Rapport d'information n° 276 (2002-2003) de MM. Yann GAILLARD et Paul LORIDANT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 6 mai 2003

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N° 276

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 6 mai 2003

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur les aides publiques au cinéma en France ,

Par M. Yann GAILLARD,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, René Trégouët.

Culture.

INTRODUCTION

« La santé n'est qu'un mot, qu'il n'y aurait aucun inconvénient à rayer de notre vocabulaire. Pour ma part, je ne connais que des gens plus ou moins atteints de maladies plus ou moins nombreuses à évolution plus ou moins rapide ».

Knock. Jules Romains.

L'histoire du cinéma français est, aussi, faite de rapports. Leurs auteurs ont, le plus souvent, laissé un nom dans l'histoire politique ou administrative : rapports Petsche en 1935, Carmoy en 1936, avant-guerre 1 ( * ) , mais aussi, plus près de nous, rapports Malécot en 1977 et Bredin en 1982.

Le Parlement, de son côté, a multiplié les études d'excellente qualité, qu'il s'agisse, au Sénat, de celle de notre ancien collègue M. Jean Cluzel au nom de l'ex-Office d'évaluation des politiques publiques et des avis budgétaires de la commission des affaires culturelles ou, à l'Assemblée nationale, sous la précédente législature, du rapport de M. Marcel Rogemont pour la commission des affaires culturelles familiales et sociales.

A ces rapports officiels, il faut ajouter les multiples rapports administratifs réalisés par les corps d'inspection ou par des commissions de professionnels expérimentés réunies à l'initiative du ministère de la culture.

Le présent rapport d'information de la commission des finances, qui vient donc s'ajouter à cette liste impressionnante et qui a bénéficié du concours d'une expertise extérieure a été déposé au printemps 2003 dans un contexte très différent de celui dans lequel il avait été décidé, un an auparavant.

A cette époque, si l'on se préoccupait déjà de l'équilibre financier d'un système d'aide publique sans équivalent dans le monde, c'était parce que le cinéma français était victime de son succès. Et très naturellement, il s'agissait, avant tout, de rechercher de nouvelles sources de financement.

Aujourd'hui, la situation est tout autre ; même si la crise n'est pas ouverte, l'inquiétude porte sur les fondements mêmes de mécanismes, dont la pérennité n'apparaît plus assurée.

Le cinéma français se porte apparemment bien. Jamais le nombre de films produits et le nombre d'entrées en salles n'auront été aussi importants. Pourtant, la profession est inquiète. Parodiant Knock, cité en exergue du présent rapport d'information, on pourrait dire que, pour ce secteur, comme pour d'autres la santé est un état précaire qui ne présage rien de bon...

De fait, on peut avoir le sentiment qu'une page de l'histoire du cinéma français est en en train de se tourner car se profilent une série de facteurs de rupture, qui pourraient bien compromettre le développement du secteur.

Le premier de ces facteurs est la crise de Canal +, qui est menacé à la fois par l'éclatement de la bulle des nouvelles technologies, la saturation annoncée de son marché national et la crise économique. Quelle que soit l'issue de cette crise - et le pire n'est pas toujours sûr -, il est probable que la contribution de Canal + au cinéma français devra être réaménagée pour tenir compte de ce nouveau contexte.

Le deuxième facteur est lié à la fragilité structurelle du secteur de la distribution, qui reste le « maillon faible » de la filière cinéma, soit qu'il ait besoin de s'appuyer sur le secteur de l'exploitation, au risque de susciter des interrogations du point de vue de la concurrence ou du pluralisme, soit que sa rentabilité ne lui permette plus d'assurer convenablement la mise sur le marché d'une quantité croissante de films.

La troisième menace, apparemment lointaine, mais non moins préoccupante, tient à la nécessité dans laquelle la France va se trouver de satisfaire à l'impératif européen, qui, sous couvert de libre-circulation interne, fera objectivement l'affaire du cinéma américain.

Certes, la France bénéficie encore jusqu'en 2004 et peut-être un peu plus longtemps compte tenu de facteurs institutionnels, d'une forme de blanc-seing de la Commission européenne de Bruxelles ; mais il s'agit d'un simple sursis car, comme vos deux rapporteurs ont pu le constater à l'occasion de leur déplacement à Bruxelles, il existe une logique propre au sein de la puissante direction de la concurrence qui la pousse à remettre en cause ce qu'elle considère comme une aide d'État, incompatible avec les règles du marché commun.

Dès lors, le contexte macroéconomique caractérisé par un ralentissement conjoncturel, tout comme les incertitudes qui pèsent sur le paysage audiovisuel, conduisent moins à placer des espoirs dans de nouvelles sources de financement dont l'apport à court et moyen terme ne peut être que limité par rapport aux besoins exprimés, qu'à s'intéresser aux moyens de dépenser mieux les ressources du compte de soutien à l'industrie cinématographique.

Le présent rapport d'information s'est surtout efforcé, dans un horizon déjà bien encombré par de multiples travaux de qualité, de développer une approche spécifique, propre aux commissions des finances, pour s'inscrire dans la perspective de la nouvelle loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances et , plus généralement, de la réforme de l'État .

« Combien ça coûte ? », « les Français en ont-ils pour leur argent ? » Ces questions, sans doute triviales, sont, selon votre commission des finances, tout à fait légitimes. Du point de vue du budget de l'État, il n'y a pas d'exception culturelle : dans le domaine de la culture comme ailleurs, il faut se demander si l'argent public est bien dépensé et se donner les moyens d'apprécier l'efficacité de la dépense.

La loi organique du 1 er août 2001 précitée fait correspondre à chaque enveloppe de crédits, un responsable administratif et des indicateurs de performance. L'application de tels principes au secteur du cinéma, n'est certainement pas simple ; c'est pourtant une des lignes de force qui doit sous-tendre la refondation, nécessaire à moyen terme, du système de soutien budgétaire au cinéma français.

L'autre ligne directrice du présent rapport d'information consiste à prendre acte du fait communautaire pour considérer qu'à longue échéance le système d'aide ne se maintiendra que s'il n'est pas « le seul de son espèce » au sein de l'Union européenne. D'où la nécessité d'adapter les règles du jeu pour rendre le système français sinon transposable du moins interconnectable avec ceux en vigueur dans d'autres pays européens . La déclaration commune des organismes publics européens en charge du cinéma est un premier pas important 2 ( * ) mais qui devra être relayé au niveau gouvernemental pour faire contrepoids aux tendances naturellement très libérales de la Commission européenne de Bruxelles.

En matière de cinéma, l'exception culturelle ne sera durablement défendue contre les assauts qu'elle subit tant à l'extérieur qu'à l'intérieur -et ces derniers ne sont pas les moins violents-, que si elle prend une dimension européenne.

PREMIÈRE PARTIE : LES ENSEIGNEMENTS DES RAPPORTS D'EXPERTS

Le mécanisme du compte de soutien à l'industrie cinématographique 3 ( * ) , créé après la Libération sur la base d'une taxe spéciale additionnelle, perçue sur « les entrées-salles » 4 ( * ) , étendu ultérieurement sur les ventes aux télévisions, a connu une transformation radicale lorsque, en 1984, il a été décidé d'alimenter ce compte par une taxe sur les ressources des chaînes de télévision. Cette innovation, concurremment avec les obligations d'investissement dans la création cinématographique imposées à Canal + et aux autres chaînes en clair, s'est accompagnée d'une mutation profonde des circuits de financement, et donc du mode de fonctionnement, du cinéma français.

Ces deux novations ont sauvé le cinéma français en lui permettant de supporter la concurrence de la télévision et de survivre à la traversée du désert qui en a résulté en matière de fréquentation dans les années 80 et au début des années 90.

La télévision, après avoir failli tuer le cinéma, a ainsi constitué le moteur de son développement pendant une vingtaine d'années. C'est ce choix stratégique qui est aujourd'hui remis en cause par différents acteurs pour des raisons économiques et culturelles.

Sur le plan économique, et c'est l'enseignement essentiel que vos deux rapporteurs tirent de l'étude d'expert que votre commission des finances a commandée au printemps 2002, il est des raisons conjoncturelles et surtout structurelles pour penser que l'on entre dans une phase sinon de reflux du moins d'ajustement, qui pourrait accélérer encore les phénomènes d'intégration et de concentration croissants que l'on connaît depuis 20 ans.

Sur le plan culturel, c'est l'adossement du cinéma sur les télévisions généralistes qui est parfois contesté . La recherche d'audiences fédératrices est perçue plus nettement aujourd'hui comme un facteur de nivellement, peu stimulant pour la création. A cet égard, il faut reconnaître que le rapport remis par M. Jean-Pierre Leclerc à M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, en février 2003 participe à certains égards de cette remise en question.

Il s'agit d'un débat politique, à l'issue duquel il faudra arbitrer en deux logiques, celle de la télévision et celle du cinéma, dont on peut remarquer qu'elles ne sont aussi différentes que dans notre pays qui est, d'ailleurs un des rares à séparer aussi nettement ex ante , au niveau du projet lui-même, le film de cinéma du film de télévision.

Vos deux rapporteurs estiment, sur la base des conclusions de l'étude commandée par votre commission des finances que l'on ne peut se contenter de chercher à améliorer à la marge le fonctionnement de la première section du compte spécial du Trésor n° 902-10 sans évoquer dans le même temps une adaptation progressive de l'ensemble du système d'aide au cinéma français.

La démarche du présent rapport d'information est donc sensiblement différente de celle de M. Jean-Pierre Leclerc, chargé par M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, d'une mission d'expertise des projets de réforme de financement élaborés par le Centre national de la cinématographie.

Libres de définir les contours de leur mission, vos rapporteurs ont infléchi une approche qui, initialement axée autour des problèmes de financement des aides au cinéma, a finalement englobé la question plus générale de l'utilisation qui est faite des crédits inscrits au compte de soutien.

S'ils se sont appuyés sur l'état des lieux relativement pessimiste de l'étude du cabinet de « Réalisations et recherches audiovisuelles », qui figure en annexe au présent rapport d'information, vos deux rapporteurs ont bénéficié également des analyses et de la panoplie très complète de mesures proposées par le rapport précité de M. Jean-Pierre Leclerc.

I. L'ÉTUDE DE « RÉALISATIONS ET RECHERCHES AUDIOVISUELLES »

Le rapport du cabinet d'études « Réalisations et recherches audiovisuelles » se distingue des autres travaux qui l'ont précédé, essentiellement sur deux points : son diagnostic est plus pessimiste , les mesures -ou les réflexions- qu'il propose au gouvernement de prendre ou d'engager, sont plus radicales.

L'étude insiste sur le nouveau facteur de fragilité qui résulte de la place prise dans l'économie du cinéma par les grands groupes de communication soumis à une forte pression des marchés financiers .

L'étude souligne aussi, à juste titre, ce que la crise actuelle a de général, au-delà des difficultés de Vivendi Universal. Ce n'est pas un hasard, si ces difficultés se sont manifestées à peu près en même temps que l'effondrement du groupe Kirch en Allemagne, la faillite d'ITV Digital en Grande-Bretagne ou les contre-performances d'AOL Time Warner et de Disney aux États-unis. « Aucune de ces crises n'a été due au cinéma. Toutes auront des conséquences sur son économie ».

L'éclatement de la bulle Internet, l'échec des stratégies de la convergence fondées sur des acquisitions coûteuses, vont ainsi avoir des répercussions sur un secteur particulièrement fragile. Par un phénomène de vases communicants, l'implication des groupes de communications dans le cinéma devient désormais tributaire des déficits générés par leur endettement dans d'autres secteurs ou de l'effondrement en bourse d'une partie de leurs actifs.

A. L'ENVERS D'UNE RÉUSSITE

L'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » part d'un constat paradoxal : le cinéma français se porte bien, et pourtant tous les ingrédients sont réunis pour qu'il soit confronté, à plus ou moins court terme, à une crise majeure.

Avant d'expliciter ce paradoxe, l'étude s'efforce de replacer le cinéma français dans son contexte.

Ainsi, nous rappelle-t-elle, d'abord, que le chiffre d'affaires du cinéma français, pourtant réputé être le troisième cinéma mondial, représente, toutes exploitations confondues, à peine 2 % de celui des seules « majors » du cinéma américain.

Plus anecdotique mais tout aussi significatif, est le fait que la dépense des Français pour aller au cinéma est inférieure à celle qu'ils consacrent à l'achat de sorbets ou de crèmes glacées !

L'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » confirme aussi que, si le système d'aide français -qui mobilise à travers le recyclage du compte de soutien ou des obligations des chaînes près de la moitié de ses besoins de financement- a préservé le cinéma français du phénomène de dislocation qui a frappé les autres cinémas européens, c'est aussi au prix d'un processus de concentration qui a affecté tous les niveaux de la filière de distribution et d'exploitation des films.

1. Des succès économiques fragiles

On trouvera d'abord dans l'étude des chiffres rassurants sur l'évolution récente de la filière cinématographique . C'est ainsi que, depuis 1996, le secteur enregistre globalement une progression de 50 %.

Cette tendance très positive est confirmée par l'évolution du nombre de films sortis depuis 1996, qui témoigne de la vitalité du secteur cinématographiqu e : le nombre de films d'initiative française passe pour la période de 104 à 172 pour un financement de près de 750 millions d'euros en 2001 à comparer aux 385 millions d'euros en 1996.

Si, en dépit de ce bilan favorable, le cinéma français se caractérise par une économie fragilisée, c'est parce que son financement repose, pour plus des deux-tiers, sur la télévision.

Or, tout laisse à penser que la période faste qui a vu à la fois le développement de la télévision à péage et l'expansion des recettes publicitaires des chaînes, pourrait bien toucher à sa fin.

Un deuxième facteur de fragilité tient aux contraintes croissantes qui pèsent sur la distribution : la concentration dans le secteur de l'exploitation cinématographique comme le développement des multiplexes, ont entraîné une rotation de plus en plus rapide des films, accélérée par la mise en place des cartes illimitées.

Enfin, la nouvelle logique des marchés amplifie ces déséquilibres pour déboucher sur un marché dualiste.

La rotation accélérée des films aboutit en effet à une polarisation croissante du marché autour de deux catégories d'oeuvres : des films chers , de plus en plus chers ; des films à petit budget de plus en plus nombreux.

Chacun à leur manière, les deux types de film contribuent à la fragilité du secteur : les premiers, parce qu'ils sont de plus en plus difficiles à rentabiliser et comportent des risques importants ; les seconds, parce qu'ils sont de plus en plus difficiles à distribuer et n'ont aucune visibilité sur un marché encombré.

Dans la nouvelle économie du cinéma, l'exploitation en salle ne joue qu'un rôle limité : si elle demeure une vitrine indispensable à la valorisation commerciale des films, elle ne constitue désormais que la première séquence d'une longue chaîne d'exploitation secondaire , à laquelle la technologie numérique apporte une dimension supplémentaire.

L'étude a l'intérêt de mettre le doigt sur certaines idées reçues concernant le secteur.

Ainsi, la rentabilité du cinéma peut difficilement s'évaluer à partir de films dont les recettes ne sont connues qu'à l'issue d'une période longue, lorsque l'on est en mesure de comptabiliser l'ensemble des revenus résultant de son exploitation. En outre, la rentabilité du secteur doit s'apprécier globalement au niveau des entreprises ; or, celles-ci ont bien souvent des activités et des ressources provenant d'autres secteurs que du cinéma.

Le chiffre d'affaires des distributeurs a atteint 842 millions d'euros en 2000 marquant une progression de 60 % par rapport à 1996.

Quant à l'exploitation en salle, elle représentait en 2000 un total de 798 millions d'euros, au sein desquels l'on comptait un peu plus de 15 % de recettes de confiserie et de publicité. L'étude souligne que la part des films français dans les recettes « guichets » a tendance à diminuer sur l'ensemble de la période, puisqu'elle passe de 37,5 % en 1996 à 28,5 % en 2000.

Enfin en insistant sur la réflexion d'ensemble qui doit être entreprise sur le dispositif d'aide au cinéma, l'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » met enfin l'accent sur des éléments de contexte importants comme l'importance du déficit commercial européen en matière audiovisuelle , qui représente aujourd'hui plus de 8 milliards d'euros et a augmenté de près de 50 % en 4 ans.

2. Des phénomènes de concentration sans précédents

L'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » fournit des éléments d'information synthétiques sur les progrès de la concentration à tous les niveaux tant dans l'exploitation que dans la programmation.

Au niveau de l'exploitation, les multiplexes se sont imposés sur le marché : ils représentent 4,4 % des établissements, 22,2 % des écrans et 40 % des entrées.

En matière de programmation, depuis le regroupement en 2001 des activités d'exploitation de salles de Gaumont et Pathé, deux réseaux , le nouvel ensemble, Europalace et UGC, déterminent à eux seuls la programmation de 23 % des écrans représentant plus de 40 % des entrées en 2001 .

La concentration dans la distribution n'est pas moins forte, puisque sept sociétés contrôlent plus de 80 % du marché des films.

Enfin, s'agissant de la fréquentation, l'étude montre que 30 films assurent à eux seuls plus de 50 % des entrées , chiffre qui a peu varié depuis dix ans, alors que le nombre de films distribués augmentait de façon importante.

Sur le plan commercial, on assiste à une rotation de plus en plus rapide des films qui tend susciter un marché à deux vitesses .

L'étude souligne le déséquilibre croissant au profit des films distribués par les filiales des grands groupes et notamment des films américains. Il indique qu'en dépit de l'accroissement de la fréquentation, le nombre des entrées de la majorité des films ne progresse pas.

De nombreux films ne bénéficient en fait que d'une faible exposition au public. Sur les quelque 1.300 films français sortis depuis 1995, la moitié n'ont pas atteint le seuil de 25.000 entrées . L'étude relativise cette observation en signalant qu'en 2000, sur 461 films américains produits, 193 seulement sont sortis en France ; parmi eux, plus du tiers n'ont pas atteint 25.000 entrées.

La concentration de la fréquentation est flagrante. Ainsi, en 2001, la spectaculaire progression des films français (plus 30 millions d'entrées) est, pour les trois-quarts, imputable aux quelques films ayant dépassé 2 millions d'entrées.

Enfin, l'étude note que, malgré la progression importante des recettes , qui dépasse 70 % entre 1992 et 2001, le secteur de l'exploitation reste fragile . Ainsi, en 2000, sur un échantillon de 40 entreprises représentant un chiffre d'affaires de 590 millions d'euros, soit presque les deux-tiers de celui de l'ensemble du secteur, l'INSEE constate un déficit d'exploitation de 88 millions d'euros. Il y a là un facteur supplémentaire de concentration.

Ensuite, l'étude souligne que les mouvements de concentration dans la distribution et dans l'exploitation se retrouvent dans les autres modes de diffusion, qu'il s'agisse du cinéma, de la vidéo ou de l'exportation.

Avec le développement des chaînes du câble et du satellite, jamais la télévision n'a diffusé autant de film s. L'offre est considérable ; elle dépasse 5.000 titres par an. L'essentiel de la vente de films est assuré par un petit nombre d'opérateurs, nationaux ou internationaux. En France, Canal + possède les droits de 5.500 films, tandis que TF1, Pathé et Gaumont en détiennent aux alentours de 500 chacun ; aux États-Unis, on constate le même phénomène de concentration des catalogues : plus de 5.000 titres pour la Warner et MGM, entre 2.000 et 3.500 pour Columbia, Universal et la Fox, 1.000 et 500 respectivement pour Paramount et Buena Vista.

Dans ce paysage cinématographique, la tendance à l'intégration croissante, au sein des grands groupes de communication des fonctions de diffuseurs, d'acheteurs de droits et de distributeurs, a une série de conséquences défavorables que pointe l'étude.

D'une part, les accords passés entre les grands distributeurs et les chaînes, se traduisent par une augmentation du nombre de films américains à sortir en salle ; d'autre part, on assiste à la marginalisation des distributeurs français indépendants ; dans la même logique, l'étude constate que le succès du DVD profite surtout au cinéma américain .

Enfin, s'agissant de l'exportation, le diagnostic très positif du CNC, qui souligne les succès à l'étranger du cinéma français , la plupart tournés en langue française, doit être relativisé par un triple constat :

- il repose sur un nombre limité de films ;

- il est concentré sur un petit nombre de march és, l'Allemagne, à elle seule représentant 12,5 % du total des exportations ;

- il a été obtenu au prix d'un accroissement important du nombre de copies par film.

B. CHRONIQUE D'UNE CRISE ANNONCÉE

Si l'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » montre que le système français de soutien a largement atteint ses objectifs et a permis au cinéma national de résister à la concurrence de la télévision comme à la pression commerciale du cinéma américain, une révision de l'ensemble du dispositif est difficile à éviter pour deux séries de raisons tenant à l'évolution technologique et aux transformations des marchés.

L'étude rappelle qu'à ces raisons s'ajoute la remise en cause des aides françaises au regard de la légalité européenne et commerciale internationale . En dépit des succès d'opinion obtenus par la notion d'exception culturelle, l'étude rappelle que les tenants de la libre circulation n'ont pas désarmé et que la direction de la concurrence de la Commission européenne continue de contester à la fois la territorialité des aides et la légitimité des obligations de production imposée aux chaînes.

C'est ce que vos rapporteurs ont pu constater par eux-mêmes lors de leur rencontre avec M. Joaquin Fernandez-Martin, chef de l'Unité « Entreprises publiques et services » de la direction générale de la concurrence.

1. Les tensions internes

Dans une seconde partie intitulée les déséquilibres et les tensions, l'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » s'efforce de dégager les zones de fragilité et de rupture du système, compte tenu de l'évolution divergente entre les besoins et les ressources.

Analysant l'accroissement des besoins financiers et son facteur principal, le phénomène de la hausse du coût des films à vocation commerciale, l'étude évoque, en premier lieu, ce que les économistes appellent « la survalorisation des enjeux de concurrence ».

Il s'agit de la dynamique apparaissant sur un marché fortement concurrentiel aboutissant à l'augmentation des prix à payer pour tout ce qui est censé assurer d'emblée à un film les plus grandes chances de succès : présence de vedettes connues, effets spéciaux, marketing et publicité... L'étude note à cet égard que, même si les exploitations secondaires se diversifient, l'ensemble des recettes potentielles ne peut pas croître au même rythme 5 ( * ) .

Au contraire, l'allongement de la durée de vie commerciale des films contribue à différer la sanction du marché.

Il est aussi fait état des conséquences structurelles d'une telle tendance et, en particulier, du renforcement qui en résulte du processus de concentration et d'internationalisation des entreprises de distribution et d'exploitation de films.

En second lieu, en ce qui concerne la production, l'étude tend également à relativiser les performances de l'industrie cinématographique . C'est ainsi que le record enregistré en 2001 avec 200 films agréés a des aspects préoccupants dans la mesure où cette évolution s'accompagne d'une polarisation croissante des investissements . L'on a, d'un côté, une nette augmentation du nombre de films dont le devis est supérieur à 7 millions d'euros, et, de l'autre, un doublement du nombre de films dont le devis est inférieur à 1 million d'euros.

L'étude souligne que, parmi les 34 films d'initiative française dont le devis était, en 2001, supérieur à 7 millions d'euros, 27 n'ont fait l'objet d'aucune coproduction internationale, tandis que deux ont bénéficié d'avances sur recettes.

L'analyse des films dont le budget est inférieur à 1 million d'euros , fait apparaître que, sur un total de 42, 24 ont bénéficié d'une avance sur recettes. Pour 16 d'entre eux, cette avance a été leur seul financement .

L'étude constate que les chaînes tendent à redéployer leurs investissements au profit des films qui correspondent le plus à leur priorité éditoriale. Il en résulte une uniformisation croissante autour de « standards fédérateurs » ainsi qu'une tendance à l'inflation des devis.

Ce sont les films moyens qui pâtissent de ces multiples tendances. Selon l'étude, la fragilité du système ne résulte donc pas du volume de production, mais d'une dégradation des conditions du financement des films pouvant prétendre à un succès public. Un nombre croissant de producteurs est alors amené à faire des économies en amont et en aval au niveau de l'écriture des scénarios ou des frais de promotion, ce qui réduit d'autant les chances de succès de leurs films.

En outre, au travers, notamment, de l'étude que votre commission des finances a commandée à « Réalisation et recherches audiovisuelles », on prend aujourd'hui davantage conscience des effets pervers de l'adossement du cinéma sur la télévision et de la fragilité d'un mécanisme de soutien. Celui-ci a eu pour conséquence non seulement de tenir les opérateurs français, pour partie au moins, à l'écart des contraintes du marché, mais encore à subir les effets d'une mondialisation accrue du secteur.

2. Les pressions externes

Il y a tout lieu de se demander si nombre d'opérateurs, à commencer par Canal +, n'ont pas un pied en dehors et un pied en dedans de la mondialisation et si ce n'est cette ambivalence qui est à l'origine, au-delà des succès immédiats, tant des chocs externes que de difficultés qui fragilisent le système.

On doit évoquer ici la « contradiction majeure » soulignée en 1996 dans le rapport de M. René Bonnell et Mme Margaret Menegoz sur la réforme de l'agrément, qui évoquait la difficulté à concilier, préservation du tissu industriel et artistique national et mondialisation du commerce des films.

En outre, on peut mettre en doute l'existence d'un marché européen domestique du fait de son morcellement.

Tandis que les films américains s'amortissent largement sur leur marché domestique avant toute exploitation en Europe, les films européens ne sont pas exploités à l'échelle continentale .

A cet égard, il faut noter un décalage de distribution : les distributeurs attendent de voir comment un film est reçu dans son pays d'origine avant de le distribuer dans d'autres pays européens, ce qui ralentit d'autant la circulation.

Il est en tout état de cause important de sensibiliser les autorités de Bruxelles à la spécificité du secteur du cinéma, en insistant sur le fait que les films européens ne sont pas en concurrence entre eux , et donc que les différents systèmes d'aides mis en place dans chaque État membre ne créent pas de distorsion de concurrence.

Et lorsque l'on évoque les questions de concurrence, il faut se rappeler que le marché du cinéma français représente moins de 3 % du marché européen, alors que le cinéma américain représente 65 % de ce marché.

C'est dans ce contexte incertain tant sur le plan économique qu'institutionnel, que vos deux rapporteurs tentent d'amorcer une réflexion de fond, considérant que, même s'il ne semble pas être menacé à brève échéance, le système français de soutien est, si l'on en croit l'étude « Réalisation et recherches audiovisuelles », fragilisé dans ses mécanismes mêmes.

Aussi estiment-ils que tout le volet « ressources » développé par le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc, aussi important soit-il, ne devrait pas suffire à faire face à une crise annoncée.

II. LE RAPPORT DE M. JEAN-PIERRE LECLERC

Le ministre de la culture et de la communication, M. Jean-Jacques Aillagon, a défini, dans une lettre en date du 17 septembre 2002, la mission qu'il a confiée à M. Jean-Pierre Leclerc sur le financement du cinéma français.

Cette mission consistait à analyser les travaux menés par le Centre national de la cinématographie (CNC) sur le sujet, afin d'expertiser quatre pistes de travail principales :

- le développement des instruments fiscaux (modernisation du système des soficas, autres outils d'aide à l'investissement dans les films indépendants) ;

- le rééquilibrage de la contribution de l'édition vidéo et DVD au compte de soutien ;

- le développement des fonds régionaux d'aide à la production ;

- l'extension de la clause de diversité à d'autres sources de financement.

Il s'agissait d'examiner la faisabilité de telles mesures, en liaison avec les organisations professionnelles et de les compléter, le cas échéant, par de nouvelles propositions pour permettre l'adaptation des dispositifs d'aide existants.

En ce qui concerne les industries techniques, la lettre de mission mentionnait explicitement les travaux de M. Pierre Couveinhes qui ont fait l'objet d'un rapport spécifique.

Si le diagnostic de la situation du cinéma français, auquel a procédé le rapport, a fait l'objet d'un large consensus, il n'en n'a pas été de même des propositions.

A. DES ANALYSES CONSENSUELLES

La démarche retenue par M. Jean-Pierre Leclerc s'est organisée en trois temps. Avant de porter un jugement sur les propositions de réformes avancées par le CNC et les organisations professionnelles, le rapport s'est efforcé de rappeler et d'analyser le fonctionnement du système français de soutien à la production cinématographique et de procéder à un diagnostic général du système.

1. L'architecture générale du système

Le rapport souligne, en premier lieu, que l'économie du cinéma s'apparente à une économie de « casino ». Compte tenu de l'importance des aléas, le système ne s'équilibre globalement que parce qu'un petit nombre de très grands succès commerciaux compense une faible rentabilité moyenne.

Une autre caractéristique du secteur est qu'il s'agit d'une industrie « lourde », en ce sens que le coût moyen de production est sans commune mesure avec celui des autres produits culturels : 4,36 millions d'euros pour un film en 2001 contre seulement 225.000 euros en moyenne pour un disque.

a) Les raisons de l'intervention de l'État

Une des raisons qui semble justifier l'intervention de l'État, est l'insuffisance chronique des financements par suite du peu d'intérêt du système bancaire pour ce secteur, compte tenu des caractéristiques précédemment relevées, à savoir un marché étroit, des risques élevés et une rentabilité faible.

L'autre élément important qui fonde le système français, est le souci de garantir le renouvellement, la qualité et la diversité de la création. C'est cette préoccupation qui conduit l'État à favoriser, notamment, une multiplicité des dépendances capitalistiques et à prévoir toujours plus de « guichets ».

b) Les trois cercles de financement du cinéma

Analysant les mécanismes mis en oeuvre par la puissance publique, le rapport distingue trois cercles d'intervenants :

- un premier cercle , qui se définit par un lien économique direct entre l'investissement et différentes formes d'exploitation, qu'il s'agisse des salles, de l'édition vidéo ou de la diffusion à la télévision ;

- un deuxième cercle , constitué par tous les agents , essentiellement les télévisions, que le rapport présente comme ceux ayant été implicitement considérés par l'État comme ayant une activité comportant des nuisances pour le secteur du cinéma -les économistes parleraient d'effets externes négatifs- ;

- un troisième cercle enfin, hétérogène, et quantitativement moins important, qui rassemble toutes les autres sources potentielles de financement en provenance du marché .

Le rapport procède à une analyse extrêmement claire et détaillée des différents mécanismes, et notamment des conditions d'accès aux aides : pour être éligible, un film doit obtenir 14 points sur 18 du point de vue de la nationalité des intervenants ; pour bénéficier de l'aide, l'oeuvre doit obtenir, sur la base d'un autre barème, 25 points sur 100, étant noté que la totalité du soutien est acquise à partir de 80 points.

Au sujet du deuxième cercle, le rapport détaille les obligations des chaînes hertziennes en clair, de Canal + et des chaînes du câble et du satellite, tant quantitatives que qualitatives en termes de diversité.

Le troisième cercle recouvre, en fait, trois sources complémentaires de financement : l'investissement privé dans le cadre, notamment, des soficas, l'encouragement aux coproductions étrangères et les financements locaux.

Le rapport achève cet état des lieux en évoquant certaines mesures d'encadrement des investissements destinées à favoriser la production indépendante et les films à budget petit ou moyen, tels qu'ils sont définis par la clause de diversité, appliquée pour la première fois en mai 2000 par Canal + et étendue à compter du 1 er janvier 2003 aux autres chaînes du câble et du satellite.

2. Les éléments de contexte

Le rapport évoque ensuite un certain nombre d'éléments de contexte. Il s'agit d'abord de la faible rentabilité du secteur qui, selon les statistiques fournies par la direction du Trésor, aurait accusé un bilan financier négatif d'une centaine de millions d'euros en 2001. Ce résultat est à relativiser en fonction des observations du rapport commandé par la commission des finances à « Études et réalisations audiovisuelles ».

a) La poussée inflationniste

Un autre constat est la persistance de tensions inflationnistes . C'est ainsi que le rapport souligne que le coût moyen des films a été multiplié par 7,7 entre 1980 et 2000 , avec une tendance à l'accélération en fin de période, puisque le devis moyen des films ayant augmenté, entre 1999 et 2001, de près de 17 %, passant de 3,9 millions d'euros à 4,7 millions d'euros. Il semble que cette évolution se ralentisse, puisque le devis moyen s'établirait, en 2002, à 4,45 millions d'euros.

Cette augmentation est corroborée par une augmentation des droits d'auteur . C'est ainsi que, selon une première estimation mentionnée dans le rapport, les droits perçus par les réalisateurs seraient passés de 44.000 euros en 1999 à 180.000 euros en 2001.

La tendance est plus contrastée en ce qui concerne les rémunérations des interprètes. Si la moyenne de l'échantillon augmente fortement pour les films dont le budget est supérieur à 7 millions d'euros (2,1 millions d'euros en 2001 contre 1,6 million d'euros en 1999, soit une augmentation de près d'un tiers), elle diminue de 30 % pour les films dont le budget est compris entre 3 millions d'euros et 7,6 millions d'euros, et de 15 % pour les films d'un budget compris entre 1,5 million d'euros et 3 millions d'euros. Quant aux cachets des interprètes des films, dont le budget est inférieur à 1,5 million d'euros, ils auraient diminué de 50 %.

b) Les évolutions du marché

Un certain nombre d'évolutions structurelles témoignent de l'évolution du marché : si, en 1950, des films réalisaient près de la moitié de leurs recettes au cours des trois premiers mois, les trois-quarts au cours de leur première année d'exploitation, un film obtient, aujourd'hui, l'essentiel de ses résultats en deux semaines si c'est un échec, et en moins de dix semaines, si c'est un succès . Parallèlement, la publicité de lancement est plus importante. Il faut compter entre 400.000 et 500.000 euros pour un film français moyen.

Le rapport souligne également, à côté de l'essor des DVD, le « rôle complexe » joué par les chaînes de télévision . A cet égard, un facteur important est l'affaiblissement de la puissance de programmation du cinéma sur les chaînes de télévision . Celui-ci est concurrencé à la fois par le sport -il faut rappeler, avec le rapport Leclerc, que Canal + avait initialement fait une offre de 480 millions d'euros par an pour l'exclusivité de la retransmission des matchs de football, soit plus de trois fois ce qu'elle dépense pour le cinéma- et pour la télévision-réalité.

Un mouvement d'intégration verticale autour des éditeurs de services de télévision pourrait ainsi menacer la production indépendante, tandis que les choix d'investissement des chaînes de télévision orientent le contenu de la création cinématographique en fonction de considérations de nature à améliorer l'audience aux heures de grande écoute.

Le rapport attire aussi l'attention sur la logique économique qui conduit les chaînes de télévision à essayer de réduire le coût et d'augmenter l'utilité de leurs investissements obligatoires. Ainsi, un certain nombre de sociétés de production et de distribution adossées ont-elles tendance à produire et distribuer un grand nombre de films avec, parfois, pour seul objectif, « de faire identifier les oeuvres comme films de cinéma » et d'optimiser ainsi leur passage sur la chaîne.

Par ailleurs, il est mis l'accent sur la situation critique de la distribution , qui est menacée par un double mouvement de concentration centré, d'une part, sur les exploitants et, d'autre part, sur les diffuseurs : pour la seule année 2002, on relève ainsi une dizaine de dépôts de bilan d'entreprises indépendantes.

Globalement , 80 % des films français sont traités par des sociétés distribuant moins de dix films par an , alors que les distributeurs importants ont tendance, à l'exception de Pathé, à privilégier les productions américaines.

Le rapport attire également l'attention sur le dilemme à l'origine duquel se trouvent les multiplexes. On peut dire en effet que ceux-ci favorisent les films à succès faisant l'objet d'importantes campagnes de promotion, mais aussi qu'ils font concurrence au cinéma d'art et d'essai lorsqu'ils mettent à l'affiche, dans le cadre d'engagements de programmation, des films indépendants.

Toujours au niveau du diagnostic, le rapport a également l'intérêt de souligner les différences, a priori peu fondées, existant dans la définition des productions « indépendantes » retenue pour l'agrément des soficas, et dans la définition des obligations des chaînes.

c) Des tensions sur l'équilibre financier du système

Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc achève ce constat en posant une question fondamentale : quel volume de financement consacrer à la production de films français ? Les éléments de réponse ne résultent pas nettement du rapport. Celui-ci se contente d'observer que, sur les 200 films agréés en 2002, une centaine seulement est considérée comme des films « dans le marché », c'est-à-dire susceptibles de rencontrer un public suffisant pour les rendre rentables. Ces films se répartiraient par moitié, entre des films « difficiles » et des films carrément « hors marché ». De telles observations, à certains égards préoccupantes, sont toutefois à relativiser dans la mesure où il est fait mention du fait que, sur les quelque 600 films produits chaque année aux États-Unis, un tiers n'est pas diffusé en salle.

La question de l'exposition des films fait l'objet de développements intéressants : sur la base d'un objectif d'exposition de 4 semaines et de 100 copies par film, il faudrait, pour montrer convenablement les quelque 200 films produits par an, mobiliser 30 % du potentiel d'écrans français. Compte tenu de la place du cinéma américain, ce n'est guère réaliste. Si un film américain dispose en moyenne de 180 salles, un film français n'est montré que dans 70 salles : plus du tiers des films français est diffusé dans moins de 10 salles, tandis que les trois-quarts le sont dans moins de 100 salles.

Un certain nombre de films ne connaissent d'ailleurs qu'une sortie « technique », dont le seul objet est de déclencher le paiement des droits de pré-achat par les chaînes de télévision.

Le rapport conclut : « Sans tomber dans le malthusianisme, force est de constater qu'il existe une limite pratique et non seulement financière, à la production cinématographique française, dont il y a tout lieu de se demander, si, s'agissant du nombre des films produits, elle n'a pas été atteinte, voire dépassée, par les chiffres exceptionnels des années 2001 et 2002 » .

L'origine des financements ne suit pas la « dynamique des coûts » , qui résulte notamment de l'inflation de la rémunération des talents, évoquée plus haut.

Ainsi, le financement par la vidéo ne correspond pas à la progression du secteur ; l'évolution du nombre des entrées est satisfaisante tout comme la part que représente le film français qui s'établit, depuis le début des années 90, à environ un tiers de la fréquentation contre environ 60 % pour les films américains. Ce constat, plutôt favorable, doit cependant être nuancé compte-tenu de la grande dispersion des résultats par film : sur les quelque 170 films d'initiative française agréés en 2001, 1 sur 5 n'a pas atteint 25.000 entrées , tandis que 6 films français sur 10 ont produit moins de 550.000 euros de recettes en salles.

Enfin, le rapport souligne le tassement relatif de la contribution des soficas au financement du cinéma qui, après avoir représenté jusqu'à 10 % des films d'initiative française, ne représente plus que 3,3 % en 2001.

Le rapport peut donc conclure à l'existence de tensions croissantes dans la production de certaines catégories de films : tandis que l'on assiste à la concentration des financements sur les gros films , dont témoigne l'élévation des coûts moyens et médians qui atteignent respectivement 4,45 millions d'euros et 2,82 millions d'euros en 2002 , les films à petit budget ont tendance à se multiplier . Ces derniers sont à la fois plus nombreux et moins chers : sur les 66 films qui, en 2001, se sont partagés 7 % du total des investissements, il en est 23 qui n'ont bénéficié que d'une seule source de financement qui était, dans 19 cas, l'avance sur recettes .

Paradoxalement, ce sont finalement les films à budget moyen qui souffrent, notamment du fait d'un effet pervers de la clause de diversité imposée à Canal + qui aboutit à une concentration des films autour du seuil de 5,4 millions d'euros.

Pour compléter ce tableau peu encourageant, le rapport note que sur les quelque 120 à 130 sociétés de production réellement actives, il en est 20 à 25 en sérieuses difficultés après les faillites de Noé production et Euripide.

Pour le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc, le niveau du soutien automatique qui a représenté, en 2001, 9,1 % du financement total des films d'initiative française « n'est pas calibré pour financer durablement un volume de production de l'ordre de 200 films par an et une part de marché des films français supérieure à 30 % » . En revanche, il considère comme bien rôdé le système de l'avance sur recettes, même s'il regrette le faible taux de remboursement.

Le succès des films français en 2001 avec une part de marché de 41,5 % des films français et, dans une moindre mesure en 2002, année au cours de la quelle cette part s'est établie à 34 % à comparer à celle de 54 % des films américains, a eu pour conséquence une augmentation du soutien automatique au détriment du soutien sélectif.

La part des premiers films ayant bénéficié d'avances sur recettes est toutefois en diminution. Elle est d'un sur trois pour la période 1997-2000 contre un sur deux pour la période 1990-1996. Corrélativement, on assiste à une diminution de l'importance de l'avance sur recettes qui ne représente plus, en fin de période, que 12,5 % des devis des films aidés contre environ 14 % dans les années 80.

En ce qui concerne les obligations des chaînes de télévision, le rapport estime qu'elles ont produit des résultats positifs tout en notant que le bien-fondé de la clause de diversité 6 ( * ) acceptée en mai 2000 par Canal + peut être contesté, dans la mesure, notamment, où l'on peut se demander s'il existe un lien entre la taille du budget des films et la diversité des contenus.

En dernier lieu, le rapport affirme que le système des soficas s'est révélé positif, en ce que les financements qu'il procure, se sont portés majoritairement sur des films dits « indépendants » .

Même si la collecte est en perte de vitesse, puisqu'elle ne devrait s'établir qu'à 35 millions d'euros en 2002 contre 39,2 millions d'euros en 1999, les soficas restent, selon le rapport, « les seuls intervenants extérieurs avec les établissements financiers spécialisés, à porter de facto le risque de bonne fin des films indépendants ». Certes, les limitations réglementaires (et notamment l'enveloppe globale de 46 millions d'euros plafonnée à 18.000 euros par contribuable), les frais de gestion et son coût relativement élevé pour les finances publiques, en limitent l'intérêt.

B. DES PROPOSITIONS PARFOIS CONTROVERSÉES

M. Jean-Pierre Leclerc a regroupé ses propositions sous quatre rubriques : la consolidation des ressources, la préservation de la diversité de la création, la concentration de l'effort sur les investissements les plus productifs et les plus structurants, enfin l'ouverture du système vers l'étranger.

1. Une augmentation attendue des ressources

Deux voies sont explorées : la taxation des nouveaux supports de diffusion du cinéma, les contributions accrues des télévisions généralistes.

a) La taxation des vidéogrammes et à terme de la vidéo à la demande

Le rapport estime possible de taxer, dès le second semestre 2003, les ventes et locations de vidéos et de DVD sur la base du prix public. Selon lui, les avantages de cette solution, qui fait l'objet d'un quasi-consensus professionnel, sont multiples : un gain mécanique en rendement d'environ 50 %, la cohérence avec le système de la taxe spéciale additionnelle (TSA) qui fait peser la taxe sur la consommation, la possibilité, enfin, de mieux appréhender les recettes de location.

La taxe ainsi modifiée, serait perçue, comme en matière de TVA, par la direction générale des impôts qui prélèverait des frais de recouvrement.

Par suite du changement d'assiette, le produit de la taxe passerait de 27,6 millions d'euros en 2003 à 55 millions d'euros en 2006, soit un supplément de recettes d'environ 6 millions d'euros la première année en année pleine et, sur la base d'une augmentation du marché de 20 % par an, sans doute plus de 13 millions d'euros en 2006 .

Cette imposition renforcée aurait pour contrepartie un soutien diversifié tant au niveau de l'aide sélective que du soutien automatique aux éditeurs vidéos qui deviendraient de véritables acteurs de la politique patrimoniale.

Le rapport est également favorable à la taxation de la vidéo à la demande , même si celle-ci suppose que l'on surmonte un certain nombre d'obstacles techniques. De façon plus audacieuse, il envisage d'appliquer le principe « profiteur-payeur » à toute forme de consommation numérique. Prenant acte de la difficulté de contrôler sur les réseaux la transmission des données protégées par la propriété intellectuelle, le rapport envisagerait une imposition des abonnements ou actes de connexion à ces réseaux, quitte à appliquer une clé de redistribution du prélèvement en fonction de la structure des échanges de données constatés l'année précédente.

b) Les obligations des chaînes hertziennes

Après avoir écarté l'idée, parfois avancée, d'une taxation des recettes annexes des multiplexes, le rapport propose de renforcer les obligations des chaînes de télévision.

Il s'agirait, d'une part, d'obliger les chaînes à répartir leurs investissements sur un nombre de films plus important dans le cadre de leur cahier des charges pour remédier à une concentration jugée excessive de leurs investissements et, d'autre part, d'exclure les télévisions généralistes du bénéfice du compte de soutien . On remarque que l'obligation d'investissement de ces entreprises qui est de 3,2 % de leur chiffre d'affaires, est une obligation brute, dont le poids est en réalité moindre du fait des remontées de recettes des coproductions.

Il est précisé, à cet égard, que la mesure affecterait davantage les chaînes du service public , dont les investissements sont pour plus du tiers réalisés sous forme de coproductions, contre un cinquième seulement pour TF1 et M6.

Ce dispositif serait complété par un alourdissement de la taxe sur la publicité télévisée qui serait assis également sur les recettes de parrainage et pas seulement sur les seules ressources tirées de la publicité. Le supplément attendu serait de l'ordre de 8 millions d'euros.

2. La mise en concurrence des dispositifs de collecte

Toujours au niveau du financement, le rapport est favorable à la mise en concurrence des dispositifs de collecte.

a) Les soficas

Loin de suggérer la suppression des soficas, il propose de faire le « pari de leur modernisation ».

L'idée serait de fixer le taux de la réduction d'impôt à 50 % -soit un niveau inférieur de 10 points à celui de 60 % retenu pour les dons aux oeuvres reconnues d'utilité publique- tout en retenant un plafond de réduction d'impôt global pour les deux catégories, égal à 20 %.

L'octroi de ce nouveau régime , qui ferait des soficas un support défiscalisé ouvert à tous les contribuables et pas simplement à ceux imposés au taux marginal de l'impôt sur le revenu, serait conditionné par le recentrage des investissements des soficas sur la production indépendante .

b) La relance du mécénat

Dans le même esprit, le rapport évoque les perspectives offertes par la relance du mécénat dans le cadre du projet de loi adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 1 er avril 2003 7 ( * ) .

Il est indiqué que, si 5 % des dons étaient orientés vers le cinéma, la production et la distribution bénéficieraient d'un surcroît de ressources de 25 millions d'euros par an pour un coût de 1,5 million d'euros pour les finances publiques.

Pour compléter ces mécanismes éprouvés, il est évoqué la possibilité d'adapter le système du crédit-bail fiscal à l'industrie cinématographique plutôt qu'une transposition directe du système britannique dit « Sale and lease back ». Le système, qui suppose une modification de l'article 39 C A du code général des impôts, a été critiqué dans la mesure où la valeur de l'actif, qui serait ainsi cédé pour être loué, est extrêmement volatile.

3. Les autres mesures

Sous cette rubrique, on regroupe une série de mesures visant, outre à favoriser l'ouverture une ouverture sur l'extérieur qui sera évoquée ultérieurement, à trouver de nouveaux financements auprès des collectivités locales, à diminuer les dépenses liées à la rémunération des talents, et à favoriser la diversité et la création.

a) L'accompagnement des efforts des régions

Pour M. Jean-Pierre Leclerc, de multiples incertitudes affectent l'implication des régions, quelles soient d'ordre économique -on ne sait pas exactement ce que rapporte un euro d'investissement dans le cinéma- ou d'ordre institutionnel et juridique.

Pour lever ces difficultés et créer les conditions d'un engagement accru des régions, le rapport propose la mise au point de conventions-type diffusées par le CNC, afin de faciliter la coordination entre services de l'État et de servir de guide aux régions. Il estime qu'il convient de mettre l'accent sur la formation des fonctionnaires territoriaux et sur la concertation des responsables locaux en charge du soutien à la production cinématographique.

En matière de formation professionnelle, le rapport estime que les régions ont un rôle particulier à jouer, tel est également le cas des actions en matière de recherche-développement, c'est-à-dire pour l'écriture ou la réécriture des scénarios.

b) La promotion du renouvellement et de la diversité de la création

De ce point de vue, le rapport se situe dans la ligne de réflexions antérieures, qu'il s'agisse de celles du rapport de M. Charles Gassot, qui s'est traduit par une accentuation des aides à la réécriture, ou de l'aide au développement en général. A cet égard, le rapport a marqué sa préférence pour une incitation aux soficas à investir dans l'écriture plutôt que d'étendre le mécanisme d'aide à la recherche.

Le rapport parle « de rendre plus efficace le soutien sélectif aux premiers films ou aux films difficiles ». Trois mesures sont évoquées dans le rapport : le relèvement des plafonds d'intervention de la commission d'avances sur recettes qui serait compris entre 150.000 euros et 400.000 euros, l'amélioration du taux de remboursement en faisant du CNC une sorte de créancier privilégié susceptible de recouvrer les sommes avancées sur les recettes de soutien automatique généré par le film aidé, l'ouverture , enfin, de l'avance sur recettes aux productions étrangères .

En dernier lieu, le rapport envisage une harmonisation des définitions de l'indépendance en vigueur pour l'application de la législation du cinéma. Le rapport envisage une « option haute » consistant à mettre en place une grille unique d'évaluation calculée sur le système classique des points, et une « option basse » se contentant d'aménager les limites de plafonds actuels et se traduisant notamment par un ajustement des contours de la clause de diversité . C'est ainsi que le seuil retenu pour l'application de cette clause pourrait être indexé et qu'il devait être prévu une renégociation périodique pour tous les investisseurs de quotas de films inférieurs aux seuils correspondants.

Corrélativement, le régime des soficas serait adapté pour favoriser nettement la production indépendante . Les soficas devraient investir à hauteur de 65 % dans ce type de production contre 35 % actuellement. Le rapport envisage également de leur appliquer une clause de diversité analogue à celles que doivent respecter Canal + et désormais TPS.

c) Recentrage de l'emploi des fonds sur l'investissement structurel

Le rapport conclut des auditions que les talents , c'est-à-dire la rémunération des scénaristes, celle des réalisateurs et des acteurs, jouent un rôle dans l'inflation des coûts de production .

Il estime même que cette tendance est aggravée par deux phénomènes :

- la pratique dite de « l'équivalent comptable », qui consiste à demander au producteur délégué qu'il rétrocède aux « talents » une partie de ses droits de tirage sur le compte de soutien ;

- le montage par ces derniers de sociétés de coproduction ad hoc , dont les droits de tirage sur le compte ne sont pas nécessairement réinvestis immédiatement par les détenteurs de parts dans la production d'un nouveau film, mais « mis en sommeil » ou monnayés, à l'occasion de la revente des parts.

Ces pratiques réduisent d'autant les sommes réinvesties dans la production par le producteur délégué.

En aval, il a été envisagé d'exclure tout ou partie des coûts artistiques du bénéfice du compte de soutien, soit en mettant fin à la pratique des « équivalents-comptables », soit, de manière plus radicale, en excluant ex ante ces coûts des dépenses pouvant être couvertes par la mobilisation du compte. Cette mesure apparaît d'une mise en oeuvre délicate, tant pour une raison de principe, qui est la liberté de contracter, que pour une raison pratique, qui est la lourdeur des procédures de contrôle qu'elle impliquerait.

Dans le même ordre d'idée, le rapport propose de refondre la nomenclature comptable des dépenses éligibles au compte de soutien à la fois pour y inclure de façon plus lisible les dépenses de distribution et pour distinguer plus clairement , sur le modèle britannique, d'une part, les coûts liés à la rémunération de la prise du risque artistique (achat ou développement de scénarios, acteurs, réalisateur) et à la production (salaires du producteur, imprévus et frais généraux), d'autre part, les coûts de fabrication au sens strict (salaire des équipes techniques, charges sociales, location des lieux et costumes de tournage, frais de pellicule, de montage, de post-production, etc.).

*

* *

Vos deux rapporteurs, au nom de la commission des finances, qui adhèrent assez largement aux propositions du rapport de M. Jean-Pierre Leclerc, se sont efforcés de les compléter par des orientations à moyen terme portant sur le volet « dépenses ».

DEUXIÈME PARTIE : VERS UNE REFONDATION
DU COMPTE DE SOUTIEN

Il ressort des analyses précédentes qu'en dépit d'une bonne santé apparente, le cinéma français est de constitution fragile. Ses faiblesses, et même ses forces, sont à l'origine de la crise latente d'un mode de régulation en décalage croissant avec la dynamique des marchés.

Compte tenu des menaces pesant sur l'équilibre du compte de soutien, vos rapporteurs estiment que, s'il convient de consolider l'alimentation financière du système et, notamment, de dégager des sources de financement supplémentaires, il faut d'emblée marquer les limites d'une telle politique.

Face à la perspective de stagnation et, surtout aux risques, non négligeables, de rupture, le principe de précaution conduit à se donner les moyens d'agir plus efficacement, à ressources, au mieux, faiblement croissantes.

Dans ce contexte on ne peut que rechercher un meilleur ciblage des interventions de l'État et s'efforcer d'adapter les mécanismes du soutien financier à ce nouvelle exigence. L'ampleur et le rythme de ce changement restent à déterminer et dépendront, à bien des égards, de facteurs externes et, au premier chef, du devenir de Canal +.

Mais, ce qui est sûr, c'est qu'il faut, dès maintenant, réfléchir aux questions de principe et ne plus considérer comme tabous, certains sujets sensibles, tels une plus grande sélectivité dans certaines catégories d'aides, l'encadrement des possibilités d'affectation de ces aides aux rémunérations élevées ou le plafonnement, si ce n'est du nombre total de films, du moins du nombre de films aidés.

En outre, le système actuel, à la fois hyper-réglementé et hyper-concerté, ne favorise guère un partage clair des responsabilités entre la profession et l'État.

Le système apparaît d'autant plus difficile à faire évoluer que l'État en a, en fait, délégué l'essentiel de la gestion à une profession, collectivement attachée au statu quo en dépit de certaines divisions internes, bien que, pris isolément, les représentants des différents éléments de la filière cinéma conviennent de la nécessité d'une réforme. L'imbrication est telle qu'il serait peu réaliste et donc en définitive inefficace, d'entreprendre une réforme du mode de gestion actuel de l'aide publique au cinéma sans emporter l'adhésion d'une profession , actuellement associée à tous les niveaux de l'aide.

Sans forcément recourir à des formules de concertation généralisée pompeusement qualifiées « d'états généraux », il conviendrait de favoriser la prise de conscience par les professionnels des limites du système actuel , que le climat « d'argent facile » consécutif à l'expansion de la télévision à péage, avait permis de masquer. L'État peut faire un effort en acceptant, dans un contexte économique général défavorable, une légère augmentation des prélèvements, ainsi qu'éventuellement, des moins-values de recettes supplémentaires. La profession, de son côté, ne doit pas refuser de se pencher sur un mode de fonctionnement, jusqu'à présent insuffisamment sélectif et ne débouchant pas spontanément sur une ouverture sur l'extérieur.

La « refondation », réclamée à juste titre par un grand nombre de professionnels du secteur, ne devrait pas consister en de simples corrections à la marge des procédures existantes ; elle passe par le réexamen sans a priori d'une tuyauterie financière, que sa complexité croissante a rendu de moins en moins lisible et de moins en moins efficace.

L'esprit dans lequel vos rapporteurs abordent cette « refondation » ne se résume cependant pas à une remise à plat, qui si elle était menée trop rapidement et était alors perçue comme radicale, ne ferait que déstabiliser un système déjà fragilisé ; bien au contraire, ils s'efforcent de reprendre l'idée d'un processus progressif d'adaptation en insistant sur le besoin de continuité avec le système existant, car il est essentiel de garantir à la profession, par delà un éventuel changement de méthode , la continuité à défaut de laquelle toute réforme d'ensemble serait vouée à l'échec.

Il s'agit d'intégrer -au sens de la formule anglaise de « built in »- dans la logique même de fonctionnement des aides, à la fois le souci d'éviter certains effets pervers et celui de rendre mesurables les performances des différentes procédures comme de ceux qui en ont la responsabilité.

Bref, il ne s'agit pas seulement d'apporter un complément de moyens qui, sans mesures d'accompagnement, permettrait simplement de différer des choix, mais, au contraire, de lier l'octroi de ressources supplémentaires -qu'elles proviennent de prélèvements plus importants ou d'avantages fiscaux accrus- à un effort de clarification des procédures de nature à faciliter les arbitrages indispensables.

Vos rapporteurs, au nom de la commission des finances, n'ont pas l'ambition de redéfinir jusque dans les moindres détails un ensemble complexe. Soucieux de faire la part des domaines respectifs du Parlement, du gouvernement et de la profession, ils ont avant tout pour ambition de désigner des objectifs, d'esquisser des orientations ou d'évoquer des solutions, mentionnées ici plus comme des pistes à explorer que comme des mesures véritablement opérationnelles dans l'immédiat.

I. LA CORRECTION DES MÉCANISMES DU MARCHÉ

Le principe d'une intervention de l'État n'est que rarement contesté. Interventionnistes et libéraux se rejoignent en général pour estimer que l'importance de ce mode d'expression au sein de la culture vivante, justifie des mesures correctrices pour permettre au cinéma français d'exister face au cinéma américain.

En revanche, si leur nécessité ne fait guère de doute, les modalités des interventions sont difficiles à déterminer et se prêtent naturellement à certains dérapages.

Jusqu'à présent, la fragilité de l'équilibre politique, sur lequel repose le système, a conduit les responsables à se contenter, à de rares exceptions, d'interventions à la marge, consistant, le plus souvent, soit à créer un « robinet » financier supplémentaire, soit à accroître le débit d'un « robinet » existant.

Tout se passe comme si l'État avait ainsi multiplié les « guichets » à tous les niveaux. Tous les types d'entreprises du cinéma français, de la plus petite à la plus grande, peuvent, à un titre ou à un autre, prétendre à une aide du compte de soutien.

Peut-on, dans le contexte actuel, se contenter de surajouter de nouvelles aides, de nouveaux « guichets » ? A court terme, c'est possible et sans doute suffisant pour permettre au système de continuer à fonctionner.

Mais, retarder les ajustements nécessaires , consécutifs, notamment, à la fin de l'âge d'or des télévisions à péage, c'est, probablement, à un terme plus ou moins lointain -car globalement le nombre des abonnements continue encore de s'accroître-, s'obliger à des révisions plus radicales et à des arbitrages plus difficiles .

Un nouvel équilibre doit être trouvé entre la recherche de l'efficacité économique et la préservation de la diversité culturelle.

Dans cette perspective, des mesures peuvent être envisagées, à court terme, pour améliorer le fonctionnement du système, voire éliminer certains dysfonctionnements ; mais à moyen terme, il faudrait s'attacher à en restaurer la lisibilité, suivant en cela la voie tracée par la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Cette démarche de clarification est d'autant plus nécessaire que, tôt ou tard, l'impératif européen obligera la France à bien faire la part dans ses procédures de soutien entre les finalités économiques et culturelles .

A. AJUSTER À COURT TERME LES MÉCANISMES EXISTANTS

La marge de manoeuvre de l'État en ce qui concerne les dépenses du compte de soutien est plutôt limitée. Dès lors que l'on ne veut pas s'engager sur la voie de la création de « guichets » supplémentaires, on ne peut que désigner des axes prioritaires en vue d'atténuer certains dysfonctionnements ou d'infléchir le comportement des agents dans un sens favorable aux intérêts collectifs du cinéma français.

Les deux premiers constats qui ressortent des analyses des rapports d'experts, sont que l'on n'exploite pas pleinement la créativité du cinéma français et que le système actuel tend à alimenter une dynamique des coûts qu'il convient de freiner.

Une autre idée forte que l'on peut dégager des analyses mentionnées en première partie, est que, du fait de l'aisance financière résultant des obligations d'investissement des chaînes hertziennes, le cinéma s'est développé dans un cadre trop franco-français sans véritablement prendre en compte la dimension internationale.

1. Mieux exploiter la richesse créative du cinéma français

Le paysage cinématographique français est particulièrement dense. Il y est difficile de montrer dans des conditions décentes au public les quelque 170 à 200 films français qui sortent chaque année. C'est d'ailleurs difficilement réalisable matériellement, comme l'a montré le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc, sans même prendre en compte la pression commerciale croissante des films américains.

Le cinéma est, on le sait, une industrie de prototypes. Il est normal que tout ce qui est produit ne soit pas des succès ni même, parfois, montrable.

Mais passé un certain seuil, on peut se demander s'il n'y a pas là un gaspillage de talents et, compte tenu du nombre de films soutenus par l'État, le signe d'une mauvaise allocation de l'argent public.

