B. LES CENTRES DE RECHERCHE

1. Les établissements publics nationaux

a) L'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS)

L'INRETS est un établissement public à caractère scientifique et technologique, sous la double tutelle du ministère de la recherche et du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Il intervient essentiellement dans le champ des transports terrestres.

Organisme pluridisciplinaire qui rassemble des compétences variées, l'institut est structuré en unités de recherche qui combinent à la fois un champ de recherche et une approche pluridisciplinaire.

La sécurité routière est l'un des quatre axes stratégiques définis à l'INRETS, aux côtés de l'aide à la conduite, des réseaux de transport et services et de la durabilité et l'environnement.

Quatre domaines de recherche sont identifiés pour la sécurité routière :

1 - Connaissance du fonctionnement du système routier et de ses composants (homme, véhicule, infrastructure) ;

2 - Facteurs et conséquences des accidents de la route ;

3 - Biomécanique et protection des usagers des transports ;

4 - Conception et évaluation des politiques de sécurité routière ; éducation, réglementation, actions incitatives, sanctions.

L'INRETS est composée de 17 unités de recherche implantées dans quatre centres : Arcueil, Lyon-Bron, Marseille-Salon de Provence, Villeneuve d'Ascq. Seuls les trois premiers centres agissent réellement dans le domaine de la sécurité routière, le centre de Villeneuve d'Ascq étant spécialisé dans le secteur des transports terrestres.

(1) Le centre d'Arcueil

Le centre d'Arcueil accueille le siège de l'INRETS.

Ce centre comprend également le département d'évaluation et de recherche en accidentologie (DERA) qui a vocation à développer des problématiques de recherche sur l'accident, le risque routier et l'action de sécurité routière.

Il dirige également le Laboratoire sur les interactions véhicules-infrastructure-conducteurs (LIVIC) en partenariat avec le laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC). Ce laboratoire mène des recherches théoriques et appliquées, des réalisations de prototypes destinés à être embarqués à bord de véhicules ou disposés sur l'infrastructure, des expérimentations sur pistes d'essais. Le LIVIC travaille notamment à l'approfondissement des scenarii de route automatisée.

(2) Le centre de Lyon-Bron

Le centre INRETS de Lyon-Bron regroupe 140 spécialistes de compétences très diverses : ingénieurs, techniciens, médecins, psychologues, informaticiens... Structurés en équipes pluridisciplinaires, ils conduisent des recherches dans les domaines de la sécurité, de la qualité du transport, de l'ingénierie du trafic et de l'environnement. Le centre compte cinq unités de recherche :

- LMBC : laboratoire de biomécanique et mécanique des chocs ;

- LESCOT : laboratoire ergonomie et sciences cognitives pour les transports ;

- LICIT : laboratoire d'ingénierie circulation transport ;

- LTE : laboratoire transports et environnement ;

- UMRETTE : unité mixte de recherche épidémiologique, transports, travail, environnement.

En matière de sécurité routière, ce sont essentiellement le LMBC et l'UMRETTE qui mènent des expérimentations.

(a) Le laboratoire de biomécanique et mécanique des chocs (LMBC)

Le LMBC, laboratoire qui compte 25 permanents, travaille dans le domaine de la sécurité secondaire 1 ( * ) . Il mène des recherches sur la caractérisation biomécanique de l'être humain et sa modélisation, sur le comportement au choc des structures de véhicules et sur les performances des dispositifs de protection.

Les thèmes de recherche sont les suivants : comportement dynamique au choc des tissus et organes, mécanismes de survenue des blessures et tolérance humaine au choc, capacité des matériaux à absorber l'énergie, comportement au choc, résistance et agressivité des structures des véhicules, biofidélité des mannequins mécaniques d'essais de chocs, modèles numériques de l'être humain pour la simulation du comportement au choc et la prédiction des blessures, efficacité des dispositifs de protection en fonction des caractéristiques des personnes à protéger et de leur environnement proche, interaction confort/sécurité.

