III. LA GESTION À TERME DES FRÉQUENCES

Les fréquences sont un bien rare . Elles sont utilisées par le secteur des télécommunications en concurrence avec d'autres besoins : défense nationale, police, navigation aérienne, secteur audiovisuel, radios, etc.

Leur gestion est assurée à un triple niveau :

- national, en France, sous l'autorité de l'Agence nationale des fréquences,

- européen, dans le cadre des attributions de l'Union européenne, mais, également, dans celui plus technique de la conférence des Postes et télécommunications qui regroupe 43 pays,

- et mondial, au sein de l'UIT.

Il n'est pas inutile de souligner qu'il existe une constante de temps de l'ordre de 10 ans entre l'affectation à un nouvel usage de fréquences et sa validation .

Par exemple, les discussions sur les fréquences de téléphonie mobile de troisième génération ont commencé en 1992 pour aboutir, en principe, à une libération fin 2002. De même, pour la télévision numérique terrestre, a-t-on commencé à étudier le problème en 1994 pour une mise en oeuvre à partir de 2005.

Compte tenu de cette constante de temps, les besoins à terme sont planifiés . Ainsi :

- la conférence d'Istanbul tenue en 2000 a défini une extension des bandes de fréquence attribuées à la téléphonie mobile de troisième génération,

- et une conférence européenne est prévue en 2005 afin de planifier le spectre de la future télévision numérique destinée, à terme, à se substituer au spectre analogique actuel.

Pourquoi, dès lors, s'inquiéter des problèmes posés par la gestion à terme de ces fréquences qui semble planifiée dans de bonnes conditions ?

Principalement, pour deux raisons :

En premier lieu , parce que cette planification est encore trop dépendante des situations acquises et d'une évaluation trop linéaire des besoins à terme .

La télévision numérique terrestre va accroître d'un facteur 5 ou 6 les canaux à la disposition des chaînes audiovisuelles, canaux qui sont mis à disposition gratuitement s'agissant du service public et pour un coût relativement faible pour les autres chaînes.

Or, en raison de la latence de libération évoquée ci-dessus, il est peu prudent d'affecter un bien aussi rare que ces nouvelles fréquences sans réelles contreparties financières et sans interrogation de fond sur les besoins à venir , ceci uniquement parce que les chaînes étaient attributrices des fréquences analogiques correspondantes et que l'on n'imagine pas que certains besoins puissent faire l'objet d'une croissance exponentielle.

Rappelons, par exemple, que le chiffre d'affaires de la formation professionnelle en France est de 143 milliards, bien supérieur à celui de l'audiovisuel, que le téléenseignement est appelé à y croître très fortement, et que ce type de téléenseignement -mais également celui qui pourrait être dispensé par l'éducation et les universités- pourrait, à un terme beaucoup plus proche que l'on ne le prévoit, avoir pour usagers ceux de l'espace hertzien.

Il en va de même pour tout ce qui ressort de la télésanté .

La prudence dans ce domaine commanderait donc de réserver certains des canaux libérés par le numérique hertzien audiovisuel à des usages dont on ne peut encore mesurer l'importance alors que, dans le même temps, on sait très bien que la migration de l'analogique audiovisuel au numérique audiovisuel sera très longue 17 ( * ) . Ceci d'autant plus que ces fréquences permettent d'obtenir des couvertures du territoire à moindre coût, ce qui faciliterait la mise en oeuvre d'applications de service public comme le téléenseignement ou la télésanté .

Ensuite , parce que l'harmonisation européenne des fréquences -effective dans le domaine de la téléphonie mobile- n'est pas assurée dans d'autres domaines.

Cette harmonisation est pourtant essentielle si l'on souhaite que chaque citoyen européen, appelé de plus en plus à travailler et à voyager dans les autres pays de l'Union, puisse avoir une continuité d'utilisation des services de télécommunications et d'audiovisuel.

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Compte tenu de ce qui précède, vos rapporteurs ont estimé qu'il revenait à l'Office, dont la mission est d'éclairer le Parlement sur les grands choix technologiques, de collaborer à l'organisation d'un colloque, tenu le 17 décembre 2001 à Sophia-Antipolis, et dont le but était d'alerter les pouvoirs publics français et européens sur l'importance de ces questions .

* 17 La suppression des postes 819 lignes, non adaptés à la couleur, a pris une vingtaine d'années.

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