Rapport d'information n° 71 (2003-2004) de M. Yves FRÉVILLE , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 novembre 2003

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N° 71

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 2003

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur les dégrèvements d'impôts locaux ,

Par M. Yves FRÉVILLE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, René Trégouët.

Impôts et taxes.

INTRODUCTION

La taxe d'habitation n'est plus un vrai impôt local : la moitié des contribuables ne paie plus ou ne paie que partiellement cet impôt qu'en fonction de leurs revenus, sans que subsiste un quelconque lien avec l'impôt sur l'habitation voté par les collectivités locales.

Un coin fiscal à la charge de l'Etat a été enfoncé entre la recette perçue par les collectivités locales et l'impôt payé par les contribuables. Il représente 30 % de la taxe d'habitation assise sur les résidences principales et prend essentiellement la forme de crédits inscrits au titre I du budget des charges communes au titre des dégrèvements législatifs dont bénéficient les contribuables locaux. Il revient donc à votre rapporteur spécial du budget des charges communes, en application de l'article 57 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, d'évaluer l'efficacité de cette politique mise en place par étapes depuis 1982 et parachevée en 2000.

Cette politique de dégrèvements législatifs a une cause : la non-réforme de la taxe d'habitation. Non seulement l'assiette de cet impôt , la valeur locative du logement, est légèrement dégressive par rapport au revenu 1 ( * ) mais surtout ses bases continuent à être évaluées en fonction des résultats, désormais totalement obsolescents, de la révision de 1970. Les deux réformes proposées en 1990 par la majorité d'alors - taxe départementale sur le revenu et révision des valeurs locatives - n'ont pas été poursuivies par leurs initiateurs. Les mesures de dégrèvements législatifs ont donc eu pour objectif de corriger une situation jugée inéquitable pour des contribuables de plus en plus nombreux face à un impôt que l'on ne savait comment réformer.

Cette politique a aussi une conséquence imprévue: c'est d'inciter à la non-réforme de la taxe d'habitation ! Pourquoi réformer un impôt dont le poids a été largement allégé ? Une double anesthésie des élus et des contribuables locaux est en effet mise en place puisque les augmentations éventuelles de la pression fiscale locale ont cessé d'être ressenties par la moitié des contribuables-électeurs.

Cette politique a enfin un impact financier qui obère les relations entre l'Etat et les collectivités locales. Sur le plan budgétaire, la montée en puissance des dégrèvements législatifs, de taxe d'habitation mais aussi de taxe professionnelle, au début de la dernière décennie ne pouvait qu'induire un freinage de la croissance des dotations d'Etat.

Les dégrèvements législatifs, même s'ils sont d'abord des aides individuelles apportées à certains contribuables, constituent également des « subventions implicites » aux collectivités territoriales où résident ces contribuables. Ces « subventions implicites » n'apparaissent pas dans les budgets locaux, leur montant exact n'est même pas connu des élus ; elles n'en constituent pas moins un transfert financier de l'Etat au bénéfice des collectivités dont la répartition spatiale doit être rendue transparente, ne serait-ce que pour être comparée à celle des autres dotations de l'Etat. Au moment où le principe de péréquation vient d'être inscrit dans la Constitution, on peut utilement se demander si ces subventions implicites ont un caractère péréquateur et si, en favorisant les collectivités qui recourent le plus à l'impôt, elles ne vont pas à l'encontre du principe de neutralité face aux choix fiscaux locaux qui fonde le choix du potentiel fiscal comme critère de péréquation

Votre rapporteur spécial a déjà attiré à plusieurs reprises l'attention du Parlement dans ses rapports concernant le budget des charges communes sur la répartition des dégrèvements législatifs entre collectivités locales . Il lui a semblé qu'une étude d'ensemble de cette question méritait d'être entreprise au moment où l'on s'interroge sur ce que doivent être les ressources propres nécessaires à la mise en oeuvre du principe d'autonomie fiscale des collectivités locales : un impôt payé par l'Etat est-il encore une ressource propre ?

Cette étude a été entreprise dans une terra incognita , à partir des fichiers informatiques de différentes administrations et au niveau des 36.500 communes françaises de métropole 2 ( * ) . Il a fallu constituer au niveau communal un ensemble cohérent de données fiscales et résoudre de nombreuses difficultés méthodologiques 3 ( * ) , la moindre n'étant pas la détermination du montant des dégrèvements attribuable à chaque collectivité. Il a semblé à votre rapporteur spécial que la découverte de cette terre inconnue pouvait s'effectuer à l'aide de nombreux graphiques faisant apparaître à la fois l'extrême diversité des situations locales et l'existence de tendances lourdes, telle la concentration des dégrèvements dans les zones urbaines de province.

Cette étude a été effectuée à partir des données de 2001, dernière année pour laquelle des résultats complets étaient disponibles lorsqu'elle fut entreprise. Ce choix chronologique rend possible l'évaluation des conséquences de la réforme des dégrèvements de taxe d'habitation intervenue en 2000 et l'utilisation des statistiques établies pour la première fois par l'INSEE sur la répartition des revenus dans chaque commune en 2000.

Après le rappel dans un chapitre premier des lignes directrices de la politique des dégrèvements et de son coût pour l'Etat, trois questions seront successivement posées :

Combien de contribuables bénéficient d'allègements de la taxe d'habitation et comment se répartissent-ils entre les collectivités locales ? (chapitre deux).

Comment et en fonction de quelles variables se ventilent les subventions implicites de l'Etat entre les diverses collectivités locales ? (chapitre trois).

Cette répartition spatiale des dégrèvements législatifs a t-elle ou non un caractère péréquateur ? (chapitre quatre).

Votre rapporteur spécial estime que les dégrèvements d'office constituent un mécanisme pervers du fait de sa non-transparence . Il faudra envisager leur suppression et le recyclage de leur montant en dotations d'Etat à caractère péréquateur lorsque sera mise en chantier une réforme en profondeur de la taxe d'habitation qui passe nécessairement par une révision des bases. Mais la définition des lignes directrices d'une telle réforme dépasse évidemment le cadre de ce rapport d'information. Votre rapporteur spécial s'est donc borné à mettre en lumière les contradictions entre la pratique des dégrèvements d'office et les autres objectifs de la politique de développement des responsabilités locales et à émettre, en conclusion, diverses recommandations permettant d'en atténuer les conséquences.

AVERTISSEMENT

L'étude présentée dans les chapitres deux à quatre a été effectuée à partir de fichiers de très grande taille relatifs aux données communales de 2001.

Il n'a pas été possible de convertir les données de ces fichiers de francs en euros.

CHAPITRE PREMIER :
LA NATIONALISATION PARTIELLE DE LA TAXE D'HABITATION

La taxe d'habitation est devenue progressivement un impôt à double assiette et double taux.

La cotisation normale de taxe d'habitation correspond à un impôt local : elle est déterminée par application à la valeur locative nette de l'habitation, d'un taux global d'imposition, somme des taux votés par le département, la commune et, le cas échéant, l'EPCI. Les deux caractéristiques d'un impôt local sont réunies : d'une part, la base d'imposition est localisée, d'autre part le taux de l'impôt est fixé librement 4 ( * ) par les collectivités locales. C'est de plus un « bon » impôt local en ce sens qu'il est supporté effectivement par le contribuable qui n'a pas la possibilité de le rejeter sur d'autres agents par les mécanismes classiques de translation de l'impôt 5 ( * ) .

Mais, suite à un ensemble de mesures votées depuis une quinzaine d'années, le redevable de la taxe d'habitation peut soit en être exonéré ou dégrevé totalement en raison notamment de la faiblesse de son revenu, soit voir sa cotisation plafonnée en fonction du niveau de son revenu et du nombre de parts de son quotient familial. Dans tous ces cas, la taxe d'habitation s'apparente à un impôt national . Son assiette, en cas de plafonnement, n'a plus aucun lien avec le logement mais est constituée par le revenu du contribuable. Son taux (ou son non-paiement) est déconnecté de tout choix fiscal local et dépend uniquement de décisions législatives à portée nationale. Toutefois, cette métamorphose de la taxe d'habitation en impôt à caractéristiques nationales n'est parfaite que pour le contribuable individuel. L'Etat verse en effet aux collectivités locales tout ou partie de la perte de recettes générée par le passage de l'impôt local assis sur le logement à l'impôt fonction du revenu.

L'objet de ce chapitre sera donc de préciser d'abord sous un angle institutionnel la frontière entre ces deux aspects, local et national, de la taxe d'habitation pour le contribuable (I), puis d'en apprécier les conséquences sur les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales (II).

I. LES ALLÈGEMENTS INDIVIDUELS TRANSFORMENT PARTIELLEMENT LA TAXE D'HABITATION EN UN IMPÔT SUR LE REVENU

La personnalisation de la taxe d'habitation a longtemps été assurée par les seuls abattements locaux (à la base ou pour charge de famille) qui ne modifient pas la matière imposable (l'occupation d'un logement). En revanche, les mesures nationales d'allègement sont prises directement ou indirectement en fonction du revenu du contribuable. On précisera donc la frontière entre le champ d'application des mesures d'allègement de l'impôt en fonction du revenu et celui du régime normal de la taxe (A). Mais il existe un autre régime de taxe d'habitation dans la mesure où les résidences secondaires obéissent à des règles spécifiques ne laissant aucune place à la personnalisation de l'impôt ce qui justifie leur exclusion du champ de cette évaluation (B).

A. LES MESURES NATIONALES D'ALLÈGEMENT DÉPENDENT PRINCIPALEMENT DU REVENU DU CONTRIBUABLE

Un contribuable normalement assujetti à la taxe d'habitation à raison de l'occupation d'un logement à titre de résidence principale au 1 er janvier de l'année peut être placé dans l'une des trois situations suivantes :

• Il ne paie aucune taxe d'habitation parce qu'il en est soit dégrevé totalement, soit exonéré.

• Il bénéficie d'un plafonnement de son imposition grâce à un dégrèvement partiel qui déconnecte le calcul de sa cotisation de toute référence à la valeur du logement occupé.

• Il acquitte la cotisation normale de taxe d'habitation.

« Revenu fiscal de référence » et « ménage fiscal ».

Dans tous les cas, lorsqu'il est fait appel au revenu du contribuable, ce revenu est le revenu fiscal de référence défini au IV de l'article 1417 du code général des impôts. Ce revenu s'entend du montant net des revenus et plus-values retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, majoré de divers compléments (bénéfices exonérés ou charges déduites) et notamment des revenus soumis à des prélèvements libératoires.

Ce revenu fiscal de référence est de plus, sauf exceptions, déterminé par « ménage fiscal ». Ce terme commode qui n'apparaît pas dans la législation fiscale, mais est utilisé par l'INSEE signifie qu'il est tenu compte de l'ensemble des revenus fiscaux des personnes cohabitant dans le même logement à titre de résidence principale, qu'il s'agisse d'un seul foyer fiscal, ou de plusieurs foyers fiscaux distincts cohabitant dans le même logement (concubins, ascendants, enfants non rattachés au foyer fiscal de leurs parents, frères et soeurs). De même, lorsqu'il est fait état du nombre de parts de quotient familial, il s'agit de la somme des parts des divers foyers fiscaux constituant le « ménage fiscal ».

Les deux notions de « résidence principale » et de « ménage fiscal » peuvent donc être considérées comme équivalentes pour l'analyse statistique.

1. Le redevable ne paie pas de taxe d'habitation si son revenu est inférieur à un certain minimum ou s'il est placé dans une situation laissant présumer qu'il est sous ce minimum

Tableau 1-1
Principaux cas d'exonération ou de dégrèvement total

La première ligne du tableau 1-1 montre que la mesure générale de plafonnement des impositions en fonction du revenu aboutit à un dégrèvement total lorsque le revenu de référence est inférieur à un seuil de non-imposition, partiellement indexé sur le nombre de parts de quotient familial dont bénéficie le redevable.

Les deux lignes suivantes montrent que ce seuil de non-imposition double pratiquement lorsque le contribuable passe la barre des 60 ans ou qu'il est placé dans d'autres situations particulières (veuvage par exemple).

Dans les deux derniers cas, aucune condition de revenu n'est directement exigée du bénéficiaire de l'exonération ou du dégrèvement total, mais la condition de situation personnelle laisse présumer un « revenu modeste ». La principale exception est la prolongation d'un an du dégrèvement total pour les ex-bénéficiaires du RMI à leur sortie de ce dispositif pour éviter toute désincitation à la reprise d'un emploi.

Lorsque le seuil de non-imposition est franchi, le redevable peut bénéficier d'un dégrèvement partiel.

2. Le redevable bénéficiant d'un dégrèvement partiel paie une cotisation plafonnée en fonction de son revenu et de son quotient familial

Le plafonnement de la cotisation en fonction du revenu du redevable sera d'abord envisagé dans le cas simple où le quotient familial de ce dernier n'est que d'une seule part. On présentera ensuite l'impact du quotient familial, les particularités d'un régime transitoire, et les conséquences du régime de plafonnement sur la localisation des agents.

Toutes les données numériques en euros font référence au barème de 2003.

a) La règle de plafonnement de l'imposition en fonction du revenu est soumise à une double condition de revenu pour un redevable ne disposant que d'une part de quotient familial

D'abord le revenu fiscal de référence, R , du contribuable doit être inférieur à un revenu plafond de 16.567 euros.

Ensuite son imposition C de taxe d'habitation ne peut être supérieure à 4,3 % de son revenu déduction faite d'un abattement de 3.593 euros. (Si le revenu est inférieur à cet abattement de 3.593 euros, le contribuable est totalement dégrevé).

Si ces deux conditions sont réunies, le contribuable est dégrevé de l'excédent de sa cotisation par rapport à 4,3 % de son revenu après abattement . Il est donc assujetti à un impôt T ne dépendant plus de son imposition normale en fonction de la valeur locative de son logement :

• Si R < 3.593, alors T = 0 (dégrèvement total)

• Si 3.593 < R < 16.567 et si C > 0,043 (R - 3593),
alors T = 0,043 (R - 3.593)

Cette formule montre que l'impôt dû en cas de plafonnement en fonction du revenu est caractérisé par un taux marginal constant de 4,3 % et qu'il est progressif (son taux moyen varie entre un minimum de 0 % et un maximum de 3,37 % lorsque le revenu de référence passe de 3.593 euros à 16.567 euros).

La portée de ce plafonnement est précisée à l'aide de trois exemples illustrés par des graphiques qui permettent de visualiser l'évolution de la situation d'un contribuable lorsque son revenu de référence, représenté sur l'axe horizontal, varie. Le segment de droite oblique représente la cotisation plafonnée en fonction du revenu fiscal de référence.

Les deux premiers graphiques correspondent au cas d'un contribuable célibataire qui devrait acquitter une taxe d'habitation avant dégrèvement de 300 euros.

Graphique 1-1
le contribuable est âgé de moins de 60 ans.

Si son revenu de référence est inférieur à 3.593 euros, il est dégrevé totalement.

Si son revenu de référence est compris entre 3.593 euros et 10.570 euros, sa cotisation est plafonnée.

Si son revenu est supérieur à 10.570 euros, il s'acquitte de sa cotisation normale de 300 euros. On remarquera que dans ce cas, le revenu-plafond de 16.567 euros ne joue aucun rôle.

Graphique 1-2
le contribuable est âgé de plus de 60 ans.

Dans ce cas, le contribuable, vu son âge, est susceptible d'être exonéré au lieu d'être dégrevé totalement.

Si son revenu est inférieur à 7.046 euros, il est exonéré.

Si son revenu est compris entre 7.046 euros et 10.570 euros, sa cotisation est plafonnée.

Si son revenu de référence est supérieur à 10.570 euros, il s'acquitte de sa cotisation normale de 300 euros.

Le graphique suivant illustre la situation d'un contribuable de moins de 60 ans dont la taxe d'habitation avant dégrèvement est nettement supérieure (700 euros).

Graphique 1-3
le contribuable, âgé de moins de 60 ans est redevable d'une taxe avant dégrèvement de 700 euros

Dans le troisième cas, le redevable âgé de moins de 60 ans est redevable d'une taxe avant dégrèvement de 700 euros.

Si son revenu est inférieur à 3.593 euros, il est toujours dégrevé totalement.

Si son revenu est supérieur à 3.593 euros mais inférieur au revenu plafond de 16.567 euros, sa cotisation est plafonnée en fonction de son revenu (elle est au maximum de 558 euros).

Si son revenu est supérieur au revenu plafond de 16.567 euros, il s'acquitte de sa cotisation normale de 700 euros.

On constate de plus que le passage au dessus du revenu plafond entraîne un fort ressaut de l'impôt à acquitter (de 558 euros à la cotisation due, en l'espèce de 700 euros.

b) Les dispositions précédentes de plafonnement en fonction du revenu sont adaptées pour tenir compte de la composition du ménage fiscal, mais de façon marginale

Les montants du revenu-plafond et du seuil de non-imposition sont en effet relevés 6 ( * ) lorsque s'accroît le nombre de parts de quotient familial du redevable, mais sans que soit obtenue la neutralité du barème lorsqu'il est exprimé par part de quotient familial comme le montre le tableau 1-2.

Le seuil de dégrèvement total est nettement à l'avantage du contribuable célibataire sans personne à charge (une part de quotient familial) : il est supérieur de 40 % par part à celui du couple avec deux enfants (trois parts), le moins avantagé. Mais l'écart est encore plus marqué pour le revenu-plafond au delà duquel disparaît la possibilité de dégrèvement partiel, puisqu'il atteint 85 % par part entre le célibataire et la famille de quatre enfants (ou le ménage fiscal composé de trois adultes).

Tableau 1-2
Barème 2003 du plafonnement de la taxe d'habitation

(en euros par part de quotient familial)

 

seuil de dégrèvement total

seuil de pleine imposition

Dégrèvement maximum par part

1 part

3 593

16 567

558

1,5 part

3 087

13 625

453

2 parts

2 835

11 742

383

2,5 parts

2 683

10 611

341

3 parts

2 582

9 858

313

3,5 parts

2 738

9 319

283

4 parts

2 855

8 916

261

Il n'est cependant pas certain qu'une analyse par part de la structure du barème (se fondant sur le respect du principe d'équité horizontale) soit totalement pertinente. Le principe du dégrèvement partiel s'appuie en effet sur le fait que le loyer des logements (que devrait refléter leur valeur locative) est régressif par rapport au revenu et que les petits logements sont relativement plus coûteux (au m²) que les grands.

c) Dans quels cas, a contrario, le redevable acquitte-t-il sa cotisation normale de taxe d'habitation ?

C'est d'abord le cas lorsque le revenu fiscal de référence est supérieur au seuil de pleine imposition fixé par l'article 1417 du code général des impôts. On ne peut en effet bénéficier d'un dégrèvement partiel attribué en fonction du revenu que si ce dernier est inférieur à ce revenu-plafond 7 ( * ) .

C'est ensuite le cas lorsque la cotisation de taxe d'habitation est inférieure à 4,3 % du revenu fiscal de référence après abattement (soit en raison de la modicité relative de la base nette d'imposition, soit en raison du faible niveau de la pression fiscale locale), même si le revenu de référence est inférieur au seuil de pleine imposition.

Du fait de la complexité de ces dispositions, il a paru utile d'établir un tableau à double entrée permettant de déterminer directement, à partir d'un revenu fiscal de référence 8 ( * ) donné (en ligne) et un nombre de parts de quotient familial ( en colonne ) le montant maximum de taxe d'habitation exigible d'un contribuable en 2003. Il fournit également pour chaque valeur du quotient familial le seuil de non imposition (dégrèvement total) et le seuil de pleine imposition.

