TROISIÈME PARTIE :


PROPOSITIONS

L'étude des conséquences de l'évolution scientifique et technique du secteur des télécommunications montre qu'en dépit de la crise qui affecte ce secteur, ainsi que celui de l'informatique, leur confluence sera probablement déterminante sur les conséquences économiques et le développement durable des quinze prochaines années .

Les auditions conduites par vos rapporteurs leur donnent également à penser que le soutien apporté au déploiement de ces technologies par la puissance publique est un levier très important de leur diffusion dans l'économie et la société. Et que ce soutien est très inégal suivant les pays - et très moyen dans le nôtre, en dépit de sa vocation scientifique et technologique .

On peut légitimement s'interroger sur le problème de savoir pourquoi la France ne peut entreprendre un effort de recherche qui n'est, par rapport aux PNB respectifs, qu'un peu supérieur à la moitié de celui de la Suède.

Or cet appui est essentiel. Et il fait défaut aujourd'hui.

Si l'Europe, et à son niveau la France, n'affectent plus suffisamment de ressources aux nouvelles technologies d'information et de communication, elles en subiront les conséquences dans une dizaine d'années ou moins . Car, à l'issue de cette période, il y aura des pays gagnants et des pays perdants .

En fait, tout se passe comme si notre pays n'avait pas pris la totale mesure de la nécessité de l'innovation continue dans le contexte de la mondialisation, pourtant inéluctable dans sa dynamique et dont on peut sans doute maîtriser certains aspects mais pas ignorer la logique.

L'architecture de soutien de l'État à la recherche, mais surtout au développement technologique, a été mise en cause ; elle est aujourd'hui gravement menacée.

D'autant plus que l'acceptation des règles de concurrence de la mondialisation, permet, à certains pays, sous couvert de recherches militaires ou universitaires, de soutenir massivement les développements technologiques de leur structure industrielle.

La France - et l'Europe -, par contre, n'ont pas (les optimistes disent, et pensent « pas encore ») de stratégie de recherche duale permettant, comme aux Etats-Unis, de lier plus étroitement les besoins de la recherche militaire aux avancées de la recherche civile .

De plus, dans le domaine qui nous concerne on relèvera également une grande timidité à prendre des mesures très incitatives en ce qui concerne les services de l'État et des collectivités locales. A quoi sert d'équiper les mairies et les préfectures d'ordinateurs connectés à l'Internet si une convocation à des réunions de syndicats intercommunaux par voie électronique est frappée d'illégalité par les services préfectoraux de contrôle de légalité ?

A quand les appels d'offres publics passés uniquement par voie électronique avec la réduction correspondante des délais inscrits dans les codes divers de l'urbanisme, des communes et collectivités locales ?

Parallèlement, l'échelon européen qui dispose de crédits de recherche non négligeables, a des difficultés -compte tenu des règles d'approbation de ses programmes de soutien- à fédérer l'emploi d'une partie significative de ses fonds sur des thèmes mobilisateurs .

Même si chacun des échelons considérés doit mettre à niveau l'ampleur de ces soutiens et adapter ses objectifs et ses procédures, une autre voie doit être explorée dans notre pays : l'encouragement de la participation des régions à ces actions, sous la forme d'expérimentations sociales à grande échelle.


PREMIÈRE PROPOSITION :
DONNER DE L'AMPLEUR ET DE LA LISIBILITÉ AU SOUTIEN DE L'ÉTAT À LA RECHERCHE ET AU DÉVELOPPEMENT TECHNOLOGIQUE DE LA FILIÈRE TÉLÉCOMMUNICATIONS-INFORMATIQUE

A. ACCROÎTRE LES CRÉDITS DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT TECHNOLOGIQUE

1. les crédits civils de recherche

Depuis la disparition du CNET, ce sont plus de deux milliards de francs de crédits qui sont annuellement soustraits à la dynamisation du secteur.

Or, cette somme est relativement marginale par rapport à la nécessité d'encourager les nouvelles technologies . Elle ne représente qu'environ 4,8 % des crédits du ministère de la Recherche et 3,5 % de l'ensemble du budget civil de recherche et de développement.

Si elle était réinjectée, elle pourrait être utilisée par le fonds de la science, par le fonds de la recherche technologique, mais également par l'ensemble des réseaux : réseau national de recherches en télécommunications (RNRT), réseau national de recherches et d'innovation en technologies logicielles (RNTL), réseau des nano et microtechnologies (RNMT), dont une partie des fonds est dédiée aux nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Notamment, mais pas exclusivement, afin de donner un répondant à un phénomène nouveau, le raccourcissement des délais entre les progrès de la science fondamentale et leur développement technologique .