D'où l'urgence, dans l'immédiat, de s'efforcer de donner à tous les films produits leur chance face au public. Un tel objectif passe par des actions diversifiées à tous les niveaux de la chaîne cinématographique : production, distribution et exploitation.

a) L'objectif : rétablir une certaine égalité des chances dans l'accès au public à potentiel commercial équivalent

Le rapport Goudineau sur la distribution des films en salle remis en mai 2000, a procédé à une analyse à long terme de l'évolution de la fréquentation qui souligne le déséquilibre existant entre le cinéma français et américain.

Relevant que, depuis 1986 8 ( * ) , il n'y a pas de lien entre le nombre de films français sortis et leur fréquentation, il constate que le nombre de films français agréés sortis sur des combinaisons de moins de 5 établissements en France dépassait la trentaine à la fin des années quatre-vingt-dix.

(1) Le déséquilibre franco-américain

Le rapport met l'accent sur les différences existant entre la distribution des films français et américains : d'une part, ces derniers sont présentés en première semaine dans un nombre d'établissements en moyenne deux fois plus important que les films français, d'autre part, et ceci est le prolongement de cela, les films américains bénéficient d'une exposition massive dès la première semaine, alors que les films français doivent faire la preuve de leur succès pour acquérir une meilleure exposition . A ce facteur s'y ajoute le meilleur étalement des sorties de films américains comme en témoigne le contraste entre « le pic de l'été américain et le creux de l'été français ».

A la question « les films français ont-ils les moyens de leur promotion ? », le rapport Goudineau précité oppose des pratiques américaines et françaises : aux États-Unis, les sommes dépensées pour le marketing des films représentent 50 % des coûts de production , soit 25 millions de dollars en moyenne, en France, pour les films d'un montant supérieur à 7,6 millions d'euros, les dépenses de promotion se situent en 8 % et 10 %.

En ce qui concerne les dépenses de promotion sur le territoire français, il ressort du rapport Goudineau précité que le différentiel de dépenses s'établit dans un rapport de 1 à 2, voire de 1 à 2,5.

Comparant les performances des films français et américains, le rapport identifie un « point névralgique » qui concerne les films ayant obtenu entre 500.000 et 2 millions de spectateurs : offre réduite et maigres résultats du côté français, offre abondante et résultats honorables du côté américain.

Toutefois, l'on note trois différences : un nombre de salles et des moyens de promotions supérieurs, le fait que les films américains sont distribués par des gros distributeurs. Une des explications avancées est la pratique des achats globaux conclus entre certaines « majors » et les chaînes de télévision ainsi que les besoins du marché vidéo qui suppose une diffusion préalable au niveau des salles.

Le rapport Goudineau souligne en conclusion que, dans un contexte caractérisé par l'abondance de films, la standardisation des campagnes de promotion et l'augmentation des moyens profitent moins aux films français qu'aux films américains dans la mesure où le spectateur privilégie les films les plus identifiables, bien que l'un des enseignements du rapport est le nombre à peu près équivalent de films français et américains à faibles entrées.

(2) Des circuits de distribution très différents

Plus généralement, le rapport Goudineau attire l'attention sur un certain nombre de paradoxes dans la distribution des films français. D'abord, les trois plus importants distributeurs ne distribuent que 10 % des films français , dont ils représentent toutefois la moitié des recettes. Corrélativement, 40 % des films français sont distribués par des sociétés moyennes distribuant entre 5 et 10 films par an .

Ensuite, il faut noter que les trois-quarts des films français ne permettent pas la récupération des frais d'éditions de leurs distributeurs . Si l'on tient compte des minima garantis, ce sont quatre films sur cinq qui ne permettent pas cette récupération 9 ( * ) .

b) Protéger l'exposition des films à petit budget

Le film français a du mal à résister à la pression commerciale des films américains. Face à une stratégie d'« offre saturante » -qui se caractérise par le nombre toujours plus important de films bénéficiant de combinaison de sortie se comptant en centaines d'écran-, il convient de rechercher des moyens diversifiés de nature à rendre plus visibles tous les films français.

Bien évidemment, le succès ne se programme pas. Le déséquilibre des forces commerciales que certains sont tentés de dénoncer pour expliquer cette forte proportion d'échecs, ne fait parfois que traduire un certain déficit artistique.

Mais, indépendamment de cette action en amont, il n'en reste pas moins nécessaire d'envisager une série de mesures concrètes pour rétablir une certaine égalité des chances entre films français et américains, d'une part, mais aussi entre films français, d'autre part.

Les diverses mesures mentionnées ci-dessous ne sont que de simples pistes qui demandent à être examinées de façon contradictoire sous tous leurs aspects. Elles supposent, soit l'instauration de nouvelles contraintes de gestion au sein d'un secteur déjà sur-réglementé, soit le desserrement de réglementations protectrices auxquelles un certain nombre d'acteurs sont particulièrement attachés.

(1) Encourager la promotion des films européens à la télévision

Indépendamment de l'importance de leur budget de promotion, les films américains bénéficient d'une dynamique commerciale naturelle , qui tend à accroître leur visibilité sur les écrans de télévision. Sans qu'il soit besoin des les y inciter, les chaînes ont tendance à faire une place importante au sein de leurs émissions aux vedettes des grosses productions. Seul un petit nombre de films français bénéficient du même phénomène spontané de relations publiques. S'il est vain d'espérer pouvoir inverser le rapport de forces médiatiques, des aménagements sont envisageables en liaison avec les professions concernées.

(a) Renforcer les obligations des cahiers de charges des chaînes de télévision en matière de promotion du cinéma national

Une première piste consiste à redéfinir les obligations des chaînes en matière de cinéma. Les chaînes du câble et du satellite ont déjà réalisé des avancées, en ce sens, multipliant les émissions d'actualité ; il resterait à inciter les grandes chaînes généralistes à faire une place au cinéma d'auteur dans leurs émissions de seconde partie, voire de première partie de soirée, et pas simplement passé minuit.

Une telle évolution devrait résulter plus d'une volonté des dirigeants que de dispositions réglementaires, même si les cahiers des charges pourraient être précisés et complétés en ce sens.

(b) Développer la promotion des films français avant ou pendant la diffusion des films à la télévision

Le cinéma reste, en application d'un décret de 1992, un des secteurs interdits de publicité. L'objet de cette restriction est, avant tout, de protéger les autres supports publicitaires, à commencer par la presse écrite, dont la survie et le développement sont largement liés à leurs recettes de publicité.

La Commission européenne à Bruxelles semble vouloir remettre en cause cette réglementation. Diverses propositions d'évolution ont été faites, parmi lesquelles la levée de l'interdiction en faveur des télévisions de proximité . Une telle mesure favoriserait bien évidemment le cinéma, mais il s'agirait moins d'une aide à la diffusion du cinéma qu'au financement des télévisions locales.

En outre, il y aurait tout lieu de craindre qu'une telle libération n'entraîne un accroissement des dépenses de promotion qui pèseraient alors plus lourdement sur le budget des films, alors que la France se caractérise, jusqu'à présent, par la relative faiblesse des dépenses de lancement. Nul doute que cette inflation pénaliserait encore un peu plus le cinéma français.

Une voie, qui ne s'appuierait pas sur le développement de la publicité commerciale, pourrait passer par une modification du cahier des charges des chaînes leur imposant de passer des bandes annonces de films agréés à sortie limitée en nombre d'écrans, à l'occasion de la diffusion des films de première partie de soirée. Une telle idée, a priori sympathique, serait sans doute difficile à appliquer.

(2) Favoriser les films à petit budget dans une perspective de diversité

Il résulte clairement des analyses développées en première partie qu'il existe plusieurs cinémas. En fait, on peut distinguer trois économies du cinéma : à côté des productions artisanales voire à compte d'auteur, des productions semi-artisanales, il y a des produits de grande consommation réalisés par des multinationales ou des grands producteurs nationaux.

Toute la difficulté est d'aider les entreprises artisanales et les « PME » du secteur, sans pour autant décourager les grandes entreprises nationales.

L'obstacle majeur à une telle approche réside dans la définition des films « à petit budget ». L'expérience acquise à l'occasion de la mise en oeuvre de la clause dite de « diversité » montre que les seuils définis en valeur absolue sont arbitraires et sont d'autant plus contestables qu'ils sont définis au niveau des devis et non des budgets effectifs. A titre d'exemple, on peut rappeler que le devis moyen et médians des films se situaient respectivement autour de 4,45 millions d'euros et 2,82 millions d'euros en 2002.

Sans doute faudrait-il compléter une définition budgétaire du film à petit budget par une définition commerciale , considérant qu'un film sortant en première semaine sur moins de 50 écrans n'est pas un film à gros budget.

Cette catégorie de petits films pourrait bénéficier d'un régime de faveur, tant au niveau de l'exploitation que de la distribution, et même de la vidéo.

(a) Inciter les exploitants à maintenir les films plus longtemps à l'affiche et à passer des bandes annonces de films indépendants

Pour le rapport Goudineau, les engagements de programmation constituent l'outil le plus efficace pour améliorer l'exposition du film français dans le but de préserver la diversité des choix offerts au public, et de créer les conditions d'un réel pluralisme de l'offre sur l'ensemble du territoire et tout au long de l'année.

Il estime qu'il conviendrait, à la suite du décret de septembre 1999, de reprendre la réflexion sur le contenu des engagements des opérateurs . Ceux-ci devraient porter sur un certain nombre de points tels :

- le taux des films distribués par des opérateurs indépendants de l'exploitant ;

- un engagement de maintien à l'écran des films un certain nombre de semaines ;

- la limitation du nombre d'écrans simultanément consacrés à un seul film .

L'idée d'un équilibre dans les bandes-annonces entre les films américains et les films européens ne doit pas être écartée même si elle paraît plus difficile à mettre en oeuvre.

Par ailleurs, le rapport Goudineau précité estime qu'il faut poursuivre la politique consistant à subordonner les aides sélectives à la création et à la rénovation des salles, à la souscription d'engagements précis soit en volume de films européens, soit en volume d'art et d'essais, soit en volume d'art de continuation.

Ce rapport fait aussi une place à l'idée de lier l'attribution de certaines aides à une obligation de maintien des films à l'affiche. Enfin, il lance l'idée d'un festival trimestriel des films trop vite disparus de l'affiche.

(b) Ouvrir éventuellement le marché du vidéodisque dès la fin de l'exploitation en salle

Les études mentionnées en première partie du présent rapport d'information ont montré que les vidéogrammes, et en l'occurrence les DVD, représentent une part croissante du marché des films. Or, jusqu'à présent, ce sont surtout les films américains qui ont le plus bénéficié de la dynamique du DVD .

Ce marché devrait constituer un débouché naturel pour les films français ayant rencontré un succès en salle . Mais on peut aussi espérer que , dans le cadre d'un processus analogue à celui du livre , l'on verra prospérer des éditions de « niche » favorables aux films d'auteur , à côté de la commercialisation des « best-sellers ».

De ce point de vue, la rotation rapide des films qui restent souvent à l'affiche moins de 15 jours quand leur démarrage n'est pas immédiat, ne laisse pas le temps au « bouche-à-oreille » de produire ses effets . Chacun a l'expérience de films retirés de l'affiche prématurément.

Autoriser un producteur à demander l'autorisation au CNC -après avis d'une commission de professionnels- de commercialiser les DVD avant l'expiration du délai de 6 mois prévu par le calendrier des médias, aurait l'avantage de ne pas gaspiller le capital de notoriété obtenu tardivement par des petits films, sans pour autant nuire au secteur de l'exploitation.

(c) Promouvoir la diffusion des films dans les circuits spécifiques non-marchands voire marchands

Considérant que la moitié environ du nombre de films qui sortent chaque année sont, pour reprendre la formule du rapport Leclerc, des films « hors marché », vos deux rapporteurs se sont interrogés sur la possibilité de leur assurer une diffusion spécifique en dehors des circuits commerciaux classiques.

A côté des aides à la fabrication de copies pour les villes moyennes, il pourrait être envisagé de faciliter la circulation de copies destinées aux salles expérimentales, ainsi que de DVD destinés à enrichir les collections de vidéothèques.

Parallèlement, l'extension du prélèvement sur les vidéogrammes justifie pleinement un soutien contractualisé aux établissements de location qui s'engageraient dans une politique de diversification de leurs références et de présentation sur leurs rayonnages de films d'auteurs.

(d) Favoriser l'éclosion de nouveaux talents au niveau du court-métrage

Le court métrage, que le rapport Leclerc évoque peu, reste la porte d'entrée des nouveaux talents du cinéma. Compte tenu des coûts limités qu'il représente, le court métrage permet d'aider à l'éclosion de qualités artistiques à moindres frais. Les oeuvres que sont ces courts métrages, sont pourtant rarement montrés au public, si ce n'est dans certains festivals remarquables ou dans certaines salles particulièrement cinéphiles.

Si la réalisation d'un court métrage peut venir en appui d'un dossier d'un financement pour un long métrage ultérieur, elle est trop rarement considérée comme une création digne d'intérêt en elle-même et donc susceptible d'être montrée aux spectateurs. Pourtant, de nombreux courts métrages manifestent des qualités que n'ont pas certains longs métrages trouvant plus facilement une fenêtre d'exposition en salle ou au cinéma. Il est dommage que ces créations restent méconnues.

Il conviendrait, dès lors, d'engager une réflexion sur les engagements que pourraient prendre les multiplexes et les chaînes de télévision pour qu'avant la projection d'un long métrage puisse être diffusé un court métrage de qualité de jeunes réalisateurs. Il y aurait là pour le spectateur un gain qualitatif, puisque qu'il pourrait voir dans une même séance deux films. Pour les salles souhaitant s'engager dans cette démarche, comme pour les chaînes de télévision, les coûts resteraient limités. Salles et chaînes de télévision manifesteraient ainsi leur intérêt pour le cinéma de demain.

2. Encourager l'engagement des collectivités territoriales

Le rapport du groupe de travail du CNC sur le financement de la cinéma que le rapport Leclerc précisément pour mission d'expertiser, avait insisté sur l'intérêt, parmi les nouvelles sources de financement, des apports des collectivités territoriales.

a) Faire cofinancer par l'État des fonds régionaux de développement du cinéma

La FICAM (Fédération des industries du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia) a proposé la création d'une « sofica Industries Techniques », dont les fonds seraient réservés à des oeuvres tournées et post-produites en France. Une telle disposition apparaît a priori peu compatible avec la réglementation européenne.

Toutefois, la création de ce type de soficas pourrait être envisagée au niveau régional dès lors que les collectivités territoriales sont motivées et que la commission européenne à Bruxelles semble faire preuve de beaucoup de compréhension pour les interventions économiques locales.

b) Soutenir les industries techniques par des aides plus aisément localisables

Un autre phénomène anormal était le fait qu'avant la réforme de 1999 l'octroi de l'agrément n'était ni dépendant ni proportionnel à l'existence de dépenses en France. La conclusion était sans appel : tout favorise l'investissement français à l'étranger, rien n'incite aux investissements étrangers en France. Le système français a pu être analysé comme favorisant les exportations de capitaux.

Cette observation vaut pour les industries techniques : tandis que les films qui ne sont pas d'initiative française, sont intégralement ou presque tournés à l'étranger, les films d'initiative française n'étaient, au début des années 1990, tournés en France qu'à raison des deux-tiers.

3. Développer le volet européen et international

En 2001, le cinéma français a représenté 62,5 millions d'entrées à l'étranger (contre 177,1 millions d'entrées dans l'hexagone). Si l'on prend en compte uniquement les films de langue française, en excluant les coproductions, ces longs métrages ont rassemblé, en 2001, 37,4 millions de spectateurs dans les cinémas du monde (hors France), contre une moyenne de 17 millions les années précédentes, ce qui s'explique par le succès d'Amélie Poulain, mais aussi par celui des Rivières pourpres, du Pacte des loups, du Placard, de Taxi 2...

L'exportation des films de langue française à l'étranger a représenté en 2001 un chiffre d'affaires de 207,9 millions d'euros. Les perspectives pour 2002 sont bonnes : sur les sept premiers mois de l'année, l'exportation de ces films représente un chiffre d'affaires de plus de 158 millions d'euros pour 26,4 millions d'entrées.

Pourtant , le rapport Bonnell/Menegoz précité évoquait, il y a quelques années, une crise de la coproduction et de l'idée européenne, en ce sens que le système européen d'encouragement aux coproductions débouche une économie largement « virtuelle » .

Sur le plan structurel, son développement trouve une limite dans le déséquilibre existant entre la France et les autres pays qui font des efforts beaucoup plus limités en faveur du cinéma, comme en témoignent les différences entre les devis des films qui sont près de deux fois supérieurs en France à ce qu'ils sont en Angleterre, en Italie ou en Espagne.

Il en résulte un fonctionnement asymétrique : s'il était, avant la réforme de l'agrément, aisé de trouver en France les 20 % minimum d'une coproduction majoritaire européenne, il est impossible de trouver chez les partenaires le million d'euros d'apport qu'exige un film français moyen.

Comme les producteurs français ne peuvent se passer des accords, même très limités, des producteurs étrangers, la part de ces derniers est notoirement gonflée pour permettre aux devis d'atteindre les 20 % alors exigés.

Telle est la raison pour laquelle on a considéré qu'il fallait prendre acte du déséquilibre des efforts réalisés en Europe pour les industries cinématographiques nationales et abaisser à 10 % la part minimale des contributions financières tout en recentrant davantage sur les films réellement réalisés en France. C'est ainsi que le barème de points a été modifié pour faire une place plus importante aux industries techniques.

L'essoufflement du marché intérieur « captif » devrait conduire le cinéma français à accentuer son ouverture sur l'extérieur . Bien que conscients de la difficulté d'un objectif récurrent de la politique française, vos rapporteurs estiment néanmoins que le contexte est propice à la relance d'une telle politique.

Longtemps, les producteurs ont pu se contenter de travailler essentiellement avec de l'argent franco-français. Aujourd'hui, dit l'un d'entre eux dont les propos sont rapportés dans un dossier des Cahiers du cinéma (juillet/août 2002), il faudra trouver d'autres solutions, et l'une d'elles passe par la coproduction internationale.

Les pistes envisagées par vos rapporteurs se rapprochent de celles mentionnées dans le rapport Leclerc, étant entendu qu'il s'agit non seulement de trouver des financements complémentaires mais encore de dégager des synergies commerciales et artistiques.

a) Bonifier le soutien automatique en fonction des entrées dans les salles européennes

Dans son rapport, M. Jean-Pierre Leclerc insiste, en effet, sur la nécessité d'encourager l'ouverture du système de soutien vers l'étranger, tout en estimant que les contraintes juridiques liées au droit communautaire et à celui de la concurrence, réduisent la marge de manoeuvre.

Il repousse pour cette raison l'élargissement de l'assiette de la taxe spéciale additionnelle (TSA) aux recettes internationales comme, par exemple les cessions de droits à l'étranger. Il considère, également, comme sans portée effective une augmentation des droits de tirage sur le compte de soutien pour le financement des dépenses de promotion à l'étranger. La mobilisation s'opère effectivement à fonds perdus, les entrées en salles réalisées à l'étranger n'étant pas prises en compte dans la détermination des droits de tirage.

Dans la mesure où un certain nombre de pays, à commencer par l'Italie, ont mis en place un système de prélèvement sur les places de cinéma analogue, dans son principe, à celui en vigueur en France, il devrait être possible de les prendre en compte pour le calcul du soutien automatique.

Il s'agirait, dans un premier temps, non de les comptabiliser au même titre que les entrées françaises, dans la mesure où elles ne donnent pas lieu à perception d'une taxe, mais d'en faire un paramètre pour le calcul d'une simple bonification des droits de tirage.

Un tel mécanisme viendrait utilement compléter l'escompte des recettes sur l'étranger que le rapport Leclerc propose de faciliter en autorisant l'Institut de financement du cinéma (IFCIC) à garantir de telles opérations.

b) Orienter l'action d'Unifrance vers la prospection sur le modèle de TVFI

Le rapport Leclerc estime souhaitable que l'État accompagne les producteurs nationaux dans la recherche de coproducteurs étrangers aussi bien dans une logique artistique que financière. Effectivement, il existe, notamment au sein du programme Média +, des incitations au rapprochement entre opérateurs européens, mais sans que les structures mises en place aient un caractère opérationnel. Pour ce rapport, ni Eurimages, ni le réseau ACE (Association pour le cinéma européen) ne permettent l'identification et le repérage de partenaires.

Vos deux rapporteurs estiment indispensable que, dans le domaine du cinéma, se mettent en place, comme dans le domaine industriel, des organismes de prospection commerciale et de rapprochement d'investisseurs. On pourrait songer à susciter l'apparition d'un organisme fonctionnant mutatis mutandis comme Invest in France , qui aurait des « antennes » dans les pays les plus importants et serait adossé au réseau des attachés audiovisuels comme Invest in France l'est sur celui de la direction des relations économiques extérieures.

Le rapport Leclerc envisage de confier cette tâche au CNC au motif que cet organisme bénéficie d'un accès privilégié à ses homologues européens. Vos rapporteurs estiment qu'il faudrait plutôt confier cette tâche à Unifrance. Certes, l'objet principal de cette association est non la recherche de financement mais la promotion du cinéma français à l'étranger. Toutefois, il pourrait être envisagé de rééquilibrer le centre de gravité de cet organisme du culturel au commercial en lui confiant également une tâche de prospection commerciale et financière sur le modèle de TV France Internationale (TVFI), association de producteurs, distributeurs et filiales de chaînes françaises, chargée de leur promotion à l'étranger.

Le fait qu'il existerait des organismes privés spécialisés dans la recherche de partenariats ne suffit pas à condamner une telle piste dans la mesure où la prospection générale laisse de l'espace pour des activités directement opérationnelles.

c) Faut-il admettre les filiales des majors américaines produisant des films français ?

Il convient de rappeler que, pour bénéficier du soutien financier, les entreprises de production ne peuvent être contrôlées au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce 10 ( * ) par des personnes physiques ressortissant d'États non européens ou par des personnes morales établies sur le territoire d'États non européens.

Le rapport commandé par votre commission des finances à « Réalisations et Recherches audiovisuelles » pose très clairement la question : à partir du moment où l'on veut élargir le financement de la production, il faut se demander s'il ne serait pas opportun de permettre aux filiales françaises des sociétés américaines d'accéder au compte de soutien lorsqu'elles produisent des films d'expression originale française.

Au moment où on assiste à une délocalisation croissante de la production américaine, la France a des atouts à faire valoir pour attirer les investissements étrangers.

4. Ne pas alimenter l'inflation des rémunérations

Les deux études mentionnées en première partie du présent rapport d'information font état de facteurs inflationnistes, qui viennent rendre plus difficile le financement des films français. Ce phénomène a sans doute un caractère cyclique et traduit le développement du secteur sous l'effet d'une demande croissante, à la fois des salles et de la télévision.

L'inflation des coûts a pu être constatée à tous les niveaux : rémunérations des « talents », qu'il s'agisse des interprètes ou des autres types de collaboration artistique, effets spéciaux croissants, dépenses de promotion, etc...

Sans doute est-il difficile d'éviter ce qui paraît être la conséquence d'un déséquilibre de marché. Toutefois, notamment en ce qui concerne les talents, on peut se demander si l'augmentation des tarifs ne résulte pas, pour une part, du recyclage des fonds organisés par le compte de soutien.

Le rapport Leclerc, qui reprend sur ce point une analyse de M. René Bonnell dans son ouvrage « La 25 ème image », parle des effets inflationnistes du soutien automatique en évoquant même la théorie quantitative de la monnaie. L'augmentation de certains coûts serait directement liée à l'augmentation de la quantité d'argent rendue disponible par le recyclage de moyens financiers de l'aide publique.

Vos deux rapporteurs estiment, en effet, qu'il faut envisager un encadrement, du point de vue du compte de soutien, des rémunérations prises en compte pour le calcul des droits de tirage.

Une première réaction a eu lieu en 2001 avec le rétablissement d'une nette dégressivité du soutien ; nombreux sont ceux qui, au sein de la profession, estiment nécessaire de revoir les modalités de l'aide pour ne pas encourager une croissance excessive des rémunérations les plus élevées.

a) L'amorce d'un mécanisme stabilisateur avec la dégressivité de l'aide

Longtemps, le soutien automatique a été dégressif. Compte tenu des menaces sur l'équilibre du compte de soutien, il a été décidé, en 2002, de réintroduire des éléments de dégressivité.

Evolution du taux de retour « producteur »

1988

120%-85%-40%

120% jusqu'à 2,74 M€, 85% jusqu'à 7,62 M€,
40% au-delà

1989

120%

Arrêté du 15 février 1989 (taux unique)

1993

140%

Arrêté du 17 mars 1993

1997

130%

Arrêté du 21 mars 1997

1999

140%

Arrêté du 23 septembre 1999

2001

120%

Arrêté du 28 août 2001

2002

125%-110%-50%

125% jusqu'à 2,69 M€, 110% jusqu'à 26.9 M€,
50 % au-delà - Arrêté du 3 mai 2002

En fait, cette mesure devrait aboutir à limiter l'importance du soutien public pour les films les plus coûteux, qui sont aussi ceux ayant des frais artistiques ou de promotion en croissance la plus forte. De fait, on constate la concentration des investissements sur une vingtaine de grosses productions notant, à ce sujet, que près de 70 % de financements sont encadrés en 2001.

Ces films bénéficient donc de manière très déséquilibrée de tout l'appareil de soutien public et des obligations financières à la charge des diffuseurs et légitimer un certain plafonnement du soutien public.

b) Déconnecter les rémunérations « au-dessus de la ligne » du système de soutien

Les auditions conduites par M. Jean-Pierre Leclerc ont mis en évidence la part des rémunérations élevées de quelques scénaristes, réalisateurs ou acteurs dans l'inflation des coûts de production. Le rapport évoque un certain nombre de pistes pour remédier à ce phénomène sans pour autant estimer qu'il s'agit de formules absolument concluantes.

En amont, il mentionne, sans véritable conviction, une saisine des autorités en charge du droit de la concurrence sur d'éventuelles ententes ou positions dominantes pratiquées par les grandes agences artistiques.

En aval, le rapport a étudié la possibilité d'exclure tout ou partie des coûts artistiques du bénéfice du compte de soutien, soit en interdisant le recours à la pratique dite des « équivalents comptables » 11 ( * ) , soit en excluant ces coûts des dépenses servant de base au calcul des droits de tirage.

Le rapport Leclerc conclut à la nécessité de désigner une mission d'expertise sur le sujet. Vos deux rapporteurs estiment qu'il faut approuver cette initiative, car il ne faut pas encourager la « survalorisation des enjeux de concurrence » pour reprendre la formule de l'étude commandée par la commission des finances du Sénat.

La référence au monde du sport pour lequel les autorités américaines ont introduit un ensemble de règles destinées à préserver la diversité, est instructive . Les ligues professionnelles ont ainsi établi une règle (le salary cap ) qui limite la masse salariale dont une équipe peut disposer pour payer ses joueurs, de manière à éviter des surenchères qui compromettraient l'équilibre économique de l'ensemble des clubs. Elles ont de même introduit la règle du draft , qui permet aux équipes les plus faibles de choisir en priorité les nouveaux joueurs entrant dans le circuit professionnel. Enfin, le Sport Broadcasting Act de 1961, qui prévoit les conditions dans lesquelles les ligues professionnelles centralisent les droits de télévision au profit de la collectivité des clubs, n'est pas très différent dans son principe du système du fonds de soutien.

Il ne s'agit pas de limiter la rémunération des « talents » mais simplement d'éviter que de très hautes rémunérations n'absorbent une trop grande part du soutien, bref de mettre en place un système qui n'alimente pas de phénomènes spéculatifs.

B. INSISTER SUR L'AUDITABILITÉ ET LA PRÉVISIBILITÉ DES INTERVENTIONS

Au cours des dix dernières années, le cinéma français a vécu une existence cyclique à un rythme à deux temps alternant rapport/mesures correctrices : rapport de la commission de réforme de l'agrément 12 ( * ) , présidée par Mme Margaret Ménégoz et M. René Bonnell de 1995, rapport de M. Daniel Goudineau sur la distribution des films en salle de mars 2000, rapport de M. Charles Gassot sur l'écriture et le développement des films de long métrage de juin 2000, autant d'initiatives utiles qui ont mis l'accent sur des points faibles de l'industrie française du cinéma.

Sauf en ce qui concerne le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc -et encore, à en juger par les mises au point de l'intéressé-, le champ assigné n'a jamais été suffisamment vaste pour engager une réforme d'ensemble.

Pourtant, un tour d'horizon des articles de presse et de la « littérature spécialisée » témoigne, avant même la crise de Canal +, de critiques générales justifiant qu'une réflexion soit entreprise en vue de la refonte des mécanismes d'aide.

Encore une fois, la démarche de vos deux rapporteurs ne consiste pas à proposer de changer, dès maintenant, la règle du jeu . Le pire n'est pas toujours sûr et le bouclage financier du système n'apparaît pas menacé à court terme.

En revanche, il est sans doute illusoire de croire qu'on pourra trouver les ressources supplémentaires en augmentant les prélèvements ou les contributions des uns ou des autres, voire en créant de nouveaux avantages fiscaux, qui ne sont guère concevables dans la conjoncture actuelle. Le jeu est sinon à somme nulle, du moins à somme faiblement croissante.

Aussi est-ce une sorte de principe de prudence qui devrait amener les pouvoirs publics mais aussi la profession à s'interroger sur la façon de faire évoluer le système. Certains évoquent déjà cette perspective au sein de la profession elle-même.

Ainsi dans son ouvrage précité, « La 25 ème heure », M. René Bonnell, qui est des spécialistes les plus reconnus du secteur, estime qu'il conviendrait de procéder à une réforme du système. Parmi les pistes qu'il envisage, on peut mentionner :

- renforcer le soutien automatique, mais en organisant une « dégressivité telle qu'elle décourage l'inflation des coûts » ;

- simplifier les régimes d'aide sélective à la distribution et à l'exploitation afin d'éviter le saupoudrage actuel et réaliser des économies de gestion ;

- introduire des critères de résultat, pour éviter de subventionner « à l'infini les mêmes protagonistes » ;

- banaliser l'aide automatique, de façon à ce que les subventions versées à une même société puissent être utilisées, quelle que soit leur origine, à l'exploitation ou à la commercialisation.

Une telle prise de position témoigne de la convergence entre les préoccupations d'un homme de métier ayant l'expérience du privé comme du public et l'attitude de vos deux rapporteurs, qui, soucieux d'inviter le gouvernement à mettre en application les principes de la loi organique précitée du 1 er août 2001, constatent qu' il est, même au sein des milieux du cinéma, des voix pour admettre le principe d'économies de gestion et de critères de résultats .

Mais la recherche de l'efficacité de l'action publique ne passe pas seulement par la révision des procédures dépensières ; elle consiste, également, à faire jouer à l'État son rôle de régulateur du marché et, notamment, à lui faire veiller au respect des règles de concurrence qui, dans le cas particulier, sont aussi le gage de cette diversité culturelle à laquelle notre pays est particulièrement attaché.

1. Créer les conditions structurelles de la diversité économique et culturelle

Bien que l'on puisse se demander si l'existence d'un grand nombre de producteurs indépendants suffit, à elle seule, à garantir le dynamisme et la créativité du secteur, l'on a des raisons de penser que l'intégration verticale de la production à l'exploitation, quand elle se développe au niveau international, aboutit à une homogénéité des produits mis sur le marché.

Une première voie pour prévenir ce risque de nivellement serait de développer des aides discrétionnaires à la production cinématographique de qualité. Tel est l'objet de la procédure dite d'avance sur recettes, qui, précisément, parce qu'elle a pour objet de substituer une logique culturelle à la logique commerciale, est emblématique à la fois pour ceux qui y voient la manifestation par excellence de l'État providence et pour ceux qui en font l'exemple d'une dérive des interventions de l'État en matière culturelle.

Vos rapporteurs estiment que, si une telle procédure mérite d'être confortée, elle pourrait être adaptée en vue de s'efforcer de respecter , à un niveau opérationnel, les principes de lisibilité et de prévisibilité, qui découlent de la loi organique précitée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

L'intervention correctrice de l'État consiste aussi à exercer sa fonction de régulateur de la concurrence. De fait, le maintien de la concurrence dans le secteur du cinéma n'est pas simplement la condition d'une allocation optimale des ressources mais aussi celle d'une pluralité d'acteurs, gage d'un dynamisme culturel.

a) Passer d'une logique de subvention à une logique de production

La procédure de l'avance sur recettes créée en 1959 a prospéré en dépit des critiques. Même s'il peut paraître ambitieux de changer quelque chose à une procédure vieille de plus de quarante ans et qui a fait ses preuves, vos deux rapporteurs estiment que l'entrée en vigueur de la loi organique précitée relative aux lois de finances pourrait conduire à adapter les procédures actuelles.

La politique danoise pourrait constituer une source d'inspiration dans la mesure où elle fait une large place à l'idée de responsabilité et paraît reposer sur l'idée que l'encouragement à la production d'oeuvres de qualité doit s'inscrire dans une démarche d'investissement plus que de subvention.

(1) Une référence intéressante pour faire évoluer l'avance sur recettes : le modèle danois

Le rapport de M. Michel Cretin, conseiller-maître à la Cour des comptes, de 1992 fait état des critiques de fond sur cette procédure que l'on retrouve fréquemment énoncées aujourd'hui : arbitraire des choix, encouragement à la production d'oeuvres sans public, influences occultes, irresponsabilité des membres de la commission protégés par l'anonymat des votes, médiocrité des choix résultant d'une procédure collective qui joue nécessairement au détriment des projets et des talents originaux...

La procédure est régie par des règles généreuses, notamment en matière de remboursement 13 ( * ) , que le rapport Leclerc suggère opportunément de rendre plus rigoureuses 14 ( * ) , sont conformes à la logique d'une procédure, qui relève de l'aide plus que de la coproduction.

Compte tenu des consensus de la profession sur la pérennisation du système, M. Michel Cretin s'était contenté de souhaiter une amélioration nécessaire de la connaissance des recettes producteur qui servent de base au remboursement, tout en reconnaissant le caractère inévitable d'une zone de flou et d'un arbitraire dans les choix, avec pour seul correctif le renouvellement régulier des membres de la commission.

Symétriquement, le système danois fait une place manifestement importante à la responsabilité individuelle.

(a) Mettre en oeuvre un système auditable sur les plans financier et artistique

L'institut danois du film gère deux mécanismes d'aide :

- une aide automatique, dite « 60-40 scheme », qui permet à cet organisme d'accorder des aides pouvant aller jusqu'à 40 % sans évaluation qualitative du projet ;

- une aide sélective, dite « consultant scheme », qui est destinée à favoriser le développement et la production de films de long métrage sur la base d'une évaluation des mérites artistiques du projet.

Le système est d'autant plus intéressant que le Danemark est un pays actif sur le plan cinématographique. En 2001, il a produit 24 films qui ont représenté une part de marché de 30 %. Le nombre d'entrées a atteint 12 millions.

L'échelle financière des films produits est différente. En 2000, un film danois était aidé à près de 40 % et avait un coût moyen d'1,6 million d'euros, soit moins du tiers du coût moyen d'un film français.

L'examen des règles qui président aux demandes d'intervention, souligne le caractère très financier des préoccupations de l'institut danois du film 15 ( * ) . L'accent est également mis sur les questions de comptabilité et de « reporting ». C'est ainsi que six mois au plus après la sortie du film, l'institut du film danois doit être destinataire de comptes définitifs certifiés par un comptable agréé

(b) L'intérêt d'une pluralité de « guichets » personnalisés

Dans le système danois, l'aide sélective se caractérise par l'existence de plusieurs guichets. On compte 3 consultants, choisis pour 3 ans prolongeables 2 ans parmi des professionnels confirmés pour distribuer environ 17 millions d'euros de subventions à la fois pour les films de fiction et les documentaires.

Une telle organisation ne manque pas de rappeler la solution radicale évoquée dans le rapport Cretin précité consistant à abandonner le système de la commission au profit d'une délégation de pouvoir à un petit nombre de personnalités choisies par le ministre et personnellement responsables, chacune pour son compte, de la gestion des fonds qui leur sont confiés.

L'intérêt de ce type de proposition est évident : la responsabilité des choix est d'abord clairement individualisée ; elle est ensuite complète , en ce sens qu'elle ne s'arrête pas à la sélection d'un scénario mais se prolonge jusqu'à la sortie du film achevé .

M. Michel Cretin avait estimé cette voie irréaliste, à la fois parce qu'elle était « trop contraire à la tradition française en matière d'octroi des aides publiques » pour avoir quelques chances de succès, et parce que la profession n'était pas prête à donner son adhésion à un tel système.

Vos deux rapporteurs considèrent cependant que les esprits ont aujourd'hui changé et que, dans la perspective ouverte par la loi organique précitée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, il devrait être possible de faire évoluer notre système de soutien discrétionnaire au cinéma dans le sens d'une plus grande responsabilisation des acteurs publics mais aussi corrélativement d'une diversité accrue.

Le système actuel de guichet unique, marqué par un mode de fonctionnement très impersonnel -qui se traduit, notamment, par la rotation très rapide du président de la commission et des personnalités composant chaque collège, ainsi que par le recours au vote à bulletin secret-, est organisé comme un examen dans lequel les candidats ont de bonnes chances de se retrouver membres du jury et réciproquement.

La collégialité systématique qui caractérise la procédure actuelle, n'est pas dénuée d'effets pervers, notamment parce que l'on aurait tendance à niveler les apports financiers dans un souci d'équilibre.

Dans le cas où l'on cesserait de considérer l'avance sur recettes comme une sorte de bourse pour en faire un investissement dans un produit d'innovation culturelle, dégagé de la pression de la rentabilité à court terme, référence au modèle danois et à certains égards britannique prend tout son sens.

Ainsi l'existence de plusieurs guichets peut être gage de pluralisme du fait de la personnalisation de décisions. En outre, l'allongement de la durée du mandat qui seul permet une évaluation réelle des résultats d'une activité éminemment aléatoire, serait une perspective intéressante ouverte par cette multiplication des guichets.

Il ne s'agit là que de perspectives tout à fait exploratoires, dès lors que le système actuel ne présente pas de dysfonctionnements majeurs. En outre, l a personnalisation des décisions peut effectivement inquiéter tous ceux qui font de la collégialité et de la rotation rapide des personnes composant les instances, les meilleurs garde-fous contre les risques de favoritisme .

Toutefois, il a paru intéressant de les évoquer dans la mesure où il permettrait de traduire dans les faits le principe de responsabilisation, étant entendu qu'il serait toujours possible de mettre au point des solutions intermédiaires.

Actuellement l'avance est décidée sur scénario. Le fait de l'accorder en général plus sur une histoire que sur un projet mûri tant le plan artistique qu'économique, est très significatif d'une certaine conception du cinéma dans laquelle l'oeuvre, pour ne rien dire du produit, a tendance à s'effacer derrière l'idée.

L'« avance » est une forme de label délivré très en amont qui sert de catalyseur pour permettre à son titulaire d'obtenir les autres apports qui vont lui permettre de « finaliser » son projet. Cette séquence, qui constitue certes la reconnaissance de la valeur de la sélection, a l'inconvénient d'être irréversible à la fois du point de vue économique qu'artistique : au final, l'avance peut sur-financer un film qui n'en n'aura finalement pas besoin, comme elle peut se trouver gaspillée dans un projet qui se révèlera décevant, avant même le premier « tour de manivelle ».

S'il est concevable que la présélection reste le résultat d'un processus d'examen collectif, le choix définitif gagnerait sinon à procéder d'un choix individuel du moins à être effectuer sur la base de projets parvenus à un degré de maturation analogue à celui des projets sur lesquels un professionnel décide d'investir. Inversement, plus une procédure intervient en amont, plus elle doit permettre d'un interrompre un processus manifestement mal engagé.

(2) Définir critères et repères

La loi organique précitée du 1 er août 2001, relative aux lois de finances, pose une règle générale : à chaque masse de crédits doit correspondre un responsable identifié et une série d'indicateurs de résultats. Ce principe simple pose à l'évidence des problèmes d'application dans le domaine culturel. Comment apprécier les performances dans un domaine éminemment qualitatif ? Sans prétendre apporter des solutions définitives, vos deux rapporteurs estiment qu'il convient d'essayer de mettre au point des procédures tendant à une certaine quantification des résultats.

En l'occurrence, il semble important d'expliciter des choix et des arbitrages aujourd'hui le plus souvent implicites, et de mettre en place une instance d'évaluation indépendante.

(a) Faut-il encadrer le nombre de films soutenus ?

La plupart des rapports administratifs relatifs au cinéma s'interrogent -en dépit de formules prudentes- sur l'existence d'une forme de surproduction cinématographique .

Tel est notamment le cas du rapport Leclerc qui conclut : « Sans tomber dans le malthusianisme, force est de constater qu'il existe une limite pratique et non seulement financière, à la production cinématographique française, dont il y a tout lieu de se demander si, s'agissant du nombre des films produits, elle n'a pas été atteinte, voire dépassée, par les chiffres exceptionnels des années 2001 et 2002 ».

Cette observation rejoint celle formulée dans le rapport susmentionné de M. Michel Cretin, qui soulignait l'importance sans doute excessive de la part accordée au premier collège chargé d'aider les premiers films et estimait « probablement illusoire de penser révéler chaque année 25 nouveaux réalisateurs ».

On voit bien s'esquisser une opposition entre deux attitudes : d'un côté, on trouve les experts issus de l'administration, qui mettent en cause, plus ou moins ouvertement, l'absence de systèmes de régulation et soulignent le risque pour l'État de favoriser une offre inadaptée aux contraintes de l'exploitation cinématographique, surtout, trop abondante par rapport aux possibilités d'absorption du marché ; de l'autre, il y a les professionnels qui s'inquiètent de tout ce qui pourrait brider leur liberté créatrice et revendiquent le droit à produire des oeuvres hors marché jugées indispensables à la vitalité du secteur.

Le débat n'est jamais aussi vif que dans le domaine du cinéma eu égard au fait que, contrairement à d'autres secteurs, il s'agit d'investissements lourds. Sans doute dans une conjoncture budgétaire difficile, est-on fondé à faire un peu plus de place aux considérations financières.

Faut-il, pour autant, définir une forme de numerus clausus et encadrer le nombre de films soutenus discrétionnairement par l'État sur la base de critères artistiques ? Même si ce souci n'a rien de révolutionnaire dans la mesure où ce plafonnement existe déjà, de fait, pour les premiers films 16 ( * ) , vos deux rapporteurs ne vont pas jusque là, mais se contentent de souhaiter que l'on ne produise qu'un nombre de films cohérent avec les possibilités d'exposition au public .

Tandis qu'un nombre important de films ne connaît qu'une sortie dite « technique », il semble, d'après le Conseil supérieur de l'audiovisuel, que 60 % des films ne sont même jamais diffusés sur une chaîne de télévision en clair , ce que la différence de publics ne suffit pas à justifier de façon pleinement satisfaisante 17 ( * ) .

On a des raisons de penser qu'un système d'attribution personnalisé sur le modèle danois pallierait en partie ce défaut dans la mesure où le professionnel responsable du « guichet » se sentirait responsable à tous les stades de la vie du film et serait amené à prendre en compte dans la décision d'aide, non seulement les qualités artistiques du projet, mais également ses perspectives de distribution ou de diffusion.

Pratiquement, plutôt que de confier le soin de la sélection à une forte personnalité, parfois simplement cinéphile, flanquée de collèges de professionnels qualifiés, il faudrait se demander si l'on aurait pas avantage à confier la responsabilité du choix de films aidés à plusieurs personnes ayant une expérience professionnelle dans la production.

A une instance de nature fondamentalement collégiale, chargée de gérer l'ensemble des crédits d'aide discrétionnaire, soit près de 21 millions d'euros, on pourrait ainsi substituer plusieurs guichets confiés à des personnes physiques , responsables comme le seraient des producteurs, des sommes qu'on leur confie sur une période de temps suffisamment longue pour qu'on puisse juger de leur gestion .

On n'est pas obligé d'adhérer à l'idée que l'avance sur recettes est, non une subvention, mais un investissement dans la qualité, effectué par des personnes soustraites aux contraintes commerciales -ce qui est pourtant dans l'esprit de la procédure dans la mesure, s'agissant d'une avance théoriquement remboursable. Mais, il ne serait pas inconcevable d'accroître la personnalisation des choix, par exemple dans le cadre d'une procédure à deux niveaux comportant une présélection sur scénario effectuée dans un cadre collégial et une décision définitive personnalisée sur la base d'un projet finalisé tenant compte de tous les éléments de nature à augmenter les chances de succès du film.

Ainsi, pourrait-on réfléchir avec toute la prudence et les nuances que requiert un domaine éminemment qualitatif, à la façon de mettre en oeuvre le principe de responsabilisation qui découle de la loi organique précitée relative aux lois de finances.

(b) Envisager une instance ou une méthode systématique d'évaluation qualitative

Le rapport Leclerc considère que les résultats d'exploitation des films ayant bénéficié de l'avance sur recettes sont bons au motif que, sur la période 1996-2001, la moitié des films aidés ont dépassé 50.000 entrées, tandis que cette part n'est que de 40 % pour les films n'ayant pas bénéficié de l'avance.

Le rapport fait état également de statistiques sur les films aidés qui ont été sélectionnés ou primés dans les instances de validation qualitatives que sont les festivals.

Bilan général de l'avance sur recettes

Festival international du film de Cannes :

- sélection officielle + hors compétition +

un certain regard :

- quinzaine des réalisateurs :

- semaine de la critique :

Festival international du film de San Sebastian

Mostra internationale du cinéma de Venise

Festival international du film de Berlin

Festival international du film de Toronto

Festival international du film de Locarno

1999

6

6

0

2

4

3

12

5

2000

4

6

2

1

3

1

11

4

2001

7

4

1

4

5

2

13

7

Les résultats ainsi produits paraissent devoir être approfondis, dès lors que l'on ne distingue pas, par exemple, entre les films sélectionnés et les films primés. En fait, ces chiffres devraient être remis dans leur contexte et hiérarchisés en fonction, notamment, du nombre total de prix ou de sélections obtenues. De même, on pourrait comparer les performances françaises à celles d'autres pays actifs dans le domaine du cinéma.

Des données existent au sein du CNC, qui illustrent le bilan de l'avance sur recettes, qu'il s'agisse de la liste des réalisateurs que l'aide a fait connaître du grand public, ou de la comparaison, selon le nombre d'entrées, entre les films qui ont et qui n'ont pas bénéficié de l'aide sélective. Dans une perspective de moyen et long termes, qui est sans doute la plus pertinente, on remarque un des indicateurs les plus intéressants qui est la liste des films sortis de 1997 à 2001, ayant atteint plus de 500 000 entrées et dont les réalisateurs ont bénéficié de l'avance sur recettes pour leur premier ou deuxième film depuis 1985.

En tout état de cause, il conviendrait de disposer pour chaque film aidé, et, globalement, pour chaque responsable de l'attribution des aides, d'une forme de bilan d'activité retraçant des données de base telles que d'une part, le montant du devis initial, le coût effectif 18 ( * ) et les aides publiques reçues et d'autre part, le nombre d'entrées en salles, les préachats de chaînes de télévision, récompenses dans les festivals, etc...

D'une façon ou d'une autre, il s'agirait de mettre sur pied une sorte d'instance d'évaluation qualitative, chargée de rassembler des éléments permettant de disposer d'indications objectives sur la qualité des oeuvres .

Vos rapporteurs posent un principe sans chercher à voir comment on pourrait organiser pratiquement cette forme d'évaluation. Il ne s'agit pas de constituer une sorte de « grand jury » indépendant chargé de juger, individuellement, de la qualité des oeuvres sur la base d'un certain nombre de critères définis à l'avance, mais plutôt de repérer des manifestations professionnelles, dont la fonction serait précisément de se faire une idée des mérites d'ensembles significatifs d'oeuvres ayant bénéficié de l'aide de l'État.

L'objectif n'est, en aucun cas, d'apprécier, individuellement, la qualité d'oeuvres particulières et des personnes qui les ont crées, mais d'évaluer, globalement, sur une certaine période de temps, la performance d'un système et de ceux qui ont la responsabilité de la mettre en oeuvre.

On peut ajouter qu'il est moins important d'analyser les succès que de comprendre les échecs pour organiser une certaine forme de retour d'expérience, qui semble faire défaut à une procédure actuelle.

Une telle idée que d'aucuns considéreront sans doute comme simpliste, a paru intéressante à énoncer pour susciter le nécessaire débat sur l'appréciation de la qualité des prestations et des résultats en matière culturelle.

b) Ouvrir le chantier de la régulation de la concurrence

Tant le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc que l'étude de « Réalisations et recherches audiovisuelles » insistent sur l'accroissement de la concentration à tous les niveaux.

Le problème est double, économique et culturel : le secteur est-il suffisamment ouvert ? La télévision ne va-t-elle pas inciter les producteurs français à produire pour les besoins des larges audiences de première partie de soirée, au risque de brider leurs initiatives créatrices ?

(1) Faut-il découpler cinéma et télévision ?

La logique de convergence a montré ses limites. Certains estiment que le mouvement, qui s'est développé avec la croissance de la bulle Internet, a eu des effets dévastateurs sur l'industrie cinématographique et, plus généralement, sur la qualité et la diversité du paysage cinématographique français.

La nature même de ces sociétés, créées par des chaînes de télévision et économiquement adossées à celles-ci, leur offre des avantages concurrentiels évidents : le lien avec la chaîne leur permet de bénéficier à la fois d'une surface financière sans comparaison avec celle dont dispose la majorité des producteurs et distributeurs et d'une garantie d'achat des films pour une diffusion télévisée.

Une partie de la profession, en l'occurrence il s'agit du Bureau de liaison de l'industrie cinématographique -BLIC-, dénonce ce qu'elle considère, à tort ou à raison, comme une forme d'abus de position dominante en :

• produisant et distribuant chaque année un nombre excessif de films avec parfois pour seul objectif de faire identifier les oeuvres comme films de cinéma et optimiser ainsi leur passage sur la chaîne ;

• organisant une surenchère et une massification des moyens promotionnels qui laissent hors compétition la majorité des autres distributeurs et producteurs ;

• achetant un nombre considérable de films étrangers, souvent au moyen de prix surévalués, qui biaisent le marché, excluant les autres distributeurs qui ne peuvent en amont suivre la surenchère des tarifs et qui sont en aval privés des possibilités de vente à la chaîne déjà largement fournie en films étrangers par sa filiale.

Faut-il, en conséquence, favoriser le recentrage de chaque type d'opérateurs sur les métiers dont il détient le savoir-faire ? Convient-il de décourager les intégrations opérées par des groupes pour lesquels le cinéma ne constitue qu'une activité annexe ou de complément par rapport à leur activité principale de diffuseur de télévision ? La question mérite , en effet, d'être posée .

Il faudrait ainsi, toujours selon le BLIC, que la réglementation qui limite la possibilité de coproduction des chaînes hertziennes en clair 19 ( * ) , soit étendue à l'ensemble des services de télévision et que soit mis fin à la dérogation qui permet aux filiales, détenues à 100 % par des chaînes de télévision du câble, du satellite et par des services fonctionnant par abonnement, d'être assimilées à des entreprises indépendantes, dès lors qu'elles ne sont pas producteurs délégués, ce qui leur permet d'inclure leurs films dans la part obligatoire d'investissement dans la production indépendante.

Ces mesures permettraient à la fois de mettre un frein au mouvement de « satellisation » du cinéma par les services de télévision et de favoriser la relance des politiques d'achat de droits des opérateurs de télévision. Bien entendu, elles devront également pouvoir s'appliquer aux chaînes qui seront diffusées en mode numérique hertzien terrestre.

Dans une certaine mesure, le rapport Leclerc se fait l'écho de ce type de préoccupations en envisageant une augmentation de leur contribution et en diminuant les avantages que les chaînes de télévision peuvent obtenir de leur accès au compte de soutien.

Naturellement, les chaînes en clair contestent à la fois l'extension de l'assiette de calcul des obligations financières des chaînes aux recettes de parrainage 20 ( * ) et leur exclusion du bénéfice du compte de soutien , alors même que leurs droits ont déjà été réduits depuis le décret du 24 février 1999 21 ( * ) , et que le poids de leurs obligations d'investissement s'est accru en conséquence, notamment par suite de l'effort qui leur a été demandé pour aider le secteur de la distribution 22 ( * ) .

L'exclusion des chaînes généralistes du bénéfice du compte de soutien 23 ( * ) constituerait, en effet, une brèche dans un des principes de base du système qui est d'offrir des contreparties aux cotisants .

Les chaînes généralistes et notamment celles du secteur public sur lesquelles seraient ainsi prélevé près de 8 millions d'euros, soulignent aussi les conséquences budgétaires de cette mesure :

- le soutien automatique, parce qu'il constitue souvent la seule ressource d'amortissement du risque de coproduction, est un facteur de réduction du coût déjà élevé de diffusion de nombreux films et même de « gros » films dont les budgets sont tels que les chaînes n'accèdent aux recettes qu'à partir d'un niveau élevé de succès (à valoir importants, territoires exclus des recettes, soficas, etc.), alors que l'aide est calculée dès les premières recettes ;

- face à la perspective de chute du retour sur les parts coproducteurs, les chaînes auraient tendance à durcir les conditions de négociation de leur participation et, plus généralement, à réduire les financements par film pour ne pas avoir à surpayer indirectement le droit d'antenne, à préférer la sécurité des films programmables en « prime time » et plus généralement de gros films déjà sur-financés 24 ( * ) , au détriment des oeuvres « difficiles », ce qui ne pourrait que relancer l'inflation des coûts.

Le rapport du groupe de travail du Centre national de la cinématographie a souligné par ailleurs les difficultés que peuvent rencontrer certains distributeurs indépendants pour leur permettre d'accéder à certains films, notamment étrangers, dont l'exploitation leur permettait de compenser les risques pris pour la distribution de films français.

La possibilité prévue par le décret du 9 juillet 2001 tendant à permettre aux chaînes généralistes de participer à un fonds consacré à la distribution serait peut-être une façon d'aider à la production indépendante.

Dans la même perspective, il pourrait être envisagé de limiter la part qu'un diffuseur peut détenir dans un distributeur, suivant les mêmes principes que ceux applicables au niveau de la production.

Vos rapporteurs estiment que le débat doit être replacé dans son contexte. Faut-il augmenter la contribution des chaînes généralistes au compte du soutien, section cinéma, ou faut-il parallèlement multiplier les contraintes pesant sur elles ? La position peut se défendre, mais il faut avoir conscience que ce renforcement des contraintes sur les chaînes généralistes est paradoxal au moment où le cinéma voit faiblir sa puissance de programmation 25 ( * ) et, surtout, qu'un tel choix aura pour conséquence de peser sur le budget des chaînes généralistes et, en particulier, sur celui de France Télévisions.

D'une façon ou d'une autre, cela suppose que l'État compense les charges supplémentaires ou le manque à gagner qui en résulterait. A certains égards, la question est bien de savoir s'il convient de distraire une partie de l'augmentation souhaitable de la redevance audiovisuelle pour soutenir le développement du cinéma.

(2) Faut-il encadrer l'intégration verticale ?

Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc reste très prudent sur la question de l'intégration verticale. Il souligne qu'avant d'intervenir pour interdire aux chaînes d'être présentes à tous les stades de la filière cinématographique, il faudrait, dès lors que le statu quo n'est pas remis en cause pour les groupes spécialisés dans le cinéma, être en mesure de démontrer que les chaînes de télévision sont dans une situation particulière justifiant une discrimination à leur encontre.

De ce point de vue, la seule voie envisageable serait d'intégrer le cinéma dans le dispositif de limitation des concentrations prévues par la loi modifiée du 30 septembre 1986.

Faut-il, en fonction des considérations développées ci-dessus, adopter des mesures radicales de régulation anti-concentration au moyen de règles capitalistiques ? Il faut reconnaître qu'en dépit des tentations la problématique du rapport Bredin de 1982 reste d'actualité : la rupture de l'intégration verticale laisserait subsister des circuits de salles très importants qui ne pourraient tendre qu'à une concentration horizontale accrue.

La tentation existe aussi d'éditer des règles rigoureuses empêchant les diffuseurs de développer leur activité dans le domaine du cinéma.

On a vu quels pouvaient être les effets pervers d'une prise de contrôle externe de la distribution du point de vue de la diversité. Il est certain que l'arrivée dans le cinéma d'opérateurs dont le centre de gravité économique se situe en dehors du secteur, a des conséquences négatives et pourrait légitimer l'instauration de limites au contrôle capitalistique que peut exercer une entreprise ou un individu extérieur au secteur, à l'image de ce qui existe dans la communication audiovisuelle.

Le pluralisme doit-il être préservé dans le domaine du cinéma comme il l'est dans celui de la communication ? Indépendamment des difficultés d'application de ce type de régime, comme l'a montré le calcul du seuil des participations étrangères dans Canal + notamment pour la détermination du capital flottant, rien n'assure que ce type de règles ait une efficacité réelle dans la préservation du pluralisme et de la diversité.

L'actualité récente a montré que l'intégration verticale entre les différents niveaux de la filière cinématographique se doublait d'une concentration horizontale. Ainsi, le rapprochement entre Pathé et Gaumont, qui a abouti à la création d'Europalace, a été l'occasion pour M. Laurent Fabius, alors ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, d'imposer, par une lettre du 21 février 2001 aux intéressés, un certain nombre de cessions de façon à éviter l'apparition de positions dominantes sur le plan local.

On note également que Pathé a accepté de ne pas imposer ni à chercher à obtenir des distributeurs une exclusivité, quelle soit nationale ou par zones de chalandise. Enfin, Pathé s'est également engagé à ce que sa société d'exploitation en salle et sa société de distribution soient dirigées par des managements distincts. A cela s'ajoute l'engagement qu'aucune discrimination ne viendra favoriser la distribution des films produits par des sociétés avec lesquelles Pathé aurait des accords à long terme.

L'analyse du marché doit tenir compte de l'évolution des modes de consommation et, notamment, de la déconnexion entre l'acte individuel d'achat et l'acte de consommation. Ce phénomène a abouti au développement des formules des cartes d'accès illimité. L'uniformité du prix est poussée à l'extrême. Le prix n'est plus lié à un acte de consommation individuelle mais à la souscription à un service, en l'occurrence à un certain rythme de fréquentation de cinémas dans une communauté de salles. Une telle modification du mode de consommation est indissociable de l'apparition des multiplexes.

Phénomène très positif pour la profession, et pour la consommation cinématographique dans son ensemble, les multiplexes n'en posent pas moins des problèmes au regard du droit de la concurrence. Le Conseil de la concurrence a estimé que les coûts variables ne seraient plus couverts qu'à partir d'un nombre élevé d'entrées annuel situé autour de 70 et que, compte tenu des éléments en sa possession, ce nouveau mode de commercialisation des places de cinéma ne constituait pas un prix prédateur.

Il n'en reste pas moins que l'on peut se demander si les cartes illimitées n'ont pas pour conséquence d'inciter le spectateur à réserver une grande partie de sa fréquentation aux salles de l'émetteur de la carte, ce qui, du point de vue du droit de la concurrence, pourrait être considéré comme une remise de fidélité, le cas échéant anti-concurrentielle, lorsqu'elle émane d'une entreprise en position dominante. L'existence au moins dans la région parisienne de cartes concurrentes rend, il est vrai, ce risque plus faible.

2. Réfléchir à une clarification des mécanismes de soutien

Nombreux sont ceux qui soulignent la complexité du soutien, tant le système mis en place depuis la fin de la seconde guerre mondiale, s'est progressivement opacifié par suite de l'accumulation de « guichets » aux objets les plus variés.

A la simplicité du schéma original fondé sur un soutien automatique correspondant à une épargne forcée, s'est substituée une nébuleuse de procédures, dont la logique n'est pas toujours bien perçue par les professionnels eux-mêmes.

Le débat se focalise notamment autour du partage du soutien entre aides automatiques et sélectives .

Il y a là, à certains égards, la manifestation de deux conceptions de l'intervention de l'État , selon que l'on fait confiance aux actions discrétionnaires adaptées à chaque cas particulier, ou que l'on estime, au contraire, qu'il faut s'en tenir à des mécanismes automatiques aussi prévisibles que possible.

Ainsi le BLIC -Bureau de liaison des industries cinématographiques- estime que les aides sélectives, peu structurantes et peu prévisibles, ne doivent pas être développées au-delà de l'existant.

Paradoxalement, la volonté de clarification, qui a conduit à établir un barème transparent pour calculer les droits de tirage 26 ( * ) , a eu pour conséquence de faciliter les critiques de la Commission européenne à Bruxelles.

Un effort de clarification s'impose par rapport aux intentions originelles de ses fondateurs.