Ce tableau ne tient cependant pas compte d'un régime transitoire maintenu jusqu'en 2004 en faveur des ménages fiscaux composés de « cohabitants » 9 ( * ) . Pour déterminer le revenu fiscal de référence dans le cas général, il est en effet tenu compte de l'ensemble des revenus du « ménage fiscal ». Or, dans le système de dégrèvement partiel antérieur à 2001, seul le revenu du contribuable au nom duquel la taxe était établie (et non celui de l'ensemble des cohabitants) était pris en compte et un dégrèvement partiel pouvait être accordé pour la part de cotisation excédant 3,4 % de ce revenu fiscal de référence .

Cette modalité subsiste jusqu'en 2004 10 ( * ) lorsqu'elle est plus avantageuse pour le contribuable que le plafonnement de sa cotisation à 4,3 % de la somme des revenus fiscaux de référence (après abattement) des cohabitants.

Tableau 1-3
BAREME 2003 du plafonnement de la taxe d'habitation en fonction du revenu fiscal de référence et du nombre de parts de quotient familial du « ménage fiscal ».

3. Le redevable dégrevé partiellement ne tient plus compte de la taxe d'habitation dans ses choix de localisation

Les mesures de plafonnement de la taxe d'habitation ne sont pas sans effets sur les choix des contribuables en matière de localisation et de choix d'un logement.

La taxe d'habitation (et le cas échéant la taxe foncière) est un élément du choix d'un logement plus ou moins grand ou différemment situé pour tout contribuable qui souhaite soit en changer à l'intérieur d'une même ville, soit aller habiter dans une autre commune (dans la même agglomération ou dans une autre). Ce facteur joue pleinement pour le contribuable non dégrevé. En revanche il disparaît à la hausse comme à la baisse pour un contribuable partiellement dégrevé, dont le revenu est inférieur au revenu fiscal de référence.

Considérons d'abord le cas d'un contribuable mobile à l'intérieur d'une commune donnée dont le revenu fiscal de référence est donné et qui bénéficie pour le logement A qu'il occupe actuellement d'un dégrèvement partiel de 100 euros pour une cotisation de taxe d'habitation de 400 euros. Qu'arrive-t-il s'il choisit un plus grand logement B pour lequel il devrait payer une taxe d'habitation de 800 euros ? Rien, car l'Etat prendra en charge la totalité de l'augmentation de l'impôt sous forme d'un dégrèvement de 700 euros 11 ( * ) .

En soi, ce résultat ne serait en rien anormal si la taxe d'habitation était un impôt sur le revenu pour tous. Il rompt en revanche l'égalité entre contribuables dès lors que la taxe d'habitation devient un impôt mixte assis à taux variable sur le logement pour les uns, et à taux fixe sur le revenu pour les autres.

Mais un résultat absolument similaire apparaît dans le cas d'un contribuable amené à changer de ville ou souhaitant se déplacer au sein d'une agglomération multi-communale. Admettons qu'il veuille conserver un logement similaire à celui qu'il occupe dans sa commune d'origine A et pour lequel il paie une cotisation de 400 euros dégrevée à hauteur de 100 euros. et que la commune B où il souhaite se déplacer lève la taxe d'habitation à un taux double de celui pratiqué dans sa commune de départ A, ce qui correspond à un doublement de la cotisation avant dégrèvement, soit 800 euros. Si ce contribuable est dégrevé partiellement, il sera insensible à cette augmentation pour lui purement virtuelle de l'impôt local. En d'autres termes, la taxe d'habitation n'envoie plus de signaux corrects sur le poids réel de la fiscalité locale aux contribuables dégrevés. Le contribuable dégrevé n'a plus intérêt à fuir les communes surimposées en votant avec les pieds. Il a sans doute au contraire intérêt à s'y déplacer pour bénéficier de services locaux développés...financés par l'Etat !

B. LES RÉSIDENCES SECONDAIRES NE BÉNÉFICIENT PAS DES MESURES D'ALLÈGEMENT

De manière générale, les mesures d'allègement de la taxe d'habitation en fonction du revenu ne s'appliquent qu'aux résidences principales. La taxe d'habitation d'une résidence secondaire garde ainsi son caractère d'impôt strictement réel . La base d'imposition d'une résidence secondaire est constituée de la valeur locative brute (VLB) du local d'habitation et de ses dépendances que ne viennent réduire ni les abattements obligatoires, ni les abattements facultatifs à la base ou pour charge de famille votés par les assemblées locales 12 ( * ) . A fortiori , les mesures nationales de personnalisation de l'impôt en fonction du revenu ne s'appliquent pas.

En outre, la taxation des résidences secondaires obéit à des règles particulières les pénalisant en matière de taux . Elles continuent à supporter une majoration de cotisation de 3,6 % au profit de l'Etat au titre des frais d'assiette et de recouvrement, majoration dont sont désormais dispensées les résidences principales. Les résidences secondaires à valeur locative élevée supportent en outre des majorations de cotisation de 1,2 % ou de 1,7 %, alors que celles-ci sont limitées à 0,2 % pour les résidences principales.

La portée des mesures de personnalisation de la taxe d'habitation s'appréciant par rapport aux seules résidences principales, il a paru logique d'éliminer les résidences secondaires du champ de l'étude. On a donc isolé pour chaque collectivité la part des résidences secondaires dans les statistiques de la taxe d'habitation (nombre de locaux, valeurs locatives brutes et produit des cotisations). Celles-ci ne sont pas en effet réparties uniformément sur le territoire national, mais concentrées dans les communes touristiques maritimes ou montagnardes, même si un parc significatif de logements occasionnels 13 ( * ) se développe dans les villes. Pour illustrer ce phénomène de concentration des résidences secondaires, on a choisi comme indicateur 14 ( * ) le pourcentage de leurs bases brutes dans les bases brutes totales de la commune. Le tableau suivant fournit la liste des communes de plus de 10.000 habitants où la proportion des résidences secondaires est supérieure à 10 % et celle des communes de plus de 1.000 habitants où elle est supérieure aux 2/3.

Cette élimination des résidences secondaires du champ de l'étude ne souffrira pas d'exception. En conséquence toutes les données, en pourcentage ou calculées par habitant ou par logement, concernant la taxe d'habitation seront toujours relatives aux seules résidences principales 15 ( * ) .

Tableau 1-3
Part des résidences secondaires dans les bases brutes communales

II. L'EXPLOSION DU COÛT DE LA POLITIQUE D'ALLÈGEMENTS DE LA TAXE D'HABITATION.

La politique nationale d'allègements de la taxe d'habitation entraîne une perte de recettes fiscales pour le secteur public pris dans son ensemble, perte qu'il convient de partager entre l'Etat et les collectivités locales. Le principe de base auxquels les élus locaux et le Sénat sont attachés est que cette perte de recettes voulue par l'Etat doit être intégralement supportée par le budget de l'Etat. Mais, en sens inverse, il n'est pas totalement illogique de demander aux collectivités de supporter un ticket modérateur qui évitera de faire retomber sur l'Etat tout le poids des augmentations de la pression fiscale locale. On déterminera d'abord le coût global mis à la charge de l'Etat (A) avant de préciser les modalités de compensation des pertes de recettes des collectivités locales (B).

A. UN COUT BUDGÉTAIRE CROISSANT PAR ÉTAPES POUR L'ETAT

Le coût des allègements fiscaux de taxe d'habitation apparaît au budget de l'Etat sous deux formes :

- s'agissant de la compensation des exonérations de taxe d'habitation , celle-ci est englobée dans la ligne 2007 "Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale",

- s'agissant des dégrèvements législatifs et non législatifs de taxe d'habitation , les crédits correspondants sont inscrits au paragraphe 17 du chapitre 15-01 du budget des charges communes.

On constate que dans les deux cas, ce prélèvement et ces crédits ne figurent pas dans le montant net des dépenses totales du budget général figurant à l'article d'équilibre de la loi de finances. Cette pratique est devenue totalement illogique pour les dégrèvements d'impôts locaux qui n'ont plus aucune raison d'être assimilés dans la présentation de l'équilibre budgétaire aux remboursements divers d'impôts d'Etat, puisqu'ils sont désormais séparés des dégrèvements d'impôts directs d'Etat dans la nomenclature d'exécution du budget.

1. Une croissance par à-coups du coût des allégements de taxe d'habitation

La construction d'une série longue des dégrèvements doit s'appuyer sur les ordonnancements de la DGI 16 ( * ) et non sur les dépenses retracées dans le compte général de l'administration des finances. En effet, les dégrèvements de taxe d'habitation (admissions en non-valeur exclues) ne sont isolés au sein du budget des charges communes que depuis 1994. Jusqu'en 1991, ils se fondent dans la masse des dégrèvements d'impôts directs assis par la Direction générale des impôts (DGI). En 1992 et 1993, ils sont encore fusionnés avec les dégrèvements des autres contributions directes locales (TP, TF). Depuis 1994, les dégrèvements de taxe d'habitation sont isolés au sein d'un paragraphe distinct, mais ce dernier regroupe non seulement les dégrèvements législatifs, objet de cette étude mais aussi les dégrèvements non législatifs, gracieux ou contentieux.

Le point de départ de la politique des dégrèvements législatifs est le vote dans le collectif budgétaire de juin 1982 d'un dégrèvement total de taxe d'habitation pour les personnes âgées de plus de 60 ans non imposables à l'impôt sur le revenu 17 ( * ) . Ainsi est établi un lien entre impôt sur le revenu et taxe d'habitation, lien qui entraînera une forte augmentation du nombre des dégrevés chaque fois que des mesures d'allègement de l'impôt sur le revenu seront prises, comme en 1986. Il faudra attendre 2000 pour que ce lien soit définitivement rompu.

L'évolution des allégements de taxe d'habitation est retracée depuis 1987 par la courbe « total » du graphique n° 1-5 qui additionne dégrèvements législatifs et non législatifs et compensations d'exonération , à l'exception toutefois du coût de la suppression de la part régionale de taxe d'habitation 18 ( * ) .

Graphique 1-5
Evolution des allègements de taxe d'habitation depuis 1997

(en millions d'euros)

Les deux marches d'escalier discernables sur cette courbe « total » correspondent aux deux réformes figurant dans les lois de finances initiales pour 1990 et pour 2000.

La réforme de 1990 crée, entre autres mesures, un plafonnement de l'imposition à la taxe d'habitation en fonction du revenu ; elle laisse toutefois à la charge du contribuable un ticket modérateur puisque le dégrèvement ne peut excéder 50 % du montant de l'imposition qui excède 1.370 francs 19 ( * ) .

La réforme de 2000, outre la suppression de la part régionale de taxe d'habitation, refond quatre mécanismes de dégrèvements législatifs en un seul dispositif de plafonnement en fonction du revenu, mais elle supprime également le ticket modérateur de 50 % institué en 2000 20 ( * ) . Cette réforme a entraîné une augmentation des dégrèvements législatifs de l'ordre de 900 millions d'euros.

Enfin, la réforme de 1992 a transformé un certain nombre de dégrèvements totaux en exonérations (notamment pour les contribuables de plus de 60 ans). La compensation de ces exonérations ne croît que modérément puisqu'elle s'effectue sur la base de taux gelés à la hausse à leur niveau de 1991.

Au total, la participation de L'Etat , hors compensation de la suppression de la part régionale, est passée de 1,1 milliard d'euros en 1991 à près de 3,7 milliards d'euros en 2002, comme le montre la colonne (5) du tableau 1-5.

Tableau 1-5
Evolution des dégrèvements et compensations d'exonérations

(en millions d'euros)

2. Un financement par l'Etat du tiers des ressources locales de taxe d'habitation

Si l'on partage les ressources obtenues par les collectivités locales au titre de la taxe d'habitation en une part payée effectivement par le contribuable local et une part financée par l'Etat au titre des dégrèvements nets 21 ( * ) et des compensations d'exonération, on observe que la part de l'Etat est passée d'environ un quart du total en 1991 à plus d'un tiers après la réforme de 2000, comme le montrent le tableau suivant n° 1-6 et le graphique n° 1-6 Si l'on fait abstraction de la compensation de la suppression de la part régionale, l'Etat a financé 29,4 % des ressources départementales et communales de taxe d'habitation.

Graphique 1-6
Evolution du financement des ressources locales de taxe d'habitation de 1991 à 2002

(en millions d'euros)

Tableau 1-6
Financement des ressources locales de taxe d'habitation

(en millions d'euros)

B. UNE RÉPERCUSSION FAIBLE ET INÉGALEMENT RÉPARTIE DES ALLÈGEMENTS DE TAXE D'HABITATION SUR LES COLLECTIVITÉS LOCALES

On oppose traditionnellement la compensation des exonérations à la technique des dégrèvements législatifs. Dans le premier cas, l'Etat ne verserait aux collectivités locales qu'une compensation forfaitaire au mieux indexée sur un indice national de croissance, tel celui de la DGF ou celui des prix. Dans le second cas, au contraire, l'Etat se substituerait en totalité au contribuable dégrevé, « hors la vue » des collectivités locales pour lesquelles la perte de recettes serait ainsi nulle. En fait, ces deux techniques se rapprochent lorsque l'Etat accepte de financer le coût généré par une augmentation des bases exonérées ou dégrevées, même s'il se refuse à supporter le poids des hausses de taux. Les effets modérateurs attendus de ce gel des taux ne doivent pas être surévalués ; ils peuvent de plus être mis en échec par un détournement des politiques locales d'abattements facultatifs.

1. Les effets modérateurs du gel des taux sont limités

Les contributions de l'Etat ne dépendent plus des taux futurs de taxe d'habitation même si elles suivent l'évolution des bases exonérées ou dégrevées...

S'agissant des exonérations , l'Etat verse aux collectivités locales une compensation assise sur le montant des bases nettes dégrevées l'année précédente sur la base d'un taux gelé à son niveau de 1991 , s'il est inférieur au taux de l'année précédente. La collectivité locale supporte donc un ticket modérateur proportionnel à l'augmentation de son taux de taxe d'habitation depuis 1991, mais bénéficie de l'accroissement éventuel des bases exonérées (et en tout cas de leur révision forfaitaire annuelle). Ce mécanisme de compensation des exonérations est donc différent de celui mis en place pour compenser la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation dont les bases sont définitivement figées.

S'agissant des dégrèvements partiels , un ticket modérateur au bénéfice de l'Etat a également été mis en place en 2000 ; mais son coût est supporté non pas par les collectivités locales mais par le contribuable dégrevé : le montant du dégrèvement partiel est en effet réduit d'un montant égal au produit de la base nette imposable par l'augmentation du taux global de taxe d'habitation constatée depuis 2000 (en vertu des dispositions du III de l'article 1414 A du code général des impôts). C'est donc la somme des taux des diverses collectivités qui est prise en compte pour déterminer s'il y a eu augmentation de la pression fiscale dans une commune.

• Enfin, aucun ticket modérateur n'existe pour les dégrèvements totaux.

Quels sont les effets de ce double système ? :

D'abord, le gel des taux n'est pas un mécanisme suffisant pour enrayer de façon significative le risque d'irresponsabilisation des élus locaux généré par le système des dégrèvements. En effet, les contribuables dégrevés ne percevront pas les effets des augmentations de pression fiscale postérieures à 2000 par rapport aux taux réels votés en 2000, mais par rapport aux taux, parfois très inférieurs, déclenchant l'octroi du dégrèvement partiel 22 ( * ) . Tout se passe en fait comme si on mettait entre parenthèses le différentiel de pression fiscale entre le taux de taxe d'habitation de 2000 et le taux déclenchant l'octroi du dégrèvement partiel. Les collectivités locales ayant voté des taux élevés de taxe d'habitation avant 2001 ne seront donc nullement incitées à adopter une politique fiscale plus stricte que celles ayant adopté antérieurement une politique de taux modérés. De plus, le gel des taux pour le calcul des dégrèvements s'applique au taux global de 2000, toutes collectivités confondues. Si, par exemple, le département baisse son taux, la commune pourra en profiter pour augmenter le sien, sans conséquence pour le contribuable dégrevé.

Ensuite, une inégalité de traitement significative persiste entre dégrèvements et exonérations pour les collectivités locales dont la population de condition modeste vieillit. Lorsqu'un contribuable antérieurement dégrevé passe dans le champ de l'exonération parce qu'il a dépassé l'âge des 60 ans, la collectivité locale subit une perte de recettes au moins proportionnelle 23 ( * ) à la différence entre son taux actuel de taxe d'habitation et son taux de 1991. Et cette perte de recettes peut se produire à retardement : une hausse des taux entre 1991 et 1995 par exemple a pu être sans conséquence sur le montant des dégrèvements au cours de cette période et induire en revanche une perte de recettes ultérieure lors de la transformation de dégrèvements en exonérations.

2. La suppression des abattements facultatifs locaux peut accroître la charge de l'Etat

La politique nationale d'allègements de taxe d'habitation en fonction du revenu du contribuable a en effet été mise en place sans coordination avec la politique antérieure des abattements qui assurait elle aussi une certaine personnalisation de la taxe d'habitation et réduisait son caractère régressif par rapport au revenu.

Les collectivités locales peuvent voter à titre facultatif deux abattements à la base , l'un général concernant l'ensemble des contribuables au titre de leur résidence principale, le second spécial concernant les seuls contribuables dont le revenu n'excède pas la limite prévue pour les exonérations 24 ( * ) . Ces abattements sont définis sous forme d'un pourcentage de la valeur locative moyenne (VLM) des locaux d'habitation de la collectivité intéressée.

Un exemple permet de comprendre comment joue l'abattement général à la base. Supposons qu'une collectivité ne comprenant pas de résidences secondaires 25 ( * ) vote un abattement général à la base de 20 % de la VLM. Les bases d'imposition de toutes les résidences principales diminueront donc d'un même montant (soit 20 % de la VLM), mais la réduction en pourcentage sera d'autant plus élevée pour une résidence que celle-ci a une base brute plus faible, ce qui avantage relativement les contribuables occupant des logements modestes.

Toutefois, le vote de l'abattement a également pour résultat de réduire globalement les bases d'imposition de la collectivité de 20 %. Celle-ci sera donc obligée de relever son taux d'imposition de la taxe d'habitation de 25 % 26 ( * ) si elle veut conserver son produit fiscal antérieur. Le vote de l'abattement de 20 % et le relèvement concomitant du taux de taxe d'habitation de 25 % auront un effet neutre sur l'imposition d'un contribuable dont la résidence a une valeur locative brute juste égale à la moyenne, réduiront les cotisations des contribuables disposant de logements modestes et accroîtront celles des occupants de logements à forte valeur locative. L'abattement à la base exerce ainsi un effet fiscal redistributif au sein de la collectivité considérée en faveur des contribuables de conditions modestes .

Comment cette politique de redistribution fiscale locale se combine-t-elle avec une politique nationale visant à alléger les cotisations de taxe d'habitation des contribuables à faible revenu ? Il est probable que les contribuables bénéficiant de ces allègements fiscaux sont également ceux profitant le plus des abattements à la base. Plus les abattements locaux sont élevés, plus les bases nettes de ces contribuables sont réduites, moins le montant des exonérations et dégrèvements d'Etat sera élevé : Il y a donc substituabilité entre dégrèvements d'Etat et abattements à la base locaux.

Il suffit alors à une collectivité locale de mettre en oeuvre une politique de suppression des abattements facultatifs à la base, inverse de celle présentée ci-dessus, pour en reporter la charge sur l'Etat. La suppression de l'abattement à la base entraîne une augmentation des bases nettes et permet, le cas échéant 27 ( * ) , une réduction du taux de la taxe d'habitation. Le relèvement sensible des cotisations des redevables ayant des logements modestes est compensé par l'accroissement des exonérations et dégrèvements d'Etat. Quant aux contribuables disposant de logements à valeur locative élevée, la baisse des taux, si elle est votée, compense les effets du relèvement de leurs bases nettes ! L'exposé des motifs de la délibération du Conseil municipal d'une grande ville en 2002, présentée dans l'encadré ci-dessous, montre que ce mécanisme de transfert de charges est parfaitement compris des élus locaux avertis.

