III. DJIBOUTI : ATOUTS STRATÉGIQUES, CARENCES ÉCONOMIQUES

La situation géographique très privilégiée de Djibouti a été encore renforcée par le nouveau contexte stratégique qui prévaut depuis le 11 septembre 2001. Ainsi, les troupes françaises stationnées dans ce pays de longue date, et maintenues après l'indépendance en 1977, grâce à un accord de défense signé la même année, ont été rejointes, en 2002, par un millier de soldats américains, ainsi que par des éléments allemands et espagnols.

Les tensions qui opposent historiquement la communauté afar, soutenant la rébellion du FRUD (Front pour la Restauration de l'Unité et de la Démocratie), et le gouvernement d'origine issa n'ont cependant pas empêché la tenue d'élections générales le 10 janvier 2003. Leur résultat est certes contesté par l'opposition, mais dans un climat moins tendu que lors des précédentes consultations.

Il faut regretter que les atouts géopolitiques et économiques de Djibouti ne bénéficient guère à la population.

A. DES RELATIONS BILATÉRALES ÉTROITES, TANT POLITIQUES QU'ÉCONOMIQUES

1. Une présence française ininterrompue depuis la fondation du territoire

La présence française dans la région remonte à la signature, le 11 mars 1862, d'un traité d'amitié entre la France et les trois sultans qui règnent sur ce territoire.

Les possibilités de mouillage existant à Obock sont alors cédées à la France.

En 1884, la France marque son intérêt pour cette zone en y envoyant le gouverneur Lagarde, qui fonde la ville de Djibouti. Cet intérêt est affirmé par la création, en 1896, du territoire de la Côte française des Somalis, et le début de la construction du chemin de fer reliant Djibouti à Addis Abeba, dont l'exploitation débute en 1917 .

En 1946, la Côte française des Somalis reçoit le statut du territoire de l'Union française ; le référendum de 1967 confirme cette appartenance à la France, malgré de premières revendications indépendantistes, et adopte la dénomination de « territoire français des Afars et des Issas ».

En 1977, un nouveau référendum conduit à l'indépendance sous le nom de République de Djibouti . Des élections législatives conduisent à l'investiture d'Ahmed Dini (Afar) comme Premier ministre, et à la désignation d'Hassan Gouled Aptidon (Issa) comme Président de la République, fonction qu'il occupe sans interruption jusqu'à son retrait de la vie publique et l'élection, en 1999, du Président Ismaël Omar Guelleh (de la même ethnie).

La vie politique du territoire est, depuis l'indépendance, marquée par une constante tension entre les deux principales communautés, afar (environ 40 % de la population) et issa (environ 60 %).

Cette opposition a débouché sur un conflit armé entre 1991 et 1994, qui a opposé le FRUD afar et le gouvernement issa. Le premier accord de paix de 1994 n'a pas totalement fait taire les armes, et a été suivi de l'accord-cadre de février 2000, aux dispositions plus globales. En effet, cet accord prévoit le désarmement volontaire des combattants du FRUD, leur réintégration dans la vie civile, l'introduction du multipartisme et une décentralisation du pouvoir.

Les élections générales du 10 janvier 2003 ont donc été organisées dans un climat de liberté d'expression jamais connu auparavant, et leurs résultats ont manifesté une nette percée de l'opposition, même si le mode de scrutin (liste majoritaire à un tour) a permis à la majorité sortante de remporter les 65 sièges de l'Assemblée. Cette émergence de l'opposition (37 % des voix dans la ville de Djibouti) traduit sans doute le désarroi d'une population qui ne bénéficie d'aucune retombée des masses financières que le Gouvernement tire de l'activité portuaire et de la présence des troupes étrangères sur son sol.

2. Un fort appui économique de la France, insuffisant pour apurer la situation financière du gouvernement

La France est le premier bailleur de fonds de Djibouti , en terme de coopération civile . Le territoire a ainsi bénéficié en 2002 d'une enveloppe de 12,9 millions d'euros, permettant notamment la rémunération de 103 assistants techniques.

L'application de l'accord de paix est soutenue par des actions de réhabilitation des zones afar (0,76 millions d'euros en 2001 financés par le Fonds Social de Développement (FSD).

De nombreuses aides budgétaires ont également été consenties au profit du territoire , dont 1,8 million d'euros en 2001 et 6 millions d'euros en 2002. Ce soutien constant n'a pas permis, cependant, d'enrayer l'émergence d'une crise des finances publiques , dont la principale manifestation se traduit par un retard constant dans le versement des traitements de la fonction publique. La masse d'arriérés se monte aujourd'hui à environ cinq mois de salaire.

Ce constat est préoccupant car il témoigne d'un manque de maîtrise des disponibilités financières aux mains du gouvernement djiboutien.

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