 17,3

- 13,8

4,6

19,0

26,0

31,5

24,9

Administrations de sécurité sociale

- 38,5

- 52,4

- 34,9

- 35,7

- 9,5

24,7

54,6

En % du PIB

Ensemble des administrations publiques

- 5,5

- 5,5

- 4,1

- 3,0

- 2,7

- 1,6

- 1,4

Administration centrale

- 4,8

- 4,7

- 3,7

- 2,8

- 2,9

- 2,2

- 2,2

Etat

- 4,8

- 4,1

- 3,7

- 3,6

- 3,0

- 2,5

- 2,4

ODAC

0,1

- 0,5

0,0

0,7

0,1

0,2

0,2

Administrations locales

- 0,2

- 0,2

0,1

0,2

0,3

0,4

0,3

Administrations de sécurité sociale

- 0,5

- 0,7

- 0,4

- 0,4

- 0,1

0,3

0,6

Source : INSEE

3. Une réduction incertaine pour les prochains exercices budgétaires

Comme le rappelle fort opportunément le Premier ministre dans sa lettre de cadrage en date du 13 avril 2001, « la réduction résolue du déficit budgétaire a été la condition de politiques monétaires favorables à la croissance », ce qui semble induire a contrario que, si cette réduction n'était pas aussi significative à l'avenir, cela risquerait de porter atteinte à la crédibilité économique et budgétaire de notre pays, notamment vis-à-vis de ses partenaires européens. Dans le programme pluriannuel pour 2002-2004, le gouvernement, en rappelant la nécessité de réduire l'endettement de l'Etat, souligne ainsi que, pour « éviter une éviction des dépenses primaires par les charges d'intérêt, le déficit budgétaire doit être réduit d'une manière suffisamment soutenue ».

Or, malgré la volonté affichée du gouvernement d'une réduction soutenue du déficit, la Cour des comptes relève dans son rapport précité que « le déficit public risque de ne pouvoir diminuer que relativement peu, toutes choses égales par ailleurs ».

D'ailleurs, en pratique, on constate que la réduction du déficit n'est pas forcément une priorité du gouvernement puisque, en cette matière, il laisse entendre dans son rapport qu'il s'en remet à la conjoncture économique. Il indique en effet que « si la conjoncture reste positive, le déficit budgétaire devrait pouvoir être réduit en 2002 par rapport à la LFI 2001 18 ( * ) . L'ampleur de la réduction sera déterminée en partie par la croissance économique ». De fait, les hypothèses du gouvernement figurant dans le programme pluriannuel font état pour les années 2002 et 2003 d'un besoin de financement de l'Etat restant inchangé, à un niveau de 1,6 point de PIB.

Un déficit budgétaire supérieur au 30 avril 2001 de 26 milliards de francs

à celui de fin avril 2000

En exécution, selon la dernière situation mensuelle budgétaire disponible, celle au 30 avril 2001, le solde général d'exécution est en net recul par rapport à celui de l'année dernière à la même date.

Il s'établit à - 171,2 milliards de francs contre - 145,2 milliards de francs. Ce niveau est comparable à celui enregistré en avril 1999 (- 169,8 milliards de francs), année où pourtant le déficit fixé en loi de finances initiale s'établissait à - 236,5 milliards de francs soit près de 50 milliards de francs de plus que pour 2001 (- 186,6 milliards de francs). Les dernières informations en possession de votre rapporteur confirment par ailleurs tant l'existence que l'ampleur d'un tel décalage par rapport à l'exercice précédent.

B. UNE RÉDUCTION DES DEFICITS PUBLICS PRINCIPALEMENT CONJONCTURELLE ?

1. Les deux tiers de l'amélioration relative des déficits publics entre 1997 et 2002 dus à la conjoncture

Dans le rapport préparatoire au présent débat, le gouvernement indique que l'amélioration du solde des administrations publiques entre 1997 et 2002 tient pour « un peu moins des deux tiers au regain de croissance économique et pour un peu plus d'un tiers à des facteurs structurels ».

Le niveau du déficit structurel des administrations publiques ne devrait que peu évoluer entre 1999 et 2002 passant de 1,3 % de PIB à 1,1 % seulement à l'issue de la période. Le déficit structurel devrait même s'accroître entre 2000 et 1999 de 0,2 point. Pendant le même temps le solde conjoncturel s'améliorerait fortement passant d'un déficit de - 0,3 point de PIB à un excédent de + 0,5 point de PIB. Cela montre bien que l'amélioration des déficits publics résulte, pour l'essentiel, de causes exogènes tenant à la croissance, et non de la politique suivie par le gouvernement.

Evolution du solde conjoncturel /solde structurel des administrations publiques (hors UMTS)

(en points de PIB)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Solde structurel

- 2,2

- 1,9

- 1,3

- 1,5

- 1,4

- 1,1

Solde conjoncturel

- 1,3

- 0,8

- 0,3

+ 0,2

+ 0,4

+ 0,5

Solde total

- 3,5*

- 2,7

- 1,6

- 1,3

- 1,0

- 0,6

* non compris 0,5 point au titre de la soulte France Telecom

Source : rapport du gouvernement préparatoire au DOB

Une réduction des déficits publics due pour les 2/3 à la conjoncture

(en points de PIB)

Part de la réduction du déficit public résultant de la conjoncture (en points de PIB)

1998

1999

2000

2001

2002

Total

Réduction du déficit public / Année précédente

- 0,8

- 0,9

- 0,2

- 0,4

- 0,4

- 2,7

Réduction du déficit conjoncturel


- 0,5


- 0,5


- 0,5


- 0,1


- 0,2


-1,8

Rôle de la conjoncture dans la réduction du déficit

62,5 %

55,5 %

250 %*

25 %

50 %

66 %

* Le solde structurel s'est en effet aggravé de 0,2 point en 2000.

2. Le solde structurel ne s'améliore pas malgré les déclarations d'intention du gouvernement

La déconnexion entre la réalité (l'aggravation du solde structurel entre 1999 et 2000 et sa quasi stagnation entre 1998 et 2002) et le discours vertueux du gouvernement est frappante. Dans son rapport, le gouvernement n'hésite pas à affirmer que « pour réduire durablement le besoin de financement des administrations publiques par rapport au PIB, il faut agir sur le solde structurel en augmentant les recettes de manière permanente par exemple par des hausses de prélèvements obligatoires, ou en faisant progresser les dépenses publiques moins vite que la croissance tendancielle ou potentielle de l'économie ». La prochaine discussion budgétaire sera l'occasion pour le Sénat d'inciter le gouvernement à passer, enfin, des intentions aux faits.

3. La persistance d'un déficit de fonctionnement significatif

Bien que significativement réduit en loi de finances initiale pour 2001 (- 13,8 milliards de francs) par rapport à la loi de finances pour 2000 (- 46,1 milliards de francs), le déficit de fonctionnement n'a pas disparu. Le gouvernement continue de dépenser plus, mais pas mieux : il emprunte en effet, pour régler les dépenses courantes, ce qui est critiquable, et non pour financer des dépenses d'investissement, ce qui peut, en revanche, se concevoir.

Evolution du déficit de fonctionnement

(en milliards de francs)

Lois de finances

1997

1998

1999

2000

2001

Solde de fonctionnement

- 115

- 98,6

- 67,4

- 46,1

- 13,8

Evolution (n/n-1)
- en valeur absolue


+ 16,2


+ 30,9


+ 20,5


+ 32,3

- en valeur relative

- 14,1 %

- 31,4 %

- 30,2 %

- 70 %

Cela signifie concrètement que, en 2001, le gouvernement empruntera 591,7 milliards de francs sur les marchés financiers qui serviront : pour 407 milliards, à rembourser des emprunts contractés antérieurement ; pour 170,9 milliards de francs à financer des investissements  et pour 13,8 milliards de francs à régler des dépenses courantes.

Affectation des 591,7 milliards de francs empruntés sur les marchés financiers
en 2001

C. TOUTES LES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES EXCÉDENTAIRES SAUF L'ÉTAT

1. Un objectif d'équilibre des finances publiques fixé par le pacte de stabilité

Le pacte de stabilité et de croissance prévoit que les pays membres de l'Union européenne doivent, à terme, tendre vers un équilibre de leurs finances publiques (voire être en excédent), qu'il s'agisse de l'Etat, des régimes de sécurité sociale, des collectivités locales ou des organismes divers d'administration centrale.

2. Un objectif déjà atteint par les collectivités locales, la Sécurité sociale et les ODAC

Dans le rapport préparatoire au présent débat d'orientation budgétaire le gouvernement a recours à un euphémisme pour qualifier la situation actuelle lorsqu'il indique que « la situation de départ des différentes catégories d'administration était relativement contrastée ».

Déficitaires de 0,1 point de PIB en 1998, les administrations de sécurité sociale connaissent depuis 1999 une capacité de financement non négligeable et croissante qui est évaluée pour 2000 à 54,6 milliards de francs soit 0,6 point de PIB.

Les administrations publiques locales, pour leur part, connaissent depuis 1996 « un excédent durable global ». Leur capacité de financement s'accroît par ailleurs régulièrement depuis cette date et représente depuis 1997 entre 0,2 et 0,4 point de PIB soit des montants compris entre 20 et 30 milliards de francs. Dès lors, « l'aisance financière globale dont jouissent les administrations locales et souvent la qualité de leur gestion leur ont permis de mener à bien une politique de désendettement et d'allègement de la pression fiscale », et conduit le gouvernement à transférer sans complexe aux collectivités locales le financement de mesures décidées par l'Etat. Le projet de loi relatif à l'allocation personnalisée d'autonomie en constitue un exemple récent.

Ce faisant, on peut se demander si le gouvernement ne « scie pas la branche sur laquelle il est assis » puisque, plus les dépenses des collectivités augmentent, moins leur excédent sera élevé, et plus l'Etat sera contraint de réduire son propre déficit pour atteindre l'objectif d'équilibre des finances publiques en 2004.

L'Etat seule collectivité publique déficitaire en 2001

(en points de PIB)

II. UNE DETTE DE L'ETAT EN HAUSSE EN PART RELATIVE DU PIB

Dans le programme pluriannuel des finances publiques à l'horizon 2004, le gouvernement indique qu'il souhaite « réduire le poids de la dette publique par le retour à l'équilibre global des finances publiques en 2004 » et insiste sur la fait que, depuis 1998, la spirale de l'endettement est inversée et que la part de la dette publique dans le PIB diminue.

Comme en matière de réduction du déficit des administrations publiques, le gouvernement affiche des objectifs louables de réduction du poids de la dette publique mais s'exonère largement des efforts nécessaires pour les atteindre : la part de la dette de l'Etat dans le PIB continue d'augmenter. En 2000, selon les chiffres mêmes du Gouvernement la dette totale de l'Etat devrait encore s'accroître de 203 milliards de francs et son poids dans le PIB augmenter de 0,1 point. En revanche, la part de la dette des autres administrations publiques, en particulier des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale, diminue.

La baisse du poids de la dette des collectivités locales et de la sécurité sociale

(en points de PIB)

Source : rapport économique social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2001

A. L'ETAT ACCROÎT TOUJOURS MASSIVEMENT SON ENDETTEMENT

1. Un endettement croissant de l'Etat malgré le retour à un excédent primaire

Le solde primaire de l'Etat correspond à la différence entre les recettes et les dépenses, hors la prise en compte de la charges de la dette sous forme d'intérêts. Entre 1990 et 1993 ce solde s'est fortement dégradé, passant de + 30,9 milliards de francs à - 156,1 milliards de francs, ce qui signifie que l'Etat empruntait pour financer les intérêts de sa propre dette, qui « s'auto entretenait ».

Le déficit primaire s'est très sensiblement réduit entre 1993 et 1997 pour s'établir à 34,2 milliards de francs et devenir excédentaire depuis 1999. Il représentait ainsi en 2000 un solde positif de 22 milliards de francs et de 56,9 milliards de francs pour 2001. A cette date, il devrait même, selon le gouvernement, dépasser, pour la première fois depuis 20 ans, le niveau (« solde primaire stabilisant ») qui permet de stabiliser le poids de la dette de l'Etat dans le PIB.

Malgré l'amélioration indéniable du déficit primaire, sur la période 1997-2001, l'encours de la dette négociable de l'Etat se sera accru de 1.000 milliards de francs passant de 3.377 à 4.330 milliards de francs. Comme le souligne fort opportunément une publication 19 ( * ) des services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, « rapportée à chaque ménage la dette de l'Etat représente 180.000 francs de dette par ménage et un versement d'intérêt d'environ 10.000 francs par an ». La situation de l'Etat contraste à cet égard singulièrement avec celle des collectivités locales, qui se désendettent massivement malgré la récente reprise de leurs investissements.

L'encours de la dette négociable de l'Etat :
+ 1.000 milliards de francs entre 1997 et 2001

(en milliards de francs)

Source : direction du trésor

L'accroissement du stock de la dette à un rythme supérieur à celui de la croissance du PIB se traduit par la poursuite de l'augmentation de la part de la dette de l'Etat dans le PIB, comme le montre le tableau ci dessous :

Dette de l'Etat (définition de la SROT)

(en milliards de francs)

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001 (p)

Dette négociable

850

961

1069

1233

1368

1467

1777

2133

2480

2826

3111

3377

3675

3830

4082

4330

Dette non négociable

344

321

405

389

415

400

335

328

425

426

431

414

347

462

413

n. d

Dette totale

1195

1282

1475

1622

1782

1867

2111

2461

2906

3252

3542

3791

4022

4292

4495

n. d

En points de PIB

23,1

23,7

25,3

25,9

26,9

27,1

29,6

34,1

38,7

41,9

44,5

46,0

47,1

48,6

48,7

n. d

Source : direction du trésor

2. Une charge de la dette toujours trop coûteuse

Les éléments suivants, fournis par l'OCDE, permettent de donner une idée du poids de la charge de la dette pour les dépenses publiques :

Charge de la dette en 2001

LFI 2001

En milliards de francs

% des dépenses de l'Etat

% du déficit budgétaire

% PIB

Charge de la dette

240

14,2

130

2,5

Source : OCDE

La charge de la dette constitue le deuxième poste de dépense du budget de l'Etat , après les rémunérations des fonctionnaires. Sa part dans le budget de l'Etat (à structure constante) a augmenté entre 2000 et 2001 tandis que, dans le même temps, la part des dépenses en faveur de l'emploi et des dépenses en capital civiles régressait.

La part des principaux postes de dépense de l'Etat dans le total du budget général

2000 en milliards de francs

2000 en % du budget général

2001 en milliards de francs

2001 en % du budget général

Fonction publique

693,7

42,2

709,8

42,5

Dette publique nette

234,7

14,3

239,8

14,4

Emploi

151,7

9,2

149,3

8,9

Dépenses en capital civiles

73,7

4,5

72,9

4,4

Autres

488,4

29,7

496,9

29,8

Budget général à structure constante 1998

1.642,2

100,0

1.668,7

100,0

Source : rapport du gouvernement préparatoire au DOB

3. La nécessaire prise en compte du « hors bilan »

Il convient de rappeler qu'à cette dette « certaine » s'ajoutent également les engagements « hors-bilan » de l'Etat, qu'ils soient conditionnels ou certains. Il faut en outre y intégrer les engagements en assurance-vieillesse et en assurance maladie liés au vieillissement de la population. Autant de charges chiffrées de façon peu précise mais qui pèseront inévitablement et massivement sur l'avenir des finances publiques.

B. DES PERSPECTIVES LOINTAINES DE RÉSORPTION DE LA DETTE PUBLIQUE

1. Le retour en 2030 au niveau de dette publique des années 1980 ?

Le programme pluriannuel de finances publiques 2002-2004, après avoir constaté que la France avait longtemps bénéficié d'un niveau d'endettement relativement bas, estime qu' [ elle ] « s'est engagée plus tardivement dans la stratégie de réduction de cet endettement ». Afin d'éviter un effet d'éviction des charges d'intérêt aux dépens d'autres dépenses « plus utiles », et pour « alléger le fardeau de la dette léguée aux générations futures », il plaide pour une accélération de ce mouvement.

Le gouvernement esquisse dans ce document deux scénarii de réduction de la dette publique. Le premier, dans lequel le solde des administrations publiques se maintient à l'équilibre à partir de 2004, ne permettrait une réduction dudit endettement que grâce à l'activité économique. Dans ce cas, la décrue serait lente : ce n'est qu'à l'horizon 2030 que le poids de la dette dans le PIB retrouverait son niveau des années 1980, c'est-à-dire 20 points de PIB.

Dans la seconde hypothèse où, après le retour à l'équilibre en 2004, « la capacité de financement des administrations publiques continuerait de s'améliorer d'environ 0,3 point de PIB par an », le ratio d'endettement retrouverait le niveau précité des années 1980 avant l'horizon 2015, le gouvernement envisageant de voir la dette entièrement remboursée avant 2020. Ce scénario, selon le gouvernement, « est assez proche de ce qui est envisagé aux Etats-Unis ».

2. Des hypothèses trop optimistes ?

Selon le gouvernement, la réalisation de ces scénarii repose tout d'abord sur « l'évolution maîtrisée des dépenses publiques ». On peut s'étonner que l'ampleur de cette maîtrise ne soit pas chiffrée.

En outre, le scénario le plus optimiste table sur un excédent des finances publiques d'environ trois points de PIB en 2015. Si votre rapporteur général partage cet objectif, il constate que le gouvernement, à l'heure actuelle, ne propose pas les réformes structurelles qui seraient de nature à permettre de l'atteindre.

Enfin, il ressort de ces deux scénarii que, si le solde des administrations publiques redevenait négatif après 2004, même de manière temporaire, le retour au niveau d'endettement de 1980 ne pourrait être atteint en 2030.

C. UN ALLÉGEMENT DE LA DETTE COMPROMIS PAR « L'ÉCHEC PROGRAMMÉ » DE L'ATTRIBUTION DES LICENCES UMTS ?

Dans le programme pluriannuel 2002-2004, le gouvernement présente sa stratégie de maîtrise de l'évolution de la dette publique, qui comporte trois volets : réduction du déficit, baisse des taux d'intérêt et affectation d'une partie des recettes provenant de l'attribution des licences de téléphonie mobile. Ainsi, le gouvernement considère que « la baisse du déficit de l'Etat permettra dans un contexte de stabilité des taux d'intérêt à long terme, de contenir l'augmentation de la charge de la dette à un peu moins de 2 % par an, en termes réels. Cette évolution est également le produit de l'affectation d'une partie des recettes résultant de la vente des licences UMTS au désendettement de l'Etat ».

1. L'importance des sommes initialement en jeu : un double dividende de 1,1 point de PIB

Le montant total du produit des licences UMTS tel que prévu initialement par le gouvernement dans la loi de finances pour 2001 s'élève (en francs courants) à 130 milliards de francs, soit 1,1 point de PIB. La répartition proposée consistait à affecter en deux années, 2001 et 2002, 28 milliards de francs à la réduction de la dette de l'Etat.

A l'issue de cette période, la part de la dette de l'Etat dans le PIB serait mécaniquement réduite de près de 0,3 point. De plus, la charge nette supportée chaque année par le budget de l'Etat serait minorée d'environ 1.600 millions de francs, pour un coût apparent de la dette chiffré à 5,8 % par le gouvernement. Il y aurait donc eu un « double dividende » pour l'Etat, que ce soit, d'une part, au titre de la moindre progression du stock de la dette et de la baisse de son poids dans le PIB, ou, d'autre part, au titre de la réduction du coût annuel des charges d'intérêt supportées par le budget.

2. Une affectation et un produit désormais incertains

Initialement, ces sommes devaient être affectées à hauteur de 28 milliards de francs, soit 21,5 % du total, à la caisse d'amortissement de la dette publique (CADEP) et pour le reliquat, soit 102 milliards de francs (78,4 % du total), au fonds de réserve pour les retraites (FRR), conformément à l'échéancier ci-dessous.

Année de paiement des redevances

Montant des redevances versées (en millions de francs)

Cumul général

CADEP

FRR

Total

2001

14.000

18.496

32.496

32.496

2002

14.000

18.496

32.496

64.992

2003 à 2016

--------

4.644

4.644

130.008

Total

28.000

102.008

130.008

130.008

La moitié des versements était donc concentrée sur les deux premiers exercices et répartie sur la période 2001-2002, à hauteur de 56,9 % au profit du FRR et de 43,1 % à la CADEP. A compter de 2003, et jusqu'en 2016, les versements annuels devaient représenter 4,6 milliards de francs et bénéficier intégralement au FRR.