En terme de méthodologie , le LMBC procède par :

- reconstitution d'accidents en vraie grandeur avec véhicules instrumentés et mannequins d'essais de chocs en lieu et place des victimes ;

- essais de chocs sur sous-systèmes (essais portant sur des équipements de véhicules ou sur les faces avant des véhicules) ;

- essais statiques et dynamiques de caractérisation ;

- expérimentations biomécaniques sur pièces anatomiques et sur sujets volontaires ;

- simulations numériques ;

- enquêtes et observation des comportements.

Pour ses recherches, le LMBC dispose d'importants moyens matériels : catapultes pour simuler les chocs automobiles, moyens d'enregistrement des paramètres, mannequins d'essais de choc, moyens informatiques et logiciels de calcul scientifique et de simulation.

L'essentiel de l'activité du LMBC se déroule dans le cadre de contrats avec des industriels du secteur des transports (Renault S.A, Renault V.I, PSA, GIE PSA-Renault, etc..) avec la communauté européenne (projets DG VII : ADRIA, COMPATIBILITY, DG XII : CREST, HUMOS, SID-2000) ou avec les pouvoirs publics (PREDIT) 2 ( * ) .

A titre d'exemple, le LMBC collabore avec Renault Véhicules Industriels à la conception d'un dispositif qui, placé à l'avant du poids lourd, absorbe une partie de l'énergie en cas de choc frontal avec un véhicule léger.

(b) L'unité mixte de recherche épidémiologique, transports, travail, environnement (UMRETTE)

L'UMRETTE est une unité mixte de l'INRETS et de l'Université Claude Bernard Lyon I (UCBL). Elle a notamment pour mission d'améliorer par des études épidémiologiques, en particulier dans le domaine des transports, la connaissance et l'évaluation de la traumatologie accidentelle et de sa prévention 3 ( * ) .

Ainsi, dans le cadre de son travail en accidentologie routière, elle assure l'animation scientifique et l'exploitation du registre des accidentés du département du Rhône en collaboration avec l'ensemble des structures de prise en charge sanitaire des victimes de la route (SAMU, SMUR, pompiers, services de soins, etc...). Ce registre permet la réalisation d'études épidémiologiques sur l'ensemble des usagers.

Elle mène des travaux sur la santé de l'usager et l'insécurité routière (projet SANU). Il s'agit notamment de mieux appréhender les enjeux liés au vieillissement de la population, à la consommation de drogues et de médicaments. La loi du 18 juin 1999 a introduit le dépistage de ces substances en cas d'accident de la route. Le laboratoire mène depuis une étude épidémiologique en collaboration avec le Centre européen d'études de sécurité et d'analyse des risques (CEESAR) dont les résultats seront rendus publics en 2004.

Elle travaille aussi sur le lien entre accidentologie et infrastructure autoroutière , en accordant une attention particulière à l'efficacité des équipements de sécurité lors des sorties de chaussée.

Il faut enfin noter que l'INRETS de Lyon-Bron dispose d'une filiale de droit privé, le laboratoire INRETS d'équipements de la route (LIER) installé sur la piste d'essais de Satolas. Ce laboratoire réalise un chiffre d'affaire de 2,4 millions d'euros par an, ce qui correspond à 110 essais par an. Il s'agit d'un laboratoire de référence au niveau européen.

En conclusion, le centre de Lyon-Bron de l'INRETS, que votre rapporteur a visité, regroupe d'importants moyens humains et matériels de recherche qui en font une référence européenne en matière de recherche en sécurité routière.

(3) Le centre de Marseille-Salon de Provence

Ce centre regroupe deux unités de recherche : le laboratoire de biomécanique appliquée, organisme partagé avec l'université de la Méditerranée (LBA-UMR T 24) à Marseille et le département mécanismes d'accidents (MA) à Salon-de-Provence.

(a) Le laboratoire de biomécanique appliquée (LBA)

Le laboratoire de biomécanique appliquée (LBA) développe des programmes de recherche autour de la connaissance des bases anatomiques du corps humain, de sa caractérisation biomécanique et de la tolérance des structures corporelles aux chocs . Il s'agit de parvenir à modéliser le corps humain dans différentes postures (debout, assis..) à des fins de simulation des mécanismes lésionnels.