Les raisons de la suppression de l'abattement à la base
(DCM de la ville de R. du 17 juin 2002)

« L'abattement à la base dont le taux résulte d'un ancien système fiscal et qui s'applique à une valeur locative moyenne communale, elle-même sans lien avec la réalité est devenu une référence dépassée.

Par ailleurs, compte tenu de la vétusté du système de calcul de la taxe d'habitation et de l'augmentation constatée au plan national de cet impôt (...), l'Etat a progressivement instauré depuis une quinzaine d'années un système de réduction de cet impôt en fonction des revenus imposables des contribuables.

L'abattement à la base qui à l'origine revenait à ne pas imposer les contribuables dont la valeur locative était inférieure à un certain niveau de loyer, n'a donc plus de justification sociale dans la mesure où chaque contribuable ayant des revenus modestes ou moyens acquitte aujourd'hui une taxe d'habitation selon sa capacité contributive.

Enfin en matière financière, la suppression de l'abattement à la base va permettre à la Ville de bénéficier d'une majoration de la compensation fiscale versée par l'Etat pour les exonérations totales de taxe d'habitation accordées à certains contribuables. Cette majoration résulte tout simplement du mécanisme de compensation qui est fonction des bases nettes exonérées de l'année précédente et du taux de taxe d'habitation de 1991 : la suppression de l'abattement à la base en augmentant les base nettes exonérées de ces contribuables, majore donc la compensation de façon automatique. Avec une suppression de l'abattement à la base en 2003, l'effet de cette compensation interviendra à partir de 2004 » .

La baisse concomitante du taux communal de taxe d'habitation (DCM du 15 mars 2003)

« ... Par délibération du 17 juin 2002, vous avez décidé de supprimer l'abattement général à la base de 15 % de la taxe d'habitation. Ceci a pour effet automatique d'en augmenter les bases... Il est donc proposé de rapprocher le taux de la taxe d'habitation de la moyenne des taux constatés dans les villes de la même strate démographique ».

(Le taux voté en 2002 soit 21,75 % est abaissé à 20,43 % en 2003.)

Ce type d'optimisation fiscale peut être apprécié sous différents angles :

Il montre d'abord l'insuffisance du mécanisme de gel des taux à leur niveau de 2000. Il faudrait, pour qu'il soit efficace, que le ticket modérateur à la charge du contribuable bénéficiant d'un dégrèvement partiel soit calculé à taux d'abattement à la base inchangé (à la baisse).

Mais une question plus générale est ouverte : doit-il y avoir un partage du coût des allégements en fonction du revenu entre la collectivité locale (c'est à dire les autres contribuables locaux) et l'Etat ? Si la réponse est oui et que l'on veuille conserver à la taxe d'habitation son caractère d'impôt de répartition, il serait souhaitable de rendre l'abattement à la base obligatoire (quitte à supprimer l'abattement spécial à la base) et il appartiendrait à l'Etat, seul responsable de la fonction « redistribution des revenus », d'en fixer le taux. Ce taux pourrait d'ailleurs être différencié selon les catégories de communes.

CHAPITRE DEUX :
UN ALLÈGEMENT TOTAL OU PARTIEL DE LA TAXE D'HABITATION POUR LA MOITIÉ DES CONTRIBUABLES LOCAUX

Le principe de l'autonomie fiscale des collectivités locales repose sur l'idée simple qu'un financement au moins partiel de la dépense locale par l'impôt local rendra les élus locaux responsables de leurs choix financiers devant les contribuables-électeurs 28 ( * ) . Mais ce résultat ne sera obtenu que si l'impôt local fournit un signal correct au contribuable électeur et à l'élu. Pour le contribuable-électeur , l'augmentation de la dépense locale doit se traduire par une augmentation de sa cotisation sur sa feuille d'impôt. Pour l'élu , le vote d'un impôt supplémentaire doit signifier un accroissement de la charge frappant ses électeurs. Or la pratique des dégrèvements fausse ces mécanismes : le contribuable dégrevé n'est plus sensible à l'augmentation de l'impôt, donc de la dépense ; l'élu ne sait plus dans quelle proportion la variation de l'impôt local qu'il vote sera répercutée sur ses électeurs. En effet, les dégrèvements législatifs s'effectuent « hors la vue » des élus locaux qui n'en connaissent même pas le montant exact 29 ( * ) .

On s'efforcera donc de répondre dans ce chapitre à une question simple : combien de contribuables bénéficient d'une exonération ou d'un dégrèvement législatif de taxe d'habitation ? S'agit-il d'une minorité d'électeurs ou au contraire d'un phénomène plus largement répandu ?

Un peu plus de la moitié des contribuables n'acquitte pas la taxe d'habitation à taux plein pour leur résidence principale qu'ils en soient exonérés ou dégrevés partiellement. Mais une très forte dispersion autour de cette moyenne nationale est observable au niveau des 36.500 communes et des 96 départements métropolitains. On cherchera d'abord à décrire la répartition spatiale de la fréquence des allégements à partir de caractéristiques élémentaires de taille et de degré d'urbanisation des diverses collectivités locales (I). On tentera ensuite de l'expliquer au regard des niveaux de revenu de la population et des différences de pression fiscale locale (II).

I. UNE CONCENTRATION DES ALLÈGEMENTS DANS LES ZONES URBAINES DE PROVINCE

L'idée reçue suivant laquelle une majorité de contribuables supporterait effectivement le poids réel de la taxe d'habitation doit être testée pour les « ménages fiscaux » occupant une résidence principale. En effet, les occupants de résidences secondaires d'une part ne bénéficient ni d'exonérations ni de dégrèvements législatifs et d'autre part restent le plus souvent électeurs au lieu de leur résidence principale. On admettra, en se reportant pour plus de précisions à l'annexe I, qu'il est alors équivalent de raisonner sur le pourcentage de résidences principales ou sur le pourcentage de ménages fiscaux dégrevés ou exonérés 30 ( * ) .

Pour 24,35 millions de résidences principales :

• 21,5 % des redevables ne paient aucune taxe d'habitation , soit parce qu'ils en sont exonérés, soit parce qu'ils bénéficient d'un dégrèvement total.

• 29,1 % des redevables bénéficient d'un dégrèvement législatif partiel.

• Seuls, 49,5 % des redevables paient donc la taxe d'habitation à taux plein 31 ( * ) .

Ce résultat global doit être affiné suivant la taille et le caractère urbain ou rural des communes et départements 32 ( * ) .

A. UNE TENDANCE À LA CONCENTRATION DES ALLÈGEMENTS DANS LES VILLES

Cette tendance se vérifie quand on observe l'évolution de la fréquence moyenne des exonérations et dégrèvements par strates de communes ou d'unités urbaines, avec cependant une forte dispersion des résultats, et deux exceptions notables : la concentration des exonérations dans les zones rurales et le faible nombre d'allègements à Paris.

1. Analyse par strates de communes

Dans les deux tableaux suivants 2-1 et 2-2, les communes ont été réparties en communes rurales ou urbaines suivant qu'elles appartiennent ou non à une unité urbaine au sens de l'INSEE 33 ( * ) , puis classées par strates de population en fonction de leur population totale 34 ( * ) . Ces tableaux font apparaître (en nombre absolu d'articles de rôle de résidences principales et en pourcentage), la répartition des redevables de chaque strate entre redevables non imposés, partiellement imposés ou imposés à taux plein.

Tableau 2-1
Nombre de contribuables imposés, imposés partiellement ou non imposés (par strates de communes urbaines et rurales)

La fréquence de l'imposition à taux plein diminue de près de 30 points lorsqu'on passe des plus petites communes urbaines (66,3 %) à celles de 100.000 à 200.000 habitants. Elle se relève un peu dans la strate des villes de plus de 200.000 habitants 35 ( * ) . Le cas de Paris avec près de 80 % d'imposés à taux plein est à cet égard atypique.

Cette diminution tendancielle du pourcentage d'imposés à taux plein lorsque croît la taille de la commune n'est pas attribuable à une augmentation des non impositions dans les villes. Le pourcentage des redevables totalement dégrevés ou exonérés reste assez stable, aux alentours de 20 % quelle que soit la population de la commune urbaine (il est légèrement supérieur dans les communes rurales, notamment les plus petites, et notoirement inférieur à Paris).

Tableau 2-2
Pourcentages de contribuables imposés, imposés partiellement ou non imposés (par strates de communes urbaines et rurales)

En revanche la fréquence des dégrèvements partiels triple ( de 13,7 % à 41,2 %) lorsqu'on s'élève dans la hiérarchie des communes urbaines jusqu'à l'avant dernière strate. Elle diminue légèrement dans les plus grandes villes et s'effondre à Paris (11,7 %).

2. Analyse par strates d'unités urbaines

Ces résultats montrant que les urbains sont les principaux bénéficiaires de la politique des dégrèvements, sont cependant un peu atténués lorsqu'on regroupe les communes en unités urbaines pour gommer le caractère parfois arbitraire du découpage communal au sein des agglomérations. (Par exemple, une commune urbaine de 1 200 habitants appartenant à une unité urbaine de 55.000 habitants est intégrée dans la strate des unités urbaines de 50.000 à 99.999 habitants alors qu'elle était précédemment incorporée dans la strate des communes de 1.000 à 1.999 habitants. Toutes les communes de l'agglomération parisienne sont ainsi regroupées avec Paris).

Tableau 2-3
Contribuables imposés, imposés partiellement ou non imposés (par strates d'unités urbaines)

La seconde partie du tableau 2-3 qui traduit en fréquences les données brutes de la première partie, montre que le nombre de contribuables imposés à taux plein diminue de plus de 16 points (de 58,4 % à 38,6 %) lorsqu'on passe des communes rurales aux unités urbaines de 100.000 à 200.000 habitants. La singularité parisienne s'atténue lorsque Paris est regroupé avec sa périphérie : l'agglomération de Paris revient à la hauteur des communes rurales (58,6 % d'imposés à taux plein).

3. Analyse de la dispersion intercommunale des résultats

Les conclusions précédentes qui s'appuient sur le calcul de moyennes sont cependant fragiles car elles ne tiennent pas compte de la très forte dispersion des données communales au sein de chaque strate. Cette dispersion peut être illustrée à l'aide de graphiques, plus parlants que de lourds tableaux, où chaque commune est représentée par un point 36 ( * ) .

S'agissant de l'ensemble des allègements (totaux ou partiels), le graphique 2-1 confirme la tendance générale à la hausse du ratio des contribuables allégés lorsque la taille de la commune augmente, mais avec une forte dispersion.

Graphique 2-1
Pourcentage de ménages fiscaux bénéficiant d'allègements (communes de plus de 500 habitants)

Graphique 2-2
Pourcentage de dégrèvements partiels (communes de plus de 500 habitants)

S'agissant des dégrèvements partiels résultant du plafonnement des cotisations en fonction du revenu, le graphique 2-2 confirme une tendance très marquée à l'accroissement de leur pourcentage lorsque la taille de la commune augmente.

La dispersion intercommunale du pourcentage de dégrèvements partiels est également plus faible et plus stable que celle des autres cas d'exonérations ou de dégrèvements.

S'agissant enfin des non-impositions , leur fréquence reste globalement indépendante de la taille des communes, mais c'est là le résultat de deux tendances divergentes pour les dégrèvements totaux et pour les exonérations qui finissent par s'annihiler.

En ce qui concerne les deux principales catégories de dégrèvements totaux (en fonction du revenu et en faveur des bénéficiaires du RMI), la part des logements dégrevés totalement tend à croître légèrement dans les grandes villes mais avec une très forte dispersion intercommunale.

Graphique 2-3
Pourcentage de dégrèvements totaux en fonction du revenu (communes de plus de 1.000 habitants)

On observe en revanche une nette tendance à la concentration des exonérations (dont bénéficient notamment les contribuables de plus de 60 ans de condition modeste) dans les petites communes rurales, même si le taux d'exonération y varie dans une plage très étendue (entre 5 % à 45 %).

Ce taux diminue ensuite tendanciellement dans les villes avec une réduction de sa dispersion.

Graphique 2-4
Pourcentage de résidences principales exonérées (communes de plus de 500 habitants)

B. UNE TENDANCE À LA CONCENTRATION SPATIALE DES ALLÈGEMENTS DANS CERTAINES RÉGIONS

Les allègements de taxe d'habitation ne sont pas répartis de façon uniforme sur le territoire métropolitain, qu'on les observe au niveau des départements pris globalement ou pour leur seule fraction rurale ou à celui des grandes villes : de fortes disparités spatiales apparaissent, reflétant des différences sous jacentes de revenus ou de comportements fiscaux.

1. De fortes disparités entre départements selon leur ancrage géographique

Le tableau n° 2-4 fournit un classement des départements en fonction du pourcentage décroissant de contribuables bénéficiant d'un allègement de taxe d'habitation. La partie gauche du tableau correspond aux 58 départements où les imposés à taux plein sont minoritaires et la partie droite à ceux où ils sont majoritaires.

Les données de ce tableau et la carte 2-1 révèlent que la fréquence des allègements de taxe d'habitation est particulièrement élevée d'abord dans les départements du pourtour méditerranéen , avec un maximum de 68,3 % dans les Pyrénées orientales, ensuite dans une grande région Nord (supérieure à 60 % dans le Nord, le Pas de Calais, et l'Aisne), dans une partie du massif central (Loire, Allier, Haute Vienne, Creuse) et de la Bretagne (Finistère, Côtes d'Armor). Dans la Région Parisienne, seule la Seine Saint Denis est fortement dégrevée. En sens inverse, les départements où les imposés à taux plein restent majoritaires sont concentrés dans le Bassin Parisien, l'Est de la France, notamment l'Alsace, et les départements alpins.

Ces observations, parfois inattendues - la Lozère, avec 40,6 % d'allègements, bénéficie d'une proportion d'allègements inférieure d'un tiers à celle du Cantal et proche de celle... des Hauts de Seine 38 %- montrent à l'évidence que les disparités de revenus ne suffisent pas à tout expliquer et que des différences de comportements fiscaux interviennent comme facteur discriminant comme il sera montré ultérieurement.

Tableau 2-4
Classement des départements en fonction du pourcentage de contribuables bénéficiant d'un allègement

Carte 2-1
Pourcentage des contribuables bénéficiant d'un allègement de taxe d'habitation

2. Des mesures d'allègements profitant plus aux communes urbaines qu'aux communes rurales, quel que soit le département

Chaque point du graphique n° 2-5 permet de comparer pour un département donné la fréquence des allègements de taxe d'habitation dans les communes urbaines en abscisses et la même fréquence observée dans les communes rurales en ordonnées.

A l'exception de la Lozère, le pourcentage d'allègements est toujours inférieur dans les communes rurales à ce qu'il est dans les communes urbaines (tous les points sauf un sont situés sous la droite des 45° qui correspond à l'égalité des deux pourcentages), avec cependant une forte dispersion autour d'une différence moyenne de 15 points. Dans des départements du midi comme les Pyrénées orientales, l'Hérault ou l'Aude, la fréquence des allègements de taxe en zone rurale n'est que de peu inférieure à celle constatée en zone urbaine, alors que l'écart reste important dans les départements du nord-est comme le Pas de Calais, l'Aisne, la Marne ou l'Aube.

Graphique 2-5
Comparaison de la fréquence des allègements entre communes rurales et urbaines, par département

De ce fait, la taxe d'habitation "à taux plein" reste acquittée par une majorité de contribuables en zone rurale. La carte 2-2 montre que dans seulement 15 départements, la situation est inverse (midi méditerranéen, Nord Bretagne, Allier et Limousin).

Carte 2-2
Pourcentage de contribuables des communes rurales
acquittant la taxe d'habitation à taux plein

3. Une forte dispersion des résultats au niveau des grandes villes

L'opposition entre zone rurale et unités urbaines ne signifie pas que les communes urbaines constituent un ensemble homogène. Le tableau 2-5 révèle au contraire une forte dispersion du nombre de contribuables bénéficiant d'allègements de taxe d'habitation dans un échantillon constitué de l'ensemble des communes de plus de 70.000 habitants. (On se reportera à l'annexe IV pour la présentation des résultats complets concernant les communes de plus de 10.000 habitants).

Tableau 2-5
Classement décroissant des 76 villes de plus de 70.000 habitants en fonction du pourcentage

de contribuables imposés à taux plein pour leurs résidences principales

Dans cet ensemble de 76 grandes villes, les contribuables imposés à taux plein ne sont majoritaires que dans 12 d'entre elles, dont seulement 2 villes de province et 10 communes de l'agglomération parisienne, dont Paris. Le pourcentage de contribuables non imposés est maximal à Roubaix (39,5 %) ; la fréquence des dégrèvements partiels en fonction du revenu est supérieure à 50 % dans 3 villes (Dunkerque, Saint Etienne et Saint Nazaire). Enfin, parmi les 16 villes où le pourcentage des contribuables imposés à taux plein est inférieur à 30 %, on relève 6 ports (dont 3 ports de guerre) et 4 villes languedociennes.

II. UNE DISTRIBUTION DES ALLEGEMENTS REFLÉTANT LES DISPARITÉS DE REVENU ET DE PRESSION FISCALE LOCALE

Comment expliquer les fortes différences observées dans la fréquence des allègements de taxe d'habitation d'une collectivité locale à l'autre ? Reflètent elles principalement des " inégalités de situation " échappant pour l'essentiel au contrôle des collectivités locales, telles les différences de revenus ou d'âge moyen des habitants ? Sont-elles au contraire la conséquence "d'inégalités de gestion" traduisant la propension plus ou moins forte des élus à accroître, de façon volontariste, le niveau des dépenses et donc la pression fiscale ?

Le revenu communal semblerait commander le nombre de bénéficiaires d'allègements, la pression fiscale n'intervenant qu'en second rang pour déterminer le montant de l'allègement et son coût pour l'Etat. La réalité est plus complexe. Au stade du contribuable individuel, les principaux facteurs explicatifs du montant du dégrèvement ou de l'exonération sont, en simplifiant, les suivants :

Eligibilité à l'allégement fiscal

Exonération

Age du contribuable (>60 ans)

Revenu du contribuable

Dégrèvement total en fonction de la situation sociale

Bénéficiaire du RMI

Dégrèvement total en fonction du revenu

Revenu du contribuable

Age du contribuable (<60 ans)

Dégrèvement partiel en fonction du revenu

Revenu du contribuable

Montant de la cotisation

Le revenu du contribuable est pris en compte directement ou indirectement 37 ( * ) comme critère d'éligibilité à un allègement total, soit seul, soit associé à une condition supplémentaire d'âge. En revanche, il intervient concurremment au montant de l'imposition, donc à la pression fiscale dans la décision d'octroi d'un dégrèvement partiel : il ne suffit pas, pour en bénéficier d'avoir un revenu inférieur au revenu plafond ; il faut encore que l'imposition dépasse 4,3 % de ce revenu après abattements. On vérifiera donc d'abord si le revenu est bien le facteur explicatif prépondérant de non-imposition (A) ; on mesurera ensuite l'influence respective du revenu et de la pression fiscale sur la fréquence d'octroi des dégrèvements partiels.

A. LA FAIBLESSE DU REVENU COMMUNAL, FACTEUR PRÉPONDÉRANT DE NON-IMPOSITION

Au niveau d'une commune, le revenu des habitants est mieux appréhendé par un indicateur de distribution tel le revenu médian (50 % des contribuables ont un revenu inférieur au revenu médian) ou le premier quartile (25 % des contribuables ont un revenu inférieur au premier quartile) que par le revenu moyen qui est tiré vers le haut par les revenus les plus élevés. L'INSEE a publié pour la première fois en juin 2003 des indicateurs de distribution du revenu des « ménages fiscaux » (médiane, quartiles et déciles) par commune pour l'année 2000 38 ( * ) . Le seuil de diffusion de ces données par commune étant de 50 ménages au minimum pour la médiane et de 2.000 habitants pour les quartiles, on a préféré utiliser le revenu médian qui permet de couvrir un plus grand nombre de communes (environ 30.500 sur 36.000).