A cet égard, on peut mentionner les propos tenus par l'un de vos deux rapporteurs il y a 10 ans, alors qu'il effectuait, pour le compte de l'Inspection générale des finances, un audit du compte de soutien à l'industrie cinématographique :

« Il importe en effet de réagir contre tous les brouillages qui, de plus en plus, tendent à rendre peu lisible l'architecture de 1986. Celle-ci doit, au contraire, si l'on souhaite qu'elle dure (et soit durablement défendue, tant vis-à-vis des professionnels que de nos partenaires de la CEE), retrouver sa qualité primitive. Il faut désormais distinguer nettement entre le régime de l'aide automatique, mécanismes économiques correspondants à une épargne forcée et celui des aides sélectives, répondant à des soucis de qualité encourageant la naissance de nouveaux talents ».

Il semble donc utile de procéder à une forme de « retour aux sources » en s'efforçant de préserver la logique de base du système qui est de favoriser le réinvestissement . La question reste de savoir comment moduler cette aide en fonction de critères structurels et culturels.

a) Soit en distinguant « épargne différée » à restituer sur des critères de marché et aides ciblées ou sélectives

A l'origine, le compte de soutien repose sur le principe d'une épargne forcée. Le produit de la taxe spéciale sur les places de cinéma est mis de côté pour être restitué aux producteurs de films français. On prélève ainsi une taxe sur l'ensemble des entrées, quelle que soit la nationalité du film, pour la redistribuer entre les seuls agents produisant des films nationaux.

La redistribution s'effectue sur la base d'un critère simple, qui est le nombre d'entrées obtenues par le film ayant dégagé des recettes. Il s'agit d'une logique de marché , puisque le produit de la taxe est réparti proportionnellement au succès commercial des films . Le producteur qui a eu beaucoup d'entrées va voir sa capacité à financer un nouveau film largement facilitée.

A l'autre extrême, l'on trouve l'aide sélective à caractère discrétionnaire qu'est l'avance sur recettes qui répond à des préoccupations de qualité et doit encourager l'éclosion de nouveaux talents.

La situation est devenue passablement confuse, dès lors que l'on a commencé à aider tous les acteurs de la filière, c'est-à-dire non seulement les producteurs, mais les distributeurs et les exploitants sur la base d'un partage du produit de la taxe spéciale - dont on doit bien remarquer le caractère arbitraire - et que l'on a cherché à bonifier ex ante le soutien automatique en fonction de critères mélangeant économie et culture.

En fait, une première approche pourrait consister à rechercher une plus grande cohérence dans les différentes aides apportées au cinéma français sur la base de la typologie suivante :

- les aides automatiques , prélevées sur les recettes commerciales des agents pour constituer une épargne forcée, qui leur serait restituée lors de l'investissement suivant sur la base de critères de marché ;

- les aides sélectives ciblées , définies sur des bases objectives en fonction de considérations structurelles ;

- des aides sélectives « discrétionnaires » , accordées par le CNC au cas par cas au vu du dossier et comportant la prise en compte d'éléments qualitatifs.

Sur la base d'une telle typologie, on pourrait, d'une part, cantonner l'aide automatique aux seuls produits de la taxe spéciale perçue sur les salles de cinéma, et d'autre part, mettre en oeuvre une aide ciblée consistant en des mécanismes -généraux ou négociés- de bonification du soutien automatique.

(1) Cantonner l'automaticité de l'aide au seul produit de la taxe spéciale additionnelle

On pourrait cantonner le soutien automatique au seul produit de la taxe spéciale additionnelle (TSA). Aujourd'hui, le produit théorique de la taxe payée à l'occasion de la vente d'une place de cinéma, est affecté d'un coefficient qui permet aux professionnels du cinéma de percevoir plus qu'ils n'ont versé. Ce coefficient, que l'on a abaissé de 140 % à 120 % en 2001, avant d'instaurer un barème dégressif allant de 125 % à 50 % en 2002, bonifie -sans justification évidente à ce niveau- l'épargne forcée de la filière. Cette « surgénération » est rendue possible par le fait que le compte de soutien est également alimenté par une fraction de la taxe sur la publicité télévisée payée par les chaînes de télévision émettant en clair.

Autant il paraît cohérent de restituer automatiquement à la profession sur la base de critères de marché, ce qu'on peut appeler l'argent du cinéma, autant on peut considérer que le soutien automatique n'a pas vocation à être financé au moyen de la taxe sur la publicité télévisée qui est, selon vos rapporteurs, l'argent de la télévision .

Cette taxe est, en effet, prélevée sur des agents économiques, en l'occurrence les télévisions hertziennes, pour être redistribuée pour l'essentiel à d'autres agents faisant partie d'un secteur économique, connexe certes, mais distinct. En outre, le raisonnement consistant à considérer qu'il s'agit d'une façon d'internaliser les effets externes négatifs de la télévision sur le cinéma, perd de sa pertinence avec l'affaiblissement déjà évoqué de la puissance de programmation des films à la télévision 27 ( * ) .

Dans cette perspective -et en s'efforçant de conserver le vocabulaire actuel-, il y aurait un partage clair des responsabilités :

- le soutien automatique, redistribué sur des critères de marché entre des professionnels qui sont tout à la fois, collecteurs et bénéficiaires du système , correspond au produit de la TSA ,

- les aides sélectives , qu'il s'agisse des aides ciblées ou sur dossier, financées par ce qui faut considérer comme un impôt comme un autre , la taxe sur la publicité télévisée.

En termes financiers, les masses sont du même ordre de grandeur. Pour 2001 -qui est certes une année atypique du fait des succès du cinéma français-, le tableau de la page 69 permet de constater que le soutien sélectif absorbe plus de 42 % des dépenses du compte de soutien, tandis que la contribution des taxes sur les télévisions à la section cinéma fournit près de 52 % des ressources du compte. Le décalage n'est pas insurmontable dans la mesure où il est précisément prévu de lui faire correspondre de l'aide sélective sur critères objectifs a priori proche de l'aide automatique.

De toute façon, en 2001 le produit de la TSA faisait déjà l'objet d'un coefficient de majoration de 20 %, indépendamment des multiples coefficients qui bonifient ex ante le soutien automatique.

L'idée de bien séparer l'aide automatique déterminable ex ante par la simple prise en compte des entrées-salles, de l'aide sélective , qu'elle soit accordée sur dossier de façon discrétionnaire ou qu'elle s'appuie sur des critères objectifs de nature comptable ou commerciale, permettrait, le cas échéant, de faire reposer cette dernière sur les dépenses réelles et non sur les seules déclarations des intéressés .

(2) Étudier un système mixte alliant aides fondées sur d'autres éléments que les entrées-salles

Cette approche conduit à distinguer nettement dans l'aide sélective l'aide discrétionnaire sur dossier ou sur projet -dont le type même est l'avance sur recettes- de l'aide sélective objective, qui, si elle peut répondre à plusieurs logiques prend en compte des données comptables ou commerciale de l'exploitation.

Les professionnels ont tendance à se plaindre des aides sélectives actuelles qui leur paraissent particulièrement arbitraires.

Pour répondre à ce souci légitime de clarté et de prévisibilité, il est proposé de développer une forme d'aide fléchée clairement articulée sur des critères objectifs. En fait, il s'agirait d'appliquer ex post un coefficient de bonification à l'aide automatique, auquel les producteurs ont droit, tenant compte des caractéristiques de la politique suivie.

Un exemple pourrait être donné avec la prise en compte du nombre d'écrans de sortie : à nombre équivalent d'entrées, il vaudrait mieux donner une forme de bonus -le mot est à la mode dans le secteur du cinéma- à ceux qui ont obtenu leurs entrées avec un plus petit nombre d'écrans. Il semble raisonnable de privilégier une exploitation mieux étalée dans le temps par rapport aux pratiques d'exposition massive des grosses productions.

De même, l'aide automatique qui bénéficierait aux distributeurs ou aux exploitants , pourrait être bonifiée en fonction de la part des films français dont ils assurent la diffusion , ce qui devrait être admissible par Bruxelles, dès lors que l'aide a un caractère culturel et ne cherche pas à procurer un avantage économique aux opérateurs ou au produits français.

Enfin, il faut noter que dans cette perspective, il est possible de tenir compte de l'importance relative des coûts « au-dessus de la ligne ».

Dès lors que l'on raisonne en fonction des coûts effectifs des films, l'on pourrait, étant donné le petit nombre d'opérations, adopter un système mixte dans lequel le soutien sélectif fléché , serait composé à la fois d'une majoration du soutien automatique obtenu et de subventions calculées sur la base des budgets effectifs .

Il s'agirait de combiner une aide automatique dépendant des résultats en salles et une aide sélective ciblée pouvant reposer en partie sur la logique de subvention ou de crédit d'impôt ex post , qui est celle retenue par nos principaux concurrents, indépendamment de l'aide sélective, au sens où on l'entend actuellement, qui est une aide discrétionnaire sur dossier.

Ainsi serait-il ainsi possible non seulement de « rembourser » une partie des dépenses amont ou aval pour les petits films, ce qui aurait des conséquences positives sur l'économie du secteur, mais encore de décourager l'inflation des rémunérations élevées qui ne serait pas éligibles à cette aide ex post sur dépenses effectives.

b) Soit conditionner l'accès à certaines facilités du compte de soutien à des engagements négociés

L'autre voie pour clarifier le soutien serait d'attribuer la partie de l'aide sélective non discrétionnaire sur une base négociée et non sur la base de critères objectifs comme dans la première branche de l'alternative.

Cette politique tendrait à institutionnaliser la cogestion du secteur entre l'État et le secteur privé.

Dans cette optique, les opérateurs privés, désireux de participer pleinement au système d'aide seraient incités à respecter une certaine forme de cahier des charges faisant une place à des préoccupations de diversité économique et culturelle.

Deux exemples peuvent être donnés de cette politique dans laquelle les règles seraient rendues plus lisibles non par la définition de critères objectifs valables pour tous mais par la négociation d'engagements personnalisés avec les gros opérateurs

(1) Lier autorisation d'ouverture des multiplexes à des engagements d'exposition de films « indépendants » ou à faible nombre d'écrans

Le groupe de travail du Centre national de la cinématographie (CNC) a réfléchi à l' instauration éventuelle d'une durée minimale d'exposition des films qui pourrait être fixée à 15 jours. Juridiquement, plusieurs solutions sont envisageables :

- soit l'on considère que la rotation excessivement rapide des films résulte d'un « manque d'engagement des exploitants » et l'on fixe par voie réglementaire une durée minimale ;

- soit l'on estime qu'il faut intervenir en amont au motif que les opérateurs de la diffusion sont les seuls à même d'apprécier ce que veut le public et l'on s'efforce de négocier une forme de code de bonne conduite associant tous les acteurs de la filière, le cas échéant, à l'initiative du Médiateur du cinéma.

Une première approche pourrait être axée sur des objectifs spécifiques, telle l'exposition des films indépendants.

Parmi les préconisations du groupe Concurrence du CNC, on peut mentionner les orientations suivantes :

- examiner la possibilité d'un dispositif spécifique relatif à une durée minimale d'exposition des films en salles tenant éventuellement compte de la taille de l'agglomération, de l'établissement et du nombre de copies ;

- envisager l'élaboration par les professionnels d'un mécanisme d'autorégulation du type « code de bonne conduite de la diffusion des films » sur le modèle du code de bonne conduite sur les pratiques promotionnelles des salles de cinéma.

En définitive, il semble important de s'attacher à agir sur les causes du phénomène de l'accélération de la rotation des films en salles et de l'encombrement du marché et, en particulier, sur le nombre de films mis sur le marché .

(2) Instituer des mécanismes de bonification sur critères de diversité

L'autre approche pourrait consister à traiter avec les groupes intégrés dans le cadre d' engagements globaux portant sur tous les niveaux de la filière avec pour contrepartie une fongibilité du soutien .

Les aides sont actuellement très sectorisées, ce qui a pour conséquence des risques de gaspillage. Les agents auront tendance à surinvestir ou du moins à anticiper un investissement pour ne pas perdre leurs droits de tirage.

L'avantage qui pourrait consister en la possibilité, pour les groupes intégrés, d'utiliser le soutien indépendamment de son origine, serait subordonné à la signature d'engagements de diversité.

Un des effets pervers de ce type de politique serait de menacer la place de certains acteurs de la filière dont la fonction spécifique dans le cadre de l'économie actuelle du cinéma indépendant, pourrait se trouver remise en cause : à la limite le renforcement des obligations de diversité pour les multiplexes a pour conséquence de fragiliser les circuits « Art et essai ».

c) Une clarification nécessaire du point de vue européen

Dans sa communication concernant certains aspects juridiques liés aux oeuvres cinématographiques et autres oeuvres audiovisuelles, com (2001) 534 , la Commission européenne à Bruxelles rappelle que les principes de la politique audiovisuelle communautaire telle qu'elle résulte du document com (1999) 657 de décembre 1999, restent parfaitement valables. Elle reconnaît que les oeuvres audiovisuelles présentent des caractéristiques uniques en raison de leur double nature de bien économique et de bien culturel. Elle admet également la légitimité des buts de la réglementation qui tend à préserver certains objectifs d'intérêt public tels que le pluralisme, la diversité culturelle et linguistique et la protection des mineurs.

La Commission européenne tire les conséquences de l'introduction par le traité de Maastricht d'une exception en faveur de la culture au principe d'incompatibilité générale des aides d'État. Celles-ci sont admises en application du paragraphe 3 de l'article 87 dès lors qu'elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.

La commission européenne rappelle aussi qu'elle a admis que les États-membres puissent exiger, comme condition d'accès à l'aide, qu'une certaine partie du budget soit dépensée sur leur territoire au motif qu'un certain degré de territorialisation est nécessaire pour assurer la présence continue des ressources humaines. Toutefois, cette exigence doit être acceptable au regard des critères de nécessité et de proportionnalité exigés par le caractère culturel de la mesure.

(1) Mieux distinguer l'économique du culturel

Du point de vue de l'Union européenne, il est important de veiller au respect de principes essentiels.

D'abord, le caractère non-discriminatoire du système tant du point de vue des oeuvres de référence ouvrant droit à l'aide que des oeuvres de réinvestissement qui permettent de la mobiliser. Il devrait toutefois être possible d'exiger l'existence d'une filiale de droit français, compte tenu de l'importance des aides.

Ensuite, la Commission européenne ne remet pas en cause la légitimité de l'exception culturelle . Dès lors que l'aide affiche clairement sa finalité de préservation de l'identité nationale, il devrait être loisible à la France de créer les conditions économiques de son indépendance culturelle d'autant plus que l'aide vise à faire face à la concurrence américaine et non à augmenter la part du cinéma français au détriment de celui des autres pays de l'Union européenne.

Les mécanismes de bonification doivent, dans cet optique, être clairement rattachés à l'idée de diversité culturelle : rien ne devrait interdire de favoriser les films de langue française ou utilisant des talents français, bref de bonifier le soutien automatique obtenu en fonction d'un système de point analogue à celui appliqué pour déterminer les bonifications ex ante .

La question des industries techniques est sans doute une des plus délicates. En dépit de leur rôle stratégique, les services de Bruxelles persistent à considérer qu'il s'agit d'abord d'une activité économique comme les autres, même si l'on peut estimer que le maintien d'un tissu d'industries techniques est un facteur de diversité.

La marge de manoeuvre est étroite. Deux voies peuvent cependant être explorées :

- le transfert aux collectivités locales  de la responsabilité de l'aide aux industries techniques dans le cadre déjà évoqué de fonds régionaux de développement du cinéma, soutenus par l'État ;

- l'articulation d'une partie des aides sélectives objectives sur les dépenses réelles . Il s'agit de la transposition d'un processus classique dans les autres pays consistant à rembourser au moyen de crédits d'impôt une fraction des dépenses locales. Cet argent pourrait n'être débloqué qu'après que la preuve ait été apportée que les prestataires concernés ont été réglés.

L'essentiel des aides aux industries techniques doit donc provenir des collectivités locales et reposer sur l'idée d'aménagement du territoire, qui semble acceptable par Bruxelles à la condition que les aides n'augmentent pas la part des entreprises françaises en Europe.

(2) Rendre possible l'ouverture réciproque sur les systèmes européens équivalents

Le rapport Bonnell/Menegoz avait étudié un certain nombre de propositions, dont le choix jugé « impossible » de l'ouverture européenne totale. L'idée aurait été d'ouvrir la génération du soutien à tous les films européens exploités en France, même sans coproducteur français, avec pour contrepartie la concentration du soutien sur les seuls films tournés en France et en français. Les auteurs de ce rapport ont considéré que de sérieux obstacles s'opposaient à cette solution radicale. Des films anglais, en particulier, pourraient bénéficier massivement du soutien, alors même qu'on pourrait les considérer comme des « sous-marins » du cinéma américain. La seule solution pour éviter un tel risque serait de pratiquer des taux différents pour les films français et européens, ce qui serait contraire au Traité de Rome.

Une autre objection à un tel système consisterait à susciter l'apparition d'un « marché gris » des droits de tirage sur le compte de soutien pour les producteurs européens. En effet ceux-ci auraient tendance à céder les faibles sommes disponibles en France à des producteurs de films d'expression originale française, ce qui aboutirait à leur donner gratuitement des parts de négatifs de films français.

Une dernière voie de réforme évoquée par le rapport précité consisterait à aboutir à l' ouverture réciproque des fonds de soutien européens . Or, un tel système serait déséquilibré dans la mesure où seul le fonds français est alimenté par une taxe sur les télévisions. Or, le système de cantonnement du soutien automatique aux seules ressources issues de la TSA permettrait précisément d'éviter cet écueil.

DÉCLARATION COMMUNE DES ORGANISMES PUBLICS EUROPEENS EN CHARGE DU CINEMA

1.- Les agences nationales du film en Europe ont pour mission de soutenir les cultures cinématographiques nationales et européennes. Deux séries de conditions sont nécessaires au développement de ces cultures : un tissu de savoir-faire et de talents, local, durable, renouvelé, non seulement dans la production mais aussi à tous les stades de la chaîne, et un marché ouvert, qui encourage l'innovation, la prise de risque, et propose l'offre la plus diversifiée au public. C'est pourquoi il est nécessaire que les Etats membres de l'Union européenne, par le biais des agences nationales du film ou d'autres organismes compétents, interviennent pour assurer aux films nationaux et européens de bonnes conditions de production de circulation et d'accès au public.

2.- A cette fin, les Etats membres ont mis en place des aides publiques au cinéma et/ou l'audiovisuel, à un niveau national et/ou régional, selon leurs besoins propres. Ces mesures concernent notamment le développement, la production, la distribution, l'exploitation, la promotion, la formation, l'éducation et le patrimoine. Elles se justifient non seulement par les faiblesses structurelles du marché cinématographique en Europe, mais aussi par le rôle significatif que joue le cinéma dans l'expression des cultures.

3.- Dans sa Communication du 26 septembre 2001, la Commission reconnaît que les oeuvres audiovisuelles, et en particulier le cinéma, joue un rôle clef dans l'expression des identités européennes, et que ces oeuvres présentent des caractéristiques uniques, liées à leur double nature, économique et culturelle. C'est pourquoi le développement de ce secteur n'a jamais été laissé aux seules forces du marché.

4.- Cependant, l'examen des régimes d'aides d'Etat par la Commission européenne reste régi par des règles qui ne sont adaptées ni aux spécificités culturelles, économiques et sociales du cinéma, ni à la diversité des situations rencontrées dans les différents Etats membres. La définition -pour chaque pays- des critères d'attribution des aides, et parfois l'existence même des aides nationales, continuent d'être remises en question et soumises à une grande incertitude.

En conséquence, nous considérons que :

• les raisons de soutenir les films ne peuvent pas être limitées aux seuls motifs « culturels ». Une distinction tranchée entre une oeuvre « commerciale » et une oeuvre « culturelle » est artificielle, puisque chaque film est à la fois une entreprise commerciale et l'expression d'une culture. De même, il n'est pas possible de définir les « films difficiles » ;

• limiter le niveau d'aide publique à un pourcentage prédéterminé des coûts n'est pas adapté aux conditions du marché ; aucun Etat membre n'a de marché d'une taille ou d'une stabilité suffisantes pour que celui-ci soit dynamique et diversifié ;

• l'existence d'un tissu industriel fort est une condition pour permettre la créativité. Il est, par conséquent, légitime que les industries techniques du secteur bénéficient directement ou indirectement d'aides (par exemple, par des contributions aux budgets des films qui satisfont des critères de dépenses locales) ;

• les régimes d'aides n'ont pas pour effet d'assurer une position dominante aux films nationaux sur leur propre marché. Au contraire, la place de ces films est souvent fragile. Les régimes d'aides ne constituent donc pas un obstacle à la circulation des films des autres pays d'Europe. De plus, ces régimes ont servi à encourager et renforcer la coopération entre les industries cinématographiques des Etats membres, en permettant l'accès aux autres régimes nationaux d'aides, par une politique d'accords bilatéraux, et par la mise en place de fonds multilatéraux ;

• la concurrence éventuelle entre les films des différents pays européens est marginale au regard de la concurrence des films non européens, surtout si l'on tient compte de la position des films des « majors » américaines. En règle générale, la circulation des films dans l'Union européenne n'est possible que s'ils peuvent, en premier lieu, exister sur leur propre marché national.

5.- Pour ces raisons, les règles d'examen et d'autorisation de la Commission européenne affaiblissent l'efficacité de nos aides d'Etat car ces règles se révèlent incapables à prendre en compte les spécificités du secteur. La courte durée des autorisations (que la Commission a limitées à 2004) prive nos aides de la sécurité et de la pérennité, qui sont toutes deux nécessaires au développement de politiques culturelles cohérentes et structurantes, capables de s'adapter aux évolutions du secteur.

6.- En conséquence, nous souhaitons attirer l'attention de nos gouvernements sur :

• la nécessité d'affirmer la légitimité des politiques culturelles existantes, et de la réaffirmer à la Commission européenne ;

• l'urgence de trouver, avec la Commission européenne, une solution qui garantisse, à long terme, le maintien et l'évolution des systèmes nationaux d'aides ;

• l'utilité particulière des mesures qui permettent d'avoir des marchés ouverts et des publics réceptifs à une grande variété d'oeuvres, et de stimuler ainsi le pluralisme et la diversité.

Signataires :

Filmförderungsanstalt (Allemagne)

Österreichisches Filminstitut (Autriche)

Centre du Cinéma et de l'Audiovisuel de la Communauté française (Belgique)

Vlaams Audiovisueel Fonds (Belgique)

Danish Film Institute (Danemark)

Instituto de la Cinematografia y de las Artes Audiovisuales (Espagne)

Finnish Film Foundation (Finlande)

Centre national de la Cinématographie (France)

Greek Film Center (Grèce)

Irish Film Board (Irlande)

Ministero per i Beni e le Attività Culturali - Direzione Generale per il Cinema (Italie)

Film Fund Luxembourg (Luxembourg)

Nederlands Fonds v.d. Film (Pays-Bas)

Insituto do Cinema Audiovisual e Multimedia (Portugal)

Film Council (Royaume-Uni)

Swedish Film Institute (Suède)

C. ASSURER LA TRANSPARENCE DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES

Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc évoque le renforcement des structures administratives « directement concernées » par la mise en oeuvre de ses propositions. A ce titre, il propose d'adapter l'organisation générale du Centre national de la cinématographie (CNC). Deux objectifs lui paraissent devoir être recherchés : réformer la commission d'agrément, assurer le contrôle efficace des devis.

La participation des professionnels au choix d'attribution des aides gérées par le CNC est considérée par le rapport comme une des forces du système français, au motif qu'elle assure à ces décisions administratives une réelle légitimité et qu'elle organise la transparence de l'information entre professionnels.

Ce point méritera à l'évidence d'être discuté dans la mesure où l'on peut, au contraire, estimer qu'il y a là une source de confusion, voire de malentendu, de nature à affecter l'efficacité de l'ensemble du système d'aide.

La gestion collective et le plus souvent collégiale des aides apparaît en effet assez largement contraire à l'esprit de la loi organique précitée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances. Les notions cardinales de programme et de responsabilisation paraissent difficilement compatibles avec ce type d'organisation qui fait sans doute une trop large place à la cogestion.

1. Dégager des indicateurs d'activité de coût et de performances pour évaluer l'efficacité de l'aide de l'État

La désignation d'un responsable pour chaque enveloppe de crédits s'accompagne de la mise au point d'indicateurs de performances objectifs. Nul doute que dans le domaine du cinéma, la mesure des performances n'est pas chose facile.

a) La problématique de la loi organique du 1er août 2001

On peut rappeler que la loi organique du 1 er août 2001 a introduit la notion de « programme », enveloppe fongible des crédits destinée selon l'article 7 de ladite loi « à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministère ». A ces programmes, qui sont regroupés en missions et qui se décomposent en actions, sont associés des objectifs et des indicateurs.

En fait, cette nouvelle architecture prolonge celle des agrégats budgétaires 28 ( * ) tels qu'ils ont été mis en place à partir du projet de loi de finances pour 2000 sous l'impulsion de la direction du budget.

De fait, on trouve déjà au sein de l' agrégat 12 « développement culturel et spectacles » une rubrique « cinéma et audiovisuel » qui décrit les objectifs et les moyens du centre national de la cinématographie.

Les missions principales du CNC sont décrites comme étant :

- la réglementation de la production cinématographique et audiovisuelle et le soutien à l'économie du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia ;

- la promotion du cinéma et de l'audiovisuel, leur diffusion auprès de tous les publics ainsi que la protection et la diffusion du patrimoine cinématographique.

Il est probable que l'architecture des agrégats servira de base à l'établissement de ce qui devrait constituer le programme cinéma et audiovisuel.

Une série de questions vont certainement donner lieu à débat et notamment les relations entre cinéma et audiovisuel. Bien que l'agrégat 12 associe cinéma et audiovisuel, il s'agit des actions menées par le Centre national de la cinématographie à l'exclusion de celles gérées par la direction du développement des médias.

Même s'il s'agit de deux domaines distincts, vos deux rapporteurs ont tendance à penser qu'il existe suffisamment de passerelles, notamment sur le plan culturel, en matière de protection du patrimoine, mais aussi économique avec l'adossement du secteur du cinéma sur celui de la télévision pour que la question puisse être posée.

Actuellement, les objectifs et les indicateurs dont sont assortis les agrégats, sont présentés ex ante dans les bleus budgétaires et ex post dans les compte-rendus budgétaires. Avec la loi organique précitée, chaque programme donnera lieu ex ante à la définition de « projet annuel de performance », tandis que le projet de loi de règlement comportera des « rapports annuels de performance ».

Pour faire simple, on peut dire que le programme qui sera l'unité de base budgétaire, correspondra à un acteur identifié dont les performances seront appréciées par rapport à une batterie d'indicateurs de résultats d'où l'importance de la définition des indicateurs dont la mise au point doit mobiliser dès maintenant les capacités d'analyse des administrations.

La démarche est complexe. L'expérience acquise par les pays anglo-saxons montre qu'il faut aller au-delà des indicateurs d'impact (souvent de nature politique et parfois peu maîtrisables compte tenu des influences extérieures) pour déboucher sur des indicateurs opérationnels de nature à permettre le pilotage des services. La direction du budget distingue, à côté des indicateurs de contexte destinés à prendre en compte les influences extérieures, les indicateurs de moyens qui retracent le volume du coût des moyens utilisés et les indicateurs d'activité des services ainsi que les indicateurs de performance ou de résultat.

Ce bref rappel témoigne de la complexité conceptuelle et de la difficulté que l'on va rencontrer non seulement pour dégager des indicateurs objectifs et fiables des performances de l'administration mais aussi pour savoir à quel niveau, efficacité socio-économique, qualité du service ou efficacité de la gestion, l'on se situe.

b) L'urgence d'une réflexion sur les indicateurs

Il n'est pas question ici d'amorcer une réflexion qui ne peut résulter que d'un travail collectif associant, d'une part, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et les services techniques concernés et, d'autre part, la profession.

Tout au plus, peut on suggérer que l'observatoire de la production cinématographique 29 ( * ) , dont le rapport Leclerc propose la constitution, ou son équivalent quel qu'en soit le nom, ait pour tâche d'élaborer des références incontestables pour l'appréciation des résultats de l'intervention de l'État. Sur le plan administratif, il restera à veiller à ne pas empiler les instances dès lors qu'il existe depuis 1996 une autre instance du même type destinée à suivre l'évolution de la fréquentation cinématographique, avec « l'observatoire de la diffusion ».

Jusqu'à présent, les lois de finances étaient principalement axées sur la discussion des moyens ; avec la loi organique précitée, les débats se focaliseront sur des objectifs à atteindre et des résultats obtenus. En matière de cinéma, la méthode est certainement plus facile à énoncer qu'à mettre en oeuvre.

D'abord, il faudra éviter de faire référence à des indicateurs ayant un caractère incantatoire ou au contraire calqués sur les moyens mis en oeuvre sans que l'on se pose la question de l'importance des résultats obtenus.

Deux orientations méthodologiques paraissent cependant incontestables :

- d'une part, il convient de s'assurer que le souci de la diffusion du contrôle de gestion et de la comptabilité analytique est bien pris en compte. Sans se faire de ce type d'outil un objectif absolu, il faut insister sur l'apport qu'il constitue du point de vue de l'appréciation des résultats de l'action administrative ;

- d'autre part, ainsi qu'on l'a déjà mentionné, on aura du mal à éviter de s'attaquer à la délicate question de la mesure de la qualité , si ce n'est de la production elle-même, du moins des résultats obtenus. Tel est le sens à donner à l'idée avancée ci-dessus par vos rapporteurs de la création d'une instance chargée de déterminer des indices de la qualité de la production cinématographique.

En tout état de cause, la réflexion sur la nouvelle architecture budgétaire qu'il faut entreprendre sans tarder, doit déboucher sur la définition d'un contrat d'objectifs et de moyens, passé entre l'État et le Centre national de la cinématographie. Un tel cadre, à défaut d'être un outil parfaitement opérationnel, a essentiellement le mérite de servir de relais entre le niveau global retracé dans le « bleu » budgétaire et le niveau microéconomique.

2. Clarifier les responsabilités entre tutelle et gestionnaires des aides, entre État et professionnels

Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc se félicite, comme on l'a vu, de la participation des professionnels du secteur à la gestion des aides publiques à la filière cinématographique.

a) Le partage des compétences entre Budget et compte spécial du Trésor

La répartition des dépenses exécutées par le CNC entre les crédits issus du compte d'affectation spéciale et ceux du budget général venant du ministère de la culture a fait l'objet depuis quelques années d'un effort de rationalisation par rapport aux sources de financement.

La logique de cette répartition est d'abord juridique :

- relèvent du compte d'affectation spéciale, les dépenses qui sont prévues dans la loi de finances et les décrets fixant son objet et ses modalités d'attribution. On doit rappeler que la loi organique précitée précise et restreint les possibilités de dépenses qui doivent avoir un rapport avec la source des recettes des comptes d'affectation spéciale ;

- relèvent des crédits du ministère de la culture, les dépenses financées sur le budget général par le ministère de la culture dont l'exécution lui est confiée par l'État. Dans la mesure où ces dépenses entrent dans la mission du CNC et celle du ministère de la culture, les possibilités sont donc plus générales que pour le compte.

De cette logique juridico-budgétaire, découle la répartition des compétences entre les deux masses budgétaires.

Les dépenses inscrites sur le compte de soutien, à partir de taxes prélevées sur les recettes des professionnels, doivent revenir soit directement aux professionnels du secteur pour la réalisation d'oeuvres ou pour aider les entreprises à s'adapter à l'évolution du marché, soit indirectement par la promotion ou l'aide à la formation.

L'objet du compte de soutien est en quasi-totalité d'apporter une aide économique au secteur du cinéma et des programmes audiovisuels, même si la section cinéma intègre des éléments de choix culturels, essentiellement dans l'avance sur recettes.

Les aides dispensées sur les crédits du ministère de la culture relèvent :

- soit de secteurs qui n'entrent pas dans le domaine du compte de soutien tel le multimédia,

- soit correspondent à une mission de l'État comme le rayonnement international de la France, l'éducation initiale ou la préservation du patrimoine, et ne sont pas une aide directe aux professionnels, même si ceux-ci peuvent en tirer des bénéfices annexes.

- soit à une mission spécifique exécutée pour le ministère de la culture par le CNC ainsi que c'est la cas de l'opération « Images de la culture ».

Le tableau ci-dessous dresse la liste des principales interventions du CNC et la justification de leur rattachement à l'un ou l'autre des budgets:

Ventilation des crédits entre budget et compte de soutien

Crédits du compte de soutien

Soutien automatique aux producteurs

Aide à l'oeuvre versée aux producteurs, à fondement économique

Soutien automatique aux distributeurs

Aide à l'oeuvre versée aux distributeurs, à fondement économique

Soutien automatique aux exploitants

Aide à l'investissement pour les exploitants, à fondement économique

Avance sur recettes et autres aides sélectives à l'oeuvre

Aide à une oeuvre présentée par un réalisateur, aide aux films d'auteurs

Aides sélectives à la rénovation de salles

Aide aux exploitants dans des situations de concurrence difficile (salles de centre-ville face à des multiplexes, salles dans des zones peu desservies...)

Aides sélectives à la programmation (art et essai)

Aide aux exploitants proposant une programmation plus difficile

Soutien automatique aux oeuvres audiovisuelles

Aide à l'oeuvre versée aux producteurs avec obligation de contrat d'un diffuseur, à fondement économique

Aide sélective aux oeuvres audiovisuelles

Aide à l'oeuvre versée à un producteur qui n'a pas de compte de soutien (nouveaux entrants) - aide à visée automatique

Aides à l'exportation

Actions en faveur de l'exportation des films et des programmes audiovisuels français sur les marchés et foires (essentiellement pour les marchés rentables)

Formation continue des professionnels

Formation des professionnels en activité (scénaristes, producteurs...)

Industries techniques

Aides à l'investissement des industriels, définition des normes (CST)

Promotion

Actions de soutien au cinéma destiné aux professionnels, à visée économique (ex : Festival de Cannes, MIFA...), aides aux organismes professionnels (SRF, ARP...)

Crédits du budget général Ministère de la culture

Multimédia (FAEM, RIAMM, DICREAM)

Interventions dans le multimédia qui ne ressortait pas des missions du compte

Actions internationales (Fonds Sud, aides à l'exportation, cinématographies peu diffusées)

Actions liées au rayonnement international de la France, sans retombée économique directe (diffusion de films français sur des marchés non rentables, ou de filmographie du Sud en France...)

Coproductions (Eurimages, franco-canadiennes, franco-allemandes)

Actions internationales de la France tendant à soutenir au-delà de ses aides "normales" les coproductions avec certains pays proches. Ces interventions relèvent en général d'accords internationaux.

Patrimoine (Cinémathèque française, Bibliothèque du film,

51 rue de Bercy, cinémathèques régionales...)

La défense du patrimoine et sa mise en valeur relève des activités de l'État dans le cadre de son budget général

Aides sélectives aux salles

Subventions à des salles ne relevant pas du compte de soutien (DOM-TOM essentiellement) car n'acquittant pas la taxe.

Images de la Culture

Collecte et mise à disposition des DRAC, bibliothèques... en cassettes vidéo de documentaires sur la Culture. Mission exécutée pour le Ministère de la culture dans toutes ses directions

Education à l'image (écoles, collèges et lycées au cinéma) et actions jeunes

Actions d'éducation pour les jeunes en formation initiale

Actions régionales (conventions avec les collectivités, fonds régionaux de production)

Soutien aux activités des collectivités décentralisées et au développement régional

Festivals et manifestations culturelles

Activités ayant un but culturel et peu commercial : "festival des films de femmes, du film ancien, du film italien...", rétrospectives...

Fonds de création audiovisuelle

Aides à des actions culturelles (documentaires culturels sur le cinéma, formation d'animateurs...)

Un été au ciné - Cinéville

Politique de la ville

b) Le risque d'une certaine confusion des genres

S'il y a dans cette participation des professionnels aux instances d'attribution de l'aide une source de légitimité , on peut aussi y voir un facteur de confusion des genres.

On peut en effet se demander si l'État n'abdique pas une partie de ses responsabilités d'acteur de plein exercice pour se contenter de celles de régulateur du système, voire de simple spectateur engagé.

Le rapport Leclerc a bien vu la difficulté. Il s'est toutefois contenté d'estimer que la participation de professionnels doit avoir pour contrepartie l'ouverture de la composition des commissions professionnelles à des personnalités extérieures ainsi qu'une rotation rapide des membres desdites commissions.

Il y a là, selon vos deux rapporteurs, un remède qui n'est pas sans effets négatifs dans la mesure où il interdit de donner un contenu opérationnel aux idées de responsabilité et de responsabilisation qui sous-tendent la loi organique précitée du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Le cas de la commission de l'agrément est significatif de l'ambiguïté d'un système, dans la mesure où ses membres, au nombre de 25 environ, demeurent exclusivement nommés par les représentants des organisations professionnelles et siègent dans cette instance depuis plusieurs années.

La méthode actuelle de cogestion, comme l'absence de direction du cinéma dont le rôle est en fait assumé par le CNC, paraissent peu conformes à l'évolution récente qui , dans de nombreux secteurs, au sein même du ministère de la culture, a conduit à séparer les pouvoirs de tutelle, qui sont l'apanage de l'administration centrale, des responsabilités opérationnelles , de plus en plus souvent confiées, soit à des établissements publics soit à des organes déconcentrés de l'État. On peut citer des évolutions de ce type aussi bien à la direction du patrimoine et à la direction des musées de France qu'à la délégation aux arts plastiques.

La réforme en cours des structures de la cinémathèque française est d'ailleurs un autre exemple de cette évolution vers une clarification des rapports entre l'État et les acteurs de la filière cinématographique.

Suivant les recommandations du rapport Toubiana et les observations du rapport d'audit de KPMG de la fin octobre 2002, M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, a décidé de demander à la cinémathèque de réformer les statuts. En effet, alors qu'il est le principal financeur de la cinémathèque française, l'État ne dispose au sein de ce conseil d'administration que de trois membres de droit sur vingt-quatre administrateurs. La solution retenue consiste dans la désignation d'un commissaire du gouvernement qui aurait voie consultative, sauf en ce qui concerne certaines décisions financières pour lesquelles il aurait un droit de suspension des délibérations jusqu'à ce que l'autorité de tutelle ait tranché. A ce droit de veto, s'ajouterait la désignation d'un comité financier chargé du pilotage budgétaire de l'institution. Enfin, la cinémathèque française serait invitée à s'engager vis-à-vis de l'État dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens.

Vos rapporteurs se proposent de poursuivre cette démarche en demandant au ministère de la culture et de la communication d'explorer de nouveaux modes de gestion séparant plus clairement les responsabilités de l'État et celles des acteurs de la filière.

La nouvelle articulation des aides envisagées, à titre exploratoire, par vos rapporteurs paraît de nature à faciliter cet effort de clarification.

La distinction entre l'aide automatique de base accordée sur des critères des marchés aux films agréés et les aides sélectives, au sens nouveau plus large qui lui est donné dans l'optique des rapporteurs, qu'elle soit fondée sur des critères objectifs ou sur une appréciation qualitative discrétionnaire, permet de faire la part des responsabilités des uns et des autres.

Dès lors que l'octroi de l'agrément n'est plus l'amorce d'un examen de la structure des devis débouchant sur une modulation de l'aide par suite de la délivrance d'un certain nombre de points donnant droit à des aides bonifiées mais un simple système d'admission au sein du club des films participants, il peut tout à fait relever du cadre professionnel. L'agrément dans cette perspective ne constitue qu'un système de reconnaissance mutuelle , on n'ose pas dire de cooptation, que la profession est tout à fait habilitée à gérer.

Les exemples précédemment donnés à titre indicatif, donnent une idée de la façon dont le système pourrait fonctionner :

- une partie des aides sélectives au sens large serait directement articulée sur le soutien automatique engendré par les entrées-salles : on pourrait ainsi bonifier les résultats obtenus en tenant compte du plus ou moins grand nombre de salles mobilisées, étant entendu qu'il conviendrait de favoriser les films ayant obtenu de bons résultats avec une petite combinaison de salles ;

- l'autre pourrait être accordée sur des bases financières sur le fondement des dépenses effectivement constatées pour certains postes. Tout se passerait comme si certaines dépenses, et en particulier les dépenses de fabrication au sens large dites « en dessous de la ligne », pouvaient donner lieu à une aide ciblée mobilisable à l'occasion du financement du film suivant. On peut préciser à cet égard qu'un tel système aurait l'avantage de permettre d'aider, sur le modèle de ce qui se passe dans d'autres pays d'Europe, les dépenses de fabrication effectuées en France, sans que, par définition, l'on puisse paraître, du point de vue de Bruxelles, exiger un pourcentage exorbitant de « localisation » de l'aide.

Un autre avantage de cette formule serait de permettre de responsabiliser les professionnels qui pourraient être amenés à pratiquer une certaine forme d'autocontrôle.

Actuellement, la gestion du système d'aides se trouve confrontée au lancinant problème du contrôle des devis . Il s'agit, en l'état présent, d'une forme de théâtre d'ombres dans lequel l'administration est amenée à se déterminer sur la base de devis, dont tout le monde sait qu'ils ne correspondent pas à la réalité . Qu'il s'agisse de l'importance des coproductions ou de celle des apports des producteurs, il y a de multiples facteurs qui concourent à un gonflement des devis qui n'est pas sans conséquence, même s'il n'a aucune influence directe sur l'importance de l'aide.

Une solution consiste bien entendu à renforcer les moyens de contrôle du CNC , ce qui n'est guère réaliste en l'état actuel des finances publiques. Bien que bon nombre de professionnels ne croient pas possible de trouver au sein des cabinets comptables privés des contrôleurs conciliant la connaissance du secteur et l'indépendance requise, une réflexion doit être entreprise entre spécialistes pour résoudre la difficulté, ce qui passe sans doute par la mise au point d'un cadre ou de procédures comptables adaptées .

Aussi à la solution préconisée par le rapport Leclerc envisageant une collaboration d'agents du ministère des finances ou de la Cour des comptes, vos rapporteurs se demandent s'il ne faut pas pousser, dès lors que l'on dispose d'un cadre comptable de référence, vers une solution plus radicale conférant aux demandeurs le soin de faire certifier eux-mêmes les comptes qu'ils produisent à l'appui de leur demande d'aide sélective.

Une telle voie n'est envisageable que si l'on cesse de faire référence aux devis pour faire reposer l'aide ciblée uniquement sur les comptes d'exploitation de l'oeuvre de référence.

Autant il semble indispensable d'avoir recours à des experts pour apprécier la véracité des devis, autant de simples experts comptables devraient pouvoir certifier les comptes des films déjà mis en exploitation.

Ainsi, les devis ne serviraient qu'à justifier l'agrément tandis que les comptes d'exploitation serviraient de base aux calculs de l'aide par les intéressés eux-mêmes à la condition, bien sûr, qu'existerait un cadre comptable clair.

II. LA CONSOLIDATION DES RESSOURCES

L'augmentation des ressources est une priorité, mais en aucune façon une panacée. Son intérêt est certes d'atténuer les tensions à court terme mais aussi de permettre d'amorcer des rééquilibrages structurels.

Compte tenu de la conjoncture budgétaire et de l'attitude de la Commission européenne à Bruxelles, il ne faut pas placer trop d'espoirs dans une baisse de la TVA sur les vidéogrammes, dont la mise en oeuvre aurait permis d'accompagner le développement d'un secteur en pleine expansion. Telle est la raison pour laquelle, il convient de ne pas faire le pari d'une augmentation des ressources du secteur mais se contenter de viser leur simple consolidation.

A. TROUVER DE NOUVELLES SOURCES DE FINANCEMENT DU SECTEUR

D'abord, il n'est pas normal que le secteur le plus dynamique du marché du cinéma, en l'occurrence celui du DVD, ne contribue pas au financement du système à la mesure de son importance économique. Telle est la raison pour laquelle, à la suite de la profession dans sa quasi-totalité, vos deux rapporteurs souhaitent mettre à contribution ce secteur par un réaménagement de la taxe pesant sur ces produits, étant entendu que l'absence de perspective immédiate d'abaissement des taux de TVA interdit d'aligner le prélèvement sur celui applicable aux places de cinéma .

Ensuite, il convient de chercher à aménager le système fiscal de façon à retrouver la logique initiale du système d'aide qui se justifie par le caractère éminemment risqué de l'investissement cinématographique. Vos rapporteurs reprendront une partie des propositions du rapport Leclerc sans toutefois aller aussi loin. Un certain nombre de propositions audacieuses leur ont paru mériter un examen supplémentaire, telle celle d'un amortissement fiscal dérogatoire ; d'autres, comme le rapprochement du régime fiscal des investissements cinématographiques sur celui des dons aux oeuvres, ont paru aller trop loin.

L'idée directrice en revanche consistant à retrouver la logique initiale des soficas paraît pouvoir être retenue : sans aller jusqu'à transformer la déduction de revenus imposable en réduction d'impôts, on pourrait augmenter le plafond individuel et collectif, avec en contrepartie, le recentrage de l'aide sur la production dite indépendante.

1. Aménager la taxe vidéo en tenant compte des réalités du marché

En dépit de la croissance du marché du DVD, la contribution du secteur de la vidéo reste limitée.

Compte tenu de ce décalage et du quasi-consensus professionnel, vos rapporteurs ont très vite considéré qu'il fallait réaménager le régime de cette taxe dans les meilleurs délais.

L'un d'entre eux a même obtenu, à l'occasion de la discussion en séance du projet de loi de finances rectificative de fin d'année 2002 , une réponse d'attente favorable du ministre du budget sur le principe du réaménagement de la taxe .

Le gouvernement a trouvé avec le texte sur le droit de prêt en bibliothèque un support commode permettant au nouveau dispositif d'entrer en vigueur pour le second semestre 2003.

Si le dispositif est satisfaisant dans ses grandes lignes, il n'en laisse pas moins subsister la question des modes de commercialisation parallèles.

a) Le mécanisme proposé par le gouvernement

Dans un contexte caractérisé par le poids des prélèvements obligatoires, il a paru peu opportun d'accroître le taux de la taxe pesant sur les DVD. En conséquence, l'idée retenue par le gouvernement consistant à maintenir le taux de 2 % actuellement en vigueur pour l'appliquer au prix public, a paru raisonnable.

Soucieux de mettre en place le nouveau régime de la taxe vidéo dès le second semestre 2003, le gouvernement a cherché le « véhicule » législatif le plus approprié. C'est ce qui l'a conduit à introduire, par voie d'amendement, à l'Assemblée nationale, le nouveau dispositif lors de la discussion en première lecture du projet de loi relatif à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs.

L'article 6 (nouveau) de ce texte introduit dans le code général des impôts, au livre premier, première partie, titre II, un chapitre VII quinquies intitulé : « Taxe sur les ventes et les locations de vidéogrammes destinés à l'usage privé du public ».

L'article 302 bis KE instaure une taxe de 2 % sur les recettes de ventes et de locations de vidéogrammes, assise sur le montant hors taxe desdites opérations et exigible dans les mêmes conditions que celles applicables en matière de TVA.

L'État opère une retenue de 2,5 % sur le produit de cette taxe dont on remarque qu'elle est inférieure à celle envisagée dans le rapport Leclerc.

b) Toucher toutes les formes de distribution

Toutefois, vos rapporteurs se sont un moment demandés si cela était bien suffisant pour profiter de toute la dynamique d'un marché qui se développe aussi bien à partir des grands magasins spécialisés dont les deux enseignes les plus connues sont la FNAC et Virgin ou des grandes surfaces, qu'à partir de circuits parallèles comme la vente sur Internet ou la distribution avec des produits de presse dans les kiosques à journaux.

On peut craindre en effet que, sauf à considérer que la taxe actuellement perçue au niveau des éditeurs, n'est pas toujours payée par les circuits parallèles ou les grandes surfaces, l'extension d'assiette ne correspondra assez largement à la marge des grands magasins spécialisés. De fait, les grandes surfaces et à certains égards les modes de distribution parallèles se caractérisent par des marges minimales, voire nulles, et ce seront donc les magasins spécialisés, dont la caractéristique est précisément d'offrir plusieurs centaines de références, qui devrait supporter une bonne part de la charge de l'augmentation du prélèvement.

En revanche, les grandes surfaces qui font des DVD des produits d'appel, ou les distributeurs sur Internet qui sont capables de proposer des coffrets au prix d'à peine plus d'un euro le DVD, seront relativement moins touchés, sauf, bien évidemment, s'ils s'approvisionnaient auprès d'opérateurs étrangers ne payant pas de taxe au CNC. On doit observer, cependant, que les sommes payées au titre de la taxe par les éditeurs vidéo sont basées sur les recettes effectives tenant compte des ristournes et sont donc, de fait, sensiblement inférieures aux prix d'achat facturé : selon les organisations professionnelles, il y aurait bien un écart de 40 % entre les recettes éditeurs et les recettes points de vente.

Dans le même ordre d'idées, tous les journaux spécialisés dans la diffusion de revues comportant un DVD ne seront guère concernés, ce qui est d'autant plus anormal qu'ils sont soumis à un taux de TVA super réduit de 2,5 %.

Un argument supplémentaire pour s'interroger sur la pertinence de l'assiette retenue vient de ce que les produits d'appel ou ceux diffusés par les circuits parallèles, sont plutôt des films américains. Contrairement aux films en salle dont le prix de vente est indépendant en fait de la nature et de la nationalité d'origine, le mécanisme va jouer probablement en faveur du film américain dont le prix unitaire sera plus faible que les films français qui ne sont pas amortis à l'échelle mondiale, comme leurs concurrents venus des États-Unis.

D'où l'idée un moment avancée par vos deux rapporteurs, avec toute la prudence que requiert un système atypique, de faire prendre en considération une taxation à l'unité : un droit fixe d'un demi-euro par DVD rapporterait ainsi, en théorie 25 millions d'euros , étant entendu que le droit spécifique est cohérent avec la rémunération pour copie privée frappant les supports vierges, qui repose également sur les bases physiques.

2. Adapter le régime des soficas et éventuellement du crédit-bail fiscal

Le rapport Leclerc a procédé à une analyse approfondie des circuits de financement privilégiés destinés à drainer les financements privés faisant partie de ce qu'il qualifie de troisième cercle.

Dans cette perspective, le rapport fait ce qu'il appelle le « pari d'une modernisation » du régime des soficas, avec comme objectif prioritaire d'orienter l'activité de ces organismes vers la production indépendante.

Dans le contexte financier actuel, il semble difficile d'aller aussi loin que le rapport Leclerc en transformant le système de déductibilité du revenu imposable en réduction d'impôt, surtout à un taux de 50 % trop proche du taux de 60 % admis par le gouvernement pour le mécénat.

Plutôt que d'envisager une remise à plat sans doute souhaitable compte tenu du relatif déclin de la formule -qui après avoir représenté presque 10 % des devis n'en constitue plus aujourd'hui que 3 %-, il a paru plus réaliste à court terme d'envisager des mesures ciblées, quitte à accepter de les surajouter au régime existant.

a) Favoriser les soficas consacrées aux films indépendants ou au financement des prestations techniques

L'idée du rapport Leclerc consistant à recentrer les soficas sur les films indépendants à raison de 65 % des investissements contre 35 % actuellement dans les textes et un peu plus de 50 % dans les faits, est tout à fait cohérente. Mais la transformation de la déduction du revenu imposable en crédit d'impôt ne semble envisageable que dans des cas très particuliers présentant un intérêt public évident.

Pour justifier un crédit d'impôt substantiel sans que le mécanisme soit entravé par un plafond d'émission, il faut que la sofica soit dédiée à des actifs très particuliers : films de sociétés de production indépendantes, certes mais aussi financement des prestations techniques, voire films de « création ».

Ainsi des soficas régionales destinées à couvrir les frais techniques localisés paraissent des instruments justifiables au regard des règles communautaires de nature à apporter des financements complémentaires centrés sur des prestations pour lesquelles la France n'est pas compétitive.

Cette forme de financement passant par le marché, aurait, surtout si la garantie des collectivités est partagée avec l'Institut de financement du cinéma (IFCIC), l'avantage d'avoir d'un fort effet de levier. Contrairement à un système de subvention, qui comporte les risques d'arbitraire et donc de gaspillage de tout interventionnisme direct, l'action sur les circuits des financement a l' inconvénient d'amener les collectivités à accumuler des engagements hors bilan . Il en serait de même pour l'État, dans l'hypothèse ou serait introduite dans le circuit l'IFCIC, indépendamment des risques de contagion pouvant résulter l'extension à d'autres types de soficas de la garantie de l'IFCIC.

Mais l'outil puissant que constituerait des soficas ouvrant droit pour leurs souscripteurs à une réduction d'impôt, pourrait se justifier également s'il s'agit de financer des films expérimentaux innovant, du type de ceux éligibles à l'avance sur recette voire susceptibles de recevoir le label « art et essai ».

A quel niveau faudrait-il, dans l'hypothèse où l'on considèrerait justifié d'accorder une réduction d'impôt, fixer le niveau du crédit d'impôt, 25 % comme pour les autres placements à risque ou 40 % soit le niveau d'imposition de la tranche marginale ? Tout cela resterait à débattre, de même que le statut de ce nouveau type de soficas au regard du plafonnement des émissions imposées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Les idées ainsi avancées vont dans le même sens que celles mentionnées dans le rapport Leclerc, qui propose d'appliquer aux soficas l'équivalent de la « clause de diversité ». Il s'agit là d'une position de principe tendant à affecter clairement ce circuit de financement, fiscalement avantagé, au soutien des productions indépendantes.

En tout état de cause, l'on devrait envisager d'assortir l'avantage fiscal accru dont bénéficieraient les soficas à des règles plus rigoureuses en matière de garantie . Le rapport Leclerc suggère que le taux de la garantie éventuellement accordée aux souscripteurs, -que ce soit un engagement de rachat des actions contractées envers la banque collectrice aux mêmes conditions que celles qui ont présidé à leur placement auprès des actionnaires, ou par le biais d'accords de portage et de lettres de confort garantissant à la banque la compensation des pertes subies- ne puisse plus excéder 75 %. Compte tenu de l'importance de la réduction d'impôt, une telle limitation paraît supportable. Elle est en tout cas conforme à l'esprit originaire du système qui consistait à accorder l'avantage fiscal en contre partie d'une prise de risque.

Dans l'optique du rapport Leclerc, la réforme s'accompagnait du maintien pendant quelques années d'une formule complexe dans laquelle auraient coexisté deux régimes qu'il aurait fallu distinguer par des noms différents.

b) Attirer de nouveaux investisseurs par un régime de type « sale and lease back » ?

Le rapport Leclerc propose de rendre applicable le système de crédit bail fiscal aux films. Ceux-ci seraient ainsi vendus par leurs producteurs pour être ensuite loués par ces derniers et, éventuellement rachetés par eux en fin de période de location.

Le système conçu pour le financement des Airbus ou des TGV et rarement appliqués à d'autres types de biens, est-il applicable à des films ? Ce n'est pas évident pour des actifs dont l'amortissement fiscal s'effectue sur un petit nombre d'exercices voire sur un seul exercice, et qui comme le reconnaît le rapport Leclerc posent des problèmes de transferts de propriété compte et des droits d'auteurs qui lui sont attachés.

B. RENFORCER LES FONDS PROPRES DES ENTREPRISES

Le rapport réalisé par notre ancien collègue M. Jean Cluzel en 1998 au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques sur les aides publiques au cinéma insistait déjà sur l'insuffisance de fonds propres des sociétés de production et notait que le secteur du cinéma n'était pas capable de financer ses investissements.

L'étude de « Réalisation et recherches audiovisuelles » voit dans la sous-capitalisation des sociétés de production un facteur de fragilité inquiétant. Elle montre en effet que les préfinancements offerts par le CNC et par le secteur audiovisuel diminuent la prise de risque de producteurs qui, n'ayant besoin, dès lors, que de peu de fonds propres, ne cherchent pas à maximiser la rentabilité de leurs films. La faiblesse des fonds propres nuit particulièrement à certains postes de dépenses affectées au retravail du scénario ou à la promotion du film. Elle limite donc le potentiel de succès des films français.

Le CNC exige pour les entreprises de production un capital social minimal de 45.700 euros. Le rapport Leclerc considère, selon les indications fournies par les professionnels du secteur, qu'une société de production de long métrage devrait idéalement être en mesure de lancer, au cours d'une année donnée, la production d'un à deux films au minimum, ce qui demande, compte tenu notamment des statistiques établies par le CNC sur les devis moyens de développement et les coûts de production, environ 300.000 euros de capitaux propres. Or, selon le CNC, le capital social de la majorité des entreprises de production est égal au minimum prévu par la loi, soit 45.700 euros. Certes, ces sociétés comportent d'autres actifs qui sont incorporés dans leurs capitaux propres, pour l'essentiel les parts de négatifs de films éventuellement conservées sur les films, mais ceux-ci peuvent difficilement être mobilisés rapidement pour le financement d'une nouvelle production. Ils sont de peu de secours pour faire face, dans l'urgence, à une crise de liquidité de la société.

Une piste sérieuse évoquée par le rapport Leclerc pourrait donc consister dans le relèvement du montant minimal du capital social des sociétés de production fixé par la loi. Dans cette perspective, la mobilisation de véhicules d'investissement fiscalement attractifs et l'utilisation des incitations fiscales de droit commun aujourd'hui disponibles pour encourager l'investissement dans l'entreprise doivent être encouragées. Si les dispositions concernant les fonds communs de placement dans l'innovation, le capital risque, les déductions fiscales pour la souscription au capital d'entreprises non cotées ne sont pas spécifiques au cinéma, elles méritent d'être mieux connues par les professionnels du secteur. En ce qui concerne les fonds communs de placement dans l'innovation et le capital risque, une adaptation judicieuse de ces instruments de financement peut se justifier. Qui peut nier que le cinéma soit un secteur innovant, à forts risques, où la rentabilité, quoique aléatoire, est parfois élevée ?

1. Rendre applicables les mesures favorables à l'innovation et la recherche

La France s'est dotée depuis une dizaine d'années d'un dispositif de soutien aux entreprises innovantes qui draine aujourd'hui des capitaux importants. Les entreprises financées par ce biais, souvent dans le domaine des nouvelles technologies et de la recherche, présentent des caractéristiques communes avec les entreprises du secteur du cinéma. Alors qu'elles exercent une activité très capitalistique, elles sont, à différents stades de leur développement, sous-capitalisées. Elles offrent aux investisseurs des perspectives de gains mais au prix d'une prise de risque non-négligeable. Pour ces raisons, les capitaux drainés dans ces secteurs viennent d'investisseurs, sinon professionnels, du moins particulièrement avisés, et disposant d'une surface financière suffisamment large pour répartir leurs pertes.

D'où l'idée de mettre le capital-risque et les fonds communs de placement au service du cinéma.

a) Favoriser l'entrée du capital-risque dans le cinéma

Les années récentes ont connu une forte croissance des capitaux collectés par le biais du capital-risque. Ainsi, entre 1995 et 2002, année qui n'est pourtant pas sur le plan financier une des meilleures, les capitaux levés par l'intermédiaire des fonds de capital-investissement ont été multipliés par huit et les investissements par cinq.

Situation du capital-investissement en France

(en milliards d'euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002 *

Capitaux levés

0,53

0,72

0,66

2,60

3,26

6,11

5,1

4,2

Investissements réalisés

0,75

0,87

1,26

1,79

2,82

5,30

3,29

3,52

* Données provisoires pour 2002

Source : AFIC-PWC, communication du 11 mars 2003 et rapport 2001 sur l'activité du capital investissement

Les investissements réalisés en faveur de la création et du développement des entreprises par les fonds de capital-risque ont ainsi représenté en 2002 plus d'un milliard d'euros.

Investissements des sociétés de Capital-Investissement par stade

(en millions d'euros)

2002*

Amorçage

65

Création / post création

390

Développement

691

Transmission

2201

Rachats minoritaires

177

Total des montants investis

3524

* Données provisoires pour 2002

Source : AFIC-PWC, communication du 11 mars 2003

Les placements dans les fonds de capital-risque connaissent une diffusion croissante parmi les épargnants. Si les fonds communs de placement à risque (FCPR) paraissent réservés à un public averti, voire à des investisseurs institutionnels, la diffusion publique des fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) ne cesse de progresser, comme en témoigne la part prépondérante des réseaux bancaires dans leur distribution.

