E. DE NOUVELLES PROPOSITIONS POUR UNE OPTIMISATION DU SYSTÈME D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Lorsque l'Etat a appelé les collectivités territoriales et locales à co-financer, dans le cadre du schéma U2000, les mesures prises en faveur de l'enseignement supérieur à hauteur au moins de 50 %, les autorités locales ont multiplié les efforts afin de favoriser l'accès des jeunes bacheliers à l'enseignement supérieur sans quitter leur ville ou alors bénéficier de la proximité d'un pôle universitaire.

Aujourd'hui, face à la semi-réussite de cet essaimage des équipements d'enseignement supérieur sur le territoire national, les élus - notamment ceux des villes moyennes - souhaitent des localisations plus thématiques et technologiques en adéquation avec les activités industrielles locales.

En parallèle, l'université en réseaux peut favoriser l'émergence de réseaux de villes susceptibles de créer un climat propice incitant les responsables de l'enseignement supérieur à concevoir l'organisation d'une même université sur plusieurs sites. Cette évolution se rattache à l'idée de l'indispensable ouverture des universités françaises sur « d'autres partenaires français ou étrangers, au niveau européen comme au niveau régional avec les organismes de recherche comme avec les entreprises » 28( * ) . Pour exemple l'université du Littoral regroupe les villes de Dunkerque, Calais, Boulogne-sur-mer, Saint-Omer ; celle d'Artois regroupe Douai, Lens, Béthune et Arras. En Italie, l'Université de Bologne est, plus encore, un exemple en la matière.

L'université de Bologne : un modèle de décentralisation universitaire

La décentralisation de la structure universitaire commença en 1989 et visait à décongestionner l'université qui comportait à l'époque 100 000 inscrits. Les autres objectifs étaient de trouver de nouvelles ressources financières en raison du déclin des financements publics, de répondre à la dégradation des conditions de vie des étudiants et enfin d'anticiper les mesures ministérielles qui souhaitaient la création de nouvelles universités.

La décentralisation de l'université de Bologne a permis aux nouveaux pôles créés de bénéficier du prestige du label « Bologne » et ainsi de développer des centres reconnus et de qualité. Les villes quant à elles, y ont vu un avantage économique important : augmentation des activités, création de centres de recherches pouvant bénéficier au développement technologique de l'industrie, réutilisation de bâtiments inutilisés et réhabilitation des centres urbains, nouvelles sources financières, etc.

L'installation des facultés dans les nouveaux centres s'est organisée autour des activités économiques des villes : le pôle de Rimini s'est spécialisé dans le tourisme puisque sa situation géographique, sur la côte Adriatique permet à la ville de connaître une forte économie touristique. Ravenne, ville à la culture et à l'histoire millénaire, a développé essentiellement l'aspect culturel au sein de son pôle universitaire. Forli regroupe des entreprises à envergure internationale et a donc installé une école d'interprètes. Enfin Cesena a obtenu la spécialisation de l'architecture et de la psychologie.

En définitive, Bologne a décentralisé son enseignement sans en sacrifier ni la qualité, ni la variété. Cette mesure s'est avérée largement positive d'une part à cause de la stratégie globale qui unit spécificité territoriale et recherche scientifique, d'autre part à cause de l'aspect achevé de cette décentralisation : les pôles universitaires sont dans la mesure de proposer des cycles complets d'études.

Grâce à cette nouvelle structuration, une ville moyenne sur deux dispose désormais de formations universitaires, et même d'universités et de pôles universitaires de plein exercice. De plus, si le développement des formations généralistes de 1 er cycle (DEUG) marque désormais un palier dans les universités, en revanche dans les villes moyennes, ce sont de véritables filières de formations qui se structurent, avec des seconds cycles (licences, maîtrises, licences professionnelles, IUP) et même des troisièmes cycles (DESS).

La professionnalisation est pour les autorités locales l'axe majeur évident de développement de l'enseignement supérieur au niveau des villes moyennes, qu'elle soit fondée sur l'identité et les ressources des bassins socio-économiques ou sur l'existence de pôles de compétences spécifiques.

En définitive, si la carte universitaire élaborée au cours des programmes U2000 et U3M présentait une dispersion de formations identiques, il semble que depuis peu se dessine une carte de pôles spécialisés complémentaires entres les métropoles et les villes moyennes.

Aussi, la préoccupation majeure des autorités locales est de dépasser le stade de la formation pour implanter ou développer des services de recherche, essentiellement technologique, afin de compléter les filières pédagogiques, assurer aux enseignants-chercheurs des activités valorisantes et assurer le lien entre les grands sites scientifiques et les bassins d'activité économique des villes moyennes.

Ceci nous amène alors à dresser un état de la recherche en France, qui joue un rôle majeur dans la qualité des connaissances enseignées aux étudiants.

Le tableau de l'enseignement supérieur en France apparaît particulièrement contrasté .

Depuis une vingtaine d'années, alors que les effectifs étudiants ont quasiment doublé, le système universitaire s'essouffle, comme le montre la diminution de son poids au sein de l'enseignement supérieur et l'inadaptation croissante de ses locaux.

Pourtant, fait marquant de la dernière décennie, si une certaine pesanteur se fait ressentir, les universités sont le théâtre d'un lent processus de décongestion en direction de pôles secondaires naissants, à la faveur d'un essaimage - certes encore insuffisant - des formations courtes vers de nombreuses villes qui se sont vues attribuer des fonctions d'enseignement supérieur (Figure 7.1).


Mais au-delà de cette nouvelle organisation qui se manifeste par une recomposition du tissu d'établissements, marquée par un essaimage des sites fonctionnant de plus en plus en réseau, et malgré les améliorations enregistrées, le système universitaire français souffre de maux profonds . Tout d'abord, si la primauté francilienne a tendance à s'estomper, la concentration de la population étudiante y demeure trop forte . Plus grave, l'université s'avère moins attractive que les autres filières , et dotée de moyens financiers nettement insuffisants. Enfin , la France se positionne mal dans le classement international .

Reste que le fait le plus préoccupant concerne le secteur de la recherche universitaire qui s'effondre, avec des moyens insuffisants et fortement concentrés, à l'image d'une région francilienne qui conserve sa suprématie.

Il est donc urgent de rendre à notre université la place qu'elle doit tenir.

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