10. Audition d'une délégation de l'Assemblée des Chambres françaises de Commerce et d'Industrie (ACFCI) et de MM. Bernard Martel, président de la Chambre de Commerce et d'Industrie d'Abbeville et Alain Longatte, directeur du service industrie (6 juin 2001)

M. Marcel Deneux, Président - Nous recevons maintenant une délégation à l'échelon national des Chambres de Commerce et d'Industrie : M. Bernard Martel, président de la Chambre de Commerce et d'Industrie d'Abbeville et M. Alain Longatte, directeur du service industrie, accompagnés de M. Pierre-Olivier Viac, responsable du service Environnement et Patrice Arnoux, juriste au service Environnement de l'Assemblée française des chambres de commerce et d'industrie.

Le Président rappelle le protocole de publicité des travaux de la commission d'enquête et fait prêter serment à MM. Bernard Martel, Alain Longatte, Pierre-Olivier Viac et Patrice Arnoux .

M. le Président - Nous souhaitons que vous nous parliez des répercussions des inondations sur l'activité économique et la vie des entreprises de la région. Vous pouvez bien sûr nous donner également vos appréciations sur la répartition des indemnisations, après avoir présenté les personnes de vos services.

M. Bernard Martel - M. Longatte est le directeur du service Industrie de la Chambre de commerce et d'industrie d'Abbeville qui a tout de suite pris en main les difficultés des entreprises sinistrées.

M. Pierre-Olivier Viac - Je suis pour ma part responsable du service Environnement de l'Assemblée française des Chambres de commerce et d'industrie. Nous animons des réseaux de conseillers en environnement et de conseillers en qualité dans les 182 Chambres de commerce et d'industrie.

M. Patrice Arnoux - Je suis juriste, spécialisé en environnement au sein de l'Assemblée française des Chambres de commerce et d'industrie.

M. Bernard Martel - Je vais vous parler essentiellement d'Abbeville car il s'agit du secteur qui me concerne, mais il faut savoir que les difficultés sont les mêmes à Amiens et à Péronne. Nous avons vécu au mois d'avril les crues surprises de la Somme avec toutes les conséquences que vous connaissez. Notre souci principal a concerné les entreprises, leur survie et leur redémarrage. Dans un premier temps, nous avons eu comme priorité de reloger les entreprises qui ne pouvaient plus fonctionner. Nous avons par exemple hébergé une entreprise dans la Chambre de commerce. Il nous fallait aider les entreprises à continuer à fonctionner. Puis, nous avons mis en place une structure pour répertorier toutes les entreprises qui avaient besoin d'aide. Nous avons reçu des délégations et nous disposons maintenant d'une liste qui regroupe toutes les entreprises en difficulté, de la plus grosse, la COMAP avec ses 250 salariés, à l'entreprise individuelle sans salarié.

Ainsi, certaines entreprises ont directement les pieds dans l'eau et ne peuvent plus fonctionner. D'autres sont pénalisées car on ne peut plus accéder à leur site en raison des routes inondées. Par ailleurs, nous avons eu une quantité d'annulations dans le secteur touristique, notamment dans le parc du Marquenterre. La publicité faite à cette région par la presse a provoqué une perte de notoriété. On peut remercier les médias d'avoir sensibilisé l'opinion sur nos difficultés, mais on connaît les effets pervers que cela peut impliquer.

De nombreuses aides ont été mises en place par tous les organismes existants : URSSAF, EDF etc. La Chambre de commerce a lancé l'idée de la création d'une association afin de faire jouer la solidarité. Cette association a été élargie à l'ensemble du département de la Somme.

Actuellement, la vie reprend son cours. Il n'y a quasiment plus d'eau et nous commençons à évaluer les dégâts.

M. Alain Longatte - Dès les premiers jours d'avril, la CCI s'est jointe à la mairie d'Abbeville pour trouver des solutions. Nous avons recensé toutes les entreprises en difficulté et identifier leurs besoins. L'entreprise industrielle COMAP, dont les 800 m² de site se trouvaient dans l'eau, recherchait des ateliers pour effectuer du montage en urgence afin de satisfaire ses commandes. Nous avons donc trouvé des locaux disponibles et l'entreprise a pu transférer son activité de montage. Nous avons donc fait le lien entre toutes les entreprises. Pour l'entreprise Monsieur Bricolage, nous avons également trouvé des locaux de stockage.

Nous vous avons préparé un petit dossier qui recense toutes les entreprises soit touchées directement par l'eau, soit touchées d'une manière économique, sans être touchées physiquement telles que les sous-traitants d'entreprises en difficulté et d'entreprises dont l'accès était bloqué par les eaux.