L'unité regroupe pour partie des médecins hospitalo-universitaires et pour l'autre des chercheurs et techniciens de l'INRETS. Les domaines d'action sont l'étude des bases anatomiques des mécanismes lésionnels à partir des bases de données accidentologiques en collaboration avec le département mécanismes d'accidents, la caractérisation et la tolérance de l'être humain au choc, la modélisation et la simulation numérique du comportement humain au cours d'accidents réels et la validation de ces modèles à l'aide d'expérimentation avec sujets d'anatomie.

Le laboratoire dispose d'une rampe de lancement, de machines d'essais, des systèmes d'acquisition de mesures (capteurs), de moyens cinématographiques, de salles de radiologie et de dissection et de matériels informatiques.

(b) Le département mécanismes d'accidents (MA)

Le département mécanismes d'accidents (MA) regroupe une équipe pluridisciplinaire de spécialistes en psychologie, mécanique et dynamique du véhicule, génie civil et urbanisme, en droit et sciences politiques. L'activité scientifique porte sur l'étude des mécanismes générateurs d'accidents et des processus de dysfonctionnement du système de circulation pour déboucher sur l'analyse de l'insécurité routière et proposer des aides à la conception (aménagement, véhicule) et à la formation (concepteurs, aménageurs, usagers).

Le département travaille notamment au projet intégration de la sécurité dans la gestion urbaine (SEGUR) et à la contribution de la psychologie et de l'ergonomie cognitives à la coopération homme-machine dans les transports (COPEC).

b) Le Laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC)
(1) La sécurité des usagers des infrastructures routières, une des missions prioritaires du LCPC

Comme l'INRETS , le laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC) est un établissement public à caractère scientifique et technologique, sous la double tutelle du ministère de la recherche et du ministère de l'équipement, des transports et du logement

L'activité du LCPC est complémentaire de celle de l'INRETS. Le laboratoire est en effet davantage orienté vers la recherche sur l'infrastructure. Le thème de la sécurité routière apparaît moins clairement dans les attributions du LCPC que dans celles de l'INRETS, mais une grande partie de ses activités, notamment en termes d'étude de la « vie » des chaussées et des ouvrages d'art, a des incidences directes sur la sécurité routière.

Le LCPC organise ses équipes de recherche autour de quatre grands domaines liés aux infrastructures de transport : les routes, les ouvrages d'art, la géotechnique et les risques naturels, et le domaine urbain.

Le LCPC dispose d'un programme de recherche « infrastructures et sécurité routière » qui a pour objet de maîtriser le rôle de l'infrastructure dans la sécurité de la route . D'une part, il s'agit de rechercher les caractéristiques de la route ayant une incidence déterminante sur les performances du transport routier. D'autre part, il s'agit de permettre des échanges continus entre infrastructures et exploitants, infrastructures et équipements, infrastructures et conducteurs... Selon les termes mêmes du laboratoire, « c'est un domaine de forte innovation, en particulier dans le domaine de la route automatisée et des systèmes d'assistance à la conduite, en relation directe avec la vie quotidienne des citoyens . »

De fait, le LCPC développe des matériels de simulation de conduite. Une convention de recherche lie depuis 2000 le LCPC et la société Oktal SA : son but est de rendre possible la réalisation et l'exploitation de maquettes virtuelles réalistes, afin de garantir la visibilité et l'ambiance lumineuse sur simulateur de conduite. Le LCPC développe ainsi des outils de calcul et de visualisation qui sont utilisés dans des applications liées à la sécurité routière : études de visibilité routière, dimensionnement d'installations d'éclairage, etc. Une maquette virtuelle du tunnel de Fourvières a ainsi été réalisée.