Il semble intéressant de constater qu'il existe un écart non négligeable entre les capitaux levés chaque année et les investissements réalisés . Ceci signifie qu'un certain nombre de capitaux ne trouve pas à s'investir dans les secteurs traditionnels du capital-risque. Ceci peut constituer une opportunité intéressante pour le cinéma , du moins pour certains de ses domaines d'activité que l'on songe aux industries techniques, au secteur de l'animation et des effets spéciaux.

Si le rapport Leclerc se montre réservé face à l'introduction du capital risque dans le secteur du cinéma, montrant les échecs des expériences passés, relevant le peu d'intérêt manifesté par certains capitaux risqueurs pour le secteur, il faut souligner le volume des capitaux aujourd'hui drainés par le capital-risque et le professionnalisme que pourraient introduire des investisseurs professionnels non-bancaires dans la gestion financière des entreprises cinématographiques.

b) L'assimilation du cinéma indépendant à un secteur innovant au sens des FCPI

Les fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) sont des organismes de placement collectifs en valeurs mobilières (OPCVM) devant respecter des règles précises quant à la composition de leur actif, notamment un quota d'investissement de 60 % de leur actif dans des valeurs mobilières de PME non cotées « innovantes » reconnues comme telles par l'Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR). Les encours levés par les FCPI sont en forte croissance, manifestant ainsi l'attrait de ces produits dont l'argumentaire de placement repose largement sur la fiscalité applicable. Les épargnants souscrivant des parts de FCPI bénéficient d'une réduction d'impôt égale à 25 % de leur investissement dans la limite de 12.000 euros pour les contribuables célibataires, divorcés ou veufs et 24.000 euros pour les contribuables mariés.

Situation des FPCI au 31 décembre 2002

Année

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Nombre de FCPI crées

5

5

11

17

30

31

Souscriptions en millions d'euros

67

151

248

421

567

370

Source : commission des opérations de bourse

Compte tenu des difficultés rencontrées par le secteur des nouvelles technologies, les fonds collectés par les FCPI peinent aujourd'hui à s'investir dans l'économie. Il y a là une opportunité pour le cinéma, et surtout pour le cinéma indépendant dont le caractère « innovant » sur le plan artistique ne peut être contesté. Si une labellisation par l'ANVAR des entreprises du cinéma paraît difficile en l'absence de compétences dans le domaine de cet organisme, une création d'une nouvelle catégorie de FCPI-cinéma , dont la labellisation reviendrait au CNC, paraît une piste à creuser. Contrairement aux soficas, qui financent les films, ces FCPI présenteraient l' avantage d'investir en direct dans les entreprises cinématographiques innovantes , en fonction de considérations artistiques mais aussi de critères financiers.

2. Favoriser le réinvestissement des revenus issus du cinéma

Le milieu de la création d'entreprise s'est familiarisé ave ces « investisseurs providentiels » ou « business angels » qui cherchent à réinvestir dans des sociétés nouvelles l'expérience et les capitaux engrangés au terme de leur réussite professionnelle. Ces personnes physiques, entrepreneurs confirmés, épaulent les créateurs d'entreprise et participent ainsi au renouvellement du tissu économique.

Dans le milieu du cinéma, si les producteurs recyclent effectivement leurs revenus dans des nouvelles aventures cinématographiques, les autres acteurs de la chaîne, en particulier les « talents », se trouvent insuffisamment incités à jouer le rôle d'investisseurs providentiels alors que leur expérience artistique et les gains accumulés pourraient donner un coup de pouce décisif à certaines entreprises du secteur. Certaines incitations fiscales, renforcées dans le projet de loi pour l'initiative économique actuellement en cours d'examen par le Parmement, existent et ne demandent qu'à être davantage utilisées.

a) La déductibilité des souscriptions aux sociétés de production non cotées

Une réduction d'impôt, dite « Madelin » 30 ( * ) , vise à inciter les épargnants à investir en fonds propres dans les petites et moyennes entreprises. Ainsi, l'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts prévoit que « les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 25 % des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées ».

Les sociétés concernées doivent satisfaire à quatre conditions :

- ne pas être cotées sur un marché réglementé ;

- relever de l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun (de plein droit ou sur option) ;

- en cas d'augmentation du capital, réaliser un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 40 millions d'euros ou présenter un total de bilan inférieur à 27 millions d'euros 31 ( * ) ;

- disposer d'un capital majoritairement détenu par des personnes physiques ou des « holdings » de famille ».

La réduction d'impôt est alors égale à 25 % du montant des versements effectués au cours d'une année, dans la limite d'un plafond de 6.000 euros pour les célibataires, veufs ou divorcés, et de 12.000 euros pour les contribuables mariés.

Ce dispositif vient d'être rendu encore plus incitatif par le projet de loi précité pour l'initiative économique, « projet de loi Dutreil », qui prévoit de porter le plafond des souscriptions ouvrant droit à la réduction d'impôt de 6.000 euros à 20.000 euros pour les personnes seules et de 12.000 euros à 40.000 euros pour les couples mariés soumis à imposition commune, le relèvement de ce plafond s'appliquant aux versements réalisés à compter du 1 er janvier 2003.

Il y a là une réelle incitation fiscale à développer les fonds propres des entreprises du cinéma dont doivent s'emparer l'ensemble des acteurs du secteur, d'autant que le projet de loi précité pour l'initiative économique prévoit un dispositif encore plus attractif au bénéfice des redevables à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) . Seraient en effet exonérés les titres reçus par le redevable en contrepartie de sa souscription en numéraire au capital d'une PME sans aucun plafond .

b) L'amortissement fiscal des pertes en capital

La loi « Madelin » de février 1999prévoit un dispositif qui donne quelques garanties aux investisseurs faisant face à des pertes liées à la mise en cessation de paiement de l'entreprise dans laquelle ils ont investi. L'article 25 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative économique, codifié à l'article 163 octodecies A du code général des impôts, permet plus précisément aux contribuables concernés de déduire de leur revenu net global les pertes en capital32 ( * ) subies à la suite de la cessation de paiement d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés au capital de laquelle ils ont directement souscrit. Ces pertes peuvent être déduites dans la limite de la limite annuelle de 15.250 euros pour une personne seule et de 30.500 euros pour un couple marié.

Le projet de loi pour l'initiative économique prévoit de doubler le montant des pertes déductibles du revenu, le portant à 60.000 euros pour les couples mariés et à 30.000 euros pour les personnes seules.

L'amortissement fiscal des pertes en capital, de nature à rassurer l'investisseur, doit permettre aux professionnels du cinéma de financer plus sereinement les entreprises du secteur.

C. DÉVELOPPER LE MÉCÉNAT COMME FACTEUR DE DIVERSITÉ

Activité hybride à la fois économique et culturelle, le cinéma ne s'appuie pas suffisamment sur le ressort puissant que constitue le mécénat.

Le projet de loi que vient de déposer le gouvernement relatif au mécénat, aux associations et aux fondations devrait favoriser le développement d'une source de financement qui devrait jouer un rôle essentiel, non seulement comme complément de ressources, mais comme facteur de diversité culturelle.

1. Une ressource insuffisamment exploitée

Le rapport de M. Jean-Pierre Leclerc constate le faible développement du mécénat dans le domaine du cinéma. Pourtant, le potentiel du secteur semble important.

a) Le constat du rapport Leclerc

Le mécénat culturel est faiblement développé en France tant pour les particuliers que pour les entreprises. Les Français ont déclaré 1 milliard d'euros de dons en 2001, tandis que les entreprises n'y ont consacré que 341 millions d'euros.

Le montant moyen des dons confirme la relative faiblesse des motivations philanthropiques en France par rapport à ce qui existe dans les autres pays.

D'une part, sur 10 foyers fiscaux à peine 15 % ont déclaré un don qui, en moyenne, est de 230 euros.

D'autre part, le mécénat d'entreprise est également peu actif. Ainsi le nombre d'entreprises mécènes reste peu élevé : une société effectue un don moyen de l'ordre de 13.000 euros, ce qui représente moins de 0,3 pour 1000 de son chiffre d'affaires, soit le 10 ème du plafond autorisé par l'article 238 bis du code général des impôts.

Pour compléter ce tableau relativement pessimiste, l'on peut souligner que la France ne compte que 486 fondations reconnues d'utilité publique, 65 fondations d'entreprises, et 1.500 fondations abritées, alors que l'on dénombre 12.000 fondations aux États-Unis et 3.000 « charity trust » au Royaume-Uni.

Selon le rapport Leclerc, une seule fondation est véritablement active en matière de cinéma. Il s'agit de la fondation GAN pour le cinéma . Cette fondation créée en mai 1987, permet notamment à des jeunes cinéastes au nombre de 5 ou 6 par an, de réaliser leur premier long métrage, grâce à une aide financière à la production de 67.600 euros par projet. Un certain nombre de films aidés ont constitué le début d'une belle carrière pour leurs auteurs. Parmi ceux-ci, on peut citer : Microcosmos, Delicatessen, L'odeur de la papaye verte, ou la vie rêvée des anges.

En réalité, à des degrés divers, et il est vrai parfois modestes, de nombreuses entreprises interviennent dans l'attribution de prix ou dans le financement de festivals. L'aide concerne soit des films spécialisés dans une activité en liaison avec celle de l'entreprise, soit des courts métrages. On peut signaler ainsi le prix Altadis du jeune réalisateur, le prix Gras Savoye du court métrage. Enfin, on remarque que la fondation Hachette a décerné des bourses à de jeunes scénaristes pour un montant global de près de 100.000 euros

b) Un terrain pourtant favorable

La nature même de l'activité cinématographique en fait pourtant un domaine très propice aux actions de mécénat.

On citera un exemple tout à fait emblématique : celui de la cinémathèque française dont le ressort principal reste celui de l'initiative privée. L'engagement d'Henri Langlois se perpétue pour faire de cette institution une forme de catalyseur de toutes les énergies et les passions que suscite le cinéma.

Il faut rappeler que les grandes cinémathèques françaises résultent d'initiatives largement personnelles , qu'il s'agisse bien sûr de celle de Paris, créée en 1936, mais aussi de celles de Toulouse ou de l'Institut Lumière de Lyon, à l'origine desquelles l'on trouve chaque fois l'engagement d'une personne privée.

Aujourd'hui encore, le patrimoine cinématographique est , comme le rappelle M. Serge Toubiana, dans son rapport « Toute la mémoire du monde » une affaire de propriété privée . Pour la mission, l'intervention publique doit demeurer subsidiaire, même si sa nécessité n'en reste pas moins évidente.

Nul doute que le mécénat doit pouvoir jouer son rôle, à la fois au niveau de la conservation des oeuvres et de leur création, moins d'ailleurs comme une source de financement complémentaire que comme un facteur de diversité culturelle.

2. La mobilisation des moyens

Le rapport Leclerc, mais aussi celui précité de Serge Toubiana, évoquent l'apport de dispositifs fiscaux pour stimuler le mécénat dans le domaine du cinéma.

Le projet de loi relatif au mécénat, aux associations et aux fondations, défendu par M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication, crée les conditions d'une relance du rôle de l'initiative privée en matière culturelle.

a) Tirer parti du projet de loi relatif au mécénat aux associations et aux fondations

L'État n'a pas le monopole de l'intérêt général. C'est sur la base de cette profession de foi que le gouvernement a décidé d'adapter de façon audacieuse la fiscalité pour permettre à la France de rattraper son retard en matière de fondations et d'activités désintéressées.

Dans son architecture initiale, le texte gouvernemental tend à stimuler les dons des particuliers comme des entreprises.

Les particuliers devraient pouvoir déduire de leur impôt sur le revenu 60 % de la valeur de leurs dons aux organismes d'intérêt général répondant aux critères de l'article 200 du code général des impôts dans la limite de 20 % de leur revenu imposable. Compte tenu du niveau des taux moyens d'imposition, un tel régime va permettre aux individus de bénéficier de réductions d'impôt très importantes par rapport à leur cotisation ; mieux encore, avec la possibilité de reports sur 5 exercices, un foyer fiscal pourra donner en franchise d'impôt, sur 5 ans, l'équivalent de la totalité de son revenu imposable d'une année.

Les entreprises bénéficient également d'un assouplissement du régime de l'article 238 bis du code général des impôts. La déduction du revenu imposable, qui ne s'accompagnait que d'un avantage de l'ordre de 33 %, compte tenu du taux de l'impôt sur les sociétés, laisse la place à une réduction d'impôt de 60 %.

Parallèlement, la limite de cette possibilité de versement à des organismes à caractère d'intérêt général passe de 3,25 pour 1000 à 5 pour 1000.

Le nouveau dispositif comporte des effets de levier très puissants. Telle est la raison pour laquelle vos deux rapporteurs n'estiment pas réaliste d'aller aussi loin que l'évoque M. Serge Toubiana qui préconisait d'appliquer le dispositif de l'article 238 bis 0-A du code général des impôts, relatif aux trésors nationaux à certains grands films historiques.

En fait, il semble possible, d'une part, de se contenter de la déduction de 60 % prévue par le projet de loi précité, et d'autre part, de faire jouer la possibilité actuellement reconnue par les services fiscaux de donations d'oeuvres en nature. Il semble effectivement qu'un particulier devrait pouvoir donner un film à une cinémathèque et déduire sa valeur marchande de son revenu imposable, éventuellement sur plusieurs années.

b) Permettre l'affectation des droits non investis aux fondations dédiées au cinéma

Le rapport Leclerc fait figurer parmi les dispositions destinées au renforcement des capitaux propres des sociétés de production, la possibilité pour certains producteurs, de mobiliser leurs droits de tirages sur le compte de soutien pour le renforcement de leurs capitaux propres.

De fait, une telle mesure serait de nature à diminuer la dette flottante qui pèse sur le CNC dans la mesure où une partie des producteurs ne peuvent pas utiliser les droits qu'ils ont acquis.

Vos deux rapporteurs considèrent, sans pour autant condamner cette piste, qu'il faudrait en étudier une autre permettant aux producteurs qui ne sont pas en mesure d'utiliser leurs droits de tirage, de les affecter à une fondation consacrée au cinéma.

Les fondations ainsi alimentées par les ressources du compte de soutien, pourraient aider, non seulement la réalisation de scénarios ou le montage de premiers films, mais encore la conservation du patrimoine cinématographique.

Ainsi pourrait-on retrouver, mais dans le cadre d'une initiative privée, l'idée développée par Serge Toubiana dans son rapport précité consistant à permettre de financer indirectement sur le compte de soutien des opérations de conservation ou de restauration . D'une certaine façon, il s'agit de récupérer, au profit du patrimoine cinématographique, les droits de tirages en déshérence, ce qui n'est pas sans rappeler certaines initiatives de la commission des finances dans d'autres secteurs du patrimoine.

*

* *

Le présent rapport d'information ne comporte pas en annexe de liste de mesures. D'abord, parce qu'il a paru possible de s'appuyer, dans de nombreux cas, sur celle, très complète, dressée par M. Jean-Pierre Leclerc ; ensuite et surtout, en raison de l'approche même retenue par vos deux rapporteurs : s'ils ont évoqué, ici ou là, des propositions concrètes, il s'agit de simples exemples qui doivent être soumis au crible des examens contradictoires des différents acteurs du secteur.

Une liste récapitulative est apparue d'autant moins nécessaire que l'ambition de vos deux rapporteurs est , avant tout, d'engager les intéressés, administrations et professionnels , à entreprendre une réflexion sur les mécanismes mêmes du compte de soutien , dont on peut se demander s'ils n'ont pas quelque peu vieilli dans un espace économique et culturel désormais largement mondialisé.

L'augmentation des ressources , que vos rapporteurs envisagent effectivement comme une priorité, est la condition nécessaire mais non suffisante pour éviter la crise .

Même si le changement d'assiette de la taxe sur les vidéogrammes, ainsi que les éventuels aménagements du régime fiscal constituent un appoint non négligeable, ils ne sauraient nous dispenser d'un changement de méthode et de mentalité.

Effectivement, il va sans doute falloir s'habituer à se développer au sein d'un espace économique qui a cessé d'être en expansion rapide, autrement dit être capable de « faire tourner la machine » avec des ressources financières qui, dans la meilleure des hypothèses, ne connaîtront qu'une croissance lente.

Or le système d'aide français a évolué de telle manière qu'il ne facilite guère les choix. S'il a permis une plus grande sélectivité, c'est au prix d'une complexité croissante et d'un manque de lisibilité pour les intéressés.

Cette évolution s'est traduite par un certain décalage entre les mots et les choses : l'aide automatique a été rendue à ce point dégressive qu'il s'agit déjà d'une forme d'aide sélective ; quant à l'aide sélective proprement dite, il s'agit en réalité d'une aide discrétionnaire, qui, du fait de son ampleur, ne peut guère échapper au soupçon d'arbitraire voire de favoritisme

La torsion du système d'aide automatique pour y introduire de la sélectivité a atteint ses limites, car la logique de marché n'est pas forcément la plus adaptée pour faire de l'interventionnisme .

A ce glissement progressif, s'est ajouté un malentendu qui tend à faire des ressources du compte de soutien et, en particulier, de l'aide automatique, la propriété de la profession .

Il y a là une question de principe : autant les ressources provenant des entrées-salles peuvent être considérées comme l'argent du cinéma, même s'il s'agit en fait de celui des spectateurs, autant la taxe sur la publicité télévisée -qui est un prélèvement sur un secteur d'activité au profit d'un autre - procède d'une logique fiscale , ce qui fait relever sa redistribution de la responsabilité de l'État. C'est à lui qu'il incombe d'en définir les modalités, même si dans le secteur plus encore que dans d'autres, il doit prêter une oreille attentive aux attentes des professionnels.

Sans doute, le compte de soutien peut-il continuer à fonctionner suivant les règles actuelles en l'absence de chocs externes, qu'il s'agisse du retrait de Canal + ou d'une remise en cause radicale du système par les autorités de Bruxelles.

Mais, surtout dans une hypothèse de rupture, il faudrait se tenir prêt à adapter les principes qui sous-tendent l'aide actuelle.

Au départ de l'enquête, il y a en effet un constat réaliste : l'augmentation des ressources du compte de soutien affectées au cinéma ne suffira pas à préserver de la crise le système d'aide publique au cinéma.

L'élargissement de l'assiette de la taxe vidéo, de même que, éventuellement, des aménagements fiscaux, nécessairement limités dans la conjoncture actuelle, ne sont pas des initiatives de nature à éviter une évolution à moyen terme des procédures d'aide.

Il faut donc selon vos rapporteurs, engager toutes les parties prenantes à se pencher, dès maintenant, sur le devenir du système d'aide.

Apportant leur contribution à ce processus de réflexion collective , vos rapporteurs estiment qu'une réforme devrait s'organiser autour de deux axes principaux : la mise en oeuvre de procédures évaluables, la clarification des mécanismes financiers.

Le premier point consiste à appliquer au secteur du cinéma les principes généraux de responsabilisation des acteurs publics, tels qu'ils résultent de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Il convient de faire évoluer le système d'aide pour le rendre « auditable » , c'est-à-dire que l'on puisse associer à des masses budgétaires des résultats mesurables, ce qui est à l'évidence plus facile à énoncer qu'à mettre en oeuvre s'agissant des aides sélectives, dont l'exemple emblématique est l'avance sur recettes. Même si cette procédure, qui mobilise beaucoup de compétences et de bonnes volontés, donne apparemment satisfaction et paraît recueillir un assez large consensus de la profession, on peut estimer qu'il y a encore beaucoup de progrès à faire pour en apprécier pleinement les résultats.

Comment ne pas être frappé par le fait que plus de la moitié des films produits n'atteignent pas 25.000 entrées et que 60 % d'entre eux ne sont jamais diffusés sur des chaînes en clair, même s'il s'agit de deux aspects distincts de la question de la sous-exposition au public d'une bonne part de la création cinématographique.

Il est difficile de ne pas y voir un certain gaspillage de talents , bien que l'on puisse considérer qu'il n'est pas anormal de connaître des échecs ou de s'engager dans des impasses, s'agissant d'une activité assimilable à de la recherche-développement.

L'autre axe de réflexion concerne les procédures financières qui doivent être clarifiées. Actuellement, le système fait l'objet de deux catégories de critiques : d'un côté, il y a ceux qui estiment que le soutien automatique, qui découle des entrées-salles, est trop important et entretient l'inflation des coûts ; de l'autre, il y a ceux qui dénoncent l'importance excessive de l'aide sélective et son caractère arbitraire.

Vos deux rapporteurs ont essayé de dépasser cette opposition pour considérer qu' il faudrait, à côté du soutien automatique, faire deux parts dans ce qui s'appelle aujourd'hui l'aide sélective , pour distinguer :

- les aides sélectives classiques attribuées sur dossier de façon discrétionnaire ;

- les aides sélectives ciblées ou fléchées accordées à guichet ouvert comme les aides automatiques, sur la base de critères objectifs de nature comptable ou commerciale .

L'équilibre entre chaque catégorie n'a pas à être défini à ce stade. Mais le nouveau système ne devrait pas, dans l'esprit de vos rapporteurs, comporter d'éléments de rupture dans les flux financiers actuels. En particulier, le montant du soutien automatique et des aides sélectives ciblées, d'une part, et l'aide sélective sur dossier, d'autre part, devrait se situer, pour les principaux opérateurs, en cohérence avec ce qu'ils reçoivent actuellement à un titre ou à un autre. C'est en effet à cette condition de continuité financière que la profession, qui doit rester associée à la gestion de l'aide, peut accepter l'inéluctable changement de la règle du jeu .

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a entendu le mardi 29 avril 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, une communication de MM. Yann Gaillard, rapporteur spécial du budget de la culture, et Paul Loridant, rapporteur spécial des crédits des comptes spéciaux du trésor, sur la mission de contrôle qu'ils ont menée sur le compte de soutien au cinéma français.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial du budget de la culture, a souligné, en introduction, combien l'aide publique au cinéma, financée, pour l'essentiel, à partir de ressources prélevées sur les entrées en salle et sur la publicité télévisée, était emblématique de la fameuse et très française « exception » culturelle. Il a rappelé le contexte dans lequel s'inscrivait la mission de contrôle des aides publiques menée par les deux rapporteurs spéciaux, l'un au titre du budget de la culture, l'autre au titre des comptes spéciaux du trésor, qui s'était appuyée sur l'étude d'un expert extérieur. Il a ensuite souligné le paradoxe d'un cinéma français en bonne santé apparente, avec un nombre de films produits qui n'avait jamais été aussi élevé qu'en 2001, avec 172 films français, contre 120 en 1990, mais subissant, sur le plan économique, les incertitudes qui planaient sur Canal +, dont les apports directs ou indirects à travers les obligations de production avaient été à l'origine d'un certain « âge d'or » du cinéma français.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a observé que, face à ce changement de contexte, l'augmentation de l'assiette de la taxe vidéo voulue par la profession et décidée par le Gouvernement apparaissait comme une condition, peut-être nécessaire, mais certainement pas suffisante, compte tenu des faibles masses budgétaires en jeu pour permettre au compte de soutien d'assurer, comme il l'avait fait par le passé, la promotion du cinéma français face au cinéma américain. Il a jugé que l'essentiel était ailleurs, dans la gestion de la dépense, selon deux axes : la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances avec, notamment, l'application des principes d'évaluation des politiques et de responsabilité des opérateurs, d'une part, la clarification du système de soutien en vue d'une meilleure orientation des aides, d'autre part.

M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a ensuite présenté les pistes tracées par les rapporteurs pour apporter de nouvelles ressources au cinéma français. Il a insisté sur la fragilité financière du secteur du cinéma, que l'on se place au niveau des entreprises -notoirement sous-capitalisées ou endettées- ou du compte de soutien, pour lequel il avait fallu diminuer le taux de retour « producteur », qui était revenu de 140 % en 1999 à un barème dégressif allant de 125 % à 50 % en 2002. Tout en soulignant que les ressources alimentant le compte de soutien constituaient des ressources fiscales, contrairement à ce qu'avançaient fréquemment les « gens du cinéma », et que l'aménagement de ces ressources devait entrer dans le cadre de la maîtrise des prélèvements obligatoires, il a appelé de ses voeux une augmentation limitée de la taxe pesant sur les DVD, sans toutefois aller jusqu'à satisfaire les demandes d'une profession, naturellement « gourmande » en argent public et encline à considérer qu'elle pouvait décider de l'importance du prélèvement comme de la répartition du produit. Il a expliqué l'augmentation de la taxe sur la vidéo, qui devrait consister en un changement d'assiette et non une hausse de taux, par le fait que le marché de la vidéo ou du DVD, étant en « plein boum », devait participer davantage au financement du cinéma. Il a indiqué que la réforme proposée, en accord avec les intéressés, consisterait à prélever la taxe, non plus sur le prix éditeur mais au stade du commerce de détail, comme en matière de TVA, et devrait rapporter un supplément de recettes d'environ 6 millions d'euros la première année en année pleine (2003) et, sur la base d'une augmentation du marché de 20 % par an, sans doute plus de 13 millions d'euros en 2006 (55 millions d'euros contre 36,7 millions d'euros à législation constante).

En ce qui concernait les ressources propres de la filière cinéma, il a invité à consolider et développer les financements existants, en aménageant le régime des SOFICA, par un recentrage sur la production indépendante (2/3 des sommes investies contre 1/3 actuellement), en utilisant pleinement tous les mécanismes de droit commun destinés au capital-risque, en tirant parti du projet de loi sur le mécénat, par exemple en permettant aux producteurs d'affecter leurs droits de tirages non utilisés, qui formaient une partie de la « dette flottante » (égale au total à 90 millions d'euros) à des fondations à vocation patrimoniale, et enfin en accompagnant le cas échéant, l'engagement des collectivités locales par la promotion de SOFICA régionales. Il a en revanche souhaité que ne soient pas bouleversées les relations délicates entre le cinéma et la télévision.

En ce qui concernait les dépenses, M. Paul Loridant, rapporteur spécial des crédits des comptes spéciaux du trésor, a indiqué que les propositions soumises à la commission des finances devaient conduire à une refondation des aides publiques au cinéma. Il a déclaré que cet objectif de refondation reposait sur le constat selon lequel les quelque 150 à 170 films français produits chaque année ne bénéficiaient pas tous d'une exposition idéale sur les écrans de cinéma et de télévision. Il s'est alors interrogé sur la question de savoir s'il fallait produire moins de films français, ou du moins diminuer le nombre de films financés par l'argent public, sans y apporter toutefois de réponse définitive. Il a surtout considéré qu'il fallait chercher des moyens diversifiés, de nature à rendre plus visibles tous les films français, et notamment les films à petit budget.

Il a ensuite exprimé les principes selon lesquels opérer la refondation du compte de soutien au cinéma français, prescrivant une évaluation claire de la politique poursuivie et une responsabilisation des acteurs du système. Il a observé que, dans cette perspective, la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances devrait offrir un outil précieux, même si le cinéma constituait un domaine éminemment qualitatif. Il a remarqué qu'à certains égards, ce serait un test de l'applicabilité de la loi organique au secteur culturel.

Au regard des principes posés par ladite loi organique, M. Paul Loridant , rapporteur spécial, s'est interrogé sur la pertinence du mode d'attribution de l'avance sur recettes, qui reposait actuellement sur un président nommé pour un ou parfois deux ans, assisté de trois collèges de neuf membres changeant a priori tous les ans. Il a souligné que cette rotation très rapide, perçue comme une façon d'associer la profession, empêchait en même temps toute évaluation des résultats. Il a noté l'intérêt d'une transposition éventuelle du cas danois, système performant d'aides au cinéma national, dans lequel c'étaient des « consultants », c'est-à-dire des producteurs, qui choisissaient au nom de l'État d'investir dans des films indépendamment de toute considération commerciale. Il a par ailleurs souhaité que la loi organique incite à appréhender la qualité des oeuvres produites, non en notant individuellement les oeuvres, mais en rendant systématique la collecte d'informations, sur les nombres d'entrées, sur les récompenses obtenues dans les festivals, pour se donner la possibilité d'évaluer les échecs et d'améliorer ainsi le processus de sélection des films financés sur fonds publics.

M. Paul Loridant a également proposé, dans un objectif de refondation du système, de clarifier le régime des aides financières en permettant une meilleure orientation et une plus grande lisibilité des aides. Il a considéré que le système d'aide au cinéma français avait, en effet, perdu beaucoup de sa lisibilité initiale par suite de l'accumulation de « guichets » de toute nature et qu'il fallait désormais « repenser la règle du jeu ». Il a imaginé un système limitant l'aide automatique au seul produit de la taxe spéciale sur les places et séparant, dans l'aide sélective, l'aide accordée sur dossier de façon discrétionnaire sur critères artistiques, dont le prototype était l'avance sur recettes, et les aides ciblées en fonction de priorités structurelles et définies sur la base de critères objectifs de nature commerciale ou comptable.

Enfin, M. Paul Loridant a estimé que cette refondation devrait viser à rendre le système français eurocompatible, expliquant que les contacts pris à Bruxelles montraient « deux visages » de la Commission. Celui de la direction des médias très compréhensif vis-à-vis de la politique française et celui de la division de la concurrence très agressif vis-à-vis d'une politique considérée comme perturbatrice pour les échanges intra-européens, en dépit de son importance objectivement limitée. Il a jugé que si la France avait obtenu un sursis jusqu'en 2004 et peut-être un peu plus, compte tenu du renouvellement de la commission, on pouvait se demander si la France pourrait, à long terme, résister à la pression de Bruxelles, soulignant que la position de la France serait plus forte si elle pouvait avoir des intérêts communs avec d'autres pays membres ayant des systèmes analogues, comme l'Italie. Il a indiqué que l'interconnexion avec d'autres systèmes d'aide avait été jusqu'à présent récusée, dans la mesure où l'aide automatique française était plus généreuse, puisqu'elle incluait des ressources en provenance d'une taxe sur la publicité télévisée, ce qui n'existait nulle part ailleurs, mais que la reconfiguration des aides envisagée par les rapporteurs devrait rendre possible l'ouverture réciproque du système français sur les systèmes européens équivalents.

En complément aux interventions de M. Jean Arthuis, président, soulignant notamment le coût très important du régime des intermittents du spectacle et du régime de TVA réduite dont bénéficiaient les professionnels du cinéma, et de M. Yves Fréville, critiquant le régime fiscal des SOFICA et observant que le système d'aides publiques au cinéma fonctionnait, sous couvert d'exception culturelle, « en circuit fermé », MM. Yann Gaillard et Paul Loridant, rapporteurs spéciaux , ont, tout en insistant sur l'excellent système que représentait l'aide automatique et le rôle qu'elle jouait en faveur de la persistance du cinéma français face au déclin des autres cinémas européens, jugé que le nombre de films produits était vraisemblablement excessif, entraînant un certain gaspillage de talents puisque plus de la moitié des films n'atteint pas 25.000 entrées et 60 % d'entre eux ne sont jamais diffusés sur des chaînes en clair. Ils ont enfin déploré que le système ait favorisé l'inflation du coût des talents.

A l'issue de cette présentation, la commission a donné acte aux rapporteurs des conclusions de leur communication et a décidé d'en autoriser la publication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNALITÉS AUDITIONNÉES

BLOCH-LAINÉ

Nathalie

Directrice des acquisitions du cinéma français à Canal +

BONNELL

René

Directeur de la stratégie des programmes à France Télévision

KARMITZ

Marin

Président de la Fédération nationale des distributeurs de films

LAMY

Jean-Claude

Président de la commission d'avances sur recettes

MIRSKI

Jean-Yves

Délégué général du Syndicat de l'édition vidéo

PAUL

Henri

Président de l'IFCIC

PERSON

Philippe

Directeur général du syndicat des détaillants spécialisés du disque

ROGARD

Pascal

Délégué général de l'ARP

SEGONZAC

Thierry de

Président de la Fédération des industries, du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia

SEYDOUX

Nicolas

Président directeur général de Gaumont

SIRITZKY

Serge

Rédacteur en chef d'Ecran total

TESSIER

Marc

Président de France Télévision

VERRECHIA

Guy

Président directeur général d'UGC

DÉPLACEMENT À BRUXELLES :
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

25 février 2003

M. Philippe Chauve , Expert national détaché à l'Unité « Commerce des services » de la Direction générale « Commerce » (Commission européenne).

M. Joaquin Fernandez-Martin , Chef de l'Unité « Entreprises publiques et services » de la Direction générale de la Concurrence (Commission européenne).

M. Emmanuel Joly , Administrateur à l'Unité « Politique audiovisuelle » de la Direction générale de la Culture (Commission européenne).

M. Alain Pithon , Conseiller « Concurrence » à la Représentation permanente de la France près de l'Union européenne.

ANNEXE

LE CINÉMA FRANÇAIS

FACE À L'ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE

ET À LA TRANSFORMATION DES MARCHÉS

Rapport rédigé pour « Réalisations et recherches audiovisuelles »

par Michel Fansten

Novembre 2002

SOMMAIRE

Pages

ANNEXE : LE CINÉMA FRANÇAIS FACE À L'ÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE ET À LA TRANSFORMATION DES MARCHÉS 114

INTRODUCTION 3

I. UN BILAN FAVORABLE, MAIS UNE ÉCONOMIE FRAGILISÉE 3

II. LA RÉFLEXION INDISPENSABLE SUR L'AVENIR DU DISPOSITIF FINANCIER ET RÉGLEMENTAIRE DE SOUTIEN AU CINÉMA 6

PREMIÈRE PARTIE - L'ÉCONOMIE DU CINÉMA 11

I. L'ÉCONOMIE DES ENTREPRISES 15

1. La place des entreprises de l'audiovisuel et du cinéma dans l'économie française 16

2. Les entreprises de production cinématographique 17

3. Les entreprises de distribution 18

4. Les entreprises d'exploitation de salles de cinéma 20

II. L'ÉCONOMIE DES FILMS 21

1. Le financement des films français 21

2. Les recettes des films français 25

a) Les recettes des entrées en salles 26

b) Les recettes issues des chaînes de télévision 27

c) Les recettes de l'édition vidéo 28

d) Les recettes d'exportation 29

3. Les revenus des producteurs 30

III. LE SYSTÈME DE SOUTIEN FINANCIER AU CINÉMA FRANÇAIS 33

1. Les aides du CNC 34

2. La contribution des diffuseurs à la production cinématographique 41

3. Les SOFICA 43

4. L'IFCIC et les systèmes de garantie 43

IV. LE CINÉMA EUROPÉEN FACE AU CINÉMA AMÉRICAIN : LE SYSTÈME FRANÇAIS DE SOUTIEN AU CINÉMA CONSTITUE-T-IL UN OBSTACLE AU LIBRE JEU DU MARCHÉ , 45

1. La question du « marché pertinent » 46

2. L'avantage concurrentiel du cinéma américain face au cinéma européen 48

a) La taille des marchés 48

b) La structure des ressources 49

DEUXIÈME PARTIE - LES DÉSÉQUILIBRES ET LES TENSIONS 51

I. LES PHÉNOMÈNES DE CONCENTRATION DANS L'EXPLOITATION ET LA DISTRIBUTION DES FILMS EN SALLES 57

1. La concentration dans l'exploitation 59

2. La concentration dans la programmation 59

3. La concentration dans la distribution 61

4. La concentration dans la fréquentation 62

5. Un déséquilibre croissant dans l'exposition des films 63

a) La conjonction du développement des multiplexes et d'une augmentation du nombre de films entraîne une rotation de plus en plus rapide des films 63

b) L'inflation des coûts de sortie 66

6. Des difficultés persistantes dans le secteur de l'exploitation 71

II. LES MOUVEMENTS DE CONCENTATION DANS LA DISTRIBUTION ET DANS L'EXPLOITATION DES FILMS EN SALLES SE RETROUVENT DANS LES AUTRES MODES DE DIFFUSION 73

1. Le cinéma à la télévision 73

a) La concentration des catalogues 73

b) La marginalisation des distributeurs indépendants 75

2. L'édition vidéo 76

3. L'exportation des films 77

4. La position des films français sur le marché national 81

III. LA PRODUCTION 82

1. Une double inflation, du nombre des films chers et du nombre des films bon marché 83

a) 34 films d'initiative française ont un devis supérieur à 7 millions d'euros en 2001 83

b) 42 films d'initiative française ont un devis inférieur à un million d'euros en 2001 84

c) Le nombre de films dont le devis est compris entre 2 et 5 millions d'euros a fortement diminué 84

2. La politique de production des chaînes de télévision 85

a) L'évolution de l'offre et de la demande de films à la télévision 85

b) Les conséquences sur les engagements des chaînes dans le financement de la production 88

3. La dégradation des conditions de financement d'un nombre croissant de films 89

IV. LES MUTATIONS TECHNOLOGIQUES AMPLIFIENT LES DÉSÉQUILIBRES LIÉS À L'ÉVOLUTION DES MARCHÉS 92

TROISIÈME PARTIE - CONCLUSION ET PROPOSITIONS 94

I. LA QUESTION DU FINANCEMENT 96

1. Inciter les investisseurs à participer au financement du cinéma commercial 97

2. Définir des politiques spécifiques de soutien aux films qui n'ont pas vocation à se situer d'emblée dans un projet commercial. 99

II. LA QUESTION DE L'INTÉGRATION VERTICALE 100

DOCUMENTS ANNEXÉS 105

Films d'initiative française : productions 100% françaises et coproductions françaises majoritaires 106

Données complémentaires sur l'économie des entreprises cinématographiques 116

Les obligations des chaînes en matière de soutien à la production cinématographique 124

La question de la nationalité des films : la définition française et la définition européenne 130

INTRODUCTION

I. UN BILAN FAVORABLE, MAIS UNE ÉCONOMIE FRAGILISÉE

Réduit à l'essentiel ce rapport pourrait se résumer en un double constat :

• Le cinéma français se porte bien. Il affiche depuis quelques années de bons résultats, qu'il s'agisse du nombre des entrées, de la part de marché obtenue par la production nationale, ou du nombre de films produits. L'année 2001 avait été, de ce point de vue, exceptionnelle. 2002, même si elle enregistre un recul certain, reste sur une tendance favorable.

• Tous les ingrédients sont cependant réunis pour qu'il soit confronté, à relativement court terme, à une crise majeure.

1. Le premier facteur de fragilité tient au poids pris par la télévision dans le financement du cinéma, dans un contexte désormais moins favorable:

La production cinématographique française repose sur un système de préfinancement alimenté actuellement pour plus des deux tiers par la télévision hertzienne : obligations d'investissement d'une part, contributions au fonds d'aides géré par le CNC d'autre part, proportionnelles les unes et les autres aux chiffres d'affaires des chaînes (redevance, recettes publicitaires, abonnements).

Porté depuis 15 ans par l'augmentation générale des ressources de la télévision, ce système avait permis à la production française de ne pas être affectée par la diminution du nombre des entrées en salles, qui s'était poursuivie jusqu'au début des années 90. Il a amplifié les effets de la reprise de la fréquentation, qui s'est progressivement installée à partir de 1993/1994. Il a assuré le développement d'une production créative et diversifiée, malgré le redéploiement progressif des investissements des chaînes au profit des films « grand public » susceptibles d'être diffusés en première partie de soirée.

Tout laisse à penser que cette période faste, s'achève.

La progression des recettes de la télévision s'est ralentie : on assiste, depuis trois ans déjà, à un infléchissement dans l'évolution des investissements publicitaires, comme dans celle des abonnements, et rien ne permet de penser, pour l'instant, qu'ils retrouveront prochainement leur tendance antérieure.

Ce mouvement risque d'être accentué pour le cinéma par le fait qu'une part croissante des recettes de la télévision se porte désormais sur les nouvelles chaînes du câble et du satellite soumises à des obligations plus limitées, voire sur des chaînes transfrontières qui échappent à la réglementation française.

Enfin, et surtout, on ne peut exclure que la contribution de Canal+ au financement du cinéma se réduise, soit parce que ses engagements seraient revus à la baisse, par exemple d'ici 2004 à l'occasion de la renégociation de sa convention, soit simplement parce que le chiffre d'affaires de la chaîne diminuerait, contribuant ainsi à amplifier des tensions déjà perceptibles.

2. Le deuxième facteur de fragilité tient aux contraintes croissantes qui pèsent sur la distribution

La concentration dans le secteur de l'exploitation cinématographique et le développement des multiplexes ont entraîné une rotation de plus en plus rapide des films . Ce mouvement a été accentué, à la marge, par l'effet des cartes illimitées.

Le succès commercial d'une oeuvre cinématographique se joue désormais en quelques semaines. Il en résulte une double conséquence financière pour les films destinés à un large public  : au stade de la production, une augmentation continue des coûts de tout ce qui peut leur assurer d'emblée la notoriété et l'attractivité réputées indispensables pour déplacer rapidement un grand nombre de spectateurs (acteurs célèbres ; effets spéciaux) ; puis lors de leur mise en exploitation, une inflation des frais de sortie avec, notamment, une multiplication du nombre des copies nécessaires pour disposer du maximum d'écrans.

Cette évolution aboutit par contrecoup à réduire, voire à marginaliser, l'exposition des films qui ne bénéficient pas de tels moyens.

Cet ensemble de facteurs entraîne une polarisation croissante autour de deux catégories d'oeuvres : des films chers, de plus en plus chers ; des films à petits budgets, de plus en plus nombreux. Profondément différents dans leur économie et dans leurs modes de financement, ils n'en contribuent pas moins, chacun à leur manière, à la fragilité du secteur : les premiers parce qu'ils sont de plus en plus difficiles à rentabiliser ; les seconds parce qu'ils sont de plus en plus difficiles à distribuer.

Plus le nombre de films mis en exploitation augmente, comme cela a été le cas ces dernières années, plus cette tendance s'accentue..

3. Le développement de nouveaux supports et de nouveaux canaux de diffusion contribue à amplifier ces déséquilibres.

L'exploitation en salle, qui dans le système français détermine le statut de « production cinématographique » d'une oeuvre audiovisuelle, n'intervient plus aujourd'hui que pour 15% environ, en moyenne, dans l'économie des films. Elle demeure une vitrine indispensable à leur valorisation commerciale ultérieure, mais elle ne constitue désormais que la première séquence d'une longue chaîne d'exploitations secondaires, auxquelles la technologie numérique apporte une dimension supplémentaire : édition vidéo (cassettes et DVD), diffusion TV (paiement à la séance, télévision à péage, télévision en clair, chaînes thématiques du câble et du satellite), et demain diffusion via Internet.

Cette diversification des modes d'exploitation transforme en profondeur l'économie du cinéma : elle facilite l'accès aux oeuvres ; elle allonge leur durée de vie commerciale et elle accroît leurs perspectives de rentabilité. Mais l'expérience montre qu'elle profite surtout aux films qui ont déjà obtenu un succès auprès du public, lors de leur sortie en salle.

A la typologie définie en amont par le coût des films, se superpose ainsi en aval une autre typologie : celle du nombre des entrées en salles, avec d'un côté les films à succès a priori assurés de connaître une exploitation commerciale ultérieure favorable, et de l'autre côté des films qui, quelles que soient leurs qualités intrinsèques, n'ont pas obtenu du public une reconnaissance suffisante pour mobiliser d'emblée les distributeurs et les acheteurs, même si dans ce domaine rien n'est définitivement déterminé et que les exemples ne manquent pas de films ayant connu une brillante carrière après un premier échec commercial.

Ces deux typologies ne sont naturellement pas indépendantes l'une de l'autre : plus un film a coûté cher, plus le succès en salle apparaît comme un préalable indispensable à sa rentabilité 33 ( * ) . L'observation montre d'ailleurs que les films qui déplacent le plus de spectateurs sont majoritairement des films à gros budget.

L'accroissement de l'écart entre les deux modèles économiques qui coexistent au sein de l'industrie du cinéma correspond à la pente naturelle du marché. Il est accentué par les effets de la concentration de l'exploitation et de l'internationalisation de la distribution, qu'il contribue à son tour à accentuer.

II. LA RÉFLEXION INDISPENSABLE SUR L'AVENIR DU DISPOSITIF FINANCIER ET RÉGLEMENTAIRE DE SOUTIEN AU CINÉMA

Le système français de soutien mis en place il y a plus de cinquante ans, a largement atteint ses objectifs : le cinéma national a continué à exister et à se renouveler, et il a infiniment mieux résisté que ses homologues italien, britannique, ou allemand à la diminution de la fréquentation en salle au profit de la télévision, puis à la pression commerciale du cinéma américain.

Une révision de ce dispositif est cependant inévitable pour deux ensembles de raisons : il est fragilisé par les critiques dont il fait l'objet en dépit, et quelquefois à cause de ce succès ; il apparaît mal adapté pour accompagner les évolutions en cours.

Une partie des critiques auxquelles il est confronté, en France, concerne l'efficacité des mesures mises en place . Ces critiques ne mettent pas en cause le principe du soutien, mais les conditions de son application : les résultats obtenus n'ont-ils pas été trop cher payés ? En d'autres termes, n'aurait-on pas pu obtenir un tel bilan à moindre frais ; ne produit-on pas trop de films ; ne conviendrait-il pas d'introduire des critères plus restrictifs dans la distribution des aides ; ne peut-on pas considérer que la protection vis à vis des sanctions du marché dont bénéficient nombre de cinéastes ou de producteurs, est excessive ou injustifiée ?

Une autre partie des critiques porte au contraire sur le principe même des aides , présentées comme « altérant les conditions des échanges et de la concurrence ». C'est la position défendue par les négociateurs américains au sein de l'OCDE et de l'OMC depuis toujours, et notamment depuis que la multiplication des chaînes de télévision a considérablement augmenté le marché de leur production 34 ( * ) . C'est, depuis quelques années, le point de vue adopté par la Direction de la Concurrence de la Commission européenne qui conteste, à la fois, la territorialité des aides (considérées comme un obstacle à la construction du marché unique européen), et les obligations de production imposées aux chaînes (réputées fausser le fonctionnement du marché 35 ( * ) ).

Ces critiques relèvent de logiques différentes et quelquefois contradictoires. Mais elles se conjuguent pour fragiliser le système de soutien dans son ensemble à un moment où, pour les professionnels eux-mêmes, ce système apparaît insuffisant affronter les évolutions induites par les mutations technologiques  et le passage d'une économie de court terme sur un marché national protégé , à une économie de moyen-long terme sur un marché international de plus en plus concurrentiel et de plus en plus ouvert.

Toutes ces questions ont été et seront encore l'objet de débats. L'intérêt que leur porte la Représentation nationale apparaît d'autant plus légitime que le cinéma est au centre de la politique de diversité culturelle défendue par tous les gouvernements français, de droite ou de gauche, dans les instances européennes comme dans les négociations internationales .


Ce rapport n'est donc ni le premier ni le dernier qu'une commission parlementaire aura consacré au sujet . Il partage d'ailleurs une bonne partie des analyses des rapports qui l'ont précédé, et notamment des plus récents d'entre eux (le rapport Cluzel pour le Sénat, le rapport Rogemont pour l'Assemblée Nationale), - qu'il s'agisse des résultats obtenus ou des dérives constatées.

Il s'en distingue cependant sur deux points : son diagnostic est plus pessimiste ; les mesures sur lesquelles il débouche sont plus radicales .

Le contexte s'est en effet récemment dégradé : La place prise dans la production, la distribution, et l'exploitation des films par des grands groupes de communication soumis à une forte pression des marchés financiers, s'avère constituer un nouveau facteur de fragilité pour le cinéma.

Les polémiques qui avaient suivi les déclarations de Jean-Marie Messier sur « la fin de l'exception culturelle française », traduisaient les inquiétudes des professionnels face au risque d'une remise en cause unilatérale des engagements ce Canal+ vis à vis du cinéma français. Ces inquiétudes se doublent désormais des incertitudes sur l'avenir même de Vivendi Universal et de ses filiales.

Les difficultés de Vivendi, aussi médiatiques soient-elles, ne doivent cependant pas masquer ce que cette crise a de général : Ce n'est pas un hasard si elles se sont manifestées à peu près en même temps que l'effondrement du groupe Kirch en Allemagne, la faillite d'ITV Digital en Grande Bretagne, ou les contre performances d'AOL Time Warner et de Disney aux Etats Unis. Aucune de ces crises n'était due au cinéma. Toutes auront des conséquences sur son économie.

Les perspectives ouvertes par le développement d'Internet à haut débit avaient en effet conduit à des alliances, puis à des fusions, entre opérateurs de réseaux et opérateurs de contenus. La mise en oeuvre de ces  « stratégies de la convergence » s'était accompagnée d'acquisitions coûteuses destinées à assurer à chacun des groupes ainsi constitués, sur ses domaines d'intervention prioritaires, la masse critique considérée comme indispensable pour peser sur le marché.

Le cinéma apparaissait, dans ces stratégies, comme un produit d'appel pour constituer et fidéliser des « parcs d'abonnés ». La rentabilité des investissements à engager dans ce secteur était dès lors à envisager globalement en prenant en compte l'ensemble de l'activité commerciale que la diffusion de films était susceptible d'induire dans les portails de la nouvelle économie : les 4,5 millions d'abonnés de Canal+ devenaient dans ce schéma autant de clients potentiels d'un gigantesque supermarché virtuel allant du téléphone portable, à l'Internet rapide et au téléachat.

La remise en cause, temporaire ou durable, de ce modèle a obligé les groupes concernés à revoir leurs politiques en fonction des exigences de rentabilité financière de leurs actionnaires. Par un phénomène de vases communicants, l'évolution de leurs engagements dans le cinéma devient désormais tributaire des déficits générés par leur endettement dans d'autres secteurs, ou de l'effondrement en bourse d'une partie de leurs actifs.

Cette conjonction ne peut que déboucher sur des tensions croissantes dans le financement du cinéma français. L'infléchissement des ressources disponibles pour la production devrait certes être progressif et d'une ampleur relativement limitée, mais la perception qu'en auront les producteurs sera amplifiée pour deux raisons :

La première est que le redéploiement des investissements des chaînes privées au profit des films plus commerciaux susceptibles d'être diffusés en première partie de soirée, déjà largement engagé, réduit les masses financières disponibles pour d'autres catégories de films.

La seconde est que, porté par les facilités financières et les bons résultats du cinéma français au cours de la dernière période, le nombre des projets proposés aux chaînes (notamment à Canal+) continue à augmenter, rendant plus difficile le financement de chacun de ces projets pris isolément

___________

La réflexion sur l'avenir du dispositif financier et réglementaire sur lequel s'appuie le cinéma français, engagée par le CNC à la demande du gouvernement et des professionnels, était indispensable et urgente.

Un accord assez général existe sur le principal enjeu de la réforme à engager : préserver et mieux valoriser le potentiel de création et de production qui s`est constitué, en France, autour du cinéma.

Les questions de financement étant au centre de l'inquiétude des professionnels, un premier ensemble de propositions a porté sur l'élargissement et la diversification des financements encadrés existants, de manière à compenser l'infléchissement attendu des apports de la télévision, voire à accroître les ressources disponibles. La taxation de l'édition vidéo, la mise en place de nouvelles incitations fiscales, ou la création de fonds de soutien régionaux, vont dans ce sens.

Cette voie est naturellement à explorer. Mais il serait dangereux de se limiter à des mesures financières qui, après avoir dans un premier temps masqué les difficultés, rendraient à terme la crise plus brutale.

Les questions de financement ne sont en effet que le révélateur des problèmes croissants auquel le cinéma français va se trouver confronté.

PREMIÈRE PARTIE

L'ÉCONOMIE DU CINÉMA

Avec une dépense de 5,8 milliards de francs (880 millions d'euros) en 2000, sur une consommation globale de 4 987,2 milliards de francs (760 milliards d'euros), les Français ont consacré moins d'argent à aller au cinéma, qu'à acheter des sorbets ou des crèmes glacées 36 ( * ) - achat qui par ailleurs contribue de manière significative au chiffre d'affaires des exploitants de salles 37 ( * ) .

C'est peu, même si l'on prend en compte les exploitations secondaires des films. Il n'est pas inutile de le rappeler : l'importance du cinéma, en France comme dans la plupart des autres pays, ne se mesure pas d'abord en termes économiques.

Ce n'est pas le cas du cinéma américain. A Los Angelès, l'industrie du cinéma emploie directement 255 000 personnes, et 500 000 de manière indirecte. Ce secteur représente aujourd'hui pour les Etats Unis un des principaux postes de leur balance commerciale et, surtout, l'accroissement des ventes à l'international est devenu indispensable à la rentabilisation de films dont les coûts, de plus en plus élevés, débordent désormais largement les possibilités d'amortissement du marché intérieur. Toute part de marché conquise à l'étranger sur les cinémas nationaux contribue à cette rentabilisation ; tout recul la compromet.

Les moyens mis en oeuvre par les américains pour assurer le développement de cette industrie sont à la mesure des enjeux qu'elle représente : aux Etats Unis un régime fiscal favorable ; en dehors des Etats Unis et notamment en Europe, un contrôle à peine partagé du système de distribution des films et du parc de salles 38 ( * ) .

Deux chiffres sont à cet égard significatifs : en 2000, les films américains, qui obtenaient 93% des entrées sur leur marché national, représentaient 73% des entrées dans les cinémas européens. Le chiffre d'affaires du cinéma français, pourtant réputé être « le troisième cinéma mondial 39 ( * ) », représente toutes exploitations confondues moins de 2% de celui des seules majors du cinéma américain.

Le débat ouvert par la Commission européenne à propos du droit de la concurrence et du libre jeu du marché doit être replacé dans ce contexte. Les politiques nationales de soutien au cinéma sont avant tout des dispositifs de régulation destinés à permettre la coexistence, voire l'enrichissement mutuel, de cinémas qui sont dans un rapport très déséquilibré.

C'est sous cet angle qu'il convient, en France, d'appréhender l'économie du cinéma, et d'évaluer les résultats des politiques mise en oeuvre

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La principale caractéristique de l'évolution du secteur cinématographique a longtemps été la diminution continue du nombre des entrées en salles au profit de la télévision. Elle a entraîné une crise majeure des cinématographies nationales dans la quasi totalité des pays, avec deux exceptions notables : les Etats-Unis et la France

La diminution de la fréquentation sur le marché domestique a été compensée aux Etats-Unis, par un élargissement de la diffusion internationale, et en France, par un certain nombre d'obligations imposées aux chaînes de télévision, en matière de production et de diffusion de films.

L'engagement des chaînes dans la production cinématographique a ainsi permis le développement du cinéma français alors que les autres cinématographies européennes s'enfonçaient dans la crise. Il a toutefois eu pour contrepartie une dilution du rôle que jouaient traditionnellement la distribution et l'exploitation en salle dans la régulation de la production de films, ainsi qu'un relâchement des liens de complémentarité et de solidarité entre les entreprises du secteur, qui étaient au coeur des mécanismes de soutien mis en place après la dernière guerre. Il n'y a pas si longtemps les réseaux de salles contribuaient, sous forme d'à-valoir, à la production des films. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.

Ces différents pôles se sont progressivement organisés autour de modèles économiques autonomes, voire antagonistes, destinés à assurer leur survie, puis à permettre leur développement. Les oppositions d'intérêts qui en résultent, illustrés par l'éclatement des associations professionnelles à l'occasion du conflit entre TPS et Canal satellite sur le paiement à la séance, puis par le débat autour des cartes illimitées, contribuent à leur tour à fragiliser le système en rendant plus difficile la recherche de solutions consensuelles.

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Cette étude est organisée autour d'une double approche : celle de l'économie des entreprises et des mouvements qui l'affectent ; celle du financement des films et des tensions auquel il est confronté.

Ces deux points de vue sont nécessaires et indissociables, comme le montre par exemple la concentration croissante des entreprises du secteur autour de quelques groupes de communication : celle-ci a des effets directs sur les conditions de production et d'exploitation des films, -et inversement, les difficultés de financement ou de distribution des films poussent les entreprises concernées à s'adosser à des groupes financièrement plus puissants.

_________________

Malgré l'abondance des statistiques publiées, il n'existe pas de base de données cohérente permettant d'avoir une vision d'ensemble de l'économie française de la production et de l'exploitation des films.

Cette situation résulte de la conjonction de trois facteurs :

1. L'économie du cinéma est à la fois celle des oeuvres, et celles des entreprises qui interviennent dans leur production, leur distribution et leur diffusion . Or en France, contrairement à d'autres pays où chaque film est identifié comme une entreprise, ces deux univers ne coïncident pas.

2. La réalisation d'un film fait intervenir plusieurs types d'apports, de nature très différente : des apports financiers, mesurables, et divers apports en industrie (artistiques, techniques, administratifs..). La raison d'être de ces derniers n'est pas seulement d'ordre économique. Les recettes générées par un film peuvent très bien être inférieures à la valeur cumulée des apports des différents intervenants, telle qu'elle apparaît dans les devis, sans que ceux-ci s'estiment perdants. Dans ce décompte, il est aussi difficile d'évaluer « le coût réel d'un film », que d'apprécier sa rentabilité 40 ( * ) .

3. La plupart des entreprises du secteur du cinéma (production de films, distribution, et exploitation de salles) interviennent dans plusieurs activités dont l'association contribue à leur équilibre financier.

On dispose en pratique de deux systèmes d'information qui ne se recoupent que partiellement et que nous n'avons pas cherché à faire coïncider mais qui, de manière concordante, mettent en évidence les mêmes tendances :

- l'un construit à partir du bilan des entreprises (chiffre d'affaires, charges salariales,..).

- l'autre organisé autour des statistiques liées à l'action du CNC,  concernant les conditions de la production (devis, plan de financement,..), et les résultats l'exposition des oeuvres (nombre d'entrées en salles ; audiences télévisées ; diffusion vidéo).

I. L'ÉCONOMIE DES ENTREPRISES

Le secteur cinématographique regroupe, selon l'INSEE, trois catégories d'acteurs :

le producteur, qui réunit l'ensemble des moyens financiers nécessaires à la réalisation du film, après avoir investi dans le développement du projet ;

Le distributeur, qui prend en charge le film une fois terminé et en assure la commercialisation, en France et à l'étranger ;

L'exploitant de salles 41 ( * ) .

Les trois ensembles d'entreprises de la filière cinéma ont, en termes de chiffres d'affaires 42 ( * ) , des poids comparables

Chiffres d'affaires comparés des différents sous-secteurs de la filière cinéma (M€)

1996

2000

Entreprises de production cinématographique

539

873

Entreprises de distribution de films

536

842

Entreprises d'exploitation de salles

715

950

Source : INSEE / CNC / DDM .les entreprises de l'audiovisuel . août 2002 Retraitement MF

La période 1996 / 2000 a été prise comme référence dans cette première partie de l'étude. Elle apparaît plus représentative de la situation actuelle du cinéma français que l'année 2001 qui affiche des résultats exceptionnels. Elle correspond à une phase de confirmation de l'accroissement du nombre des entrées en salles qui s'était amorcé au début des années 90, et de montée en puissance des nouvelles chaînes thématiques du câble et du satellite (en particulier des chaînes cinéma). Le chiffre d'affaires de l'édition vidéo n'enregistre pas encore le développement du marché des DVD intervenu surtout à partir de 2001, mais ce développement est déjà perceptible dans l'évolution des cessions de droits effectuées par les producteurs ou les distributeurs. L'importance des variations enregistrées d'une année sur l'autre dans la fréquentation des salles de cinéma en France, ou dans la vente de films français à l'étranger, est par ailleurs significative de l'ampleur des fluctuations qui affectent l'économie de ce secteur, et qui tiennent souvent au succès d'un seul film.

1. La place des entreprises de l'audiovisuel et du cinéma dans l'économie française

«Entre 1996 et 2000, les cinquante premières entreprises cinématographiques de l'Union européenne, dont un grand nombre exercent une activité dans plusieurs branches, ont vu leur produit d'exploitation presque doubler, mais leurs indicateurs de performance indiquent une détérioration de leur situation financière» 43 ( * ) .

Cette situation est très exactement celle de la France : l'activité des entreprises du secteur audiovisuel en général, de la filière cinéma en particulier, s'est développée entre 1996 et 2000 deux fois plus vite que dans le reste de l'économie, mais leur équilibre économique apparaît fragile.

L'INSEE évaluait en 2000, la progression de la « production nationale » à 20% par rapport à 1996, soit un rythme moyen de 4,6% par an.

Calculé sur les mêmes bases, le produit de l'activité des entreprises du secteur audiovisuel (chiffre d'affaire et immobilisations) apparaît en augmentation de 43% par rapport à 1996, soit une moyenne de 9,3% par an 44 ( * ) .

La filière cinéma affiche une augmentation de 36,5% par rapport à 1996, soit une moyenne de 8,5% par an.

Sur cet ensemble, l'activité des entreprises de production cinématographique, enregistre une progression de 50% par rapport à 1996, soit une augmentation moyenne de 10,7% par an.