Ces dernières vont se trouver particulièrement en difficulté car elles ne sont pas du tout couvertes par les assurances, contrairement à la première catégorie d'entreprises qui, généralement, étaient assurées sur leurs biens -pas toujours sur la terre d'exploitation. Or, pour certaines entreprises indirectement touchées par les inondations, la baisse de leur chiffre d'affaires a été significative. Des aides sont donc prévues.

M. Bernard Martel - Il existe pour les entreprises du commerce les aides du Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce (FISAC) ; de même, pour l'artisanat, il existe un fond de calamités ; cependant, nous souhaiterions qu'une décision soit prise pour pouvoir affecter les fonds FISAC qui normalement ne le sont que dans le cadre d'un arrêté ministériel. Or aujourd'hui, rien n'a encore été décidé. Suite à ma rencontre avec Mme la Ministre du Tourisme, nous avons évoqué un plan de soutien au tourisme, mais nous espérons avoir également votre soutien dans le cadre des fonds FISAC.

M. Alain Longatte - Abbeville connaît un taux de chômage de l'ordre de 20 %, ce qui est considérable par rapport à la moyenne nationale. Notre grande inquiétude porte sur la société COMAP qui emploie 200 salariés et 50 intérimaires et qui appartient au groupe français Legris Industries. Ce groupe, compte tenu des risques sur le site d'Abbeville et des problèmes qu'il rencontre avec l'assurance, ne souhaite plus rester sur son site actuel. Il envisage donc de déménager. Nous espérons que ce déménagement pourra se faire sur Abbeville, mais le groupe a également des sites en Italie et nous devons donc rester attentifs. La principale difficulté vient du fait que la réglementation européenne pour les aides est limitée à 17 %, ce qui est jugé largement insuffisant par le groupe Legris.

Nous devons donc trouver des suppléments pour augmenter ces 17 % d'aides. Une des astuces serait de racheter le bâtiment actuel de l'entreprise à un prix élevé. En parallèle, la préfecture a écrit à la Commission de Bruxelles pour demander une mesure dérogatoire car rien n'est prévu pour les groupes. Le risque est donc grand pour l'emploi à Abbeville car nous connaissons la philosophie des groupes fondée avant tout sur les intérêts financiers. Le groupe Legris industries représente un chiffre d'affaires annuel de 4,7 milliards de francs avec une branche de fluides domestiques, une branche de fluides industriels et une branche logistique. Son siège se trouve à Rennes.

Tel est le message important que nous voulions vous communiquer aujourd'hui.

M. Bernard Martel - On m'a transmis les documents de M. Gaigan, ainsi que la lettre de l'ancien sous-préfet d'Abbeville, M. Emile Mocque, qui s'adressait, le 12 janvier 1994, à M. le Maire de Mareuil-Caubert pour le mettre en garde sur le mauvais entretien des marais :

« Du côté des marais et des étangs, même si les pluies cessent, le niveau d'eau monte quand même. Cela est marquant dans les habitations proches des étangs. L'eau a monté depuis le début des précipitations de près de 50 centimètres. J'ai envoyé un courrier aux services compétents signalant l'urgence de consolider la buse de la rivière du Doit en haut du passage à niveau d'Abbeville. En effet, toutes les eaux s'écoulant autour d'Abbeville passent par cette buse d'1,50 mètre de diamètre. Cela freine le débit et en cas de grande marée, l'eau monte facilement de 20 centimètres en une journée. L'agrandissement de cette buse est urgent. »

De même, M. Jean Caron avait annoncé cette catastrophe. Pour sa part, M. Gaigan exploitait une entreprise sur une zone qui est maintenant totalement inondée. On avait d'ailleurs déjà renoncé à vendre ce terrain à Intermarché. En fait, ces terrains se vendent plus au litre qu'au m². Vous trouverez tous ces éléments dans le dossier que nous laissons à votre disposition.

M. le Président - Nous sommes ici pour faire un état des lieux le plus objectif possible. Nous regardons avec beaucoup d'intérêt tous les documents qui peuvent nous être fournis.

M. Bernard Martel - Je peux parler de ma région en connaissance de cause, puisque j'habite à Abbeville depuis environ 32 ans. Or, je suis également pâtissier chocolatier et je vois la différence entre Abbeville et les villes non inondées. Il y a une trentaine d'années, les bateaux allaient jusqu'à Abbeville. Tout ce trafic a été abandonné aujourd'hui en raison de l'ensablement de la baie de Somme et des problèmes liés à l'entretien du canal de la Somme. Sans doute, les moyens de transport ont également évolué.