Autre exemple de l'implication du LCPC dans la recherche en sécurité routière : un laboratoire texture-adhérence (LTA) a été créé en début d'année 2001 au sein du LCPC pour développer les recherches sur la prédiction de l'adhérence pneumatique-chaussée en fonction des états de texture du revêtement de la chaussée et disposer de moyens de mesure et d'analyse.

Liste des opérations dans le comité de programme « infrastructures et sécurité routière » du LCPC :

- sécurité des itinéraires ;

- aides à la conduite ;

- adhérence ;

- percevoir ;

- exploitation ;

- limiteur adaptant à la vitesse limitée (LAVIA) ;

- moyens d'essais pour la route intelligente et la sécurité routière.

(2) Les modalités d'action du LCPC

Les travaux du LCPC sont réalisés suivant les orientations suivantes :

- construire des modèles, réaliser des tests et des expérimentations in situ sur le comportement de l'ensemble formé par le conducteur, le véhicule et ses aides à la conduite dans différentes configurations d'infrastructure et dans différentes conditions climatiques ;

- contribuer à la mise au point des systèmes de gestion de la circulation, avec en priorité des travaux sur l'adaptation des capteurs de trafic existants, la mise au point de nouveaux capteurs et sur les systèmes de transmission à faible portée, ainsi qu'à la mise au point et l'évaluation d'aides à la conduite ;

- appréhender et bâtir les principes et dispositifs capables de communiquer au couple formé par le conducteur et les dispositifs d'aide à la conduite, l'adhérence que peut mobiliser un véhicule en déplacement ;

- poursuivre les recherches sur la lisibilité et la visibilité de la route (éclairage, signature horizontale et verticale) y compris en situation difficile (nuit, brouillard, pluie, projections d'eau, circulation) ;

- approfondir la compréhension des phénomènes physio-chimiques observés à la surface des chaussées en période hivernale afin de les modéliser et d'élaborer les procédures et traitements judicieux assurant la mobilité et la sécurité des voyageurs en hiver.

Parmi les résultats attendus, le LCPC prévoit notamment de développer :

- des démonstrateurs de fonction de localisation et d'aide à la conduite des véhicules intégrant une interaction avec l'infrastructure dans un objectif de sécurisation de la conduite ;

- des outils de prévision en matière d'exploitation hivernale des chaussées, notamment en cas de chutes de neige ;

- des briques élémentaires de simulation de vision en conditions dégradées de circulation (pluie, brouillard, etc) ;

- des méthodologies d'évaluation et de caractérisation des équipements de la route .

La mise en oeuvre progressive de technologies permettant d'intégrer les interactions entre l'infrastructure, ses équipements, les véhicules et leurs conducteurs, est pour le LCPC une des voies d'amélioration de la sécurité sur les infrastructures routières et de la qualité de leur service. Cet objectif connaît des développements significatifs aux Etats-Unis et au Japon.

Le LCPC a donc pour ambition de proposer des caractéristiques, à la construction et en exploitation, de l'infrastructure routière, adaptées à la route intelligente. Dans l'immédiat, l'objectif vise à une exploitation « plus intelligente » c'est-à-dire plus interactive, des infrastructures routières construites selon des caractéristiques actuelles.

A titre d'exemple de recherches en cours, on peut noter que très récemment, le LCPC a entrepris des recherches sur le comportement dynamique des poids lourds et leurs interactions avec les infrastructures (chaussées et ouvrages d'art) et sur les outils d'aide à la gestion et au contrôle des flots de poids lourds . Les travaux porteront notamment sur la modélisation dynamique des poids lourds, leurs impacts sur les infrastructures, le contrôle de leurs trajectoires et les détections de défaillances potentiellement dangereuses, et l'instrumentation des véhicules et de la route à mettre en oeuvre. Les recherches se déroulent dans le cadre de projets nationaux (ARCOS 2003, PREDIT) et européens (6ème PCRD, EUREKA). Le projet ARCOS 2003 est mené en partenariat avec Volvo Global Trucks, l'université de Versailles Saint-Quentin et la société SERA-CD qui a conçu un logiciel de simulation du comportement dynamique des véhicules. Un partenariat entre Volvo Global Trucks et Michelin permettra de progresser sur le thème du poids lourd du futur. Ces travaux feront appel à la simulation et seront menés sur la trajectographie, les risques de renversement, le passage en virages et carrefours giratoires etc.