Tant ces montants que leur affectation sont désormais incertains. La diminution du nombre des licences attribuées devrait d'ores et déjà se traduire pour les deux exercices 2001 et 2002 par une moins-value pour l'Etat de 32,5 milliards de francs aux dépens, soit du fonds de réserve pour les retraites, soit du désendettement de l'Etat.

Licences UMTS : une affectation et un produit désormais incertains

(en millions de francs)

III. UNE SITUATION DIVERGENTE PAR RAPPORT A CELLE DE NOS PRINCIPAUX PARTENAIRES

Dans son rapport précité pour l'année 2000, la Cour des comptes relève que « la France améliore ses comptes moins vite que les autres Etats ». Elle souligne que le besoin de financement des administrations publiques ( 1,3 % du PIB ) de la France « se compare à des résultats meilleurs chez nos partenaires », à une capacité de financement de 0,3 % pour la zone euro et de 1,2 % pour les 15 Etats de l'Union européenne, y compris le cas échéant le produit des ventes de licences UMTS.

Cette analyse est confortée par les travaux réalisés par l'OCDE sur l'évolution du solde des administrations publiques, conformément au graphique ci-dessous :

Des déficits supérieurs à la moyenne de nos principaux partenaires

(en points de PIB)

Source : OCDE

A. DES DÉFICITS PUBLICS PARMI LES PLUS ÉLEVÉS

Le tableau ci-après, fourni par la commission européenne, permet de comparer les performances de la France à celles des autres pays de l'Union européenne en matière de réduction des déficits. Il en ressort que, en 1999, quatre pays sur quinze avaient un déficit supérieur à celui de la France en pourcentage du PIB. Ils étaient trois en 2000. Selon les prévisions du printemps 2001, ils ne seraient plus que deux en 2001 et en 2002.

L'analyse des programmes pluriannuels transmis par les Etats-membres à la Commission européenne fait apparaître que, en 2000, 2001 et 2002, seulement deux pays envisagent un déficit supérieur à celui de la France. Un seul l'envisage pour 2003. En 2004, ils seraient quatre. Cependant, les prévisions pour 2004 semblent sujettes à caution puisque la France table sur une très forte amélioration de son solde, qui passerait de - 0,4 % du PIB en 2003 à + 0,3 % en 2004.

Dans tous les cas, les performances de la France sont inférieures à celles de la moyenne des pays de la zone euro comme à celles de la moyenne des Etats de l'Union européenne, à l'exception de l'année 2004, où les performances de la France seraient moins bonnes que celles de la moyenne de la zone euro, mais meilleures que la moyenne des Etats de l'Union européenne.

Besoin (-) ou capacité (+) de financement des administrations publiques (1)

(en % du PIB)

1999

2000

Prévisions de printemps 2001

Programmes de stabilité et de convergence (actualisés)

2001

2002

2000

2001

2002

2003

2004

Belgique

- 0,7

0,0

0,5

0,7

- 0,1

0,2

0,3

0,5

0,6

Allemagne

- 1,4

- 1,0

- 1,7

- 1,2

- 1,0

- 1,5

- 1,0

- 0,5

0,0

Grèce

- 1,8

- 0,9

0,0

0,6

- 0,8

0,5

1,5

2,0

2,0

Espagne

- 1,2

- 0,4

0,1

0,2

- 0,3

0,0

0,2

0,3

0,3

France

- 1,6

- 1,3

- 1,1

- 0,8

- 1,4

- 1,0

- 0,6

- 0,4

0,3

Irlande

2,1

4,5

3,9

3,6

4,7

4,3

3,8

4,6

-

Italie

- 1,8

- 1,5

- 1,3

- 1,0

- 1,3

- 0,8

- 0,5

0,0

0,3

Luxembourg

4,7

5,3

4,0

3,0

3,0

2,6

2,5

2,5

-

Pays-Bas

1,0

1,3

0,8

1,4

1,0

0,7

0,6

1,1

1,9

Autriche

- 2,1

- 1,5

- 0,7

- 0,0

- 1,8

- 0,8

- 0,0

- 0,0

0,0

Portugal

- 2,1

- 1,7

- 1,5

- 1,5

- 1,9

- 1,1

- 0,7

- 0,3

0,0

Finlande

1,8

6,7

5,3

5,2

4,5

4,7

4,4

4,5

4,9

Zone euro

- 1,2

- 0,7

- 0,8

- 0,4

- 0,7

- 0,6

- 0,3

0,1

0,4

Danemark

3,1

2,5

2,9

2,9

2,7

2,8

2,6

2,6

2,7

Suède

1,8

4,0

3,9

3,4

3,4

3,5

2,0

2,0

-

Royaume-Uni

1,3

1,9

1,0

0,9

1,1

0,6

- 0,1

- 0,9

- 1,0

Union européenne

- 0,6

0,0

- 0,3

0,0

- 0,2

- 0,2

- 0,1

0,0

0,2

(1) Les données 2000 et 2001 sont calculées hors produits des licences UMTS. En incluant ces derniers, les prévisions de printemps 2001 seraient les suivantes :

- en 2000 : 1,5 % pour l'Allemagne, - 0,3 % pour l'Espagne, - 0,3 % pour l'Italie, 2 % pour les Pays Bas, - 1,1 % pour l'Autriche, - 1,4 % pour le Portugal, 0,4 % pour la zone euro, 4,3 % pour le Royaume-Uni et 1,2 % pour l'Union européenne ;

- en 2001 : 0,6 % pour la Belgique, - 0,6 % pour le France, - 0,7 % pour la zone euro, 3,2 % pour le Danemark et - 0,2 % pour l'Union européenne.

Les données correspondantes selon les programmes de stabilité et de convergence actualisés seraient les suivantes :

- en 2000 : 1,5 % pour l'Allemagne, - 0,1 % pour l'Italie, 1,7 % pour les Pays-Bas, - 1,4 % pour l'Autriche, - 1,5 % pour le Portugal, 0,3 % pour la zone euro, 3,5 % pour le Royaume-Uni et 1,1 % pour l'Union européenne ;

- en 2001 : 0,1 pour la France, - 0,4 % pour la zone euro et 0 % pour l'Union européenne.

Source : commission européenne

B. UN AVANTAGE COMPARATIF EN TERME DE DETTE DÉGRADÉ

S'agissant de la dette publique, la situation relative de la France par rapport à l'ensemble de ses principaux partenaires, qu'il s'agisse des Etats membres de l'Union européenne ou de la zone euro, naguère favorable, continue de se dégrader régulièrement.

1. Une situation correcte en apparence

En 2000, la France devrait compter parmi les 8 pays sur les 15 que comporte l'Union européenne à avoir une dette des administrations publiques inférieure au plafond de 60 % du PIB fixé par le traité de Maastricht. Par ailleurs, comme le montre le tableau ci-dessous, la part de la dette publique française rapportée au PIB est inférieure tant à la moyenne des Etats de l'Union européenne qu'à celle des pays de la zone euro.

Dette brute des administrations publiques

(en points de PIB)

1995

1996

1997

1998

1999

2000
(prévision)

2001 (prévision)

Allemagne

57,0

59,8

60,9

60,7

61,1

60,7

59,5

Espagne

63,2

68,0

66,7

64,9

65,2

62,3

59,9

France

51,9

57,1

59,0

59,3

58,8

58,2

57,1

Italie

123,2

122,1

119,8

116,3

114,5

110,8

106,6

Pays-Bas

75,5

75,3

70,3

67,0

63,2

58,7

54,4

Royaume-Uni

52,0

52,6

50,8

48,4

45,7

42,4

39,4

Moyenne de l'Union européenne

69,5

72,1

71,0

69,0

67,5

65,1

62,6

Moyenne de l'euro-11

71,4

74,7

74,5

73,1

72,1

70,5

68,2

Source : commission européenne

2. Une dégradation certaine par rapport à la situation de nos principaux partenaires

La France connaît toujours un niveau de dette publique inférieur à la moyenne de ses principaux partenaires. Cet écart, longtemps important en faveur de notre pays, tend cependant à se réduire significativement : l'effort qu'accomplit notre pays pour réduire ses déficits publics et son endettement est moins net et volontariste que celui de ses principaux partenaires.

Comme le montre le graphique ci-après, le « différentiel » s'est ainsi très significativement réduit : il était en 1995 de 17,6 points de PIB par rapport à la moyenne de l'Union européenne. Il ne devrait plus être, en 2001, que de 5,5 points de PIB. De même, l'écart par rapport à la moyenne de la zone euro s'est, lui aussi, considérablement réduit en notre défaveur : il est passé de 19,5 points de PIB en 1995 à 12,3 points en 2000 et est estimé à 11,1 points pour 2001.

L'écart entre le poids de la dette publique française et celle de nos principaux partenaires

(en points de PIB)

C. UN JUGEMENT CRITIQUE DES INSTITUTIONS EUROPÉENNES À L'ÉGARD DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE SUIVIE PAR LA FRANCE

La voie retenue par la France pour redresser son déficit public, qui consiste à tirer profit d'une conjoncture favorable sans mener des réformes de structure, fait l'objet, directement ou indirectement, de nombreuses et régulières critiques de la part des instances communautaires.

1. L'évaluation par la Commission européenne de la mise à jour pour 2000 du programme de stabilité de la France (2002-2004)

En janvier 2001, la commission a conclu que le programme actualisé français était conforme aux exigences du pacte de stabilité mais elle a estimé que la France aurait pu obtenir en 2000 de meilleurs résultats budgétaires, compte tenu de « l'évolution favorable de l'économie et des finances publiques ».

Elle souhaitait ainsi qu'un contrôle strict de la dépense publique soit mis en oeuvre afin « de dégager des marges pour accélérer la réduction du déficit », estimant nécessaire, même dans le cadre du scénario macroéconomique « prudent », de parvenir à un équilibre des finances publiques d'ici 2004, alors que le gouvernement français prévoit, dans cette hypothèse, un besoin de financement de 0,5 point de PIB. Selon elle, en effet, toute croissance plus forte que prévu doit être utilisée afin de réduire le déficit public.

2. Le rapport de la commission et du Conseil « ECOFIN » au Conseil européen de Stockholm des 23 et 24 mars 2001

Tout en reconnaissant l'ampleur des progrès réalisés, ce rapport estime utile de ne pas céder à « l'autosatisfaction » et insiste sur la nécessité d'avoir des budgets « proches de l'équilibre ou excédentaires ». Dans ce cadre, il fixe deux objectifs essentiels, consistant, d'une part, à éviter les politiques budgétaires procycliques, et, d'autre part, à mettre en place des finances publiques saines afin de créer un cadre macroéconomique stable qui repose à la base sur la réduction de la dette publique puis sur la baisse des impôts et le financement des investissements publics dans des domaines clés.

Après avoir souligné que « l'évolution récente dans le domaine budgétaire montre que l'Union européenne est sur la bonne voie », ledit rapport, au vu des déséquilibres budgétaires passés, rappelle l'intérêt qu'il y a pour les Etats-membres à suivre l'évolution du « solde budgétaire corrigé des variations saisonnières ».

3. Le document de la commission européenne de mai 2001 sur les « futures priorités de la politique fiscale communautaire »

L'ensemble de ces préoccupations sont reprises par la commission européenne lorsqu'elle cherche à détailler les priorités à venir de la politique fiscale communautaire, et leur compatibilité avec la poursuite de l'assainissement budgétaire. Elle indique à ce titre que : « la recherche de la stabilité monétaire et de la croissance économique requiert un assainissement budgétaire plus important .... Un déficit budgétaire proche de l'équilibre reste une condition préalable pour la stabilité macroéconomique ... . Il est également nécessaire de trouver un juste équilibre entre les réductions d'impôts, l'investissement dans les services publics et la poursuite de l'assainissement budgétaire afin d'alléger durablement la pression fiscale ».

CHAPITRE V :

LA BONNE GESTION DES COLLECTIVITÉS LOCALES  « RÉCOMPENSÉE » PAR LE TRANSFERT DE CHARGES NOUVELLES

En matière de finances locales, le budget de 2002 devrait être un exercice de transition. En effet, si la proposition du gouvernement de prolonger d'un an l'actuel contrat de croissance et de solidarité (qui régit une partie des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales 20 ( * ) ) était confirmée par le Parlement dans le cadre de la loi de finances pour 2002, les prochains débats budgétaires seront surtout marqués par l'attente des propositions du gouvernement en matière de réforme des finances locales.

Devant l'Assemblée nationale, le 17 janvier 2001, le Premier ministre a annoncé que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ainsi que le ministre de l'intérieur remettraient au Parlement un rapport avant la fin de l'année 2001. Les grandes lignes de la réforme des finances locales tracées à cette occasion par le Premier ministre restent assez vagues, et donc susceptibles d'être partagées par tous.

En matière fiscale, il s'agirait de « trouver le système qui garantira à la fois la clarté de l'impôt et une stabilité suffisante pour les recettes des collectivités locales, même si, bien entendu, celles-ci évoluent en fonction de la richesse nationale et donc de la conjoncture ». Mais il faudrait aussi « veiller à ce que cette réforme n'entraîne pas de transferts excessifs entre collectivités et entre contribuables, et ne nuise pas à la nécessaire péréquation des ressources ». Quant aux dotations, elles « devront, elles aussi, être simplifiées et permettre une péréquation plus volontariste. Le devoir de l'Etat sera de redistribuer entre les collectivités locales, suivant des critères simples, des dotations modernisées, prenant en compte l'objectif d'un aménagement équilibré du territoire ». Mais là encore, cette réforme « nécessite nombre de calculs afin que les transferts de charges entre contribuables et entre collectivités n'aboutissent pas à des effets économiques et sociaux inéquitables ».

Pour la mise en oeuvre de ce vaste programme, le Premier ministre espère pouvoir « compter, comme par le passé, sur la sagesse des collectivités afin de maîtriser l'évolution des prélèvements obligatoires et de l'ensemble des dépenses publiques, conformément à nos engagements à l'égard de l'Union européenne ».

Conformément au souhait du Premier ministre, il ressort de l'examen de l'évolution des composantes du solde budgétaire des collectivités locales que, malgré les charges nouvelles qui leurs sont imposées par l'Etat et la réduction de leurs marges de manoeuvres fiscales, les administrations publiques locales contribuent toujours de manière positive au solde des administrations publiques et font preuve d'une grande modération fiscale.

I. LES COLLECTIVITÉS LOCALES DÉGAGENT TOUJOURS UNE CAPACITÉ DE FINANCEMENT SIGNIFICATIVE

A. UN EXCÉDENT BUDGÉTAIRE SIGNIFICATIF

Depuis 1996, les administrations publiques locales, qui regroupent les collectivités locales et leurs établissements publics, contribuent de manière positive au solde des administrations publiques, comme le rappelle le tableau ci-dessous :

Evolution de la capacité ou du besoin de financement des administrations publiques

(en milliards de francs)

1995

1993

1997

1998

1999

Etat

-320,3

-296,0

-293,1

-257,3

-220,4

Organismes divers d'administration centrale

-40,5

+2,0

+60,6

+8,6

+14,3

Administrations publiques locales

-13,8

+4,6

+19,0

+27,2

+34,7

ODASS

-52,4

-40,7

-35,7

-9,5

+14,6

Total des administrations publiques

-426,9

-330,1

-249,2

-231,1

-156,8

Source : Observatoire des finances locales, Les finances des collectivités locales en 2000

Dans son rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour des compte relève que l'excédent des administrations publiques locales s'est dégradé en 2000 « de 6,6 milliards de francs (0,99 milliard d'euros) du fait de la forte croissance de leur investissement ». Si l'on se réfère à l'annexe IX du programme pluriannuel des finances publiques 2002-2004, le « creux » constaté en 2000 devrait être comblé dès 2001. Le tableau ci-dessous, établi à partir d'une prévision de croissance de 3 %, retrace les prévisions d'évolution de la capacité de financement des administrations publiques locales :

Capacité de financement des administrations publiques locales

(en points de PIB)

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

0,3

0,4

0,3

0,4

0,4

0,4

0,4

Source : programme pluriannuel des finances publiques 2002-2004, annexe IX

S'agissant du solde des seuls collectivités locales et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, il s'établirait en 2000, selon les « premières tendances » publiées par la direction générale de la comptabilité publique, à 763 millions de francs, répartis comme indiqué ci-dessous :

Capacité de financement des collectivités locales et des EPCI à fiscalité propre

(en millions de francs)

Communes

Départements

Régions

Collectivités locales

EPCI

Total EPCI + collectivités locales

+200

+1601

+321

+2122

(-25,5 % par rapport à 1999)

-1359

+763

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

B. LA POURSUITE DU DESENDETTEMENT DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Dans son rapport annuel au nom de l'Observatoire des finances locales, rendu public en juin 2000, notre collègue Joël Bourdin note que les collectivités locales « profitent de leur autofinancement pour poursuivre en les intensifiant leurs efforts de désendettement : communes, départements et même régions pour la première fois en 1999 ont remboursé plus qu'ils n'ont emprunté . Sur l'ensemble des collectivités, 1999 est la troisième année consécutive de baisse de l'encours de la dette ». Il note cependant que le désendettement concerne surtout les grandes communes, les départements et les régions, et que la dette des communes de moins de 10.000 habitants stagne.

Pour 2000, la direction générale de la comptabilité publique confirme la poursuite du processus de désendettement. Selon le Crédit local de France, après avoir un peu marqué le pas en 2000, le désendettement devrait retrouver de la vigueur en 2001.


Le désendettement des collectivités locales

(en milliards de francs)

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Flux net de dette (emprunt - remboursement)

31,1

40,5

36,7

33,1

16,3

6,8

-3,5

-9,0

-12,4

-9,1

-12,1

Source : Crédit local de France

II. L'ÉVOLUTION DES RECETTES LOCALES

A. LA STABILITÉ DE LA PRESSION FISCALE

Du fait des modifications intervenues en matière de fiscalité locale depuis la discussion de la loi de finances pour 1999 21 ( * ) , les comparaisons d'une année sur l'autre de l'évolution des recettes fiscales des collectivités locales ont perdu une grande part de leur signification.

Suite à ces modifications, l'évolution du produit des impôts locaux ne permet d'avoir une idée, ni de l'évolution de leurs bases, ni de celle de leurs taux, ni même des ressources des collectivités locales. Par exemple, en 2000, le Crédit local de France 22 ( * ) relève que les bases de taxe professionnelle restent stables, en dépit de la disparition d'une partie de l'assiette assise sur les salaires. Sans la réforme intervenue dans la loi de finances pour 1999, les bases de taxe professionnelle auraient connu une croissance très forte.

En revanche, l'analyse de l'évolution des taux des impôts locaux permet de faire apparaître les orientations des collectivités locales en matière de politique fiscale. Elles sont caractérisées par une volonté de stabilisation de la pression fiscale. La direction générale de la comptabilité publique observe que les taux votés en 2000 étaient globalement identiques à ceux de 1999. Pour 2001, le Crédit local de France indique que, pour la deuxième année consécutive, les communes baissent légèrement leurs taux et que les trois quarts de départements et des régions maintiennent leurs taux. Dans les autres départements et régions, les variations, à la hausse comme à la baisse, sont très limitées.

B. L'ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES DOTATIONS VERSÉES PAR L'ETAT

La loi de finances pour 2001 prévoit que les concours de l'Etat aux collectivités locales (hors les dégrèvements d'impôts locaux) s'élèvent à 263 milliards de francs, soit 33,5 milliards de francs de plus qu'en 2000 (+ 14,6 %).

Evolution des concours de l'Etat aux collectivités locales entre 2000 et 2001

(en millions de francs)

Cette augmentation est répartie de la manière suivante entre les différents types de concours financiers de l'Etat aux collectivités locales :

-  5,1 milliards de francs 23 ( * ) pour les dotations de fonctionnement et d'équipement ;

-  1,7 milliard de francs pour le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) et la dotation au titre des amendes de police, qui sont les deux dotations dont le montant est simplement constaté par l'Etat ;

-  26,7 milliards de francs pour les compensations d'exonérations fiscales, c'est-à-dire pour le remplacement d'impôts locaux par des dotations budgétaires.

80 % de l'effort financier nouveau de l'Etat en faveur des collectivités locales est donc consacré à remplacer des ressources existantes et non à apporter des ressources nouvelles. Les baisses d'impôts locaux voulues par le gouvernement depuis 1999 se traduisent donc essentiellement par un transfert de charge du contribuable local vers le contribuable national.