Croissance comparée des différents secteurs audiovisuel entre 1996 et 2000

1996

(M€)

2000

(M€)

Evolution moyenne annuelle

Production nationale

2 060,20

2 472,52

4,6%

Produit de l'activité du secteur audiovisuel

12,117

17,305

+9,3%

Entreprises de la filière cinéma

2,603

3,553

+8,5%

Production de films

0,785

1,177

+10,7%

Distribution

1,012

1,369

+7,8%

Exploitation de salles

0,806

1,007

+5,7%

Autres entreprises de l'audiovisuel

9,514

13,752

+9,6%

Télévision hertzienne

4,664

5,921

+6,1%

Chaînes thématiques et locales

0,413

1,157

+29,4%

+34,0%

Ensembliers du câble et du satellite

0,486

1,565

Production de programmes télévisuels de flux

0,482

0,624

+6,7%

Production de programmes télévisuels de stock

1,140

1,351

+4,3%

Edition vidéo

0,693

0,861

+5,6%

Production de commande

0,634

0,894

+9,0%

Prestations techniques

1,001

1,378

+8,3%

Sources : Les Comptes de la Nation / INSEE 2002 , et Les entreprises de l'audiovisuel / édition août 2002 / CNC - DDM.

2. Les entreprises de production cinématographique

Le chiffre d'affaires des producteurs de cinéma s'est établi à 873 millions d'euros en 2000, en forte progression par rapport à 1996 grâce notamment à l'augmentation des ventes et préventes de droits aux chaînes de télévision, en 1999 et surtout 2000.

Si l'essentiel des recettes de ces entreprises est lié à l'exploitation des films produits 45 ( * ) , une partie significative provient d'autres activités de production (production exécutive, prestations diverses), ou de distribution.

Chiffre d'affaires des entreprises de production cinématographique (M€)

1996

1997

1998

1999

2000

Production totale

785

876

861

924

1177

dont : chiffre d'affaires

539

569

563

661

873

production immobilisée ou stockée 46 ( * )

246

307

288

263

304

Détail du chiffre d'affaires

Ventes de droits d'exploitation des films

384

412

347

525

594

dont :

Remontées recettes guichets et autres recettes en provenance des distributeurs 47 ( * )

123

129

85

120

91

Ventes de films aux chaînes

53

72

69

104

143

Préventes de films aux chaînes

135

121

122

144

201

Ventes et préventes de films à la vidéo

17

20

16

33

59

Ventes et préventes de films à l'étranger

56

70

56

123

101

Autres recettes de production

38

50

80

44

118

Recettes de distribution et autres recettes

117

107

135

93

161

Source : INSEE / CNC / DDM .les entreprises de l'audiovisuel . août 2002 Retraitement MF

3. Les entreprises de distribution

Le montant des recettes des distributeurs de programmes audiovisuels, correspondant à la commercialisation de films français ou étrangers s'est élevé à 842 millions d'euros en 2000, en progression de près de 60% par rapport à 1996. La part des distributeurs spécialisés dans la distribution des films reste majoritaire, mais elle tend à baisser au profit des distributeurs plus généralistes : elle représentait 61 % des recettes en 2000 contre 76% en 1996.

La progression des ventes de films aux éditeurs vidéo est le reflet de l'évolution attendue du marché du DVD.

Chiffre d'affaires des entreprises de distribution (M€)

1996

1997

1998

1999

2000

Production totale

1012

1054

1304

1243

1369

Dont : chiffre d'affaires

946

1004

1246

1186

1342

immobilisations

66

50

58

57

27

Détail du chiffre d'affaires

Recettes de distribution de films 48 ( * )

536

588

802

763

842

dont :

Remontées de recettes des salles

327

288

348

337

343

Ventes de films cinéma aux chaînes

114

174

253

252

225

Ventes de films cinéma à la vidéo

36

43

57

70

115

Distribution de films cinéma à l'étranger

49

61

104

63

93

Divers

10

22

40

41

66

Autres recettes des distributeurs

410

416

444

423

500

Recettes des entreprises ayant pour activité principale la distribution de films en salles

Recettes de distribution de films

407

399

491

461

513

dont :

Remontées de recettes des salles

313

269

319

293

314

Ventes de films cinéma à la vidéo

18

26

27

38

43

Ventes de films cinéma aux chaînes

59

80

121

108

104

Autres recettes sur films cinéma

8

19

20

16

30

Distribution de films cinéma à l'étranger

9

5

4

6

22

Autres recettes des distributeurs de films

65

89

83

101

100

Total des recettes

472

488

574

562

613

4. Les entreprises d'exploitation de salles de cinéma

Les recettes liées à l'exploitation des salles représentaient, en 2000, un total de 798 millions d'euros, constitué à 84% des « recettes guichet », auxquelles s'ajoutaient les recettes de confiseries et les recettes de publicité. On notera que les montants de ces deux derniers postes ont doublé depuis 1996, alors que les recettes guichet n'augmentaient que de 20%

Le niveau élevé des recettes guichet en 1998 est lié au succès de Titanic.

Chiffre d'affaires des entreprises d'exploitation en salles

en millions d'euros

1996

1997

1998

1999

2000

Production totale

806

890

1038

1063

1007

Dont : chiffre d'affaires

715

836

952

958

950

immobilisations

91

54

86

105

57

Détail du chiffre d'affaires

Recettes liées à l'exploitation des salles

625

678

808

758

798

dont

Recettes nettes aux guichets ( hors TSA) 49 ( * )

555

585

686

629

669

Confiseries

34

49

58

64

69

Recettes de publicité

16

18

22

33

31

Autres recettes d'exploitation de salles

20

27

43

32

28

Autres recettes des exploitants de salles

90

158

144

200

153

Recettes de distribution 50 ( * )

43

124

80

122

82

Recettes de production

Autres recettes

30

17

22

12

28

36

31

47

23

48

Total

715

836

952

958

950

Source : INSEE / CNC / DDM .les entreprises de l'audiovisuel . août 2002 Retraitement MF

II. L'ÉCONOMIE DES FILMS

Le cinéma français a produit ou coproduit 821 films entre 1996 et 2000, dont 672 films d'initiative française (films 100% français, ou coproductions majoritairement françaises) pour un budget global de 2892 millions d'euros sur 5 ans.

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre de films agréés

131

158

180

181

171

204

Dont, nombre de films d'initiative française

104

125

148

150

145

172

Coût global des films d'initiative française(M€)

385

597

646

586

678

749

1. Le financement des films français

Le financement des films repose sur trois ensembles de participations : producteurs, distributeurs, diffuseurs (français et étrangers), auxquelles s'ajoutent les différentes formes de soutien apportées par le CNC, et les apports des Soficas

Directement concernés par le succès d'un film, distributeurs et diffuseurs interviennent en effet souvent dès le stade de la production, le distributeur sous la forme d'un «  minimum garanti », à valoir sur les recettes qu'il aura à verser au producteur, les diffuseurs sous la forme d'un préachat des droits d'exploitation qui les intéressent. Leurs apports sont fréquemment complétés par des participations en coproduction dans le financement du film, qui leur donnent à titre complémentaire un droit sur l'ensemble des recettes d'exploitation.

Le coût de production, tel qu'il apparaît dans les tableaux suivants, correspond au coût de l'ensemble des prestations nécessaires à la préparation et à la réalisation des films, majoré avant la mise en production, d'une « provision pour imprévus », de l'ordre de 7 à 10% du budget.

Une partie des prestations artistiques, techniques, ou administratives peut toutefois faire l'objet d'« apports en industrie » des intervenants concernés, qui acceptent ainsi d'être rémunérés de manière différée sur les recettes revenant au

producteur, au moment de l'exploitation du film 51 ( * ) . Ces apports sont comptabilisés dans la part producteurs pour la partie française, ou dans les apports étrangers.

Les besoins effectifs de financement peuvent dès lors être sensiblement inférieurs au coût de la production 52 ( * ) .

Financement des films d'initiative française 53 ( * ) (M€)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Financements encadrés

231,83

312,93

346,55

332,42

367,03

382,62

Apports Sofica

18,57

27,06

27,72

25,86

38,77

24,78

Soutien automatique

31,96

45,97

50,35

51,30

65,06

67,92

Soutien sélectif

19,16

30,43

28,39

25,63

24,44

23,62

Apports en coproduction des chaînes

29,95

33,67

36,56

29,28

27,23

26,33

Pré-achats de chaînes

132,19

175,80

203,53

200,35

211,53

239,97

Financements non encadrés

153,19

284,12

298,66

253,24

311,26

366,5

Apports des producteurs français 54 ( * )

102,03

204,93

188,69

157,84

230,02

260,32

A-valoir distributeurs France

21,21

20,83

43,66

51,46

37,21

44,95

Apports étrangers

29,95

58,36

66,61

43,94

44,03

61,23

Total

385,02

597,05

645,51

585,66

678,29

749,12

Financement des films d'initiative française

en % des devis

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Financements encadrés

60,21

52,41

53,68

56,77

54,11

51,07

Apports Sofica

4,82

4,53

4,29

4,42

5,72

3,31

Aides du CNC

13 ,28

12,80

12,20

13,14

13,19

12,22

Soutien automatique

8,30

7,70

7,80

8,76

9,59

9,07

Soutien sélectif

4,98

5,10

4,40

4,38

3,60

3,15

Obligations d'investissement des chaînes

42,11

35,08

37,19

39,21

35,20

35,54

Apports en coproduction

7,78

5,64

5,66

5,00

4,01

3,51

Pré-achats de chaîne

34,33

29,44

31,53

34,21

31,19

32,03

Financements non encadrés

39,79

47,59

46,32

43,23

45,89

48,93

Apports des producteurs français

26,50

34,33

29,24

26,94

33,91

34,76

A-valoir distributeurs France

5,51

3,49

6,76

8,79

5,49

6,00

Apports étrangers

7,78

9,77

10,32

7,50

6,49

8,17

Total

100,00

100,00

100,00

100,00

100,00

100,00

Source : CNC / octobre 2002

Les financements encadrés (obligations d'investissement ou de préachat des chaînes de télévision, crédits gérés par le CNC, contributions des Soficas) mobilisent autour du cinéma des masses financières importantes.

Ils réduisent d'autant les ressources que les producteurs doivent prélever sur leurs fonds propres, ou les crédits qu'ils doivent obtenir auprès d'organismes financiers 55 ( * ) . Ils limitent ainsi leurs risques financiers.

La plupart de ces financements ont toutefois pour contrepartie de limiter les droits qui restent disponibles pour une commercialisation éventuelle, et donc de restreindre les perspectives de profit que les autres investisseurs peuvent attendre de l'exploitation des films. Dans certains cas, les droits résiduels apparaissent même trop limités pour intéresser un distributeur ou un exportateur. C'est la raison pour laquelle la réglementation imposant aux chaînes de télévision un quota d'investissement dans la production de films, a limité les droits d'exploitation ou de commercialisation qui peuvent être détenus par les diffuseurs ou leurs filiales.

Les financements encadrés et leurs contreparties

Type de financement

Droits cédés

Pré-achat

1ou 2 multidiffusions en crypté (1ére et 2è fenêtre)

1ou 2 passages TV en clair

Part copro TV

jusqu'à 50 % des revenus nets de la part producteur

Soutien automatique

Aucune cession de droits

Soutien sélectif

jusqu'à 30 % du soutien ou 15 % des RNPP

(récupération de l'apport)

SOFICA

jusqu'à 50 % des recettes

(récupération de l'apport et bonus au delà)

La production française apparaît ainsi financée de deux manières : par les « financements encadrés » dont la masse globale est fixée par la réglementation 56 ( * ) et dont l'essentiel ( compte de soutien du CNC et contributions des chaînes de télévision) repose sur les performances passées des diffuseurs ; par les financements non encadrés, dont la masse globale dépend des anticipations des investisseurs financiers sur les performances à venir des productions.

La quasi totalité de ces apports ont pour contrepartie un intéressement au résultat de l'exploitation des films qui, sous des formes diverses, repose sur les recettes générées par la vente des films.

2. Les recettes des films français

D'après le CNC, l'ensemble des recettes des films français perçues par les distributeurs, les exportateurs et les éditeurs vidéo a atteint 662 M€ en 2000 57 ( * ) .

Dans ce décompte, les recettes de l'exploitation en salles ont légèrement diminué par rapport à 1996, les recettes TV ont augmenté de 36% en quatre ans, soit près de 8% en moyenne par an, les exportations (soumises à des fluctuations significatives d'une année sur l'autre) ont faiblement progressé, et l'édition vidéo n'a pas encore enregistré de mouvement significatif sur les ventes de films français.

Evolution des recettes des films français (M€)

(M€)

1996

1997

1998

1999

2000

Recettes salles 58 ( * )

111,7

113,0

103,0

109,4

104,9

Recettes TV 59 ( * )

297,3

328,4

366,5

380,1

402,8

Recettes vidéo 60 ( * )

62,1

67,5

74,5

84,7

82,5

Recettes d'exportation 61 ( * )

62,8

125,0

64,0

105,0

71,7

Total

533,9

633,9

608,1

679,3

661,8

Source : CNC / rapport sur le financement du cinéma/ juillet 2002

a) Les recettes des entrées en salles62 ( * )

Montant global et affectation des recettes guichet (M€)

1996

1997

1998

1999

2000

Total

726,0

788,9

916,8

823,2

891,4

Taxe spéciale

79,4

86,3

100,1

89,7

97,0

TVA

38,5

41,8

48,6

43,6

47,4

SACEM

9,2

10,0

11,6

10,5

11,3

Exploitation

299,4

323,2

377,7

339,5

363,9

Distribution

299,5

327, 6

378,8

339,9

371,9

Dont films français 63 ( * )

111,7

113,0

103,0

109,4

104,9

films étrangers

187,8

214,6

275,8

230,5

267

(%)

1996

1997

1998

1999

2000

Total

100,00

100,00

100,00

100,00

100,00

Taxe spéciale

10,94

10,94

10,92

10,90

10,88

TVA

5,30

5,30

5,30

5,30

5,31

SACEM

1,27

1,27

1,26

1,27

1,27

Exploitation

41,24

40,97

41,20

41,24

40,82

Distribution

41,25

41,52

41,32

41,29

41,72

Source : CNC / rapport sur le financement du cinéma/ juillet 2002

La répartition de la recette salle entre la taxe spéciale additionnelle (TSA) alimentant le fonds de soutien du CNC, la TVA, les droits d'auteurs payés à la SACEM, les exploitants et les distributeurs, apparaît très stable.

On constate tout au plus un léger glissement au profit des distributeurs, compensant l'augmentation de leurs frais d'édition. Ceux-ci ont en effet augmenté de manière importante ces dernières années à cause de l'élargissement des combinaisons de sorties des films (qui augmente le nombre de copies en première semaine d'exploitation) et de l'inflation des investissements publicitaires.

b) Les recettes issues des chaînes de télévision

Depuis 1987, la télévision s'est imposée comme la principale source de financement des oeuvres cinématographiques françaises.

Achats de droits de diffusion de films par les chaînes de télévision (M€)

1996

1997

1998

1999

2000

Chiffre d'affaire des chaînes de télévision

5061

5382

5841

6454

7074

Dont chaînes hertziennes

4657

4838

5077

5489

5919

Chaînes du câble et du satellite

404

544

764

963

1155

Total achats de films

514,8

608,3

678,7

717,3

776,7

Dont films français

297,3

328,4

366,5

380,1

402,8

films étrangers

217,5

279,9

312,2

337,2

373,9

Part relative des films français (%)

58%

54%

54%

53%

52%

Sources : DDM / Indicateurs statistiques de l'audiovisuel et CNC / rapport sur le financement du cinéma/ juillet 2002

Quasi négligeables jusqu'au début des années 1980, les recettes télévisuelles du cinéma avaient progressé à un rythme rapide entre 1982-1991 : +30 % par an, en moyenne. Après une phase de stagnation entre 1991 et 1993 imputable à la disparition de La Cinq, cette croissance s'est poursuivie, portée par l'augmentation du chiffre d'affaires des chaînes de la télévision et notamment, depuis 1996, par celui des chaînes du câble et du satellite

Les achats de films par les télévisions ont progressé de 10,8% par an, en moyenne, entre 1996 et 2000, plus rapidement que les autres postes de recettes du cinéma.

Les achats de films français ont progressé toutefois à un rythme sensiblement inférieur à cette moyenne : 7,9% par an (soit pratiquement celui des ressources des chaînes 64 ( * ) ), contre 14,5% pour les films étrangers (essentiellement américains)

Le recul relatif des films français résulte de la pratique des Output Deals conclus par les chaînes avec les majors , pour garantir leurs approvisionnements en films américains.

c) Les recettes de l'édition vidéo 65 ( * )

Les recettes de l'édition vidéo des films français ont représenté un peu plus de 80 M€ en 2000 soit 12 % des recettes des films français. Le poids de ce secteur est relativement stable sur la période étudiée 66 ( * ) .

Evolution du chiffre d'affaires des éditeurs vidéo(M€)

1996

1997

1998

1999

2000

Total

557

562

572

576

656

Location

57

67

71

78

78

Vente

499

495

502

498

578

dont, vente de DVD

13

83

216

Vente de films en vidéo

408,1

430

428,1

397,2

409,3

Dont films français

62,1

67,5

74,5

84,7

82,5

Films étrangers

346

362,5

353,6

312,5

326,8

Part relative des films français (%)

15%

16%

17%

21%

20%

Source : SEV

Près de 4 000 films sont disponibles sur le marché de la vidéo toutes nationalités confondues. Les films américains représentaient 47 % de l'offre en 2000, mais réalisaient plus de 70 % du chiffre d'affaires. Avec 37 % de l'offre en nombre de titres, les films français ne réalisaient que 20 % des recettes.

Le marché du cinéma en vidéo repose en grande partie sur les oeuvres récentes : les films dont le visa d'exploitation est postérieur à 1990, réalisent 85 % du chiffre d'affaires films des éditeurs, ceux qui sont sortis dans l'année en réalisent plus de 60 %.

Contrairement aux Etats-Unis où la vidéo représente, depuis plusieurs années, une source substantielle de financement pour le cinéma, les producteurs français profitent pour l'instant relativement peu de ce marché et notamment des perspectives de développement du DVD. L'une des explications est sans doute que les principaux éditeurs vidéo aux Etats Unis sont des filiales des majors qui participent à ce titre au financement des films, ce qui n'est généralement pas le cas en France.

d) Les recettes d'exportation

Les exportations de longs métrages correspondent au montant total des ventes de films français et étrangers réalisées au cours d'une année donnée, par des sociétés françaises (exportateurs, producteurs) détenant les droits de diffusion de ces films sur divers territoires ou mandatées pour en effectuer la cession, pour des diffusions en salle, à la télévision ou en vidéo.

Les recettes d'exportation des films français à l'étranger ont représenté en moyenne, sur la période considérée, 13,5 % des recettes du cinéma français, avec des fluctuations importantes d'une année sur l'autre. Si l'on exclut les films événements, tels que Jeanne d'Arc ou le Cinquième Elément, qui ont marqué les années 1999 et 1997, leur évolution semble s'inscrire dans une tendance légèrement croissante.

En 2000, les exportations des films français ont généré 71,65 M€ de recettes

Evolution des recettes d'exportation (M€) 67 ( * )

1996

1997

1998

1999

2000

Exportations de films français

62,8

125,0

64,0

105,0

71,7

Réexportations de films étrangers

38,3

50,3

37,5

45,6

97,6

Total des exportations

101,1

169,2

101,5

166,6

169,2

Source : CNC / rapport sur le financement du cinéma/ juillet 2002

Les recettes générées par les longs métrages étrangers exportés par les sociétés françaises ont, pour la première fois en 2000, dépassé les recettes des films français, portant à près de 170 M€ les encaissements en provenance de l'étranger

Cette activité de réexportation est essentiellement le fait de filiales des principaux groupes audiovisuels français, notamment TF1 International et Studio Canal. Ces sociétés peuvent détenir librement les mandats sur des films étrangers, plus facilement que sur les films français (du fait de la limitation du nombre de mandats 68 ( * ) - parmi lesquels le mandat de vente à l'étranger - imposée aux filiales des chaînes de télévision, mais qui ne s'applique pas aux acquisitions étrangères).

3. Les revenus des producteurs

Les recettes du cinéma français, saisies au niveau des distributeurs, des éditeurs vidéo et des exportateurs ne donnent qu'une vue partielle des revenus de la production, pour trois raisons :

• les sommes perçues par les producteurs français sur ces recettes dépendent de pratiques contractuelles spécifiques à chaque marché, correspondant à des barèmes particulièrement diversifiés.

• Les ventes de droits effectuées par les producteurs auprès des éditeurs vidéo sont, dans un marché en développement, proportionnellement supérieures aux recettes vidéo de l'exercice en cours.

• Les recettes d'exportation ne prennent en compte que les recettes déclarées au CNC par les exportateurs. En règle générale, elles ne comptabilisent donc pas les préventes effectuées directement par les producteurs avant la réalisation du film.

Les flux financiers correspondant aux ventes et aux achats de droits par les différentes catégories d'intervenants en amont et en aval de leur réalisation, ne peuvent être reconstitués qu'indirectement, en croisant les différentes sources d'information disponibles 69 ( * ) .

Les différents tableaux ci-après, réalisés selon cette méthode, font ainsi apparaître que, en 1996 70 ( * ) ,

• 16% des revenus des producteurs français provenaient de l'exploitation en salles, 61% des ventes aux chaînes de télévision, le reste se répartissant en parts sensiblement équivalentes entre l'édition vidéo et les exportations

• 70% résultaient de ventes directes, 30% des reversements sur les ventes réalisées par des distributeurs

• 44% intervenaient en préfinancement (dont l'essentiel en préventes aux chaînes de télévision), 56%, une fois le film terminé.

Marché des droits sur films de cinéma en 1996

millions de francs

Achats par les :

Ventes par les :

Distributeurs

Exploitants

Editeurs vidéo

Diffuseurs TV

Etranger

Total

des ventes

Producteurs cinéma

898

-

120

1 600

381

2 999

(films français)

Distributeurs

-

-

-

-

-

1964 71 ( * )

733

1231

302

30

272

1 533

350

1 183

406

135

271

4 205

1248

2 957

dont

films français

dont

films étrangers

Etranger

1 546 72 ( * )

-

113

244

-

1 903 73 ( * )

Total des achats

2 444

898

1546

1964

733

1231

535

150

385

3 377

1 950

1 427

787 74 ( * )

516

271

dont

films français

dont

films étrangers

Source : le compte de l'audiovisuel / 1989-1996 / retraitement MF

Ce tableau se lit ainsi :

• Les producteurs français vendent pour 2 999 MF de droits sur leurs films, dont 898 MF aux distributeurs, 120 MF aux éditeurs vidéo, 1 600 MF aux chaînes de télévision et 381 MF à l'étranger.

• Les distributeurs français achètent pour 898 MF de droits aux producteurs et pour 1.546 MF à l'étranger, soit en tout pour 2 244 MF. Ils en revendent pour 4.205 MF, essentiellement aux exploitants de salles pour 1964 MF (47%) et aux diffuseurs de télévision pour 1543 MF (36%). La différence correspond à leur commission et à la valeur ajoutée par leur intervention (tirage des copies, doublage ou sous-titrage des films étrangers, publicité ...).

L'étranger a vendu pour 1 903 MF de droits sur films (étrangers), essentiellement aux distributeurs (81%) et aux chaînes (13%) et a acheté pour 787 MF de droits aux producteurs et aux distributeurs français. Ces derniers ont réexporté pour 271 MF une partie des droits qu'ils avaient acquis sur les films étrangers . On peut déduire de ces chiffres que le déficit commercial du cinéma français en 1996, s'élevait à plus de 1,1milliard de F.

Revenus des producteurs

( année 1996 ; Millions de francs)

Part des ventes directes et des ventes par l'intermédiaire d'un distributeur 75 ( * )

Répartition entre préventes et ventes de films terminés

Nature des revenus

Total

Part des ventes directes et des ventes par l'intermédiaire d'un distributeur

Répartition entre préventes et ventes films terminés

Ventes directes

Intervention d'un distributeur

préventes

Ventes

film terminé

préventes (minima garantis)

Ventes

film terminé

préventes

Ventes

film terminé

Recettes salles

469

16%

139 76 ( * )

330

139

330

Recettes TV

1832

61%

1055

545

232

1055

777

Exportation et vidéo

698

23%

125

376

197

125

573

Total

2999

100%

1180

39%

921

31%

139

5%

759

25%

1319

44%

1580

56%

Source : le compte de l'audiovisuel / 1989-1996 / retraitement MF

Ce tableau se lit ainsi :

Sur un total de 469 MF de recettes salles, 139 ont été apportés par des distributeurs en minima garantis lors de la production, à valoir sur les recettes futures ; et 330 sur les recettes effectives de l'exploitation, une fois déduits les minima garantis.

Les 759 MF reversés aux producteurs par les distributeurs sur leurs recettes, comprennent, outre le complément de 330 millions d'euros sur les recettes salles, 232 MF de recettes TV et 97 MF sur l'ensemble de leurs ventes aux éditeurs vidéo et à l'étranger.

III. LE SYSTÈME DE SOUTIEN FINANCIER AU CINÉMA FRANÇAIS

Tous les pays aident leur cinéma, pour des raisons à la fois économiques et culturelles.

La nature des mesures mises en place varie très sensiblement d'un pays à l'autre. Elles peuvent prendre la forme d'aides directes financées sur le budget de l'Etat comme au Danemark, ou sur ceux des régions comme en Allemagne, de ressources affectées comme celles qui proviennent des profits de la loterie en Grande-Bretagne, d'avantages fiscaux comme en Allemagne ou en Irlande, de facilités de crédit bancaire adossées à un fonds de garantie comme en Espagne, ou d'aides à l'exportation, comme aux Etas-Unis...Elles peuvent être accompagnées, comme dans la plupart des pays de l'Union européenne, d'obligations réglementaires ou d'engagements contractuels associant des chaînes de télévision à la production cinématographique.

La principale originalité du système français est que les interventions directes sur le budget de l'Etat sont pratiquement inexistantes et les interventions des régions, marginales. Le soutien financier est pour l'essentiel financé en interne , par les contributions obligatoires des entreprises concernées par les exploitations des films : salles de cinéma ; chaînes de télévision ; éditeurs vidéo.

Il comporte deux composantes principales :

Les aides automatiques et sélectives du Compte de soutien géré par le CNC, dont la part cinéma est financée par la taxe spéciale additionnelle sur le prix des places de cinéma (11%, en moyenne, du prix du billet), la taxe sur les diffuseurs télévisuels (5,5% du chiffre d'affaires des chaînes, dont un peu plus du tiers est affecté au cinéma, la taxe sur l'édition vidéo (2% du chiffre d'affaire des éditeurs et importateurs, dont 85% est affecté au cinéma).

Les obligations d'investissement des chaînes nationales hertziennes dans le financement d'oeuvres cinématographiques françaises et européennes, sous forme de préachat de droits de diffusion ou d'apports en coproduction.

Il est complété par une sorte d'avance sur recettes, financée sur fonds privés à travers une incitation fiscale, les Sociétés de financement du cinéma et de l'audiovisuel (SOFICA).

L'ensemble s'appuie sur un système de crédit et de garanties bancaires, organisé autour de l'Institut de financement du cinéma (IFCIC), permettant notamment aux producteurs d'obtenir dans des conditions favorables des avances de trésorerie sur les contrats passés ou les aides attendues.

D'autres soutiens financiers viennent compléter ce dispositif, au niveau national (fonds régionaux), ou européen (fonds Eurimages). Leur poids relatif dans l'économie de la production est limité, mais ils s'avèrent souvent déterminants pour compléter un plan de financement.

Le système français de soutien financier au cinéma est par ailleurs indissociable du cadre réglementaire auquel il est adossé, en matière de production (définition de l'oeuvre cinématographique, conditions de l'agrément pour avoir accès au compte de soutien,..), et de diffusion (chronologie des médias, quotas d'oeuvres françaises et européennes des chaînes de télévision,..).

1. Les aides du CNC

Institué par la loi du 25 octobre 1946 et organisé par un décret du 28 décembre 1946 sous la tutelle du Ministère de l'industrie et du commerce, le Centre national de la cinématographie est à l'origine chargé notamment de contrôler les recettes et de garantir leur répartition auprès de ayants droit. La loi du 23 septembre 1948 instaure un mécanisme de taxation des sorties qui permet l'attribution d'un soutien automatique à la production et à l'exploitation. Un fonds d'aide à la diffusion du cinéma français à l'étranger s'ajoute en 1953 au Fonds de développement de l'industrie cinématographique.

En 1959, le Centre national de la cinématographie est rattaché au nouveau Ministère des affaires culturelles et le Compte de soutien à l'industrie cinématographique, alimenté par la taxe spéciale additionnelle (TSA) est créé. Aux soutiens automatiques s'ajoutent des aides sélectives : les prix à la qualité du court métrage et surtout l'avance sur recettes, créée par décret du 16 juin 1959.

Le système va être complété peu à peu vers la distribution et l'exploitation, par ajouts et retouches successives, avec notamment la création d'un secteur "art et essai" par décret du 30 juin 1962.

Le développement de la télévision, qui fait largement appel à la diffusion de films de cinéma, entraîne une baisse de la fréquentation des salles, conduisant les pouvoirs publics à définir des règles du jeu entre les deux secteurs économiques et à créer, par la loi de finances pour 1984, une taxe sur les ressources des chaînes qui vient alimenter le compte de soutien, redéfini avec une section cinéma et une section audiovisuelle.

Ce dispositif est élargi à la diffusion vidéo avec la création d'une taxe sur les vidéogrammes, par la loi de finances pour 1993. Le décret du 30 juin 1994 organise le système de soutien automatique et sélectif. La loi de finances pour 1996 précise l'objet et le contenu du compte d'affectation spéciale " soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie des programmes audiovisuels".

Le système de soutien au cinéma, réorganisé dans le cadre des nouvelles normes européennes, par le décret 98-750 du 24 août 1998, a été modifié par plusieurs textes ultérieurs, notamment en ce qui concerne les conditions d'agrément des films de long métrage.

L'action des pouvoirs publics s'est aussi déployée ces dernières années dans les secteurs de l'exploitation (encadrement des cartes d'abonnement, réévaluation des aides à l'exploitation indépendante et aux salles d'art et essai, régulation de la concurrence entre multiplexes et salles indépendantes) et de la distribution (réévaluation des aides aux distributeurs de films français, par un doublement en quelques années de l'enveloppe de ces aides). Elle s'est élargie avec la mise en place d'un nouveau dispositif d'aide intervenant à l'amont de la production des films (aides au scénario, aides au développement pour les jeunes sociétés de production, nouvelles aides au court-métrage).

Les conditions d'exigibilité pour bénéficier des aides du compte de soutien :

Sont seuls admis au bénéfice du soutien financier les entreprises et organismes établis en France 77 ( * ) . Cette condition s'applique à toutes les branches de l'industrie : production, distribution, exploitation, industries techniques.

Pour bénéficier du soutien, les films de long métrage doivent être agréés. Il doivent pour cela satisfaire à des critères de nationalité, relatifs aux éléments artistiques et techniques du film.

Un barème de 100 points a été instauré, répartis entre les éléments suivants : l'entreprise de production, la langue de tournage, les auteurs, les artistes interprètes, les techniciens collaborateurs de création, les ouvriers, la localisation des lieux de tournage, des matériels techniques de tournage et de la post production. Si le personnel employé sur un film peut être de nationalité européenne, le contrat de travail doit désigner la loi française comme loi applicable. Un film doit obtenir un minimum de 25 points pour que son producteur puisse bénéficier du soutien financier automatique, lié aux entrées en salles. En outre, le nombre de points obtenus dans le barème de 100 points détermine le niveau du soutien qui sera généré par l'exploitation du films et accordé au producteur : un film qui obtient 80 points génère 100% du soutien, celui qui obtient 25 points génère 25%. Le barème s'applique quelle que soit la nature du film : production 100% française ou coproduction internationale.

La procédure d'agrément a été modifiée par un décret du 24 février 1999 78 ( * ) .

La demande d'agrément des investissements avant le début des prises de vue est désormais facultative pour les films ne faisant pas appel à des financements encadrés (avance sur recettes, chaînes hertziennes en clair, SOFICA et coproductions internationales). L'obtention de l'agrément de production, délivré après le visa d'exploitation, reste toutefois obligatoire pour rendre un film générateur de soutien financier 78 ( * ) .

LES PRINCIPAUX DISPOSITIFS DE SOUTIEN FINANCIER DU CENTRE NATIONAL DU CINÉMA 79 ( * )

Le soutien automatique à la production de films de long métrage

Les producteurs bénéficient d'un soutien financier calculé à partir des recettes d'exploitation de leurs films en salles, mais aussi de la diffusion de ces films à la télévision et sur le marché de la vidéo. Le soutien financier ainsi généré est inscrit au compte des producteurs 80 ( * ) . Il peut être investi pour :

- régler les créanciers privilégiés du film précédemment produit ;

- assurer des dépenses liées à la préparation du prochain film ;

- financer un nouveau film, à condition qu'il soit agréé 81 ( * ) .

Le soutien sélectif à la production

Le principal dispositif est celui de l'avance sur recettes, qui permet de soutenir les nouveaux talents et les films ambitieux sur le plan artistique.

Les autres dispositifs concernent :

- le soutien au scénario, destiné aux auteurs et aux auteurs-réalisateurs. Il est accordé pour l'écriture et la réécriture de scénarios,

- le relais financier au développement des projets. Il est destiné aux producteurs, pour leur permettre d'engager des dépenses plus importantes au moment de l'écriture des scénarios,

- l'aide aux films tournés en langue étrangère. Elle est destinée à soutenir les films en langue étrangère qui ne peuvent avoir accès à l'avance sur recettes pour cette raison.

Le soutien automatique à la distribution

Les distributeurs bénéficient aussi d'un soutien financier proportionnel aux recettes d'exploitation des films en salles. Il peut être réinvesti dans de nouveaux films, soit pour régler les frais d'édition soit pour intervenir dans le financement de la production par le versement de minima garantis.

Le soutien sélectif à la distribution

L'objectif de cette aide est de soutenir l'activité des entreprises de distribution indépendantes qui effectuent un travail de découverte et de diffusion du cinéma d'auteur, français et étranger. Le dispositif de soutien a été élargi en 1997 par la création à côté de l'aide au fonctionnement (aide à la structure), d'une aide aux programmes de sorties de films établi sur le programme prévisionnel de l'année).

L'aide à la structure est plus précisément destinée aux entreprises de petite taille, qu'elles soient en phase de développement ou qu'elles diffusent un cinéma exigeant, ainsi qu'aux entreprises spécialisées dans le répertoire. L'aide aux programmes concerne les entreprises qui ont la capacité de présenter un programme (il faut au minimum 4 films pour en bénéficier) et qui ont donc un volume d'activité plus important.

Des aides « film par film » peuvent être accordées aux distributeurs qui n'ont pas obtenu l'aide aux entreprises pour la sortie d'un film déterminé. Une aide minimale de 15 000 euros est accordée automatiquement aux premiers films des réalisateurs qui ont bénéficié d'une avance sur recettes (la commission concernée peut proposer d'augmenter ce montant).

Par ailleurs, un dispositif de soutien spécifique concerne les distributeurs des cinématographies peu diffusées. Il est cofinancé par des crédits du ministère de la culture et du ministère des affaires étrangères.

Le soutien automatique à l'exploitation

Les recettes perçues dans les salles génèrent du soutien financier au bénéfice des exploitants. Ce soutien est proportionnel au montant de la taxe encaissée sur le prix du billet. Il est destiné à financer les travaux d'équipement et de modernisation ainsi que les créations de salles

L'aide sélective à l'exploitation

- L'aide sélective à la création et à la modernisation des salles permet de soutenir les exploitants indépendants dans leurs efforts de modernisation du parc et d'assurer l'équipement de l'ensemble du territoire en salles de cinéma.

- L'aide aux salles classées art et essai permet de soutenir le fonctionnement de ces salles, qui contribuent à la diversité de l'offre cinématographique.

- Une aide spécifique est accordée pour le fonctionnement des salles indépendantes des communes de plus de 200 000 habitants, notamment à Paris, qui offrent une diversité de programmation.

Ressources de la section 1 (cinéma et vidéo) du compte de soutien, d'après la loi de finances

1985

(MF)

1990

(MF)

1996

(MF)

1997

(MF)

1998

(MF)

1999

(MF)

2000

(MF)

2001

(MF)

(M€)

Taxe sur le prix des places (TSA)

530

420

502

502

517

612

629

634

96 ,65

Taxe sur les diffuseurs TV

55

395

587

644

688

634

680

774

118,00

Taxe vidéo

58

77

79

85

77

68

10,37

Contribution de l'Etat

109

Autres

4

17

2

5

5

13

13

13

2,01

Total

698

832

1168

1228

1289

1344

1399

1489

227,03

Source : CNC

Les soutiens financiers à la production, à la distribution et à l'exploitation

distribués en 2001

(en millions d'euros)

Soutien automatique à la production de longs métrages

52,61

Règlement de créances

1,83

Aide à la préparation

2,05

Investissement en production

48,73

Soutien sélectif à la production de longs métrages

28,33

Avances sur recettes

20,41

Soutien au scénario

0,61

Aides au développement

1,8

Aides pour les coproductions internationales

4,17

Aide aux films en langue étrangère

1,34

Soutien sélectif à la production de courts métrages

4,95

Soutien automatique à la distribution

13,02

Aides sélective à la distribution

6,05

Aides aux structures et aides aux programmes

3,93

Autres aides à la diffusion

2,12

Soutien automatique à l'exploitation

43,75

Soutiens sélectifs à l'exploitation

19,76

Aide sélective à la modernisation et à la création des salles

8

Aide aux salles art et essai

10,69

Aide aux salles des communes de plus de 200 000 habitants

1,07

Source : CNC / bilan 2001

2. La contribution des diffuseurs à la production cinématographique

Le décret n°90-67 du 17 janvier 1990 prévoit que « les chaînes en clair consacrent chaque année au moins 3% de leur chiffre d'affaires annuel net de l'année précédente à des dépenses contribuant au développement de la production d'oeuvres cinématographiques européennes, dont au moins 2,5% à des dépenses contribuant au développement de la production d'oeuvres cinématographiques d'expression originale française ».

En ce qui concerne Canal+, le décret du 9 mai 1995 prévoit que cette chaîne consacre au moins 20% de ses ressources totales, hors taxes, à l'acquisition de droits de diffusion d'oeuvres cinématographiques. Les oeuvres européennes doivent représenter au moins 60%, et les oeuvres d'expression originale française au moins 45% de ces sommes, soit respectivement 12% et 9% de son chiffre d'affaires.

Arte n'est pas soumise aux obligations des chaînes nationales hertziennes en clair. Elle n'a pas pris d'engagements particuliers concernant sa contribution à la production cinématographique, même si elle y consacre une part de ses ressources. 82 ( * ) .

Pour la réalisation de leurs obligations, les diffuseurs ne peuvent intervenir comme coproducteurs d'oeuvres cinématographiques que par l'intermédiaire d'une filiale spécialisée. Les dépenses prises en compte regroupent à la fois les apports en parts de producteur de la filiale cinématographique et les préachats de droits de diffusion exclusifs effectués par le diffuseur, société mère de cette filiale.

Les dépenses des diffuseurs ne sont comptabilisées, au titre de ces obligations, qu'à la double condition, pour chaque film concerné, de ne pas dépasser la moitié du coût total de la production et de ne pas être constituées pour plus de moitié de parts de producteur.

Ce dispositif a été complété par un décret du 11 mars 1999 prévoyant que les diffuseurs devaient consacrer au moins 75 % de leur contribution au développement de la production cinématographique, à des oeuvres produites par des entreprises indépendantes 83 ( * ) 84 ( * ) .

Les contributions des chaînes de télévision en matière de production cinématographique

d'après les bilans du CSA (en millions de F.)

1990

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Télévisions en clair ( préachats + copro.)

283,5

504,9

540,6

546,5

570

588

621

dont : TF1

107,6

188,8

197,4

199,6

208,8

221

240

France 2

112,0

134,4

149,2

148,0

155,3

145

154

France 3

42,0

87,5

97,0

97,5

99,3

99

104

M6

-

46,5

51,3

51,7

56,8

67

76

La Sept/Arte

21,9

47,7

45,8

49,8

49,9

55

47

Canal Plus

556,5

724,8

796,7

828,8

860,2

877

913

Total Chaînes en clair et Canal+

840

1229,7

1337,3

1375,3

1430,2

1465

1534

Les contributions des chaînes de télévision en matière de production cinématographique

d'après les devis des producteurs enregistrés par le CNC (en millions de F.)

à la production de films

1985

1990

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Télévisions en «clair»

Préachats

96,2

176,2

249,3

276,2

312,9

384,8

356,9

377,3

Parts coproduction

95,5

143,0

200,3

210,8

230,0

256,6

200,3

183,4

Total préachats + coproduction

191,7

319,2

449,6

487,0

542,9

641,4

557,2

560,7

dont : TF1

56,9

91,3

148,8

221,2

197,5

218,7

245,5

234,6

France 2

83,2

123,8

133,4

120,9

116,5

190,7

128,1

156,9-

France 3

48,9

41,4

67,3

99,0

103,0

117,1

84,1

86,0

La Cinq

0,0

59,1

-

-

-

-

-

-

M6

0,0

0,0

51,3

15,0

73,7

70,1

47,8

36,9

La Sept/Arte

2,0

4,6

46,9

28,9

52,2

44,9

51,7

46,4

Canal Plus (1)

31,3

329,6

668,5

678,5

844,9

917,8

929,9

954,4

Total Chaînes en clair et Canal+

223

648,8

1118,1

1165,5

1387,8

1559,2

1487,1

1515,1

Studio Canal France (1)

-

-

-

27,9

63,9

58,9

37,9

277,8

TPS (1)

-

-

-

-

57,3

121,1

104,3

114,0

Ensemble des diffuseurs

223,0

648,8

1 118,1

1 193,4

1 509

1739,2

1629,3

1906,9

(1) TPS, comme, Canal Plus, n'intervient qu'en préachat ; Studio Canal Plus intervient comme coproducteur.

source : CNC

La progression enregistrée entre 1997 et 2000 tient pour une large part aux apports de Studio Canal et de TPS.

Les écarts entre les contributions déclarées par les chaînes au CSA et les apports déclarés par les producteurs au CNC, traduisent les délais pouvant intervenir entre la décision de principe du diffuseur et la mise en production, c'est à dire le temps nécessaire au producteur pour boucler le financement, ou l'abandon du projet.

3. Les SOFICA

Les Sociétés de financement du cinéma et de l'audiovisuel (SOFICA) ont été crées en juillet 1985, pour apporter un relais financier en anticipant les recettes de commercialisation des oeuvres audiovisuelles et cinématographiques.

Elles ont l'obligation d'investir dans la production 90% des sommes collectées, dans les douze mois qui suivent. L'essentiel de ces sommes est affecté à la production cinématographique.

42,85 millions d'euros ont été collectés en 2000, 45,18 millions d'euros en 2001.

Investissements des Soficas dans la production cinématographique

1985

(MF)

1990

(MF)

1996

(MF)

1997

(MF)

1998

(MF)

1999

(MF)

2000

(MF)

2001

(MF)

(M€)

Investissements

72,6

159,1

128,6

181,6

181,9

171,2

256,1

162,68

24,78

Nombre d'interventions

23

53

39

48

59

67

59

Source : CNC Indicateurs statistiques

4. L'IFCIC et les systèmes de garantie

L'IFCIC garantit, grâce à un fonds doté par le CNC, des crédits à court terme pour la production et la distribution d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, ainsi que des crédits à moyen terme pour des besoins plus permanents des entreprises de production et de distribution. La garantie de l'IFCIC s'adresse à l'établissement financier, pour lui faciliter la prise de risque : en cas de défaillance de l'entreprise, la perte de la banque est partagée avec l'IFCIC.

En ce qui concerne les crédits à court terme, les opérations éligibles sont les suivantes : dépenses de développement, de pré-production, de tournage et de postproduction.

L'IFCIC oriente son action en matière de production cinématographique sur les films dits "indépendants", qu'il définit selon trois critères :

- la production déléguée est assurée par une société dont les capitaux ne sont pas majoritairement détenus par un groupe ;

- les dépenses en trésorerie ne sont pas prises en charge par un groupe en coproduction ;

- le film n'est pas produit dans le cadre d'un accord à long terme avec un groupe, prévoyant notamment la cession des droits patrimoniaux à ce groupe.

En 2001, le volume de crédits à la production cinématographique indépendante s'est élevé à 140,7 millions d'euros (65,7 M€ en risque IFCIC).

IV. LE CINÉMA EUROPÉEN FACE AU CINÉMA AMÉRICAIN : LE SYSTÈME FRANÇAIS DE SOUTIEN AU CINÉMA CONSTITUE-T-IL UN OBSTACLE AU LIBRE JEU DU MARCHÉ ,

La critique récurrente du système français par le lobby américain du cinéma, est relayée depuis quelques années par les services chargée de la concurrence à la Commission européenne. Ceux-ci tendent à considérer que ce système de soutien est assimilable à des aides d'Etat et, à ce titre, incompatible avec le marché commun dans la mesure où il apparaît « de nature à fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises et certaines productions. »

Après quelques aménagements concernant les critères de nationalité pour obtenir l'agrément 85 ( * ) , la Commission a accepté que le dispositif français d'aide à la production reste provisoirement en l'état, mais elle a décidé de procéder à un nouvel examen du dossier en 2004.

Le raisonnement de la Commission concernant le soutien au cinéma repose sur un double postulat : un film est un bien comme les autres, et le marché concerné étant le marché européen, il n'y aurait lieu de prendre en compte, ni la fermeture du marché américain au cinéma européen, ni le poids des entreprises américaines en Europe qui, du point de vue de la Commission, aurait en effet neutre sur le fonctionnement du marché intérieur .

Cette dernière affirmation, en particulier, résiste mal à l'observation : la domination du cinéma américain en Europe est à ce point écrasante qu'elle constitue un obstacle au développement d'un marché européen du cinéma européen, d'une toute autre portée que les réglementations nationales.

La Commission se place dans la position d'un juge qui, ayant à arbitrer un combat de boxe entre un super léger et un super lourd, décrèterait que le combat est équilibré puisque les règles sont les mêmes pour tous.

Les chiffres concernant le déséquilibre des échanges sont, sur ce plan, significatifs.

Les échanges commerciaux entre l'Europe et les Etats-Unis en matière audiovisuelle (millions de dollars)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Revenus américains dans l'UE

5311

5262

6645

7313

8042

9031

Revenus européens aux USA

517

613

668

706

853

851

Déficit commercial de l'Europe

4814

5649

5977

6607

7190

8180

Source : Observatoire européen de l'audiovisuel

En 2000, la part de marché du cinéma européen aux Etats Unis était de 3,9% ; celle du cinéma américain en Europe, de 73%. Le déficit commercial de l'Europe vis à vis des Etats Unis était de plus de 8 milliards de dollars ; il avait augmenté de 70 % en 5 ans.

Une telle domination ne tient pas seulement à la qualité des films américains. Elle résultait, au départ, de l'avantage concurrentiel que constituaient pour le cinéma américain la taille et les caractéristiques de son marché intérieur, et des aides à l'exportation dont il a bénéficié. Elle repose surtout, aujourd'hui, sur l'organisation du secteur de la distribution en Europe, largement contrôlée par les filiales des majors américaines. Cette organisation aboutit à faciliter la circulation des films américains sur l'ensemble du marché européen, et à cantonner celle des films européens sur leur marché national 86 ( * ) .

1. La question du « marché pertinent »

L'une des principales questions examinées dans les contentieux en matière de concurrence concerne la définition du marché pertinent ( the relevant market ), c'est à dire du segment de marché sur lequel il convient d'examiner s'il y a, ou non, des pratiques anticoncurrentielles. En d'autres termes, si certaines des firmes tendent à organiser le marché (abus de position dominante ; ententes ; barrières à l'entrée...) de manière à obtenir des profits supérieurs à ceux qu'elles obtiendraient si le marché était normalement concurrentiel.

Dans ses prises de position sur les dossiers cinéma, la Commission a considéré jusqu'ici que pour la distribution et le négoce des droits, le marché pertinent est un marché de dimension nationale (pour des questions de langue et de marketing), et que pour la production, le marché pertinent est un marché de dimension européenne.

Cette analyse est doublement favorable au cinéma américain : il suffit d'observer le paysage audiovisuel européen pour constater que le marché qui concentre les principaux enjeux et sur lequel les abus de position dominante sont les plus lourds de conséquences, est le marché européen du négoce de droits et qu'il est totalement dominé par les distributeurs américains 87 ( * ) .

Inversement, la quasi totalité des films européens étant, pour l'essentiel, financés en interne et n'ayant d'exploitation que sur leur marché domestique, il est abusif de considérer que le marché pertinent de la production est européen. Il ne l'est que pour les quelques films qui sont effectivement produits et distribués au niveau communautaire.

Les distorsions éventuelles de concurrence introduites par les réglementations nationales en matière de cinéma ont des effets économiques minimes sur la construction d'un espace audiovisuel commun, comparés aux conséquences qu'auraient leur démantèlement.

Dans son interprétation la Commission européenne aboutit ainsi à ce paradoxe que le droit communautaire de la concurrence entend limiter des systèmes de soutien qui n'affectent guère la concurrence intra -européenne, mais qui sont au contraire des moyens de rétablir un tant soit peu de concurrence entre les industries européennes et l'industrie américaine.

2. L'avantage concurrentiel du cinéma américain face au cinéma européen

a) La taille des marchés

Année 2000

Union européenne

Allemagne

Espagne

Italie

Royaume-Uni

France

Etats-Unis

Population totale (millions)

375,3

83,4

39,5

57,7

59,5

59,3

270,3

Production de long métrages 1 ( * )

595

75

77

94

66

145

461 2 ( * )

Nombre d'écrans

24200 3 ( * )

4783

3500

2948

2954

5103

37396

Entrées (millions)

844,0

152,5

135,3

103,4

142,5

165,5

1420,1

Entrées par habitant

2,3

1,8

3,4

1,8

2,4

2,8

5,3

Recettes guichet (M€)

4600 3 ( * )

824,5

536,3

544,8

1003 4 ( * )

891,4

8733 5 ( * )

Films nationaux (%)

-

12,5%

10%

17,5%

19,6% 1 ( * )

28,2%

93,3%

Films européens (% )

23%

16,7%

17,1%

27,7%%

22,1%

34,9%

3,9%

Films américains (%)

73%

81,9%

82%

69,5%

75,3%

61,9%

93,3%

Sources : CNC et Observatoire européen de la production audiovisuelle

b) La structure des ressources

Les recettes mondiales des majors américaines en 2000 et 2001

(en millions de dollars)

2000

2001

Salles

5 500

5 700

Dont recettes US 4 ( * )

2 850

3 270

recettes étranger

2 630

2 440

dont France

180

166

Télévision

13 000

12 900

dont TV payante

2 900

4 200

Edition vidéo

11 400

12 400

Total

29 900

31 000

Source : Motion picture association

A titre de comparaison, on rappellera ci-dessous, la structure des ressources du cinéma français

Les recettes mondiales du cinéma français en 2000 et 2001

( en millions d'euros)

2000

2001

Salles 5 ( * )

104,9

176,0

télévision

402,8

410,8

Vidéo

82,5

nd

Vidéoexportationex exportations

71,7

nd

Total

661,8

nd

Source : CNC

La vidéo assurait déjà en 2000 près de 40% des recettes du cinéma américain, alors qu'elle représentait à peine plus de 12% des recettes du cinéma français. Les recettes totales du cinéma français sur le marché mondial, tous marchés confondus, s'élevaient en 2000 à 661,8 millions d'euros (580 millions de dollars au taux moyen de l'année considérée), soit 52 fois moins que celles des seules majors américaines.

DEUXIÈME PARTIE

LES DÉSÉQUILIBRES ET LES TENSIONS

Le premier problème auquel est confronté le cinéma français concerne l'avenir de son financement.

Il tient pour une large part à la hausse du coût des films à vocation commerciale.

Celle-ci n'est pas propre à la France. Elle résulte de ce que les économistes appellent « la survalorisation des enjeux de concurrence », c'est à dire, sur un marché fortement concurrentiel, de l'augmentation du prix à payer pour tout ce qui est censé assurer d'emblée à un film les plus grandes chances de succès : des vedettes connues dont les salaires augmentent à proportion de leur notoriété ; des effets spéciaux d'autant plus chers qu'ils sont spectaculaires... Elle s'accompagne inévitablement d'un surinvestissement dans les dépenses de marketing, pour assurer la rentabilisation des films ainsi produits. Loin des sommets atteints par le cinéma américain, elle ne s'inscrit pas moins dans une évolution comparable à celle qu'on a observée ces dernières années aux Etats Unis, et que personne ne semble maîtriser : ni les financiers, ni les producteurs, ni les agents des artistes 88 ( * ) . Tous mesurent les risques d'une telle inflation. Mais tous contribuent à l'entretenir et à l'amplifier : les financiers convaincus que les profits à attendre seront à la mesure des investissements engagés ; les producteurs qui se rémunèrent à proportion du coût du film ; les artistes dont la cote professionnelle finit par se mesurer à la hauteur du cachet qui leur est proposé..

Or, même si le nombre des entrées en salles augmente, même si les exploitations secondaires se diversifient et se multiplient, l'ensemble des recettes potentielles ne peut pas croître au même rythme. La rentabilité commerciale de chaque film pris isolément suppose qu'il gagne des « parts de marché » sur les autres productions. En d'autres termes, pour cette catégorie de productions, la proportion de films rentables tend inévitablement à diminuer. Le fait que la durée de vie commerciale d'un film s'allonge et que ses exploitations s'insèrent progressivement dans la gestion de catalogues, contribue à différer le terme de la sanction commerciale, et alimente la bulle spéculative. Mais, tôt ou tard, cette bulle spéculative finit par exploser, quand la confiance des financiers dans la valeur du catalogue commence à faiblir.

Cet enchaînement n'est pas nouveau, et il ponctue depuis longtemps l'histoire du cinéma. Ce qui est nouveau, c'est qu'il a changé d'échelle. La sanction est désormais moins la faillite de l'entreprise que sa fusion dans un ensemble plus vaste, dont l'activité cinématographique n'est plus que l'une des composantes, contribuant au développement d'activités de diversification. La production de films de plus en plus chers, « formatés » pour fédérer un large public, alimente ce processus de concentration et d'internationalisation des entreprises de distribution et d'exploitation des films. Celles-si l'alimentent à leur tour, la production de ce type de films correspondant très exactement aux besoins de réseaux mondialisés.

Pour la plupart des économistes, ce processus est commun à tous les secteurs dans lesquels la hausse des coûts de production ne peut pas être compensée par des gains de productivité, mais par un accroissement de la taille du marché. Ce qui, quand cet accroissement devient insuffisant, entraîne une concurrence de plus en plus tendue entre les entreprises en présence. C'est à se stade qu'interviennent la survalorisation des enjeux de concurrence et le surinvestissement dans le marketing. Les déséquilibres qui en résultent aboutissent à la disparition des entreprises les plus fragiles et, par fusion ou acquisition, à la concentration progressive du secteur autour d'un nombre de plus en plus réduit d'acteurs. Jusqu'au moment où l'émergence de nouveaux produits, de nouvelles technologies ou de nouveaux besoins, portés par de nouvelles entreprises, réinitialise le cycle.

Il existe un assez large consensus pour considérer que ce processus, inévitable, doit être encadré par une régulation appropriée, au nom de l'intérêt général. Toute la question est alors de savoir comment se détermine l'intérêt général. Pour les économistes libéraux la référence est celle du libre jeu du marché : il faut simplement éviter qu'un des acteurs dispose d'un pouvoir de marché excessif, et réduire tout ce qui s'apparente à un abus de position dominante. C'est la position de la Direction chargée de la concurrence, à Bruxelles.

Or, pour les Américains eux-même, il existe un certain nombre de secteurs dans lesquels le libre jeu de la concurrence ne va pas nécessairement dans le sens de l'intérêt général. C'est, par exemple, le cas du sport pour lequel les autorités américaines ont introduit un ensemble de règles qui visent à préserver la diversité (au nom de l'intérêt de la compétition), et qui sont très exactement le contraire du libéralisme. Les ligues professionnelles ont ainsi établi une règle (le salary cap ) qui limite la masse salariale dont une équipe peut disposer pour payer ses joueurs, de manière à éviter des surenchères qui compromettraient l'équilibre économique de l'ensemble des clubs. Elles ont de même introduit la règle du draft , qui permet aux équipes les plus faibles de choisir en priorité les nouveaux joueurs entrant dans le circuit professionnel. Enfin, le Sport Broadcasting Act de 1961 qui prévoit les conditions dans lesquelles les ligues professionnelles centralisent les droits de télévision au profit de la collectivité des clubs n'est pas très différent dans son principe, du système du fonds de soutien.

L'analyse des déséquilibres et des tensions qui caractérisent actuellement l'évolution du cinéma en France est à replacer dans ce contexte d'une inflation du coût des films et du double processus de concentration qui l'accompagne : concentration de la distribution et de l'exploitation autour des groupes de communication ; concentration autour des films les plus chers, d'une part croissante des ressources de production, des moyens de commercialisation, et finalement de la fréquentation.

.

William Baumol, l'un des spécialistes américains de l'économie de la culture, exposait dès 1964 que les produits et les services culturels, quand ils sont soumis aux mêmes tensions concurrentielles que celles qui existent sur les autres marchés, sont confrontés à ce qu'il appelle « la fatalité des coûts », c'est à dire une augmentation des coûts qui tend à devenir supérieure aux ressources globalement disponibles. Leur spécificité ne peut dès lors, selon lui, être préservée sans un mécanisme de subvention ou de redistribution 89 ( * ) .

Ce qu'il déclarait au début des années 80 à propos du théâtre, s'applique aujourd'hui parfaitement au cinéma : « Pour expliquer la hausse des coûts, point n'est besoin d'évoquer la prodigalité des magnats du cinéma, les largesses des responsables de la télévision, la cupidité des agents ou la démagogie des syndicats. On peut toujours trouver, ici ou là, quelques exemples de manque de scrupules, mais la réalité se suffit à elle-même. Le problème de fonds, en l'occurrence, n'est qu'une banale histoire d'économie et de technologie.

Des éléments dont nous disposons, il ressort que l'avenir [du théâtre] paraît clair. Absolument rien n'indique que sa survie soit menacée. Tout comme par le passé il a survécu aux guerres, aux persécutions et autres catastrophes, il résistera à l'inflation... Mais, il est confronté à une autre menace, peut-être l'une des manifestations les plus dangereuses de la « fatalité des coûts », qu'on pourrait appeler le  « risque du déficit artistique », dont l'un des effets consiste à étioler l'expérimentation artistique en régissant les choix de programmes surtout par des soucis de rentabilité ... » 90 ( * ) .

2001 : une année exceptionnelle

« Avec 185 millions d'entrées, soit une progression de 11,4 % par rapport à l'année précédente, la fréquentation des salles de cinéma a atteint un niveau que l'on n'avait pas connu depuis 1984. On peut estimer qu'il s'agit d'une confirmation très nette du regain d'intérêt du public pour le spectacle cinématographique en salles, en dépit de la diversification des modes de diffusion du film ces dernières années (télévision - notamment les chaînes thématiques- vidéo et plus récemment DVD). Ce chiffre place la France en tête de l'Europe pour la fréquentation des salles.

Mais le phénomène le plus remarquable de l'année cinématographique 2001 est sans doute que ce retour du public vers les salles a été très favorable aux films français, pour la première fois depuis plus d'une décennie durant laquelle le cinéma américain avait conservé une part de marché très majoritaire, et profitait seul de l'embellie de la fréquentation.

Il y a cinquante quatre ans que l'on n'avait pas observé la même année quatre films français dépassant cinq millions d'entrées 91 ( * ) : Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, La vérité si je mens 2, Le Placard, Le pacte des loups. En outre, 20 films français ont dépassé le million d'entrées, contre 7 l'année précédente. De plus en plus de films français, y compris des films réputés difficiles, ont rencontré leur public en salles : le nombre des films français ayant dépassé 50 000 entrées a doublé en cinq ans. Toute la production française a ainsi bénéficié de cet engouement du public. Au total, les films français auront attiré environ 25 millions de spectateurs de plus en 2001 que l'année précédente où le cinéma français totalisait 50 millions d'entrées.

La part de marché du cinéma français a atteint 41 % (contre 28,5 % en 2000), chiffre très nettement supérieur à celui observé au long de la dernière décennie (en moyenne 32%).

