D. INVESTIR DANS LES JEUNES ENTREPRISES INNOVANTES

Les privatisations ont accéléré le développement des placements en actions des grandes sociétés cotées. L'épargne salariale tend à favoriser l'actionnariat salarié. Il est important de ne pas négliger l'investissement dans les fonds propres des petites entreprises innovantes, qui présentent certes un risque de défaillance élevé, mais recèlent de grands potentiels de croissance. Les fonds de capital-investissement et les sociétés de capital-risque jouent le rôle d'intermédiaire entre les jeunes entreprises de croissance et les épargnants. Des dispositions fiscales incitent les ménages à choisir ce type de placement. Le projet de créer des fonds d'investissement de proximité devrait permettre de conforter le système français de capital-risque.

1. Les acteurs du capital-investissement

Les acteurs du capital-investissement sont les sociétés de capital-risque, et des types particulier de fonds communs de placement que sont les FCPR (fonds communs de placement à risque) et les FCPI (fonds communs de placement dans l'innovation).

a) Les sociétés de capital-risque

Depuis une loi du 30 décembre 2000, les sociétés françaises par actions dites « de capital-risque » ont pour objet social exclusif la gestion d'un portefeuille de titres de sociétés non cotées. Leur actif peut néanmoins comprendre des liquidités, ainsi que les biens meubles et immeubles nécessaires au fonctionnement de la société.

Toutefois, ne bénéficient d'un régime fiscal spécial que les sociétés de capital-risque dont la situation nette comptable comprend au moins 50 % d'actions, de parts, de titres participatifs, d'obligations convertibles ou de titres assimilés, de sociétés ayant leur siège dans un État de la Communauté européenne, dont les titres ne sont pas admis à la négociation sur un marché réglementé, et qui exercent une activité industrielle ou commerciale.

Les sociétés de capital-risque qui respectent ces conditions sont exonérées d'impôt sur les sociétés sur les produits courants, et les plus-values de cession des titres compris dans leur portefeuille.

Les actionnaires des sociétés de capital-risque sont exonérés d'impôt sur le revenu sur les dividendes perçus, sous certaines conditions (essentiellement une condition de durée de détention des actions, et de réinvestissement des dividendes perçus).

Ce régime fiscal attractif doit inciter les épargnants à investir, dans la durée, dans les sociétés de capital-risque. Il vient compenser une prise de risque élevée. Les sociétés de capital-risque contribuent au financement de jeunes entreprises qui n'ont pas accès au marché boursier.

b) Les fonds communs de placement à risque (FCPR)

Créés en 1983, les fonds communs de placement à risque sont une catégorie particulière de fonds communs de placement. Leur caractéristique essentielle tient à la composition de leur actif, qui comprend au moins 50 % d'actions non cotées, ou cotées au nouveau marché (sociétés dont le siège se trouve dans un État de l'Union européenne).

Cette composition particulière de leur actif justifie que les FCPR soient soumis à un régime fiscal plus avantageux que les FCP ordinaires. Les personnes physiques qui souscrivent des parts de FCPR peuvent en effet prétendre à l'exonération des produits et des plus-values réalisées dans ce cadre, à conditions de respecter certaines conditions. Ces conditions sont proches de celles prévues pour les sociétés de capital-risque, à savoir, essentiellement, une durée minimale de détention des parts de FCPR (cinq ans), et une obligation de réinvestir dans le fonds les sommes réparties pendant cette période de cinq ans.

c) Les fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI)

Créés par la loi de finances pour 1997, les FCPI constituent une dérogation au régime des FCPR. 60 % au moins de leur portefeuille doit être constitué de titres de petites sociétés non cotées, innovantes, et détenues majoritairement par des personnes physiques . Les placements dans les FCPI donnent droit à une réduction d'impôt sur le revenu, égale à 25 % des souscriptions en numéraire de parts de FCPI, à condition de prendre l'engagement de conserver les parts de fonds pendant cinq ans au moins à compter de leur souscription, dans la limite de 12 000 euros par an (le double pour un couple).

2. Un essor récent du capital-investissement en France

Si l'apparition du capital-risque en France est déjà ancienne, les années récentes ont connu une forte croissance des capitaux collectés et des investissements réalisés. Entre 1995 et 2002, les capitaux levés par l'intermédiaire des fonds de capital-investissement et sociétés de capital-risque ont été multipliés par huit, et les investissements par cinq.

Situation du capital-investissement en France

(en milliards d'euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

201

2002*

Capitaux levés

0,53

0,72

0,66

2,60

3,26

6,11

5,1

4,2

Investissements réalisés

0,75

0,87

1,26

1,79

2,82

5,30

3,29

3,52

Dont amorçage/création

0,08

0,15

0,17

0,26

0,52

1,16

0,56

0,46

* Données provisoires pour 2002

Source : AFIC-PWC, communication du 11 mars 2003 et rapport 2001 sur l'activité du capital-investissement

Ne sont investis dans l'amorçage et la création d'entreprise que 12,9 % des investissements réalisés par les institutions de capital-investissement. L'entreprise naissante reste donc encore peu prise en compte par comparaison avec les autres cibles du capital-investissement que sont les entreprises déjà matures, en développement, ou celles susceptibles de faire l'objet d'une reprise.