L'évolution des concours de l'Etat aux collectivités locales depuis 1998 : un facteur de rigidification des finances publiques

Entre la loi de finances pour 1998 et la loi de finances pour 2001, les concours de l'Etat aux collectivités locales (dotations, compensations et dégrèvements) ont augmenté de 79 milliards de francs. Les seules dotations et compensations ont augmenté d'environ 67 milliards de francs, passant de 229,3 milliards de francs à 262,9 milliards de francs (+ 34,4 %).

Cette augmentation résulte pour 85 % du choix du gouvernement de remplacer des impôts locaux par des dotations budgétaires versées aux collectivités locales.

Ces sommes ne se traduisent pas par une augmentation d'autant des dépenses du budget général puisque, pour une grande partie d'entre elles, elles sont retracées en prélèvements sur recettes dans les documents budgétaires. Cependant, qu'elles minorent les recettes de l'Etat ou qu'elles aggravent ses dépenses, les compensations, destinées non pas à réduire la pression fiscale mais à remplacer un impôt local par le recours au contribuable national, absorbent une part importante des marges budgétaires, au détriment d'autres postes de dépenses et ne sont pas susceptible de faire l'objet d'économies en cas de retournement de conjoncture.

A titre de comparaison, sur la même période, l'annexe V du rapport du gouvernement pour le présent débat d'orientation budgétaire indique que les dépenses du budget général ont augmenté de 82 milliards de francs.

III. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES LOCALES

A. LA POURSUITE DE LA MAÎTRISE DES DÉPENSES DE GESTION

Le programme pluriannuel des finances publiques 2002-2004 retient une prévision d'augmentation des dépenses des administrations publiques locales de 2,1 % en 2000 et 2 % en 2001. Pour les années suivantes, la prévision retenue est de 1,7 %.

S'agissant des collectivités locales en 2000, le rapport précité sur les finances des collectivités locales de l'Observatoire des finances locales relève que, « à partir de 1997, les collectivités territoriales, guidées par une volonté de limiter la pression fiscale tout en améliorant leurs marges de manoeuvre, ont réalisé des efforts importants pour maîtriser leurs dépenses de gestion (+ 2,7 % en 1999). En moyenne, ces efforts ont été fructueux sur l'ensemble des coûts sauf les frais de personnel dont la croissance, bien qu'en baisse, reste soutenue et s'affirme comme la principale cause de progression des dépenses de gestion depuis 1997 ». Comme on le verra ci-dessous, les collectivités locales ne maîtrisent pas l'évolution de leurs dépenses de personnel, qui dépend très largement des décisions du gouvernement.

En 2000, la direction générale de la comptabilité publique estime que « les collectivités territoriales ont assumé sensiblement le même volume de charges qu'en 1999 ». Elle estime que « la diminution des transferts versés et des charges financières a compensé la progression ralentie des frais de personnel et des achats et charges externes. Ce fléchissement est davantage lié au développement de l'intercommunalité qu'à une politique de modération des charges ».

Il convient en effet de souligner que, malgré l'interruption du mouvement de baisse des taux d'intérêt, les frais financiers des collectivités locales ont encore baissé en 2000 (-7,9 %), du fait de leur politique de désendettement et de la qualité de la gestion de leur dette.

B. LE REDÉMARRAGE DE L'INVESTISSEMENT

Comme le souligne la Cour des compte, l'excédent des collectivités locales a diminué en 2000 en raison du redémarrage de l'investissement local qui, selon le Crédit local de France, a progressé de 8,5 % contre 2,7 % en 1999. Dans son rapport pour le présent débat, le gouvernement attribue cette reprise « au pic de dépenses traditionnellement enregistré à l'approche des élections municipales ». Il n'est pas interdit d'y voir également le résultat de la politique d'assainissement financier menée par les collectivités depuis le milieu des années 90, qui leur permet aujourd'hui, grâce à leur autofinancement, de financer des investissement sans recourir à l'endettement.

En 2001, l'investissement local devrait rester soutenu en raison du caractère inévitable de certaines dépenses (mise aux normes environnementales des équipements) et du lancement des travaux inscrits dans les contrats de plan, notamment en matière de transport en commun.

C. LES CHARGES NOUVELLES IMPOSÉES PAR L'ETAT

Le gouvernement entretient dans son rapport précité le « mythe » des collectivités locales dépensières en relevant que, « entre 1999 et 2002, le volume des dépenses des administrations locales devrait progresser de 2,4 % par an (dont 2,5 % au titre des seules dépenses courantes), contre 0,4 % pour les dépenses de l'Etat ».

Par ailleurs, dans le programme pluriannuel des finances publiques 2002-2004, il justifie sa révision à la baisse de la prévision d'évolution des dépenses locales en 2002 et 2003 (1,7 % contre 2 % en 2000 et 2001) en indiquant que « les dépenses des administrations publiques locales sont un peu moins dynamiques que dans le programme déposé l'an dernier en raison d'une hypothèse de stabilité des taux de cotisations sociales de la CNRACL Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales et d'une sortie plus rapide du dispositif des emplois-jeunes ».

Cette présentation est biaisée. S'il est vrai que les dépenses locales augmentent plus vite que les dépenses de l'Etat, c'est avant tout parce que l'Etat impose aux collectivités locales des dépenses obligatoires nouvelles. Ces dépenses peuvent avoir un impact positif sur l'économie nationale, comme celles qui résultent des investissements en matière environnementale, notamment le traitement de l'eau et des déchets ménagers.

Cependant, les dépenses imposées aux collectivités locales sont surtout des dépenses affectant leur masse salariale, qui ont progressé de 5,3 % en 2000. La direction générale de la comptabilité publique explique la progression des dépenses de personnel par, outre le jeu mécanique du « glissement-vieillesse-technicité » (GVT), « la répercussion en année pleine des revalorisations du point d'indice appliquées au 1 er décembre 1999 ; le réhaussement de 0,5 point de la cotisation employeur à la CNRACL, les recrutements réalisés dans le cadre des contrats « emplois-jeunes » ».

Ainsi, contrairement à ce que laisse entendre le programme pluriannuel 2002-2004, les orientations du gouvernement en matière de cotisations à la CNRACL et de recrutement des emplois-jeunes comptent parmis les facteurs d'accroissement des dépenses locales. S'agissant des emplois-jeunes, leur coût est appelé à augmenter lorsque les contrats viendront à échéance, et que les collectivités seront fortement incitées à pérenniser ces emplois et à supporter l'intégralité de leur coût. S'agissant de la CNRACL, les collectivités devront supporter en 2001 une nouvelle hausse d'un demi-point de leur taux de cotisation. A ces facteurs d'augmentation des dépenses de personnel, il convient d'ajouter, comme le relève le Crédit local de France, « les conséquences financières des 35 heures » et « l'issue des négociations salariales en cours ».

Votre rapporteur s'inquiète également des conséquences financières de deux dispositions figurant dans des projets de loi actuellement soumis au Parlement :

- le projet de loi relatif à la création de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), dans sa rédaction adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, crée une charge nouvelle de 11,5 milliards de francs pour les départements 24 ( * ) . Ce montant représente 14 % du produit des impôts directs locaux perçus par les départements en 2000 ;

- l'article 46 du projet de loi sur la démocratie locale prévoit, pour soulager les communes, de mettre à la charge des départements 80 % de l'augmentation des dépenses des services d'incendie et de secours (SDIS), qui ne se sont pas caractérisées ces dernières années par leur modération. L'Etat, pour sa part, n'a pas prévu de s'impliquer dans le financement des SDIS.

CHAPITRE VI :

LES FINANCES SOCIALES, BÉQUILLE DES FINANCES PUBLIQUES ?

Pour la deuxième année consécutive, les comptes de la sécurité sociale présentent, en apparence, des résultats vertueux. Mais, comme l'année précédente, force est de se rendre à l'évidence : ces apparences sont, pour une large part, factices. Un fragile excédent du régime général qui masque des disparités croissantes entre branches et, une fois encore, l'impossible maîtrise des dépenses de santé ; un excédent « historique » des comptes des administrations de sécurité sociale qui n'en rend que plus flagrante leur déconnexion avec l'évolution des comptes de l'Etat et qui risque bien d'être « réquisitionné » pour assurer le financement des dépenses sociales décidées par le gouvernement.

A cet égard, la décision, prise par le ministère de l'emploi et de la solidarité, de repousser de trois semaines la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale est révélatrice. Elle traduit les difficultés qu'a rencontrées le gouvernement pour arrêter sa position non seulement sur les prévisions d'équilibre de la sécurité sociale pour 2001, et notamment sur sa capacité à respecter l'objectif national de progression des dépenses d'assurance maladie (l'ONDAM) cette année, mais aussi, et surtout, sur le financement des allégements de charges liés à la mise en place des 35 heures, véritable « pomme de discorde » entre le gouvernement et les partenaires sociaux d'une part, entre le ministère de l'emploi et de la solidarité et celui de l'économie et des finances d'autre part.

I. DES FINANCES SOCIALES DÉCONNECTÉES DES FINANCES DE L'ÉTAT

A. L'AMÉLIORATION DES SOLDES DES FINANCES SOCIALES

1. La situation du régime général

Après son retour à l'équilibre comptable en 1999, le régime général de la sécurité sociale présente un solde excédentaire, en encaissements et en décaissements, de 5,2 milliards de francs en 2000. En comptabilité de droits constatés, cet excédent s'établit à 4,4 milliards de francs.

La commission des comptes de la sécurité sociale avait estimé en septembre dernier que ce solde s'élèverait à 3,3 milliards de francs d'excédent. Par rapport au mois de septembre, les recettes et les dépenses sont revues à la baisse, respectivement de 1,3 et 3,2 milliards de francs. Ces écarts sont le résultat de mouvements complexes.

L'absence de couverture d'une partie des exonérations de cotisations sociales (pour 13,2 milliards de francs) pèse sur les recettes, qui bénéficient en revanche de rentrées de CSG plus élevées que prévues (+ 8,2 milliards de francs en métropole), particulièrement sur les revenus du capital.

Recettes consolidées du régime général

De 1999 à 2001

(en milliards de francs et évolution en %)

1999

2000

2001 prév.

Milliards
de francs

Evolution en %

Milliards
de francs

Evolution en %

Milliards
de francs

Evolution en %

Cotisations (1)

867

1,8

907,4

4,7

966,6

6,5

Impôts et taxes affectés (2)

284

12,1

309,7

9,1

319,6

3,2

Transferts (3)

70,8

1,7

62,7

- 11,5

60,7

- 3,2

Contributions publiques

37,9

17,7

34,5

- 9

33,7

- 2,2

Autres recettes (4)

27,2

17,5

28,8

5,9

28,5

- 0,9

Total Recettes

1 286,9

4,6

1 343

4,4

1 409,1

4,9

(1) y compris les exonérations prises en charge

(2) CSG. Taxes diverses (assurances automobiles, alcools, tabacs, publicité pharmaceutique) en métropole

impôts de 1 % sur les revenus des capitaux et les valeurs mobilières

(3) Transferts divers entre organismes de sécurité sociale et autres transferts reçus

(4) Recours contre tiers, produits financiers, recettes diverses, recettes DOM

Source : direction de la sécurité sociale

S'agissant des dépenses, les montants constatés en assurance maladie sont supérieurs aux estimations, pourtant déjà fortement relevées, du mois de septembre, mais les dépenses sont moindres que prévues dans les autres branches. Les prestations vieillesses connaissent peu de changements mais les dépenses de la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) sont au total inférieures de 3,4 milliards de francs aux prévisions de septembre en raison de la non réalisation du versement de 2,9 milliards de francs au Fonds de réserve des retraites. Enfin, les dépenses de la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) se révèlent légèrement inférieures aux prévisions.

Au total, l'excédent du régime général en 2000 se concentre sur la branche famille et sur les accidents du travail. La CNAV dégage un petit excédent, en retrait sur le résultat de l'année précédente. Le déficit de la branche maladie se réduit mais reste très substantiel (- 6,1 milliards de francs).

En outre, l'année 2000 a été marquée par une forte progression de l'emploi et de la masse salariale (environ 6 %). Cependant les recettes du régime général ont augmenté sensiblement moins vite que l'assiette salariale qui en constitue pourtant le principal déterminant. L'écart s'explique en partie par la montée en régime des exonérations qui n'ont pas été intégralement remboursées au régime général. Y ont également contribué la réduction de la prise en charge par l'Etat de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire et la diminution des transferts du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) à la CNAV.

Au total, l'augmentation des recettes du régime général a été pratiquement la même en 2000 qu'en 1999 (4,4 % contre 4,6 %). Les dépenses ont connu une accélération (4 % contre 3,2 %) entièrement imputable à la branche maladie (5,9 % après 2,8 %).

Pour 2001, la commission des comptes de la sécurité sociale prévoit un excédent du régime général de 7,9 milliards de francs. Les soldes par branche seraient dans l'ensemble assez proches des résultats de l'année 2000, avec une réduction du déficit de la branche maladie et un léger recul de l'excédent de la CNAF. Les dépenses de la CNAV et de la CNAF augmenteraient sensiblement plus vite en 2001 que les années précédentes en raison des revalorisations de prestations intervenues en début d'année, et d'une forte croissance de leurs transferts à d'autres organismes de sécurité sociale (compensations, versements de la CNAF au FSV). Pour l'ensemble du régime général, la hausse des dépenses serait de 4,7 % en 2001, contre 4 % en 2000.

Mais l'excédent retrouvé n'enlève rien à la fragilité persistante des comptes sociaux dans la mesure où cet excédent servira avant tout à financer le surcoût des 35 heures -estimé par la commission des comptes de la sécurité sociale à 12,5 milliards de francs en 2000 s'agissant du régime général et à 13,2 milliards de francs tous régimes confondus- ainsi que la mise en place du plan « médicaments » annoncé le 7 juin dernier par la ministre de l'emploi et de la solidarité qui devrait permettre de dégager des économies de l'ordre de 4 à 5 milliards de francs en année pleine.

Solde financier du Régime général

(en milliards de francs)

1997

1998

1999

2000

2001 (p)

Maladie

- 14,4

- 15,9

- 8,9

- 6,1

- 3,6

Accidents du travail

0,3

1,5

1,1

2,4

3,2

Vieillesse

- 5,2

- 0,2

3,7

1,0

2,0

Famille

- 14,5

- 1,6

4,8

7,9

6,3

Régime général

- 33,8

- 16,2

0,7

5,2

7,9

(p) prévisions

Source : CCSS juin 2001

2. Le solde excédentaire des administrations de sécurité sociale

Les administrations de sécurité sociale (ASSO) sont excédentaires pour la deuxième année consécutive, en amélioration par rapport à 1999. En effet, la capacité de financement des ASSO a atteint en 2000 54,6 milliards de francs en augmentation de 30 milliards de francs par rapport à l'année 1999. Cette augmentation a concerné l'ensemble des régimes d'assurance sociale, tandis que le déficit des hôpitaux est resté stable. Les recettes des ASSO ont continué de croître à un rythme plus soutenu (+ 4,4 % comme en 1999) que les dépenses (+ 3 %).

Comme le souligne le rapport préalable au présent débat déposé par le gouvernement, l'amélioration des comptes sociaux est surtout due à des facteurs conjoncturels qui ont entraîné des recettes dynamiques, à savoir le retour de la croissance couplé à l'amélioration du marché de l'emploi.

a) Des recettes dynamiques

Le dynamisme des recettes a résulté d'une vive progression de la masse salariale privée (+ 5 % en 2000 et + 4,9 % en 2001) sur laquelle est assise la majeure partie de la CSG et des cotisations sociales. Les régimes de retraite complémentaire ont par ailleurs bénéficié d'une forte augmentation des cotisations suite aux accords AGIRC-ARRCO de 1996.

En outre, si les cotisations sociales versées aux régimes sociaux n'ont augmenté que de 3,5 %, les impôts reçus, du fait de la progression de la CSG et de l'affectation nouvelle d'impôts auparavant perçus par l'Etat, ont progressé de 17,6 %. Les recettes des administrations de sécurité sociale sont désormais constituées à 66 % de cotisations sociales et à 23 % d'impôts. En 1995, ces proportions étaient respectivement de 78 % et 8 %.

En contrepartie de l'élargissement de leurs ressources fiscales, l'Etat a nettement réduit ses transferts courants vers les ASSO. Ainsi, les versements de l'Etat à la sécurité sociale ont diminué d'environ 30 milliards de francs : la compensation des exonérations de cotisations patronales - liée à la réduction du temps de travail - prend désormais moins la forme de transferts directs que d'une réaffectation de certains impôts aux régimes de sécurité sociale. En outre, l'Etat avait effectué en 1999 des transferts en capital exceptionnels (dont un versement de 10 milliards de francs à l'UNEDIC) ; ces dépenses n'ont pas été reconduites en 2000.

Toutefois, 4,3 milliards de francs ont été versés au titre de la réduction du temps de travail. Mais le financement des allègements de cotisations sociales a été incomplet, ce qui a pesé sur le régime général à hauteur de 11,5 milliards de francs. En revanche, des transferts en capital ont alimenté le Fonds de réserve des retraites (FRR), avec notamment la première tranche des produits de cession des caisses d'épargne (4,7 milliards de francs) et un versement exceptionnel de la Caisse des dépôts et consignations de 3 milliards de francs.

b) Des dépenses sociales non maîtrisées

Les dépenses des administrations de sécurité sociale ont continué d'augmenter à un rythme voisin de l'année 1999 (+ 3 % contre + 2,8 %).

Les prestations en espèces augmentent modérément (+ 2,8 %) en raison de la diminution du nombre de chômeurs et des faibles revalorisations des allocations familiales et des retraites.

Comme le souligne le rapport précité du gouvernement : « La d ynamique des dépenses maladie et la nouvelle convention UNEDIC 2001-2003 atténuent le redressement du compte des administrations sociales, dont les dépenses devraient progresser deux fois plus vite que celles de l'Etat sur la période 1997-2002. L'amélioration du solde des administrations sociales devrait ainsi être deux fois moins élevée que celle du solde de l'Etat ».

Les dépenses d'assurance maladie, tirées notamment par l'accélération des remboursements de sécurité sociale (+ 6 % après + 2 % en 1999), ont dépassé l'objectif national (ONDAM) de 17 milliards de francs. Les autres transferts sociaux en nature, principalement les dépenses d'hospitalisation publique, augmentent de 2,2 %.

Le gouvernement le reconnaît lui-même dans son rapport : « une maîtrise des dépenses sociales est nécessaire ». En outre, s'agissant des dépenses de santé, l'analyse du gouvernement est certes clairvoyante mais sa mise en application inexistante : « Ces dernières années, les dépenses maladie ont suivi l'évolution dynamique de la consommation des ménages, elle-même tirée par la croissance. Le programme pluriannuel 2002-2004 prévoit un écart de progression entre les dépenses maladie et le PIB de 1,2 % par an, et les expériences étrangères montrent que seules des réformes structurelles - en particulier sur l'offre de soins - permettent d'atteindre de tels objectifs ».

Dépenses et recettes des administrations de sécurité sociale (y compris hôpitaux publics)

(en milliards de francs)

1999

2000

2000/1999 (en %)

Dépenses de fonctionnement

391,9

407,5

4,0

Intérêts

5,5

5,0

- 9,1

Prestations sociales en espèces

1.285,8

1.321,5

2,8

Remboursements de sécurité sociale

322,5

341,9

6,0

Autres transferts sociaux en nature

36,0

36,8

2,2

Subventions et autres transferts

47,2

35,1

- 25,6

Acquisitions nettes d'actifs non financiers

22,5

27,2

20,9

Total des dépenses

2.111,3

2.174,9

3,0

Ventes et autres recettes de production

74,7

76,5

2,4

Revenus de la propriété

7,7

7,2

- 6,5

Impôts

434,8

511,2

17,6

Cotisations sociales effectives

1.430,6

1.481,2

3,5

Autres recettes

188,2

153,4

- 18,5

Total des recettes

2.136,0

2.229,5

4,4

Capacité de financement

24,7

54,6

-

Source : Comptes de la Nation 2000 - base 95, Insee, direction de la prévision, direction générale de la Comptabilité publique

B. UNE HAUSSE DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX MALGRÉ LA LÉGÈRE BAISSE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

Les prélèvements obligatoires en faveur des régimes sociaux constituent la première source de prélèvements avec 21,4 % du PIB en 2000 et plus de 1.970 milliards de francs de recettes, soit un peu plus de 300 milliards d'euros. Ils ont ainsi augmenté de 6,7 % en valeur par rapport à 1999.