Nous sommes tout de même dans une région qui a toujours été très humide.

M. le Président - On parle toujours en effet de la Picardie Maritime.

M. Michel Souplet - Vous venez d'évoquer le rapport de Jean Caron. J'aimerais connaître votre point de vue sur son analyse qui est la suivante : la Somme a un débit normal de 35 à 70 m 3 /seconde. Tant qu'il y a de l'eau à ce niveau, la montée des eaux ne pose pas de problème. Quand on est en période de grande marée, l'écluse se ferme et pendant ce temps-là plus rien ne coule. Selon Jean Caron, il y a d'un côté une étendue, dénommée les Mollières, où l'on pourrait stocker 500 000 m 3 d'eau. Ainsi, au moment de la marée, ou lorsque le débit est supérieur à 70 m 3 , il faudrait pouvoir stocker de l'eau grâce à un autre système de pompe, comme une vanne par exemple, de la Somme directement dans les Mollières et, une fois la marée basse revenue, on la ferait disparaître. Il n'y aurait donc jamais d'arrêt : il s'agit d'un bassin de rétention qui se viderait régulièrement tous les jours. Pensez-vous que ce système est valable, même si son aménagement coûterait certainement cher ?

M. Pierre Martin, Rapporteur - Je crois que notre collègue parle en fait du Monel : il s'agit d'un espace marécageux utilisé pour faire paître les moutons. Il y a une digue qui sépare ce marais de la mer. Or cette digue a été crevée par la mer. Cela supposerait donc qu'il y ait une écluse. Je ne sais si le réservoir serait assez grand, mais pour y arriver, il suffirait de construire un canal latéral à la Somme qui conduirait vers ce marais ou d'installer des pompes. Cependant, les ingénieurs affirment dans leurs études que cela n'aurait pas d'effet.

M. Michel Souplet - Si pendant quatre heures la Somme n'écoule pas d'eau parce que les écluses sont fermées, mais si, dans le même laps de temps, on stocke de l'eau pour qu'elle coule au moment des marées basses, cela permet de créer un bassin permanent. Je ne suis pas un technicien, mais Jean Caron avait l'air de dire qu'il s'agirait d'un moyen qui aurait évité la situation dramatique de cette année. Il serait donc intéressant de savoir quelle proposition nous devons faire à terme pour ne plus se retrouver devant un tel cubage d'eau à évacuer rapidement.

M. Bernard Martel - L'idée mérite d'être étudiée. Jean Caron avait également fait des propositions à la ville d'Abbeville qui sont aujourd'hui mises en application : ainsi, nous installons un système de déversoir avec un bassin de rétention. A force de persévérance, les travaux ont fini par débuter.

M. le Rapporteur - Il y a un réel problème. J'en discutais ce matin encore avec des personnes du secteur. L'armée constate que l'on a construit, il y a plusieurs siècles, dans le lit majeur de la Somme. Mais quelle proposition fait l'armée ? Faut-il démolir ces constructions ? Ces réflexions sont peut-être utiles a priori, mais quelle est la solution proposée ? En effet, chacun y va de sa réflexion, de son constat or l'essentiel est plutôt de proposer des solutions !

A Fontaine-sur-Somme, grâce au pompage, il n'y a plus d'eau. Les gens rentrent donc chez eux. Or personne ne prend de décisions sur ces habitations alors que l'on avait prévu de statuer avant le retour des habitants dans cette zone. Il est vrai que les habitants ont le droit de rentrer chez eux puisqu'il s'agit de leur propriété. Il faut donc savoir ce que nous voulons. On est en train de tout mélanger et l'on ne s'y retrouve plus. En fait, seules les indemnisations préoccupent aujourd'hui les personnes concernées.

M. Ambroise Dupont - Qui fait les estimations des dégâts ? Par ailleurs, à la lumière de ces événements, que pense la CCI de la gestion des zones industrielles en place ou à venir ?

M. Jean-Guy Branger - Il nous est facile de croire que les difficultés des entreprises sont grandes et graves. Vous avez parlé d'aides. De quelles aides parlez-vous ? Vous avez raison de faire passer le message sur la gravité de la situation. Il faut faire céder la Commission de Bruxelles sur ces 17 %. Compte tenu de la gravité des dégâts, cela doit être possible selon moi. Cependant, s'il y a une concurrence avec l'Italie ou d'autres pays, il serait bon d'envisager dès à présent des montages financiers avec d'autres collectivités territoriales ou régions. A mon avis, ce défi est jouable.