Investissements des sociétés de capital-investissement
par stade

(en millions d'euros)

2002*

Amorçage

65

Création/post-création

390

Développement

691

Transmission

2 201

Rachats minoritaires

177

Total des montants investis

3 524

Pour mémoire
- Investissements amorçage + création/post-création
- Part de ces investissements dans le total


455
12,9 %

* Données provisoires pour 2002

Source : AFIC-PWC, communication du 11 mars 2003

Les placements dans les fonds de capital-risque connaissent une diffusion croissante parmi les épargnants. Si les fonds communs de placements à risque paraissent réservés à un public averti, voire à des investisseurs institutionnels, la diffusion publique des FCPI a beaucoup progressé depuis leur création, quoique l'on observe un recul en 2002, résultat d'une plus grande prudence des épargnants dans un contexte devenu moins favorable à l'investissement dans les petites entreprises de croissance.

Situation des FCPI au 31 décembre 2002

Année

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Nombre de FCPI créées

5

5

11

17

30

31

Souscription en millions d'euros

67

151

248

421

567

370

Source : Commission des opérations de bourse

Les réseaux bancaires jouent un rôle prépondérant dans la distribution des FCPI. L'argumentaire de placement repose largement sur la fiscalité applicable.

3. Une comparaison avec d'autres pays développés suggère cependant que le capital-investissement conserve en France une importante marge de progression

Si le secteur français du capital-investissement n'est pas mal placé par rapport à d'autres pays d'Europe continentale, il reste en retrait par rapport aux Pays-Bas, et surtout au Royaume-Uni.

Investissements réalisés par les institutions de capital-investissement
en Europe

Royaume-Uni

Source : BIPE (2002)

L'Europe dans son ensemble consacre beaucoup moins de fonds au capital-investissement que les Etats-Unis. Alors qu'en 2000 les fonds récoltés par le capital-risque aux Etats-Unis s'élevaient à 160 milliards d'euros, soit près de 2 % du PIB américain, les fonds récoltés en Europe représentaient 50 milliards d'euros, soit un tiers du niveau des Etats-Unis, et moins de 0,5 % du PIB européen.

Fonds récoltés pour le capital-investissement Europe/Etats-Unis

Source : BIPE (2002)

Le Gouvernement a diagnostiqué une faiblesse du capital-investissement orienté vers les PME régionales de taille moyenne, dont la valorisation est comprise entre cinq et cinquante millions d'euros. Cette faiblesse ne résulte pas d'une pénurie d'épargne, ni sur un plan macroéconomique, ni sur un plan territorial, mais du manque d'outils permettant une intermédiation de proximité. C'est la raison pour laquelle est proposée, dans le cadre de la loi pour l'initiative économique, la création de Fonds d'investissement de proximité (FIP) 28 ( * ) .

4. La proposition de créer des fonds d'investissement de proximité

Les FIP se présentent comme une nouvelle catégorie de fonds communs de placements à risque. Leurs investissements ne pourront s'effectuer que dans une zone géographique déterminée, limitée à une, deux, ou trois régions limitrophes, ce qui fait d'eux des fonds dotés d'un fort ancrage territorial.

Les réseaux bancaires devraient jouer un rôle capital dans la promotion de ce support d'épargne auprès des ménages. Les FIP seront d'abord destinés aux personnes physiques, puisque la part que pourront prendre les investisseurs institutionnels dans l'apport de capitaux aux FIP devrait rester minoritaire.

Les FIP devront investir au moins 60 % des fonds récoltés dans des valeurs mobilières, ou des parts sociales, émises par des PME, dans des parts de FCPR, ou enfin dans des actions de sociétés de capital-risque. Ce quota de 60 % devra être atteint dans un délai, assez bref, de deux ans.

Les incitations fiscales accompagnant les FIP seraient les mêmes que celles applicables aux FCPI.

La création des FIP est suspendue à l'adoption définitive de la loi sur l'initiative économique par le Parlement. Les grandes lignes du dispositif ne devraient cependant plus être modifiées. La création des FIP est susceptible de donner une nouvelle impulsion décisive au développement du capital-investissement dans nos régions, et est donc approuvée sans réserve par votre rapporteur. La création de ces fonds est également approuvée par la Commission spéciale crée au Sénat pour examiner le texte de loi.

* 28 Cette loi, non encore entrée en vigueur, a été votée en deuxième lecture par le Sénat le 18 juin 2003.

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