Si le revenu est le facteur explicatif prépondérant du taux de non imposition à la taxe d'habitation, d'autres variables socio-économiques telles la structure par âge ou le nombre de chômeurs semblent a priori pouvoir jouer : leur rôle n'est cependant que secondaire.

1. L'influence prépondérante du revenu

a) L'influence du revenu médian sur le taux d'exonération

Les deux graphiques 2-6 et 2-7 font apparaître une très forte corrélation négative entre le pourcentage des résidences principales exonérées et le revenu communal médian , aussi bien pour l'ensemble des communes urbaines (R² = 0,714) que pour les communes rurales de plus de 400 habitants (R² = 0,782). Dans les deux cas, l'élasticité est voisine de - 1,8 : une augmentation de 10 % du revenu médian se traduit en moyenne par une réduction de 18 % du taux d'exonération.

Graphique 2-6
Influence du revenu médian sur le taux d'exonération dans les communes rurales
(12.125 communes de plus de 400 habitants)

Graphique 2-7
Influence du revenu médian sur le taux d'exonération dans les communes
urbaines

b) L'influence du revenu médian sur la fréquence des dégrèvements totaux

Graphique 2-8
Influence du revenu médian sur les dégrèvements totaux (communes de plus de 1.000 habitants)

Un résultat similaire, même s'il est un peu moins significatif (R² = 0,627) est obtenu pour les dégrèvements totaux , comme l'illustre le graphique 2-8 pour l'ensemble des communes rurales et urbaines de plus de 1.000 habitants.

Au total, mais seul le résultat contraire eut été surprenant, le revenu médian apparaît comme un bon prédicteur du taux de non imposition des ménages fiscaux dans une commune. A titre d'exemple, un revenu médian de 20.000 euros par ménage fiscal correspond à un taux moyen d'exonération de 17,5 % pour les communes urbaines et à un taux légèrement plus élevé de 20 % pour les communes rurales. Le même revenu médian de 20.000 euros correspond à une fréquence de dégrèvements totaux proche de 7 %.

Si le revenu médian est un facteur explicatif commun aux taux d'exonération et de dégrèvement total, la structure par âge de la population et le taux de chômage (relié au RMI) déterminent à leur tour le taux de non-imposition, propre à chacun de ces allègements fiscaux.

2. L'influence de la structure par âge sur le taux d'exonération

La majorité des exonérations est accordée à des contribuables de plus de 60 ans. De ce fait, comme l'illustre le graphique 2-9 pour l'ensemble des communes urbaines, le taux d'exonération croît lorsque le pourcentage de personnes de plus de 60 ans dans la population communale s'élève.

Graphique 2-9
Influence de la structure par âge sur le taux d'exonération

Mais la réalité est plus complexe car le revenu médian est corrélé négativement avec la proportion de personnes âgées , celles-ci ayant un revenu plus faible que celui des actifs. Une analyse de régression multiple permet de discriminer l'influence spécifique du facteur « âge ». Elle montre que l'élasticité du taux d'exonération par rapport au pourcentage de personnes âgées est de 0,496 pour les communes rurales et de 0,455 pour les communes urbaines, à revenu médian donné. (En d'autres termes si le taux de personnes âgées augmente de 10 %, le taux d'exonération s'accroît d'un peu moins de 5 %) 39 ( * ) .

Ainsi est expliqué le fait que les communes rurales ont un taux d'exonération supérieur à celui des communes urbaines : le « vieillissement » de la population des communes rurales est en effet assez nettement supérieur à celui des communes urbaines :

Pourcentage de personnes de plus de 60 ans

 

Communes urbaines (avec Paris) :

Communes rurales :

Paris :

20,02 %

23,40 %

19,42 %

3. L'influence du taux de chômage sur le nombre de dégrèvements totaux

Les dégrèvements totaux sont accordés aux titulaires du RMI et aux plus bas revenus, s'ils n'ont pas déjà bénéficié d'une exonération totale. Il peut être conjecturé que le taux de chômage est corrélé négativement au revenu médian et positivement au nombre de Rmistes.

Graphique 2-10
Influence du taux de chômage sur les dégrèvements totaux

Le graphique 2-10 qui concerne la totalité des communes (urbaines et rurales) de plus de 1.000 habitants confirme cette hypothèse et montre que le pourcentage des ménages fiscaux dégrevés totalement dépend de façon assez étroite du taux de chômage observé.

Une analyse plus fine en corrélation multiple portant sur la totalité des 8.750 communes de plus de 1.000 habitants révèle que le pourcentage de ménages fiscaux totalement dégrevés est corrélé positivement au taux de chômage (avec une élasticité de 0,539) et négativement au pourcentage de personnes âgées de plus de 60 ans (avec une élasticité de - 0,509 ) 40 ( * ) . En effet, les personnes âgées à faible revenu bénéficient d'une exonération et n'ont donc pas à être dégrevées. Cette relation prouve, s'il en était besoin, la nécessité d'évaluer simultanément les dispositifs d'exonérations et de dégrèvements de la taxe d'habitation.

B. LE NIVEAU DE LA PRESSION FISCALE LOCALE, CONDITION DE DÉCLENCHEMENT DES DÉGRÈVEMENTS PARTIELS

Pour mesurer l'impact de la pression fiscale sur les conditions d'octroi des dégrèvements partiels, il a paru nécessaire de construire un indicateur de la pression fiscale locale avant dégrèvement ou exonération moins frustre que le taux de taxe d'habitation . Le taux global de taxe d'habitation est en effet un mauvais indicateur de la pression fiscale car il s'applique à des bases nettes dépendant de valeurs locatives brutes, non réévaluées depuis 1970 et de la politique locale d'abattements facultatifs: Des bases brutes nettement sous-évaluées (comme dans le Nord) ou des taux d'abattements facultatifs élevés réduisant les bases nettes conduisent, à produit fiscal donné à une majoration des taux. Il a donc paru préférable de retenir comme indicateur de pression fiscale le montant de l'imposition avant allègement, rapporté au revenu.

Cet indicateur a été établi, non par habitant mais par « ménage fiscal », c'est à dire en pratique par résidence principale, en cohérence avec la méthode utilisée par l'INSEE pour déterminer le revenu médian communal 41 ( * ) . Il a donc été calculé pour une résidence principale dont la valeur locative brute est égale à la valeur moyenne communale (à défaut de la valeur médiane, inconnue) et bénéficiant d'un abattement à la base et le cas échéant 42 ( * ) d'un abattement pour charge de famille. L'annexe II précise le mode de calcul de cet indicateur et l'illustre à l'aide d'un exemple.

On mettra d'abord en évidence l'influence de la pression fiscale sur le nombre de dégrevés partiels rapporté à celui des seuls contribuables imposés , c'est à dire n'ayant pas bénéficié d'une exonération ou d'un dégrèvement total.

On précisera ensuite l'impact de la pression fiscale conjuguée à celle du revenu médian en resituant la place des dégrevés partiels dans l'ensemble des contribuables.

1. Le nombre de dégrevés partiels est corrélé au niveau de la pression fiscale globale dans la commune

Dans le graphique 2-11 qui porte sur les 2.645 communes de plus de 3.500 habitants, l'indice de pression fiscale globale tient compte des abattements à la base et pour charge de famille votés par la commune et le département ; le taux de dégrèvement partiel indique le pourcentage de dégrevés partiels dans l'ensemble des contribuables imposables au titre de leurs résidences principales.

Ce graphique fait apparaître une relation hautement significative (R² = 0,772) entre la pression fiscale et le taux de dégrèvement partiel et caractérisée par une élasticité un peu supérieure à l'unité (1,149). On illustrera ce résultat par l'examen de la situation d'une des communes apparaissant comme un cas extrême sur le graphique 2-11.

Graphique 2-11
Pourcentage de dégrèvements partiels en fonction de l'indice de pression fiscale (communes de plus de 3.500 habitants)

Un cas extrême : St Pol-sur-mer

Saint-Pol-sur-Mer (à l'ouest de Dunkerque) se situe dans le décile inférieur des villes classées en fonction de leur revenu médian par ménage fiscal et se caractérise par un indice de pression fiscale très élevée (4,01 %). Il en résulte un pourcentage également très élevé de dégrevés partiels (62,6 %) si bien que le nombre de contribuables payant la taxe d'habitation à taux plein y est minime (2,3 %).

On peut comparer utilement ce cas à celui d'autres villes de population et de revenu médian assez proches Abbeville (Somme) et Bruay-la-Bussière (à l'ouest de l'ancien bassin minier du Pas de Calais), mais différent de Saint Pol par le niveau de pression fiscale . On remarquera que le nombre élevé de contribuables non imposés, assez similaire dans ces villes pauvres, ne dépend pas de l'indice de pression fiscale. En revanche, le nombre de dégrevés partiels varie comme cet indice ; celui de Bruay est presque inférieur de moitié à celui de Saint Pol où la pression fiscale est deux fois plus forte.

2. Le nombre de dégrevés partiels dépend plus du poids de l'imposition moyenne que de la faiblesse du revenu médian dans les petites communes

Une analyse plus sophistiquée permet de préciser l'impact respectif des deux composantes de la pression fiscale, l'imposition frappant la résidence principale moyenne 43 ( * ) et le revenu médian , sur le nombre de contribuables dégrevés partiellement et à titre de comparaison sur le nombre de contribuables non imposés (dégrevés totalement ou exonérés). On a retracé dans le tableau suivant les résultats principaux de régressions multiples calculées sur deux échantillons : celui des communes de plus de 3.500 habitants et celui constitué par l'ensemble des communes pour lesquelles le revenu médian est disponible. Dans tous les cas, le coefficient R² attestant la qualité de l'ajustement est hautement significatif.

Trois conclusions se dégagent du tableau des élasticités entre le taux de dégrèvement et les deux variables explicatives :

La première est que le montant de l'imposition moyenne n'exerce aucune influence sur le nombre de non-impositions. Ce résultat est logique puisque le dégrèvement total ou l'exonération ne dépendent que du revenu du contribuable. Le revenu joue en revanche un rôle crucial pour la détermination du nombre de dégrèvements partiels.

La seconde est que la sensibilité au revenu médian est beaucoup plus forte pour les non -impositions que pour les dégrèvements partiels. Dans l'échantillon des communes de plus de 3.500 habitants, une baisse du revenu médian de 10 % entraîne un accroissement du pourcentage de non imposés de 19 % et de dégrevés partiels de seulement 11,2 %.

La troisième résulte de la comparaison des résultats pour les dégrèvements partiels dans les deux échantillons. Dans l'échantillon des communes de plus de 3.500 habitants, les élasticités par rapport au revenu médian et à l'imposition moyenne sont pratiquement égales (au signe près), ce qui autorise à raisonner en termes de pression fiscale, comme on l'a fait dans le paragraphe 1. ci-dessus. En revanche, dans l'échantillon de plus de 30.000 communes, pour la très grande majorité de petite taille, l'élasticité du nombre de dégrevés partiels par rapport à l'imposition moyenne est beaucoup plus élevée : 1,622.

Tableau 2-6
des élasticités des équations de régression multiple entre les taux de dégrèvement, la cotisation moyenne et le revenu médian

Deux faits ont été mis en évidence dans ce chapitre ; d'abord le nombre de bénéficiaires des mesures d'allègement de la taxe d'habitation augmentait avec la taille de la commune ; ensuite, qu'il était fortement corrélé avec l'indice de la pression fiscale globale dans la commune.

Ces deux faits sont évidemment reliés, c'est parce que la pression fiscale croît tendanciellement lorsqu'on s'élève dans la hiérarchie des communes, comme le montre le graphique 2-12 pour les communes de plus de 3.500 habitants, que les villes sont les premières bénéficiaires de la politique d'allègement de la taxe d'habitation.

Graphique 2-12
Indice de pression fiscale et taille de la commune

CHAPITRE TROIS :
LA RÉPARTITION D'UNE SUBVENTION IMPLICITE DE L'ETAT AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS LOCALES LES PLUS IMPOSÉES

Bien que les dégrèvements législatifs de taxe d'habitation aient le caractère d' aides individuelles accordées par l'Etat à certains contribuables, ils équivalent à une subvention accordée aux collectivités locales où résident ces contribuables. Ces subventions sont « implicites » en ce sens qu'elles ne sont pas connues des collectivités locales bénéficiaires puisqu'elles ne figurent pas dans leurs budgets ; elles diffèrent en cela des compensations d'exonérations qui sont des subventions « explicites » inscrites en recettes budgétaires ; mais économiquement, ces deux types d'allègements de taxe d'habitation sont de même nature et doivent être analysés ensemble.

Globalement, l'Etat a pris à sa charge en 2001 29,2 % des ressources que les collectivités locales tirent de la taxe d'habitation frappant les résidences principales.

La part prise en charge par le contribuable national regroupe le montant des dégrèvements législatifs et la compensation des exonérations. Cette compensation est versée aux collectivités locales avec un décalage d'un an ; mais on intégrera dans les ressources de taxe d'habitation de 2001 la compensation versée en 2002 pour assurer une homogénéité dans les données.

Cette part financée par l'Etat doit être rapportée à l'ensemble des ressources tirées de la taxe d'habitation par les départements, les communes et leurs groupements. Ces ressources comprennent le produit fiscal voté, dégrèvements compris auquel s'ajoute la compensation des exonérations versée par l'Etat 44 ( * ) . De plus, les ressources de taxe d'habitation prises en considération correspondent aux seules résidences principales , à l'exclusion des résidences secondaires qui ne bénéficient ni d'exonérations, ni de dégrèvements législatifs 45 ( * ) .

Part financée par l'État=

(dégrèvements législatifs 2001 + compensation d'exonérations 2002)

(Imposition 2001 des résidences secondaires + compensation d'exonérations 2002)

Pour que puisse être appréciée l'aide apportée par l'Etat à chaque collectivité locale, une difficulté majeure devait être surmontée : les dégrèvements sont accordés directement aux contribuables au vu de leur cotisation globale de taxe d'habitation et ne sont donc pas ventilés entre les diverses collectivités locales (commune, département et le cas échéant EPCI) et l'Etat (pour la part correspondant aux frais d'assiette ). Pour déterminer la subvention « implicite » à chaque collectivité locale et nonobstant certaines difficultés présentées dans une note méthodologique figurant en annexe III, on a procédé à une ventilation, commune par commune, du montant des dégrèvements législatifs au prorata de la part des cotisations allant à l'échelon communal, au département et à l'Etat 46 ( * ) . On a de plus été dans l'obligation de regrouper dans un niveau dit « semi-global » la part communale et la part de taxe d'habitation levée au profit de l'EPCI dans la même commune. La répartition du produit de la taxe d'habitation entre commune et groupement dépend en effet d'un facteur extérieur au cadre de cette étude, l'adoption ou non de la TPU comme mode de financement de l'intercommunalité 47 ( * ) .

On présentera d'abord la répartition entre collectivités de la part financée par l'Etat (I) avant de montrer que cette répartition se calque sur celle de la pression fiscale locale mesurée en termes de revenu (II).

I. LA RÉPARTITION SPATIALE DU FINANCEMENT NATIONAL DE LA TAXE D'HABITATION

Cette répartition duplique évidemment celle des effectifs de contribuables bénéficiant d'un allègement, présentée dans le chapitre deux. Elle s'en écarte cependant pour trois raisons essentielles.

D'abord la part des ressources provenant de l'Etat, 29,5 %, est très inférieure au pourcentage des effectifs dégrevés, 49,5 %, les contribuables de condition modeste n'occupant pas de logements à haute valeur locative, sauf exception.

Ensuite, la répartition spatiale des ressources étatiques n'est pas la même pour les deux échelons semi-global et départemental. Cette séparation en deux échelons n'avait pas de raison d'être pour l'analyse du nombre de bénéficiaires, une personne dégrevée l'est aussi bien pour l'impôt départemental que pour l'impôt communal.

Enfin, les dégrèvements partiels correspondent à des taux moyens d'allègement des impositions qui varient d'une collectivité à l'autre.

On présentera en conséquence la répartition spatiale des dégrèvements et exonérations à trois niveaux, au niveau semi-global (communes + EPCI), au niveau départemental et enfin au niveau dit global (commune + EPCI + département).

A. UNE PRISE EN CHARGE PAR L'ETAT DE 29,5 % DE LA TAXE D'HABITATION SEMI GLOBALE (COMMUNES ET EPCI)

Le contribuable national prend en charge 26,2 % des ressources communales de taxe d'habitation des communes rurales au titre de leurs résidences principales et 30 % de celles des communes urbaines . Mais ces données moyennes recouvrent d'importantes inégalités.

Un ensemble de tableaux fera ressortir pour chaque niveau :

(1) le montant par habitant des ressources de taxe d'habitation (montant des impositions dégrèvements compris et de la compensation des exonérations) ;

(2) le montant par habitant des ressources de taxe d'habitation financé par le contribuable national ; ce montant se décompose en trois parts : dégrèvements totaux, dégrèvements partiels et compensation des exonérations

(3) = (2) / (1) le pourcentage des ressources de taxe d'habitation pris en charge par le contribuable national.

1. Une forte concentration de la participation de l'Etat dans les grandes communes urbaines, sauf Paris

La colonne (3) du tableau 3-1 révèle que le montant moyen par habitant de taxe d'habitation à la charge du contribuable national augmente très fortement lorsqu'on s'élève dans les strates de communes urbaines : il passe de 74,6 francs dans les communes de moins de 500 habitants à 465,7, soit six fois plus, dans les villes de plus de 200 000 habitants, à la notable exception de Paris. Cette augmentation est principalement due aux dégrèvements totaux et surtout partiels (le montant de ces derniers décuple lorsqu'on passe de la strate 1 à la strate 15) alors que le produit des compensations d'exonérations ne fait que tripler dans le même intervalle.

Cette tendance à la concentration de la participation de l'Etat dans les grandes villes résulte de la superposition de deux facteurs. D'abord, le produit des ressources par habitant de taxe d'habitation s'accroît au fur et à mesure que l'on s'élève dans la hiérarchie urbaine (colonne 1), Paris exclu ; ensuite la part prise en charge par le contribuable national s'élève également de 20 % environ dans les petites communes urbaines à 35 % en moyenne dans les plus grandes villes, Paris une fois encore exclu (colonne 2).

Tableau 3-1
Montant moyen par habitant des ressources semi-globales de taxe d'habitation
Communes rurales et urbaines classées par strates de population.

(en francs 2001)

On remarquera enfin que la part de l'Etat est nettement plus forte dans les communes rurales de moins de 2.000 habitants - 26 % en moyenne- que dans les communes urbaines de même taille - 20 % en moyenne, en raison du montant plus élevé des compensations d'exonérations dans les premières dont la population est souvent vieillissante.

2. Une forte dispersion intercommunale de la participation de l'Etat

Le graphique 3-1 illustre cette dispersion pour l'ensemble des quelques 15.500 communes de plus de 500 habitants autour d'une courbe de tendance fortement ascendante. A titre d'exemple, la participation de l'Etat s'élève dans un cas extrême à 688 francs par habitant à Avignon et tombe à 66 francs à Courbevoie, deux communes de taille comparable.

Graphique 3-1
Montant par habitant de la taxe d'habitation semi-globale (résidences principales) payé par le contribuable national (communes de plus de 500 habitants)

(en francs 2001)

Dans le tableau 3-2 concernant les villes de plus de 60.000 habitants (regroupant 12 millions d'habitants), les communes sont classées suivant l'importance décroissante de la participation de l'Etat par habitant. On constate que les communes les plus aidées sont implantées sur le pourtour méditerranéen. (A Perpignan et Béziers, plus de la moitié des ressources de taxe d'habitation proviennent de l'Etat !). Les villes les moins aidées appartiennent à la région parisienne et à l'Alsace. Ces différences sont évidemment explicables comme on le montrera ultérieurement ; elles témoignent cependant de l'énorme pouvoir redistributif du système des dégrèvements et exonérations dont il faudra vérifier la rationalité.