Par ailleurs, le projet « Car sense », projet européen, vise à développer un système de perception évolué. Il est développé en partenariat avec l'INRETS, l'institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA), l'école nationale des mines de Paris (ENMP), les constructeurs automobiles Fiat, BMW et Renault. Ce projet est doté de 7,2 millions d'euros. Le système de perception se base sur des capteurs vision (trois caméras), un radar et un scanner laser et sur une architecture de véhicule adaptée.

2. Les services techniques centraux

La recherche en sécurité routière met en oeuvre également les services d'études techniques du ministère de l'équipement, des transports et du logemen t. Ces services agissent sur « commande » de la direction de la sécurité et de la circulation routière (DSCR) qui est une sorte de « filtre » des demandes d'études et de recherches émanant des gestionnaires de la route (sociétés concessionnaires d'autoroutes, communes, départements).

a) Le SETRA

Le service d'études techniques des routes et autoroutes (SETRA) qui a pour champ de compétence l'ensemble du domaine routier (routes, autoroutes et ouvrages d'art) à l'exception du milieu urbain et des tunnels, réalise des études de sécurité.

Sa mission comprend notamment l'exploitation des données d'accidents, la compréhension des mécanismes d'accidents, l'analyse statistique des accidents, l'analyse des infrastructures et des comportements . Le SETRA est également chargé de la définition et des conditions de mise en oeuvre des mesures assurant la sécurité des routes : organisation des déplacements, réglementation de la circulation, conception des routes, gestion des routes.

Les principaux objectifs du SETRA jusqu'en 2005 dans le champ de la sécurité routière sont les suivantes :

- développer les compétences des services pour mener de l'analyse statistique et des diagnostics de sécurité par des actions d'assistance et de formation ;

- actualiser l'étude « sécurité des routes et des rues » ; développer les guides techniques pour la prise en compte de la sécurité dans l'entretien au quotidien et dans les études d'aménagement ;

- en liaison avec le LCPC, élaborer une méthodologie de diagnostic d'itinéraire ;

- évaluer les programmes régionaux d'action de sécurité (PRAS) et fournir les outils d'évaluation pour cela ;

- travailler avec les acteurs de la recherche : accord cadre SETRA-INRETS, programme commun SETRA-LCPC.

b) Le CERTU

Le centre d'étude sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions (CERTU) réalise ou fait réaliser des études dans le réseau du ministère de l'équipement, en partenariat avec les collectivités et les associations. La vocation du CERTU n'est pas la recherche pure mais plutôt la capitalisation des savoirs et des savoir-faire sous la forme de rapports de synthèses thématiques, d'outils et de guides méthodologiques .

Le CERTU participe à l'animation du domaine « sécurité routière » au travers de sa présence au sein du groupe « déplacements, signalisation » de l'Association des ingénieurs des villes de France (AIVF), et du réseau des cellules départementales d'exploitation et de sécurité (CDES) des DDE. L'effort du CERTU porte principalement sur l'animation des réseaux d'acteurs locaux que sont les DDE d'une part, les communes et leurs groupements d'autre part. Dans les deux cas, il s'agit de promouvoir une prise en compte transversale de la sécurité dans les diverses compétences des organismes et pas seulement au travers du filtre habituel de l'action en matière de voirie.

A titre d'exemple, le CERTU a publié en 2001 un rapport sur les modes et les motifs de déplacement des personnes âgées de plus de 65 ans ainsi qu'un rapport sur l'insécurité routière des piétons âgés à travers le système mobilité, urbanisme, réseau. La sécurité des infrastructures a fait l'objet de deux études, l'une portant sur la comparaison des principaux manuels européens d'aménagements cyclables, l'autre sur la problématique relative à la gestion de priorité sur les voies rapides urbaines (VRU). L'activité d'analyse et d'évaluation des politiques a donné lieu à publication de documents consacrés à l'étude dans différents pays des systèmes automatisés de contrôle-sanction des infractions routières, aux politiques cyclables en Europe et à la détection des franchissements de feux au rouge.