Toutes les enquêtes d'opinion menées au cours de l'année écoulée ont révélé une perception très positive de la production cinématographique française, en particulier auprès des jeunes, public qui, jusque-là, favorisait le cinéma hollywoodien.

Ce constat laisse espérer qu'il s'agit là d'une évolution qui pourrait être durable, et qui s'appuie sur un renouveau des forces créatives et des talents du cinéma français ayant pour effet un nouveau dynamisme de la production. Le nombre de films produits connaît ainsi une augmentation très sensible en 2001 avec 204 films agrées dans l'année, soit une trentaine de plus que l'année précédente et un record absolu dans l'histoire du cinéma français, depuis qu'existent des statistiques de la production. » 92 ( * )

Cette analyse du CNC donne la mesure de ce dont est capable le cinéma national quand il va bien. Mais il n'est pas inutile de pointer les déséquilibres et les tensions qui accompagnent les évolutions en cours et qui, mises en perspective avec les mouvements qui affectent l'économie du cinéma au niveau mondial, font apparaître la fragilité de ses acquis.

I. LES PHÉNOMÈNES DE CONCENTRATION DANS L'EXPLOITATION ET LA DISTRIBUTION DES FILMS EN SALLES

La fréquentation a augmenté de 65% entre 1992 et 2001. Au cours de la même période, le nombre de films proposés au public s'est accru de 30%

Avec 33,5% de parts de marché en moyenne sur l'ensemble de la période, le cinéma français a maintenu sa position face au cinéma américain 93 ( * ) .

De tels résultats sont suffisamment remarquables, compte tenu des évolutions constatées un peu partout en Europe, pour devoir être soulignés avant toute analyse susceptible d'en relativiser la portée .

Nombre d'entrées et parts de marché

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Entrées (millions)

113

132,7

124,41

130,24

136,74

149,02

170,57

153,57

165,54

185,82

Films français

40,54

46,60

35,25

45,86

51,26

51,42

47,10

49,82

47,22

77,14

Films américains

67,46

75,83

75,81

70,25

74,29

77,77

107,82

82,77

103,02

86,27

Autres films

7,99

10,28

13,35

14,13

11,19

19,82

15,65

20,98

15,30

22,41

Parts de marché (%)

Films français

35,0

35,1

28,3

35,2

37,5

34,5

27,6

32,4

28,5

41,5

Films américains

58,2

57,1

60,9

53,9

54,3

52,2

63,2

53,9

62,2

46,4

Autres films

6,8

7,8

10,8

10,9

8,2

13,3

9,2

13,7

9,3

12,1

Total

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

Nombre de nouveaux films

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

total

392

394

408

405

410

417

470

531

570

509

français

167

155

146

149

161

170

176

204

227

209

américains

121

136

146

138

141

144

173

183

193

160

autres

104

103

116

118

115

103

121

144

150

140

Source : CNC / octobre 2002

Cette évolution, globalement positive, s'est toutefois accompagnée d'un double mouvement de concentration, de la fréquentation autour d'un nombre limité de films, de l'exploitation, de la programmation, et de la distribution autour d'un nombre de plus en plus réduit d'acteurs.

1. La concentration dans l'exploitation

La progression du nombre des entrées est largement due au développement des multiplexes.

Les multiplexes représentaient en 2001 : 4,4% des établissements ; 22% des écrans ; 40% des entrées

Poids des multiplexes dans l'exploitation française 94 ( * )

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre de multiplexes

22

34

45

65

80 95 ( * )

97

% du total France

% Etablissements

1,0

1,6

2,1

3,0

3,8

4,4

% Ecrans

6,3

9,5

12,0

16,5

19,7

22,2

% Entrées

10,8

17,3

22,7

28,3

34,5

39,4

Source : CNC

2. La concentration dans la programmation

Le développement des multiplexes a accru le rôle des groupements nationaux de programmation 96 ( * )

Poids des groupements nationaux de programmation en % du nombre des écrans

1997

1998

1999

2000

2001

Gaumont

Europalaces

6,8

7,1

7,4

7,8

14,5

Pathé

6,8

6,5

6,8

6,7

UGC

8,3

8,7

8,6

8,7

8,6

Autres groupements nationaux (Glozel, GPCI, SAGEC, Soredic)

11,8

13,2

13,0

12,8

13,2

Bien qu'ils n'en soient pas les seuls acteurs, les groupements nationaux de programmation sont les principaux promoteurs de multiplexes en France. Le nombre de salles dont ils sont propriétaires s'accroît sensiblement chaque année. Au total, l'ensemble des groupements nationaux programme plus de 36% des écrans actifs.

En 2001, le regroupement des activités d'exploitation de salles de Gaumont et de Pathé sous l'enseigne EuroPalaces. a modifié profondément les rapports de force entre les groupements nationaux de programmation. Le nouvel ensemble réunit désormais 14,5 % des écrans français.

Deux réseaux, Europalaces et UGC, déterminent ainsi à eux seuls la programmation de 23% des écrans, représentant plus de 40% des entrées en 2001.

3. La concentration dans la distribution

7 sociétés contrôlent plus de 80% du marché des films.

Cette caractéristique n'est pas récente. L'élément nouveau est que les sociétés qui contrôlent l'essentiel de la distribution des films sont désormais des filiales de majors américaines ou de groupes intégrés, voire des deux comme les associations UGC / Fox, ou Gaumont / Disney. UIP et Bac Film sont des filiales de Vivendi-Universal (ainsi que Mars Film qui n'apparaît pas dans cette liste)

Les principaux distributeurs et leurs parts de marché en 1991 et en 2001

1991

2001

Distributeur

Pdm (%)

Distributeur

Pdm (%)

AMLF

21,3

UFD (UGC / Fox)

15,5

Columbia Tristar

15,6

GBVI(Gaumont/ Disney)

14,0

Warner Bros

12,2

UIP (VivendiUniversal)

13,7

UIP

10,0

Warner Bros

12,6

Fox

8,0

Bac (Vivendi Universal)

10,3

Gaumont

6,2

Metropolitan

6,9

UGC

4,6

Pathé (ex AMLF)

4,8

Bac Films

1,6

Columbia Tristar

3,9

Autres

20,5

Autres

18,3

Les parts de marchés (Pdm) sont exprimés en pourcentage du total des encaissements des distributeurs.

4. La concentration dans la fréquentation

30 films assurent plus de 50% des entrées.

Ce chiffre est stable depuis 10 ans, malgré l'accroissement de la fréquentation et l'augmentation, notamment depuis 1997, du nombre des films sortis en première exclusivité.

On constate dans le même temps une concentration des entrées sur les films les plus récents.

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre de films sortis dans l'année

405

410

417

470

531

570

509

% des entrées réalisées par les 30 premiers films

52,8

54,6

53,2

60,1

50,6

53,5

52,2

Nb moyen d'entrées des 30 premiers films (millions)

2,3

2,3

2,6

3,4

2,6

2,9

3,2

% des entrées des films sortis dans l'année

77,1

81,3

85,6

90,0

85,9

83,2

89,7

% des entrées des films sortis l'année précédente

15,9

15,5

8,3

7,1

11,6

14,0

6,5

% des entrées des autres films

7,0

3,2

6,1

2,9

2,5

2,8

3,8

Total

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

5. Un déséquilibre croissant dans l'exposition des films

a) La conjonction du développement des multiplexes et d'une augmentation du nombre de films entraîne une rotation de plus en plus rapide des films

Le nombre de salles nécessaires en première semaine pour assurer la sortie des films qui visent une large diffusion, et donc les coûts de sortie, sont de plus en plus élevés. On constate, dans cette évolution, un déséquilibre croissant au profit des films américains, d'une part, au profit des films distribués par les filiales des grands groupes, d'autre part - au détriment des autres films.

L'augmentation de l'exposition moyenne des films mesurée en nombre de salles pour la première semaine d'exclusivité, ainsi que celle du nombre des films sortis dans plus de 500 salles sont de ce point de vue, significatifs

Nombre moyens de salles en première semaine d'exclusivité 97 ( * )

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Ensemble des films

96

106

112

108

114

Films français

81

79

86

96

83

Films américains

150

168

191

170

190

Nombre de films sortis dans plus de 500 salles

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Ensemble des films

20

26

Films français

1

1

2

3

5

Films américains

4

10

15

12

20

De même, alors que l'exposition moyenne des films sortis en 2000 était de 114 écrans, les films des sept principaux distributeurs liés à des groupes de communication ou à des majors américaines, disposaient d'une exposition moyenne de 250 écrans.

Exposition des films sortis par les filiales des grands groupes, en 2000

Distributeur

Pdm

( en % du total des encaissements des distributeurs )

Exposition moyenne par film distribué

(en nombre d'écrans)

GBVI

20,3

330

UIP

13,1

181

Bac Films

10,2

184

UFD

9,6

196

Pathé (ex AMLF)

8,9

243

Columbia Tristar

7,6

219

Warner Bros

7,1

354

Metropolitan

2,7

161

Ensemble

79 ,5

250

b) L'inflation des coûts de sortie

Elle rend, par contre-coup, plus problématique la sortie des films considérés, à tort ou à raison, par les distributeurs, comme présentant des perspectives commerciales limitées : sortis de manière plus confidentielle, disposant de budgets de promotion limités et d'une exposition réduite, ceux ci n'ont généralement ni le temps, ni les moyens de s'installer pour bénéficier, le cas échéant, du « bouche à oreille » qui leur permettrait de rencontrer leur public

Dès lors, malgré l'accroissement de la fréquentation, le nombre des entrées de la majorité des films ne progresse pas . En 2001, année pourtant exceptionnelle, plus de 45% des films sortis ont obtenus moins de 25000 entrées. Parmi ces films une proportion importante n'a connu que la « sortie technique » nécessaire à leur qualification d'oeuvre cinématographique.

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nb de films ayant réalisé moins de

25000 entrées

207

201

202

247

279

311

228

% des entrées réalisées

1,1%

0,9%

0,9%

1,0%

1,2%

1,2%

1,0%

Entrées moyennes par film

6920

6120

6640

6900

6600

6380

8150

Répartition de l'ensemble des films sortis dans l'année en fonction du nombre des entrées

Nombre de films

Films ayant réalisé

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Plus de 2 millions d'entrées

10

13

17

17

12

15

26

Entre 1 et 2 millions d'entrées

21

15

19

20

21

18

19

Entre 500 000 et 1 million

21

30

23

21

34

33

31

Entre 100 000 et 500 000

72

88

80

84

86

89

104

Entre 50 000 et 100 000 entrées

34

35

34

47

46

51

59

Entre 25 000 et 50 000 entrées

40

28

42

34

53

53

42

Moins de 25 000 entrées

207

201

202

247

279

311

228

Total

405

410

417

470

531

570

509

Proportion des entrées réalisées

Films ayant réalisé

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Plus de 2 millions d'entrées

31,5%

39,3%

45,7%

55,4%

39,1%

40,9%

53,4%

Entre 1 et 2 millions d'entrées

30,2%

20,0%

21,2%

16,5%

21,0%

20,1%

16,2%

Entre 500 000 et 1 million d'entrées

14,6%

18,5%

13,2%

9,7%

19,5%

16,7%

11,9%

Entre 100 000 et 500 000 entrées

18,7%

18,0%

15,8%

14,3%

15,3%

16,9%

14,2%

Entre 50 000 et 100 000 entrées

2,4%

2,3%

1,9%

2,3%

2,4%

2,7%

2,5%

Entre 25000 et 50 000 entrées

1,5%

0,9%

1,2%

0,8%

1,4%

1,4%

0,8%

Moins de 25 000 entrées

1,1%

0,9%

0,9%

1,0%

1,2%

1,2%

1,0%

Total (%)

100%

100%

100%

100%

100%

100%

100%

Total ( en millions d'entrées)

130,24

136,74

149,02

170,57

153,57

165,54

185,82

Source : CNC

Sur les 1296 films français sortis depuis 1995, 701, c'est à dire plus de la moitié, ont réalisé moins de 25000 entrées.

La spectaculaire progression observée en 2001 dans la fréquentation des films français (+ 30 millions d'entrées) est pour les trois-quarts, imputable aux films qui ont fait plus de 2 millions d'entrées.

Il est important de noter à ce stade que, contrairement à ce que l'on pourrait croire, une part importante des films américains distribués en France affiche des performances plutôt médiocres alors que les distributeurs ne proposent déjà qu'une partie de la production d'outre atlantique. En 2000, par exemple, 193 films sur 461 produits sont sortis en France ; plus du tiers ont réalisé moins de 25000 entrées. En 2001, les distributeurs n'ont sortis que 160 films sur les 462 produits ; 45 d'entre eux ont réalisé moins de 25000 entrées.

Répartition des films français sortis dans l'année en fonction du nombre des entrées

Nombre de films

films ayant réalisé

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Plus de 2 millions d'entrées

5

4

4

3

3

3

10

Entre 1 et 2 millions d'entrées

4

7

6

2

6

4

10

Entre 500 000 et 1 million d'entrées

6

11

7

7

14

8

13

Entre 100 000 et 500 000 entrées

21

27

34

32

38

30

43

Entre 50 000 et 100 000 entrées

13

13

12

15

21

22

27

Entre 25000 et 50 000 entrées

19

8

14

12

19

25

13

Moins de 25 000 entrées

81

91

93

105

103

135

93

Total

149

161

170

176

204

227

209

Proportion des entrées réalisées

films ayant réalisé

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Plus de 2 millions d'entrées

47,8%

32,2%

44,5%

57,4%

31,2%

43,6%

54,6%

Entre 1 et 2 millions d'entrées

18,3%

26,9%

20,3%

5,9%

19,8%

15,4%

18,2%

Entre 500 000 et 1 million d'entrées

14,4%

20,3%

11,9%

11,8%

22,9%

13,4%

11,0%

Entre 100 000 et 500 000 entrées

13,8%

16,2%

19,1%

19,5%

20,4%

19,6%

12,2%

Entre 50 000 et 100 000 entrées

2,5%

2,4%

1,8%

2,8%

3,1%

4,0%

2,6%

Entre 25000 et 50 000 entrées

2,0%

0,8%

1,1%

1,1%

1,5%

2,2%

0,6%

Moins de 25 000 entrées

1,2%

1,3%

1,3%

1,6%

1,2%

1,9%

0,8%

Total (%)

100%

100%

100%

100%

100%

100%

100%

Total ( en millions d'entrées)

45,86

51,26

51,42

47,10

49,82

47,22

77,14

Répartition des films américains sortis en France en fonction du nombre des entrées

Nombre de films

Films ayant réalisé

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Plus de 2 millions d'entrées

5

9

9

13

7

11

14

Entre 1 et 2 millions d'entrées

14

7

12

17

13

12

7

Entre 500 000 et 1 million d'entrées

14

16

14

13

17

22

17

Entre 100 000 et 500 000 entrées

40

48

31

41

40

44

43

Entre 50 000 et 100 000 entrées

14

19

19

21

18

21

18

Entre 25000 et 50 000 entrées

15

13

14

9

20

17

16

Moins de 25 000 entrées

36

29

45

59

68

66

45

Total

138

141

144

173

183

193

160

Pour information : nombre de films sortis aux Etats-Unis

370

420

461

490

442

461

462

Proportion des entrées réalisées

Films ayant réalisé

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Plus de 2 millions d'entrées

26,4%

47,5%

43,5%

56,4%

42,5%

42,5%

54,4%

Entre 1 et 2 millions d'entrées

34,9%

16,0%

25,4%

20,8%

21,9%

22,2%

14,5%

Entre 500 000 et 1 million d'entrées

15,9%

15,7%

15,2%

9,3%

18,9%

18,5%

14,1%

Entre 100 000 et 500 000 entrées

19,6%

17,5%

12,6%

11,4%

13,2%

13,8%

14,2%

Entre 50 000 et 100 000 entrées

1,8%

2,2%

2,1%

1,5%

1,8%

1,8%

1,6%

Entre 25000 et 50 000 entrées

1,0%

0,7%

0,8%

0,3%

1,0%

0,7%

0,7%

Moins de 25 000 entrées

0,5%

0,4%

0,4%

0,4%

0,6%

0,4%

0,5%

Total (%)

100%

100%

100%

100%

100%

100%

100%

Total ( en millions d'entrées)

70,3

74,3

77,8

107,8

82,8

103,0

86,3

6. Des difficultés persistantes dans le secteur de l'exploitation

Malgré la progression importante des recettes (+69% entre 1992 et 2001), le secteur de l'exploitation présente un bilan financier mitigé

Total des recettes (M€)

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

600,8

688,9

653,5

690,1

726,0

788,9

916,8

823,2

891,4

1 014

En 2000, sur un échantillon de 40 entreprises représentant un chiffre d'affaires de 591 millions d'euros, (soit 62% du chiffre d'affaires de l'ensemble du secteur de l'exploitation), l'INSEE constate un résultat d'exploitation négatif de 88 millions d'euros. 98 ( * )

Cette tendance, qui est à mettre en perspective avec le développement des multiplexes, n'est pas propre à la France : L'observatoire européen de l'audiovisuel, analysant les résultats financiers de plus de 700 entreprises d'exploitation, montre une détérioration de leur situation financière  malgré la progression générale de la fréquentation des salles de cinéma dans l'Union européenne (+20% entre 1996 et 2000). La marge bénéficiaire de l'ensemble de ces entreprises, qui était de +7,5% en 1998, est tombée à 1,7% en 1999, et à -6,2% en 2000 99 ( * ) .

Aux Etats Unis, le niveau historique atteint en 2001, « la meilleure année de l'histoire du cinéma en termes de recettes salles » selon Jack Valenti, n'a pas empêché la faillite de nombreux circuits de salles, et pour la première fois depuis longtemps, une diminution du nombre des écrans.

Une telle situation, qui met en péril les entreprises les plus fragiles, ne peut que se traduire par une concentration accrue.

II. LES MOUVEMENTS DE CONCENTATION DANS LA DISTRIBUTION ET DANS L'EXPLOITATION DES FILMS EN SALLES SE RETROUVENT DANS LES AUTRES MODES DE DIFFUSION

1. Le cinéma à la télévision

Avec la multiplication du nombre de chaînes diffusées par câble ou par satellite, on a assisté à une augmentation considérable de l'offre de films à la télévision. Jamais la télévision n'a diffusé autant de films : plus de 5000 titres par an.

Les chaînes cinéma du câble et du satellite (notamment les chaînes de « seconde fenêtre »), qui permettent au public des cinéphiles de bénéficier d'une offre élargie, représentent de nouveaux marchés potentiels pour les catalogues de films et en particulier pour des films récents.

a) La concentration des catalogues

L'essentiel de la vente des films aux chaînes de télévision est assuré à partir des catalogues détenus par un petit nombre d'opérateurs.

Principaux catalogues français 100 ( * )

Nombre de films

Canal+ 101 ( * )

5500

TF1

500

Pathé

Gaumont

460

Entre 500 et 600

Principaux catalogues américains 102 ( * )

Nombre de films

MGM

5 177

Warner Bros (Time Warner)

5 993

Columbia / Tristar ( Sony)

2 431

Universal Vivendi

3 574

20 th Century Fox (News Corp)

2 135

Paramount (Viacom)

947

Buena Vista (Disney)

525

Source : CNC pour les catalogues français ; KPG/IMM pour les catalogues américains

b) La marginalisation des distributeurs indépendants

On assiste à une intégration croissante, au sein des grands groupe de communication, des fonctions de diffuseur, d'acheteur de droits, de distributeur, amplifiant les mouvements intervenus au niveau de la distribution des films en salles.

Les accords passés par les chaînes cinémas des bouquets satellite avec les majors américaines ont eu, de ce point de vue, des conséquences importantes sur l'économie du secteur.

Les deux opérateurs français de bouquets satellites, en forte concurrence, ont cherché à nouer des accords leur donnant accès aux catalogues des majors, pour sécuriser leur approvisionnement en films.

A l'issue d'une bataille très vive, Canal + a ainsi conclu des accords en première exclusivité avec cinq studios (Disney, MCA/Universal, Columbia/Tristar, Fox et Warner) et TPS avec deux (MGM et Paramount). Ces accords confèrent aux deux groupes français des droits de diffusion pour la télévision à péage et en paiement à la séance de la production passée, récente et à venir des films des majors.

TPS a, par ailleurs, négocié une deuxième fenêtre de diffusion à péage de la production récente et à venir de Columbia/Tristar, MCA/Universal, et des sociétés de production filiales de Disney (Touchtone et Miramax) lui permettant de diffuser des films avant les chaînes hertziennes en clair. Les deux opérateurs se sont ainsi répartis le marché.

Ces accords ont abouti à augmenter le nombre de films américains à sortir en salles, tout en réduisant l'espace d'intervention des distributeurs français auprès des chaînes de télévision. La conjonction de ces deux facteurs contribue à rompre l'équilibre sur lequel reposait l'activité des distributeurs indépendants, entre la sortie des films à fort potentiel commercial, et celle des films plus difficiles, entre le marché des salles et la vente aux chaînes de télévision. Elle met en péril ce relais traditionnel de la part la plus innovante de la production nationale.

De fait, et en dépit des mesures prises en faveur du secteur de la distribution (augmentation des enveloppes du soutien sélectif et automatique à la distribution, contribution volontaire de Canal+ à la distribution, obligation des chaînes en clair à contribuer à hauteur de 0,2 % de leur chiffre d'affaires à un fonds d'aide à la distribution de films français), la situation des entreprises indépendantes de distribution reste actuellement trop fragile pour que celles-ci constituent des partenaires réguliers de la production indépendante

2. L'édition vidéo

Le rythme de croissance de l'édition vidéo s'est intensifié en 2001 (+25 %). Il apparaît porté par le dynamisme des ventes de DVD qui supplantent désormais celles des cassettes VHS. Même si, avec 36,5 millions d'unités vendues, celles-ci continuent de dominer l'activité en volume (59 % du total des ventes en 2001, contre 76,5 % en 2000), le DVD a représenté 57,4 % du chiffre d'affaires total du secteur.

La nouvelle réglementation sur la chronologie des médias a joué un rôle non négligeable dans cet essor, en autorisant la sortie vidéo des films, six mois après leur sortie en salle.

Evolution du chiffre d'affaires des éditeurs vidéo (M€)

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Location

52

46

49

50

57

67

71

78

78

96

Vente

305

329

384

483

499

495

502

498

578

723

Total

357

375

433

533

557

562

572

576

656

819

Dont vente de DVD

13

83

216

415

Source : Syndicat de l'édition vidéo (SEV),

Mais ce succès profite surtout au cinéma américain.

Contrairement à l'édition en vidéocassettes où l'augmentation des tirages n'a qu'un effet limité sur les coûts de fabrication unitaires, l'édition en DVD, dans laquelle le principal investissement concerne la réalisation du master, bénéficie rapidement des économies d'échelle quand le tirage augmente. La possibilité d'une édition multilingue accroît par ailleurs la taille du marché potentiel. Même si, à terme, cette technologie permet d'envisager des « éditions de niche », dans la phase actuelle elle favorise surtout la diffusion des films à fort potentiel commercial, et les éditeurs disposant d'une infrastructure de distribution bien établie.

Six sociétés se partagent 85% du marché. Universal Pictures Vidéo occupe la tête du classement en 2001, grâce au succès de Gladiator , devant Fox Pathé Europa porté par Star Wars- La menace fantôme . TF1 Vidéo, premier en 2000 grâce à la série des Pokemon et Taxi 2 , figure désormais en sixième position, avec une part de marché de 11,5 %, contre 18,7 % en 2000. Le Pacte des loups , est l'unique film français recensé au « top 10 » 103 ( * ) .

Les six premiers éditeurs vidéo en 2001

Parts de marché (%) en termes de chiffre d'affaires

Universal Pictures Video

16,7%

Fox Pathé Europa

16,1 %

Buena Vista Home Entertainment France

14,6 %

Gaumont Columbia Tristar Home Video

13,2%

Warner Home Video

12,3 %

TF1 Vidéo

11,5 %

3. L'exportation des films

« Aux bons résultats du cinéma français en 2001 sur son propre marché, s'ajoute un regain sensible d'intérêt et même de popularité pour le film français dans le monde : les résultats des films en salles dans de nombreux pays ont atteint eux aussi des records, les sélections de films français dans les festivals internationaux se sont multipliées, ainsi que les récompenses et l'accueil critique des films. Ce sont d'abord les distinctions que films français ont reçu dans les festivals ou les cérémonies équivalentes à celle des Césars : les prix décernés à Laissez Passer de Bertrand Tavernier et à Huit Femmes de François Ozon, au festival de Berlin, ou encore les récompenses attribuées dans le cadre des « césars » anglais et espagnols à Amélie Poulain. Le film de Jean Pierre Jeunet était aussi en lice aux Oscars avec cinq nominations et c'est en fin de compte une coproduction française : No Man's Land, du réalisateur bosniaque Danis Tanovic, qui a remporté l'Oscar du meilleur film étranger.

Dans les salles ensuite, les films français ont su séduire aussi le grand public, et la hausse des entrées des films français a été spectaculaire : 120 % d'augmentation pour le cinéma français dans les salles étrangères en 2001. Il y a évidemment au premier rang le succès d'Amélie Poulain, mais il ne doit pas cacher les performances  d'autres films: Les rivières pourpres, Le pacte des loups, Le placard. Mais aussi : « Sous le sable », « Va Savoir », ou  « Intimité ».

Il est à noter que pour la première fois depuis de nombreuses années, la presque totalité des films français ayant rencontré le plus large public cette année en France comme à l'étranger ont été tournés en langue française, ce qui n'est apparemment pas un obstacle - au contraire- à leur popularité auprès de publics non francophones » 104 ( * ) .

Entrées du cinéma français à l'étranger (millions)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Films en langue française

16,2

16,2

12,9

13,1

27,0

17,0

30,0

Films en langue étrangère

23,5

26,4

43,0

4,7

15,4

18,0

20,0

Total

39,7

42,6

55,9

17,8

42,4

35,0

50,0

Là encore, le diagnostic très positif du CNC doit être tempéré par un triple constat :

• Les succès français à l'exportation reposent sur un nombre limité de films : en 1997, le Cinquième élément avait réalisé plus de la moitié du chiffre d'affaires à l'étranger des films français (70 ME sur un total de 125 ME) ; en 1999, Jeanne d'Arc avait représenté une recette de 53 ME sur un total de 103 ME).

Performances des films français à l'exportation

1997

1998

1999

2000

2001

Films ayant généré plus de 1,5 ME

3

3

4

5

Films ayant généré entre 760 kE et 1,5ME

34

39

28

36

• Les recettes des films français à l'étranger sont concentrées sur quelques marchés : en 2000, l'Europe a assuré plus de la moitié de ces recettes, l'Allemagne à elle seule représentant environ 12,5% du total des exportations.

Répartition des recettes françaises à l'exportation (en millions d'euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Europe de l'ouest

27,59

31,10

52,90

36,59

43,30

36,44

dont Allemagne

8,54

7,01

16,16

7,62

11,10

8,99

Amérique du nord

7,62

8,08

28,05

5,49

29,42

7,47

dont Etats Unis

6,25

5,49

26,53

3,20

25,60

4,27

Asie

9,91

11,13

25,46

12,50

14,79

13,11

dont Japon

6,71

6,56

16,46

7,93

10,40

8,38

Amérique latine

1,22

1,98

5,18

2,44

3,81

2,74

Europe de l'est

2,29

3,51

4,12

2,90

3,66

3,05

Autres

6,04

6,99

9,3

4,11

10,07

8,76

Total

55,03

62,79

125,01

64,00

105,04

71,57

Source : CNC

• Le succès commercial des films a été obtenu au prix d'un accroissement important du nombre moyen de copies par film .

Ainsi, par rapport aux dernières années, le nombre moyen de copies des films en langue française a doublé en Espagne, au Royaume Uni, en Italie et au Québec. En Allemagne, il a augmenté de 40%. Les surcoûts qui en résultent représentent pour les distributeurs un risque supplémentaire qui les incite à réserver leur effort commercial aux films qui ont déjà obtenu un succès significatif sur le marché national. 105 ( * )

• Enfin, il est à noter que les recettes des exportateurs français proviennent, pour une part de plus en plus importante, de la vente de films étrangers dont ils ont acquis les droits : en 2000, pour la première fois, les recettes des longs métrages étrangers ainsi réexportés ont dépassé les recettes des films français.

Evolution des recettes du cinéma à l'exportation ( M euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Films français

55,03

62,81

125,01

64,03

105,04

71,65

Films étrangers

34,15

38,26

50,31

37,50

45,58

97,57

Total

89,18

101,07

169,22

101,53

166,63

169,22

On retrouve ici un problème analogue à celui qui est posé par le développement de l'édition vidéo : pour protéger la production indépendante et la diversité de la création, la réglementation française limite l'engagement des diffuseurs dans l'exploitation secondaire des films qu'ils contribuent à produire 106 ( * ) .

4. La position des films français sur le marché national

L'évolution des recettes d'exploitation du cinéma français fait apparaître un léger effritement de sa position sur son marché national au profit du cinéma étranger, c'est à dire en l'occurrence des films américains.

Recettes comparées des films français et des films étrangers sur le marché national en 2000 (M€)

salles

Télévision

vidéo

Total

Films français

104,9

402,8

82,5

590,2

Films étrangers

267 ,0

373,9

326,8

967,7

Total

371,9

776,7

409,3

1557,9

Part des films français

28,2%

51,2%

12,6%

37,9%

Recettes comparées des films français et des films étrangers sur le marché national en 1996 (M€)

salles

Télévision

vidéo

Total

Films français

111,7

297,3

62,1

471,1

Films étrangers

187,8

217 ,5

346

751,1

Total

299,5

514,8

408,1

1222,4

Part des films français

39,0%

57,8%

11,1%

38,5%

Le recul relatif de la position française sur le marché de l'exploitation en salles a un caractère conjoncturel. En revanche, l'évolution observée dans le secteur de la télévision est liée au développement des nouvelles chaînes cinéma du câble et du satellite qui, s'il contribue à accroître les recettes du cinéma français, profite plus encore aux films américains.

L'accroissement des exportations de films est loin de compenser celui des importations : Le déficit commercial de la France dans le secteur du cinéma, qui était de l'ordre de 170 millions d'euros (1,1 milliard de F) en 1996, se situait autour de 260 millions d'euros (1,7 milliards de F) en 2000107 ( * ).

III. LA PRODUCTION

Le nombre de films produits a enregistré une augmentation très sensible en 2001 avec 204 films agréés dans l'année, soit une trentaine de plus que l'année précédente et un record absolu dans l'histoire du cinéma français, depuis qu'existent des statistiques de la production.

Nombre de films agréés

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Films d'initiative française

97

104

125

148

150

145

172

Dont films 100% français

63

74

86

102

115

111

126

films majoritairement français

34

30

39

46

35

34

46

Films majoritairement étrangers

32

27

33

32

31

26

32

Total

129

131

158

180

181

171

204

L'accroissement du nombre des films agréés tient essentiellement à l'augmentation du nombre des films d'initiative française, 100% français.

De même, l'augmentation du volume global d'investissement sur les films d'initiative française (+ 10,4 % par rapport à 2000) est due principalement à l'augmentation des investissements français.

Investissements dans les films d'initiative française (M )

1998

1999

2000

2001

Investissements français

578,91

541,73

634,26

687,89

Investissements étrangers

66,60

43,93

44,03

61,23

Investissements totaux

645,51

585,66

678,29

749,12

Le côté préoccupant de cette évolution est qu'elle s'accompagne d'une polarisation croissante des investissements avec d'un côté une nette augmentation du nombre de films dont le devis est supérieur à 7 millions d'euros. et de l'autre, un doublement du nombre de films dont le devis est inférieur à un million d'euros

Répartition des films en fonction de leur devis

Nombre de films

1998

1999

2000

2001

Plus de15 M€

3

3

7

9

De 10 à 15 M€

6

7

7

11

De 7 à 10 M€

14

13

12

14

De 5 à 7 M€

12

10

14

15

De 2 à 5 M€

68

70

62

49

De 1 à 2 M€

26

28

21

32

Moins de 1 M€

19

19

22

42

Total

148

150

145

172

Dont premiers films

58

62

53

53

1. Une double inflation, du nombre des films chers et du nombre des films bon marché

a) 34 films d'initiative française ont un devis supérieur à 7 millions d'euros en 2001

Les films d'initiative française dont le devis est supérieur à 7 millions d'euros représentent une part de plus en plus importante du total des investissements dans la production : 58,8%, soit 440 millions d'euros sur un total de 749 millions d'euros en 2001.

Parmi les 34 films d'initiative française, 27 n'ont fait l'objet d'aucune coproduction internationale, soit 80 % d'entre eux. Ces projets, onéreux, ont donc trouvé suffisamment de financement sur le seul sol français pour voir le jour.

La totalité de ces films a bénéficié du financement d'une chaîne de télévision payante, certains cumulant même un apport de Canal+ et de TPS. ( Canal+ est intervenue dans 29 films et TPS dans 9 films). Tous, sauf un ( Le Baiser du dragon de Christophe Nahon) ont bénéficié de surcroît du financement d'une chaîne en clair. Enfin, 13 films ont bénéficié du financement d'une Sofica.

2 ont été produits avec le concours de l'avance sur recettes 108 ( * ) .

Films d'initiative française dont le devis est supérieur à 7 M€

1998

1999

2000

2001

Répartition du nombre de films selon les devis

plus de 15 (M€)

3

3

7

9

de 10 à 15 M€

6

7

7

11

de 7 à 10 M€

14

13

12

14

total

23

23

26

34

Part des investissements dans la production (%)

plus de 15 (M€)

18,2%

10,7%

24,3%

24,8%

de 10 à 15 M€

11,2%

14,4%

12,7%

18,2%

de 7 à 10 M€

19,0%

18,9%

14,1%

15,8%

ensemble

48,4%

44%

51,1%

58,8%

31 films ont été tourné en langue française et 3 en langue anglaise

b) 42 films d'initiative française ont un devis inférieur à un million d'euros en 2001

Films à moins de 1 M€

1998

1999

2000

2001

Nombre de films

19

19

22

42

% du total des investissements

2,0

2,0

1,2

3,6

La forte augmentation du nombre de ces films à petits budgets explique pour l'essentiel l'augmentation du nombre de films d'initiative française en 2001 109 ( * ) .

24 films ont bénéficié d'une avance sur recettes (11 avances avant réalisation et 13 avances après réalisation) ; pour 16 d'entre eux cette avance a été leur seul financement.

15 ont fait l'objet d'un achat d'une chaîne de télévision payante (11 films achetés par Canal+ et 4 par TPS), 5 films ont été coproduits par une chaîne en clair, 2 ont pu compter sur l'investissement d'une Sofica. 9 d'entre eux ont fait l'objet d'une coproduction internationale (un même film peut cumuler plusieurs de ces financements).

5 films n'ont bénéficié d'aucun financement.

c) Le nombre de films dont le devis est compris entre 2 et 5 millions d'euros a fortement diminué

Les films dont le budget était compris entre 2 et 5 millions d'euros ont longtemps constitué l'un des principaux pôles d'expression du cinéma français, celui du « cinéma d'auteur commercial ».

Les études menées par l'IFCIC sur le financement de la production indépendante au cours des trois dernières années font ressortir les difficultés croissantes de la production indépendante à produire cette catégorie de films, de plus en plus délaissés par les diffuseurs soucieux d'acquérir des films aux budgets élevés, bénéficiant d'une plus grande notoriété auprès du public, et donc assurés a priori d'obtenir une plus forte audience. Par voie de conséquence, les producteurs indépendants sont contraints de se replier sur les films à petits budgets.

L'analyse comparative des devis et des financements en trésorerie (c'est-à-dire les financements externes) fait apparaître la fragilité de ces entreprises. Le nombre de films ayant eu une marge de trésorerie négative a augmenté, en raison soit d'un sous financement (cas le plus fréquent), soit d'un dépassement en cours de tournage. Le producteur est alors particulièrement dépendant des résultats de l'exploitation en salle, au moment même où cette exploitation devient de plus en plus difficile.

Films d'initiative française dont le devis est compris entre 2 et 5 M€

1998

1999

2000

2001

Nombre de films

68

70

62

49

% du total des investissements

32,5

36,3

31,2

20,8

2. La politique de production des chaînes de télévision

La très forte progression de l'offre de films sur les chaînes du câble et du satellite au cours de la décennie a banalisé l'offre de films à la télévision, du moins pour les foyers bénéficiant d'une « offre élargie ».

Cette progression s'est effectuée sans contrepartie financière proportionnelle pour la production compte tenu des très faibles prix d'achat des films français par certaines chaînes. Elle a en revanche eu pour effet un affaiblissement du poids du cinéma dans l'offre et dans l'audience des chaînes en clair, et une forte concurrence pour Canal+.

Les tensions qui en résultent ne sont pas sans conséquence sur l'évaluation que ces chaînes sont amenées à faire de leurs engagements financiers dans ce secteur.

a) L'évolution de l'offre et de la demande de films à la télévision

Les chaînes en clair

Le cinéma a cessé d'être le programme phare des chaînes de télévision en clair au profit notamment de la fiction.

Un chiffre est de ce point de vue significatif : en 1990 le cinéma représentait 3,9% de l'offre de programmes et, avec une moyenne de 106 heures d'écoute sur l'année, 10,2% de l'audience. En 2000, il représentait 5% de l'offre et, avec une moyenne de 76 heures d'écoute, 7,3% de l'audience.

Cette évolution a entraîné une réorientation de la politique de programmation et de production des chaînes. On constate, à la fois, une diminution du nombre total de films diffusés et, parmi ces films, une augmentation du nombre de ceux qui ont été coproduits par la chaîne concernée.

Films français en première partie de soirée sur TF1, F2, F3, F5, Arte, M6

Nombre de films

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

total

265

218

252

251

246

261

236

246

239

226

216

Films en première diffusion

43

33

44

47

37

60

35

62

47

49

55

Films en rediffusion

222

185

208

204

209

201

201

184

192

177

161

Films coproduits par une chaîne et diffusés par cette chaîne

47

33

42

55

56

67

49

89

66

79

81

Films français en deuxième partie de soirée sur TF1, F2, F3, F5, Arte, M6

Nombre de films

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

total

199

181

130

159

142

154

137

127

146

155

142

Films en première diffusion

63

32

26

47

52

57

39

30

49

42

52

Films en rediffusion

136

149

104

112

90

97

98

97

97

113

90

Films coproduits par une chaîne et diffusés par cette chaîne

22

11

22

28

33

38

37

42

37

36

42

On constate dans le même temps, et bien que le quota de 40% de films français reste respecté sur les chaînes hertziennes, une augmentation relative du nombre des films américains.

Nombre de films français et de films américains diffusés sur TF1 et F2

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

TF1

Films français

114

106

95

87

87

90

100

102

102

94

Films américains

43

43

64

66

68

66

75

75

76

76

F2

Films français

100

93

100

110

108

112

95

102

86

76

Films américains

62

63

66

54

72

59

73

69

69

58

Canal+

La présence de nouvelles chaînes cinéma sur le câble et le satellite, a fait perdre à Canal+ sa position privilégiée de « chaîne du cinéma ». L'offre de films et notamment de films récents ne constitue plus autant que par le passé, un produit d'appel pour accroître son parc d'abonnés.

Le nombre de films français diffusés sur la chaîne est resté stable, sur l'ensemble de la programmation, mais il a diminué en première partie de soirée.

Le nombre de films français produits ayant considérablement augmenté au cours de la période considérée, la proportion de films français préachetés par Canal + a diminué.

Nombre de films français et de films américains diffusés sur Canal+

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre de films français

226

195

197

195

211

210

202

203

212

226

Dont diffusés en 1 ère partie de soirée

68

63

73

69

66

57

65

70

67

56

Nombre de films américains

155

169

160

161

165

162

154

160

151

150

Dont diffusés en 1 ère partie de soirée

128

132

115

114

121

115

112

114

112

111

Les chaînes du câble et du satellite

La multiplication des chaînes cinéma a fait exploser l'offre de films à la télévision,

L'élément préoccupant pour l'avenir du cinéma français à la télévision est que cet accroissement dépasse le nombre des films français porteurs disponibles. Politique de rétention de la part de ceux qui détiennent les droits, ou insuffisance qualitative, peu importe : le fait est que les quotas de diffusion sont de moins en moins respectés.

Sur les 39 chaînes ayant diffusé en 2001 des oeuvres cinématographiques, 24 n'ont pas respecté l'un des deux quotas d'oeuvres françaises et européennes qu'elles s'étaient engagées à diffuser au moment de leur autorisation par le CSA ( 14 n'ont respecté aucun de leurs quotas).

Ce manquement à l'une des principales obligations prévues par le dispositif de soutien au cinéma national ne peut que fragiliser l'ensemble du système.

b) Les conséquences sur les engagements des chaînes dans le financement de la production

La télévision apporte directement 55% des financements (hors apports producteurs) de la production cinématographique nationale, et elle contribue à plus de 50% au financement du compte de soutien au cinéma (52 % des recettes en 2001, contre 7,8 % en 1985). Elle assure ainsi 65% des ressources du cinéma français

Cette dépendance rend désormais ce secteur d'autant plus vulnérable, qu'elle repose sur les chaînes généralistes nationales et les chaînes « premium » par abonnement, dont les recettes enregistrent un tassement, sinon un recul. Il semble peu probable que l'augmentation du prix payé par Canal+ pour les droits de retransmission du football puisse être compensée par un accroissement suffisamment important du nombre de ses abonnés pour dégager des ressources nouvelles pour le cinéma.

Les chaînes tendent à redéployer leurs investissements au profit des films qui correspondent le plus à leurs priorités éditoriales.

Le nombre de films coproduits par les chaînes a progressé moins vite que le nombre de films agréés.

La stabilité relative des apports moyens masque une évolution divergente entre des films grands public présentant des devis de plus en plus élevés et bénéficiant d'une part croissante des obligations d'investissement des diffuseurs, et les autres films supposés moins porteurs et donc moins bien financés.

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre de films agréés

129

131

158

180

181

171

204

Chaînes en clair

(TF1, M6, F2, F3, F5, Arte)

Nombre de films

66

67

73

94

88

95

89

Apport total (MF)

68,5

74,2

82,8

97,8

84,9

85,5

100

Ap. moyen par film

1,03

1,1

1,13

1,04

0,97

0,90

1,12

dont TF1

Nombre de films

13

17

16

20

19

20

21

Apport total (MF)

22,7

33,7

30,1

33,3

37,4

35,76

45,71

Ap. moyen par film

1,74

1,98

1,88

1,67

1,96

1,78

2,18

Canal+

Nombre de films

101

107

134

139

140

115

122

Apport total (MF)

668

679

845

918

930

145,5

153,1

Ap. moyen par film

1,01

0,97

0,96

1,01

1,01

1,27

1 25

La politique plus sélective des chaînes oriente le contenu des productions vers les « standards fédérateurs », et elle pousse les producteurs à faire appel à des acteurs connus. Elle contribue à ce titre à l'inflation des devis, et aux difficultés de financement des films plus novateurs.

Cette évolution, qui s'est accentuée en 2001, est particulièrement sensible sur les films bénéficiaires de l'avance sur recettes. Canal Plus n'a financé que 33 des 51 films bénéficiaires de l'avance soit 65%, contre 83% en 2000. TPS a financé un film contre 4 films en 2000 et 3 films en 1999. Par ailleurs, 18 films bénéficiaires d'une avance ont également bénéficié du financement d'au moins une chaîne en clair, contre 27 films en 2000.

3. La dégradation des conditions de financement d'un nombre croissant de films

Avec la conjonction actuelle d'une diminution des engagements des chaînes auprès des producteurs indépendants, et d'une réorientation des stratégies d'investissements des groupes de communication, le système de soutien financier au cinéma se trouve confronté à deux dérives, qu'il contribue par ailleurs à alimenter:

- la hausse des coûts : une part croissante des fonds encadrés, notamment en matière de soutien automatique, va aux films à budget élevé, contribuant ainsi à entretenir le processus inflationniste.

- l'augmentation du nombre de films à petit budget pour lesquels les risques et les incertitudes de l'exploitation en salle sont tels que le bon sens impose qu'ils soient produits sans qu'un minimum de succès commercial soit indispensable à leur économie. La principale obligation du producteur est de mener le projet à son terme, à l'intérieur du budget dont il dispose, l'intervention du distributeur se bornant alors, souvent, à la « sortie technique » limitée à quelques salles, nécessaire pour donner à ces films le statut d'oeuvre cinématographique 110 ( * ) .

L'évolution des systèmes de distribution et d'exploitation du cinéma accentue l'écart entre des films à gros budgets, de plus en plus chers  et pour lesquels, à l'image de ce qui se passe aux Etats-Unis, des dépenses de promotion de plus en plus importantes doivent être prévues dès la production, et des films à petit budget sans moyens de promotion.

Cette différentiation dans la nature des films produits et dans leur économie, s'accompagne inévitablement d'une distinction de plus en plus marquée entre deux catégories d'entreprises de production :

• Les films destinés à une exploitation commerciale sur période longue et sur un marché international, à budget élevé, sont le plus souvent produits ou coproduits par des groupes intégrés, disposant de catalogues importants, qu'ils sont en mesure de gérer film par film, année par année, pays par pays.

• Les « films d'auteurs » sont plutôt portés par des producteurs, puis par des distributeurs indépendants, qui assument la fonction indispensable de recherche de nouveaux talents, mais qui ne sont pas en situation de prendre un risque financier lourd, surtout sur période longue. Les oeuvres correspondantes, compte tenu des risques commerciaux qu'elles présentent, ne peuvent être réalisées que si elles sont pour l'essentiel préfinancées.

Produit-on trop de films de cette nature ?

Même si nombre de ces films obtiennent un succès public et une rentabilité que nombre de films réputés commerciaux n'atteignent pas, la production en question suscite généralement une double critique :

• d'ordre économique : le système de soutien financier permettrait au producteur de ne pas avoir à tenir compte du marché, 111 ( * )

• d'ordre artistique : Les films produits, trop élitistes, correspondraient aux goûts d'un petit groupe de critiques parisiens, et non ceux du public.

Ces critiques ne sont pas infondées, mais cette situation apparaît désormais moins la cause que la conséquence de la difficulté de distribuer et d'exploiter dans des conditions qui assureraient leur rentabilité, des films qui ne sont pas délibérément commerciaux.

Certains de ces films se posent certes comme des oeuvres trouvant leur légitimité auprès d'une partie de la critique et dans leur présentation dans des festivals, plus que dans leur rencontre avec le public. D'autres, en revanche, présentent un réel potentiel commercial, mal exploité faute de moyens financiers suffisants.

La fragilité du système ne résulte donc pas du volume de production, mais d'une dégradation des conditions de financement des films pouvant prétendre à un succès public . Un nombre croissant de producteurs est alors conduit à faire des économies excessives sur l'écriture des scénarios, sur les budgets de réalisation, sur les frais de sorties,- économies qui réduisent d'autant les chances de succès de leurs films.

IV. LES MUTATIONS TECHNOLOGIQUES AMPLIFIENT LES DÉSÉQUILIBRES LIÉS À L'ÉVOLUTION DES MARCHÉS

Les problèmes de financement rencontrés par les producteurs français ne sont que le révélateur d'une crise plus profonde liée à un clivage de plus en plus marqué entre les deux systèmes économiques qui coexistent au sein de l'industrie du cinéma, et qui traditionnellement s'équilibraient, se complétaient et s'enrichissaient l'un l'autre : l'un sous-tendu par une logique de marché , l'autre par une logique de création. Cet équilibre est en situation d'être rompu.

La diversification croissante des modes de diffusion a entraîné une segmentation des marchés. Elle s'est traduite par l'émergence de nouvelles fonctions commerciales, et de nouveaux acteurs en mesure de gérer des droits d'exploitation, sur période longue, au niveau international, pays par pays, support par support. Comme pour la télévision, devenue le principal vecteur d'exploitation des films, un « cinéma de la demande » s'est progressivement substitué, sur ces nouveaux marché, à un « cinéma de l'offre ».

Le développement des technologies numériques, en multipliant les possibilités de diffusion ne pourra, dans un premier temps du moins, qu'accentuer cette segmentation et ses conséquences : l'internationalisation des marchés et le poids croissant des groupes intégrés.

Le cinéma, quel que soit son ancrage national, est devenu partie prenante du processus de mondialisation 112 ( * ) .

Le volet qui apparaît aujourd'hui le plus déstabilisant dans ce mouvement, parce que le plus éloigné des logiques de la production cinématographique, que ce soit celles des producteurs ou celles des auteurs, est celui qui résulte de la financiarisation du secteur et des effets en retour des ratés de la convergence.

Le système français de soutien au cinéma a été conçu à l'origine autour de l'exploitation en salles sur un marché national protégé, aura du mal sous sa forme actuelle, à résister aux évolutions qui se dessinent. Et pourtant, le cinéma français bien que menacé ne manque pas d'atouts pour s'adapter aux mutations à venir : la « biodiversité » qu'il a réussi à préserver ne le met pas en position moins favorable que les lourdes productions hollywoodiennes, qui ne peuvent trouver leur équilibre économique que dans une fuite en avant, en multipliant les exploitations dérivées de plus en plus coûteuses à développer et de plus en plus incertaines à rentabiliser.

TROISIÈME PARTIE

CONCLUSION ET PROPOSITIONS

Le principal atout du cinéma français tient à sa diversité , c'est à dire à sa capacité d'adaptation et de renouvellement face aux multiples évolutions, technologiques ou économiques, qui affectent le cinéma au niveau mondial.

Cette diversité résulte d'un ensemble d'équilibres qu'il est dès lors essentiel de préserver :

• Equilibre au stade de la production, entre le cinéma d'auteur et le cinéma commercial, entre les productions 100% françaises et les coproductions ;

• Equilibre au stade de la distribution  entre les entreprises intégrées et les entreprises indépendantes

• Equilibre au stade de l'exploitation, entre le cinéma américain et le cinéma européen.

Sa principale faiblesse résulte d'une valorisation insuffisante de ce potentiel.

• Valorisation insuffisante de la production cinématographique : près de 1300 films français ont été produits entre 1995 et 2001 : 700 ont obtenu moins de 25.000 entrées. Plus de la moitié des films français produits ces dernières années n'a jamais été diffusée sur une chaîne de télévision en clair.

• Valorisation insuffisante des compétences techniques et artistiques développées dans le cinéma, dans les autres secteurs de la communication audiovisuelle. Si la France est le premier pays d'Europe pour la production cinématographique, elle n'est que le cinquième pays d'Europe pour la fictions TV, avec 553 heures produites en 2001, derrière l'Allemagne (1.800 heures), la Grande-Bretagne (1.463 heures), et même derrière l'Espagne (1.306 heures) ou l'Italie (761 heures) 113 ( * ) .

Les évolutions en cours tendent à bouleverser ces équilibres et à accentuer ces faiblesses, à travers un double mouvement : la concentration croissante des ressources disponibles sur les films les plus chers ; l'intégration verticale et l'internationalisation des entreprises autour des grands groupes de communication.

I. LA QUESTION DU FINANCEMENT

La réflexion engagée récemment la demande du gouvernement concerne à juste titre le financement : c'est sur cette question d'abord que s'est exprimée l'inquiétude des professionnels et, quels que soient les autres ajustements à apporter au système de soutien, il est nécessaire d'éviter un décrochage financier qui mettrait en péril l'existence de pans entiers de la production, de la distribution et de l'exploitation cinématographiques.

Cela posé, les ressources nouvelles potentiellement mobilisables du côté des opérateurs de télévision et des éditeurs vidéo pour alimenter le compte de soutien, même complétées par la création de fonds régionaux ou le déplafonnement des Soficas, représentent des masses financières d'un volume limité. Elles apparaissent d'autant plus insuffisantes pour peser, à elles seules, sur les évolutions en cours, qu'elles seront en partie absorbées par l'inflation des coûts, qu'elles contribuent de ce fait à entretenir.

Il semble dès lors souhaitable d'inciter les professionnels à accompagner les mesures qui seront prises pour élargir et diversifier les financements du cinéma, par le réexamen d'un certain nombre de dispositions, notamment celles qui concernent l'utilisation du compte de soutien . Même si chacun sait que les réformes en ce domaine ne seront pas faciles à mettre en oeuvre.

Ainsi, il ne serait pas absurde d'envisager de moduler une partie du soutien automatique, en la bonifiant en fonction des conditions de son affectation, lorsque cette affectation correspond à un des objectifs économiques ou culturels posés par les Pouvoirs publics 114 ( * ) . Par exemple, si l'un de ces objectifs concerne le renforcement de la production indépendante, la part du soutien automatique mobilisé par un groupe intégré sur une production nouvelle, pourrait être bonifiée si cette production est portée par un producteur indépendant.

Plus généralement, le clivage de plus en plus marqué entre l'économie des films chers à vocation commerciale et celle des films d'auteur à petit budget devrait conduire à explorer des modes d'intervention spécifiques.

1. Inciter les investisseurs à participer au financement du cinéma commercial 115 ( * )

Les possibilités de plus value des investissements dans le cinéma justifient la mise en place de mesures visant à associer de nouveaux partenaires financiers à la production et à la distribution des films, et à encourager la prise de risque commercial.

Les faiblesses du cinéma français sont en effet dues, pour une large part, à ce qu'il est financé en vase clos. Les préfinancements accessibles auprès des chaînes de télévision et du CNC permettent à des producteurs qui disposent de peu de fonds propres de n'avoir à prendre que des risques financiers limités, en se contentant d'une rentabilité réduite. Ce qui, en cas de sous-financement, aboutit à sacrifier des dépenses pourtant essentielles, dans le développement, la réalisation et l'exploitation du projet. Or ce sont ces postes qui, pour un investissement relativement faible au regard du coût de la production, contribuent de manière déterminante au succès d'un film 116 ( * ) .

Sortir d'une logique de préfinancement, c'est à dire non pas minimiser les risques mais maximiser les perspectives de profit en finançant un film en fonction de son potentiel commercial, suppose l'intervention d'investisseurs.

Un telle intervention n'est pas seulement nécessaire pour compenser le tassement attendu des apports financiers de la télévision dans le financement de la production, ou pour éviter que la tendance des chaînes à « produire pour la télévision » réduise progressivement la diversité et la créativité du cinéma français, au profit des standards dominants du moment. Elle constitue un moyen de rapprocher l'industrie cinématographique française du marché, et de l'adapter aux nouvelles perspectives de développement du secteur.

L'enjeu n'est pas de faire basculer l'ensemble de la production cinématographique dans une logique de rentabilité commerciale. Ce n'est ni possible, ni souhaitable. Il s'agit de mieux valoriser ce qui peut l'être.

Les propositions concernant la réforme et la modernisation du régime des Soficas, ainsi que la possibilité de faire migrer une partie de leurs financements vers l'amont (l'écriture) et vers l'aval (la distribution), vont dans ce sens.

D'autres mécanismes, accompagnés ou non d'incitations fiscales, sont sans doute aussi à étudier sur la base des expériences étrangères :

• L'extension au secteur audiovisuel de dispositifs qui existent déjà dans d'autres secteurs liés à l'innovation technologique , permettant aux entreprises de disposer de fonds propres suffisants pour développer leur activité sur plusieurs années, à l'image de se qui se pratique dans de nombreux pays étrangers, comme la Grande -Bretagne.

• La mise en place, sous le contrôle éventuel de l'IFCIC, de nouveaux produits financiers, comme des fonds communs de placement indexés sur les résultats de l'exploitation en salle, des fonds de capital-risque finançant le développement des projets ou les frais de sortie, ou des fonds d'investissement intervenant dans le financement des droits de second marché au delà de ce qui est aujourd'hui financé par les diffuseurs et les Soficas, ...

Une telle action pourrait s'appuyer sur les dispositions prises récemment par la Banque européenne d'investissement à l'initiative de la Commission européenne, en faveur de l'investissement dans l'audiovisuel et les nouvelles technologies.

• Enfin, il faut poser de manière claire la question de savoir si, à partir du moment où l'on veut élargir le financement de la production, il n'est pas opportun d'ouvrir l'accès au compte de soutien aux filiales françaises des sociétés étrangères, américaines en particulier, quand elles produisent des films français 117 ( * ) . Cette question, évoquée de façon récurrente par les professionnels, se pose dans des termes nouveaux dans une période où on assiste à une délocalisation croissante de la production américaine 118 ( * ) .

2. Définir des politiques spécifiques de soutien aux films qui n'ont pas vocation à se situer d'emblée dans un projet commercial.

Le cinéma de création représente une composante essentielle du cinéma français. Il est un des principaux vecteurs de l'influence culturelle de la France à l'étranger. Il constitue aussi l'espace où se forment les réalisateurs du cinéma grand public de demain.

Cette position apparaît aujourd'hui fragilisée, en premier lieu par des insuffisances de financement - non pour produire des films, mais pour les produire dans des conditions cohérentes. Mobiliser des ressources alternatives pour le cinéma commercial, permettrait de libérer plus de moyens pour l'innovation et la prise de risque artistique.

Mais le principal problème rencontré par ce type de films est celui de leur exposition. Ce problème peut être abordé à trois niveaux :

• Celui de la diffusion télévisée. Arte, en France, comme la BBC ou Channel Four en Grande Bretagne, ont développé une politique de production alternative pour la création cinématographique, qui repose sur la diffusion à la télévision, mais qui n'exclut pas une présentation dans les festivals de cinéma, voire une exploitation en salles, quand elle se justifie. L'importance des enjeux dans ce domaine, doit conduire à engager un débat entre les professionnels sur la question de savoir si le moment n'est pas venu d'introduire des possibilités de dérogation dans la chronologie des médias, en fonction de la nature et des conditions d'exploitation des films.

• Celui de l'exploitation en salle. Il serait souhaitable d'encourager les exploitants à s'engager auprès des distributeurs sur des durées minimales de présentation des films, éventuellement en partenariat avec des collectivités locales ou avec des fondations et, plus généralement, de favoriser la mise en place de dispositifs permettant à des films qui ont eu une exposition limitée lors de leur sortie dans les salles commerciales, de trouver leur public autrement (centres culturels ; circuits universitaires..).

• Celui de l'exploitation en DVD. Les nouvelles formes d'édition vidéo représentent, à plus ou moins long terme, une possibilité d'accès au public pour des films marginalisés par les contraintes de l'exploitation en salles, voire par celle de la diffusion télévisée. Encore faut-il que se soit préalablement mise en place la logistique de distribution et de commercialisation indispensables. Les entreprises concernées par cette activité de niche trouveront difficilement leur équilibre économique si elles ne bénéficient pas d'un soutien des pouvoirs publics dans la phase actuelle d'émergence du marché.

II. LA QUESTION DE L'INTÉGRATION VERTICALE

Le processus d'intégration verticale observé ces dernières années, et dont Vivendi Universal a été en France l'exemple à la fois le plus spectaculaire et le plus malheureux, va bien au delà de la seule filière cinéma puisqu'il associe aux métiers de ce secteur, l'exploitation de chaînes de télévision, la création de jeux vidéo, l'édition musicale, les développements d'Internet, voire tout un ensemble d'activités qui n'ont en commun que les économies d'échelle que l'intégration est susceptible de favoriser, depuis la gestion d'infrastructures de diffusion, jusqu'à la création de parcs de loisirs ou la propriété de clubs sportifs.

Dans un premier temps, les réactions devant la constitution de ces groupes intégrés ont été partagées.

Des professionnels se sont inquiétés des risques de position dominante, mais d'autres ont considéré qu'il s'agissait là d'un phénomène inévitable, les groupes intégrés étant les seuls à pouvoir disposer des moyens financiers nécessaires pour gérer les incertitudes industrielles et commerciales liées à l'évolution des techniques et des marchés.

A partir du moment où les principales firmes américaines s'engageaient dans cette voie, il paraissait difficile d'exclure que les entreprises européennes - et notamment françaises - fassent de même.

Cette transformation des entreprises semblait d'ailleurs, pour certains, pouvoir contribuer au développement du cinéma en incitant des groupes, qui ont naturellement tendance à privilégier les contenus fédérateurs à fort potentiel de diffusion, à établir des relations stables de partenariat avec des entreprises indépendantes, innovantes. Elle paraissait de même être l'occasion de constituer des majors européennes qui auraient pu servir d'appui à la diffusion de la production européenne.

Les choses n'ont pas évolué dans ce sens : les groupes européens se sont associés à des entreprises américaines plus puissantes qu'eux, contribuant ainsi à accroître les déséquilibres des échanges audiovisuels entre l'Europe et les Etats-Unis, et non à construire l'espace audiovisuel européen.

Un consensus assez général se dégage aujourd'hui pour considérer que les pouvoirs publics ne peuvent pas se désintéresser de cette question, et qu'il est indispensable d'encadrer le processus d'intégration verticale.