1. Une augmentation d'un point de PIB depuis 1997

La tendance à la hausse continue des prélèvements sociaux depuis 1997 se poursuit donc. Ils seront ainsi passés en quatre ans de 20,5 % à 21,4 % du PIB, soit une augmentation « record » de près de 1 point de PIB.

Prélèvements obligatoires des administrations de sécurité sociale

1996

1997

1998

1999

2000

en milliards de francs

1.627

1.681

1.756

1.840

1.974

évolution

-

+ 3,33 %

+ 4,46 %

+ 4,78 %

+ 6,7 %

en % du PIB

20,5 %

20,5 %

20,6 %

20,9 %

21,4 %

Source : INSEE, Comptes nationaux

En 2000, les prélèvements obligatoires des administrations de sécurité sociale ont intégré une nouvelle affectation d'impôts auparavant perçus par l'Etat à hauteur d'environ 40 milliards de francs - les droits sur les tabacs et la taxe générale sur les activités polluantes - et la perception d'un nouvel impôt, la contribution sociale sur les bénéfices. Par ailleurs, les prélèvements des administrations de sécurité sociale sont largement assis sur la masse salariale, qui a fortement progressé. Ainsi, la CSG a augmenté de 5,8 %. Les cotisations ont été en hausse modérée de 3,4 %, du fait des exonérations de cotisations liées à la mise en place des lois sur la réduction du temps de travail et à la poursuite des mesures d'allègements sur les bas salaires.

Ainsi, en 2000, les impôts après transferts perçus par les ASSO ont représenté plus de 511 milliards de francs, soit 5,5 % du PIB, contre près de 435 milliards de francs en 1999, soit 4,9 % du PIB. En revanche, les cotisations sociales effectives perçues par les ASSO ont légèrement diminué entre 1999 et 2000, passant de 16 % du PIB à 15,9 % du PIB.

2. Une déconnexion croissante entre les finances sociales et celles de l'Etat

Ces transferts successifs de ressources fiscales de l'Etat aux administrations de sécurité sociale ont pour conséquence de « biaiser » l'interprétation qui peut être faite du niveau des prélèvements obligatoires perçus par l'Etat. En effet, si les impôts reçus par l'Etat n'ont progressé entre 1999 et 2000 que de 0,1 %, cette stabilisation n'est qu'apparente dans la mesure où certains impôts, auparavant perçus par l'Etat, ont été affectés aux administrations de sécurité sociale. Ainsi, alors que la part des prélèvements obligatoires au profit de l'Etat représentait en 1999 17,8 % du PIB, ils ne représentent plus en 2000 que 17,1 % du PIB tandis que cette part, pour les administrations de sécurité sociale, est passée de 20,9 % du PIB en 1999 à 21,4 % en 2000.

Cette année encore, la volonté du gouvernement de diminuer les prélèvements obligatoires ne s'appliquera pas aux prélèvements sociaux, révélant une déconnexion croissante entre les finances de l'Etat et les finances sociales ainsi que l'absence de réelle maîtrise des finances sociales.

C. DES DISPARITÉS PERSISTANTES ENTRE BRANCHES DU RÉGIME GÉNÉRAL

1. La branche maladie toujours largement déficitaire

La branche maladie reste largement déficitaire avec - 6,1 milliards de francs en 2000 et une prévision de - 3,6 milliards de francs en 2001. Certes le déficit se réduit entre 1999 et 2000 puisqu'en 1999 le déficit de la branche maladie s'élevait à 8,9 milliards de francs mais il faut souligner, d'une part, que ce déficit se réduit beaucoup moins vite que prévu puisqu'en mai 2000 la commission des comptes de la sécurité sociale prévoyait un déficit de la branche maladie ramené à 1,2 milliards de francs en 2000, d'autre part, qu'en en droits constatés, la situation de la branche maladie est inversée. De même le déficit est fortement dégradé par rapport à la comptabilité en encaissement-décaissement et s'élève pour 2000 à 10,7 milliards de francs, et pour 2001 à 6,7 milliards de francs.

Les dépenses maladie du champ de l'ONDAM se sont élevées à 675,3 milliards de francs en 2000, soit une augmentation de 5,5 % par rapport à 1999. Le dépassement de l'objectif initial (658,3 milliards de francs) atteint 17 milliards de francs ; il porte entièrement sur les soins de ville et s'explique en grande partie par la très forte croissance des remboursements de médicaments (+ 11,1 % pour la CNAM).

L'hypothèse retenue par la commission des comptes de la sécurité sociale pour 2001 est un dépassement de l'ONDAM de 9 milliards de francs. Elle correspond à une augmentation de 3,9 % par rapport aux dépenses de l'année 2000, ce qui suppose un ralentissement sensible. Cette hypothèse paraît difficile à tenir compte tenu des niveaux déjà atteints par la consommation médicale en début d'année.

2. La situation des autres branches

La branche accidents du travail affiche un excédent de 2,4 milliards de francs en 2000 et une prévision d'excédent de 3,2 milliards de francs en 2001. Traditionnellement excédentaire, la branche accidents du travail voit son excédent progresser régulièrement malgré les charges supplémentaires qui lui incombent en 2001 au titre de l'indemnisation des victimes de l'amiante.

La branche vieillesse bénéficie pour la deuxième année consécutive d'un résultat excédentaire : + 1 milliard de francs en 2000 et une prévision de + 2 milliards de francs en 2001. Pourtant il faut noter un net recul de cet excédent entre 1999 et 2000 : en 1999 en effet, la branche vieillesse affichait un excédent de 3,7 milliards de francs. Ce recul est dû notamment aux revalorisations des pensions début 2000 et 2001 ainsi qu'à la diminution des transferts en provenance du Fonds de solidarité vieillesse au titre des cotisations chômage prises en charge (- 11,3 %).

La branche famille bénéficie d'un solde positif de 7,9 milliards de francs en 2000 et d'une prévision d'excédent de 6,3 milliards de francs en 2001. En 2000, les recettes de la branche famille ne progressent que de 2 %. La baisse de la prise en charge par l'Etat de la majoration de l'ARS (1,8 milliard de francs en 2000 contre 6,5 milliards de francs en 1999), ainsi que le transfert au FSV de 2 % de prélèvement sur les revenus du capital ( - 4,1 milliards de francs) expliquent ce faible rythme de progression des recettes. Les dépenses de la CNAF augmentent de 0,8 % en 2000 contre 3,3 % en 1999. Ce chiffre ne tient cependant pas compte du coût des mesures annoncées lors de la conférence de la famille réunie le 11 juin 2001 et notamment de la création d'un « congé de paternité » qui devrait cependant être financé par les excédents de la branche famille.

Au total, la branche maladie demeure le « maillon faible » du régime général de sécurité sociale tandis que la branche vieillesse, qui a déjà vu sa situation se dégrader fortement entre 1999 et 2000 comme l'avait prévu votre rapporteur dans son rapport de l'année précédente, pourrait à nouveau se trouver « dans le rouge » si les réformes qui s'imposent ne sont pas mises en oeuvre rapidement.

II. LA PERSISTANCE DE ZONES D'OMBRE

A. LE FINANCEMENT INCERTAIN DES MESURES SOCIALES GOUVERNEMENTALES

1. 35 heures : la sécurité sociale paiera !

Votre commission, comme elle l'avait redouté, constate que le financement des 35 heures n'est pas assuré, comme l'a montré notre collègue Charles Descours, rapporteur des lois de financement de la sécurité sociale de notre commission des affaires sociales, au terme du contrôle qu'il a effectué sur le FOREC.

En dépit des multiples « tuyauteries » mises au point par le gouvernement, accentuant encore l'opacité des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, et des contorsions législatives auxquelles il a dû se livrer pour sortir de l'impasse de financement, le déficit du FOREC est devenu structurel.

Le gouvernement a dès lors constamment cherché à masquer la vérité au Parlement comme aux partenaires sociaux sur le coût véritable des 35 heures, en surévaluant les recettes et en sous-estimant les dépenses 25 ( * ) .

En 2000, le déficit du FOREC est compris entre 13 et 17,6 milliards de francs :

Le compte du FOREC en 2000

(en millions de francs)

Mode de comptabilisation
12 mois civils ou 4 trimestres

Mode de comptabilisation 12 mois glissants ou 4 trimestres

Mode de comptabilisation 13 mois ou 5 trimestres

Régime général

68.103.848.898

70.897.403.032

75.569.548.898

Régime agricole

4.072.348.247

4.366.707.385

5.210.848 247

Autres régimes (pm)

?

?

?

TOTAL régimes

72.176.197.145

75.264.110.417

80.780.397.145

Recettes

59.040.000.000

63.200.000.000

63.200.000.000

Solde

- 13.136.197.145

- 12.064.110.417

-17.580.397.145

Source : rapport de M. Charles Descours au nom de la commission des affaires sociales du Sénat

En 2001, les dépenses sont beaucoup plus importantes que prévu, soit 10 à 15 milliards de francs supérieures à ce que prévoyait la loi de financement de la sécurité sociale :

Les dépenses 2001 du FOREC : les nouvelles prévisions

(en millions de francs)

Dépenses

Septembre 2000 (PLFSS 2001)

Janvier 2001 (DARES)

Janvier 2001 (ACOSS- MSA) (1)

Ristourne dégressive 1,3 SMIC (39 heures)

27.000

27.200

23.100

Loi Aubry I

16.200

17.100

14.600

Loi Aubry II

37.200

46.600

58.900

Aide de Robien

3.700

3.700

3.200

Majorations ZRR, ZF Corse et routiers

900

1.000

-

Exonération cotisations allocations familiales régimes spéciaux agricoles

300

300

300

Total dépenses

85.200

95.600

100.200

(1) citées dans la note de la Direction de la sécurité sociale du 24 janvier 2001.

Source : rapport de M. Charles Descours au nom de la commission des affaires sociales du Sénat

Compte tenu de recettes inférieures aux prévisions  -79,3 milliards de francs au lieu de 85,2 milliards de francs-, le déficit serait compris entre 16,4 et 20,9 milliards de francs.

Le gouvernement semble donc aujourd'hui avoir perdu la maîtrise du « monstre » qu'il a engendré, et a dû se mettre à la recherche d'un financeur en dernier ressort des 35 heures, refusant d'assurer les conséquences de ses choix. Il a trouvé ce financeur : c'est la sécurité sociale qui paiera.

Renouant avec la théorie des « retours » pour les finances publiques, dite aussi « recyclage », voire « autofinancement » de la réduction du temps de travail, qu'il avait finalement abandonnée à la fin de l'année 1999 devant les protestations des partenaires sociaux, le gouvernement a décidé de faire payer la sécurité sociale.

A l'occasion de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale du 7 juin dernier, le gouvernement a officialisé la ponction de 12 milliards de francs sur le régime général, fragilisant ainsi l'amélioration de sa situation financière , même si, selon l'avant-propos du rapport sur les comptes de la sécurité sociale, le traitement comptable retenu « revêt un caractère transitoire ». En effet, pour le traitement en droits constatés de l'insuffisance des recettes destinées au FOREC, le régime général bénéficie d'une créance de l'Etat d'une dizaine de milliards de francs. Ce traitement comptable « devra être révisé lorsque des dispositions validant l'insuffisance de la compensation des exonérations en 2000 et en 2001 auront été prises » !

Votre commission tient à rappeler son hostilité au dispositif retenu par le gouvernement, et imposé à la sécurité sociale, qui présente surtout le grand tort d'être contraire à la loi. En outre, elle s'interroge sur la façon dont les 35 heures seront financées en cas de retournement de la conjoncture et, donc, de dégradation de la situation financière du régime général.

2. Le financement opaque de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA)

L'APA est une allocation destinée à « toute personne résidant en France qui se trouve dans l'incapacité d'assumer les conséquences du manque ou de la perte d'autonomie liés à son état physique ou mental » et remplace la prestation spécifique dépendance (PSD). Le coût de cette nouvelle allocation est estimé, selon le gouvernement, à 16,5 milliards de francs en 2002 et à 23 milliards de francs en régime de croisière.

L'APA doit être cofinancée par les départements, un établissement public national à caractère administratif appelé « Fonds de financement pour l'allocation personnalisée d'autonomie » et par les bénéficiaires, qui acquitteraient un ticket modérateur.

Ainsi, en 2002, le financement de l'APA se présenterait ainsi :

- un peu plus de 11 milliards de francs pour les départements ;

- 0,5 milliard de francs provenant d'une contribution des caisses de retraite, affectée au nouveau Fonds national de financement de l'APA ;

- 5 milliards de francs provenant d'une fraction du produit de la CSG actuellement affecté au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et désormais destinée au nouveau Fonds national de financement de la prestation autonomie. Le taux de la CSG affectée au FSV passerait ainsi de 1,15 % à 1,05 %.

S'agissant de la création de cette nouvelle allocation et de ses modalités de financement, votre rapporteur tient à faire les remarques suivantes.

Tout d'abord, les modalités de financement de l'APA constituent une entorse au droit de contrôle du Parlement sur les prélèvements sociaux. En effet, le fonds de financement de l'APA ne constitue pas en tant que tel un organisme concourant au financement des régimes de base puisque l'APA n'a pas été considéré comme constituant un « cinquième risque ». En conséquence, ce fonds échapperait au contrôle du Parlement lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale. Seule la contribution des caisses de sécurité sociale (500 millions de francs) apparaîtrait dans l'objectif de dépenses « vieillesse-veuvage » voté de manière globale.

En outre, les dépenses de ce fonds ne relèveront pas non plus des lois de finances, alors qu'elles ne diffèrent en rien d'autres concours de l'Etat aux collectivités locales, qui, eux, y sont retracés en dotations budgétaires ou en prélèvements sur recettes. Ensuite, il faut souligner que le détournement au profit du fonds de financement de l'APA d'une partie de la CSG affectée au FSV prive le Fonds de réserve des retraites de ces « excédents » du FSV qui sont cependant censés en constituer la première source d'alimentation.

Or, afin de financer les 35 heures, le gouvernement a déjà supprimé l'affectation des droits sur les alcools au FSV (11,5 milliards de francs en 2001) et diminué une première fois le taux de CSG affectée au FSV (7,5 milliards de francs en 2001). Les recettes du FSV sont ainsi amputées annuellement de plus de 24 milliards (19 milliards résultant de la loi de financement pour 2001, 5 milliards de francs au titre du financement de l'APA).

Ainsi, notre collègue Alain Vasselle, rapporteur au nom de la commission des affaires sociales, a calculé que sur trois ans, entre 2000 et 2002, le gouvernement allait ponctionner le FSV de 50 milliards de francs pour financer les 35 heures et l'APA, somme qui aurait pu alimenter le Fonds de réserve des retraites ou qui aurait pu faire l'objet d'un allégement du prélèvement social. En outre, il apparaît que les excédents de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS), également destinés au Fonds de réserve des retraites, seront de la même manière mécaniquement diminués puisque les régimes d'assurance vieillesse participent également au financement de l'APA.

Par ailleurs, outre la complexité des modalités de financement de l'APA, votre rapporteur tient à souligner le caractère déséquilibré de ce financement ainsi que la sous-estimation manifeste du coût de cette mesure. Au-delà de 2003 notamment, le financement de l'APA tel que défini par le gouvernement risque de ne plus être assuré. Il s'agit en effet d'une prestation plus avantageuse que la PSD et qui devrait concerner de 800 à 960.000 personnes. Ainsi, le risque est que les perspectives de financement au-delà de 2003 rendent les régimes de retraite et le FSV premiers contributeurs du financement de l'allocation.

3. La non-anticipation du choc financier des retraites

Les premières projections provisoires du Conseil d'orientation sur les retraites (COR), instance de réflexion et de concertation mise en place par le gouvernement en juin 2000, confirment en grande partie le diagnostic dressé en 1999 par le commissaire général au Plan, Jean-Michel Charpin.

Ces projections, basées notamment sur l'hypothèse d'un taux de chômage à 4,5 % en 2010 avec 3,1 millions d'actifs occupés supplémentaires, prévoient qu'à l'horizon 2020 le régime de retraite de base des salariés du privé connaîtrait un besoin annuel de financement de l'ordre de 72 à 99 milliards de francs. Les deux extrémités de la fourchette dépendant, pour l'essentiel, du profil de progression de la retraite moyenne dans les prochaines années. En 2040, le déficit annuel de ce régime d'assurance-vieillesse atteindrait 261 milliards de francs au minimum, 325 milliards de francs au maximum. Lesdites projections sont un peu moins pessimistes que celles du rapport Charpin qui, avec des hypothèses de départ similaires, prévoyait un déficit de la caisse nationale d'assurance vieillesse compris dans une « fourchette » de 100 à 125 milliards de francs.

S'agissant des régimes complémentaires (AGIRC et ARRCO), le déficit prévu par le COR à l'horizon 2020 est respectivement de 13 et 7 milliards de francs, tandis qu'à l'horizon 2040 ce déficit s'élève à 27 et 93 milliards de francs.

Le régime des fonctionnaires connaîtrait lui un déficit annuel de 132 milliards de francs en 2020 et de 241 milliards de francs en 2040. Enfin, s'agissant de la fonction publique territoriale, ce besoin annuel de financement s'élèverait à 48 milliards de francs à l'horizon 2020 et 137 milliards de francs à l'horizon 2040.

Ces chiffres ne font que confirmer l'effort financier qu'il reste à accomplir pour assurer l'équilibre du système de retraite, même dans une conjoncture favorable.

Les déficits futurs des régimes de retraite (chômage à 4,5 % en 2010)

Besoin de financement annuel en milliards de francs

2020

2040

Régimes des salariés

- 72 à - 99

- 261 à - 325

Agirc

- 13

- 27

Arrco

- 7

- 93

Fonctionnaires

- 132

- 241

CNRACL (fonction publique territoriale)

- 48

- 137

Source : COR

Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Laurent Fabius, a déclaré, après avoir pris connaissance de ces projections du COR : « il existe à terme un vrai problème d'équilibrage des retraites et il va falloir le résoudre, ce sera l'un des axes majeurs de la prochaine présidence ». En outre, il a affirmé que la répartition « doit rester le socle des retraites, même s'il peut y avoir des aménagements complémentaires ».

Votre rapporteur ne peut que constater qu'une fois encore, le gouvernement affirme de grands principes sans y adjoindre de réelles décisions. Or, les projections du COR le confirment, si rien n'est fait rapidement, les hypothèses les plus pessimistes concernant l'avenir de notre système de retraite seront validées. En outre, votre rapporteur ne peut que se rallier à l'analyse précitée de notre collègue Alain Vasselle concernant l'avenir « hypothéqué » du fonds de réserve des retraites. Selon lui, le FRR souffrira dès sa deuxième année d'existence d'un déficit de 15 milliards de francs sur les 55 milliards de francs de recettes escomptées par le gouvernement.

Le FRR doit être doté de 1.000 milliards de francs d'ici à 2020, selon le plan annoncé par le Premier ministre en mars 2000 ce qui suppose des recettes annuelles moyennes de l'ordre de 30 à 35 milliards de francs. Or, pour l'année 2000, le FRR accuse déjà un retard de 15 milliards de francs avec seulement 20 milliards de francs accumulés. En 2001, ce retard va s'aggraver puisqu'au lieu des 55 milliards de francs prévus dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, le FRR ne devrait bénéficier que d'une dotation de 40 milliards de francs.

En outre, comme il a déjà été souligné, le FRR est en grande partie privé des excédents du FSV que l'Etat « ponctionne » pour financer ses mesures sociales : politique de réduction du temps de travail, allocation personnalisée d'autonomie ou prise en charge de la dette de l'Etat à l'égard de l'AGIRC-ARRCO. Au total, ce sont 540 milliards de francs cumulés en 2020, intérêts financiers non compris, qui seront prélevés sur le FSV, autant de fonds détournés de leur destination principale : le FRR.

Pourtant, dans son rapport préparatoire au présent débat, le gouvernement indique : « Pour ne pas faire peser sur les générations les plus jeunes l'ensemble de cet ajustement et trouver les moyens d'assurer le financement des retraites sur le long terme, le gouvernement a souhaité prendre de l'avance et décidé en 2000 de constituer un fonds de réserve des retraites qui devrait représenter environ 10 points de PIB (1.000 milliards de francs actuels) d'ici à 2020 ».