Tableau 3-2
Ressources semi-globales de taxe d'habitation par habitant (villes de plus de 60.000 habitants classées par ordre décroissant du montant par habitant supporté par l'État).

(en francs 2001)

3. Une élasticité élevée des dégrèvements partiels par rapport au montant des ressources semi-globales de taxe d'habitation

La décomposition de la participation de l'Etat en dégrèvements partiels d'une part et prise en charge des non-impositions d'autre part fait apparaître une différence essentielle :

Graphique 3-2
Montant semi global des dégrèvements partiels (communes de plus de 3.500 habitants)

(en francs 2001)

Le graphique 3-2 établi pour toutes les communes de plus de 3.500 habitants montre que le montant par habitant des dégrèvements partiels croît plus que proportionnellement à celui des ressources totales de taxe d'habitation, avec 48 ( * ) une élasticité de 1,67 : plus la commune impose ses habitants, plus l'Etat accroît sa participation relative. C'est la conséquence automatique du plafonnement des cotisations en fonction du revenu : non seulement le montant moyen des dégrèvements s'accroît, mais le nombre des contribuables dégrevés augmente 49 ( * ) .

En revanche, la participation de l'Etat au titre des dégrèvements totaux et des exonérations est, comme le montre le graphique 3-3, nettement moins corrélée au montant des ressources de taxe d'habitation par habitant. Une augmentation des ressources de taxe d'habitation, si elle est due à une hausse des taux n'induit pas en effet d'augmentation du nombre des contribuables dégrevés ou exonérés dans une commune mais seulement de leurs impositions individuelles prises en charges par l'Etat. De plus les compensations d'exonérations sont plafonnées en fonction des taux de taxe d'habitation de 1991 de telle sorte que les augmentations de ressources provoquées par des hausses de taux au cours de la dernière décennie n'ont induit aucune majoration des compensations d'exonérations.

Graphique 3-3
Montant semi-global des dégrèvements totaux et compensations d'exonérations (communes de plus de 3.500 habitants)

(en francs 2001)

B. AU NIVEAU DÉPARTEMENTAL : UNE PRISE EN CHARGE MOYENNE DE 28,5 % DE LA TAXE D'HABITATION À L'AVANTAGE DU POURTOUR MÉDITERRANÉEN

La part supportée par le contribuable national dans les ressources départementales, hors Paris 50 ( * ) , varie de 19,1 % dans le Haut Rhin 51 ( * ) à 43,6 % en Haute Corse Le montant mis à la charge du contribuable national est en moyenne de 99 francs et varie dans une fourchette de 1 à 4, si l'on ne tient pas compte des cas extrêmes.

1. De sensibles disparités régionales

Le tableau 3-3 montre que les départements les plus avantagés (montant > 140 francs / habitant) sont, sauf l'Allier et la Nièvre, localisés sur le pourtour méditerranéen. On trouve parmi les départements les moins aidés (montant < 70 francs / habitant) les départements alsaciens et alpestres ainsi que certains départements franciliens (Yvelines, Seine et Marne et Paris).

Tableau 3-3
Classement des départements selon le montant décroissant de la participation de l'Etat

(en francs 2001)

2. Une influence faible mais contrastée de la taille du département

S'agissant de la compensation des non-impositions , le graphique 3-4 révèle l'existence d'une tendance très lâche à la réduction du produit par habitant lorsque la taille du département augmente. Ce résultat n'est pas dû aux dégrèvements totaux qui ne sont pas corrélés à la taille du département mais aux compensations d'exonérations tendanciellement plus importantes dans les départements peu peuplés, dont la population est souvent vieillie. Les spécificités régionales déjà décrites se surimposent à cette tendance générale, comme on le voit pour les départements du pourtour méditerranéen.

Graphique 3-4
Compensation des exonérations et dégrèvements totaux (Conseils généraux)

S'agissant du montant dégrèvements partiels, la tendance est inverse, comme le montre le graphique 3-5, car ils tendent d'abord à être plus élevés dans les départements urbanisés que dans les petits départements ruraux, avec les notables exceptions du Nord et de Paris Mais les disparités régionales restent essentielles.

Graphique 3-5
Dégrèvements partiels (Conseils généraux)

C. AU NIVEAU GLOBAL, DE FORTES DISPARITÉS DANS LA RÉPARTITION SPATIALE DE LA PARTICIPATION DE L'ETAT

Le tableau 3-4, illustré par la carte 3-1 établit une synthèse départementale des résultats obtenus. Il présente pour chaque département d'une part le montant moyen par habitant des ressources globales de taxe d'habitation , toutes collectivités confondues, au titre des résidences principales, d'autre part la part de ces ressources financée par l'Etat exprimée à la fois en pourcentage des ressources globales et en valeur absolue (francs par habitant).

Tableau 3-4
Part de l'imposition globale de taxe d'habitation (résidences principales)
prise en charge par l'État
(Départements classés en ordre décroissant des ressources globales
de taxe d'habitation par habitant)

Carte 3-1
Montant moyen par habitant de la participation de l'État dans chaque département.

(en francs 2001)

La participation de l'Etat dépend fortement du montant moyen des ressources de taxe d'habitation comme le montre le graphique 3-6 : Si les collectivités locales ne votent qu'un faible montant de taxe d'habitation, leurs contribuables à l'évidence ne seront pas dégrevés partiellement et le montant des allègements totaux sera faible !

La droite de tendance de ce graphique correspond à ce que serait une prise en charge moyenne par l'Etat de 30 % de la taxe d'habitation frappant les résidences principales. Les écarts à cette droite de tendance révèlent les départements (communes comprises) qui bénéficient plus que la moyenne de l'aide de l'Etat ou obtiennent une participation inférieure à la moyenne. Les plus forts écarts figurent dans le tableau 3-5.

Graphique 3-6
Comparaison par département des ressources globales de taxe d'habitation et de la part financée par habitant

(en francs par habitant)

Tableau 3-5
Ecarts supérieurs à + 50 F ou - 35 F par habitant par rapport à une prise en charge moyenne de 30 % de la taxe d'habitation

Apparaissent en évidence comme principales zones bénéficiaires, d'abord le pourtour méditerranéen dans son ensemble (où la pression fiscale est très élevée), puis le grand Nord et la Bretagne occidentale .

Figurent dans les zones les moins aidées une grande partie de l'Ile de France et du bassin parisien, l'Alsace et une large fraction de Rhône-Alpes (régions où les revenus sont supérieurs à la moyenne.

Ces résultats sont explicables à partir d'une analyse de la pression fiscale générée par la taxe d'habitation.

II. L'INFLUENCE DÉTERMINANTE DE LA PRESSION FISCALE LOCALE SUR LA CHARGE FINANCIÈRE DE L'ETAT

On mettra d'abord en évidence que la pression fiscale, mesurée en termes de revenu, explique globalement le montant de la participation en l'Etat ; on nuancera ensuite ce résultat d'ensemble par type d'allègement.

A. LA PARTICIPATION DE L'ETAT ÉQUIVAUT À UNE DOTATION RÉPARTIE EN FONCTION DE LA PRESSION FISCALE

La charge financière de l'Etat est constituée de la somme des dégrèvements législatifs et des compensations d'exonérations versées aux collectivités locales au titre des résidences principales. Les graphiques 3-7 et 3-8 montrent que cette charge financière, qu'elle soit calculée par résidence principale ou par habitant, est corrélée, dans l'échantillon constitué par l'ensemble des communes de plus de 3.500 habitants, à l'indice de pression fiscale 51 ( * ) avec une qualité d'ajustement extrêmement élevée (R² voisin de 90 %).

De plus , les courbes de tendance à élasticité constante font apparaître une élasticité très élevée de la participation de l'Etat par rapport à la pression fiscale, de 1,64 quand elle est calculée par habitant et de 1,73 si elle est exprimée par résidence principale. En d'autres termes une augmentation de l'indice de pression fiscale de 10 % correspond à un accroissement de 17,3 % de la charge financière de l'Etat 52 ( * ) .

Graphique 3-7
Participation de l'Etat par ménage fiscal (communes de plus de 3.500 habitants)

(en francs par ménage fiscal)

Graphique 3-8
Participation de l'Etat par habitant (communes de plus de 3.500 habitants)

(en francs par habitant)

Graphique 3-9
Participation de l'Etat par ménage fiscal (communes de moins de 3.500 habitants)

(en francs 2001)

Enfin l'extension de l'échantillon à environ 28.000 petites communes de moins de 3.500 habitants pour lesquelles le revenu médian est disponible (et dont le nombre de logements est supérieur à 50 logements) (graphique 3-9 ) confirme la portée explicative de l'indice de pression fiscale, même si la qualité de l'ajustement est légèrement inférieure (R² = 0,779) ce qui n'a rien de surprenant étant donné l'extrême diversité de ces communes, souvent de très petite taille. On observera de plus qu'il n'apparaît aucune discontinuité entre l'échantillon des petites communes et celui des villes de plus de 100.000 habitants.

Ce résultat général est essentiel : il prouve que les subventions implicites que représentent pour les collectivités locales les dégrèvements législatifs équivalent à une dotation d'Etat indexée sur la pression fiscale mesurée en termes de revenu.

Mais ce résultat est un résultat global qui doit être affiné par type d'allègement car des compensations jouent certainement entre les diverses formes d'allègements fiscaux.

B. LE TAUX MOYEN DES DÉGRÈVEMENTS PARTIELS CROIT AVEC LA PRESSION FISCALE

Le taux moyen de dégrèvement partiel 53 ( * ) correspond à la part des impositions avant allègement prise en charge par l'Etat pour l'ensemble des contribuables bénéficiant de ce type de dégrèvement. Une pression fiscale plus forte exerce un double effet sur ce taux . D'abord elle augmente le montant du dégrèvement pour les contribuables déjà dégrevés, d'où une élévation du taux moyen de dégrèvement ; ensuite elle provoque l'apparition de nouveaux dégrevés dont l'imposition, désormais plus élevée, passe la barre du plafonnement à 4,3 % de leur revenu ; mais leur taux de dégrèvement partiel est au départ faible, ce qui tend à diminuer le taux moyen. Ces deux effets jouant en sens inverse, une pression fiscale plus élevée n'induit pas automatiquement une augmentation du taux moyen de dégrèvement.

Graphique 3-10
Taux moyen de dégrèvement partiel (communes de plus de 3.500 habitants)

Le graphique 3-10 montre cependant que le premier effet est dominant et que l'accroissement de la pression fiscale s'accompagne d'un net accroissement du pourcentage moyen de dégrèvement. Celui-ci est voisin de 30 % lorsque le taux de pression fiscale n'est que de 1 % ; il atteint les 60 % lorsque l'indice de pression fiscale s'élève à 4 %.

C. LES ALLÈGEMENTS TOTAUX SONT TRÈS SENSIBLES A LA COMPOSANTE REVENU DE LA PRESSION FISCALE

L'indice de pression fiscale, dont on vient de mesurer l'influence déterminante sur la participation de l'Etat se définit comme le rapport entre une imposition moyenne et un revenu médian . Les deux variables qui le composent agissent cependant de façon différente sur le montant de la participation de l'Etat suivant la nature de l'allègement, comme le montrent les valeurs des élasticités obtenues par régression multiple 54 ( * ) et présentées dans le tableau 3-6. Deux échantillons y sont distingués : celui des communes de moins de 3.500 habitants, majoritairement rurales et celui des communes urbaines de plus de 3.500 habitants. La qualité des ajustements est élevée, sauf pour les dégrèvements totaux en zone rurale.

Si le montant de la cotisation moyenne et le niveau du revenu médian influaient de façon parfaitement symétrique, mais évidemment de façon inverse sur l'allégement fiscal, les élasticités seraient égales mais de signe contraire. Ce n'est pas le cas. Le dégrèvement partiel est beaucoup plus sensible au niveau de l'imposition moyenne dans la commune que le dégrèvement total ou l'exonération. C'est exactement l'inverse pour le revenu. Ce résultat est totalement logique. Le facteur déclencheur de l'exonération ou du dégrèvement total est le seul revenu, que la cotisation soit élevée ou non.

Par ailleurs, le mode de calcul du dégrèvement partiel rend celui-ci très fortement élastique au montant en valeur absolue de la cotisation (l'élasticité trouvée, voisine de 2,5, signifie qu'une hausse de 10 % de la cotisation engendre une majoration de 25 % du dégrèvement ). En effet la partie de la cotisation supportée par le contribuable est une donnée fixe pour un revenu donné; toute augmentation de sa cotisation est intégralement prise en charge par l'Etat.

Tableau 3-6
Influence des composantes de la pression fiscale sur la participation de l'Etat (imposition moyenne et revenu médian par ménage fiscal)

Elasticités

 

Á

â

 

Nombre de

communes

Imposition

moyenne : C

Revenu médian

Y

 

Participation de l'Etat (par ménage fiscal)

Communes < 3500 h.

27 632

1,297

-1,732

0,828

Communes > 3500 h.

2 645

1,593

-1,762

0,916

Toutes communes

30 267

1,369

-1,737

0,857

Dégrèvements partiels (par ménage fiscal)

Communes < 3500 h.

27 632

2,523

-1,403

0,757

Communes > 3500 h.

2 645

2,307

-1,457

0,924

Toutes communes

30 267

2,510

-1,408

0,806

Dégrèvements totaux (par ménage fiscal)

Communes < 3500 h.

27 632

1;094

-1,918

0,376

Communes > 3500 h.

2 645

1,377

-2,482

0,765

Toutes communes

30 267

1,167

-1,990

0,436

Compensations d'exonérations (par ménage fiscal)

Communes < 3500 h.

27 632

0,867

-1,971

0,643

Communes > 3500 h.

2 645

0,678

-1,990

0,704

Toutes communes

30 267

0,785

-1,937

0,642

D. LES COMPENSATIONS D'EXONÉRATIONS SUBISSENT L'IMPACT D'UN TICKET MODÉRATEUR

Dans le cas d'un dégrèvement total, les collectivités locales perçoivent la totalité du montant dégrevé, calculé en fonction des taux votés de l'année ; Dans le cas d'une exonération, elles bénéficient d'une compensation déterminée à partir des taux votés de 1991. Elles se voient donc appliquer un ticket modérateur égal au produit des bases nettes exonérées par l'augmentation des taux survenue depuis 1991. Or, dans presque la moitié des communes (et dans les petites plus que dans les grandes), le taux global de taxe d'habitation du siècle a crû de plus de 20 % au cours de la dernière décennie comme le montrent les données du tableau 3-7.

On améliore donc sensiblement la qualité de l'estimation de la participation de l'Etat lorsqu'on pondère le montant de l'imposition moyenne par le rapport entre le taux 1991 et le taux 2001 de taxe d'habitation. (Les élasticités par rapport à l'imposition moyenne et au ticket modérateur étant comme cela est logique quasiment égales).

Tableau 3-7
Répartition des communes selon le pourcentage d'augmentation
du taux global de taxe d'habitation

Variation du taux global de taxe d'habitation

Toutes

communes

Communes de plus de 3500hab.

> 100%

0,4%

0,0%

de 75 à 100%

1,2%

0,3%

de 50 à 75%

5,0%

1,9%

de 40 à 50%

5,9%

4,1%

de 30 à 40%

11,8%

12,5%

de 20 à 30%

21,6%

24,2%

de 10 à 20%

30,9%

33,5%

de 0 à 10%

20,7%

20,5%

< 0%

2,6%

2,9%

TOTAL

100,0%

100,0%

Tableau 3-8
Elasticités du montant des compensations d'exonération de taxe d'habitation par rapport à divers indicateurs structurels

% personnes de plus de 60 ans

Rapport du taux de taxe d'habitation 1991 au taux 2001

Imposition moyenne

Revenu médian

0,459

0,486

0,931

0,707

0,916

0,736

-1,515

-1,678

0,737

0,778

0,470

0,894

0,825

-1,479

0,732

Le fait que les compensations d'exonérations ne soient pas indexées est sans doute moins regrettable que l'apparition d'une distorsion entre exonérations et dégrèvements totaux , au détriment des communes comptant le plus de personnes âgées, principales bénéficiaires des exonérations.

CHAPITRE QUATRE :
LES ALLÈGEMENTS DE TAXE D'HABITATION SONT-ILS PÉRÉQUATEURS ?

Cette question a-t-elle un sens ? L'article 72-2 alinéa 5 de la Constitution dispose désormais que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales » . Or, les dégrèvements législatifs et les exonérations individuelles de taxe d'habitation visent à corriger des situations jugées inéquitables entre individus , hors la vue des élus locaux. Les transferts de péréquation, au contraire, s'effectuent dans une optique de type non pas individualiste, mais collectif, comme l'écrit de façon provocante Joseph Stiglitz : " Si on considère le seul problème de la redistribution, pourquoi ne pas redistribuer directement aux individus concernés au lieu de le faire indirectement en subventionnant les collectivités les plus pauvres, ce qui bénéficie sans doute aux riches qui vivent dans ces collectivités 55 ( * ) ".

La pertinence de ce raisonnement ne doit pas conduire à ignorer les effets d'une politique de dégrèvements sur le fonctionnement de la décentralisation, en termes d' efficacité d'abord (et non plus de redistribution), si une majorité d'électeurs n'est plus sensible à la pression fiscale locale, en termes de péréquatio n ensuite , si les indicateurs de richesse ou d'effort fiscal sur lesquelles elle repose omettent de prendre en compte les transferts de ressources de l'Etat vers les contribuables locaux dégrevés.

Tout dépend des objectifs que l'on assigne à la péréquation financière locale de manière à la rendre compatible avec le respect de l'autonomie locale. On admet en général que la péréquation doit tendre vers l 'égalisation du ratio « avantage/effort 56 ( * ) » . Mais le passage de ce principe à des mécanismes précis, du fait notamment du rationnement budgétaire des dotations de péréquation conduit à deux types de formules péréquatrices, suivant qu'il est ou non tenu compte de l'effort fiscal.

Ou bien la dotation de péréquation est indexée sur l'effort fiscal local ; encore faut-il que ce dernier soit correctement calculé en présence de dégrèvements, mais les dégrèvements restent sans doute péréquateurs (I.).

Ou bien, pour éliminer toute incitation à augmenter les dépenses, la dotation de péréquation est forfaitisée et ne dépend plus de l'effort fiscal. Toute l'évolution de la péréquation en France (depuis les impôts-ménages jusqu'au potentiel fiscal) a consisté à séparer ce qui était de la liberté des collectivités (la pression fiscale, l'effet taux), à ne pas corriger) de ce qui était hors leur contrôle, c'est à dire leur potentiel fiscal, l'effet base dont on pouvait corriger l'insuffisance. N'y aurait-il pas intérêt dans ces conditions à réduire les subventions implicites générées pour les collectivités locales par les dégrèvements pour accroître en contrepartie les dotations péréquatrices non indexées sur l'effort fiscal (II.).

I. LES DÉGRÈVEMENTS SONT PÉRÉQUATEURS AU REGARD DU SEUL CRITÈRE D'EFFORT FISCAL

La subvention implicite que représentent les dégrèvements constitue l'archétype de la dotation indexée sur l'effort fiscal des ménages puisqu'elle dépend étroitement comme il a été démontré dans le chapitre précédent de la pression fiscale. On abordera deux problèmes : Tout d'abord les dégrèvements contribuent-ils à l'égalisation de la pression fiscale ? (A). En second lieu, comment doivent-ils s'articuler avec les autres dotations faisant appel à la notion d'effort fiscal (B).

A. UNE TENDANCE À L'ÉGALISATION DE LA PRESSION FISCALE APRES DÉGRÈVEMENTS

1. Un constat sans ambiguïté

Que devient la pression fiscale moyenne dans une collectivité après allègements de la taxe d'habitation ? On a, pour ce faire, comparé la pression fiscale avant et après allégements 57 ( * ) dans l'ensemble des communes de plus de 10.000 habitants en la rapportant au revenu médian de chaque commune.

