c) Un bilan globalement défavorable à l'Europe ?

Le tableau récapitulatif ci-dessous souligne l'inégalité des degrés et des rythmes d'internationalisation des trois principaux systèmes de brevets mondiaux. Il illustre, tant en proportion qu'en rythme d'évolution, le plus grand degré d'ouverture du système européen :

PROPORTION DES DEMANDES DOMESTIQUES PAR SYSTÈME

Source : Trilateral statistical report 1999, OEB, JPO et USPTO.

Le « taux de pénétration » en brevets étrangers des trois blocs économiques Etats-Unis/Japon/Europe est, d'après ce tableau, plus élevé en Europe. C'est d'ailleurs cette constatation, notamment, qui a motivé le lancement de diverses initiatives tant nationales que communautaires, ou prises au niveau des Etat parties à la Convention de Munich.

Le rapport précité de M. Didier LOMBARD tire une conclusion sans équivoque de la situation : « L'Europe a connu au cours des 20 dernières années une baisse sensible de la part de ses dépôts sur son propre territoire. Même si la proportion des dépôts d'origine européenne semble s'être stabilisée un peu au dessous des 50 % depuis quelques années, la performance de l'Europe apparaît comme faible : en termes de brevets, elle est beaucoup plus pénétrée sur son propre territoire que ne le sont les Etats-Unis et le Japon. Ces deux pays comptent ainsi ensemble pour environ la moitié des demandes de brevets européens (en 1996, 29,2 % pour les Etats-Unis et 17,7 % pour le Japon), alors que les Etats membres de l'OEB ne sont à l'origine que de 4 % des demandes au Japon et de moins de 15 % aux Etats-Unis.

« Au cours des deux dernières décennies, les dépôts de brevets américains et japonais ont progressé en Europe aux dépens des dépôts d'origine européenne. Cela pourrait n'être qu'un effet de la mondialisation si on constatait un effet symétrique de progression des dépôts européens aux Etats-Unis et au Japon. Or, les dépôts d'origine européenne stagnent dans ces deux pays . Les dépôts japonais ont progressé aux Etats-Unis, alors que la réciproque n'est pas vraie ».

Quelle conséquence peut-on réellement tirer de ces différences de « taux de pénétration » ? Est-ce le signe d'un affaiblissement technologique de l'Europe ? Votre rapporteur inclinerait naturellement à le penser, mais l'honnêteté commande de souligner deux éléments contredisant cette analyse assez largement reçue.

Les trois principaux offices (OEB, USPTO et JPO) publient des données qui relativisent quelque peu l'importance de ce déséquilibre, si l'on s'attache aux flux respectifs de demandes de 1998 entre les trois blocs trilatéraux . On notera que ces chiffres ont fait l'objet d'un retraitement : ils portent sur des inventions identifiées en tant que telles et ne présentent pas de risque de doubles comptes, en même temps qu'ils neutralisent les effets « multiplicateurs » dus aux comportements spécifiques des entreprises japonaises et américaines. Ils démentent l'idée d'un déséquilibre inventif au détriment de l'Europe.

FLUX DE DEMANDES ENTRE LES BLOCS TRILATÉRAUX EN 1998

ETATS MEMBRES DE L'OEB

ETATS-UNIS

JAPON


Source : Trilatéral statistical report

(1) Equivalent à 817.149 demandes nationales

(2) Equivalent à 283.929 demandes nationales

De plus, si l'on s'attache aux inventions pour lesquelles une protection est demandée dans chacun des trois systèmes , qui sont, a priori, celles qui présentent le plus grand intérêt commercial , on s'aperçoit que le déséquilibre n'est pas, non plus, si marqué , l'Europe étant certes, distancée, mais de peu, par les Etats-Unis et le Japon comme terre d'origine des inventions étendues aux trois blocs.

DÉPÔTS « TRILATÉRAUX » PAR ORIGINE EN POURCENTAGE

1991

1994

Evolution

Japon

32,7

31,6

Etats-Unis

38,2

36,7

Pays de l'OEB

26,4

28,5

Source : Trilateral statistical report

Plus que le bilan chiffré des dépôts, c'est la singularité du droit américain des brevets qui est souvent citée comme une source de déséquilibre au détriment des déposants étrangers.

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