3. La recherche universitaire

Le milieu universitaire est impliqué dans de nombreux projets de recherche en sécurité routière , mais il n'est pas en France le moteur des recherches.

La France a fait le choix de centres de recherche en sécurité routière rattachés à l'Etat (INRETS, LCPC) ou aux constructeurs (LAB, CEESAR) alors que dans d'autres pays comme le Japon, l'Allemagne ou les Etats-Unis, des centres de recherche dépendent directement de l'université. Dans les programmes européens, les universités de Grande-Bretagne ou d'Allemagne sont très présentes.

Il ne faut pas négliger l'apport des universitaires, qui est essentiel en matière de sécurité routière . Nombre de recherches sont d'ailleurs développées dans le cadre de thèses. Cependant, le fait que le milieu universitaire soit associé mais non initiateur des recherches explique peut-être les difficultés à recruter certains chercheurs dans les domaines de la psychologie et de la sociologie de la sécurité routière et le problème de renouvellement des chercheurs actuellement dans les centres de recherche publique, notamment à l'INRETS.

4. Les constructeurs privés

a) Le laboratoire d'accidentologie, de biomécanique et d'étude de comportement humain (LAB)

La France compte de grands constructeurs automobiles qui consacrent d'importants moyens à la recherche en sécurité routière.

L'effort des constructeurs en faveur de la recherche en sécurité routière passe essentiellement par le Laboratoire d'accidentologie, de biomécanique et d'étude de comportement humain (LAB) organisme financé en commun par PSA Peugeot-Citroën et Renault. Les recherches sont nombreuses, sur le plan national, communautaire et international, de même que les études appliquées, puisque plusieurs centaines d'ingénieurs travaillent sur les sujets de sécurité.

Le LAB mène un travail essentiel en matière de sécurité routière. Il conduit des études détaillées d'accidents (EDA) qui permettent de reconstruire des accidents réels et d'en analyser tous les aspects. Il dispose également d'une base de donnée unique en Europe, contenant des informations sur 10.000 véhicules et 19.000 victimes d'accidents.

Le principal objectif des enquêtes détaillées d'accident (EDA) est de mieux comprendre l'enchaînement des faits dans le temps et dans l'espace routier ainsi que la relation de causalité entre les différents événements, c'est-à-dire de reconstituer a posteriori le scénario de l'accident. Plus de 500 accidents ont été répertoriés à ce jour.

Les études détaillées d'accidents sont donc une des sources essentielles d'information en matière d'accidentologie routière, y compris pour les pouvoirs publics.

L'étude détaillée d'accidents (EDA)

Les fichiers issus des procès-verbaux ne permettent pas de répondre à toutes les questions sur l'accidentologie routière. L'objectif de l'EDA est donc de développer les connaissances sur les mécanismes générateurs des accidents et sur les processus de dysfonctionnement du système routier.

Dans les études détaillées d'accidents, chaque accident corporel fait l'objet d'une analyse détaillée :

- relevé des déformations de structure des véhicules accidentés,

- comparaison avec les dommages subis lors des essais réalisés aux centres techniques des deux constructeurs,

- établissement de bilans lésionnels,

- description et reconstitution des mécanismes de ces lésions,

- évaluation de l'efficacité des nouveaux systèmes de sécurité pour les véhicules les plus récents,

- évaluation de la diminution du risque lésionnel apporté par tel ou tel dispositif.

La stratégie de l'EDA repose sur le recueil du maximum de données centrées sur le déroulement de l'accident, sur la scène même de l'accident, par une équipe pluridisciplinaire, intervenant en urgence, en coordination avec les secours. Les informations recueillies portent d'abord sur le conducteur (par entretiens), le véhicule et l'infrastructure (relevé de traces, plans, photos de déformations). Puis, la seconde étape porte sur l'itinéraire, les caractéristiques de la route, le contrôle technique du véhicule, et les lésions et dommages corporels. Le tout donne lieu à un archivage des données sur support informatique.