Graphique 4-1
Evolution de la pression fiscale avant et après allègements (communes de plus de 10.000 habitants)

Avant allègements , la pression fiscale (exprimée par rapport au revenu médian) tend à être plus faible dans les villes ayant les plus hauts revenus que dans les villes où les habitants sont plus pauvres (en moyenne un revenu plus élevé de 10 % correspond à une diminution de 3,8 % de la pression fiscale. Ce n'est que la confirmation de la dégressivité de la taxe d'habitation par rapport au revenu.

Après allègements , la pression fiscale tend au contraire à croître légèrement lorsque s'élève le revenu de la ville. De régressive la taxe d'habitation devient légèrement progressive : un revenu supérieur de 10 % induit une augmentation de 1,5 % de la pression fiscale après allègements. L'écart entre les deux courbes de tendance correspondant à la pression fiscale avant et après allégements illustre ce fort pouvoir correcteur de la politique d'allègement .

Mais cette correction est d'autant plus forte que la commune est caractérisée par une forte pression fiscale avant allégement et que son revenu est bas. On vérifiera d'ailleurs sur le graphique que la dispersion des pressions fiscales après allègements est beaucoup plus faible qu'avant allègements.

Votre rapporteur spécial tient cependant à souligner que cette tendance à l'égalisation de la pression fiscale ne porte que sur des moyennes communales. La politique d'allègements conduit sans nul doute à une augmentation des disparités intracommunales , en particulier là où la pression fiscale est la plus forte, entre les contribuables bénéficiaires d'allègements et les autres.

2. Mais une justification très incertaine...

Votre rapporteur spécial ne pouvait que s'interroger sur les raisons susceptibles d'expliquer les écarts de pression fiscale avant allègements entre collectivités locales et donc d'en justifier la correction. Les raisons avancées généralement sont bien connues : le maintien d'un niveau de services publics locaux satisfaisant dans les communes faiblement dotées en bases de taxe professionnelle ou recevant pour des raisons tenant à l'histoire des dotations sous évaluées de l'Etat 58 ( * ) les obligent à compenser cette insuffisance de ressources potentielles par une hausse des taux des impôts frappant les ménages et notamment de la taxe d'habitation.

Une vérification complète de cette hypothèse outrepassait le cadre de ce rapport. Néanmoins, les quelques investigations menées par votre rapporteur spécial ne permettent pas de la confirmer, tout au contraire comme le montrent les résultats d'une analyse statistique présentée dans l'encadré ci après. Il est donc probable que les différences de pression fiscale en matière de taxe d'habitation sont tout autant la résultante de choix politiques, parfois anciens 59 ( * ) que la conséquence de disparités de potentiel fiscal. Sil en était ainsi, la principale justification d'une politique de dégrèvements fondée sur l'égalisation de l'effort fiscal s'effondrerait.

a) Une première analyse de régression multiple portant sur 1.838 communes de plus de 5.000 habitants faisant partie d'unités urbaines (au sens de l'INSEE) a cherché à expliquer le niveau de la cotisation semi-globale de la taxe d'habitation par les variables suivantes :

• Au titre des ressources :

o Le montant par habitant de l'ensemble des dotations d'Etat (données établies par la DGCL)

o Le potentiel fiscal de la taxe professionnelle (en échelle logarithmique)

o Le taux semi global de la TP dans la commune

o Le revenu médian par habitant

• Au titre des charges :

o La population communale (en échelle logarithmique)

o Le fait d'être ville centre de l'unité urbaine

Il ressort de cette analyse dont le coefficient de détermination est assez élevé (R²=05608) des résultats assez surprenants :

La cotisation semi globale de taxe d'habitation avant allègement croît de façon très significative avec le revenu médian² (r² partiel = 0,430)

Elle croît également mais de façon moins significative avec la population communale (r² partiel = 0,066) d'une part, mais également avec le taux de taxe professionnelle (r² partiel = 0,092) et avec le montant par habitant des dotations de l'Etat (r² partiel =0,057).

Enfin le fait d'être ville centre ou le niveau du potentiel fiscal par habitant de la taxe professionnelle n'exerce aucune influence

Au total, le montant de la cotisation d'habitation ne semble pas compenser une insuffisance de ressources externes (TP et dotations de l'Etat) mais aller de pair avec le revenu des habitants et le niveau d'imposition à la TP, via la liaison entre taux .

b) Une seconde analyse portant sur le même échantillon vise à expliquer non plus le niveau en valeur absolue de la cotisation de taxe d'habitation mais sa valeur relative en termes de revenu médian, c'est à dire la pression fiscale avant allègements, à partir d'une équation de régression à élasticités constantes (R² = 0,394)

Les résultats suivants ont été obtenus :

Elasticité par rapport au revenu médian : - 0,262 (r² partiel = 0,078)

Elasticité par rapport à la population 0,138 (r² partiel = 0,193)

Elasticité par rapport aux dotations de l'Etat : 0,093 (r² partiel = 0,024)

Elasticité par rapport au potentiel fiscal taxe professionnelle : - 0,077

(r² partiel = 0,050)

Cette régression confirme l'absence de relation significative avec les ressources externes (potentiel fiscal TP et dotations de l'Etat).

En revanche, la pression fiscale de la taxe d'habitation croît avec la taille de la commune et décroît avec le revenu médian. ( Ce résultat signifie que la cotisation en valeur absolue croît avec le revenu, mais moins rapidement que lui, si bien que la pression fiscale est une fonction décroissante du revenu).

B. UN RISQUE DE « SUBVENTIONNEMENT DES SUBVENTIONS »

L'effort fiscal entre, sous diverses formes, dans le calcul de certaines dotations actuelles de péréquation (par exemple la dotation impôts-ménages de la DGF des départements ou la DSU). Serait-il alors illogique de redéfinir les coefficients d'effort fiscal en déduisant du produit fiscal le montant des dégrèvements législatifs ? Tout dépend de la conception que l'on a de l'effort fiscal.

Si la réduction des inégalités entre collectivités locales constitue un moyen de mieux proportionner le service rendu aux usagers à l'effort fiscal demandé réellement aux contribuables , les dégrèvements devraient être déduits de l'évaluation de l'effort fiscal demandé 60 ( * ) (alors qu'ils sont « intégrés » en bases dans le potentiel fiscal). Si non, l'Etat sera amené à subventionner une seconde fois, via ses dotations de péréquation aux collectivités locales , les subventions implicites qu'il a déjà versées aux contribuables locaux de ces collectivités.

Ce point de vue ne sera évidemment pas partagé par tous ceux qui considèrent que les collectivités locales n'ont pas à être pénalisées par les politiques de redistribution directe de l'Etat à leurs contribuables qui n'ont pas pour elles de réalité budgétaire tangible, ce qui revient à dire qu'impôt local et subvention implicite d'Etat sont équivalents !

Deux exemples permettent d'illustrer cette question :

1. Le plafonnement de l'effort fiscal dans le calcul de la DSU limite le risque

La formule de calcul de la dotation de solidarité urbaine fait intervenir l'effort fiscal comme coefficient multiplicateur de l'indice synthétique des ressources et des charges, dans une limite supérieure fixée à 1,3. L'effort fiscal comprend, entre autres ressources prélevées sur les ménages, le produit de la taxe d'habitation

On constate à travers le graphique 4-2 que la subvention implicite de l'Etat, exprimée en francs par habitant croît comme il est logique avec l'effort fiscal , même si la corrélation est assez lâche.

Graphique 4-2
Subvention implicite de l'Etat et indice d'effort fiscal

(en francs par habitant)

Ainsi, les communes à faible pression fiscale sont doublement pénalisées ; non seulement elles perçoivent moins de DSU en raison d'un indice d'effort fiscal peu élevé, mais de plus elles bénéficient d'un montant réduit de subventions implicites au titre des allègements de taxe d'habitation. En sens inverse, le plafonnement à 1,3 de l'indice d'effort fiscal cesse d'avantager au titre de la DSU les communes les plus imposées et donc bénéficiaires des subventions implicites les plus élevées.

Malgré ce correctif apporté par le plafonnement à 1,3 de l'effort fiscal, votre rapporteur spécial estime qu'une déduction des dégrèvements législatifs du montant des ressources intégrées dans l'effort fiscal mériterait d'être envisagée.

2. La dotation impôts-ménages de la DGF des départements intègre le risque

En sens inverse, la dotation de péréquation « impôts-ménages » aboutit clairement à un subventionnement des dégrèvements au titre de la taxe d'habitation départementale. Le graphique 4-3 montre non seulement que la subvention implicite totale est du même ordre de grandeur que la dotation de péréquation « impôts ménages », mais qu'elle évolue très logiquement comme elle. Les départements qui exercent une forte pression fiscale sur les ménages (dégrèvements compris) sont doublement bénéficiaires, une première fois au titre de la DGF, une seconde fois au titre des dégrèvements. Il serait donc logique de déduire les dégrèvements du montant des impôts ménages servant de base au calcul de la dotation de la DGF.

Graphique 4-3
Comparaison de la DGF "impôts ménages" et des subventions implicites des départements

(en francs 2001 par habitant)

II. UNE FRACTION DES SUBVENTIONS IMPLICITES DOIT FAIRE L'OBJET D'UNE PÉRÉQUATION HORIZONTALE

Comment rendre sensibles aux élus les avantages parfois considérables que représentent pour leurs électeurs le système des dégrèvements ? Comment éviter que ce système ne soit déresponsabilisant ? Comment répartir une fraction de la masse des crédits de dégrèvements de façon plus conforme aux critères généraux de péréquation entre collectivités locales, sans remettre en cause à ce stade les avantages individuels dont bénéficient les contribuables ?

Votre rapporteur spécial estime que, de même qu'un ticket modérateur, même très modeste, devrait être imposé à tous les dégrevés en fonction du taux moyen d'imposition dans la commune, de même un ticket modérateur devrait être appliqué au niveau de chaque collectivité locale au regard des allègements d'impôt pris en charge par l'Etat. Mais ce ticket modérateur ne doit pas avoir pour objectif de permettre à l'Etat de reprendre d'une main ce qu'il a déjà donné de l'autre. Son produit doit être utilisé pour bonifier les dotations de péréquation existantes.

Votre rapporteur spécial s'est donc interrogé sur la possibilité d'un "recyclage" d'une petite fraction des subventions implicites en dotation de péréquation , dans le cadre d'un exercice de simulation portant sur l'ensemble des communes de plus de 10.000 habitants.

A. UNE SIMULATION DU RECYCLAGE DES SUBVENTIONS IMPLICITES

1. L'objectif de péréquation horizontale assigné à la simulation

Un exercice de simulation permet de tester l'intérêt de ce recyclage et également d'en révéler les difficultés. Il réalise une comparaison directe entre la péréquation cachée basée sur l'effort fiscal et la péréquation directe fondée sur les critères de redistribution explicités par le législateur . Il reposerait sur les deux règles suivantes :

- d'abord, le système des dégrèvements législatifs demeurerait inchangé pour les contribuables locaux . Ceci ne signifie pas qu'il soit rationnel et qu'il ne mérite pas d'être modifié. On souhaite seulement restreindre le champ de l'analyse aux seules collectivités locales ;

- ensuite un mécanisme de péréquation horizontale serait greffé sur une dotation verticale de l'Etat aux collectivités locales, la future DGF de péréquation par exemple. Ce mécanisme de péréquation horizontale aurait par hypothèse un solde global nul.

Seraient contributrices à ce mécanisme de péréquation horizontale la totalité des collectivités dont une partie des contribuables est exonérée ou dégrevée d'office à raison des subventions implicites à la charge de l'Etat.

La contribution totale de chaque catégorie de collectivités est en suite remise en distribution suivant un (ou plusieurs) critère de péréquation en vigueur.

Le solde (positif ou négatif) de la contribution et de la redistribution pour chaque collectivité vient abonder ou au contraire est repris sur sa DGF.

2. Le champ de la simulation et le choix des critères de péréquation

Cette simulation a porté pour l'essentiel sur les communes de plus de 10.000 habitants entrant dans le champ d'application de la Dotation de solidarité urbaine (DSU). Votre rapporteur spécial est conscient du caractère restrictif de ce choix, car il élimine de son champ toute redistribution entre communes urbaines et rurales , ces dernières étant moins imposées et donc moins subventionnées implicitement par l'Etat ; mais il a tenu à respecter l'esprit des mécanismes actuels de péréquation qui traitent différemment les communes de plus de 10.000 habitants (via la DSU) et les communes de moins de 10.000 habitants (via la Dotation de solidarité rurale DSR).

a) Une péréquation reposant sur les critères de répartition de la DSU

S'agissan t des critères de redistribution entre communes de l'enveloppe à répartir, votre rapporteur spécial s'en est tenu aux critères actuels de la DSU, sans s'interroger sur leur pertinence et sans remettre en cause leur redondance.

Les critères incorporés dans l'indice synthétique de ressources et de charges de la DSU sont au nombre de quatre : inverse du revenu par habitant, inverse du potentiel fiscal par habitant, au titre des ressources ; proportion de logements sociaux et proportion de bénéficiaires de prestations logement. En fait, ces quatre critères ne sont pas réellement indépendants : le revenu moyen et le pourcentage de bénéficiaires de prestations logements sont des variables très fortement corrélées entre elles et pratiquement interchangeables, comme le montre le graphique 4-4. En revanche le potentiel fiscal par habitant est indépendant des trois autres critères 61 ( * ) On s'en est néanmoins tenu à ces quatre critères et à leur combinaison linéaire sous forme d'un indice synthétique . En revanche, il n'a pas été tenu compte des divers mécanismes qui se surimposent à cet indice dans le processus complexe de détermination de la DSU (coefficient multiplicateur tenant compte du rang de classement de chaque commune en fonction de l'indice synthétique ; prise en compte partielle de l'effort fiscal, élimination de la distribution du quart des communes les plus favorisées 62 ( * ) ).

Graphique 4-4
La proportion de bénéficiaires de prestations logement dépend du revenu par habitant

b) Une péréquation horizontale limitée aux dégrèvements partiels

S'agissant ensuite de la base des prélèvements à opérer , faut-il prendre en compte la totalité des ressources apportées par l'Etat en contre-partie des allègements de taxe d'habitation ?

On a retenu le principe suivant lequel seules les subventions implicites non péréquatrices devaient faire l'objet d'une redistribution (limitée). Si leur distribution entre communes s'apparentait à celle à laquelle conduirait l'application des critères de la DSU, il serait évidemment absurde de les redistribuer.

Les subventions implicites correspondant aux dégrèvements partiels sont clairement non péréquatrices , comme le montre le tableau ci-dessous des coefficients de détermination R², entre ces subventions implicites et les critères de péréquation de la DSU, tous très proches de 0. Ce résultat essentiel signifie que l'aide de l'Etat apportée à ce titre n'est pas automatiquement dirigée vers les communes à faible revenu ou à faible potentiel fiscal, mais bénéficie à celles d'entre elles qui font le choix d'une pression fiscale élevée. Il justifie la mise en place d'un mécanisme de redistribution partielle des subventions implicites.

En revanche, les subventions implicites engendrées par les exonérations et les dégrèvements totaux sont légèrement péréquatrices, notamment par rapport au revenu communal et par voie de conséquence aux bénéficiaires de prestations logements On les éliminera en conséquence du champ des simulations.

 
 

Subventions implicites liées aux dégrèvements partiels

Subventions implicites liées aux allègements totaux

Indices de péréquation

 

Inverse du potentiel fiscal par habitant

0,0095

0,1009

Inverse du revenu moyen par habitant

0,0018

0,2603

Proportion de logements sociaux

0,0003

0,0356

Proportion de bénéficiaires de prestations logement

0,0018

0,208

A titre d'exemple les deux graphiques suivants illustrent le fait que les subventions implicites dues aux allègements totaux sont légèrement péréquatrices au regard du critère « proportion de bénéficiaires de prestations logement » à la différence de celles liées aux dégrèvements partiels.

Graphique 4-5
Les subventions implicites liées aux dégrèvements partiels ne sont pas corrélées à l'indice de péréquation APL

(en francs 2001 par habitant)

Graphique 4-6
Les subventions implicites liées aux allègements totaux (dégrèvements et exonérations)
sont corrélées à l'indice de péréquation APL 63 ( * )

(en francs 2001 par habitant)

c) Une éventuelle péréquation au niveau des prélèvements sur les ressources

S'agissant enfin des critères de prélèvement à opérer sur ces subventions implicites, deux variantes ont été utilisées dans la simulation.

• Ou bien on n'intègre aucun critère de péréquation dans la détermination du prélèvement. La contribution de chaque commune correspond alors à un pourcentage donné, égal pour toutes de la participation de l'Etat au titre de la part semi globale des dégrèvements partiels. Les calculs ont été opérés sur la base, totalement arbitraire , d'une reprise de 20 % des subventions implicites (soit 1,1 milliard de francs 2001).

• Ou bien, au contraire, on introduit un critère de péréquation au niveau du prélèvement horizontal en considérant que les communes les plus pauvres n'ont pas à contribuer dans la même proportion que les plus riches, à égalité de pression fiscale.

Ces deux types de prélèvements seront successivement testés dans les sections suivantes.

B. LES LIMITES D'UNE PÉRÉQUATION REPOSANT SUR LA SEULE REDISTRIBUTION DES RESSOURCES

Deux simulations 64 ( * ) sont présentées. La première consiste en une redistribution d'une fraction des subventions implicites au prorata du critère « potentiel fiscal de la DSU » ; la seconde s'effectue au prorata du critère « bénéficiaires de prestations logement ». Dans les deux cas, la péréquation est alimentée par un prélèvement de 20 % sur les subventions implicites générées par les dégrèvements partiels. Ce prélèvement , au taux identique pour toutes les communes, est donc neutre au regard de la péréquation des ressources qui ne fait que refléter la distribution intercommunale des dégrèvements partiels.

1. L'impact du critère « potentiel fiscal »

Le graphique 4-7 montre les résultats de la péréquation horizontale lorsqu'elle porte sur 20 % des dégrèvements partiels semi-globaux dans les communes de plus de 10.000 habitants, soit 1,1 milliard de francs 2001. La courbe supérieure indique la dotation maximale que peut percevoir une commune du fait de l'insuffisance de son potentiel fiscal. Chaque point indique la dotation réelle positive ou négative reçue par chaque commune, après reprise d'une fraction égale à 20 % de sa subvention implicite.

Graphique 4-7
Redistribution de 20 % des subventions implicites au prorata du critère d'insuffisance du potentiel fiscal (ensemble des communes de plus de 10.000 habitants)

Les villes à faible potentiel fiscal (moins de 3.000 francs par habitant) sont presque toujours gagnantes, d'une part parce que nombre d'entre elles sont faiblement imposées, d'autre part parce que le critère « inverse du potentiel fiscal » est fortement redistributif. En revanche , les communes nettement perdantes (perte de plus de 30 francs par habitant) sont à la fois très fortement imposées et dotées d'un potentiel fiscal moyen qui ne leur assure qu'une assez faible redistribution à ce titre . De nombreuses villes de plus de 100.000 habitants se rangent dans cette catégorie. On remarque en outre que les communes à fort potentiel fiscal peuvent bénéficier de transferts de ressources en leur faveur dès lors que les dégrèvements partiels y sont faibles.

Le tableau 4-1 illustre ces observations en fournissant la liste des plus grands écarts constatés , en plus ou en moins dans l'échantillon des communes de plus de 20.000 habitants. On vérifie que le caractère contre-péréquateur des subventions implicites est gommé dans les villes pauvres du Nord faiblement ou moyennant imposées. En revanche les villes très fortement imposées doivent contribuer même lorsque leur potentiel fiscal est moyen (Nîmes, Béziers, Yerres par exemple).