En définitive, ce sont en réalité les excédents de la branche famille captés par le FSV en contrepartie partielle des ponctions qu'il a subies qui sont susceptibles de financer le fonds de réserve des retraites. Ainsi, sur 725 milliards de francs d'excédents confondus du FSV (310 milliards de francs) et de la branche famille (415 milliards qui viennent alimenter le FSV par transfert de charge et prélèvement sur recettes), seul un quart (185 milliards de francs) pourrait lui être attribué.

B. L'IMPOSSIBLE MAÎTRISE DES DÉPENSES DE SANTÉ

1. Une branche maladie structurellement déficitaire

Pour l'année 2000 , les statistiques publiées en février dernier par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ont confirmé la dérive des dépenses de santé : ainsi les dépenses d'assurance maladie du régime général de la sécurité sociale pour les travailleurs salariés ont augmenté de 6,3 % au cours de l'année 2000, soit plus du double de l'objectif fixé par le Parlement (+ 2,5 %). Une hausse similaire, estimée à 6 %, était annoncée pour l'ensemble des régimes d'assurance maladie (CNAM, CANAM pour les professions libérales et MSA pour les exploitants agricoles), pour lesquels le dépassement de l'objectif national devrait être proche de 18 milliards de francs.

En chiffres absolus, les dépenses du régime général auront atteint 548,8 milliards de francs en 2000. Les dépenses de soins de ville ont connu la plus forte hausse (+ 9 % dont 11,9 % pour les médicaments dont les prescriptions ont atteint 141,5 milliards de francs) et leur taux de croissance pour l'ensemble des régimes d'assurance maladie atteint 7,8 %. Tous régimes confondus, les réalisations pour l'année 2000 devraient atteindre 308,8 milliards de francs, soit un dépassement de 17,2 milliards de francs par rapport à l'objectif initial.

ONDAM Réalisation 2000 provisoire

(nette de la remise de l'industrie pharmaceutique en 1999 et 2000)

(en milliards de francs et %)

Réalisations tous régimes 1999

Objectif 2000

Réalisations tous régimes 2000

Evolution des Réalisations 2000/1999

Dépassement

Total soins de ville

286,2

291,6

308,6

7,8 %

+ 17,0

Dont ODD

138,0

140,4

145,5

5,5 %

+ 5,1

Total établissements

338,5

350,0

350,6

3,6 %

+0,6

Etablissements sanitaires publics


253,3


260,8


261,4


3,2 %


+ 0,6

Etablissements sanitaires sous DG

248,3

255,7

256,3

3,2 %

+ 0,6

Autres établissements sanitaires

4,3

4,3

4,3

-

-

Honoraires du secteur public

0,8

0,8

0,8

-

-

Médico-social

44,1

47,2

46,9

6,3 %

- 0,3

Médico-social (EI. AH)

29,7

31,7

31,3

5,4 %

- 0,4

Médico-social (personnes âgées)

14,4

15,5

15,6

8,3 %

+ 0,1

Cliniques privées

41,1

42,1

42,3

3,0 %

+ 0,2

ONDAM Métropole

624,7

641,6

659,2

5,5 %

+ 17,6

Prestations DOM

14,2

14,9

14,9

4,9 %

-

Ressortissants français à l'étranger

1,1

1,2

1,2

9,1 %

-

Marge de manoeuvre

-

0,6

-

-

-

Objectif national

640,0

658,3

675,3

5,5 %

+ 17,0

Source : direction de la sécurité sociale dans le rapport de la CCSS de juin 2001

Progression de l'ONDAM sur les trois premiers mois de 2001

Sur les trois premiers mois de l'année 2001 , à fin mars, les dépenses remboursées du régime général d'assurance maladies établies de façon définitive par la CNAMTS, atteignent près de 144 milliards de francs. A fin avril, les résultats provisoires fournis par la CNAMTS font état d'un montant de près de 190 milliards de francs.

L'objectif total de dépenses, tous régimes confondus pour l'année 2001, a été fixé par le Parlement dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 à 693,3 milliards de francs, soit un taux de progression de 3,5 %.

Sur les quatre premiers mois de l'année, la croissance des remboursements est, corrigée des jours ouvrés, de 4,7 % pour l'ONDAM. Cet taux de croissance reste donc très élevé malgré les difficultés rencontrées par les caisses pour assurer le traitement et le paiement des dossiers de remboursement.

L'évolution des remboursements des soins de ville atteint 6 % à fin avril, en données corrigées des jours ouvrés, avec un montant de 90,3 milliards de francs. Les postes de dépenses peu affectés par les problèmes de liquidation des caisses continuent de progresser très rapidement (médicaments : + 9 %, analyses de laboratoire : + 6 %). En revanche, le rythme de croissance des remboursements d'honoraires médicaux et dentaires fléchit (+ 2,5 %) en raison de ces mêmes difficultés. Les dépenses d'assurance maladie du régime général ont progressé de 4,7 % sur une année, entre janvier et avril 2001 et la même période en 2000.

L'évolution des dépenses hospitalières a enregistré une hausse de 3,7 % pour les établissements sociaux, de 4,2 % pour les hôpitaux publics et 1,7 % pour les cliniques.

Alors que le rythme des dépenses semble ralentir, + 6,1 % sur janvier-février, + 5,3 % sur janvier-mars et + 4,7 % sur janvier-avril, le fléchissement des remboursements sur les derniers mois est dû pour l'essentiel à l'incapacité des caisses à liquider le stock des feuilles de soins en souffrance (près de 15 millions de dossiers à la mi-mai).

Parmi les soins de ville, les dépenses en prescriptions ont crû de 8,4 % entre la période janvier-avril 2001 et la période janvier-avril 2000, loin devant les indemnités journalières versées en cas d'arrêt maladie (+ 4,6 %) et les honoraires médicaux et dentaires (+ 2,5 %).

L'objectif national de dépenses d'assurance maladie au premier trimestre 2001

Régime général - Métropole - Tous risques

Montants cumulés à fin mars 2001


Montants cumulés à fin avril 2001 (provisoires)


Taux d'évolution bruts : janvier à avril 2001/janvier à avril 2000

Taux d'évolution corrigé des jours ouvrés : janvier à avril 2001/janvier à avril 2000

Soins de ville

69.147

90.231

+ 7,3 %

+ 6,0 %

Honoraires médicaux et dentaires

20.989

27.389

+ 3,7 %

+ 2,5 %

Prescriptions

38.230

49.865

+ 9,8 %

+ 8,4 %

Indemnités journalières

9.928

12.977

+ 5,8 %

+ 4,6 %

Etablissements sanitaires publics*

55.488

13.786

+ 3,7 %

+ 3,7 %

Etablissements sanitaires privés

8.752

11.5452

+ 2,9 %

+ 1,7 %

Etablissements médico-sociaux**

10.483

14.155

+ 5,5 %

+ 4,2 %

Total ONDAM

143.870

189.723

+ 5,5 %

+ 4,7 %

* Taux d'évolution calculé en neutralisant l'évolution du poids du régime général par rapport aux autres régimes

** Ce poste intègre désormais les versements faits aux établissements pour personnes âgées et aux centres d'action médico-sociale précoce

Source : CNAMTS

Les dépenses maladie continuent donc leur inexorable augmentation et l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) voté chaque année par le Parlement perd désormais toute signification et cela d'autant plus que les dépassements réguliers de l'ONDAM ne sont que constatés chaque année et n'aboutissent pas à la mise en oeuvre de réformes structurelles d'envergure.

Progression en volume des dépenses d'assurance maladie de 1998 à 2000

2. L'absence de réformes d'envergure

Dans son rapport préparatoire au présent débat, le gouvernement reconnaît la nécessité de la mise en place de réformes : « La maîtrise des dépenses d'assurance maladie et des dépenses consacrées à la famille est nécessaire. La mise en place d'une régulation de l'offre de soins et le développement de la prévention devraient permettre de concilier maîtrise des dépenses d'assurance maladie et meilleure qualité des soins pour les Français. Comme le montre l'expérience de nos partenaires européens qui nous ont précédés dans cette démarche, notamment les pays scandinaves, cette décélération est compatible avec un progrès continu de la qualité du système de santé et avec une extension de la couverture maladie. Une meilleure efficacité exige cependant des réformes de structure et rend indispensable la mise en place de mécanismes de régulation efficaces tels que le respect d'une enveloppe globale de dépenses de médecine ambulatoire ».

Si le gouvernement a le mérite de dresser un diagnostic éclairant des besoins de notre système de santé et de s'en référer aux réformes mises en oeuvre chez nos voisins scandinaves, force est de constater que les résultats de sa politique de santé ne sont en rien à la hauteur des ambitions affichées.

Cette année, les critiques à l'encontre du fonctionnement de notre système de santé ont été particulièrement nombreuses et vives. C'est ainsi notamment, que dans une note publiée le 9 mai dernier, la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) dresse un bilan très critique et avance des propositions.

Les insuffisances de l'architecture du système sont clairement identifiées : l'objectif de dépenses annuel voté par le Parlement souffre d'une absence de vision sanitaire, les remboursements des médicaments se caractérisent par leur incohérence, il n'existe pas de réelle coordination des soins entre la ville et l'hôpital, et entre professionnels de santé, enfin la qualité des soins n'est pas garantie. S'agissant des relations conventionnelles entre les caisses et les professionnels de santé, le bilan de la CNAM précise que le vote annuel de l'ONDAM par le Parlement a sans doute servi de révélateur aux carences en matière de définition d'une politique de santé publique et de priorités sanitaires, mais qu'il faudrait aussi éclairer le débat d'une perspective pluriannuelle sous forme de loi d'orientation sanitaire. La variation des tarifs des actes médicaux est en outre considérée comme un mode de régulation des dépenses inadapté et inopérant à l'efficacité économique illusoire.

Enfin, il semble que la finalité du système - le service rendu au malade - ait été perdue de vue tout comme la transparence sur les activités de soins et la mesure de leur qualité.

Les insuffisances de la politique du médicament

La « crise » que rencontre aujourd'hui le médicament est, à cet égard, symptomatique des faiblesses du système de santé dans son ensemble. En effet, d'après le président de la CNAM, l'assurance maladie rembourse des spécialités à des prix différents pour un service médical rendu identique et continue à rembourser des médicaments pour un service médical rendu insuffisant. En outre, la part des médicaments chers (plus de 100 francs de prix public) parmi les produits remboursés par la sécurité sociale s'est accrue en 2000, atteignant 44 % de l'ensemble des montants prescrits, contre 38 % en 1999.

Au total, les dépenses de médicament ont augmenté de 10,7 % entre 1999 et 2000. La croissance des remboursements tient aussi à l'impact de l'accroissement des quantités de médicaments prescrits. En 2000, les régimes d'assurance maladie ont remboursé plus de 2,5 milliards d'unités acquises dans les 23.000 pharmacies d'officine. En montant remboursé, la dépense s'est élevée à environ 95 milliards de francs, dont 65 milliards pour le régime général.

La ministre de l'emploi et de la solidarité a annoncé la mise en place d'un « plan médicament » au cours de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale le 7 juin 2001. Ce plan devrait s'appuyer sur le rapport définitif de la commission de transparence qui a recensé dans la pharmacopée française remboursée, 835 médicaments dont le service médical rendu est insuffisant. Des baisses de prix ou des diminutions de prise en charge sont les voies privilégiées par le gouvernement, laissant de côté l'option des « déremboursements secs ». L'objectif de ce plan est de parvenir à des économies de l'ordre de 4 à 5 milliards de francs en année pleine. Ce plan s'articule autour de trois axes : agir sur le bon usage du médicament, relancer le développement des médicaments génériques, renforcer l'efficacité de la régulation, appuyée sur une politique du médicament à l'hôpital et à l'échelle européenne.

Il faut souligner ici le relatif échec du développement des médicaments génériques . Un an et demi après l'instauration du droit de substitution pour les pharmaciens, le secteur des génériques ne s'est développé que faiblement (ce type de médicaments ne représente, selon la CNAMTS, que 2 % des médicaments remboursés).

Comme l'année précédente, le constat de votre rapporteur en matière de finances sociales est sévère, et cela d'autant plus que les soldes s'améliorent.

En effet, que signifient des soldes excédentaires (ceux des administrations de sécurité sociale notamment n'ont jamais été aussi élevés) si, parallèlement, les prélèvements sociaux continuent de croître, si les dépenses ne sont pas maîtrisées, si les réformes structurelles ne sont pas mises en place et si lesdits excédents sont captés par l'Etat pour financer les largesses de sa politique sociale ?

Le solde prend une importance relative dans la mesure où il ne peut en aucun cas apparaître comme le fruit d'une politique saine et volontaire mais plutôt comme le reflet d'une croissance économique vigoureuse et de recettes dynamiques. En aucune façon, il ne reflète, malheureusement, l'existence d'une vraie politique de maintien de la dépense sociale.

examen en commission

Au cours d'une séance tenue le mardi 12 juin 2001 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général , sur le débat d'orientation budgétaire pour 2002 .

M. Philippe Marini, rapporteur général , a d'abord présenté les quatre éléments qui fondaient selon lui l'actuelle « désorientation budgétaire » du Gouvernement : la montée des aléas sur les prévisions de croissance, de réelles difficultés à tenir l'objectif de maîtrise des dépenses publiques, la fragilité des recettes fiscales, et la réduction compromise du déficit budgétaire pour 2002. Il a rappelé que l'hypothèse de croissance sur laquelle le Gouvernement avait bâti la loi de finances pour 2001 était comprise dans une fourchette de 3 à 3,6 % qu'elle avait été révisée à la baisse au mois de mars à 2,7 %, et qu'elle le serait sans doute une nouvelle fois en juin ou juillet, à 2,4 %.

Ainsi le scénario économique du Gouvernement, qui suppose un redémarrage de la croissance, est loin d'être vérifié. La norme de progression des dépenses de l'Etat a été fixée à 0,5 % en volume pour 2002, ce qui ne paraît guère crédible au vu des dépenses engendrées par les dernières négociations salariales dans la fonction publique ainsi que du plan de consolidation des emplois-jeunes, qui « saturent » déjà cette norme de progression, dont la valeur est donc purement optique. Enfin, M. Philippe Marini a rappelé que le déficit public structurel ne devrait diminuer que de 0,2 point de produit intérieur brut (PIB) entre 1999 et 2002.

Le rapporteur général a rappelé que la période 1998-2000 avait été marquée par une forte croissance, mais qu'un ralentissement significatif de l'activité était perceptible depuis le dernier trimestre. Ainsi, en rythme annualisé, la croissance au premier trimestre 2001 ne s'établit qu'à 2 %, la conjoncture mondiale étant en partie à l'origine de cette situation. Il a considéré que ce ralentissement devenait préoccupant. D'une part, le ralentissement de l'économie américaine est plus brutal que prévu, et il est également net dans la zone euro. D'autre part, l'affaiblissement de la demande intérieure résulte non seulement de la faible croissance de l'investissement des entreprises au cours du premier trimestre de cette année, mais également des incertitudes relatives au niveau de la consommation des ménages.

En matière d'évolution des prélèvements obligatoires, M. Philippe Marini, rapporteur général, a estimé que les années 1997 à 1999 constituaient une parfaite illustration du « théorème de Dominique Strauss-Kahn », consistant en une baisse des impôts et une augmentation corrélative des prélèvements obligatoires. Il apparaît ainsi que le taux des prélèvements obligatoires après les mesures nouvelles introduites par le Gouvernement est supérieur au taux des prélèvements obligatoires spontané. L'objectif du Gouvernement pour les années 2000 à 2002 consiste à revenir au taux de prélèvements obligatoires constaté en 1997, ce qui semble difficile à réaliser en raison des nombreuses incertitudes pesant actuellement sur la croissance. Ainsi, le « plan Fabius » de baisse des impôts est dilué sur l'ensemble de la palette fiscale et poursuit une multitude d'objectifs concomitants, la réduction des inégalités sociales, le soutien de l'investissement, la promotion du pouvoir d'achat et l'emploi. Il a considéré qu'un tel « saupoudrage fiscal » ne pouvait être efficace. Il a ajouté que le « plan Fabius » poursuivait des ambitions modestes en terme de réduction du poids des recettes publiques dans le PIB par rapport à l'ensemble des autres pays de la zone euro, en particulier au regard du programme fiscal allemand, puisqu'il est très coûteux (120 milliards de francs) guère efficace et moins ambitieux que ce qui peut être observé dans les pays étrangers. Au cours des deux dernières années, les engagements du Gouvernement en la matière n'ont du reste pas été respectés. En 1999, les recettes fiscales ont ainsi progressé de 30 milliards de francs, par rapport à la prévision initiale soit une hausse du taux des prélèvements obligatoires de 0,3 point, puis de 38 milliards de francs en 2000 (+ 0,4 point). Il est donc probable que le taux de prélèvements obligatoires affiché en 2001, soit 44,8 % du PIB, ne sera pas non plus respecté, a conclu le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a ensuite présenté l'évolution des dépenses. Il a constaté, reprenant les travaux de la Cour des comptes, que les engagements du Gouvernement n'avaient été tenus, ni en 1998, ni en 1999. Pour 2000, la norme de progression des dépenses aurait été respectée, bien que la Cour des comptes ait formulé dans son rapport préliminaire sur l'exécution des lois de finances pour 2000 d'importantes critiques et réserves d'ordre méthodologique. Il convient par ailleurs de noter que les programmes pluriannuels de finances publiques successifs fixent des objectifs de moins en moins ambitieux en matière de maîtrise des dépenses publiques. Ces derniers sont toujours largement supérieurs au niveau qu'ils ont atteint dans la quasi totalité des pays de l'OCDE. Ainsi, l'Italie, qui avait un niveau de dépenses publiques supérieur à celui de la France au début des années 1990, présente désormais des résultats meilleurs que ceux de la France, tandis que plusieurs pays convergent vers une zone où les dépenses sont d'un niveau comparable, créant ainsi un espace de compétitivité. Le rapporteur général a souligné le caractère relativement inquiétant de l'évolution des dépenses publiques dans notre pays en raison, en particulier, de l'impact des dépenses de fonction publique, dont la progression par rapport à l'ensemble du budget général est de 1,8 point depuis 1997. Plus généralement, la progression annuelle du budget de l'Etat résulte quasi-essentiellement de la hausse et de l'inertie des dépenses de fonction publique et de charge de la dette, si bien que le Gouvernement ne dispose plus de marge de manoeuvre budgétaire autre que le recours à des redéploiements de crédits.

Présentant ensuite l'évolution de la dette, M. Philippe Marini, rapporteur général , a rappelé que le besoin de financement de l'Etat - principal agrégat comptable retenu par le traité de Maastricht - avait progressé entre 1999 et 2000, alors que le déficit budgétaire diminuait sur la même période. Il a insisté sur le fait que la réduction des déficits publics résultait à hauteur des deux tiers de la bonne tenue de la conjoncture, le solde conjoncturel s'améliorant beaucoup plus substantiellement que le solde structurel. Il convient d'en déduire que cette amélioration est passagère et qu'elle ne résulte pas des efforts d'adaptation de l'Etat ou de réformes structurelles. Enfin, il a noté qu'en 2001, l'Etat demeurait la seule collectivité publique déficitaire.

Le rapporteur général a ensuite fait observer que le stock de la dette continuait d'augmenter, l'encours de la dette négociable de l'Etat s'étant accru de plus de 1.000 milliards de francs entre 1997 et 2001 : si cette dérive de l'endettement peut être constatée sous tous les gouvernements successifs, il est un fait que la bonne conjoncture observée depuis plusieurs années n'a, en rien, fait reculer le poids de la dette, a-t-il constaté. Il a expliqué que les 591,7 milliards de francs empruntés par l'Etat sur les marchés financiers en 2001 avaient été affectés de la façon suivante : 407 milliards de francs pour le remboursement des emprunts antérieurs, 170 milliards de francs pour le financement des investissements, et 13,8 milliards de francs pour le paiement des dépenses courantes. Rappelant que le Gouvernement avait indiqué vouloir réduire la dette grâce aux recettes exceptionnelles que constitue l'attribution de quatre licences Universal Mobile Telecommunications System (UMTS), soit 32,5 milliards de francs par an pour les années 2001 et 2002, dont le produit devait être affecté au fonds de réserve pour les retraites (FRR) mais aussi, à hauteur de 14 milliards de francs par an, à la caisse d'amortissement de la dette publique (CADEP), il a jugé extrêmement incertaines tant ces ressources, déjà amputées de 50 % en raison de l'attribution de deux licences sur quatre, que leur affectation. Enfin, il a noté que les déficits publics français restaient supérieurs à la moyenne de nos principaux partenaires.