Mais vous avez parlé des aides, tout en restant très vague. Certaines entreprises ne travaillent plus depuis deux mois. Elles ne sont pas reparties. Quand vont-elles repartir et avec quel plan de charge ? De quelle nature sont les aides dont vous parlez ? En effet, s'il s'agit de reports d'échéances, cela revient simplement à différer les paiements. Où en êtes-vous dans les négociations ? Ces aides seront-elles suffisamment substantielles pour sauver les entreprises qui sont tout de même la richesse du pays ?

M. François Gerbaud - Votre audition appelle une question récurrente. Vous avez dit que, sans doute les moyens de transport ont évolué et qu'il y a trente ans, on pouvait venir en bateau à Abbeville.

M. le Président - J'ai connu des caboteurs de 700 tonnes partant d'Abbeville pour se rendre sur la Tamise. Je suis âgé, mais tout de même !

M. François Gerbaud - A-t-on bien entretenu le fonds des rivières ? En effet, le grand problème est apparemment là. Par ailleurs, notre Commission devra réfléchir, dans le cadre de l'application de la loi Barnier : est-ce que les constructions doivent être édifiées sur le haut ou sur le bas des rivières ? Si les rivières remontent, il est clair que l'on peut avoir des accidents sur les terrains en aval. Va-t-on enfin donner une définition des règles à respecter en matière de permis de construire sur les berges ?

M. Bernard Martel - Chaque entreprise reçoit une aide selon le secteur dont elle dépend. La COMAP a été évoquée, mais nous avons également beaucoup de petits artisans.

M. Alain Longatte - Les experts d'assurances pratiquent les estimations. Si les entreprises contestent ces estimations, elles ont la possibilité de faire appel à des experts particuliers. Le Conseil général a mis en place des rendez-vous préprogrammés avec des experts privés pour estimer les dégâts.

M. Jean-Guy Branger - Avez-vous une réflexion sur la gestion des zones artisanales et commerciales qui se trouvent dans une situation critique ?

M. Bernard Martel - Nous n'avons pas de zones industrielles ou artisanales. La COMAP est très ancienne, il s'agit donc d'une entreprise intégrée dans la ville, entre la voie de chemin de fer et le canal. Les futures zones sont totalement à l'abri de ce genre de soucis.

M. Hilaire Flandre - Notre Commission d'enquête a pour mission de comprendre les causes de ces inondations, mais surtout de déterminer ce qu'il faudrait faire pour éviter qu'elles se renouvellent. Il me semble pour l'instant exclu que l'on élimine les zones inondées, parce que ces inondations m'apparaissent comme un accident dû notamment à un certain nombre de manquements à l'obligation d'entretien de la Somme ou des canaux parallèles. Dans mon département, suite à l'inondation de 1995, nous avons construit une digue pour protéger l'usine Citroën qui emploie 2.500 salariés. Il existe donc des moyens techniques qui empêchent les inondations. A Fontaine-sur-Somme, il suffit de pomper, d'assécher et de maintenir le sol à sec.

Par ailleurs, je ne suis pas sûr qu'il faille toujours céder au chantage d'une entreprise qui menace de partir ailleurs si elle ne reçoit pas plus d'aides que les 17 % prévus par Bruxelles. Il est normal qu'un chef d'entreprise tente de faire monter les enchères.

M. Bernard Martel - Je rejoins votre analyse sur le côté exceptionnel de ces inondations.

M. le Rapporteur - Une association a publié au début du mois de janvier une liste des inondations qui ont eu lieu dans la région depuis des siècles. Certaines ont même provoqué des morts. Cependant, il s'agissait toujours d'inondations dues au gel : en effet, la pluie tombait alors que la glace était encore là. Ce ruissellement emportait tout sur son passage dans ces basses vallées. Cela ne durait que quelques jours. J'ai également découvert qu'à Fontaine-sur-Somme, le 29 janvier 1841, 70 familles ont abandonné leurs demeures submergées et dans 20 autres maisons, les habitants ne se maintenaient qu'au moyen d'échafaudages pratiqués tant dans les habitations que dans les écuries ou les étables. Toutes ces informations reprises dans les journaux de l'époque me semblent assez utiles à connaître.

M. Bernard Martel - Certaines personnes ont également fait le choix de venir habiter près de l'eau pour des raisons de qualité de vie.

M. Alain Longatte - Compte tenu de la cartographie de la région, les entreprises en difficulté sont plutôt des petits artisans. Nous avons donc dans un premier temps mis en place des petites aides d'urgence à la personne : la Chambre des Métiers dispose d'un fond de solidarité de 5.000 francs par personne. Certaines caisses de retraites ont fait de même.