Tableau 4-1
Redistribution de 20 % des subventions implicites en fonction du critère « potentiel fiscal »
communes de plus de 20.000 habitants gagnant (ou perdant) au moins 25 francs par habitant

(péréquation des subventions implicites sur les dégrèvements partiels)

(en francs 2001 par habitant)

2. L'impact du critère « bénéficiaires de prestations-logement ».

Ce critère a été choisi de préférence au critère du revenu parce qu'il est affecté d'un coefficient plus élevé dans l'indice synthétique de la Dotation de solidarité urbaine (DSU) (30 % au lieu de 10 %) mais il a été démontré que ces deux critères sont fortement corrélés.

On observe sur le graphique 4-8 que toutes les communes se situent dans une bande de largeur à peu près constante sous la droite (en rouge) indiquant les transferts maxima en l'absence de toute reprise sur les dégrèvements partiels. Ceci signifie que cette reprise sur subventions peut être très forte dans des communes à faible revenu et forte proportion de bénéficiaires de prestations logement, quand bien même la pression fiscale n'y est que moyenne.

Graphique 4-8
Redistribution de 20 % des subventions implicites au prorata du pourcentage de bénéficiaires des prestations logements

Ensemble des communes de plus de 10.000 habitants

Les principaux écarts constatés dans les communes de plus de 20.000 habitants sont récapitulés dans le tableau 4-2 page suivante.

Tableau 4-2
Redistribution de 20 % des subventions implicites liées aux dégrèvements partiels en fonction du critère « proportion de bénéficiaires des prestations logements »
communes de plus de 20.000 habitants gagnant (ou perdant) au moins 30 francs par habitant

(péréquation des subventions implicites sur les dégrèvements partiels)

(en francs 2001 par habitant)

C. L'EFFICACITÉ D'UNE PÉRÉQUATION FONDEE SUR LA MODULATION DES PRÉLÈVEMENTS

Pour éviter que les communes les mieux dotées ne participent pas à l'effort de péréquation, on a modulé dans cette seconde simulation le taux de prélèvement sur les subventions implicites en fonction du revenu communal moyen au lieu de le maintenir constant . Il paraît équitable qu'une commune bénéficiant de peu de dégrèvements partiels, non en raison de la faiblesse de sa pression fiscale mais parce que ses habitants jouissent de revenus élevés, rende à la péréquation un plus fort pourcentage de ses subventions implicites qu'une commune où le revenu moyen est moins élevé.

La formule utilisée consiste à ne rien prélever dans les communes où le revenu est inférieur à la moitié du revenu moyen des villes de plus de 10.000 habitants et à faire croître asymptotiquement le taux du prélèvement vers le double du taux moyen retenu 65 ( * ) lorsqu'augmente le revenu communal.

La simulation effectuée en fonction de ce principe porte sur 970 millions de francs de prélèvements. Ces prélèvements ont ensuite été redistribués entre toutes les communes de plus de 10.000 habitants au prorata de l'indice synthétique des ressources et des charges.

1. L'efficacité globale du recyclage

Cette efficacité globale se lit sur le graphique 4-11 (en se souvenant qu'une valeur élevée de l'indice synthétique sur l'axe des abscisses correspond à la situation des communes défavorisées par l'insuffisance de leurs ressources).Les transferts négatifs sont clairement concentrés autour d'une valeur de l'indice proche de 1, tandis que les transferts positifs se rapprochent de plus en plus de leur montant maximum (indiqué en rouge) lorsque la valeur de l'indice s'élève. Ceci résulte du fait que le taux de prélèvement sur les subventions implicites diminue dans les communes pauvres à indice de ressources élevé.

Graphique 4-9
Simulation d'une péréquation horizontale en fonction d'un prélèvement modulé sur les subventions implicites et d'une redistribution basée sur l'indice de la DSU

2. L'impact de la péréquation horizontale sur les finances des grandes villes

Un dernier tableau récapitule les principaux résultats obtenus pour l'ensemble des villes de plus de 50.000 habitants, classées suivant le solde redistribué par habitant, de Roubaix (+ 56,8 francs par habitant) à Cannes (- 68,9 francs par habitant 66 ( * ) . Ces montants peuvent paraître modestes mais ils correspondent à des montants absolus parfois considérables qui figurent dans la dernière colonne du tableau. Votre rapporteur spécial tient à cet égard à rappeler qu'il ne s'agit là que d'un exercice de simulation très ambitieux puisqu'il porte sur près d'un milliard de francs de transferts horizontaux et qu'il ne saurait être mis en oeuvre que très progressivement. Il souligne également que la redistribution opérée ne s'effectue pas uniquement entre les grandes villes figurant dans le tableau, dont beaucoup sont contributrices nettes, mais entre toutes les communes de plus de 10.000 habitants.

Les deux premières colonnes rappellent le taux moyen de pression fiscale dans la commune (exprimé par rapport au revenu médian et le montant par habitant des subventions implicites au titre des dégrèvements partiels

La troisième colonne fait apparaître l'impact du taux correcteur du prélèvement , par rapport à un taux moyen de prélèvement de 20 %. Des villes où le revenu moyen est élevé ont des taux de prélèvement qui peuvent atteindre 29 % (Paris) ou même 35 % (Neuilly) et descendre à 1,4 % à Roubaix ou 9 % à Tourcoing. Ce taux de prélèvement appliqué au montant des subventions implicites découlant des dégrèvements partiels fournit le prélèvement par habitant de la quatrième colonne. On constate que ce prélèvement peut être assez modeste, même avec un taux de prélèvement élevé, dès lors que le montant des dégrèvements et la pression fiscale sont faibles (par exemple à Versailles ou à Issy les Moulineaux).

La cinquième colonne indique le montant par habitant de la redistribution des ressources prélevées au prorata de l'indice synthétique des ressources et des charges de la DSU 67 ( * ) .

Enfin les deux dernières colonnes fournissent le solde péréquateur par habitant , c'est à dire la différence entre le prélèvement sur subventions implicites et la redistribution au prorata de l'indice de la DSU, et le montant correspondant en valeur absolue à imputer sur la DGF communale.

Tableau 4-3
Bilan de la simulation d'une péréquation horizontale des subventions implicites entre les villes de plus de 10.000 habitants

(données concernant l'échantillon des communes de plus de 50.000 habitants)

Bilan de la simulation d'une péréquation horizontale des subventions implicites entre les villes de plus de 10.000 habitants (suite)

(données concernant l'échantillon des communes de plus de 50.000 habitants)

Bilan de la simulation d'une péréquation horizontale des subventions implicites entre les villes de plus de 10.000 habitants (suite)

(données concernant l'échantillon des communes de plus de 50.000 habitants)

CONCLUSION

Votre rapporteur spécial croit utile de suggérer quelques recommandations sur le système de dégrèvements législatifs de la taxe d'habitation en fonction du revenu. Mais ces recommandations n'ont qu'un caractère limité car elles ne peuvent prendre effet que dans le cadre transitoire de la taxe d'habitation actuelle, à bases non révisées (A). Votre rapporteur spécial se permettra de conclure par quelques observations sur la nécessaire réforme de l'assiette de la taxe d'habitation et de l'extinction corrélative de la pratique des dégrèvements (B).

A. CINQ PROPOSITIONS POUR RESPONSABILISER ÉLUS ET CONTRIBUABLES

1. Rendre le système des dégrèvements transparent

Les dégrèvements législatifs doivent cesser d'être un domaine opaque ignoré de tous :

• Au niveau du contribuable :

Le dégrèvement législatif doit apparaître clairement sur la feuille d'imposition du contribuable

L'extrait ci-joint d'un avis d'imposition est totalement incompréhensible (il faut d'ailleurs se référer au verso de l'avis pour comprendre la signification de la lettre A donnant l'explication du plafonnement en fonction du revenu)

Ne serait-il pas possible de faire figurer en bas de l'avis une phrase du type « l'impôt voté par les collectivité locales s'élève pour votre logement à 681 euros . Mais du fait de votre revenu et de votre situation de famille, l'Etat prend à sa charge en 2003 une partie de cet impôt, soit 508 euros. Il la versera à votre place à votre commune et à votre département. Vous n'aurez donc à payer que 173 euros ».

• Au niveau des collectivité locales

Les collectivités locales doivent être informées du montant des dégrèvements législatifs.

Cette mesure n'est pas anodine. Elle suppose en effet que le montant des dégrèvements législatifs soit ventilé par collectivité bénéficiaire au prorata des cotisations dues avant allègement, pour chaque contribuable.

La ventilation des cotisations avant et après dégrèvements législatifs doit figurer sur les états statistiques fournis aux collectivités locales (état 1386). Elle servira le cas échéant à la mise en oeuvre de la mesure de recyclage qui sera proposée ultérieurement (cf. 4.).

Chaque assemblée délibérante prendra acte de la communication annuelle qui lui sera faite annuellement par les services fiscaux du montant des allègements d'impôt la concernant. Les média pourront ainsi connaître le poids réel de la taxe d'habitation pour les contribuables locaux.

• Au niveau du budget de l'Etat

Les dégrèvements d'impôts locaux ne devraient plus être confondus avec les dégrèvements et remboursements d'impôts d'Etat dans la présentation actuelle de l'équilibre budgétaire et dans la définition des futurs programmes prévus par la loi organique sur les lois de finances.

2. Réviser le mécanisme des abattements facultatifs à la base

La loi a institué deux tickets modérateurs pour éviter de faire supporter à l'Etat les conséquences des hausses de taux de taxe d'habitation :

- l'un à la charge des collectivités locales pour les exonérations (blocage en fonction des taux votés en 1991) ;

- l'autre à la charge des contribuables pour les dégrèvements partiels (blocage en fonction des taux de 2000).

La suppression des abattements à la base dans une collectivité locale neutralise l'effet de ces tickets modérateurs en augmentant les bases nettes imposables et les impositions sans provoquer de hausse des taux et en en transférant l'essentiel de la charge sur l'Etat.

• A très court terme , il convient de neutraliser l'effet d'aubaine résultant d'une suppression des abattements facultatifs à la base en bloquant les dégrèvements en fonction non seulement des taux de 2000 mais aussi des abattements existants en 2000, sans que cette mesure soit nécessairement rétroactive.

• A moyen terme, une réforme des abattements à la base devrait être entreprise. L'abattement spécial à la base serait supprimé , car il n'a plus de raison d'être en raison de l'extension des dégrèvements totaux. (Seules les collectivités « mal informées » le votent).

La création d'un taux minimum d'abattement général à la base devrait être simulée pour maintenir une solidarité redistributive minimale à l'intérieur de chaque collectivité et surtout pour supprimer l'inégalité de traitement entre les communes appliquant encore un abattement à la base et prenant de ce fait à leur charge une partie des allègements de taxe et les autres qui rejettent la totalité de cette charge sur l'Etat. Ce taux minimum (de 5 % ?) ne devrait probablement concerner que les villes, l'abattement à la base étant très peu développé en zone rurale.

La détermination de la valeur locative moyenne devrait être révisée pour ne s'appliquer qu'aux seules résidences principales (à l'exclusion des résidences secondaires) et à partir d'un nombre de résidences correctement établi (sans prise en compte des dépendances).

3. Renforcer le ticket modérateur à la charge du contribuable dégrevé partiellement

Dans le système actuel des dégrèvements partiels, le contribuable devient insensible au niveau de la pression fiscale locale dès que celle-ci a dépassé un certain seuil puisque la totalité de l'imposition dépassant 4,3 % du revenu de référence après abattements est prise en charge par l'Etat. De plus le ticket modérateur existant qui ne joue qu'en cas de hausse du taux global dépend de la seule variation de ce dernier et non du niveau plus ou moins élevé de l'imposition de départ. Une hausse de 2 points du taux global a les mêmes effets, qu'elle s'applique à un taux initial de 10 % ou de 20 % !

Le ticket modérateur actuel devrait d'abord jouer séparément pour chaque niveau de collectivité, sans compensation possible entre les variations de taux communal, intercommunal et départemental. Il ne faut plus qu'une hausse du taux départemental, par exemple, puisse être sans effet parce que compensée par une baisse du taux communal.

Un nouveau ticket modérateur devrait être mis en place en fonction du niveau de l'imposition existante et non plus seulement en fonction de sa variation., en plafonnant par exemple le dégrèvement partiel à 50 % de la cotisation.(voire à un taux supérieur). Ce ne serait d'ailleurs que le retour à une pratique antérieure.

Illustration du plafonnement du dégrèvement à 50 % de la cotisation

Cas d'un contribuable célibataire dont le revenu de référence de 10.000 euros

• Situation actuelle :

Le contribuable paie au maximum 275 euros quel que soit le montant de sa cotisation dès lors qu'elle dépasse 275 euros (zone bleu clair)

• Situation après réforme :

Il continuera à ne payer que 275 euros tant que sa cotisation n'atteint pas 550 euros. Si ce niveau est dépassé, il devra acquitter la moitié de sa cotisation, par exemple 400 euros pour une cotisation de 800 euros. (dans ce cas le dégrèvement passe de 275 euros à 400 euros). Le ticket modérateur est représenté par la zone bleue foncée du graphique.

4. Mettre en place un mécanisme de péréquation horizontale recyclant une fraction du coût des dégrèvements partiels en dotation de péréquation

Cette mesure ne remet pas en cause les dégrèvements individuels. Elle a pour but de majorer les dotations de péréquation de la DGF grâce à une contribution des collectivités bénéficiaires des subventions implicites de l'Etat générées par les dégrèvements partiels.

Cette contribution devrait rester modeste (de l'ordre de 10 % des dégrèvements partiels en régime de croisière). Le taux de contribution devrait varier avec le revenu moyen communal.

La totalité de cette contribution abonderait les dotations de péréquation de la DGF. Elle constituerait un ticket modérateur à la charge essentiellement des collectivités les plus riches, mais à forte pression fiscale.

5. Rapprocher à terme le régime des exonérations de celui des dégrèvements totaux

Pour le contribuable , les deux régimes ont un effet identique : la non-imposition, avec un seuil de non imposition plus élevé en cas d'exonération, pour les personnes de plus de 60 ans.

Pour les collectivités locales , les exonérations sont compensées par l'Etat sur la base des taux de 1991 , et les dégrèvements totaux sont pris en charge sur la base des taux de l'année.

Cette dualité de régime n'est pas satisfaisante , même si dans les deux cas les bases dégrevées ou exonérées évoluent : elle pénalise les communes à forte proportion de personnes âgées. Le Sénat a toujours souhaité que les exonérations soient compensées au même titre que les dégrèvements totaux. Votre rapporteur spécial s'interroge sur la possibilité d'une unification des modalités de compensation sur la base des taux d'une année intermédiaire, ce qui créerait un léger ticket modérateur à la charge des dégrevés totaux en cas de hausse des taux et exigerait un effort financier de l'Etat en faveur des communes et départements, souvent ruraux, à forte proportion de personnes âgées.

Il s'interroge également sur la nécessité de maintenir un régime spécifique d'allègement de l'impôt pour les personnes de plus de 60 ans. Ce régime avait été mis en place avant le développement des dégrèvements totaux . Sa mise en extinction partielle par relèvement chaque année de l'âge minimum (61 ans, 62 ans, etc.) jusqu'à 70 ans mériterait d'être étudié.

B. QUELQUES SUGGESTIONS POUR UNE RÉFORME DE LA TAXE D'HABITATION

Les recommandations précédentes de votre rapporteur spécial ne peuvent avoir qu'une portée limitée, car elles se situent dans le cadre législatif existant. Le système déresponsabilisant des dégrèvements législatifs ne pourra en effet être réformé en profondeur et sans doute supprimé que lorsque sera résolu le problème de l'assiette de l'impôt local frappant les ménages, qu'elle corresponde à la valeur des logements, qu'il s'agisse de la valeur locative, vénale ou administrée, ou qu'elle prenne en compte les capacités contributives à travers notamment le revenu. Il n'est évidemment pas question de proposer ici une solution à ce problème lancinant, même si votre rapporteur tient à faire part de quelques convictions toutes personnelles.

• D'abord, il lui semble qu'une diversification des assiettes fiscales locales est en général souhaitable : faire reposer l'ensemble des prélèvements obligatoires sur le seul revenu (pour les ménages) ou sur la seule valeur ajoutée (pour les entreprises) conduit à dupliquer au niveau local le système fiscal national et fait perdre aux impôts locaux leur nécessaire autonomie. A cet égard, l'impôt foncier, la « property tax » doit demeurer un élément déterminant de la fiscalité locale puisque la valeur des services rendus par les collectivités locales se capitalise dans la valeur des propriétés. Que cet impôt soit partagé par le législateur entre le propriétaire et l'occupant de logement via une taxe d'habitation ou supporté en totalité par le propriétaire qui le répercutera partiellement sur son locataire via une augmentation du loyer est plus une question technique qu'un choix économique car les résultats sont probablement équivalents, du moins si l'évaluation des propriétés est faite correctement.

• Ensuite, l'expérience des plafonnements de taxe d'habitation montre que les « assiettes mixtes 68 ( * ) » résultant de l'introduction d'une part de revenu dans l'assiette de la taxe d'habitation sont non seulement difficiles à « calibrer » mais de plus totalement illisibles pour le contribuable. Si l'on veut conserver la taxe d'habitation comme impôt finançant les services rendus aux occupants de logement et recréer une contribution personnelle et mobilière assise sur les capacités contributives des ménages, mieux vaut organiser deux impôts distincts que créer une chimère .

Dans les faits, ces deux impôts existent déjà puisque les dégrevés partiels sont assujettis à un impôt sur le revenu légèrement progressif et à taux fixe et que les imposés à taux plein acquittent un impôt sur la valeur administrée de leurs logements et à taux variable. Mais il est parfaitement anormal, au regard de l'équité fiscale que la frontière entre ces deux impôts soit fluctuante et dépende à la fois de la politique fiscale des collectivités territoriales et du revenu de référence du contribuable : une légère augmentation de son revenu de référence peut faire basculer un contribuable d'un régime dans l'autre et provoquer, pour peu que la pression fiscale dans la commune soit élevée, une brutale majoration de sa taxe d'habitation.

Mais cette « contribution personnelle et mobilière » serait très différente de l'impôt progressif sur le revenu si l'on veut assurer une transition avec le mécanisme des dégrèvements. Elle serait acquittée comme la taxe d'habitation par « ménage fiscal » regroupant le cas échéant plusieurs foyers fiscaux vivant dans le même logement et frapperait à un taux proportionnel le revenu de référence (avec un abattement à la base). Ce taux devrait être soit fixé soit enserré dans une fourchette étroite par le Parlement.

Votre rapporteur spécial est enfin convaincu que le « coin fiscal » que les allègements fiscaux enfoncent entre l'impôt payé par le contribuable et l'impôt encaissé par la collectivité locale doit disparaître et qu'en conséquence, les dégrèvements législatifs devront être recyclés en dotations de péréquation 69 ( * ) tenant compte notamment du revenu moyen de la collectivité locale.

Cette conversion ne devra pas être interdite par une interprétation littérale mais économiquement erronée de la notion de « ressources propres » dont l'article 72-2 de la Constitution dispose qu'elles doivent représenter une « part déterminante » de l'ensemble des ressources des collectivités territoriales. Si cette part déterminante ne peut être inférieure à celle constatée en 2003, il sera essentiel de déterminer cette dernière à partir des ressources fiscales locales de 2003, déduction faite des dégrèvements législatifs financés par le contribuable national. Sinon tout recyclage des dégrèvements en dotations deviendra un problème budgétaire insoluble.

