C. VERS UNE VACCINATION DES ESPÈCES RARES ET SENSIBLES

La protection des espèces rares et des races à faible effectifs constitue un enjeu majeur pour la préservation d'un capital génétique inestimable, ainsi que l'a montré notre collègue Gérard Larcher dans un Rapport sur le patrimoine animal et le patrimoine rural élaboré en 1992 à la demande du Premier ministre, dans lequel il indiquait que : « l'intérêt économique [des] races traditionnelles est [...] démontré. Ces populations d'animaux rustiques, en voie d'extinction dans les années 50, présentent des aptitudes aujourd'hui recherchées pour leurs qualités de reproduction, de longévité et de résistance, sont appréciables dans le cadre de la réforme de la PAC, en particulier pour l'impératif de réduction de coûts de production » d'autant que « dans la mesure où la production en grande quantité n'est plus le but unique, les races rustiques permettent d'envisager un mode d'élevage moins contraignant, nécessitant moins d'intrants et moins de main-d'oeuvre que les races spécialisées ».

Or, en cas d'épizootie aphteuse survenant dans une zone indemne, aucun animal n'étant vacciné, toutes les espèces sensibles sont susceptibles d'être atteintes et, eu égard au faible nombre d'individus existants, les races à faibles effectifs sont menacées de disparaître. C'est pourquoi la conférence FAO/OIE d'avril 2001 à adopté une recommandation sur la protection contre la fièvre aphteuse par la vaccination dans certains cas particuliers tels que ceux des parcs zoologiques, des réserves de faune sauvage, des races ou matériels génétiques rares, des espèces en danger, des animaux inclus dans des programmes de recherche spéciaux.

Invoquant l'obligation de conserver les espèces en danger protégées, instituée par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, la conférence recommande que :

- l'OIE examine la faisabilité de la mise en oeuvre du concept de « compartimentalisation » 76 ( * ) pour la lutte contre la fièvre aphteuse et les autres maladies transfrontalières ;

- le code sanitaire international soit modifié pour permettre la vaccination en urgence de certains animaux rares ou précieux, sans porter atteinte au statut de pays ou de zone indemne de fièvre aphteuse sans vaccination , sous réserve que ces animaux vaccinés soient identifiés individuellement et placés sur un site entouré de barrières physiques et soumis à des procédures zoosanitaires empêchant tout contact avec des animaux sensibles se trouvant aux alentours, et que des mesures soient instituées pour éviter toute dissémination du virus par des objets ; ce site pouvant être considéré comme « zone indemne de fièvre aphteuse où est pratiquée la vaccination », toutes les restrictions prévues dans le code s'appliquant aux animaux vaccinés, à leur descendance, aux embryons, aux ovules, à la semence et à tout autre produit tiré de ces animaux ;

- des recherches soient consacrées à l'efficacité des vaccins chez les ruminants et autres animaux non domestiqués ainsi qu'à l'utilisation des tests de diagnostic sur ces espèces pour les animaux des parcs zoologiques .

La question du sort des races à faible effectif s'est d'ailleurs posée en Grande-Bretagne au cours de ces derniers mois, et le Gouvernement britannique a décidé d'épargner, sous réserve du respect de certaines conditions sanitaires, des espèces ovines et caprines protégées et des races à haute valeur génétique telles que les Herdwicks et Swaledales notamment.

Au vu de ces éléments, votre mission d'information estime que le gouvernement français a fait un choix approprié en ne cédant pas à une réaction purement émotionnelle au moment où la crise s'est déclenchée. A l'évidence, le recours à une vaccination d'urgence aurait eu plus d'inconvénients que d'avantages, puisque l'on sait qu'en vertu de l'article 6 du code zoosanitaire international un pays indemne qui pratique la vaccination ne retrouve ce statut que 12 mois après le dernier cas s'il procède à l'abattage des animaux vaccinés et 24 mois après le dernier cas en l'absence d'abattage sanitaire.

Cependant, rien ne met votre pays à l'abri d'une crise analogue à celle qu'a subi le Royaume-Uni.

C'est pourquoi il convient de s'interroger, dès à présent, sur l'opportunité de la vaccination, en fonction des résultats obtenus dans les négociations internationales, en n'omettant pas de rappeler que si la France procédait à la vaccination, même avec l'accord de la Communauté européenne, ses exportations vers des zones « propres » seraient stoppées pour une période d'un à deux ans.

Pour votre mission d'information, cette question mérite donc d'être réexaminée dans l'avenir compte tenu des divers scénarios envisageables quant à  :

- la nature des vaccins existants ;

- aux conditions d'utilisation optimale de la vaccination ;

- aux conséquences que celle-ci aurait sur les exportations de notre pays.

Tels sont les éléments fondamentaux que votre rapporteur se propose d'évoquer sans parti pris au chapitre VI, relatif aux recommandations de la mission d'information.

* 76 Qui consiste en une forme d'isolement des zones où vivent les animaux vaccinés, par des mesures appropriées.

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