La régulation à envisager doit concerner l'ensemble des activités cinéma des groupes intégrés, et se déployer en fonction d'objectifs qui relèvent à la fois du droit de la concurrence et de la politique culturelle :

• Eviter qu'un opérateur détiennent un pouvoir de marché excessif

• Préserver l'autonomie éditoriale et la créativité des entreprises indépendantes de production, de distribution ou l'exploitation des films, tout en permettant le cas échéant, leur adossement à des groupes financiers plus solides (à l'image de ce qui existe aux Etats Unis).

Mais elle doit aussi prévoir les recours possibles en cas de crise :

• Limiter le risque que des difficultés rencontrées par un des ces groupes, dans un de ses pôles de diversification, mettent en danger non seulement ses propres filiales cinéma, mais aussi l'ensemble de leurs partenaires.

• Faire en sorte que la France garde le contrôle de son patrimoine cinématographique, quelles que soient les fluctuations de la structure capitalistique des groupes qui détiennent les catalogues

Le débat autour de l'intégration verticale, tel qu'il se développe actuellement, peut sembler rappeler celui du début des années 80. Ce n'est pas le cas.

A l'époque des voix s'étaient élevées, face à la puissance des trois grands groupes cinématographiques : Gaumont, Pathé et UGC, pour réclamer l'adoption d'une législation anti-trust, calquée sur le « décret Paramount » de 1948 qui, aux Etats-Unis, avait imposé la séparation entre les activités de production et de diffusion.

Cette mobilisation résultait pour une large part des tensions liées à la diminution continue du nombre des entrées et au poids croissant que prenaient ces trois groupes dans la production et dans l'exploitation des films.

Une mission de réflexion et de proposition sur ces questions avait été confiée à Jean Denis Bredin. Son rapport, remis au Ministre de la Culture en novembre 1981, distinguait deux types de risques : le risque que l'intégration verticale réduise le pluralisme et la diversité de la création ; le risque que les groupes intégrés privilégient la distribution et l'exploitation des films produits en interne au détriment de la production indépendante.

Sans méconnaître la réalité de ces risques, le rapport Bredin se refusait à préconiser la séparation entre les activités de production, de distribution, et de diffusion, mais estimait que la libre activité des groupes devait avoir pour contrepartie un certain nombre d'engagements vis à vis des indépendants.

La situation actuelle est aujourd'hui différente pour trois raisons :

• Le processus d'intégration verticale, comme le mouvement de concentration, a pris une dimension internationale, dans une logique souvent plus financière qu'industrielle.

• Les activités cinématographiques, et en premier lieu la production, ne constituent qu'un aspect (généralement le moins rentable) des activités des groupes intégrés d'aujourd'hui. Le risque est alors que ce pôle se retrouve sacrifié au profit d'autres secteurs réputés plus stratégiques.

• Les moyens de régulation dont disposent le CNC ou le CSA ne sont pas adaptés à la nouvelle configuration du secteur audiovisuel.

Le Code de l'industrie cinématographique prévoit qu'une entreprise ne peut exercer d'activité dans une des branches de l'industrie du cinéma, sans une autorisation délivrée par le Directeur général du CNC 119 ( * ) . Ce dispositif ne vise pas à réguler la concurrence. Il n'envisage pas la séparation des métiers entre entités juridiquement distinctes. Il ne s'oppose ni au cumul des autorisations, ni à la concentration des activités ou des entreprises.

La réglementation du secteur de la communication audiovisuelle, en revanche, introduit un ensemble de limitations, plus d'ailleurs pour des raisons de pluralisme que pour des raisons de concurrence : en matière de concentration horizontale (limitation du nombre des autorisations pour une entreprise donnée), et en matière d'intégration verticale (obligation des diffuseurs à affecter l'essentiel de leurs commandes à des producteurs indépendants 120 ( * ) ). Mais elle ne concerne que les activités de télévision. 121 ( * )

Une concertation semble dès lors devoir être engagée à l'initiative des pouvoirs publics, associant les instances chargées de la concurrence et les organismes professionnels.

Elle devrait se donner un double objectif :

• Evaluer la nature et l'importance des risques liés aux différentes modes d'intégration verticale à l'oeuvre actuellement.

• Etudier la forme que pourrait prendre la régulation dans ce domaine, entre l'autorégulation et le contrôle externe: limiter la part qu'un groupe peut détenir dans le capital d'un distributeur, ou d'un producteur ? élargir les compétences du médiateur du cinéma ? créer une instance de régulation sectorielle?

Compte tenu des pressions exercées par la Commission européenne, cette concertation devrait s'accompagner d'une réflexion plus théorique, permettant à la France de conforter ses prises de position concernant la diversité culturelle et le principe de la subsidiarité des politiques nationales dans ce domaine, par une argumentation technique cohérente avec le droit de la concurrence tel qu'il s'élabore dans les instances internationales.

________________

Les adaptations indispensables du dispositif financier et réglementaire existant sont à envisager dans un contexte caractérisé par une mutation des technologies et une internationalisation des marchés.

Elles doivent viser à préserver la diversité du cinéma français, son dynamisme, sa capacité à se renouveler. Mais elle doivent aussi contribuer à le rapprocher davantage de son marché et de son public, et à créer les conditions d'une meilleure valorisation du potentiel de production et de création qu'il représente.

DOCUMENTS ANNEXÉS

(1) Les films agréés et les films bénéficiaires de l'avance sur recettes en 2001

(2) L'économie du cinéma / données statistiques

(3) Les obligations des chaînes de télévision en matière de cinéma

(4) La question de la nationalité : la définition française et la définition européenne

FILMS AGRÉÉS EN 2001

FILMS D'INITIATIVE FRANÇAISE :
PRODUCTIONS 100% FRANÇAISES ET COPRODUCTIONS FRANÇAISES MAJORITAIRES

Coproductions françaises minoritaires

_______________

Films ayant reçu l'avance sur recettes

Devis ; participation des chaînes ; pays coproducteurs Films d'initiative française agréés en 2001

Titre

Réalisateur

Producteur Délégué

Devis (M€)

C+

TPS

Chaînes

Sofica

Pays coproducteurs

15 août

ALESSANDRIN Patrick

Leeloo Productions

7,47

X

TF1

Fr100%

24 heures de la vie d'une femme

BOUHNIK Laurent

Playtime

10,56

X

F3

X

Fr69%-All20%-GB11%

3 zéro(s)

ONTENIENTE Fabien

Mandarin

12,95

X

X

TF1

Fr100%

*A la folie... pas du tout

COLOMBANI Laetitia

Téléma

6,20

X

TF1

X

Fr100%

Absolument fabuleux

AGHION Gabriel

Mosca Films

11,22

X

TF1

X

Fr100%

Acteurs anonymes (Les)

COHEN Benoît

VF Productions

0,45

X

Fr100%

*Adieu pays

RAMOS Philippe

Sésame Films SA

0,88

Fr100%

Adversaire (L')

GARCIA Nicole

Films Alain Sarde

8,36

X

F3

X

Fr75%-CH15%-Esp10%

Amants du Nil (Les)

HEUMANN Eric

Paradis

4,34

X

X

Fr80%-It20%

Amen

GAVRAS Costa

Renn Productions/Katharina

15,75

X

TF1

Fr100%

Ames calines (Les)

BARDINET Thomas

Diaphana Films

2,90

X

M6

X

Fr100%

And now... ladies and gentlemen

LELOUCH Claude

Films 13/Gemka

21,31

X

F2

Fr81%-GB19%

*Après la tempête, portrait d'une femme...

VAN EFFENTERRE Joële

Mallia Films

0,14

Fr100%

Après la vie

BELVAUX Lucas

Agat Films & Cie

2,42

X

X

Fr76%-Belg24%

Après-midi d'un tortionnaire (L')

PINTILIE Lucian

YMC Productions

0,87

Fr50%-Roumanie50%

Au plus près du paradis

MARSHALL Tonie

Orsans Prod./Maia Films

8,54

X

F2

X

Fr76%-Canada14%-Esp10%

Auberge espagnole (L')

KLAPISCH Cédric

Ce Qui Me Meut Motion Picture

5,33

X

F2

Fr80%-Esp20%

*Baiser mortel du dragon (Le)

NAHON Christophe

Europa Corp.

20,98

X

Fr100%

Balzac et la petite tailleuse chinoise

SIEJE Daï

Productions Inter. Le Film

5,33

X

F3

Fr100%

*Bande du Drugstore (La )

ARMANET François

3B Productions

2,97

X

F2

X

Fr100%

*Bécassine

VIDAL Philippe

Home Made Movies

3,74

X

X

Fr100%

Being light

ARNOLD Pascal / BARR Jean-Marc

Toloda

1,01

X

Fr100%

Bête de miséricorde (La)

MOCKY Jean-Pierre

Mocky Delicious Products

0,29

Fr100%

Blanche

BONVOISIN Bernie

Films de la Suane

14,09

X

TF1

X

Fr100%

*Bloody Mallory

MAGNAT Julien

Fidélité Productions

3,05

X

X

Fr80%-Esp20%

Boulet (Le)

BERBERIAN Alain

La Petite Reine

24,15

X

F2, F3

Fr80%-GB20%

*Bruit, l'odeur et quelques étoiles (Le)

PITTARD Eric

Films d'Ici/Films à Lou

1,06

Fr75%-Belg25%

*Cage (La)

RAOUST Alain

Gémini Films

1,10

Fr100%

*Carnages

GLEIZE Delphine

Balthazar Productions

3,37

X

F3

X

Fr60%-Belg15%-CH15%-Esp10%

Cas Pinochet (Le)

GUZMAN Patricio

Films d'Ici/Renn Productions

0,77

X

Fr57%-Belg23%-Esp20%

Cavale

BELVAUX Lucas

Agat Films & Cie

2,42

X

X

Fr76%-Belg24%

Cerf volant (Le)

CHAHAL SABBAG Randa

Ognon Pictures

1,52

Arte

Fr80%-Liban20%

C'est le bouquet

LABRUNE Jeanne

Films Alain Sarde

5,26

X

F2

Fr100%

Chatte à deux têtes (La)

NOLOT Jacques

Elia Films

1,13

Fr100%

*Chignon d'Olga (Le)

BONNELL Jérôme

Artcam International

0,93

X

F3

X

Fr100%

Chittagong dernière escale

DESCLOZEAUX Léon

Zeaux Productions

1,13

Fr100%

Choses secrètes

BRISSEAU Jean-Claude

Aventuriers de l'Image/Sorcière rouge

1,21

Fr100%

*Comme il vient

CHIESA Christophe

LFP

0,42

Fr100%

Comme un avion

PISIER Marie-France

Léo et Compagnie

2,29

X

F3

X

Fr100%

*Crachez vos souhaits

VILLENEUVE Thierry

Capharnaüm Production

0,23

Fr100%

De l'amour

RICHET Jean-François

Why NotProd.

/Films Alain Sarde

3,15

X

Fr100%

Décalage horaire

THOMPSON Danièle

Films Alain Sarde

12,93

X

TF1

Fr100%

*Découverte du monde (La)

TAIEB Ivan

SDP Films/Jacques Le Glou Audiov.

0,91

Fr80%-It20%

Demonlover

ASSAYAS Olivier

Elizabeth Films

7,24

X

M6

X

Fr100%

Dernière lettre (La)

WISEMAN Frederick

Idéale Audience

0,86

X

Arte

Fr100%

*Des plumes dans la tête

DE THIER Thomas

JBA Production

2,36

X

Arte

X

Fr62%-Belg38%

Diables (Les)

RUGGIA Christophe

Lazennec Production

3,98

X

Arte

X

Fr100%

Dix huit ans après

SERREAU Coline

Films Alain Sarde

10,98

X

TF1

X

Fr100%

*Dix-sept fois Cécile Cassard

HONORE Christophe

Sépia Production

2,24

X

Arte

Fr100%

Djib

ODOUTAN Jean

45 RDLC

0,64

X

Fr100%

*Doulaye, une saison des pluies

IMBERT Henri-François

Libre Cours

0,21

Fr100%

Doux amour des hommes (Le)

CIVEYRAC Jean-Paul

LFP

0,94

Fr100%

Eden

GITAI Amos

Films Balenciaga

6,00

X

Fr71%-Israël19%-It10%

Electroménager

MONOD Sylvain

Gémini Films

0,92

X

Fr100%

Embrassez qui vous voulez

BLANC Michel

UGC YM

12,20

X

X

F2

X

Fr70%-GB20%-It10%

*En quête des soeurs Papin

VENTURA Claude

ARP

0,45

X

Fr100%

*Engrenage (L')

NICOTRA Franck

MN Productions

0,77

Fr100%

Enquête sur le monde invisible

ROUX Jean-Michel

Noé productions

0,94

X

Fr100%

Entre chiens et loups

ARCADY Alexandre

Alexandre Films

5,33

X

X

F2

X

Fr100%

Espérances de feu (Les)

GARREL Philippe

Why Not Productions

2,41

X

Fr80%-Pays-Bas20%

*Et si on parlait d'amour...

KARLIN Daniel

V.F. Et Assossiés

0,87

X

F2

Fr100%

Etre et avoir

PHILIBERT Nicolas

Maïa Films

1,04

X

Arte

30 490

Fr100%

*Exit

FONTANA Olivier (dit Megaton)

Avalanche Productions

1,60

X

Fr100%

Fantômes

CIVEYRAC Jean-Paul

LFP

0,34

Fr100%

Fantômes de Louba (Les)

DUGOWSON Martine

Ima Films

2,55

X

Fr100%

Femmes ou les enfants d'abord...(Les)

POIRIER Manuel

Salomé

4,13

X

F2

X

Fr84%-Esp16%

*Filles perdues, cheveux gras

DUTY Claude

Ce Qui Me Meut Motion Picture

2,97

X

F2

X

Fr100%

Filles, personne s'en méfie (Les)

SILVERA Charlotte

Louise Productions

1,06

Fr100%

*Fils de Jean-Claude Videau (Le)

VIDEAU Frédéric

Film Oblige

0,11

Fr100%

Frère du guerrier (Le)

JOLIVET Pierre

Films Alain Sarde

11,45

X

M6

X

Fr100%

*Frogz

TUNZINI Guillaume

Blackstone Pictures/Loreleï

0,76

Fr100%

*Gangsters !

MARCHAL Olivier

Ajoz Films

4,42

X

F3

X

Fr80%-Belg20%

Grande vie (La)

DAJOUX Philippe

Filmtel

1,12

Fr100%

Guerre à Paris (La)

ZAUBERMAN Yolande

Hachette 1ère et Cie

5,13

X

F3

X

Fr100%

Gunblast Vodka

DANIEL Jean-Louis

Koba Films

4,13

X

Fr100%

Homme du train (L')

LECONTE Patrice

Ciné B

5,34

X

X

Fr80%-All20%

Huit femmes

OZON François

Fidélité Productions

8,46

X

X

F2

X

Fr100%

Idole (L')

LANG Samantha

Fidélité Productions

4,57

X

Arte

X

Fr100%

Inch'allah Dimanche

BENGUIGUI Yamina

Bandits Longs

2,32

X

Fr100%

*Juliette est absente

THERON Anne

Pickpocket Productions

1,05

Fr100%

Là-haut

SCHOENDOERFFER Pierre

Euripide Productions

3,12

X

Arte, F2

X

Fr75%-Canada25%

*Légende de Parva (La)

CUBAUD Jean

Carrère Group/Pro Vision

5,32

X

Fr80%-It20%

Lise et André

DERCOURT Denis

Films à un Dollar

0,64

X

Fr100%

Lokarri

GRASSET Jean-Pierre

Atlan Films

0,57

Fr73%-Esp27%

Loup de la côte ouest

SANTIAGO Hugo

Gémini Films

2,53

X

Fr80%-Portugal20%

Lundi matin

IOSSELIANI Otar

Pierre Grise Productions

3,11

X

X

Fr80%-It20%

Ma caméra et moi

LOIZILLON Christophe

Films du Rat/La mouche du Coche

1,87

X

Fr100%

Ma femme s'appelle Maurice

POIRE Jean-Marie

Okay Films

15,70

X

F2

Fr100%

Made in the USA

ANSPACH Solveig

Point du Jour

0,59

X

Fr80%-Belg20%

Marie-Jo et ses deux amours

GUEDIGUIAN Robert

Agat Films & Cie

3,35

X

F3

X

Fr100%

Marins perdus (Les)

DEVERS Claire

Salomé

4,00

X

Arte

X

Fr100%

Mauvais genres

GIROD Francis

Ognon Pictures

3,51

X

F3

X

Fr80%-Belg20%

Mentale (La)

BOURSINHAC Manuel

Gaumont

7,70

X

TF1

Fr100%

Miroir aux oiseaux (Le)

CARPITA Paul

13 Production

0,92

Fr100%

*Monique

GUIGNABODET Valérie

Pan Européenne Production

5,17

X

X

M6

X

Fr100%

Monsieur Batignole

JUGNOT Gérard

RF2K Productions

8,86

X

X

TF1

Fr100%

Musicienne (La)

ANGELO Yves

Film par Film

3,37

X

F3

X

Fr100%

Mystery troll

ATLAN Eric

DPA/AS31

1,23

Fr100%

*Nationale 1

HEINRICH Eve

Maïa Films

2,00

X

Arte

X

Fr80%-Belg20%

Naufragés de la D17 (Les)

MOULLET Luc

Gémini Films

1,02

Fr100%

Ni pour ni contre (bien au contraire)

KLAPISCH Cédric

Vertigo Productions

9,91

X

M6

Fr100%

Nid de guêpes

SIRI Florent E.

Cinémane Films/Carrère Group

8,52

X

F2

X

Fr100%

*No man's land

TANOVIC Danis

Noé Productions

1,91

X

Fr40%-Belg20%-It20%-GB20%

Nourrir la lune

BARATIER Jacques

Wallworks

0,98

Fr100%

*Nouveau Jean-Claude (Le)

TRONCHET Didier

Epithète Films

4,12

X

M6

X

Fr100%

*Nouvel ordre mondial

DIAZ Philippe

Sceneries Europe

0,20

Fr100%

Novo

LIMOSIN Jean-Pierre

Lumen Films

3,24

X

Fr60%-Esp20%-CH20%

*Origine du monde (L')

ENRICO Jérôme

Caroline Prod./

Haymann-Reus Prod.

1,13

Fr100%

Other worlds

KOUNEN Jan

Ajoz Films

0,72

X

Fr100%

Paria

KLOTZ Nicolas

Nosy be Productions

0,46

Fr100%

Paris selon Moussa

DOUKOURE Cheik

Films de l'Alliance

1,20

Fr60%-Guinée40%

*Parlez-moi d'amour

MARCEAU Sophie

Ciné Valse

3,81

X

Fr100%

Passage du milieu

DESLAURIERS Guy

Kreol Productions

0,54

Fr100%

*Peau d'ange

PEREZ Vincent

Europa Corp.

4,52

X

TF1

Fr100%

*Pharmacien de garde (Le)

VEBER Jean

Orly Films

5,33

X

TF1

X

Fr100%

Plus petit que la vie

WATERHOUSE Rémi

Magouric Productions

4,12

X

M6

X

Fr100%

*Pollux, mon équipière

de combat

PAGES Luc

Magouric Productions

3,05

X

F3

X

Fr100%

*Prophétie des grenouilles (La)

GIRERD Jacques-Rémy

Folimage-Valence Production

5,34

X

F2

Fr100%

Quelqu'un de bien

TIMSIT Patrick

Films Alain Sarde

9,91

X

TF1

X

Fr100%

*Racines

COPANS Richard

Films d'Ici

0,78

Fr100%

Raid (Le)

BENSALAH Djamel

Gaumont

17,71

X

TF1

Fr100%

Repentie (La)

MASSON Laetitia

ARP

9,94

X

F3

Fr100%

*Requiem

RENOH Hervé

Fidélité Productions

1,90

X

60 980

Fr100%

*Requin (Le)

LOPES-CURVAL Julie

Sombrero Productions

1,35

X

X

Fr100%

Rois mages (Les)

BOURDON Didier / CAMPAN Bernard

Renn Productions/Katharina

11,82

X

TF1

Fr100%

Royal bonbon

NAJMAN Charles

Films du Requin

1,08

Fr73%-Canada27%

Rue des plaisirs

LECONTE Patrice

Ciné B

13,35

X

TF1

X

Fr100%

Rue du retrait

FERET René

Films Alyne

0,30

Fr100%

*Samouraïs

GEDERLINI Giordano

Fidélité Productions

7,62

X

M6

Fr100%

*Sanary : ultime étape avant l'oubli

HENRICHS Bertina

Le Mur du son Cinéma

0,79

Fr60%-CH20%-All20%

Sansara

SIEGFRIED

Initial Productions

1,97

60 980

Fr80%-Esp20%

*Satin rouge

AMARI Raja

ADR Productions

1,15

X

Arte

Fr60%-Tunisie40%

Scènes intimes

BREILLAT Catherine

Flach Film

2,30

X

Arte

X

Fr100%

Schimkent Hôtel

DE MEAUX Charles

Anna Sanders Films

0,30

Fr71%-GB29%

Selon Matthieu

BEAUVOIS Xavier

Why Not Prod./Films Alain Sarde

3,06

X

Arte

Fr100%

Serbie année zéro

MARKOVIC Goran

Films du Lendemain

0,92

X

Arte

Fr80%-Yougoslavie20%

Sexes très opposés

ASSOUS Eric

Kien Productions

2,26

X

X

Fr80%-Belg20%

*Sexy boys

KAZANDJIAN Stéphane

Delante Films

3,72

X

M6

X

Fr100%

Singe (Le)

ABDYKALYKOV Aktan

Noé Productions

0,90

X

Fr80%-Kirghiztan20%

Sirène rouge (La)

FONTANA Olivier (dit Megaton)

Haut et Court

5,95

X

F2

Fr100%

*Slogans

XHUVANI Gjergj

Films des Tournelles

0,62

Fr100%

Sobibor, 14 octobre 1943, 16 heures

LANZMANN Claude

Why Not Productions

0,84

X

F2

X

Fr100%

*Sueurs

COUVELAIRE Louis Pascal

Davis films

6,92

X

Fr100%

Sur mes lèvres

AUDIARD Jacques

SEDIF/Ciné B

7,37

X

F2

Fr100%

Swing

GATLIF Tony

Princes films

2,28

X

Fr100%

*T.I.C

LOCQUET Philippe

Extravaganza

1,13

Fr100%

Tanguy

CHATILLEZ Etienne

Téléma

16,74

X

TF1

Fr100%

Taxi 3

KRAWCZYK Gérard

Europa Corp.

14,49

X

TF1

Fr100%

The pianist

POLANSKI Roman

RP Productions

38,16

X

F2

Fr53%-GB20%-All20%-Pologne7%

Too much flesh

BARR Jean-Marc / ARNOLD Pascal

Toloda

1,18

X

Fr100%

*Total kheops

BEVERINI Alain

Ognon Pictures

2,29

X

F2

Fr100%

Traversée (La)

LIFSHITZ Sébastien

Lancelot Films

0,64

Fr100%

Un couple épatant

BELVAUX Lucas

Agat Films & Cie

2,42

X

X

Fr76%-Belg24%

Un homme sans l'occident

DEPARDON Raymond

Double D copyright Films

2,12

X

Fr100%

Un jeu d'enfants

TUEL Laurent

Fidélité Productions

1,92

X

60 980

Fr100%

Un jour viendra

CALBERAC Ivan

TNVO

2,00

X

M6

Fr100%

*Un moment de bonheur

SANTANA Antoine

ADR Productions

1,33

X

Fr100%

Un petit cas de conscience

TREILHOU Marie-Claude

Tourne Sol Films/Films de la Boissière

1,12

X

Fr100%

Un voyage entre amis

BECCU Pierre

Bas Canal Productions

1,27

Fr100%

Une affaire privée

NICLOUX Guillaume

Little Bear

3,95

X

TF1

X

Fr100%

*Une affaire qui roule

VENIARD Eric

Films du Kiosque

1,25

Fr100%

Une employée modèle

OTMEZGUINE Jacques

Mazel Productions

3,47

X

Fr100%

Une femme de ménage

BERRI Claude

Hirsch/Renn Productions

8,58

X

TF1

Fr100%

Une pure coïncidence

GOUPIL Romain

Films du Losange

2,11

X

Fr100%

Va, petit*e

GUESNIER Alain

Maïa Films/Agora Films

1,91

Fr80%-Belg20%

Vache merveilleuse (La)

ROUCH Jean

AMIP

0,35

Fr100%

Vendredi soir

DENIS Claire

Aréna

5,32

X

F2

X

Fr100%

Ventre de Juliette (Le)

PROVOST Martin

Alta Loma Films/Productions Bagheera

2,48

X

Fr80%-Esp20%

*Vertiges de l'amour

CHOUCHAN Laurent

Epithète Films

3,84

X

M6

X

Fr100%

Vie nue (La)

BOCCAROSSA Dominique

Ognon Pictures

1,00

Fr100%

Vie promise (La)

DAHAN Olivier

La Chauve-Souris

4,97

X

F2

Fr100%

Wasabi

KRAWCZYK Gérard

Europa Corp.

15,27

X

TF1

Fr100%

En gras les films ayant reçu l'agrément de production.

*  premier film

Films minoritaires français agréés en 2001

Titre

Réalisateur

Producteur Délégué

Devis (M€)

C+

TPS

Chaînes

Sofica

Pays coproducteurs

Alexandrie, une histoire d'amour

ILIOU Maria

Rosem Distribution

2,63

Grèce54%-Fr27%-It20%

Bijou de famille ou le principe de l'incertitude

DE OLIVEIRA Manoel

Gémini Films

2,70

X

Portugal70%-Fr30%

Boccanera

CRIALESE Emanuele

Films des Tournelles

3,11

X

It80%-Fr20%

Callas for ever

ZEFFIRELLI Franco

Galfin

17,91

X

F2

It90%-Fr10%

Chambre du fils (La)

MORETTI Nanni

StudioCanal France

3,98

X

It70%-Fr30%

Clairières de lune (Les)

MINAIEV Igor

Artcam International

0,91

Russie52%-Fr48%

Conseil d'Egypte (Le)

GRECO Emidio

SDP Films

5,48

It90%-Fr10%

Couilles de l'éléphant (Les)

KOUMBA BIDIDI Henri Joseph

Adélaïde Productions

1,28

Cameroun62%-Fr38%

Double down

JORDAN Neil

TNVO

30,53

GB60%-Fr40%

Enfant qui voulait être un ours (L')

HASTRUP Jannik

Les Armateurs

4,28

X

F3

Danemark59%-Fr41%

Fils (Le)

DARDENNE Luc / DARDENNE Jean-Pierre

Archipel 35

2,65

X

Belg62%-Fr38%

*Fils de Marie (Les)

LAURE Carole

Toloda

1,22

X

Canada64%-Fr36%

Fleurs de sang

TANNER Alain / MEZIERES Myriam

Gémini Films

0,91

CH65%-Fr25%-Esp10%

Garage Olimpo

BECHIS Marco

Paradis Films

2,82

It80%-Fr20%

Heist

PIRES Gérard

Mandarin

12,77

M6

Canada60%-Fr20%-GB20%

Maison de fous (La)

KONCHALOVSKY Andreï

Hachette 1ère et Cie

2,36

X

Russie80%-Fr20%

Mer (La)

KORMAKUR Baltasar

Emotion Pictures

2,27

Islande70%-Fr30%

Nha Fala

GOMES Flora

Films de Mai

2,21

Portugal54%-Fr24%-Lux21%

Oligarque (L')

LOUNGUINE Pavel

CDP

5,42

X

Arte, F2

Russie51%-Fr49%

Pau et son frère

RECHA Marc

JBA Production

1,80

Esp80%-Fr20%

Pauline et Paulette

DEBRAUWER Lieven

K-Star

2,22

Belg75%-Fr25%

Petites couleurs (Les)

PLATTNER Patricia

Gémini Films

2,25

X

CH55%-Fr45%

Portrait de famille

OZPETEK Ferzan

Films Balenciaga

2,89

It80%-Fr20%

Quicksand

MACKENZIE John

Capitole Productions

10,78

GB78%-Fr22%

Rêve de métal

CORNILIOS Nikos

Sunday Morning Productions

1,03

Grèce80%-Fr20%

Saisons de l'amour (Les)

CAMPIOTTI Giacomo

Noé Productions

4,07

X

It60%-Fr20%-GB20%

Sans nouvelles de Dieu

DIAZ YANES Agustin

DMVB Films

6,16

X

F2

Esp80%-Fr20%

Sortilège de Shanghaï (Le)

TRUEBA Fernando

Orsans Productions

5,75

Esp90%-Fr10%

South Kensington

VANZINA Carlo

Filmtel

8,71

F2

It80%-Fr20%

Troisième acte (Le)

COMENCINI Francesca

Films d'Ici

1,80

Arte

It80%-Fr20%

Troisième oeil (Le)

FRAIPONT Christophe

Gaïa Films

1,07

Belg77%-Fr23%

*Une part du ciel

LIENARD Bénédicte

JBA Production

2,06

X

Arte, F2

Belg50%-Fr50%

*  premier film Films d'initiative française agréés en 2001, ayant eu l'avance sur recettes, avant ou après réalisation.

Titre

Réalisateur

Producteur Délégué

Devis (M€)

Rang 1 ( * )

A/R

C+

TPS

Chaînes

Sofica

Pays coproducteurs

Adieu pays

RAMOS Philippe

Sésame Films SA

0,88

1

avant

Fr100%

Amants du Nil (Les)

HEUMANN Eric

Paradis

4,34

2

après

X

X

Fr80%-It20%

Après la tempête, portrait d'une femme...

VAN EFFENTERRE Joële

Mallia Films

0,14

1

après

Fr100%

Après la vie

BELVAUX Lucas

Agat Films & Cie

2,42

3

avant

X

X

Fr76%-Belg24%

Bête de miséricorde (La)

MOCKY Jean-Pierre

Mocky Delicious Products

0,29

3

après

Fr100%

Bruit, l'odeur et quelques étoiles (Le)

PITTARD Eric

Films d'Ici/Films à Lou

1,06

1

avant

Fr75%-Belg25%

Cage (La)

RAOUST Alain

Gémini Films

1,10

1

avant

Fr100%

Carnages

GLEIZE Delphine

Balthazar Productions

3,37

1

avant

X

F3

X

Fr60%-Belg15%-CH15%-Esp10%

Cas Pinochet (Le)

GUZMAN Patricio

Films d'Ici/Renn Productions

0,77

3

après

X

Fr57%-Belg23%-Esp20%

Cavale

BELVAUX Lucas

Agat Films & Cie

2,42

3

avant

X

X

Fr76%-Belg24%

Chatte à deux têtes (La)

NOLOT Jacques

Elia Films

1,13

3

avant

Fr100%

Choses secrètes

BRISSEAU Jean-Claude

Aventuriers de l'Image/Sorcière rouge

1,21

3

avant

Fr100%

Comme il vient

CHIESA Christophe

LFP

0,42

1

après

Fr100%

Comme un avion

PISIER Marie-France

Léo et Compagnie

2,29

2

avant

X

F3

X

Fr100%

Dernière lettre (La)

WISEMAN Frederick

Idéale Audience

0,86

3

avant

X

Arte

Fr100%

Des plumes dans la tête

DE THIER Thomas

JBA Production

2,36

1

avant

X

Arte

X

Fr62%-Belg38%

Diables (Les)

RUGGIA Christophe

Lazennec Production

3,98

2

avant

X

Arte

X

Fr100%

Dix-sept fois Cécile Cassard

HONORE Christophe

Sépia Production

2,24

1

avant

X

Arte

Fr100%

Djib

ODOUTAN Jean

45 RDLC

0,64

2

après

X

Fr100%

Doulaye, une saison des pluies

IMBERT Henri-François

Libre Cours

0,21

1

Fr100%

Doux amour des hommes (Le)

CIVEYRAC Jean-Paul

LFP

0,94

3

avant

Fr100%

Electroménager

MONOD Sylvain

Gémini Films

0,92

2

après

X

Fr100%

En quête des soeurs Papin

VENTURA Claude

ARP

0,45

1

après

X

Fr100%

Engrenage (L')

NICOTRA Franck

MN Productions

0,77

1

après

Fr100%

Espérances de feu (Les)

GARREL Philippe

Why Not Productions

2,41

3

avant

X

Fr80%-Pays-Bas20%

Etre et avoir

PHILIBERT Nicolas

Maïa Films

1,04

3

avant

X

Arte

30 490

Fr100%

Fantômes

CIVEYRAC Jean-Paul

LFP

0,34

3

après

Fr100%

Femmes ou les enfants d'abord...(Les)

POIRIER Manuel

Salomé

4,13

3

avant

X

F2

X

Fr84%-Esp16%

Filles, personne s'en méfie (Les)

SILVERA Charlotte

Louise Productions

1,06

3

après

Fr100%

Fils de Jean-Claude Videau (Le)

VIDEAU Frédéric

Film Oblige

0,11

1

après

Fr100%

Guerre à Paris (La)

ZAUBERMAN Yolande

Hachette 1ère et Cie

5,13

3

avant

X

F3

X

Fr100%

Huit femmes

OZON François

Fidélité Productions

8,46

3

avant

X

X

F2

X

Fr100%

Inch'allah Dimanche

BENGUIGUI Yamina

Bandits Longs

2,32

2

après

X

Fr100%

Juliette est absente

THERON Anne

Pickpocket Productions

1,05

1

avant

Fr100%

Là-haut

SCHOENDOERFFER Pierre

Euripide Productions

3,12

3

avant

X

Arte, F2

X

Fr75%-Canada25%

Lise et André

DERCOURT Denis

Films à un Dollar

0,64

2

après

X

Fr100%

Loup de la côte ouest

SANTIAGO Hugo

Gémini Films

2,53

3

avant

X

Fr80%-Portugal20%

Lundi matin

IOSSELIANI Otar

Pierre Grise Productions

3,11

3

avant

X

X

Fr80%-It20%

Ma caméra et moi

LOIZILLON Christophe

Films du Rat/La mouche du Coche

1,87

2

avant

X

Fr100%

Made in the USA

ANSPACH Solveig

Point du Jour

0,59

2

avant

X

Fr80%-Belg20%

Marie-Jo et ses deux amours

GUEDIGUIAN Robert

Agat Films & Cie

3,35

3

avant

X

F3

X

Fr100%

Marins perdus (Les)

DEVERS Claire

Salomé

4,00

3

avant

X

Arte

X

Fr100%

Miroir aux oiseaux (Le)

CARPITA Paul

13 Production

0,92

3

avant

Fr100%

Naufragés de la D17 (Les)

MOULLET Luc

Gémini Films

1,02

3

avant

Fr100%

Nourrir la lune

BARATIER Jacques

Wallworks

0,98

3

avant

Fr100%

Novo

LIMOSIN Jean-Pierre

Lumen Films

3,24

3

avant

X

Fr60%-Esp20%-CH20%

Origine du monde (L')

ENRICO Jérôme

Caroline Prod./Haymann-Reus Prod.

1,13

1

après

Fr100%

Paria

KLOTZ Nicolas

Nosy be Productions

0,46

2

après

Fr100%

Paris selon Moussa

DOUKOURE Cheik

Films de l'Alliance

1,20

3

avant

Fr60%-Guinée40%

Passage du milieu

DESLAURIERS Guy

Kreol Productions

0,54

2

après

Fr100%

Prophétie des grenouilles (La)

GIRERD Jacques-Rémy

Folimage-Valence Production

5,34

1

avant

X

F2

Fr100%

Racines

COPANS Richard

Films d'Ici

0,78

1

avant

Fr100%

Requin (Le)

LOPES-CURVAL Julie

Sombrero Productions

1,35

1

avant

X

X

Fr100%

Royal bonbon

NAJMAN Charles

Films du Requin

1,08

2

avant

Fr73%-Canada27%

Sanary : ultime étape avant l'oubli

HENRICHS Bertina

Le Mur du son Cinéma

0,79

1

avant

Fr60%-CH20%-All20%

Scènes intimes

BREILLAT Catherine

Flach Film

2,30

3

avant

X

Arte

X

Fr100%

Sur mes lèvres

AUDIARD Jacques

SEDIF/Ciné B

7,37

3

avant

X

F2

Fr100%

Swing

GATLIF Tony

Princes films

2,28

3

avant

X

Fr100%

Traversée (La)

LIFSHITZ Sébastien

Lancelot Films

0,64

2

avant

Fr100%

Un couple épatant

BELVAUX Lucas

Agat Films & Cie

2,42

3

avant

X

X

Fr76%-Belg24%

Un homme sans l'occident

DEPARDON Raymond

Double D copyright Films

2,12

3

avant

X

Fr100%

Un moment de bonheur

SANTANA Antoine

ADR Productions

1,33

1

avant

X

Fr100%

Un petit cas de conscience

TREILHOU Marie-Claude

Tourne Sol Films/Films de la Boissière

1,12

3

avant

X

Fr100%

Un voyage entre amis

BECCU Pierre

Bas Canal Productions

1,27

2

après

Fr100%

Une affaire qui roule

VENIARD Eric

Films du Kiosque

1,25

1

avant

Fr100%

Une pure coïncidence

GOUPIL Romain

Films du Losange

2,11

3

avant

X

Fr100%

Vache merveilleuse (La)

ROUCH Jean

AMIP

0,35

3

avant

Fr100%

Vendredi soir

DENIS Claire

Aréna

5,32

3

avant

X

F2

X

Fr100%

Vie nue (La)

BOCCAROSSA Dominique

Ognon Pictures

1,00

3

avant

Fr100%

Films minoritaires français agréés en 2001, ayant eu l'avance sur recettes, avant ou après réalisation.

Titre

Réalisateur

Producteur Délégué

Devis (M€)

Rang*

A/R**

C+

TPS

Chaînes

Sofica

Pays coproducteurs

Fils (Le)

DARDENNE Luc / DARDENNE Jean-Pierre

Archipel 35

2,65

3

avant

X

Belg62%-Fr38%

Pau et son frère

RECHA Marc

JBA Production

1,80

après

Esp80%-Fr20%

Une part du ciel

LIENARD Bénédicte

JBA Production

2,06

1

avant

X

Arte, F2

Belg50%-Fr50%

DONNÉES COMPLÉMENTAIRES SUR L'ÉCONOMIE DES ENTREPRISES CINÉMATOGRAPHIQUES

extraites de l'enquête annuelles de l'INSEE

dans les entreprises de service

(année 2000)Comparaison des chiffres d'affaires des entreprises cinématographiques

avec ceux des autres entreprises du secteur audiovisuel

Chiffres d'affaires (M€)

1996

2000

Télévision hertzienne

4657

5919

Chaînes thématiques et locales

404

1155

Ensembliers du câble et du satellite

465

1533

Production cinématographique

539

873

Production de programmes télévisuels de flux

433

529

Production de programmes télévisuels de stock

689

884

Production de commande

603

858

Prestations techniques

967

1329

Distribution de films

536

842

distribution de programmes TV et autres activités de distribution

410

500

Exploitation de salles

715

950

Edition vidéo

683

857

Ensemble de l'audiovisuel

11 101

16 229 122 ( * )

Source : INSEE / CNC / DDM .les entreprises de l'audiovisuel . août 2002 Retraitement

Autres données sur les entreprises cinématographiques

Nombre d'entreprises

1996

2000

Production cinématographique

775

882

Distribution

325

350

Exploitation

673

793

Total

1 773

2 025

Source : INSEE - EAE / CNC / DDM

Valeur ajoutée (M€)

1996

2000

Production cinématographique

454

647

Distribution

331

306

Exploitation

243

359

Total

1 028

1 312

Source : INSEE - EAE / CNC / DDM

Rémunérations totales (M€)

1996

2000

Production cinématographique

125

154

Distribution

60

70

Exploitation

120

158

Total

305

382

Source : INSEE - EAE / CNC / DDM

Les entreprises de production cinématographique

Valeurs en millions d'euros

1996

1997

1998

1999

2000

Situation des entreprises

Nombre d'entreprises (unités)

775

777

891

869

882

Production totale 1 ( * )

785

876

861

924

1 177

Evolution n/n-1

-

+11,6%

-1,8%

+7,4%

+27,3%

dont :

Chiffre d'affaires

539

569

563

661

873

Production immobilisée

240

307

287

255

302

Production moyenne par entreprise (k€)

1 013

1 128

966

1 064

1 334

Consommations intermédiaires

331

367

414

399

530

Valeur ajoutée

454

509

447

525

647

Valeur ajoutée moyenne par entreprise (k€)

586

655

502

604

733

Valeur ajoutée / production totale

57,9%

58,1%

51,9%

56,8%

54,9%

Frais de personnel

173

198

203

196

229

Excédent brut d'exploitation

311

340

259

343

423

Investissements corporels

11

7

11

10

12

Rémunérations totales

126

-

139

-

154

dont :

Rémunérations des salariés permanents

38

-

38

-

43

Ventilation des produits

Production de films cinéma

422

462

427

569

712

Evolution n/n-1

-

+9,3%

-7,5%

+33,2%

+25,2%

dont :

Remontées recettes guichets et recettes en provenance des distributeurs

123

129

85

120

91

Ventes de films aux chaînes

53

72

69

104

143

Préventes de films aux chaînes

135

121

122

144

201

Ventes & préventes de films à la vidéo

17

20

16

33

59

Ventes & préventes de films à l'étranger

56

70

56

123

101

Autres recettes de production(ciné & T.V.)

38

50

80

44

118

Recettes de distribution

72

60

70

19

29

Autres recettes

45

47

65

74

132

Total

539

569

563

661

873

Source : CNC / DDM.

Les principales entreprises de production cinématographique en 2000

ALICELEO

LA CHAUVE SOURIS

ARENA FILMS

LEGENDE ENTREPRISES

CINE VALSE

LES FILMS ALAIN SARDE

EPITHETE FILMS

LES PRODUCTIONS LAZENNEC

EURIPIDE PRODUCTIONS

RENN PRODUCTIONS

FILM PAR FILM

SALOME

FILMS CHRISTIAN FECHNER

LES FILMS DU LOSANGE

FLACH FILM

STUDIOCANAL FRANCE

GALATEE FILMS

TF1 FILMS PRODUCTION

GEMINI FILMS

UGC IMAGES

ICE 3

UGC YM

IMA FILMS

WHY NOT PRODUCTIONS

JEM PRODUCTIONS

La concentration en 2000 (en % de la production totale)

Les 5 premières : 25%

Les 10 premières : 33%

Les 25 premières : 47%

Les entreprises de distribution

Valeurs en millions d'euros

1996

1997

1998

1999

2000

Situation des entreprises

Nombre d'entreprises (unités)

325

290

338

346

315

Production totale 1 ( * )

1 012

1 054

1 304

1 243

1 369

Evolution n/n-1

-

+4,2%

+23,7%

-4,7%

+10,2%

dont :

Chiffre d'affaires

946

1 004

1 246

1 187

1 342

Production immobilisée

62

51

60

55

27

Production moyenne par entreprise (k€)

3 113

3 634

3 857

3 591

4 346

Consommations intermédiaires

680

790

918

915

1 063

Valeur ajoutée

331

264

386

327

306

Valeur ajoutée moyenne par entreprise (k€)

1 020

909

1 142

946

971

Valeur ajoutée / production totale

32,8%

25,0%

29,6%

26,3%

22,4%

Frais de personnel

85

89

102

96

104

Excédent brut d'exploitation

253

179

285

231

201

Investissements corporels

8

18

16

6

5

Rémunérations totales

60

-

72

-

69

dont :

Rémunérations des salariés permanents

55

-

66

-

66

Ventilation des produits

Recettes de distribution

842

906

1 128

1 055

1 253

Evolution n/n-1

-

+7,6%

+24,5%

-6,5%

+18,8%

dont :

Remontées de recettes des salles

327

288

348

337

343

Distribution de films cinéma aux chaînes

114

174

253

252

225

Distribution de films cinéma à la vidéo

36

43

57

70

115

Commissions sur films cinéma

10

22

40

41

66

Distribution de films cinéma à l'étranger

49

61

104

63

93

Distribution de programmes TV

132

135

116

100

108

Commercialisation de portefeuilles de droits

124

122

184

167

250

Autres recettes de distribution

51

61

26

24

53

Autres recettes

103

98

118

132

89

Total

946

1 004

1 246

1 187

1 342

Source : CNC / DDM.

Les principales entreprises de distribution (cinéma et TV) en 2000

AB DROITS AUDIOVISUEL

SPECTACLE

BAC FILMS

STUDIOCANAL IMAGE

BUENA VISTA INTERNATIONAL FRANCE (BVI)

TF1 INTERNATIONAL

COLUMBIA TRISTAR FILMS FRANCE

TWENTIETH CENTURY FOX FRANCE

PRODUCTION EDITION CINEMA FRANCAISE (PECF)

WALT DISNEY COMPANY (FRANCE)

La concentration en 2000 (en % de la production totale)

Les 3 premières : 27%

Les 10 premières : 59%

Les entreprises dont l'activité principale est la distribution en salles

Valeurs en millions d'euros

1996

1997

1998

1999

2000

Situation des entreprises

Nombre d'entreprises (unités)

99

92

99

109

100

Production totale 1 ( * )

517

519

612

587

633

Evolution n/n-1

-

+0,5%

+17,8%

-4,0%

+7,8%

dont :

Chiffre d'affaires

473

488

574

561

614

Production immobilisée

43

33

38

26

19

Production moyenne par entreprise (k€)

5 219

5 643

6 180

5 387

6 333

Consommations intermédiaires

381

420

484

498

552

Valeur ajoutée

136

99

128

89

81

Valeur ajoutée moyenne par entreprise (k€)

1 373

1 077

1 289

817

813

Valeur ajoutée / production totale

26,3%

19,1%

20,9%

15,2%

12,8%

Frais de personnel

34

39

40

36

37

Excédent brut d'exploitation

109

64

90

55

46

Investissements corporels

1

4

4

2

2

Rémunérations totales

24

-

28

-

27

dont :

Rémunérations des salariés permanents

23

-

27

-

26

Ventilation des produits

Recettes de distribution

461

476

547

547

603

Evolution n/n-1

-

+3,3%

+15,0%

-0,1%

+10,2%

dont :

Remontées de recettes des salles

313

269

319

293

314

Distribution de films cinéma à la vidéo

18

26

27

38

43

Distribution de films cinéma aux chaînes

59

80

121

108

104

Distribution de programmes TV

20

33

44

57

75

Commissions sur films cinéma

8

19

20

16

30

Distribution de films cinéma à l'étranger

9

5

4

6

22

Commercialisation de portefeuilles de droits

7

8

1

16

0

Autres recettes de distribution

26

36

11

14

13

Autres recettes

12

12

27

14

12

Total

473

488

574

561

614

Source : CNC / DDM.

Les entreprises d'exploitation de salles

Valeurs en millions d'euros

1996

1997

1998

1999

2000

Situation des entreprises

Nombre d'entreprises (unités)

673

619

682

746

793

Production totale (hors TSA) 123 ( * )

806

890

1 038

1 063

1 007

Evolution n/n-1

-

+10,4%

+16,5%

+2,4%

-5,3%

dont :

Chiffre d'affaires

715

837

951

959

950

Production immobilisée

91

54

87

104

56

Production moyenne par entreprise (k€)

1 198

1 438

1 521

1 425

1 269

Consommations intermédiaires

563

544

707

680

648

Valeur ajoutée (hors TSA)

243

346

331

383

359

Valeur ajoutée moyenne par entreprise (k€)

361

559

485

513

453

Valeur ajoutée / production totale

30,2%

38,9%

31,9%

36,0%

35,7%

Frais de personnel

170

177

202

219

217

Excédent brut d'exploitation (hors TSA)

89

174

157

165

148

Investissements corporels

123

177

219

93

133

Rémunérations totales

120

-

147

-

158

dont :

Rémunérations des salariés permanents

115

-

146

-

152

Ventilation des produits

Recettes d'exploitation (hors TSA)

625

678

808

758

798

Evolution n/n-1

-

+8,5%

+19,1%

-6,2%

+5,3%

dont :

Recettes nettes aux guichets

555

585

686

629

669

Confiseries

34

49

58

64

69

Recettes de publicité

16

18

22

33

31

Autres recettes d'exploitation de salles

20

27

43

32

28

Recettes de distribution

43

124

80

122

82

%Recettes de production

30

22

28

31

23

Autres recettes

17

12

36

47

48

Total

715

837

951

959

950

Source : CNC / DDM.

Les principales entreprises d'exploitation en 2000

CTV INTERNATIONAL

GAUMONT

KINEPOLIS

LES IMAGES

MK2 VISION

PATHE

STE RENNAISE DE DIFFUSION CINEMA (SOREDIC)

UGC

La concentration en 2000 (en % de la production totale))

Les 5 premières : 43% Les 10 premières : 49%

Compte de résultat agrégé des grandes entreprises de l'audiovisuel en 2000

millions d'euros

Production

Cinématographique

Distribution

Cinéma et TV

Exploitation en salles

Nombre total d'entreprises dans le secteur

882

315

793

Nombre d'entreprises étudiées

40

40

52

% des entreprises du secteur

% CA du secteur

5%

47%

13%

89%

7%

62%

Produits d'exploitation

729

1 379

704

dont:

Chiffres d'affaires

413

1 196

591

Production immobilisée

178

10

45

Production stockée

-2

1

-1

Subventions d'exploitation

14

9

26

Charges d'exploitation

723

1 320

792

dont:

Consommations intermédiaires

299

979

430

Charges de personnel

102

69

126

Impôts et taxes

7

10

19

Amortissements et provisions

267

247

200

Autres charges diverses

49

14

16

Résultat d'exploitation

6

59

-88

Compte financier

Produits financiers

34

46

31

Charges financières

47

47

61

Résultat financier

-13

-1

-29

Produits exceptionnels

46

248

121

Charges exceptionnelles

45

96

53

Résultat exceptionnel

1

152

68

Résultat total

-6

209

-49

Valeur ajoutée brute

291

228

206

Investissements corporels

3

3

74

Résultat total / Prod. Expl.

-0,8%

15,2%

-7,0%

Source : CNC / DDM.

Principales publications sur le secteur de l'audiovisuel s'appuyant sur les résultats des Enquêtes Annuelles d'Entreprise de l'INSEE.

Les Entreprises de l'audiovisuel

Résultats 1996-2000

DDM, CNC

Edition CNC

Les Entreprises de l'audiovisuel

Résultats 1989-1997

SJTIC, CNC

Edition CNC

Les Indicateurs statistiques de l'audiovisuel

Edition 2001

DDM, CNC, CSA, INA

Edition La documentation Française

Le compte économique de l'audiovisuel

La base 1989-1996

(juin 1999)

SJTIC, CNC, INA

Edition SJTIC

LES OBLIGATIONS DES CHAÎNES EN MATIÈRE DE SOUTIEN À LA PRODUCTION CINÉMATOGRAPHIQUE

Les obligations des chaînes

Le 3° de l'article 27 et l'article 71 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée prévoient que les principes généraux définissant les obligations des éditeurs de services diffusés par voie hertzienne terrestre en matière de contribution à la production cinématographique et audiovisuelle ainsi que l'indépendance des producteurs à l'égard des diffuseurs sont fixés par un décret en Conseil d'État.

Les obligations imposées aux diffuseurs constituent des mesures à visées à la fois culturelles et pro-concurrentielles. Dans un contexte d'inégal développement entre diffuseurs et producteurs, elles tendent en effet à élargir le marché de la production, à développer un tissu diversifié d'entreprises de création et à limiter les risques d'intégration verticale entre les chaînes et la production audiovisuelle et cinématographique.

La loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 détermine dans une nouvelle rédaction de l'article 71, les critères permettant de définir l'indépendance des oeuvres cinématographiques et de l'entreprise de production. Ces dispositions législatives ont pour objectif de favoriser la circulation des oeuvres et leurs exploitations secondaires en limitant les droits exclusifs et de permettre ainsi une meilleure exposition des oeuvres.

Le décret d'application, qui intervient pour l'application du 3° de l'article 27 et de l'article 71 et vient se substituer au décret n° 90-67 du 17 janvier 1990 modifié 124 ( * ) , comporte des mesures visant à encourager le développement et l'indépendance des secteurs de la production cinématographique.

Les règles applicables à la production dite indépendante ont été complétées par des dispositions de portée plus générale prises en application du nouveau 4° de l'article 27 relatif à « l'acquisition des droits de diffusion, selon les différents modes d'exploitation, et la limitation de la durée de ces droits lorsqu'ils sont exclusifs ».

L'ensemble de ces dispositions était applicable à partir de l'exercice 2002

1. La situation avant les nouveaux décrets

Le décret n°90-67 du 17 janvier 1990 définissait en son titre II (articles 2 à 7), le régime de la contribution des diffuseurs au développement de la production cinématographique. Ces derniers devaient consacrer un minimum de 3 % de leur chiffre d'affaires annuel net de l'exercice précédent à la production d'oeuvres cinématographiques européennes dont 2,5% au moins à la production d'oeuvres cinématographiques d'expression originale française.

Pour la réalisation de cette obligation, les diffuseurs ne pouvaient intervenir comme coproducteurs d'oeuvres cinématographiques que par l'intermédiaire d'une filiale spécialisée. Les dépenses prises en compte regroupaient à la fois les apports en parts de producteur de la filiale cinématographique et les préachats de droits de diffusion exclusifs effectués par le diffuseur, société mère de cette filiale.

Les dépenses des diffuseurs n'étaient prises en compte, au titre de ces obligations, qu'à la double condition, pour chaque film concerné, de ne pas dépasser la moitié du coût total de la production et de ne pas être constituées pour plus de moitié de parts de producteur.

Ce dispositif avait été complété par un décret n°99-189 du 11 mars 1999 qui prévoyait que les diffuseurs devaient consacrer, au moins 75 % de leur contribution au développement de la production cinématographique, à des oeuvres produites par des entreprises indépendantes 125 ( * ) .

2. Les mesures nouvelles

Si n'est pas apparu nécessaire d'augmenter le taux de la contribution des diffuseurs en clair en faveur de la production cinématographique, le dispositif adopté depuis le décret du 11 ars 1999 en faveur de la production indépendante a été considéré comme insuffisant.

Actuellement trois sociétés de production ont des liens capitalistiques avec TF1 (Film par film, Les films Ariane et plus récemment Téléma) et une avec M6 (la Société Nouvelle de Cinématographie). Pour les exercices 1999 et 2000, l'ensemble des investissements effectués par les diffuseurs a été dirigé vers des oeuvres produites par des entreprises indépendantes. Ceci tenait pour partie à des effets de calendrier de comptabilisation et il semblait utile pour l'avenir de fixer un plafond aux engagements pris par les chaînes vis-à-vis des partenaires auxquels elles sont liées.

Mais la question de l'indépendance de la production portait cependant au moins autant sur les conditions d'intervention des diffuseurs dans le financement des oeuvres elles-mêmes. En dehors de tout lien capitalistique avec la société de production, l'éditeur de service peut en effet, placer sous sa dépendance économique la production qu'il contribue à financer, s'il impose des paiements trop tardifs ou une prise excessive de droits secondaires ou de mandats de commercialisation. Sur ce dernier point, la création de filiales de distribution par tous les diffuseurs, les conduit à négocier lorsqu'ils sont coproducteurs, des droits secondaires ou des mandats.

C'est pourquoi, de nouveaux critères ont été introduits concernant les oeuvres tenues pour indépendantes, limitant l'étendue des droits secondaires et des mandats de commercialisation détenus à leur égard par les diffuseurs ou leurs filiales. Ces mesures devaient permettre aux producteurs d'assurer une meilleure présence de leurs oeuvres sur le marché, le maintien d'un tissu de sociétés de production indépendantes, en mesure de se constituer des actifs suffisants, ayant été considéré en outre comme le garant d'une offre cinématographique créative et diversifiée.

Des règles minimales concernant les délais de paiements sont par ailleurs apparues nécessaires pour l'ensemble de la contribution des diffuseurs à la production cinématographique en vue d'alléger les frais financiers des producteurs.

Enfin, l'un des principaux éléments de faiblesse économique de la production cinématographique française et européenne tenant aux difficultés rencontrées pour la distribution des films en salle, il a été décidé qu'une partie additionnelle de la contribution à la production des diffuseurs en clair soit instaurée, à l'instar de l'engagement de même nature déjà pris par Canal + en accord avec les organisations professionnelles, en vue de soutenir la distribution.

Contribution des diffuseurs à la production cinématographique.

Les dispositions du titre II du décret définissent les conditions dans lesquelles les services, à l'exclusion de ceux qui diffusent annuellement un nombre inférieur ou égal à 52 oeuvres cinématographiques de longue durée par an, doivent contribuer au développement de la production. En pratique, seule La Cinquième qui diffuse peu de films, est exclue de cette obligation.

L'article 5 fixe une contribution en légère augmentation globale : de 3 % du chiffre d'affaires annuel net de l'exercice précédent celle-ci passe à 3,2 % (dont, comme antérieurement, au moins 2,5 % du chiffre d'affaires devront être consacrés à la production d'oeuvres d'expression originale française), une part de 0,2 % devant désormais être consacrée à la distribution des films en salles.

Montants investis dans la production.

S'agissant des dépenses éligibles, les mesures nouvelles reconduisent pour l'essentiel le dispositif existant. Les dépenses prises en compte regroupent à la fois les préachats de droits de diffusion exclusifs effectués par le diffuseur et les parts de producteur prises par l'intermédiaire d'une filiale de production. Pour chaque oeuvre et comme auparavant, le diffuseur ne peut investir dans une oeuvre que pour moitié du coût total de production et ne peut investir en parts de coproducteur qu'à hauteur de 50 % au plus de son investissement.

En outre, le règlement des sommes investies doit désormais respecter un échéancier en fonction du type d'investissement : pour l'essentiel (90%) la part coproducteur doit être versée en cours de tournage ( ce qui était déjà la pratique, en règle générale) ; quant à la part antenne, elle doit être versée en intégralité dans un délai de trente jours à compter de la délivrance du visa d'exploitation, c'est-à-dire une fois l'oeuvre définitivement achevée (ce qui constitue une pratique plus favorable au producteur que celle qui était suivie jusque là).

Définition de la production indépendante .

Elle est complétée conformément au nouvel article 71 de la loi du 30 septembre 1986 qui précise désormais aussi bien la définition de l'indépendance des entreprises que celle de l'indépendance des oeuvres.

En premier lieu, l'indépendance des entreprises de production reste appréciée selon les mêmes critères quant aux liens capitalistiques existant entre le diffuseur, ou ses actionnaires et le producteur. En revanche le critère de la « communauté d'intérêts durable », qui s'est avéré d'application ambiguë entre des partenaires ayant des liens de coproduction et qui peut en outre pénaliser des entreprises qui n'ont qu'une production limitée à très peu de films par an, a été abandonné.

En second lieu, pour que l'oeuvre soit réputée indépendante, le diffuseur ne peut acquérir, au titre du contrat initial pris en compte pour le calcul de l'obligation, plus de deux diffusions exclusives sur une période limitée à 18 mois chacune. Par ailleurs, le diffuseur ne peut détenir qu'une seule catégorie de droits secondaires ou de mandats de commercialisation parmi les cinq énumérées par le décret (cinéma, télévision, vidéo, Internet, étranger) ;

Dans le régime de base, le niveau de l'obligation à l'égard de la production indépendante reste, comme précédemment, fixé à 75 % du montant total des dépenses consacrées à la production. Toutefois, le diffuseur qui, au titre d'un exercice donné, consacre une part de ses investissements à la production indépendante d'au moins 85 %, est autorisé à détenir une catégorie supplémentaire de droits secondaires ou mandats de commercialisation. Mais il ne peut détenir simultanément ceux se rapportant aux deux principales formes d'exploitation secondaire que sont l'exploitation télévisuelle et les ventes à l'étranger.

Le soutien à la distribution en salles.

En complément des diverses mesures mises en oeuvre en vue de maintenir une pluralité d'acteurs dans le secteur de la distribution en salles, il a été décidé, en application du 3° de l'article 27 de la loi de 1986 précitée, de réserver une part de la contribution des diffuseurs à la production d'oeuvres cinématographiques, au financement de la distribution, à hauteur de 0,2 %. Il est prévu que seuls pourront bénéficier de ce dispositif les films agréés par le Centre national de la cinématographie.

Dans un souci de diversification, les diffuseurs sont autorisés à affecter ces investissements soit directement à des oeuvres données, soit par l'intermédiaire d'un fonds collectif du type de celui déjà mis en place avec Canal +. Dans la première de ces hypothèses, l'intervention des diffuseurs doit bénéficier à la distribution des oeuvres indépendantes dans la même proportion que pour l'investissement dans la production indépendante, soit 75 % de l'obligation.