M. Philippe Marini, rapporteur général , présentant ensuite la situation des collectivités territoriales, a noté que l'augmentation des concours de l'Etat aux dites collectivités entre 2000 et 2001 s'élevait à 33 milliards de francs, ainsi répartis : 80 % au titre de la compensation des exonérations fiscales, 15 % au titre des dotations de fonctionnement et d'équipement et 5 % au titre du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) et des amendes de police. Il en a déduit que les « cadeaux » fiscaux consentis aux contribuables par l'Etat avaient été, en fait, supportés par les collectivités territoriales.

S'agissant des administrations de sécurité sociale, il a relevé que la limitation des dépenses d'assurance maladie était restée un « voeu pieux », l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ayant toujours été réalisé à un niveau supérieur aux prévisions. En fait, l'équilibre de la sécurité sociale est dû à un niveau de prélèvements sociaux toujours croissants, soit 21,4 % du PIB aujourd'hui, la contribution sociale généralisée (CSG) constituant le premier impôt payé par les Français.

M. Philipe Marini, rapporteur général , a conclu en estimant qu'il existait de graves incertitudes sur l'exécution du budget 2001 et sur le cadrage du projet de loi de finances pour 2002. La charge de la dette, en raison de la remontée des taux d'intérêt, va probablement de nouveau augmenter après la réalisation d'économies de constatation au cours des années précédentes. Le programme de lutte contre l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) devrait coûter, selon le Gouvernement, 8 milliards de francs en 2001, alors que seuls 2,2 milliards de francs sont aujourd'hui prévus, suite à l'intervention du décret d'avance du 21 mai dernier. La revalorisation des salaires dans la fonction publique va entraîner des dépenses pour l'Etat d'un montant total de 19,4 milliards de francs sur les années 2001 à 2003. Par ailleurs, outre le coût résultant de la pérennisation des emplois-jeunes, l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) va engendrer un coût annuel de 5,5 milliards de francs à partir de 2002. Ce sont donc des dépenses supplémentaires de l'ordre de 30 milliards de francs qui sont d'ores et déjà programmées pour 2002.

M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis des loi de financement de la sécurité sociale , a ensuite présenté la situation des finances sociales. Il a indiqué que, pour la deuxième année consécutive, les comptes de la sécurité sociale présentaient des résultats apparemment vertueux, mais que, comme l'année précédente, force était de constater que ces apparences étaient, pour une large part, factices. Un fragile excédent du régime général masquant des disparités croissantes entre branches et, une fois encore, l'impossible maîtrise des dépenses de santé ; un excédent « historique » des comptes des administrations de sécurité sociale n'en rendant que plus flagrante leur déconnexion avec l'évolution des comptes de l'Etat et risquant d'être « réquisitionné » pour assurer le financement des dépenses sociales décidées par le gouvernement : telle est la réalité des comptes sociaux aujourd'hui.

Puis il a présenté les résultats comptables du régime général de la sécurité sociale, rendus très tardivement publics par la commission des comptes de la sécurité sociale. Après son retour à l'équilibre comptable en 1999, le régime général de la sécurité sociale présente un solde excédentaire de 5,2 milliards de francs en 2000. Cette situation excédentaire explique notamment la capacité de financement dégagée cette année par les administrations de sécurité sociale qui s'élève à 54,6 milliards de francs. En outre, cette amélioration des comptes sociaux est, avant tout, le résultat de facteurs éminemment conjoncturels : le retour de la croissance couplé à l'amélioration du marché du travail.

Il a cependant souligné la diversité de la situation de chacune des branches :

- la branche maladie reste largement déficitaire avec - 6,1 milliards de francs en 2000 et une prévision de - 3,6 milliards de francs en 2001. Les dépenses maladie du champ de l'ONDAM se sont élevées à 675,3 milliards de francs en 2000, soit une augmentation de 5,5 % par rapport à 1999. Le dépassement de l'objectif initial (658,3 milliards de francs) atteint 17 milliards de francs ;

- la branche accidents du travail affiche un excédent de 2,4 milliards de francs en 2000 et une prévision d'excédent de 3,2 milliards de francs en 2001, malgré les charges supplémentaires qui lui incombent en 2001 au titre de l'indemnisation des victimes de l'amiante ;

- la branche vieillesse bénéficie pour la deuxième année consécutive d'un résultat excédentaire : + 1 milliard de francs en 2000 et une prévision de + 2 milliards de francs en 2001. Pourtant il faut noter un net recul de cet excédent entre 1999 et 2000 puisqu'en 1999, en effet, la branche vieillesse affichait un excédent de 3,7 milliards de francs ;

- la branche famille bénéficie d'un solde positif de 7,9 milliards de francs en 2000 et d'une prévision d'excédent de 6,3 milliards de francs en 2001. Ce chiffre ne tient cependant pas compte du coût des mesures annoncées lors de la conférence sur la famille réunie le 11 juin 2001 et notamment de la création d'un « congé de paternité » qui devrait cependant être financé par les excédents de la branche famille.

Le rapporteur pour avis a précisé que, du côté des recettes, les prélèvements obligatoires en faveur des régimes sociaux constituaient la première source de prélèvements avec 21,4 % du PIB en 2000, en augmentation de 6,7 % par rapport à 1999. La tendance à la hausse continue des prélèvements sociaux depuis 1997 se poursuit donc. Ils seront ainsi passés en quatre ans de 20,5 % à 21,4 % du PIB, soit une augmentation « record » de près de 1 point de PIB. Cette année encore, la volonté du gouvernement de diminuer les prélèvements obligatoires ne s'appliquera pas aux prélèvements sociaux, révélant l'absence de réelle maîtrise des finances sociales, appelées le plus souvent à jouer le rôle de béquille pour le « canard boiteux » des finances publiques qu'est l'Etat.

M. Jacques Oudin a souligné à quel point le financement de la plupart des mesures sociales décidées par le gouvernement était incertain et devait souvent faire intervenir la sécurité sociale pour en assurer la pérennité. Il a notamment cité le cas du financement des 35 heures. La ministre de l'emploi et de la solidarité l'a confirmé jeudi dernier : l'excédent du régime général de la sécurité sociale devra, en partie, contribuer à financer le surcoût des 35 heures estimé par la commission des comptes de la sécurité sociale à 12,5 milliards de francs en 2000. Il a également évoqué l'allocation personnalisée d'autonomie : outre que ses modalités de financement constituent une entorse aux droits de contrôle du Parlement sur les prélèvements sociaux, le détournement au profit du fonds de financement de l'APA d'une partie de la CSG affectée au fonds de solidarité vieillesse (FSV) prive le fonds de réserve des retraites de ces « excédents » du FSV, pourtant censés en constituer la première source d'alimentation. Il a pourtant rappelé que, afin de financer les 35 heures, le gouvernement avait déjà supprimé l'affectation des droits sur les alcools au FSV (11,5 milliards de francs en 2001) et diminué une première fois la fraction de la CSG affectée à ce dernier (7,5 milliards de francs en 2001). Les recettes de ce fonds sont ainsi amputées annuellement de plus de 24 milliards de francs. Le risque est que les perspectives de financement de l'APA au-delà de 2003 rendent les régimes de retraite et le FSV premiers contributeurs du financement de l'allocation.

Dans la continuité de l'inquiétude qu'il avait exprimée l'an passé à l'occasion du débat d'orientation budgétaire, le rapporteur pour avis a dénoncé la non-anticipation par le gouvernement du choc financier des retraites. Alors que le conseil d'orientation des retraites, créé en juin 2000, a récemment rendu publiques ses premières projections, le gouvernement ne semble pas prendre conscience de l'effort financier qu'il reste à accomplir pour assurer l'équilibre du régime des retraites même dans un contexte conjoncturel favorable. Au contraire, il ponctionne un hypothétique fonds de réserve des retraites (FRR), ce dernier n'ayant en effet toujours pas d'existence réelle. Il a rappelé que le FRR devait être doté de 1.000 milliards de francs d'ici à 2020, selon le plan annoncé par le Premier ministre en mars 2000, ce qui suppose des recettes annuelles moyennes de l'ordre de 30 à 35 milliards de francs. Or, pour l'année 2000, le FRR accuse déjà un retard de 15 milliards de francs, avec seulement 20 milliards de francs accumulés. En 2001, ce retard va s'aggraver puisqu'au lieu des 55 milliards de francs prévus dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, le FRR ne devrait bénéficier que d'une dotation de 40 milliards de francs.

M. Jacques Oudin a ensuite exprimé son inquiétude devant le déficit persistant du régime d'assurance maladie expliquant que le dépassement de l'ONDAM (17 milliards de francs) portait entièrement sur les soins de ville, en grande partie par la très forte croissance des remboursements de médicaments (+ 11,1 % pour la CNAM).

Il a précisé que l'hypothèse retenue par la commission des comptes de la sécurité sociale dans le compte pour 2001 consistait en un dépassement de l'ONDAM de 9 milliards de francs, correspondant à une augmentation de 3,9 % par rapport aux dépenses de l'année 2000, ce qui supposait malgré tout un ralentissement sensible. Cette hypothèse a paru difficile à tenir à M. Jacques Oudin compte tenu des niveaux déjà atteints par la consommation médicale en début d'année. Il a conclu que les dépenses maladie continuaient leur inexorable augmentation, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) voté chaque année par le Parlement perdant désormais toute signification. Il a ajouté que le « plan médicament » mis en place par la ministre de l'emploi et de la solidarité, devant aboutir à des économies en année pleine de 4 à 5 milliards de francs, intervenait bien tardivement. Il aurait surtout dû s'accompagner, selon lui, d'autres réformes d'envergure toujours repoussées : la restructuration hospitalière et la résorption des inégalités régionales, le désengorgement des caisses de sécurité sociale, l'évaluation médicale ou encore la place donnée à la prévention et à la santé publique.

M. Alain Lambert, président , s'est souvenu que le Gouvernement avait souvent laissé entendre qu'il « décidait » de la croissance et a estimé que, dans ces conditions, celui-ci pourrait sûrement éviter le ralentissement qui se profile. Revenant sur l'accroissement de 1.000 milliards de francs de l'encours de dette négociable depuis 1997, il a considéré que la dérive des dépenses constatée depuis cette date serait financée par les générations futures. Il a jugé que, en matière de dette, le vote du Parlement sur la variation de celle-ci, proposé dans le cadre de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, permettrait de responsabiliser la représentation nationale. Il s'est demandé si l'augmentation des dépenses publiques ne devrait pas être mesurée en valeur absolue plutôt qu'en pourcentage du produit intérieur brut.

M. Maurice Blin s'est interrogé sur les conséquences de la conjoncture allemande sur le taux de croissance de l'économie européenne. Il a jugé que l'Allemagne n'avait pas tiré profit de la reprise des dernières années en raison de choix de politique économique proches de ceux du gouvernement français, en particulier en matière de réduction du temps de travail. Il a évoqué l'investissement public en se demandant si sa réduction n'était pas liée à la nécessité de financer l'augmentation des dépenses de fonctionnement.

M. François Trucy a souhaité avoir une comparaison du ratio dette/PIB de la France avec celui des autres pays de l'Union européenne.

Mme Marie-Claude Beaudeau s'est déclarée en accord avec les objectifs du Gouvernement consistant à atteindre un taux de croissance de 3 %, à revenir au plein emploi et à réorienter le partage des fruits de la croissance au profit des salariés. Mais elle a constaté que la politique du Gouvernement, qui ne prend pas en compte la nécessité de soutenir la demande en revalorisant les salaires et le salaire minimum, aboutissait à un ralentissement de la baisse du chômage. Elle s'est déclarée opposée au pacte de stabilité européen, qu'elle n'a pas jugé compatible avec un projet social.

Mme Marie-Claude Beaudeau a également estimé que la norme de progression des dépenses publiques retenue par le gouvernement ne permettait pas de satisfaire les besoins, notamment en matière de lutte contre les exclusions. Elle a rappelé que la croissance enregistrée depuis 1997 n'aurait pas été aussi bonne si le Gouvernement, dès son élection, n'avait pas choisi de soutenir la consommation des ménages plus modestes. Elle a observé que le programme de baisse des impôts et des dépenses sociales mis en oeuvre en Allemagne s'accompagnait d'une augmentation du taux de chômage. Elle a ajouté que la qualité des services publics français expliquait l'attractivité de notre territoire pour les investisseurs étrangers, et s'est déclarée opposée à une réduction des effectifs de la fonction publique.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a considéré que le rôle d'un gouvernement dans le soutien de la croissance était de créer les conditions, en particulier législatives et réglementaires, propices à l'activité économique. Il a observé que, en l'absence d'intervention gouvernementale depuis 1997, le taux de prélèvement obligatoire serait inférieur à son niveau d'aujourd'hui et que la dépense publique progresserait moins vite.

Le rapporteur général est convenu avec le Président Lambert que le précédent ministre de l'économie et des finances avait coutume de « s'attribuer » le niveau du taux de croissance. Il s'est demandé s'il s'attribuerait aussi volontiers son ralentissement actuel.

Il a relevé que l'Etat n'avait pas encore atteint le seuil permettant de faire reculer la part de la dette dans le PIB. S'agissant de la dette des administrations publiques, il a observé que la France restait dans une situation avantageuse par rapport à un grand nombre de ses partenaires, mais qu'elle était le pays qui réalisait le moins d'effort en matière de réduction de cette dette.

Le rapporteur général a estimé que l'investissement public, en matière d'infrastructures de transport en particulier, constituait un outil indispensable pour améliorer la compétitivité de l'économie nationale. Evoquant la conjoncture en Allemagne, il a mis en avant les difficultés posées par le processus d'unification de ce pays, qui ne constitue plus une source d'impulsion mais de lourdeur. Il a estimé que les baisses d'impôts décidées en Allemagne n'avaient pas encore produit leurs effets et a qualifié de contra-cyclique la politique fiscale du gouvernement allemand.

A l'issue de ce débat, la commission a donné acte au rapporteur général de sa communication et a décidé d'autoriser la publication de ses conclusions sous forme d'un rapport d'information.

ANNEXES
ANNEXE N° 1 :


SYNTHÈSE DE L'ANALYSE DU PROGRAMME

PLURIANNUEL DE FINANCES PUBLIQUES

À L'HORIZON 2004

ANALYSE DU PROGRAMME PLURIANNUEL

DE FINANCES PUBLIQUES A L'HORIZON 2004

PRÉSENTATION SUCCINCTE DE L'ÉTUDE DE L'OFCE

A la demande de la commission des Finances, le Service des études du Sénat a commandé à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) une étude (ci-jointe) sur l'évolution des dépenses 26 ( * ) prévue par la programmation pluriannuelle des finances publiques de la France à l'horizon 2004.

La présente note, rédigée par le Service des études du Sénat, en indique les principales conclusions.

I. UN OBJECTIF MOINS AMBITIEUX QUE CELUI DES PROGRAMMATIONS PRÉCÉDENTES

La programmation pluriannuelle des finances publiques à l'horizon 2004 prévoit une augmentation des dépenses des administrations publiques, en volume, de 4,5 % sur trois ans, soit un peu moins de 1,5 % par an en moyenne.

Le graphique ci-après permet de mettre en perspective cet objectif avec ceux des programmes précédents et avec l'évolution des dépenses observée depuis 1994.

La maîtrise des dépenses publiques :
Un objectif de moins en moins ambitieux

Sources : comptes nationaux, ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

1. Un objectif moins strict

Il convient tout d'abord de souligner que cet objectif est moins strict que celui des programmations précédentes.

La révision successive de l'objectif s'explique en partie par la difficulté à contrôler les dépenses des administrations de sécurité sociale (et en particulier les dépenses de santé), qui ont connu depuis 1997 une croissance de plus en plus rapide et régulièrement supérieure à l'objectif fixé par les programmations, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance des dépenses des administrations de sécurité sociale

Sources : comptes nationaux, ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

2. Un objectif qui ne correspond qu'à une stabilisation de la croissance des dépenses publiques

Ainsi, l'objectif fixé (de 1,5 %) ne correspond qu'à une stabilisation de la croissance des dépenses publiques.

Certes, comme l'indique l'OFCE, entre 1997 et 2000, les dépenses des administrations publiques ont augmenté en volume de 1,7 % en moyenne. Cependant, sur la période 1994-2000, le taux est de 1,4 %, c'est-à-dire inférieur à l'objectif.

II. UNE PROGRAMMATION OPTIMISTE ?

L'étude de l'OFCE suggère que la programmation pluriannuelle des finances publiques à l'horizon 2004 pourrait reposer sur des hypothèses optimistes d'évolution des dépenses.

A. DES HYPOTHÈSES OPTIMISTES D'ÉVOLUTION DES DÉPENSES

1. Un contrôle rigoureux des dépenses du budget de l'Etat et du FOREC

Tout d'abord, la programmation pluriannuelle des finances publiques semble impliquer un contrôle rigoureux des dépenses du budget de l'Etat et du FOREC.

Comme le souligne l'OFCE, « le programme proposé par le gouvernement est extrêmement succinct en ce qui concerne les hypothèses sous-jacentes ». Certaines de ces hypothèses ont donc dû être induites par l'OFCE.

a) La fonction publique

Ainsi, l'hypothèse d'une croissance annuelle de 1 % en volume des dépenses de la fonction publique semble impliquer une stabilité du nombre de fonctionnaires actifs et l'absence de revalorisation salariale 27 ( * ) .

b) La politique de l'emploi

Il ne semble pas possible de déterminer à quelles hypothèses correspond l'objectif de croissance annuelle des dépenses hors charge de la dette et fonction publique, de 0,5 % en valeur (soit une réduction de 0,9 % par an en volume). Selon l'OFCE, cet objectif pourrait être atteint par la poursuite de la diminution des dépenses d'investissement et de défense , ainsi que par une réduction des dépenses en faveur de l'emploi (de près de 14 % en trois ans).

c) Des risques de dérapage

Or, dans chacun de ces domaines, des risques de dérapage existent, du fait en particulier du passage aux 35 heures.

Celui-ci est en effet susceptible d'accroître les dépenses de la fonction publique et de la politique de l'emploi par rapport à ce que prévoit le gouvernement 28 ( * ) .

2. Des dépenses sur lesquelles le gouvernement exerce un contrôle indirect pourraient plus augmenter que prévu

Ensuite, le gouvernement semble optimiste en ce qui concerne l'évolution des dépenses des administrations sociales et des collectivités locales, sur lesquelles il exerce un assez faible contrôle, et dont les experts de l'OFCE voient mal ce qui pourrait susciter leur infléchissement à la baisse.

B. CONCLUSION

Au total , les risques de dérapage des finances publiques semblent importants.

Ainsi que l'indique l'OFCE, « la grande interrogation concerne les dépenses de santé et la réduction du temps de travail ».

Le tableau ci-après permet de mettre ces risques en évidence.

Principaux risques de dérapage des dépenses publiques, selon l'OFCE

Poste de dépense

Objectif du gouvernement (croissance annuelle, en volume)

Problème

Croissance annuelle envisageable (en volume)

Impact sur la croissance des dépenses des administrations publiques

Impact sur le solde des administrations publiques en 2004

(en %)

(en %)

(en points des dépenses des administrations publiques)

(en points de PIB)

Ex ante (1)

Ex post (2)

Fonction publique

1

35 heures

1,4 (3)

0,08

- 0,13

- 0,07

FOREC

10 * (4)

Possible dérapage

15 *

0,1

- 0,2

- 0,1

Administrations locales

1,7

Objectif impliquant une forte inflexion à la baisse par rapport à la période précédente

2 (5)

0,06

- 0,1

- 0,05

Santé

1,8

3 (5)

0,15

- 0,3

- 0,15

Administrations publiques **

1,5

1,9

0,4

-0,7

- 0,4

* En valeur

** Somme des risques de dérapage, calculée par le Service des études à partir des scénarios proposés par l'OFCE

(1) Ne prenant pas en compte l'augmentation à court terme de la croissance induite par le surcroît de dépenses, et le gain de recettes en découlant.

(2) Prenant en compte ces phénomènes.