Les EDA ont permis l'émergence du concept de scenario type d'accident, qui rend compte d'accidents homogènes du point de vue des phénomènes mais également du point de vue des perspectives de prévention. Cela a permis de définir des scenarios types d'erreur humaine et de souligner le poids des problèmes cognitifs liés à la compréhension des situations routières (diagnostic) et à l'anticipation de leur évolution (pronostic).

De nombreuses exploitations des EDA ont été réalisées, sur les aides à la conduite, le comportement dynamique du véhicule, les pertes de contrôle en virage, la visibilité dans les accidents nocturnes.

En outre, les connaissances acquises par les EDA servent de support à la formation initiale, à la formation professionnelle et continue ou à l'occasion d'expertises.

Source : l'étude détaillée d'accidents - INRETS - mars 1999

Pour la recherche en sécurité active , le LAB cherche à améliorer la connaissance des accidents :

- leurs causes,

- leur déroulement,

- l'enchaînement des événements et leurs conséquences,

- les conditions de défaillances.

Ces travaux entrent dans le cadre du programme national « véhicule et sécurité routière » mené en coopération avec l'INRETS. Cette démarche est reprise dans le programme européen : « European Accident Causation Survey » (EACS) soutenu par l'association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA) et l'Union européenne.

En biomécanique, et en sécurité passive , le LAB travaille plus particulièrement sur les thèmes suivants :

- les lésions du cou en choc arrière,

- les lésions du pied et de la cheville,

- l'étude du déploiement des sacs gonflables,

- la tolérance du thorax face à une action combinée de la ceinture et du sac gonflable,

- l'effet de l'âge sur les tolérances physiques aux chocs,

- le comportement des piétons en cas de choc.

En conclusion, le LAB, que votre rapporteur a visité, mène une mission essentielle pour la sécurité routière, qui peut même être considérée comme le principal facteur actuel d'amélioration des performances de la sécurité routière.

b) Le Centre européen d'études de sécurité et d'analyse des risques (CEESAR)

Le CEESAR est une structure associative réalisant des études accidentologiques, de biomécanique et de physiologie de la conduite pour différents partenaires, notamment les constructeurs automobiles, les équipementiers, des assureurs, les pouvoirs publics .

Ce centre de recherches réalise des travaux qui ne peuvent être réalisés directement par les partenaires industriels, notamment les recherches expérimentales sur le cadavre dans le cadre du don du corps pour la science. En tant qu'organisme de recherche, le CEESAR a accès à des informations confidentielles, comme les dossiers médicaux. Il est implanté sur trois sites : Nanterre, Evreux et Amiens.

c) Les autres partenaires privés

Les autres acteurs de la recherche pourraient être les assureurs, mais ils jouent un rôle assez faible.

Les assureurs jouent un rôle en matière de sécurité routière, mais essentiellement en termes d'information et de prévention, davantage que pour la recherche.

Des projets de recherche importants sont toutefois développés grâce à l'appui des partenaires privés. Certaines sociétés et mutuelles d'assurances ont créé des associations dont l'objectif est la prévention (AXA, MAIF, MACIF, MAAF) et ont désigné des correspondants locaux, intégrés au réseau local sécurité routière.

Une convention triennale a été signée le 1 er juillet 1998 avec les trois familles de l'assurance (FFSA, GEMA, GROUPAMA) qui prévoit d'affecter 0,5 % du montant des primes d'assurance responsabilité civile obligatoire perçues par les entreprises d'assurance à des actions pour améliorer la sécurité routière.

Il est cependant vrai que l'implication des assureurs en France dans le thème de la recherche en sécurité routière est très faible, hormis le rôle non négligeable de rares fondations (cf. encadré) et surtout bien moindre que dans d'autres pays, notamment aux Etats-Unis.