____________

Synthèse des obligations réglementaires des diffuseurs hertziens nationaux en clair concernant les oeuvres cinématographiques d'expression originale française.

TF1

France 2

France 3

La 5 ème

M6

Diffusion

60% d'oeuvres OE dont 40% d'oeuvres EOF

60% d'oeuvres OE dont 40% d'oeuvres EOF

192 films par an dont 104 entre 20H30 et 22H30

60% d'oeuvres OE dont 40% d'oeuvres EOF

192 films par an dont 104 entre 20H30 et 22H30

60% d'oeuvres OE dont 40% d'oeuvres EOF

60% d'oeuvres OE dont 40% d'oeuvres EOF

192 films par an dont 104 entre 20H30 et 22H30

Production

3% du CA à production d'oeuvres cinéma, dont 2,5% pour des oeuvres EOF.

3% du CA à production d'oeuvres cinéma, dont 2,5% pour des oeuvres EOF

3% du CA à production d'oeuvres cinéma, dont 2,5% pour des oeuvres EOF

3% du CA à production d'oeuvres cinéma, dont 2,5% pour des oeuvres EOF

3% du CA à production d'oeuvres cinéma, dont 2,5% pour des oeuvres EOF

Production

Dispositions nouvelles

3% pour la production

0,2% pour la distribution

3% pour la production

0,2% pour la distribution

3% pour la production

0,2% pour la distribution

3% pour la production

0,2% pour la distribution

3% pour la production

0,2% pour la distribution

LA QUESTION DE LA NATIONALITÉ DES FILMS : LA DÉFINITION FRANÇAISE ET LA DÉFINITION EUROPÉENNE

Tous les pays ayant mis en place des mesures de soutien à l'industrie cinématographique, ont assortis ces mesures de restrictions concernant les conditions de la production de l'oeuvre : les lieux de tournage, les caractéristiques de l'entreprise de production, ou la nationalité des auteurs du film et du personnel employé...

Ces restrictions apparaissent très différentes d'un pays à l'autre, alimentant ainsi les pressions de la Direction générale chargée du Marché intérieur à la Commission européenne, pour « une harmonisation des pratiques », sur des bases non plus nationales, mais européennes. Ce qui dans la plupart des cas apparaît en porte à faux avec l'objectif même des politiques engagées.

Les différences en question peuvent être illustrées par deux exemples :

• Les caractéristiques des sociétés de production prises en compte pour la détermination de la nationalité d'un film, en France et en Grande-Bretagne ;

• Les critères qui permettent de décider qu `une oeuvre est française du point de vue du Compte de soutien, ou européenne dans l'interprétation française des principes de la Directive Télévision sans frontières, selon le Fonds Eurimages, ou selon le programme Médias.

I. CONDITIONS RELATIVES À L'ENTREPRISE DE PRODUCTION

EN FRANCE,

Pour qu'une oeuvre soit considérée comme française, l'entreprise de production doit être établie en France. Elle doit être titulaire des autorisations prévues par le Code de l'industrie cinématographique et, lorsqu'il s'agit d'une personne morale, elle doit satisfaire aux conditions suivantes :

1. 1. Le président, les directeurs ou gérants doivent être :

- soit de nationalité française
- soit ressortissants d'un État membre de l'Union européenne
- soit ressortissants d'un État partie à la Convention européenne sur la télévision transfrontière du Conseil de l'Europe
- soit ressortissants d'un État tiers européen avec lequel l'Union européenne a conclu des accords ayant trait au secteur de l'audiovisuel.

Peuvent être assimilés aux citoyens français les ressortissants d'États autres que les États européens énumérés ci-dessus, qui ont la qualité de résident en France.

1..2. L'entreprise de production ne peut être contrôlée par une ou plusieurs personnes physiques ou morales ressortissantes d'États autres que :

- les États membres de l'Union européenne
- les États parties à la Convention européenne sur la télévision transfrontière du Conseil de l'Europe
- les États tiers européens avec lesquels l'Union européenne a conclu des accords ayant trait au secteur de l'audiovisuel.

EN GRANDE-BRETAGNE,

Pour qu'une oeuvre soit considérée comme britannique, et indépendamment des conditions concernant le personnel employé et les lieux de tournage, l'entreprise de production du film doit, pendant toute la phase de production du film, être soit :

- une personne physique ayant la qualité de résident habituel d'un État membre de l'Union européenne

- une société enregistrée dans un État membre de l'Union européenne, dont l'administration centrale et le contrôle sont exercés dans un État membre de l'Union européenne.

Un Etat membre est défini, depuis un amendement de 1999, comme : un pays de l'Union européenne ou un pays de l'Espace économique européen OU un pays avec lequel l'Union européenne a signé un accord européen de coopération pour le secteur.

Par contrôle de la société, il y a lieu d'entendre le pouvoir dont dispose une personne ou un groupe de personnes d'imposer que les affaires de la société soient gérées conformément à leurs décisions :

- soit en raison de l'importance de leur participation ou de leur puissance de vote dans la société ou dans une autre personne morale
- soit en vertu de tout pouvoir conféré par les statuts ou tout autre document de cette société ou d'une autre personne morale.

EN ALLEMAGNE,

Pour qu'une oeuvre soit considérée comme allemande, et indépendamment des restrictions concernant la langue, la nationalité des intervenants, ou les lieux de tournage, le producteur, qui doit assumer la responsabilité de l'exécution du projet de film, doit:

- soit avoir son domicile en Allemagne s'il s'agit d'une personne physique

- soit avoir son siège en Allemagne s'il s'agit d'une personne morale

- soit disposer d'une succursale en Allemagne s'il est établi

- dans un autre État membre de l'Union européenne, ou
- dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

Lorsque l'entreprise de production est une personne morale de droit allemand, il n'est pas nécessaire que les administrateurs ou organes de celle-ci soient de nationalité allemande ni même ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

II. LES CONDITIONS RELATIVES AUX INTERVENANTS ARTISTIQUES ET TECHNIQUES

1. LES FILMS FRANÇAIS :

Pour bénéficier du soutien financier à l'industrie cinématographique, les films doivent totaliser un nombre minimum de points dans les listes qui suivent :

1.1. Conditions établies par l'article 10, paragraphe III du décret 99-130 du 24 février 1999

Les films doivent totaliser un minimum de 14 points sur un total de 18 dans la liste suivante :

- réalisation : 3 points
- scénario : 2 points
- autres auteurs : 1 point
- premier rôle : 3 points
- deuxième rôle : 2 points
- 50 % des autres cachets de comédiens : 1 point
- image : 1 point
- son : 1 point
- montage : 1 point
- décoration : 1 point
- laboratoire, auditorium, studio de prise de vue : 2 points.

1.2 Conditions établies par l'article 10 paragraphe IV du Décret n° 99-130 du 24 février 1999

Le montant du soutien automatique sera équivalent à 100 % du montant prévu au décret lorsque le film obtient au moins 80 points par référence à un barème qui compte 100 points. Il sera de :

- 97 % lorsque le film obtient 79 points
- 94 % lorsque le film obtient 78 points
- 91 % lorsque le film obtient 77 points
- 88 % lorsque le film obtient 76 points
- 85 % lorsque le film obtient 75 points
- 82 % lorsque le film obtient 74 points
- 79 % lorsque le film obtient 73 points
- 76 % lorsque le film obtient 72 points
- 73 % lorsque le film obtient 71 points
- 70 % lorsque le film obtient 70 points.

Lorsque le film obtient un nombre de points inférieur à 70, le pourcentage est égal à ce nombre de points.

Le nombre de points minimum à obtenir pour que le soutien automatique soit accordé est de 25 (les 20 points attribués à la version originale en langue française n'étant pas pris en compte. Ce nombre minimum peut être réduit à 20 par dérogation accordée par le directeur général du Centre national de la cinématographie.

1.3. Nombre de points

Le soutien automatique est lié au nombre de points obtenus dans les sept groupes suivants  liste suivante :

Groupe 1 : entreprise de production : 10 points

Ces points sont obtenus lorsque l'entreprise de production du film satisfait aux conditions prévues à l'article 7 du Décret du 24 février 1999.

Groupe 2 : langue de tournage : 20 points

Ces points sont obtenus lorsque l'oeuvre cinématographique est réalisée intégralement ou principalement en version originale en langue française ou dans une langue régionale en usage en France.

Groupe 3 : auteurs : 10 points

Ces 10 points sont répartis entre les postes suivants

- réalisateur : 5 points

- autres auteurs : 4 points

Ces autres auteurs sont :

- l'auteur de l'oeuvre préexistante
- l'auteur du scénario
- l'auteur de l'adaptation
- l'auteur des dialogues

- compositeur de la musique écrite spécialement pour le film : 1 point.

Les points attribués au groupe auteurs ne sont obtenus que si les contrats de production conclus avec chacun des auteurs désignent la loi française comme loi applicable au contrat. En outre, le contrat de travail conclu avec le réalisateur en complément du contrat de production doit également désigner la loi française comme loi applicable.

Groupe 4 : artistes interprètes : 20 points

Ces 20 points sont répartis entre les postes suivants :

- artistes interprètes assurant les rôles principaux : 10 points

Un rôle est considéré comme un rôle principal lorsque la présence de l'artiste interprète est requise pour au moins 50 % des scènes

- artistes interprètes assurant les rôles secondaires et les petits rôles : 10 points

Les points attribués au groupe artistes interprètes ne sont obtenus que si les conditions de l'article 7 du décret du 24 février 1999 sont remplies et si les contrats conclus avec les artistes interprètes désignent la loi française comme loi applicable.

Groupe 5 : techniciens collaborateurs de création : 14 points

Ces 14 points sont répartis entre les postes de techniciens des branches suivantes :

- réalisation autres que le réalisateur : 2 points
- l'administration et de la régie : 2 points
- la prise de vue : 3 points
- la décoration : 2 points
- la branche du son : 2 points
- la branche du montage : 2 points
- la branche du maquillage : 1 point

Les points attribués au groupe techniciens collaborateurs de création ne sont obtenus que si les conditions de l'article 7 du décret du 24 février 1999 sont remplies et si les contrats conclus avec les artistes interprètes désignent la loi française comme loi applicable.

Groupe 6 : ouvriers : 6 points

Ces six points sont répartis entre les postes suivants :

- ouvriers de l'équipe de tournage : 4 points
- ouvriers de l'équipe de construction : 2 points.

Les points attribués au groupe ouvriers ne sont obtenus que si les ouvriers remplissent les conditions relatives à la nationalité qui, en vertu de l'article 7 du décret du 24 février 1999 s'appliquent aux artistes interprètes et aux collaborateurs de création et si les contrats conclus avec ces ouvriers désignent la loi française comme loi applicable.

Groupe 7 : tournage et postproduction : 20 points

Ces 20 points sont répartis entre les postes suivants

- Localisation des éléments de tournage : 5 points, dont :

- lieu de tournage : 3 points
- laboratoire de tournage : 2 points

- Matériel technique de tournage : 5 points, dont :

- équipement de prise de vue : 2 points
- éclairage : 2 points
- machinerie : 1 point

- Entreprise de postproduction son : 5 points
(ces points concernent les mixages relatifs à la version originale de l'oeuvre cinématographique)

- Entreprise de postproduction image : 5 points (travaux effectués en laboratoire)

Les points attribués au groupe tournage et postproduction ne sont obtenus que si les entreprises concernées sont établies en France et sont titulaires de l'autorisation nécessaire.

Des exceptions aux conditions fixées pour les groupes 3 à 7 peuvent être admises en considération du genre auquel le film appartient ou pour des raisons artistiques ou techniques. Dans un tel cas, les points relevant des postes ou des éléments auxquels il n'est pas fait appel sont réputés obtenus.


II. LES FILMS EUROPÉENS

La notion de "film européen" apparaît pour la première fois dans les textes européens dans la Directive du Conseil du 15 octobre 1963 , mettant en oeuvre les dispositions du Programme général pour la suppression des restrictions à la libre prestation des services en matière de cinématographie. Sont alors considéré comme européens, les films "ayant la nationalité d'un État membre".

Cette notion sera progressivement précisée dans les instruments spécifiques mis en place pour aider au développement de la production de films européens et à l'amélioration leur distribution

- la Directive "Télévision sans frontières"

- la Convention européenne sur la télévision transfrontière

- la Convention européenne sur la coproduction cinématographique.

A. LA DIRECTIVE "TÉLÉVISION SANS FRONTIÈRES"

Chaque pays européen a transposé à sa manière les principes fixés dans la Directive, relatifs au pays d'origine de l'oeuvre, à l'entreprise de production et aux conditions de sa production concernant notamment les auteurs du film et le personnel employé.

En France, d'après l'article 6 du décret n° 90-66 modifié, un film coproduit sera reconnu comme film européen s'il obtient un minimum de 14 points sur un total de 18 dans la liste suivante :

Groupe création auteur

- réalisation : 3 points
- scénario : 2 points
- autres auteurs : 1 point

Groupe création acteur :

- premier rôle : 3 points
- deuxième rôle : 2 points
- 50 % des autres cachets de comédiens : 1 point
Groupe création technique et de tournage

- image : 1 point
- son : 1 point
- montage : 1 point
- décoration : 1 point
- laboratoire, auditorium, studio de prise de vue : 2 points.

B. LA CONVENTION EUROPÉENNE SUR LA COPRODUCTION CINÉMATOGRAPHIQUE

La Convention européenne sur la coproduction cinématographique s'inscrit dans le cadre de l'action du Conseil de l'Europe en faveur du développement des coproductions multilatérales en Europe, entreprise avec la création du Fonds EURIMAGES en 1988. Un film sera reconnu comme film européen, dans le cadre de cette convention, s'il obtient un minimum de 15 points sur un total de 19 dans la liste suivante :

Groupe création auteur :

- Réalisateur : 3 points
- Scénariste : 3 points
- Compositeur : 1 point.

Groupe création acteur :

- Premier rôle : 3 points
- Deuxième rôle : 2 points
- Troisième rôle : 1 point.

(évalués selon le nombre de jours de tournage).

Groupe création technique et de tournage :

- Image : 1 point
- Son et mixage : 1 point
- Montage : 1 point
- Décors et costumes : 1 point
- Studio ou lieu de tournage : 1 point
- Lieu de postproduction : 1 point.

C. LE PROGRAMME MEDIA

Le soutien financier à la distribution accordé par le programme MEDIA de la Commission européenne est soumis à un certain nombre de conditions relatives à la production du film, en particulier un pourcentage significatif des auteurs, interprètes et de l'équipe technique doit être composé de ressortissants de pays parties au programme MEDIA.

Leur participation est considérée comme significative lorsque le film réunit un minimum de 10 points sur un total de 19 dans la liste suivante :

Groupe créatif

Réalisateur : 3

Scénariste : 3

Compositeur : 1

Groupe interprètes

Premier rôle : 2

Second rôle : 2

Troisième rôle : 2

Groupe équipe technique

Directeur de la photographie : 1

Ingénieur du son : 1

Monteur : 1

Chef décorateur : 1

Lieu de tournage : 1

Laboratoire : 1

La France est l'un des rares pays européens ayant réussi à préserver un cinéma national face aux grosses productions américaines . Ce succès, emblématique de la très française « exception culturelle », a été obtenu par la combinaison d'un système d'épargne forcée géré par l'Etat et de l'adossement du cinéma sur les chaînes de télévisons, qu'elles soient généralistes ou à péage.

Or, aujourd'hui, ces deux éléments sont remis en cause ; le rôle des télévisions est contesté pour des raisons tant culturelles qu'économiques au moment où, sur le plan financier, il est rendu problématique par suite des difficultés de Canal + ; la tuyauterie budgétaire du « compte de soutien », apparaît fragilisée par suite du succès même du cinéma français et des critiques de Bruxelles.

A l'issue de leur enquête, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances estiment que, s'il convient de consolider l'alimentation financière du système, notamment par l'aménagement de la taxe sur les DVD, il faut d'emblée marquer les limites d'une telle politique et envisager une évolution d'un mécanisme qui a atteint ses limites.

Dans la perspective d'une nécessaire refondation du système, il convient de ne plus considérer comme tabous certains sujets sensibles, tels une plus grande sélectivité dans certaines catégories d'aides, l'encadrement des possibilités d'affectation du soutien financier aux rémunérations élevées, le plafonnement, si ce n'est du nombre total de films, du moins du nombre de films aidés, voire les questions de concurrence exacerbées par l'accentuation de l'intégration verticale.

* 1 Auxquels il faudrait adjoindre les propositions d'Henri Clerc, chef de service au ministère des finances, auteur dramatique et député de la Savoie.

* 2 Cf. infra pages 76 et 77.

* 3 Compte spécial du Trésor n° 902-10

* 4 Jusqu'à juin 2002, le producteur percevait 140 % du produit de la TSA (Taxe Spéciale Additionnelle, représentant 11 % du prix du billet) générée par les entrées de son film : soit environ 5 francs (0,76 euro) par billet. Depuis, un système dégressif en fonction du nombre d'entrées a été instauré. Le producteur reçoit 125 % de la TSA générée par les 500.000 premières entrées, 110 % de la TSA générée de la 500.001ème à la 5.000.000ème entrée, et 50 % de la TSA des entrées suivantes. Ce mécanisme est valable pendant une période de cinq ans à compter de la sortie en salles du film.

* 5 Une référence particulièrement éclairante est faite au domaine du sport, qui subit la même logique mais dont il est noté, qu'aux États-Unis, pays éminemment libéral, on s'est efforcé de maîtriser les dérives : les autorités américaines ont introduit un ensemble de règles qui visent à préserver la diversité et à éviter les surenchères qui compromettraient au bout du compte l'équilibre économique de l'ensemble des clubs.

* 6 Dans le cadre d'un accord passé en mai 2000 avec les représentants du secteur de la production, Canal + s'est engagé à consacrer 45 % de ses obligations d'achat à des production d'un montant inférieur à 5,34 millions d'euros, soit l'équivalent de 35 millions de francs. Cette obligation a été étendue à compter de 2003 aux chaînes du câble et du satellite avec d'autres paramètres.

C'est ainsi que TPS qui devrait dépenser 15 % de ses obligations d'investissement dès 2003 et 20 % en 2004, tandis que ce pourcentage atteint 25 % pour Canal Satellite.

On note que l'obligation d' investissement -fixée pour TPS cinéma à 2,01 euros par mois et par abonné dans l'achat ou le préachat de films français-, qui résultait jusqu'à présent d'un simple accord avec certaines organisations professionnelles du cinéma est désormais intégré dans les conventions des chaînes.

* 7 Cf. rapport n° 278 (2002-2003) de M. Yann Gaillard, au nom de la commission des finances.

* 8 Cette année qui a vu le franchissement par Canal + du seul du million d'abonnés est une année charnière puisqu'y sont identiques à la fois le nombre de films français et films américains distribués ainsi que leur nombre de spectateurs respectifs.

* 9 En masse, le rapport remarque que si 20 films ont gagné 20 millions d'euros, 110 films ont perdu 27 millions d'euros. Au total, en 1998, la distribution des films français avait dégagé, après intervention du compte de soutien, environ 7,5 millions d'euros de pertes.

* 10 Une personne physique ou morale distincte de l'entreprise de production sera présumée contrôler cette entreprise dès lors qu'elle détiendra une fraction du capital lui conférant plus de 50 % des droits de vote, éventuellement en vertu d'un accord avec d'autres associés ou bien qu'elle n'atteigne pas ce seuil, elle détermine en fait les décisions des assemblées générales. Le contrôle de fait est présumé lorsque cette personne physique ou morale dispose, directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40 % et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne.

* 11 Cette pratique, déjà mentionnée supra, page 29, consiste à demander au producteur délégué qu'il rétrocède aux « talents » une partie de ses droits de tirage sur le compte de soutien, le cas échéant par l'intermédiaire de sociétés de coproduction ad hoc dont les droits de tirage ne sont pas réinvestis immédiatement mais mis en sommeil ou monnayés à l'occasion de la revente des parts de ladite société de coproduction.

* 12 La procédure d'agrément est la clé d'accès au soutien automatique. C'est elle qui permet à un film de générer, à l'occasion de son exploitation, des droits futurs en proportion de son succès sur les différents supports d'exploitation. L'agrément permet également de mobiliser le soutien précédemment acquis lorsqu'il porte sur une oeuvre dite de réinvestissement.

* 13 Les contrats laissent une large proportion des « recettes nettes par producteur » RNPP- aux partenaires privés jusqu'à l'amortissement du film, après quoi la part revenant au fond de soutien est portée à 30 % ou 50 % jusqu'au remboursement du film. Lorsqu'elle est remboursée, une redevance de 15 % des recettes France reste due par les bénéficiaires et vient alimenter le compte de leurs droits à soutien. Le rapport observe en outre que la notion même de taux de remboursement est difficile à cerner. Le ratio le plus pertinent serait celui qui rapproche le montant des recettes encaissées cumulées sur la carrière des films du montant des avances investies dans la production de ces mêmes films. Les taux sont plus erratiques. Ils s'établissent pour la période 1960-1987 à 15 %.

* 14 Il s'agirait de permettre au CNC de récupérer l'avance sur le soutien automatique engendrée par le film dans tous les cas, même lorsque son bénéficiaire n'a pas opté pour cette formule de remboursement.

* 15 Les demandes de subventions doivent notamment comporter un plan de production, une liste des personnes employées, un budget présenté suivant un modèle standard, un plan de financement (cash flow plan), un contrat de distribution ou une lettre d'intention ayant le même objet, un plan de promotion et de communication...

* 16 Au cours des trois derniers exercices connus, 2000, 2001 et 2002,la commission d'avance sur recettes a retenu respectivement 19, 23 et 28 projets ( faisant apparaître des  « taux de sélectivité » par rapport aux nombre de projets examinés de 5,9 %, 6,4 % et 7,6 %) parmi lesquels seuls 15, 17 et 10 ont été réalisés, ce qui marque une baisse très sensible du  « taux de concrétisation », qui n'atteint plus en 2002 que 36 % contre près de 80 % en 2000.

* 17 Le public du cinéma est plus jeune plus urbain et plus instruit que celui de la télévision. Le décalage est tel qu'il est fréquent que la chaîne généraliste n'utilise pas toujours le droit de deuxième passage à l'antenne des films qu'elle a coproduit.

* 18 Il est vrai que cette notion est sans doute moins simple à établir dans la pratique qu'il ne pourrait sembler de prime abord, compte tenu, notamment, des marges d'arbitraire dans l'affectation des coûts à telle ou telle production par suite des libertés laissées en matière d'amortissement.

* 19 Pour investir en coproduction, les chaînes hertziennes en clair doivent passer impérativement par le biais d'une filiale dont c'est l'objectif social exclusif et qui ne peut en aucun cas être producteur délégué. Par ailleurs, des conditions restrictives tenant notamment à la proportion de la part coproduction par rapport à la part antenne conditionnent l'inclusion des dépenses des chaînes dans leur obligation à l'égard de la production indépendante.

* 20 Ainsi cela pourrait coûter en 2003 en France Télévisions 3,3 millions d'euros (plus de 1,9 million d'euros pour France 2, 1,4 million d'euros pour France 3).

* 21 Celui-ci prévoit notamment que : les filiales de chaînes de télévision ne peuvent détenir plus de 50 % du soutien financier généré par un film ; que le producteur délégué se voit réserver une quote-part inaliénable de 25 % du soutien ; que les filiales de chaînes n'ont plus accès au soutien généré par la première diffusion du film sur leur antenne (dans le cadre du préachat) ; et que le calcul de la quote-part du soutien doit refléter la participation de chaque partenaire à la production.

* 22 Le secteur la télévision en clair a vu en 2002 sa contribution passer de 3 % à 3,2 % du chiffre d'affaires, ce qui représente un coût additionnel de 2,9 millions d'euros pour France 2 (dont 1,7 million d'euros d'effet taux) et 2,1 millions d'euros pour France 3 (dont 1,2 million d'euros d'effet taux) par rapport à 2001.

* 23 La mesure préconisée augmenterait mécaniquement de 66 % les subventions versées par les chaînes mères (+ 2,8 millions d'euros pour France 2 ; + 2,3 millions d'euros pour France 3), en prenant comme référence l'exercice 2003.

* 24 Le rapport Leclerc souligne la concentration des investissements sur une vingtaine de gros films et précise que « c'est sur cette catégorie de films que l'apport en financements hors part du producteur est le plus élevé : il atteint 69 % en 2001 ».

* 25 Le phénomène est accentué par le développement du marché du DVD, qui conduit les distributeurs à décaler la date de diffusion de leurs films sur les chaînes en clair pour des rasons commerciales, indépendamment du calendrier officiel des médias.

* 26 Un barème de points permet d'obtenir 100 % du soutien à partir de 80 points.

* 27 Sur les 100 premières audiences en 2001 on ne compte plus que23 films dont 9 français, soit pour chacune de ses catégories moins de la moitié des scores de 1993.

* 28 Les agrégats budgétaires tendent à rapprocher dans un cadre commun la présentation des actions et la mesure des coûts, la description des objectifs et la mesure des résultats.

* 29 Cet organisme se verrait confier les missions suivantes :

- description des structures capitalistiques des sociétés de production cinématographique ;

- suivi statistique des investissements consentis dans la production ;

- évolution des coûts de production par l'exploitation systématique des devis ;

- suivi statistique des volumes et types de films produits ;

- étude du cycle de remontée de recettes ;

- évaluation des objectifs poursuivis par les différents outils du soutien à la production : celui-ci pourrait, par exemple, être chargé d'analyser des pondérations retenues pour les différents critères permettant d'analyser un film d'initiative française ou une production indépendante.

* 30 Elle résulte de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle.

* 31 Il s'agit très exactement de deux des critères de la PME en droit communautaire (recommandation 96/280/CE du 3 avril 1996) .

* 32 C'est à dire le montant de leur souscription moins les sommes éventuellement récupérées.

* 33 Le terme de rentabilité appliqué au cinéma doit être pris avec prudence. Pour un film pris isolément, cette rentabilité est difficile à déterminer puisqu'elle doit s'apprécier sur période longue en comptabilisant l'ensemble des exploitations à venir, support par support, pays par pays, année après année, sachant que la valeur marchande d'un film est par ailleurs fonction de l'importance du portefeuille de droits avec lequel il est commercialisé. Si, faute de mieux, on s'en tient au succès en salle comme d'un indicateur de rentabilité commerciale potentielle, on doit prendre en compte le fait, d'une part que cette exploitation ne constitue qu'un élément très minoritaire du chiffre d'affaires généré par la production cinématographique nationale, et d'autre part que, s'agissant d'une « industrie de prototypes », il n'est ni possible ni même souhaitable que tous les films produits soient d'emblée des succès commerciaux.

De ce point de vue, le clivage entre « films commerciaux» et « films d'auteur » n'est pas significatif. Les films français récents qui apparaissent les plus rentables à l'issue de leur exploitation en salles sont souvent des films qui relèvent plutôt du « cinéma d'auteur », que des catégories habituelles du « cinéma commercial ». Un certain nombre de films d'auteur à petits budgets figurent parmi les succès les plus remarqués du cinéma français de ces dernières années : Marius et Jeannette ; Le Goût des autres ; Harry, un ami qui vous veut du bien ; Vénus beauté ; Une hirondelle fait le printemps...ont dépassé 2 millions d'entrées en France.

Il paraît dès lors plus logique de chercher à évaluer la rentabilité des investissements engagés au cours d'une période donnée, y compris les aides à la production, soit au niveau de l'entreprise de production, soit au niveau de l'ensemble du secteur. Le « compte économique de l'audiovisuel » réalisé conjointement par le CNC et par la mission statistique de la Direction du développement des médias, semble ainsi montrer que sur la période étudiée, 1989-1996, la production cinématographique française est équilibrée puisque les recettes de production (20,3 milliards de F.  dont 18,1 milliards de ventes de droits de diffusion, et 2,2 milliards de F. de droits dérivés et autres recettes de production) sont supérieures à la valeur cumulée de la production immobilisée, c'est à dire au total des dépenses engagées pour des productions nouvelles (17,8 milliards de F.).

* 34 Le déficit commercial de l'Europe en matière audiovisuelle qui représente aujourd'hui plus de 8 milliards d'euros, a augmenté de 45% en quatre ans.

* 35 Les services de la concurrence de la Commission considèrent que ces obligations sont de nature à introduire des distorsions de concurrence « lorsqu'elles ne comportent pas une compensation raisonnable pour les organismes concernés ».

* 36 Les dépenses des ménages en « glaces et sorbets », pour l'année 2000 ont été de 1,1 milliard d'euros  (source : INSEE / la consommation des ménages).

* 37 On notera que les recettes de confiserie des exploitants de salles ( 69 millions d'euros, en 2000) sont du même ordre que la part de recettes ( 91 millions d'euros) qui revient aux producteurs français sur le produit de l'exploitation en salles de leurs films ( tableaux 3 et 5 , ci-après).

* 38 Il serait illusoire de croire que la force du cinéma américain ne relève que du jeu du marché et du dynamisme de ses entreprises. Outre la puissance de leur marché intérieur et la qualité de leurs films, les majors américaines ont en effet bénéficié, et bénéficient encore, de multiples avantages fiscaux à l'exportation, dont le principal consiste pour les entreprises américaines à pouvoir se faire facturer, par une filiale «off shore», les frais relatifs à la commercialisation de leurs films à l'étranger, et à déduire ces coûts de leurs revenus imposables. Ces aides ont contribué à la constitution puis au renforcement de positions dominantes sur les marchés étrangers, notamment au niveau de la distribution et de l'exploitation, selon des pratiques à l'époque strictement interdites sur le marché américain lui-même, mais vis à vis desquelles les réglementations nationales et européennes étaient démunies, ou indifférentes.

* 39 Après ceux des Etats Unis et de l'Inde.

* 40 En toute logique, la rentabilité de la production cinématographique, comme celle de l'édition de livres, ne peut être appréhendée qu'au niveau des entreprises, même si la problématique du financement se situe essentiellement au niveau des oeuvres. Cette caractéristique est souvent à l'origine d'un malentendu concernant l'évaluation des performances de la production nationale ou la légitimité du système de soutien sur lequel elle s'appuie.

* 41 Les chaînes de télévision et les éditeurs vidéo dont les ressources contribuent aussi à l'économie du secteur relèvent, pour l'INSEE, de filières spécifiques.

* 42 Les chiffres d'affaires figurant dans ce tableau correspondent à l'ensemble des recettes des entreprises concernées, y compris celles qui ne se rapportent pas à leur activité principale.

* 43 « Cinéma, télévision, vidéo et multimédia en Europe » . Octobre 2002 . Observatoire européen de l'audiovisuel

* 44 L'indicateur obtenu en ajoutant les immobilisations des entreprises à leur chiffre d'affaires est, parmi l'ensemble des indicateurs comptables, celui qui permet le plus simplement de rendre compte de l'évolution relative de l'activité d'un secteur économique.

Le Produit intérieur brut (PIB), indicateur utilisé pour évaluer la croissance économique dans le cadre de comparaisons internationales, est obtenu en retranchant de la Production nationale, les consommations intermédiaires et en ajoutant les impôts et taxes (déduction faite des subventions).

* 45 Conformément aux conventions retenues par l'INSEE, ne sont prises en compte dans ce tableau que les recettes des « entreprises ayant pour activité principale, la production de films ». D'autres entreprises peuvent coproduire des films, et enregistrer à ce titre des « recettes de production cinématographique ». Ainsi, en 2000, aux 712 millions d'euros des producteurs de films (594 M€ de ventes de droits et 118 M€ d'autres recettes de production), se sont ajoutés 97 millions d'euros de recettes de production cinématographique d'autres entreprises, répartis comme suit :

Producteurs audiovisuels : 19

Producteurs de films de commande : 26

Prestataires techniques : 17

Distributeurs :12

Exploitants : 23 (il s'agit essentiellement de Gaumont qui, en 2000, avait encore pour activité principale, une activité d'exploitant. Son activité de production n'était pas filialisée).

Globalement, les recettes liées à la production de films s'établissaient ainsi à 809 millions d'euros en 2000.

* 46 Ce chiffre, qui représente en principe la valeur de la production récente, est en fait difficilement interprétable à cause des différences de traitement comptable pouvant exister d'une société à l'autre. Le secteur de la production audiovisuelle bénéficie en effet en France, comme dans de nombreux autres pays, d'un régime comptable particulier donnant au producteur une certaine souplesse. Dans la prise en compte des apports des coproducteurs il peut, soit choisir d'inscrire le coût total de la production à son actif et les apports des coproducteurs dans son compte de résultat, soit n'inscrire à son actif que la différence entre le coût du film et les apports des autres producteurs ; ceux-ci ne figurent alors pas dans le compte de résultat. De même, pour ce qui est des amortissements, il peut opter, soit pour un amortissement linéaire sur un minimum de trois ans, soit pour un amortissement sur la base des recettes générées par la production dans la limite, la première année, de 80% du coût de l'investissement du film.

* 47 Ce chiffre regroupe les à-valoir versés par les distributeurs avant la commercialisation des films, et les compléments de recettes qu'ils versent aux producteurs au fur et à mesure des exploitations.

* 48 Conformément aux conventions de l'INSEE, ne sont prises ici en compte que les entreprises déclarant pour activité principale : la distribution. Ainsi, par exemple, les recettes de distribution d'une entreprise d'exploitation en salles comme Gaumont, distributeur de films comme Le Cinquième Elément ou Jeanne d'Arc , sont comptabilisées dans les recettes de distribution des entreprises d'exploitation en salles.

* 49 Le chiffre des recettes guichet, tel qu'il apparaît ici, concerne des recettes nettes (hors taxes). Il est issu des résultats de l'Enquête Annuelle d'Entreprises (EAE), enquête par sondage menée chaque année par l'INSEE et dont les résultats sont utilisés tel quel pour en conserver la cohérence interne. Il est différent du chiffre des recettes des entrées en salles qui figure dans le tableau p. 25, et qui, issu des bordereaux de recettes que les exploitants de salles sont tenus de transmettre au CNC chaque semaine, représente l'intégralité des recettes de billetterie comptabilisées au titre d'une année.

La part des films français dans ces recettes, varie en fonction du succès obtenu :

1996

1997

1998

1999

2000

Part des films français dans les recettes guichet (%)

37,5

34,5

27,6

32,4

28,5

* 50 Les recettes de distribution connaissent deux pics en 1997 et 1999, grâce aux très bons résultats du Cinquième Elément et de Jeanne d'Arc, tous deux distribués par une entreprise dont l'activité principale est l'exploitation de salles de cinéma.

* 51 La valeur de ces apports, telle qu'elle apparaît dans le budget de production peut alors être supérieure à ce qu'elle serait si les prestations étaient payées au moment où elles sont fournies, puisqu'elle intègre le risque pris par les prestataires concernés. C'est le cas, par exemple, quand un comédien se met « en participation ». Cet écart entre le coût de la production, et le prix qu'aurait à payer un commanditaire qui financerait totalement le film en rémunérant normalement les intervenants, conduit quelquefois les observateurs extérieurs à considérer que « les devis sont gonflés ». Ce peut être le cas mais, la valeur des apports en industrie déterminant généralement la part de recette à laquelle elle donne droit, son évaluation est soumise au contrôle des autres producteurs pour lesquels toute surévaluation constituerait un préjudice.

* 52 Ils peuvent même être inférieurs aux financements obtenus par le producteur auprès de ses différents partenaires, ce qui lui permet de financer, en totalité ou en partie, ses propres frais de fonctionnement.

* 53 Source : CNC / octobre 2002. Le coût des films, comme la répartition des financements fait régulièrement l'objet de révision en fonction des éléments d'information qui parviennent au CNC. Ces tableaux, au départ construits à partir de données provenant des budgets prévisionnels des films, évoluent donc au fur et à mesure de la disponibilité des comptes définitifs. Ce qui, pour les années récentes, peut fausser les comparaisons avec les années antérieures.

* 54 Les apports en coproduction de Studio Canal France (ex Studio Canal+), sont ici inclus parmi les apports des producteurs français, en considérant que ces financements ne font pas l'objet d'une obligation. Dans les publications antérieures du CNC, ils étaient généralement compris dans les apports en coproduction des chaînes.

* 55 Ces crédits sont de deux types : des crédits correspondant à une avance de trésorerie gagée sur des contrats ou des subventions dont tout ou partie du règlement n'interviendra qu'une fois le film terminé, et présentant à ce titre un risque limité ; des crédits finançant le gap financing, c'est à dire l'écart entre les besoins de financement de la production et les ressources mobilisées avant tournage par le producteur, que ce dernier espère combler soit par d'autres apports avant la fin du film, soit par des recettes commerciales au moment de l'exploitation. Les crédits de ce type peuvent comporter un risque important, et les frais financiers qu'ils engagent peuvent être relativement élevés.

* 56 On notera que, si la réglementation détermine les ressources du fonds de soutien, la part de leurs recettes que les diffuseurs doivent consacrer au financement de la production cinématographique, ou le montant des Soficas, l'essentiel de ces sommes est réparti en fonction de critères de marché. Les aides sélectives, et notamment l'avance sur recettes, n'ont représenté en 2001 que 3,2% du coût global des films d'initiative française.

* 57 Ce total est estimé par le CNC à 740 M€ pour 2001.

* 58 Les recettes salles qui apparaissent ici, correspondent à la part producteurs/distributeurs, sur les films français, de la recette guichet déclarée dans les bordereaux transmis au CNC.

* 59 Les recettes télévisuelles correspondent aux pré-achats et achats de droits de diffusion de l'ensemble des diffuseurs (les recettes nouvelles apportées par les services de paiement à la séance, comme Kiosque et Multivision, ou par les services de vidéo à la demande restent, pour l'instant, marginales). Les apports en coproductions des chaînes de télévision ne sont pas pris en compte dans la mesure ou ils privent en retour la filière cinématographique d'une partie des recettes générées par les autres segments. Ce choix conduit toutefois à sous-évaluer la contribution réelle des diffuseurs dans la production cinématographique.

* 60 Les recettes vidéo correspondent ici à la part du chiffre d'affaires des éditeurs vidéo émanant de la vente et de la location de cassettes et DVD de films français.

* 61 Les recettes d'exportation ne prennent en compte que l'exportation des films français et correspondent aux recettes déclarées au CNC par les exportateurs.

* 62 Le montant des recettes découle de l'exploitation des bordereaux de déclaration de recettes établis par les salles.

* 63 La nationalité résulte de l'origine du film mentionnée par la commission de classification lors de l'attribution du visa d'exploitation. La nationalité est automatiquement française lorsqu'il s'agit d'un film ayant reçu l'agrément. Les films français comprennent donc les films 100% français et des coproductions avec d'autres pays. Les évolutions divergentes des recettes des films français et des films étrangers au cours de la période considérée traduisent les différences de performances des deux catégories de films.

* 64 Les obligations des chaînes en clair, en ce domaine, ne concernent que les préachats et les apports en coproduction.

* 65 Ces statistiques sont produites à partir des déclarations de recettes des éditeurs adhérant au Syndicat de l'édition vidéo (SEV), qui réalisent environ 90 % du chiffre d'affaires du secteur (hors films pornographiques). Elles rendent compte des ventes des éditeurs aux distributeurs (détaillants, grandes surfaces spécialisées, hypermarchés , ...) et non les ventes finales aux consommateurs. Les données communiquées ici correspondent donc aux ventes en gros (hors taxes) des éditeurs.

* 66 L'explosion du DVD est surtout sensible depuis 2001. Ainsi, selon les chiffres du SEV le chiffre d'affaires des éditeurs vidéo (films et hors films) a progressé de 25 % en 2001 pour atteindre 819 M€, le DVD représentant avec un chiffre d'affaires de 415 millions d'euros, déjà plus de la moitié du chiffre d'affaires du secteur.

* 67 Ces chiffres ne prennent pas en compte les apports en industrie des coproducteurs étrangers, intervenant en contrepartie de droits de diffusion ou de commercialisation

* 68 La réglementation actuelle prévoit que les chaînes qui participent au financement d'une production indépendante, ne peuvent détenir, directement ou indirectement, les mandats de commercialisation pour plus d'une des modalités d'exploitation suivantes : exploitation en salles en France ; édition vidéo en France; diffusion sur d'autres chaînes françaises de télévision ; exploitations à l'étranger.

* 69 Le département statistique de la Direction du développement des médias réalise depuis quelques années un « compte économique de l'audiovisuel » qui tente d'établir, année par année, un bilan de l'activité des différentes filières du secteur audiovisuel en croisant l'ensemble des informations recueillies par le CNC et par l'INSEE. Comme pour les recettes des films, les échanges de droits sont pris ici au sens restreint : reversements des distributeurs aux producteurs ou remontées des salles aux distributeurs. Ils ne comprennent pas les apports en coproduction, les droits dérivés et les autres recettes, bien que ceux-ci soient liés à la production de films. Compte tenu du flou des définitions, le chiffrage des échanges avec l'étranger, est à considérer comme un ordre de grandeur.

* 70 La dernière synthèse disponible concerne l'année 1996. L'actualisation jusqu'à l'année 2000 est en cours Les données disponibles conduisent à penser que la répartition des revenus sera sensiblement la même qu'en 1996.

* 71 Reversements des exploitants aux distributeurs sur recettes guichet

* 72 Achats de droits des distributeurs à l'étranger, pour ventes aux salles , aux chaînes et aux éditeurs vidéo

* 73 Importations totales

* 74 Exportations totales, y compris les réexportations de films étrangers, et y compris les apports en industrie des coproducteurs étrangers intervenant dans la production de films français en contrepartie de droits de diffusion ( ce chiffre est donc supérieur à celui des recettes d'exportation figurant dans le tableau 14) .

* 75 En rapprochant les revenus des producteurs, telles qu'ils apparaissent dans ce tableau, des recettes des films français telles qu'elles figurent dans le tableau 8, on peut avoir une estimation de la marge brute des distributeurs et des éditeurs vidéo sur la part de droits des films français qu'ils commercialisent. (Chiffres en millions de francs)

Recettes des distributeurs et des

éditeurs vidéo

Revenus des producteurs

provenant des distributeurs et des

éditeurs vidéo

Marge brute

des distributeurs et des

éditeurs vidéo

Exploitation en salles

733

469

264

Ventes aux TV

350

232

118

Exportation et vidéo

318

197

121

Total

1401

898

503

* 76 Par convention, le minimum garanti des distributeurs est ici affecté aux recettes salles

* 77 Les entreprises de production doivent remplir les conditions suivantes : avoir des présidents, directeurs ou gérants de nationalité française ou ressortissants d'un Etat européen ; ne pas être contrôlées, au sens de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966, par une ou plusieurs personnes physiques ou morales ressortissantes d'Etats autres que les Etats européens (une définition large des Etats européens est fixée par le décret).

* 1 Les films non agrées sont soit les films financés par un producteur français mais ne pouvant être qualifiés d'oeuvres européennes, soit les films dits « sauvages », qui ne font pas appel à un financement encadré ou au soutien financier de l'Etat et dont la production n'est pas terminée. Par définition les films étrangers qui ne rentrent pas dans les critères de l'agrément sont également des films non agrées.

* 78 La souplesse introduite par la réforme - les films qui n'ont pas obtenu l'agrément avant le début des prises de vues ne sont plus exclus du bénéfice du soutien financier - a rendu quasi inexistant le nombre de films dits "sauvages". Seuls les films ne respectant pas les critères du barème de points européens et ne remplissant pas les conditions d'accès au barème du soutien financier (20 points sur 100) ne peuvent être agréés.

Cette réforme peut avoir eu pour effet d'accroître le nombre des films d'initiative française pris en compte dans les statistiques du CNC, un décalage d'une année sur l'autre pouvant se produire, puisqu'un film tourné une année donnée sans faire appel aux financements encadrés peut apparaître dans les statistiques de l'année suivante.

* 79 Les autres interventions du Centre national de la cinématographie concernent  notamment les industries techniques, l'édition vidéo, les associations et les festivals.

* 80 Le crédit inscrit à ce compte représente pour le producteur une part significative des revenus de son film. Le CNC l'évalue à environ 0,82 euro par entrée, soit plus de la moitié du recettes directes générées par l'exploitation en salle.

* 81 Le soutien investi fait l'objet d'une majoration de 25% pour les films tournés en version originale en langue française et peut être majoré lorsqu'il y a tournage en studio en France.

* 82 En 2000, la contribution d'Arte à la production cinématographique a représenté plus de 4% de son chiffre d'affaires.

* 83 Pour l'application de ces mesures, une entreprise de production cinématographique est, selon l'actuel article 3-2 du décret, réputée indépendante lorsque son capital social n'est pas détenu par le diffuseur à plus de 15 %, lorsqu'elle n'est pas contrôlée par un actionnaire ou un groupe d'actionnaires qui contrôle également le diffuseur et lorsqu'il n'existe pas entre elle et le diffuseur une communauté d'intérêts durable.

* 84 L'ensemble du dispositif a donné lieu à de nouveaux décrets, à la suite de la loi sur l'audiovisuel du 1 er août 2000.

* 85 La décision de la Commission du 24 juin 1998 a retenu quatre critères généraux : l'aide doit concerner les productions et non les structures ; l'intensité de l'aide doit être limitée à 50% du budget de production (un arrêt de la Cour de Justice de mars 2001 a par ailleurs admis que les obligations d'investissement des chaînes de télévision peuvent ne pas être qualifiées d'aides d'Etat) ; le producteur doit avoir la liberté de dépenser au moins 20% du budget du film dans d'autres Etats membres sans perte d'aide ; les aides complémentaires destinées à certaines prestations spécifiques ne sont pas autorisées.

* 86 Un film américain est distribué dans tous les pays européens en même temps (ce qui permet de réaliser des économies d'échelle dans la promotion et la commercialisation), alors que pour un film européen les distributeurs attendent de voir le succès qu'il a obtenu dans son pays d'origine pour envisager son exploitation dans les autres pays de la Communauté.

* 87 Aucun de ces distributeurs pris isolément n'a de position dominante, mais la distribution des films américains en Europe est organisée de manière concertée, entre les majors, à partir d'Hollywood, pour limiter les risques de concurrence frontale.

* 1 Dans chacun des pays européens considérés, ne sont ici comptabilisés que les films totalement ou majoritairement nationaux.

A noter qu'un certain nombre de films, comptabilisés en 2000 ou en 2001 comme films européens, sont des « coproductions » entre la Grande Bretagne et les Etats-Unis, comme James Bond : the world is not enough ; Tomorrow never dies ; Bean ; Evita ; Chicken Run ; Sliding doors ; Bridget Jones's diary ; Trainspotting ; Chocolat ;..

* 2 Sur ces 461 films, 191 ont été distribués par les Majors, 270 par des distributeurs indépendants (sans nécessairement être sortis en salles) .

* 3 Estimations

* 4 621 millions de livres, soit 1003 millions d'euros, sur la base de 1£ = 1,62 euros, taux moyen en 2000

5 7661 millions de dollars, soit 8733 millions d'euros, sur la base de de 1$ = 1,14 euros, taux moyen en 2000

* 4 Sur un total de « recettes guichet » aux Etats Unis évaluée à 7 661 Millions de dollars en 2000, et à 8 410 millions de dollars en 2001.

* 5 Ce chiffre représente la part distributeur producteur revenant aux films français, sur la recette guichet évaluée à 891,4 millions d'euros en 2000, et à 1 014 millions d'euros en 2001.

* 88 Un léger recul du coût moyen des films produit par les majors est intervenu en 2001, passant de 53 millions de dollars à 47,7 millions de dollars, mais les investissements dans le marketing ont continué à augmenter, passant de 27,3 millions de dollars en moyenne par film, à 31 millions de dollars.

* 89 Cette prise de position est d'autant plus intéressante, que W. Baumol est par ailleurs l'un des théoriciens qui ont participé, dans les années 80 et au début des années 90, à une redéfinition libérale des modes de régulation économique en matière de concurrence, à partir de la notion de « marchés contestables », à laquelle se réfèrent la plupart des procès antitrust américains depuis 1985.

Dans cette approche, la régulation repose non sur une référence formelle à une situation de concurrence parfaite, mais sur l'évaluation en fonction de l'intérêt général, de l'écart qui pourrait exister entre les performances observées et celles qui résulteraient d'une meilleure organisation. La définition de cet optimum, correspondant à une plus grande efficacité en termes de production (quantité, qualité, prix), de progrès technique, d'allocations des ressources et d'emploi, constitue la matière d'une abondante littérature dont émergent un certain nombre de notions nouvelles et de nouveaux critères d'évaluation, parmi lesquels celui de marché contestable, défini par Baumol comme « one into which entry is absolutely free, and exit is absollutely costless ».

* 90 Actes du colloque international sur « l'économie du spectacle vivant et de l'audiovisuel » / Nice -octobre 1984 ( La Documentation française)

* 91 En 1947, année où le cinéma avait enregistré 423 millions d'entrées, quatre films français avaient dépassé les 5 millions de spectateurs : Le bataillon du ciel , Monsieur Vincent , Pas si bête et Quai des orfèvres

* 92 CNC / Réponses aux questions du Sénat

* 93 Avec 41,5% de part de marché pour le cinéma français, les résultats de 2001 ont un caractère exceptionnel : sur les neuf premiers mois 2002, la part de marché des films français est estimée à 37,4 % contre 43,6 % sur les neuf premiers mois 2001 ; celle des films américains est estimée à 51,4 % contre 47,5 % en 2001.

* 94 Fin 2001, 56 départements possédaient au moins un multiplexe, contre 47 en 2000, 38 en 1999, 26 en 1998, 23 en 1997 et 8 en 1996. 21 des 22 régions françaises (toutes exceptée la Corse) étaient ainsi dotées d'au moins un multiplexe à la fin de l'année 2001. C'est surtout dans les régions les plus peuplées que ces établissements ont été implantés jusqu'à présent : Ile-de-France, Nord-Pas-de-Calais, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Rhône-Alpes et Pays de la Loire rassemblaient, à la fin de l'année 2001, près de 52 % des écrans et des fauteuils construits jusqu'à cette date au sein de multiplexes

* 95 16 multiplexes ont été ouverts en 2000, mais un multiplexe a fermé ses portes à Marseille. Le solde effectif entre 1999 et 2000 est donc de 15 établissements supplémentaires.

* 96 Groupement ou entente assurant la programmation des salles, lorsque celle-ci n'est pas assurée directement par les entreprises propriétaires du fonds de commerce

* 97 A l'exclusion des films en  « sortie technique », ou diffusés dans un seul établissement

* 98 Annexe

* 99 focus 2002 / Observatoire européen de l'audiovisuel.

* 100 Ces données n'ont qu'un caractère indicatif : le contenu des catalogues (nombre de films, durée des droits, modes d'exploitation couverts, version linguistique, territoires autorisés) évolue en permanence, et un même film peut apparaître dans plusieurs catalogues mais pour des droits différents.

* 101 Le catalogue de Canal +, premier catalogue français avec plus de 5 500 films, comporte 1815 films français, 2 035 films européens, 1540 films américains, et 110 « autres ». Le catalogue d'Universal est composé de 3 574 films dont des films de Steven Spielberg comme « Jurrasik Park », « ET » (auxquels s'ajoutent plus de 16 000 épisodes de télévision avec notamment des séries cultes comme Columbo ou Dream On). L'addition des catalogues de Canal + et d'Universal conduit à la création du premier catalogue de films au monde avec plus de 9 000 films.

Les Principaux catalogues européens sont ceux de Carlton (RU) avec1 500 films; Kirch (All) avec 2.700 films; CLT-UFA (All.Lux.) avec 2000 films.

* 102 Les recettes issues de leurs catalogues, estimées par les majors, à plus de 7 milliards de dollars par an, donnent la mesure des enjeux..

* 103 Avec les quelques mois de retard dus à la chronologie réglementaire des médias, les succès remportés par les films français en salles, en 2001, devraient toutefois se traduire par de bonnes ventes en vidéo en 2002.

* 104 CNC / Réponses aux questions du Sénat

* 105 Ce processus accentue le handicap des films européens par rapport aux films américains qui sortent en général simultanément dans tous les pays européens, et bénéficient à ce titre d'une économie d'échelle dans les frais de promotion. Il rend encore plus problématique la construction d'un « marché unique » du film européen.

* 106 Accorder plus d'un mandat pourrait dans certains cas faciliter le montage financier d'un projet, mais aboutirait à réduire les droits commerciaux résiduels dont disposent les producteurs pour assurer leur développement et à restreindre plus encore qu'aujourd'hui les possibilités d'intervention des distributeurs et des exportateurs indépendants. Ce qui aurait aussi pour effet de rendre la production de films et le contenu des projets, encore plus tributaires des priorités des chaînes de télévision.

* 107 Appliquées aux données du « Compte économique de l'audiovisuel », les évolutions enregistrées dans ces tableaux fournissent une estimation de la balance commerciale pour 2000 :

1996 (M€)

2000 (M€)

L'étranger achète

L'étranger vend

L'étranger achète

L'étranger vend

Aux producteurs

58,1

-

Aux producteurs

66,3

-

Aux distributeurs

61,9

235,6

Aux distributeurs

128,8

377,0

dont films français

20,6

dont films français

23,5

films étrangers

41,3

films étrangers

105,3

Aux éditeurs vidéo

17,2

Aux éditeurs vidéo

16,3

Aux opérateurs TV

37,2

Aux opérateurs TV

64,0

total

120

290

total

195,1

457,3

Déficit commercial

170

Déficit commercial

262,2

* 108 Il s'agit de 8 femmes et de Sur mes lèvres

* 109 Il semble que la réforme de l'agrément mise en place en 1999 ait partiellement contribué à ce phénomène. En effet, avant la réforme, ne pouvaient être agréés que les films ayant fait l'objet d'une demande d'agrément avant le début des prises de vues et dont le financement était assuré dès ce stade. La procédure laissait ainsi inévitablement de côté un certain nombre de films que l'on qualifiait de " sauvages ". La réforme de l'agrément a assoupli ce processus en permettant aux films ne faisant pas appel à des financements  encadrés  de demander l'agrément une fois terminés. Ainsi, parmi les 42 films dont le devis est inférieur à un million d'euros, pas moins de 15 films ont fait l'objet d'une demande d'agrément sur film terminé. Bien qu'il soit difficile de dénombrer parmi eux lesquels auraient pu être agréés dans l'ancien système, il paraît néanmoins indéniable que la réforme de l'agrément fait entrer dans les statistiques un certain nombre de films qui en auraient été exclus auparavant.

* 110 Ce statut est notamment nécessaire pour que les chaînes de télévision qui ont participé à leur financement, puissent les comptabiliser dans leur quota d'oeuvres de cinéma.

* 111 En tout état de cause, le courant de création dont participent ces films alimente la diversité et le renouvellement du cinéma français. Les 42 films d'un budget inférieur à 1 M€ produits en 2001 (soit le quart de la production française) représentaient moins de 3,6% des investissement dans le cinéma,  soit un pourcentage de recherche-développement tout à fait raisonnable.

* 112 Cette évolution n'est pas sans ouvrir un débat parmi les cinéastes français, illustré par les prises de position d'Olivier Assayas, dans le n° 568 des Cahiers du Cinéma consacré au cinéma français autour du monde, revendiquant « une conception apatride du cinéma » et déclarant « je ne supporte pas le chauvinisme diffus du discours économique sur le cinéma français. Qu'est-ce que j'en ai à faire que des navets français gagnent des parts de marché ...». Sans aller aussi loin, Charles Tesson, rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma constate : « qu'un cinéma d'auteur ambitieux puisse se maintenir grâce à sa reconnaissance internationale est une donnée nouvelle. L'exportation est au coeur de la définition esthétique du cinéma français ».

* 113 Observatoire européen de l'audiovisuel / la production de fiction en Europe, en 2001.

* 114 Inversement, introduire des possibilités de bonification pour le soutien automatique, justifierait d'envisager avec les professionnels un plafonnement de ce soutien pour les films à budget élevé. Il n'est pas anormal que les producteurs fassent le choix d'engager des dépenses considérables pour s'assurer la participation d'un comédien à forte notoriété, ou financer des effets spéciaux particulièrement spectaculaires. Il n'est pas absurde que les diffuseurs acceptent de participer à leur financement, s'ils considèrent que ce coût est justifié. Mais est-il légitime que la totalité de ces dépenses relève d'une aide automatique du CNC ?

* 115 Dans l'approche qui est exposée ici, un film commercial est un film qui est considéré comme tel par ceux qui investissent dans sa production.

* 116 En règle générale, l'investissement d'une chaîne de télévision et les aides du CNC assurent la plus grosse partie des besoins de financement. C'est au financement de la partie complémentaire, à risque élevé mais à fort rendement potentiel, qu'il importe d'intéresser des investisseurs. A chaque fois les sommes en jeu sont marginales par rapport au coût de la production ; à chaque fois, les profits à en attendre sont sans commune mesure avec les dépenses à engager.

* 117 Dans l'état actuel de la réglementation, l'entreprise de production doit, pour bénéficier du soutien, être établie en France et ne pas être contrôlée , directement ou indirectement par des personnes physiques ressortissantes d'Etats non européens, ou par des personnes morales établies sur le territoire d'Etats non européens.

* 118 Les majors américaines ont de plus en plus tendance à choisir des lieux de tournage hors Etats Unis, voire à créer des filiales locales, au gré des opportunités sociales, financières ou fiscales. Il n'est pas inutile de rappeler que les avantages fiscaux du système allemand des fonds de placement ont permis à Hollywood de collecter en 2001 quelques 2 milliards de dollars auprès des investisseurs d'outre-Rhin, à côté desquels les 25 millions d'euros mobilisées par les Soficas françaises pour financer les productions nationales représentent objectivement peu de choses.

* 119 Les conditions de délivrance de cette autorisation ont été fixées par une décision réglementaire de mars 1948.

* 120 Cette obligation s'accompagne de dispositions, qui peuvent apparaître trop rigides , et qu'un certain nombre de producteurs indépendants voudraient pouvoir moduler, comme celle qui concerne la limitation des mandats. Des dérogations devraient dans ce cas pouvoir être accordées par une instance de médiation

* 121 Le souci de préserver la diversité des entreprises et le pluralisme des contenus dans le secteur de la télévision, exprimé dans la Directive « télévision sans frontière », est présent dans la réglementation de la plupart des pays européens. Les réponses données varient d'un pays à l'autre, qu'il s'agisse des seuils anti-concentration (seuil capitalistique comme en France, ou part de marché comme en Grande -Bretagne ou en Allemagne), ou des dispositifs mis en place pour garantir le pluralisme (contrôle interne en Grande-Bretagne ou en Allemagne ; contrôle externe en France).

Dans d'autres domaines, comme la presse ou l'édition, la garantie de pluralisme et de diversité repose sur une combinaison d'autorégulation, de régulation sectorielle, et d'interventions publiques.

* 1 1 : premier film ; 2 :deuxième film ; 3 : autre

* 122 Ces chiffres comportent un certain nombre de doubles comptes, puisqu'une part du chiffre d'affaires des distributeurs, par exemple, provient des recettes des salles, des éditeurs vidéo, ou des chaînes de télévision. Il en est de même des recettes des producteurs.

* 1 La production totale est la somme du chiffre d'affaires, de la production stockée et de la production immobilisée

* 1 La production totale est la somme du chiffre d'affaires, de la production stockée et de la production immobilisée

* 1 La production totale est la somme du chiffre d'affaires, de la production stockée et de la production immobilisée

* 123 La production totale est la somme du chiffre d'affaires, de la production stockée et de la production immobilisée

* 124 En matière de cinéma, ce texte a été modifié ou complété à deux reprises depuis 1990 :

- par le décret n° 92-281 du 27 mars 1992 qui reprend pour les obligations de production, les nouvelles définitions des oeuvres d'expression originale française ou européennes, introduites par le décret n° 92-279 du 27 mars 1992 modifiant le décret n° 90-66 du 17 janvier 1990 relatif à la diffusion des oeuvres audiovisuelles et cinématographiques ;

- par le décret n° 99-189 du 11 mars 1999, qui introduit l'obligation pour les diffuseurs d'investir au moins 75 % de leurs dépenses dans la production d'oeuvres cinématographiques, dans des oeuvres produites par des sociétés indépendantes.

* 125 Pour l'application de ces mesures, une entreprise de production cinématographique est, selon l'actuel article 3-2 du décret, réputée indépendante lorsque son capital social n'est pas détenu par le diffuseur à plus de 15 %, lorsqu'elle n'est pas contrôlée par un actionnaire ou un groupe d'actionnaires qui contrôle également le diffuseur et lorsqu'il n'existe pas entre elle et le diffuseur une communauté d'intérêts durable.

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