(3) Selon les hypothèses d'une augmentation de 6 % des emplois civils de l'Etat et d'une rémunération moyenne égale aux 2/3 de celle des agents de l'Etat actuellement en place (scénario 3 de l'OFCE, les scénarios 1 et 2 retenant l'hypothèse d'une croissance de 10 % des emplois civils de l'Etat).

(4) Plus précisément, le gouvernement prévoit des dépenses de 105,6, 116,2 et 125,2 milliards de francs en 2002, 2003 et 2004. La hausse est donc de 10,4 et 7,4 % en valeur en 2003 et 2004. Pour 2002, sur la base de dépenses du FOREC estimées entre 95 et 100 milliards de francs en 2001, l'augmentation serait donc comprise entre 5,6 % et 11,2 %.

(5) Poursuite de la tendance observée depuis le milieu des années 1990.

Sources : OFCE, calculs du Service des études

• Si les dépenses de l'assurance-maladie et des collectivités locales, dont l'évolution échappe en grande partie au gouvernement, conservaient le rythme de croissance observé depuis le milieu des années 90, les dépenses publiques pourraient croître en volume de 1,7 % par an (au lieu de 1,5 %), ce qui correspond exactement à la croissance observée de 1997 à 2000, et est supérieur à la moyenne de la période 1994-2000 (1,4 %).

• Par ailleurs, si l'ensemble des dérapages envisagés dans cette note se produisaient, les dépenses publiques pourraient croître en volume de 1,9 % par an.

Cette évaluation n'exclut pas que le taux observé puisse être supérieur. En effet, ces dérapages éventuels concernent exclusivement des surcroîts de dépenses qui ne sont manifestement pas prévus par la programmation pluriannuelle. Or, il n'est pas certain que cette dernière intègre toutes les dépenses supplémentaires annoncées par le gouvernement : nouvelle allocation personnalisée à l'autonomie 29 ( * ) , pérennisation des emplois-jeunes, éventuelle allocation pour les personnes ayant entre 18 et 25 ans, etc.

L'objectif de progression des dépenses fixé par la programmation pluriannuelle des finances publiques pourrait donc ne pas être respecté.

ANNEXE N° 2 :


ANALYSE DU PROGRAMME PLURIANNUEL DE FINANCES

PUBLIQUES À L'HORIZON 2004 RÉALISÉE PAR L'OFCE

POUR LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT

Fondation Nationale des Sciences Politiques

OBSERVATOIRE FRANÇAIS DES CONJONCTURES ÉCONOMIQUES

O.F.C.E.

69 quai d'Orsay 75341 PARIS Cedex 07 --

Tél : 01 44 18 54 00 -- Fax : 01 45 56 06 15

Analyse du programme pluriannuel de finances publiques à l'horizon 2004

Le 5 juin 2001

O.F.C.E.

Note pour le Sénat

Gaël Dupont (gael.dupont@ofce.sciences-po.fr, 01 44 18 54 74)
Xavier Timbeau ( xavier.timbeau@ofce.sciences-po.fr , 01 44 18 54 57)

L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES PUBLIQUES PRÉVUE PAR LE

PROGRAMME PLURIANNUEL DE FINANCES PUBLIQUES

À L'HORIZON 2004

Le programme pluriannuel de finances publiques à l'horizon 2004 prévoit une augmentation des dépenses des administrations publiques un peu inférieure à 1,5 % par an en moyenne en volume pendant trois ans. L'enveloppe a été relâchée par rapport aux programmes précédents. L'objectif d'évolution des dépenses reste cependant assez contraint au vu de la croissance économique prévue (2,5 ou 3 %) et de la croissance potentielle (2,5 %). Cela permet une réduction de la part des dépenses des administrations dans le PIB.

Le programme prévoit un ralentissement des dépenses publiques. Entre 1997 et 2000, les dépenses des administrations ont augmenté en volume de 1,7 % en moyenne. Le gouvernement compte sur des économies au titre de la politique de l'emploi possibles de par l'amélioration du marché du travail. La grande interrogation concerne les dépenses de santé et la réduction du temps de travail. Le ministère de la fonction publique considère que celle-ci n'a pas vocation à créer des emplois dans la fonction publique. C'est ce que reprend, a priori , le programme pluriannuel.

I. CADRE GÉNÉRAL

La nature d'une telle programmation est hybride : les dépenses de l'Etat et de la Sécurité sociale sont du ressort du gouvernement. Il s'agit donc des grands équilibres d'un programme de politique économique sur trois ans. Concernant les administrations locales et une partie des administrations de Sécurité sociale, le gouvernement n'est pas maître. Il s'agit donc davantage d'une prévision.

Le programme proposé par le gouvernement est extrêmement succinct en ce qui concerne les hypothèses sous-jacentes. Nous avons essayé de retrouver les hypothèses faites par le gouvernement, en particulier les dépenses de la fonction publique d'Etat, afin d'évaluer la robustesse du scénario, notamment au vu des évolutions passées.

L'augmentation des dépenses des administrations publiques prévue dans le programme pluriannuel de finances publiques à l'horizon 2004 (1,5 % par an en volume) est plus rapide que celle prévue dans les programmes antérieurs : le programme pour la période 2001-2003 supposait une augmentation de 1,3 % par an, et le programme 2000-2002 prévoyait une hausse de 1 % par an en volume. La révision successive de l'objectif s'explique en partie par la difficulté à contrôler les dépenses de santé.

Objectifs de dépenses des programmes pluriannuels successifs

Taux de croissance moyen en volume

2000-02

2001-03

2002-04

Apu

1.0

1.3

1.5

Etat

0.3

0.3

0.3

ASS

1.5

1.4

1.6

Maladie

1.2

1.5

1.8

Retraites

2.0

1.9

1.9

Apul

1.5

1.9

1.7

Source : ministère de finances

Le dernier programme intègre 24 milliards de dépenses supplémentaires sur trois ans par rapport au programme 2001-2003 : 12 milliards de dépenses Unedic 30 ( * ) , 7 milliards de dépenses de santé et 10 milliards liés à la montée en charge de la contribution de la France au budget européen qui correspond, sur le plan économique, davantage à des transferts de ressources de l'Etat qu'à des dépenses. Les dépenses des collectivités locales sont plus faibles (5 milliards).

En 2000, les dépenses publiques ont augmenté de 1,2 % en volume. Le détail par sous administration n'est pas disponible pour l'année 2000. En moyenne sur 2000-2001, l'évolution devrait être de l'ordre de 1,4 à 1,5 %, ce qui est conforme au rythme du programme.

Dépenses des administrations publiques

En milliards de francs courants

1997

2000

Évolution

Rémunération des salariés

1 132

1 248

3.3%

Consommations intermédiaires

489

496

0.5%

Intérêts

304

302

-0.2%

Prestations et autres transferts

2 307

2 485

2.5%

Prestations autres que transferts en nature

1 540

1 658

2.5%

Transferts sociaux en nature

442

489

3.5%

Subventions

123

117

-1.6%

Autres transferts

202

220

-2.1%

Formation brute de capital fixe

243

277

4.4%

Total des dépenses

4 511

4 867

2.6%

Source : comptes nationaux

II. RÉMUNÉRATIONS

Le gouvernement suppose que la réduction du temps de travail ne créera pas d'emplois d'Etat et limite les hausses de salaires aux augmentations liées à l'effet de carrière.

Le gouvernement annonce une hausse des dépenses de fonction publique un peu supérieure à 1 % en volume chaque année. Ceci correspond grosso modo à l'évolution des dépenses si le nombre de fonctionnaires actifs est stable et si la rémunération moyenne des salariés en place est indexée sur les prix. Cette évolution résulte de plusieurs effets. Le salaire moyen augmente spontanément du fait de l'effet de carrière (GVT positif) et de l'effet entrées-sorties (GVT négatif). L'augmentation progressive des départs en retraite réduit l'augmentation spontanée du salaire moyen en renforçant le GVT négatif : estimé à 0,8% entre 1995 et 1997, elle serait de 0,5 % en 2000 2001 et de 0,23 % en moyenne entre 2002 et 2004, selon le gouvernement.

Le nombre de retraités de droit direct et indirect augmente de 43 000 en 2001 (+2,3 %). Mais le flux des départs en retraite va s'accélérer dans les années qui viennent, passant d'environ 65 000 en 2001 à 75 000 en moyenne sur la période 2002-2004. Les effectifs retraités de la fonction publique d'Etat pourraient donc augmenter d'environ 2,7 % en moyenne sur la période. La pension moyenne augmenterait de 0,4 % dans le même temps, essentiellement du fait de l'augmentation de la part des pensionnés de droit direct. On estime donc que les dépenses de pensions pourraient augmenter de 3,1 % en moyenne sur trois ans. Au total, compte tenu de la part respective des rémunérations et des pensions, les frais de personnels augmenteraient d'un peu plus de 1 % soit strictement ce que propose le gouvernement...

Les hypothèses du gouvernement se limitent donc grosso modo aux évolutions spontanées, à stabilisation des effectifs. Dans ces conditions, les fonctionnaires en activité verraient leurs rémunérations augmenter en moyenne de 1,5 à 2 % par an en pouvoir d'achat compte tenu de l'effet de carrière.

La stabilisation des effectifs permettra le recrutement de 75 000 personnes en moyenne chaque année. L'augmentation progressive des départs en retraite dans les années à venir facilitera la ré-affectation des postes aux objectifs prioritaires.

Evolution « spontanée » des salaires et des pensions de l'Etat

Salaires

Pensions

Effectifs

0 (hypothèse)

2.7%

Evolution spontanée du revenu moyen

0.23 %

0.4 %

Dépenses

0.23 %

3.1%

Sources : Commission des comptes de la sécurité sociale, PLF 2001, calculs OFCE

III. LES 35 HEURES DANS LA FONCTION PUBLIQUE D'ETAT

On peut évaluer le coût de la réduction du temps de travail si elle se traduit par des embauches nettes. 10 % de créations d'emplois civils représentent 170 000 salariés supplémentaires. Si on suppose une rémunération moyenne de 10 000 francs bruts mensuels, soit 2/3 de la rémunération mensuelle des agents de l'Etat, cela coûterait 20 milliards de francs (scénario 2). Un tel scénario augmenterait le déficit des administrations de 0,2 point de PIB chaque année. En supposant le scénario du gouvernement valable par ailleurs, le solde serait donc nul en 2004.

La première loi Aubry prévoyait 6 % de créations d'emplois. Si tel était le cas dans la fonction publique d'Etat, le coût de la réduction du temps de travail serait de 12 milliards. Enfin, la titularisation de 75 000 emplois jeunes de la fonction publique d'Etat correspondrait à 4,4 % d'augmentation des effectifs et coûterait 9 milliards (cf. supra). Mais il ne s'agirait évidemment pas de créations nettes d'emplois compensant la baisse de la durée puisqu'ils sont déjà en activité.

Scénarios de réduction du temps de travail dans la fonction publique d'Etat

Scénario 1

Scénario 2

Scénario 3

Scénario 4

Croissance des effectifs civils

10%

10%

6%

4.4%

Variation des effectifs ( en milliers )

170

170

102

75

coût total ( milliards de francs )

31

20

12

9

Croissance des dépenses de fonction publique

2.5 %

2.0 %

1.6 %

1.5 %

Croissance des dépenses de l'Etat

0.9 %

0.7 %

0.6 %

0.5 %

Note : dans le premier scénario, on a supposé que le salaire des embauchés était égal au salaire moyen des agents (180 KF brut), dans tous les autres on a supposé que le salaire était de 10 000 F bruts mensuels. Le scénario 4 suppose 75 000 créations de postes, soit l'équivalent des emplois jeunes actuellement en poste dans la fonction publique d'Etat.

Source : calculs OFCE

IV. AUTRES DÉPENSES DE L'ETAT

Hors charges de la dette et dépenses de fonction publique, les dépenses de l'Etat représentent 725 milliards de francs, soit 42,6 % du budget général. Pour l'ensemble de ces dépenses, le gouvernement annonce une augmentation annuelle de 0,5 % en valeur, soit une réduction de 0,9 % par an en volume.

Entre 1997 et 2001, les dépenses hors dette et fonction publique (« autres dépenses ») ont diminué de 0,3 % en volume. Le gouvernement suppose donc, là aussi, un ralentissement de la dépense. La cible de -0,9 % en volume est possible à atteindre car de nombreuses dépenses (interventions, investissements...) sont à la discrétion du gouvernement. Par rapport à une baisse de 0,3 % par an en volume, l'évolution prévue suppose une économie supplémentaire de 4,5 milliards de francs chaque année.

Les « autres dépenses » sont très diverses (cf. tableau). Une analyse économique précise du programme pluriannuel supposerait d'avoir le détail de l'évolution prévue de chacun des postes, mais il n'est pas donné et compte tenu des masses en jeu, il est impossible de le reconstituer. En particulier on ne peut déterminer si les emplois jeunes ont été pérennisés.

Évolution des « autres dépenses » depuis 1997, à structure constante

En milliards de francs courants

1997

2001
structure 1997

Croissance (volume)

Ecart au volume stable

Contribution

Emploi

144

149

-0.1%

-1

-0.1%

Transferts sociaux

111

129

2.9%

13

1.9%

défense (hors rémunérations)

113

104

-3.0%

-14

-1.9%

Interventions économiques et diverses

93

96

-0.2%

-1

-0.1%

Etablissements et entreprises publiques

79

86

1.2%

4

0.5%

Dépenses en capital civiles

72

72

-0.9%

-3

-0.4%

Subv. aux régimes sociaux spéciaux

49

43

-3.9%

-8

-1.1%

Fonctionnement de l'Etat

35

38

1.2%

2

0.2%

Total

696

717

-0.3%

-7

-1.0%

Source : Rapport économique et financier, annexé au PLF 2001.

Une partie de l'inflexion viendra des interventions en faveur de l'emploi, qui pourront être réduites compte tenu de la poursuite des créations d'emploi. On peut supposer, à titre indicatif, que l'ensemble des postes des « autres dépenses » (hors emploi) évoluent comme entre 1997 et 2001 en loi de finances, et que l'ajustement se fait entièrement sur la politique de l'emploi. Cela suppose notamment que les dépenses d'investissement et de défense continuent à être réduites afin de respecter les enveloppes annoncées.

Pour atteindre l'objectif d'une baisse des dépenses en volume de 0,9 %, les interventions en faveur de l'emploi devraient être réduites de presque 14 % en trois ans. Depuis le retour au pouvoir de la gauche, les dispositifs d'aide à l'emploi dans le secteur privé ont été fortement réduits, au profit d'emplois dans le secteur non marchand. La réduction des contrats initiative emplois devra se poursuivre (voir tableau), ainsi que les préretraites. Il est vrai que l'accord réformant l'Unedic signé par les partenaires sociaux va dégager des ressources destinées à financer une politique active de l'emploi.

Principales interventions en faveur de l'emploi

En milliards de francs courant

LFI1997

PLF2001

Var. en vol/an

Contrats aidés dans le secteur non marchand

15.2

34.2

22.3

Préretraites et reconversion d'emplois

15.3

5.0

-24.8

CIE

17.9

7.1

-21.1

Formation professionnelle

18.9

30.8

12.8

Autres

33.6

23.5

-8.9

Total

101.0

100.6

-0.3

Source : rapports Migaud

V. EMPLOIS JEUNES

Fin avril 2001, 277 000 emplois jeunes avaient été créés : 35 % des postes étaient des emplois de l'Etat, 30 % dans les associations et 35 % dans les collectivités locales et les entreprises publiques. Au total, 312 000 jeunes étaient passés par le dispositif, plusieurs personnes pouvant s'être succédées sur un même poste. L'objectif du gouvernement est d'atteindre 350 000 fin 2001. Au milieu de l'année 2000, les emplois effectivement occupés (« présents en fin de mois ») comptabilisés par le Bulletin mensuel des statistiques du travail représentaient seulement 75 % des emplois créés. Si l'objectif de 350 000 embauches était atteint fin 2001, on peut donc penser que cela correspondrait à 240 à 250 000 postes occupés. Un chiffre de 215 à 220 000 paraît plus réaliste : fin avril 2001, les postes effectivement créés peuvent être estimés à 208 000 et les créations d'emplois ont fortement ralenti au début de l'année (augmentation de 2,6 % sur les trois derniers mois). Compte tenu des statistiques disponibles, il est impossible de connaître la répartition des postes effectivement occupés. On a supposé que la répartition était la même que celle des emplois créés. Fin 2001, on peut donc faire l'hypothèse qu'il y aura environ 75 000 postes occupés dans la fonction publique d'Etat et 140 000 dans les associations, collectivités locales et entreprises publiques.

Dernier bilan des emplois jeunes, avril 2001

Effectifs

En % du total

Emplois créés

276 950

Associations

81 880

29.6

Collectivités locales

64 240

23.2

SEM, entreprises et établissements publics

33 830

12.2

Education nationale

70 000

25.3

Police nationale

25 000

9.0

Agents de justice

2 000

0.7

Effectifs

Jeunes embauchés

311 740

Associations et collectivités locales

197 340

Education nationale

89 550

Police nationale

23 650

Agents de justice

1 200

Source : ministère du travail

Le gouvernement axe la politique de l'emploi sur la réduction du temps de travail, dont le coût est élevé et dont le financement a été sorti du budget de l'Etat (voir infra.) . Au sens économique, il est logique de ne pas considérer le coût de la réduction du temps de travail comme de la dépense de l'Etat puisqu'il s'agit de baisses de cotisations. La question de la compensation par l'Etat des exonérations est actuellement en débat et pourrait se traduire, le cas échéant, par des dépenses supplémentaires du budget de l'emploi. Cependant, il est probable qu'un éventuel financement de l'Etat se fera par l'affectation de nouveaux impôts, ce qui éviterait de se traduire par une hausse des dépenses.

VI. LE FINANCEMENT DES 35 HEURES DANS LE SECTEUR PRIVÉ

Le financement des 35 heures est une perte de recette, ou une diminution de prélèvements obligatoires plutôt qu'une nouvelle dépense publique. Une partie importante des exonérations de charges est financée par l'Etat. Jusqu'à la loi Aubry, les baisses de cotisations patronales (type ristourne Juppé) étaient comptabilisées en dépenses du budget de l'emploi. La création du FOREC permet d'éviter que l'augmentation très importante des ristournes induite par la réduction du temps de travail fasse exploser le budget de l'emploi et les dépenses de l'Etat (sans modifier les dépenses de l'ensemble des administrations publiques puisqu'il s'agit de transferts entre sous secteurs des administrations, qui disparaissent dans le compte consolidé) : le financement par l'Etat des baisses de charges se fait essentiellement par une baisse des recettes de l'Etat (transfert de recettes fiscales) et non par des dépenses d'intervention. Il s'agit bien évidemment d'un problème de présentation, puisque le résultat sur le solde de l'Etat est le même que les flux financiers soient comptabilisés en dépenses ou en recettes négatives. Or l'impact des baisses de charges sur les déficits publics est difficile à évaluer et pourrait être élevé. Il convient de distinguer le coût ex ante des baisses de charges, pris en compte dans l'étude des transferts financiers entre sous-secteurs des administrations, et coût ex post , qui permet de déterminer l'impact de la mesure de politique économique (réduction du temps de travail + baisses de charges) sur le solde des administrations.

Etant donné les recettes actuellement affectées de façon permanente au financement des baisses de charges (TGAP, contribution sociale sur les bénéfices et une partie des droits sur le tabac et sur les alcools), le déficit du FOREC est probable. Les recettes affectées n'accompagneront pas les augmentations futures liées au financement des allègements de charges, compte tenu de la montée en charge des 35 heures et des indexations de ces allègements sur les évolutions de la masse salariale. En l'absence de nouveaux transferts de recettes ou de crédits budgétaires de l'Etat, la Sécurité sociale sera mise à contribution.

Il est abusif de considérer que le FOREC sert à financer le coût des 35 heures. En particulier, les déficits à venir du FOREC ne peuvent s'interpréter comme un coût, direct ou indirect, prévu ou imprévu des 35 heures. D'une part, les recettes affectées sont déconnectées de l'application des 35 heures et des allègements de charges. D'autre part, le FOREC réunit les allègements de charges au titre de diverses mesures comme la réduction du temps de travail au titre de la Loi Robien ou les allègements de charges sur les bas salaires mis en place en 1993 et accrus en 1995 par le gouvernement Juppé. Notons que légalement, les entreprises ayant signé un accord 35 heures dans le cadre de la loi Aubry II bénéficient d'un allègement de charge au titre de cette loi. Cet allègement de charge remplace la « ristourne Juppé » et ne se cumule pas avec elle. Cependant, économiquement parlant, cet allègement de charge intègre la ristourne Juppé et en augmente l'ampleur.