Ainsi, à titre de comparaison, The Insurance Institut for Highway Safety et the Highway Loss Data Institut sont deux organismes de recherche indépendants financés par les assureurs automobiles aux Etats-Unis depuis trente ans. Ils ont ouvert en 1992 leur propre centre de recherche sur les véhicules ( vehicule research center ) qui réalise des études et crash-tests. Les instituts mettent à disposition du public de nombreuses études concernant les comportements des conducteurs (port de ceinture, utilisation du téléphone portable, etc) et les résultats de leurs crash-tests.

Les projets de recherche financés par la fondation MAIF

La fondation de la Mutuelle des Instituteurs de France (MAIF) finance des recherches sur la sécurité routière avec plus particulièrement des études sur le comportement du conducteur, et notamment des jeunes et des personnes âgées. Elle finance également des études techniques et de la formation.

Les projets financés font appel à des partenariats divers : les organismes liés aux constructeurs (LAB, CEESAR), le CNRS, les instituts de recherche publics (INRETS), les universités etc.

La liste des projets qui ont été soutenus par la fondation MAIF est impressionnante : près d'une quarantaine au total. Les projets sont toutefois d'ampleur variable, nombre d'entre eux sont achevés (17 sur 39) et le financement associé est variable : certains projets associés à des thèses sont très peu coûteux tandis que d'autres requièrent jusqu'à 200.562 euros de financement.

Parmi les projets en cours les plus importants, on peut noter que le projet le plus coûteux est intitulé « méthodologie d'évaluation des interfaces conducteur-véhicule par analyse des modifications de comportement du conducteur ». Il s'agit d'analyser l'impact d'un système embarqué sur la réalisation de la tâche de conduite et ses conséquences sur la sécurité et d'obtenir une meilleure connaissance théorique du comportement du conducteur. Le projet, d'un coût global de 1,3 million d'euros, est réalisé en partenariat avec un laboratoire de Renault-PSA et devrait s'achever en juin 2004.

Les autres projets en cours d'importance concernent :

- les personnes âgées avec notamment un projet d'évaluation des capacités de conduite des personnes âgées en partenariat avec le CNRS et l'université Louis Pasteur de Strasbourg. Le projet, d'un coût global de 205.022 euros, avec un financement MAIF de 111.975 euros, doit s'achever en mai 2003 ;

- le comportement des véhicules , avec notamment un projet concernant la biomécanique des chocs et la prévention des lésions cérébrales. Il s'agit de mieux protéger la tête en cas de choc grâce à une modélisation numérique de la tête humaine et de définir des « limites de tolérance » aux chocs. Le projet, d'un coût global de 148.142 euros, avec un financement MAIF de 93.900 euros, doit s'achever courant 2003, il est réalisé en coopération avec le laboratoire des systèmes biomécaniques de l'université Louis Pasteur de Strasbourg ;

- l'efficacité de la formation , avec notamment un projet concernant l'estimation du risque relatif d'implication accidentelle des jeunes conducteurs ayant suivi l'apprentissage anticipé de la conduite (AAC). Ce projet est financé intégralement par la fondation MAIF pour 74.555 euros. Réalisé en partenariat avec le CEESAR, il vise à évaluer l'incidence réelle de l'apprentissage anticipé de la conduite sur le comportement et l'accidentologie des jeunes conducteurs.

Enfin, dans le cadre d'un programme de prévention des accidents de la route financé par la MAIF, le centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP, CNRS-ministère de la justice) a été chargé d'étudier les comportements des conducteurs et des témoins impliqués dans des accidents mortels de la route.

* 1 On rappellera que la sécurité primaire consiste à éviter l'accident, la sécurité secondaire à développer les protections en cas d'accident, et la sécurité tertiaire à analyser les accidents.

* 2 Ces programmes sont détaillés dans le titre II du présent chapitre consacré à la programmation scientifique et financière de la recherche.

* 3 Ses autres missions, qui ne concernent pas directement la sécurité routière, sont l'étude des interactions entre transport et environnement et des relations entre transports, santé et conditions de travail.

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