Pour les entreprises totalement inondées, les assurances joueront leur rôle. La population la plus mal lotie aujourd'hui regroupe les entreprises qui n'ont pas connu des inondations directes et ne peuvent donc bénéficier des couvertures d'assurances. Nous aimerions mettre en place pour cette population des avances remboursables à taux zéro avec différé de remboursement. Ces entreprises ont avant tout des problèmes de trésorerie car elles ont très peu travaillé durant le mois d'avril.

M. le Président - Existe-t-il des entreprises qui subissent des pertes sur des biens non assurables ?

M. Bernard Martel - Est venu par exemple me rencontrer un chef d'entreprise qui avait acheté le 1 er avril un café-PMU. Il a donc pour l'instant de nombreux remboursements d'emprunts à assumer, or il n'a toujours pas eu de clientèle.

M. le Président - Quelle est l'attitude des banques en général ?

M. Alain Longatte - Certaines banques ont autorisé des reports d'échéances -notamment le Crédit agricole- ou des prêts à taux zéro.

M. Jean-Guy Branger - Ces prêts ne riment à rien puisque l'entreprise n'a de toute façon pas de recette pour rembourser.

M. Hilaire Flandre - Si trois ou quatre mois après, l'activité reprend, l'entreprise pourra rembourser. En revanche, si elle ne réussit pas à reprendre son activité, il faudra qu'elle se résolve à mettre la clé sous la porte.

M. le Président - Quelle est l'attitude des contrôleurs fiscaux ?

M. Alain Longatte - Tous les organismes de l'Etat accordent des facilités, notamment des petits reports d'échéances s'ils reçoivent une demande écrite de l'entreprise. Nous aidons les chefs d'entreprise à rédiger leur demande. L'URSSAF par exemple accorde des délais de paiement sur les cotisations patronales, mais pas sur les cotisations ouvrières.

M. le Président - Que pouvons-nous faire pour que de telles inondations ne se renouvellent pas ?

M. Bernard Martel - La CCI de l'Ouest a édité une petite plaquette avant que ne surviennent les inondations de la Somme, et pronostiquait déjà quelques aménagements nécessaires.

M. Pierre Olivier Viac - De son côté, la CCI de Paris a publié un petit fascicule de propositions sur l'environnement afin de prévenir les risques pour les entreprises.

M. Patrice Arnoux - L'idée de départ de ce projet était de recenser et de cartographier toutes les entreprises situées en zone inondable et d'élaborer des plans d'urgence, comme pour les risques technologiques. Par ailleurs, il s'agit également d'améliorer les nombreux outils existants. En effet, face au grand nombre d'intervenants, on ne sait plus à qui s'adresser. Enfin, il s'agit de développer une véritable politique de prévention en envisageant des servitudes sur les zones de rétention des crues. Une maîtrise de l'urbanisation existe déjà pour les installations à risques ; pourquoi ne pas transférer cette idée aux cours d'eau ?

M. Pierre Olivier Viac - Les conseillers environnement des CCI font aujourd'hui de la prévention auprès des entreprises installées sur des zones inondables afin de les conseiller pour le jour où elles seront inondées.

M. le Président - Avez-vous dressé un inventaire de l'ensemble des zones à risque dans toute la France ? En fait, j'ai l'impression que, au cours des décennies récentes, pour des raisons de prix du terrain, on a créé beaucoup de zones d'activité sur des terrains restés sans acheteurs parce qu'inondables.

M. Patrice Arnoux - En effet, la plupart du temps, les zones industrielles se sont installées en bordure des cours d'eau et les collectivités locales ont incité les industriels à venir construire là. Le risque est aujourd'hui maximum pour l'industriel car on l'a incité à venir s'installer, mais on peut lui demander demain de partir.

M. le Président - Avez-vous chiffré cette vulnérabilité ?

M. Patrice Arnoux - Il faudrait effectuer un recensement auprès de toutes les CCI du territoire.

M. François Gerbaud - Si nous faisions aujourd'hui un inventaire, celui-ci serait fiable car il ferait apparaître de nouveaux risques compte tenu des pluies récentes.

M. Bernard Martel - En fait, on décidait à l'époque d'installer les entreprises le long des canaux car elles étaient approvisionnées par bateau.

M. Michel Souplet - L'Oise a débordé deux fois de suite dans les années 1990. Nous avons donc construit les zones industrielles 80 centimètres plus haut afin d'avoir une certaine sécurité. Nous n'avons pas de raison d'arrêter une zone industrielle quand cela joue sur si peu. On peut sauver ces usines.

M. le Président - Je vous remercie de votre présence aujourd'hui. Vous pourrez porter témoignage à l'extérieur du travail que mène le Sénat. Vous serez bien évidemment destinataires du rapport.

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