Compte tenu de ces précautions, les charges du FOREC ne seraient imputables en 2001 qu'à 50% du coût ex ante des 35 heures. Cette part devrait augmenter au fur et à mesure que les 35 heures se diffusent, pour atteindre 60 à 70 % à terme.

Par ailleurs, il importe de prendre en compte les effets ex post des 35 heures ou des allègements de charge pour en déterminer le coût effectif pour les administrations publiques. La structure comptable du FOREC ne permet pas, par construction, de faire apparaître ce coût ex post . Il est pour cela nécessaire d'évaluer l'impact sur l'économie des 35 heures ou des allègements de charges et en soldant les effets positifs et négatifs d'en déduire le coût effectif global. Ce type d'exercice est délicat et suppose des hypothèses. Il est donc discutable, mais est une meilleure évaluation de toute façon que le coût ex ante . Dans le cas des 35 heures, selon les évaluations de l'OFCE, le coût ex post est environ le ¼ du coût ex ante . Les canaux principaux de retour positifs sont d'une part les cotisations sociales supplémentaires payées par les nouveaux embauchés au titre des 35 heures et d'autre part, les baisses d'allocation chômage induites par la création d'emplois et la baisse du chômage. Pour un allègement ex ante de 65 milliards de francs, 24 milliards de francs supplémentaires de cotisations sociales seraient encaissés et 10 milliards de francs d'allocations chômage seraient économisés. 20 milliards de francs seraient par ailleurs collectés au titre d'impôts divers.

Ces recettes supplémentaires ne se matérialisent pas dans les caisses du FOREC. En effet, les cotisations sociales supplémentaires sont en grande partie collectées par la Sécurité Sociale, les caisses de retraite et l'UNEDIC. Les économies d'allocation chômage sont quant à elles au bénéfice de l'UNEDIC. Les transferts entre institutions, dont certaines sont paritaires, sont loin d'être résolus. En gros, et en l'absence de décisions claires, la création du FOREC sans autres transferts revient à laisser les retours positifs dans les caisses de la Sécurité Sociale et de l'UNEDIC et la non-création du FOREC conduit à faire porter une grande partie du coût ex ante sur la Sécurité Sociale. Les deux solutions sont ainsi mauvaises.

Le tableau indique différentes estimations de dépenses pour le FOREC pour l'année 2001. Notre estimation est proche de celles réalisées par le Ministère de l'emploi et de la solidarité et par l'Acoss. A l'instar de ces deux organismes, nous prévoyons, en janvier 2001, des dépenses liées aux allègements de charges 31 ( * ) légèrement inférieures à 100 milliards de francs. Le calcul prend en compte l'ensemble des allègements de charges et pas seulement ceux liés aux lois Aubry. En l'occurrence, on intègre dans cette évaluation les allègements de charges dégressifs jusqu'à 1,3 Smic introduits en octobre 1996 par le gouvernement Juppé. Ces derniers peuvent être évalués aux alentours de 45 milliards de francs. L'estimation du surcoût de dépenses lié aux 35 heures se situe alors aux alentours des 50 milliards de francs en janvier 2001. Si l'on tient compte du fait qu'une partie de ce surcoût est transitoire, en régime permanent, lorsque l'ensemble des entreprises seront passées aux 35 heures, le surcroît des dépenses s'élèverait à près de 70 milliards de francs, évaluation proche du scénario retenu par le gouvernement (65 milliards).

Dans les années qui viennent, les allègements de charges (à la fois ceux liés aux 35 heures et l'ancienne ristourne) devraient évoluer sous trois impulsions. La première est une revalorisation régulière liée aux évolutions du salaire moyen. On peut estimer celle-ci à à peu près 3 % par an. La deuxième est liée aux évolutions de l'emploi. La baisse du chômage et les augmentations de la population active devraient conduire dans les prochaines années à une augmentation de 2 à 3 % à ce titre. Enfin, les allègements de charges sont liés à la structure des salaires. Plus il y a de salariés entre 1 et 1,8 SMIC, plus les allègements sont importants. Il est difficile d'évaluer les évolutions liées à la structure des salaires. Cependant, dans les 5 prochaines années, les relèvements du SMIC devraient écraser la distribution des salaires et augmenter les allègements de charges.

Les prévisions en janvier 2001 des dépenses du FOREC en 2001

En milliards de francs courants

DARES

ACOSS

OFCE*

Ristourne dégressive Juppé

Entreprises à 39 h

27,2

23,1

27,5

Loi Aubry I

17,1

14,6

19,4

Aides structurelles

-

-

15

Baisse de charges entre 1,3 et 1,8 Smic

-

-

4,4

Loi Aubry II

46,6

58,9

44,8

Aides structurelles

-

-

17,6

Baisse de charges entre 1,3 et 1,8 Smic

-

-

9,7

Ristourne Juppé structurelles

-

-

17,5

Aide Robien

3,7

3,2

3,9

Total

94,6

99,8

95,8

Ristourne Juppé

45

45

45

Surcoût 35 h

49,6

54,8

50,8

Transitoire

-

-

8,5

Permanent

-

-

42,3

Le calcul repose sur les hypothèses suivantes : 60 % du champ potentiel des salariés sont passés à 35 heures, Ce pourcentage se décompose en 2,8 % de Robien, 18,5 % d'Aubry I et 39% d'Aubry II, Les aides de l'Etat par salariés s'élèvent à 14 000 francs pour les Robien, 10 500 francs pour les Aubry I et 7000 francs pour les Aubry II.

Au total, un rythme de croissance de 10% l'an en termes nominaux,  en-dehors de la montée en charge des 35 heures, n'est pas impossible. Sur trois ans, le gouvernement prévoit une augmentation des cotisations sociales liées à la réduction du temps de travail de cet ordre : elles atteindraient respectivement 105.6, 116.2 et 125.2 en 2002, 2003 et 2004. La hausse est donc de 10,4 et 7,4 % en valeur en 2003 et 2004. Pour 2001, les dépenses du FOREC sont estimées entre 95 et 100 milliards (voir tableau). L'augmentation en 2002 sera donc comprise entre 5,6 % (dans le second cas) et 11,2 % (dans le premier cas) 32 ( * ) . Les hypothèses du gouvernement constituent donc en quelque sorte un plancher. Si les dépenses augmentaient de 15 % par an en valeur, les ristournes atteindraient 150 milliards en 2004 et le solde des administrations serait réduit de 0,2 point de PIB en 2004.

VII. LES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES

Les dépenses des administrations locales représentent 871 milliards de francs en 2001, soit un peu moins de 10 % du PIB. Le gouvernement n'a pas la possibilité de déterminer l'évolution de ces dépenses. Il s'agit donc d'effectuer une prévision réaliste. Le gouvernement prévoit une croissance annuelle de 1,7 % en volume (soit une croissance cumulée de 5,2 %), alors que la croissance moyenne depuis le milieu des années 1990 est de 2 %. Si la tendance restait la même que par le passé, les dépenses des administrations locales seraient supérieures de 3 milliards de francs en 2002 et de 9 milliards en 2004. Les dépenses des administrations publiques augmenteraient ainsi de 1,56 % chaque année au lieu des 1,5 % prévus dans le scénario central. Le déficit des administrations publiques serait accru de moins de 0,1 point de PIB en 2004.

La fin du cycle électoral pourrait effectivement se traduire par un ralentissement des investissements, qui représentent 19,7 % des dépenses des administrations locales. La fin de la montée en charge du taux de cotisation de la caisse de retraite des collectivités locales doit contribuer à un ralentissement des dépenses des collectivités locales : le taux de cotisations employeurs à la CNRACL a été relevé de 0,5 point en 2000 et en 2001, passant de 25,1 % en 1999 à 26,1 % en 2001. La CNRACL estime que cette mesure « représente un effort de 550 millions de francs pour les collectivités locales », soit 0,06 % des dépenses des administrations locales.

Deux interrogations pèsent sur l'évolution des dépenses des administrations locales : la réduction de la durée du travail des 1,6 million de fonctionnaires territoriaux et le financement de la nouvelle allocation personnalisée à l'autonomie. Compte tenu du ralentissement prévu des dépenses des administrations locales, il semble que le gouvernement n'a pas pris en compte de coût supplémentaire pour l'application de ces deux mesures. Il paraît assez réaliste de supposer que les 35 heures créeront peu d'emplois dans les collectivités locales. Celles-ci ne bénéficieront pas d'aides de l'Etat et la durée y est déjà faible. Selon la mission Roché, la durée moyenne hebdomadaire effective allait en 1998 de 31 h 17 à 37 h 53 dans les communes et de 36 h 24 à 37 h 52 dans les conseils généraux. Le programme pluriannuel prend-il en compte la montée en charge de la nouvelle allocation personnalisée à l'autonomie qui devrait en grande partie être financée par les départements ? Une contribution à hauteur de 10 milliards représenterait 1,1 % des dépenses des administrations locales...

VIII. LES ADMINISTRATIONS DE SÉCURITÉ SOCIALE

Le gouvernement a relâché l'objectif d'évolution des dépenses de santé qui a été fixé à 1,8% par an en volume contre 1,5 % dans le programme antérieur. Une telle évolution suppose une inflexion par rapport à la croissance des années 1990 qui était de 2,5 % en moyenne. D'autant que les années récentes ont été marquées par une accélération, les dépenses augmentant de plus de 3 % par an en volume entre 1998 et 2000. Depuis 3 ans, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) est systématiquement dépassé de plus de dix milliards.

Ondam tous régimes, métropole 33 ( * )

En milliards de francs courants

1997

1998

1999

2000

Objectif

587

599

615

642

Réalisation

586

609

626

660

Ecart

-1

10

11

18

Source : Commissions des comptes de la Sécurité sociale

Une croissance de 3 % par an de l'Ondam coûterait 8 milliards supplémentaires chaque année aux administrations publiques. Cela augmenterait le taux de croissance annuel des dépenses de l'ensemble des administrations publiques de 0,15 point, à 1,65 % (toutes autres hypothèses du gouvernement étant supposées justes). La part des dépenses dans le PIB resterait cependant stable à moyen terme compte tenu du dynamisme économique prévu. Le solde resterait légèrement positif en 2004 puisque le dérapage induirait un « trou » de 0,25 point de PIB.

L'enveloppe paraît peu réaliste au vu des évolutions récentes, d'autant que le gouvernement passe sous silence le problème épineux des 35 heures dans la fonction publique hospitalière. 0,8 million de personnes sont concernées. La mission Roché estimait la durée de travail hebdomadaire moyenne entre 35 h 30 et 38h 29 pour les salariés de jour. Les mesures structurelles prises par le gouvernement pourraient cependant avoir des effets dans les années à venir. En tout état de cause, l'objectif sera difficile à tenir. Savoir si cela est souhaitable est une autre question...

Les dépenses de santé en milliards de francs 1995.

IMPACT DES RÉVISIONS DE CROISSANCE
SUR LES RECETTES PUBLIQUES

Dans le PLF 2001, la croissance prévue par le gouvernement était de 3,3 % pour l'année 2001. Le déficit public prévu était de 1,0 point de PIB. La révision de croissance opérée lors de la dernière prévision officielle est de 0,4 point. La justification de cette révision vient principalement de l'atterrissage, plus brutal que prévu, de l'économie américaine.

Le consensus a suivi à peu près le même mouvement de révision en passant de 3,2 % à 2,8 % pour le dernier chiffre connu (Consensus Forecast de mai 2001 et de novembre 2000). Les prévisions de croissance de l'OCDE (2,6 % contre 2,9 %) et du FMI (2,6 % contre 3,5 %) sont significativement plus basses et ont connu des révisions importantes.

L'erreur de prévision est ainsi partagée par l'ensemble des institutions et organismes, et le gouvernement ne peut pas être accusé d'avoir été trop optimiste.

Révision de la croissance économique

2000

2001

PLF 2001

PIB

3.4

3.3

Déficit des APU

1.4

1.0

Budgets éco., mars 2001

PIB

3.2

2.9 (2,7 à 3,1)

Déficit des APU

1.3

1.0


Source : PLF 2001, Budgets économiques mars 2001, déficit hors licence UMTS.

Par contre, aucune révision n'a été faite concernant la prévision de déficit public. Il y a là un probable optimisme. L'impact de la croissance sur les recettes fiscales est rappelé dans le tableau suivant (variantes OFCE) :

Impact de la croissance sur les recettes fiscales

En milliards de francs courants

Ecart de croissance

0,4 point de PIB

1,0 point de PIB

Etat

5

13

Administrations de Sécurité sociale

8

20

Administrations publiques locales

2

5

Total

15

38

Source : OFCE, e-mod.fr

15 milliards de francs représentent 0,17 point de PIB. Certes, les dépenses peuvent s'ajuster et il existe des moyens de transférer d'une année à l'autre des recettes (en particulier les recettes non fiscales), mais il sera difficile de tenir exactement le déficit annoncé. La diminution annoncée du déficit pourrait alors être une stabilité, à moins que la croissance ne se révèle conforme aux prévisions de l'automne.

En comptabilité nationale, les produits des licences UMTS sont imputés entièrement à l'année 2001 (ce qui est conforme à la règle des droits constatés) et réduiront le déficit public de 0,7 point de PIB. Si les 4 licences prévues initialement avaient été attribuées le solde aurait été amélioré de 1,4 point de PIB en 2001. En comptabilité budgétaire, les recettes devraient être de 16,2 milliards de francs (0,18 point de PIB) pour 2 licences.

Le débat d'orientation budgétaire est un moment privilégié.

Il est l'occasion de s'interroger sur la cohérence et la pertinence des perspectives tracées par le gouvernement. Il permet aussi au Parlement de porter un regard rétrospectif sur l'évolution des finances publiques.

Les orientations du gouvernement sont marquées pour 2001 et 2002 par de nombreuses incertitudes, qu'il s'agisse des conditions de la croissance, ou du contenu de la politique budgétaire. Le ralentissement enregistré aux Etats-Unis suscite en effet des inquiétudes sur le niveau de la croissance française.

Dans ce contexte, le contenu du programme pluriannuel pour les années 2002-2004 semble difficile à appliquer au vu des engagements de dépenses qui s'accumulent, au premier rang desquels figurent tant la pérennisation des emplois-jeunes, la politique suivie dans la fonction publique, que le financement « acrobatique » des 35 heures. S'appuyant sur les résultats d'une étude commandée à l'OFCE, la commission des finances ne les estime pas, en effet, « tenables » en l'état.

De même, les engagements pris, tant en matière de réduction du déficit budgétaire que de limitation des 4.500 milliards de francs de dette de l'Etat, apparaissent d'autant moins crédibles que la procédure d'attribution des licences de téléphonie mobile UMTS ne peut plus se dérouler dans les conditions prévues initialement.

Face à la montée de ces aléas, et en l'absence de réformes structurelles, l'actuel gouvernement reste fidèle à « l'exception française » marquée par un niveau historiquement élevé des prélèvements pesant sur les Français, une maîtrise peu rigoureuse de la dépense et un déficit insuffisamment contrôlé...

* 1 Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, perspectives économiques 2001-2002, mars 2001.

* 2 Organisme américain indépendant, effectuant notamment des prévisions macroéconomiques.

* 3 Prévisions du mois de mai 2001.

* 4 Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, perspectives économiques 2001-2002 (mars 2001).

* 5 Perspectives économiques 2001-2002, mars 2001.

* 6 La part de l'augmentation de la richesse nationale prélevée par la hausse des prélèvements obligatoires en 1999 s'est élevée à 23,9 % au Royaume-Uni, 54,6 % en Italie et 68,3 % en Allemagne (source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie).

* 7 Et avec des objectifs moins ambitieux que la moyenne des pays de la zone euro.

* 8 L'expression « taux de prélèvements obligatoires spontané » apparaît cette année dans le rapport déposé par le gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire. Le terme est au sens strict impropre : les prélèvements sont présentés par le gouvernement et votés par le Parlement. Il désigne en fait le niveau de prélèvements obligatoires qui aurait été constaté en l'absence de toute nouvelle mesure fiscale ou toute autre mesure portant sur les prélèvements obligatoires.

* 9 « La politique fiscale de l'Union européenne - priorités pour les prochaines années ».

* 10 Le rapport que le gouvernement avait déposé en vue du débat d'orientation budgétaire confirmait le « cap de la maîtrise des dépenses [de l'État], qui seront stabilisées en volume en 2000 ».

* 11 Loi n° 2000-656 du 14 juillet 2000.

* 12 Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

* 13 « En finir avec le mensonge budgétaire », rapport n° 485 (1999-2000).

* 14 Le rapport de M. Philippe Adnot sur l'ADEME montre bien, du reste, que cette progression est essentiellement un affichage politique (« ADEME : la grande illusion », rapport n° 236 ; 2000-2001).

* 15 Les décrets devant donner une existence effective au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, censé assurer le financement de la réduction du temps de travail, n'ont toujours pas été publiés.

* 16 Cf. le rapport d'information n° 348 (2000-2001) de M. Gérard Braun, « La réforme de l'Etat à l'étranger ».

* 17 Le retour à l'équilibre correspond à un scénario de croissance « optimiste » de 3 % par an. Dans le cas où celle-ci ne serait « que » de 2,5 %, les administrations publiques présenteraient toujours en 2004 un besoin de financement chiffré en ce cas à 0,5 point de PIB.

* 18 La loi de finances initiale pour 2001 a fixé le montant du déficit budgétaire à 186,6 milliards de francs.

* 19 Les Notes bleues de Bercy, n° 200, 1-15 février 2001.

* 20 Les dotations qui composent l'enveloppe normée représentaient les trois quarts des concours financiers de l'Etat (dotations, compensations, dégrèvements) en 1990 et seulement 55 % en 2001.

* 21 Certains impôts ont vu leur assiette réduite (taxe professionnelle, vignette), d'autres leurs taux gelés (droits de mutation à titre onéreux). La part régionale de la taxe d'habitation a été supprimée. Ces modifications ont donné lieu à des compensations versées par l'Etat.

* 22 Note de conjoncture, février 2001.

* 23 Les compensations aux départements de la baisse des droits de mutation et de la suppression partielle de la vignette ont été prises en compte au titre des compensations, même si formellement elles sont inscrites dans la dotation générale de décentralisation.

* 24 Le coût de l'APA en régime de croisière s'élève à 23 milliards de francs. L'Etat intervient à hauteur de 5,5 milliards de francs en 2002, ce montant étant indexé sur le produit de la contribution sociale généralisée (CSG). Les départements prendront en charge la différence, soit environ 17 milliards de francs. Comme ils ne consacrent aujourd'hui que 5,5 milliards de francs aux publics visés par l'APA, le surcoût sera d'environ 11,5 milliards de francs.

* 25 Les tableaux ci-dessous sont extraits du rapport de notre collègue Charles Descours.

* 26 La note aborde également, brièvement, la question de l'impact sur les recettes des administrations publiques d'une révision à la baisse de la prévision de croissance.

* 27 Une croissance de 1 % correspondant à l'évolution spontanée des dépenses de fonction publique, du fait de l'effet de carrière.

* 28 Le gouvernement retient en effet par ailleurs certaines hypothèses de progression des dépenses du FOREC (cf. tableau à la fin de cette note).

* 29 Une contribution à hauteur de 10 milliards de francs représenterait 1,1 % des dépenses des administrations locales.

* 30 On ne sait pas à quoi correspondent ces 12 milliards. Pour 2001, l'Unedic estime à 7,8 milliards l'augmentation des dépenses induites par la convention. Compte tenu d'une baisse des cotisations de 7,8 milliards et d'une diminution des produits financiers de 0,4 milliard, la convention détériorerait le solde de 16 milliards. Par ailleurs, sur la période 2001-2003, l'UNEDIC prévoit de dépenser 29,9 milliards à des « actions personnalisées en faveur du retour à l'emploi » et 19,9 milliards à l'amélioration des indemnités.

* 31 Ce calcul n'intègre pas certaines exonérations de cotisations d'allocations familiales.

* 32 Une estimation de la commission des comptes de la sécurité sociale va être publiée sous peu (le 7 juin ?).

* 33 Le rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale qui sort dans quelques jours donnera une nouvelle estimation de la réalisation pour l'année 2000.

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