Car, de façon croissante - comme le montrent par exemple les coopérations qui s'esquissent entre les entreprises et le CNRS qui amorce, enfin, sa réforme - le secteur industriel devient preneur de recherches communes en science fondamentale.

Cette interface, probablement capitale à terme, doit être fortement renforcée.

2. les crédits militaires de recherche

Lorsque l'on connaît l'ampleur du soutien du ministère de la défense américain à la recherche civile, on est confondu par la faiblesse de l'apport de la recherche militaire au budget civil de recherche - 190 millions d'euros dédiés au CNES.

C'est très insuffisant en volume . Et cela ne prend pas en compte l'ensemble des interfaces entre le civil et le militaire dans le secteur des télécommunications.

Au surplus, pour le seul spatial, le soutien du secteur militaire à notre industrie de satellites s'étiole, le programme Hélios a pris deux ans de retard, le programme Syracuse II également.

On rappellera sur ce point que les programmes américains permettent à l'industrie de satellites de ce pays d'amortir le coût de développement d'un satellite civil grâce à la commande préalable de plusieurs unités militaires.

Des décisions importantes ont été récemment prises au conseil de l'Agence spatiale européenne à Édimbourg dans le domaine civil, même si les prises de position de plusieurs pays de l'Union européenne en défaveur de la poursuite du projet Galileo ne laissent pas d'inquiéter.

Au-delà, la constitution de recherche européenne duale doit suivre.

Le développement d'EADS et la coopération militaire renforcée, notamment entre les pays les plus actifs en la matière (France, Royaume-Uni, Allemagne) devraient en agréger d'autres (Espagne, Italie, Suède en particulier) pour enfin approcher l'équivalent européen du département de la défense américain.

B. RÉEXAMINER L'ENSEMBLE DE LA FISCALITÉ DE LA RECHERCHE

Les encouragements fiscaux dans ce domaine sont-ils suffisants ?

On en doute .

Il serait souhaitable que le Gouvernement réexamine l'ensemble des encouragements fiscaux à la recherche et à la diffusion de nouvelles technologies , afin de déterminer s'ils sont toujours adaptés aux défis de la mondialisation .

Et, en particulier, mais de façon non limitative :

- la fiscalité des entreprises à croissance rapide, aussi bien afin d'éviter les échecs qui peuvent l'être que pour réduire le risque de rachat des Start-up qui réussissent par des entreprises étrangères.

- le soutien aux entreprises qui dotent leurs salariés d'un équipement informatique à domicile - c'est un point essentiel ,

- et l'adéquation des taux de TVA aux expérimentations menées sur les nouvelles technologies. On sait que « quand le bâtiment va, tout va », mais il aurait peut-être été plus fructueux, en termes de développement futur, d'appliquer la baisse de TVA intervenue dans ce domaine aux expérimentations menées dans le domaine des nouvelles technologies et aux services et téléactivités utilisant l'Internet. En essayant de promouvoir sur ce point une harmonisation des fiscalités européennes.

C. IMPLIQUER TOTALEMENT LES POUVOIRS PUBLICS DANS LA DIFFUSION DES USAGES SOCIAUX DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET DES TELECOMMUNICATIONS

1. l'introuvable société de l'information

Le retard mis à élaborer, et surtout à présenter au Parlement le projet de loi sur la société de l'information repousse d'autant la diffusion des usages de cette société, alors même que certains des instruments, comme le courrier électronique, sont largement disponibles.

Cet état de choses est regrettable .

Les pouvoirs publics nationaux et locaux doivent systématiquement montrer l'exemple dans l'utilisation de ces technologies.

L'exemple de ce qui vient d'être validé sur certains formulaires administratifs doit être généralisé dans toutes les relations au sein des pouvoirs publics centraux et décentralisés, à commencer par les marchés publics.

A un coût très faible, cette démarche aurait un effet d'entraînement fort.

2. les « hussards du numérique »

De même il conviendrait, par tous les moyens possibles (Bus Internet, cybercafés, recherches de liens avec les milieux associatifs, envois de missionnaires dans les collèges et lycées, utilisation beaucoup plus massive des chaînes de service public de télévision) de sensibiliser beaucoup plus largement les Français aux usages de l'Internet et de l'Internet à haut débit.

3. diminuer le prix de l'accès à l'Internet à haut débit

Compte tenu des difficultés actuelles de la mise en concurrence dans ce domaine, il serait hautement souhaitable que l'État - actionnaire majoritaire de l'opérateur historique - seul à développer une couverture de 80 % de la population à un horizon de deux ans sur l'Internet à haut débit - pèse rapidement sur son offre (300 F mensuels actuellement) afin d'aboutir à une offre inférieure à 200 F mensuels, comme c'est le cas dans la plupart des pays européens .

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page