EXAMEN EN COMMISSION :

PRÉSENTATION DE L'ÉTUDE
(15 OCTOBRE 2003)

Réunie le mercredi 15 octobre 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a entendu une communication de M. Yves Fréville , rapporteur spécial , sur les dégrèvements d'impôts locaux.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a rendu compte des résultats de sa mission d'information relative aux dégrèvements et exonérations de taxe d'habitation, figurant au budget des charges communes dont il est le rapporteur pour la commission des finances. Il a rappelé au préalable que, sur les 12,22 milliards d'euros de recettes perçues par les collectivités locales au titre de la taxe d'habitation, les contribuables départementaux et communaux n'en acquittaient que 70 %, l'Etat, et donc le contribuable national, étant amené à verser la différence, soit, en 2002, 3,67 milliards d'euros, en contrepartie de sa politique menée en matière de dégrèvements. Il a indiqué que la compensation financière assumée par l'Etat avait fortement augmenté depuis 1990 et qu'elle avait connu une inflexion très significative à la hausse depuis la suppression en 2000 de la part régionale de la taxe d'habitation et la réorganisation des dégrèvements. Il a indiqué qu'en conséquence, près de 50 % des contribuables bénéficiaient en 2002 d'allégements ou d'exonérations de taxe d'habitation, estimant que la taxe d'habitation demeurait ainsi un impôt local pour les « hauts revenus » mais était devenue « nationalisée » pour les « bas revenus ».

Constatant que les dégrèvements législatifs de taxe d'habitation constituaient une subvention implicite pour les collectivités locales s'ajoutant à la compensation des exonérations individuelles, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a exposé l'objet de son étude, consistant, d'une part, à analyser les risques de déresponsabilisation des contribuables et des élus locaux et, d'autre part, à s'interroger, à partir de la répartition des allégements de taxe d'habitation entre les diverses collectivités locales, sur le rôle qu'ils jouaient en matière de péréquation. Il a indiqué que son étude était fondée sur la fusion de fichiers issus de la direction générale des collectivités locales, de la direction générale des impôts, de la direction générale de la comptabilité publique et de l'INSEE.

Il a montré que les allégements de taxe d'habitation étaient concentrés dans les villes, le nombre de contribuables imposés à taux plein diminuant en fonction de la taille des communes. En ce qui concernait les dégrèvements partiels, il a souligné que le pourcentage de dégrevés partiels à 4,3 % s'élevait dans les grandes villes jusqu'à 100.000 habitants. En revanche, il a montré que pour les exonérations de taxe d'habitation des contribuables les plus âgés, les contribuables concernés étaient davantage concentrés dans les petites communes rurales. Il a indiqué que le pourcentage de contribuables ne payant pas la taxe d'habitation à taux plein était particulièrement élevé dans le pourtour méditerranéen, dans le Nord et en Bretagne, le montant par habitant de la taxe d'habitation financée par l'Etat étant donc très important dans ces zones géographiques.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a ensuite rappelé que le montant des allégements de taxe d'habitation dépendait étroitement de la pression fiscale des communes. Il a estimé que le caractère péréquateur des allégements de taxe d'habitation n'était pas complètement établi. Il a en effet démontré, d'une part, que le poids de la taxe d'habitation dans l'ensemble des ressources des collectivités locales ne variait pas en fonction inverse des autres ressources locales, celui-ci n'étant corrélé ni au potentiel fiscal, ni au montant des dotations versées par l'Etat comme la dotation globale de fonctionnement (DGF). Il a jugé, d'autre part, que les subventions implicites que représentaient les dégrèvements de taxe d'habitation n'avaient de caractère péréquateur, au regard de l'indice des ressources des communes, que pour les collectivités pauvres préférant élever leur pression fiscale afin de développer les services publics locaux. Lorsque les communes préféraient un bas niveau de services locaux pour ne pas surimposer leurs habitants, il a montré que les dégrèvements n'avaient pas de caractère péréquateur. Il a conclu ce constat en considérant que la participation de l'Etat était péréquatrice mais s'effectuait compte tenu d'un critère de péréquation contestable, puisque celui-ci était trop fortement lié au niveau de pression fiscale des collectivités locales.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a dès lors formulé, à titre personnel, des propositions pour responsabiliser les élus et les contribuables, en attendant une révision ultérieure des bases de la taxe d'habitation. Il a souhaité rendre le système des dégrèvements plus transparent, en faisant clairement apparaître sur la feuille d'imposition le montant de l'impôt dû en l'absence de dégrèvement, en ventilant le montant du dégrèvement entre collectivités au prorata de la part de la cotisation attribuée à chaque contribuable, en déduisant les dégrèvements législatifs du montant des ressources propres des collectivités locales pour en permettre le recyclage en dotations péréquatrices. Il s'est demandé s'il ne fallait pas réviser certains indicateurs de pression ou d'effort fiscal en déduisant au moins partiellement les dégrèvements législatifs, afin de ne pas « subventionner la subvention ».

Il a présenté les abus que permettaient les abattements facultatifs à la base, estimant nécessaire de neutraliser les effets d'aubaine d'une suppression des abattements à la base. Il a proposé de recycler progressivement une fraction du coût des dégrèvements partiels en dotation de péréquation répartie entre collectivités locales selon des critères rénovés et, par ailleurs, pour responsabiliser le contribuable local, de créer un « ticket modérateur » en plafonnant, par exemple, le dégrèvement partiel à 50 % de la cotisation.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a conclu en soulignant qu'à plus long terme, l'économie de la réforme reposait, selon lui, sur une rénovation des bases de la taxe d'habitation, sur un abandon de l'assiette mixte composée du revenu et de la valeur locative au profit d'une assiette unique, qui pourrait être le revenu, et sur un « recyclage » des crédits de dégrèvements législatifs, selon lui déresponsabilisants, en dotation de péréquation rénovée incorporant un critère de revenu.

A la suite de cette communication, un large débat s'est engagé.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité d'une telle présentation « percutante ». Il a estimé que le constat présenté était troublant et que, de ce fait, la situation ne pouvait pas rester figée. Il a néanmoins souligné la difficulté de toute réforme dans ce domaine.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que la recherche d'une plus grande transparence en matière de dégrèvements de taxe d'habitation lui semblait être une voie à poursuivre et à décliner si possible en proposant des « amendements d'appel » en ce sens à l'occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2004. Il a souligné le caractère déresponsabilisant du système actuel.

En complément, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a souhaité que le Parlement puisse se doter d'une expertise pour analyser et exploiter les données d'un fichier commun entre la direction générale des collectivités locales, la direction générale des impôts, la direction générale de la comptabilité publique et l'INSEE, tel qu'il l'avait créé lui-même pour son étude.

M. Michel Moreigne a souligné l'intérêt, pour le Sénat, d'utiliser et d'optimiser un tel fichier.

M. Jacques Oudin a estimé que l'étude qu'avait réalisée la commission aurait due être réalisée depuis longtemps par le comité des finances locales et a estimé qu'il fallait développer les structures d'information en matière de finances locales. Il a jugé qu'il convenait de bloquer les dérives constatées par le rapporteur spécial aujourd'hui exploitées par des « consultants en optimisation fiscale » auprès des collectivités locales.

M. Jean-Philippe Lachenaud a considéré qu'il fallait clarifier les règles en matière de dégrèvements. En ce qui concernait une réforme plus profonde de la taxe d'habitation, il s'est montré d'accord pour ne retenir qu'une seule assiette, a priori une assiette non délocalisable.

En réponse, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a remarqué que le comité des finances locales, parce qu'il était adossé à la direction générale des collectivités locales du ministère de l'intérieur, manquait d'une vision globale et synthétique qui inclurait la vision du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il a regretté que l'administration française n'ait pas de vision globale en matière de fiscalité locale, jugeant que le Sénat devait trouver les moyens d'y remédier.

Puis la commission a donné acte à M. Yves Fréville, rapporteur spécial , de sa communication , et a décidé , compte tenu de son intérêt, et pour favoriser la réflexion de la commission, de lui demander d'en formaliser les principales conclusions afin d'en permettre la publication sous la forme d'un rapport d'information.

EXAMEN EN COMMISSION :

CONCLUSIONS DU RAPPORT
(18 NOVEMBRE 2003)

Réunie le mardi 18 novembre 2003, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a entendu une communication de M. Yves Fréville , rapporteur spécial , sur les dégrèvements d'impôts locaux.

M. Jean Arthuis, président , a rappelé que la commission avait déjà entendu, le mercredi 15 octobre 2003, une communication portant sur les dégrèvements locaux et qu'il s'agissait, à partir du constat alors tracé, d'en formaliser, sous forme de propositions, les principaux enseignements.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a rendu compte des résultats de ses travaux relatifs aux dégrèvements et exonérations de taxe d'habitation, figurant au budget des charges communes dont il était le rapporteur au nom de la commission. Il a rappelé, au préalable, que 30 % des contribuables départementaux et communaux ne payaient pas de taxe d'habitation et que 20 % étaient dégrevés partiellement. Il a montré que les contribuables locaux ne supportaient que 70 % du poids de la taxe d'habitation sur les résidences principales et que l'Etat avait versé en contrepartie, en 2002, 3,67 milliards d'euros. Il a donc considéré que les dégrèvements législatifs représentaient une subvention implicite pour les collectivités locales s'ajoutant à la compensation des exonérations individuelles. Il a indiqué que son étude visait, à travers une analyse statistique menée sur les 36.500 communes françaises, à montrer comment étaient répartis les allègements de taxe d'habitation entre les diverses collectivités locales. Il a, dans ce cadre, rappelé la nécessité pour le Sénat, conformément à sa vocation constitutionnelle, de se doter d'une base de données statistiques permettant d'effectuer des simulations financières en matière d'imposition locale.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a remarqué que le montant de la participation de l'Etat dépendait de la pression fiscale et que la répartition des allègements de taxe d'habitation sur le territoire était à l'avantage des villes et de certaines régions, Sud de la France et Nord Pas-de-Calais notamment. Il a formulé quelques propositions destinées à responsabiliser les élus et les contribuables. S'agissant du long terme, il a appelé à une rénovation des bases de la taxe d'habitation et à l'abandon de l'assiette mixte composée du revenu et de la valeur locative au profit d'une assiette unique. Dans cette attente, il a proposé de rendre le système des dégrèvements plus transparent, en faisant clairement apparaître, sur la feuille d'imposition, le montant de l'impôt dû en l'absence de dégrèvement, en ventilant le montant du dégrèvement entre collectivités au prorata de la part de la cotisation attribuée à chaque contribuable, en déduisant les dégrèvements législatifs du montant des ressources propres des collectivités locales pour en permettre le recyclage en dotations péréquatrices. Il s'est demandé s'il ne fallait pas réviser certains indicateurs de pression ou d'effort fiscal en déduisant au moins partiellement les dégrèvements législatifs, afin de ne pas « subventionner la subvention ».

Enfin, il a présenté les abus que permettait l'existence des abattements facultatifs à la base, estimant nécessaire de neutraliser les effets d'aubaine d'une suppression des abattements à la base. Il a proposé de recycler progressivement une fraction du coût des dégrèvements partiels en une dotation de péréquation répartie entre collectivités locales selon des critères rénovés et, par ailleurs, pour responsabiliser le contribuable local, de créer un « ticket modérateur » en plafonnant, par exemple, le dégrèvement partiel à 50 % de la cotisation.

Un débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, après avoir souligné la qualité de la contribution ainsi présentée, s'est déclaré inquiet quant aux conséquences budgétaires pour l'Etat de la suppression des abattements à la base décidés par certaines communes. Il a souhaité que ces abus puissent cesser dès 2004.

M. Michel Charasse a estimé qu'il n'était pas malheureusement possible de résoudre le problème dès le 1 er janvier 2004. S'agissant des propositions du rapporteur relatives à la transparence, il a craint que la direction générale des impôts invoque des difficultés pratiques aux arguments présentés. Il a jugé qu'une solution serait de faire apparaître le montant des dégrèvements en rouge.

En réponse, M. Yves Fréville a fait part de son intention de déposer un amendement réduisant les conséquences budgétaires pour l'Etat de la suppression des abattements à la base.

Puis la commission a, à l'unanimité, donné acte à M. Yves Fréville, rapporteur spécial , de sa communication et a autorisé la publication de ses conclusions sous forme d'un rapport d'information .

ANNEXE I :
LE TRAITEMENT STATISTIQUE DES DONNEES DE BASE

A. UNE ÉVALUATION MENÉE AU NIVEAU DES 36.000 COMMUNES EN 2001

Ce rapport a été établi à partir d'un traitement statistique des données fournies par des fichiers administratifs de grandes dimensions portant sur les 36.500 communes de métropole, d'origines diverses (DGI : direction générales des impôts ; DGCP : direction générale de la comptabilité publique ; DGCL : direction générale des collectivités locales ; INSEE) 70 ( * ) .

Trois choix fondamentaux ont été effectués :

L'année pivot choisie pour ce traitement a été l'année 2001. Certains fichiers administratifs pour 2002 (notamment l'état 1389 sur les contributions directes locales) n'étaient pas encore disponibles en mai 2003 lorsque débuta cette étude. Par ailleurs les données statistiques concernant la fiscalité locale utilisées par la DGCL pour le calcul des dotations 2002 sont relatives à l'année 2001, du fait d'un décalage d'un an nécessaire à leur mobilisation. Enfin les données communales sur le revenu des ménages fiscaux ont été élaborées par la direction régionale de Rennes de l'INSEE à partir du fichier impôt sur le revenu-taxe d'habitation pour l'année 2000. Le choix de l'année 2001 a donc été considéré comme un compromis satisfaisant entre ces diverses contraintes.

Le champ géographique retenu couvre la seule France métropolitaine. Un régime spécifique de dégrèvements législatifs s'applique dans les départements d'outre mer et la méthode statistique utilisée requérait une certaine homogénéité dans les données qui aurait été rompue en cas d'intégration des départements d'outre-mer

L'unité d'observation retenue a été la commune. Une étude exhaustive de la politique des dégrèvements aurait exigé, sinon l'observation sur échantillon des données individuelles, du moins l'analyse de la concentration de la taxe d'habitation avant et après dégrèvements à l'intérieur des communes. Ce type d'analyse n'a pas été possible car les états 1386 communaux ne fournissent que la répartition des cotisations avant dégrèvements d'office, ce qui est très regrettable.

La politique des dégrèvements législatifs de taxe d'habitation a donc été évaluée au niveau fin des communes. On doit constater que le rapprochement des fichiers administratifs reste encore à ce stade une tâche très délicate 71 ( * ) : Il serait souhaitable qu'une coordination interministérielle ou parlementaire de ces fichiers, à défaut de leur fusion, soit entreprise. Il paraît en effet indispensable, au moment où s'engage une réforme d'ensemble des dotations de l'Etat, de disposer au niveau communal d'un ensemble cohérent de données fiscales et budgétaires et de données statistiques d'accompagnement (démographiques, économiques et sociales). Cette coordination ne viserait évidemment pas à construire un super-fichier de gestion, ce qui serait absurde, mais à faciliter le rapprochement des informations statistiques provenant de sources différentes.

On doit de plus souligner les difficultés de plus en plus insurmontables que crée sur le plan statistique le développement de l'intercommunalité : comment comparer entre elles des communes appartenant à des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) exerçant des compétences plus ou moins développées ? Comment surmonter l'obstacle de l'existence de deux régimes fiscaux distincts cohabitant sur le territoire national suivant que le régime fiscal de la taxe professionnelle unique (TPU) a été ou non adopté ? La solution la plus simple, qui a été adoptée dans ce rapport, consiste à se placer, à un niveau semi-global correspondant à la sommation du niveau communal et du niveau intercommunal : on additionne par exemple le taux communal de la taxe d'habitation au taux communautaire de l'EPCI. Mais cette solution connaît ses limites. Le régime de la TPU entraîne en effet l'apparition de flux internes à chaque EPCI entre la structure intercommunale et les communes-membres (attribution de compensation, dotation de solidarité communautaire), flux qui sont mal isolés et mal connus. Il engendre également des problèmes de ventilation entre les communes-membres de données communautaires comme le potentiel fiscal de la taxe professionnelle unique ou la dotation d'intercommunalité de la DGF suivant des clés de répartition (telle la population) qui ne sont pas toujours satisfaisantes.

B. UN TABLEAU-RÉSUMÉ DES DONNÉES COMMUNALES CONCERNANT LA TAXE D'HABITATION

On a, à partir des Etats 1386 bis taxe d'habitation, établi pour chaque commune un cadre général d'analyse des données concernant la taxe d'habitation. Certaines de ces données n'apparaissent pas directement dans l'Etat 1386 et ont été calculées, avec parfois une certaine marge d'approximation.

Ce cadre général, dont on trouvera la structure et un exemple dans le tableau A-1, est à double entrée :

1. En colonnes (col.) , les logements sont ventilés en 9 catégories :

Col 1 : Tous locaux d'habitation : ceux-ci se répartissent à leur tour en trois catégories

Col 2 : Locaux exceptionnels (au sens de l'article 1497 du code général des impôts 72 ( * ) ):

Col.3 : Résidences secondaires

Col.4 : Résidences principales : celles-ci sont ensuite réparties en deux groupes :

Col. 9 : Résidences principales exonérées

Col. 5 : Résidences principales non exonérées Celles-ci se répartissent enfin en trois sous-groupes:

Col.6 : Résidences donc imposées à taux plein

Col.7 : Résidences dégrevées partiellement

Col.8 : Résidences dégrevées totalement

2. En lignes , figurent les caractéristiques suivantes pour chaque type de locaux d'habitation (l'indice c signifie qu'il s'agit de données communales)

Ligne Nc : Nombre de locaux d'habitation (hors dépendances bâties, rattachées ou non)

Ce nombre est connu avec une certaine imprécision pour les résidences secondaires, certaines dépendances secondaires étant comptabilisées comme résidences secondaires

Ligne Bc : Montant des bases brutes d'imposition.

Les bases brutes des trois sous-groupes de résidences principales non exonérées ne sont pas connues (à la différence des bases nettes)

Lignes Ec, Hc, Fc : Montant des abattements communaux à la base, spécial à la base, et pour charges de famille

La répartition de ces abattements entre les sous groupes de résidences principales non exonérées n'est pas connue. Le montant des abattements pour charges de famille des résidences principales exonérées a donc fait l'objet d'un calcul par approximation (à partir du nombre de personnes à charge). Les abattements pour charges de famille des locaux exceptionnels sont ignorés et censés être nuls.

Ligne Gc : Montant des bases nettes d'imposition. (Gc = Bc - Ec - Hc - Fc)

Les bases nettes sont égales aux bases brutes déduction faite des abattements

Ligne Pc : Produit semi-global de la taxe d'habitation à la charge du contribuable local

Le produit semi-global correspond à la somme des ressources obtenues au titre de la taxe d'habitation par la commune et éventuellement l'EPCI dont elle est membre à raison des logements implantés dans cette commune. Il ne comprend pas le produit des majorations versées à l'Etat (frais d'assiette etc.)

Les composantes du produit semi-global sont les suivantes

Pour les locaux exceptionnels (Pc2): le produit des bases nettes par le taux semi-global (est négligée la possibilité d'exonération de certains locaux exceptionnels).

Pour les résidences secondaires (Pc3): le produit des bases brutes par le taux semi-global.

Pour les résidences principales non exonérées (Pc5 et 7) : le produit des bases nettes par le taux semi-global, déduction faite du montant des dégrèvements

Ligne Nc : Produit semi-global de la taxe d'habitation à la charge du contribuable national

Pour les résidences principales dégrevées partiellement (Nc7) : la part des dégrèvements partiels affectée à l'échelon semi-global.

Pour les résidences principales dégrevées totalement (Nc8) : la part des dégrèvements totaux affectée à l'échelon semi-global.

Pour les résidences principales exonérées (Nc9) : le produit des bases nettes exonérées par le taux semi-global 2001 (s'il est inférieur au taux 2001). Ce produit n'est versée à la commune qu'en 2002.

Lignes Rc: Produit départemental de la taxe d'habitation levé dans la commune à la charge du contribuable local

Ligne Sc : Produit départemental de la taxe d'habitation levé dans la commune à la charge du contribuable national

Les composantes du produit départemental sont les mêmes que celles du produit semi-global : mais elle sont calculées à partir des bases nettes départementales dans la commune et du taux départemental de la taxe.

Tableau A-1
Cadre de présentation des principales données concernant la taxe d'habitation

C. LA RÉFÉRENCE AU « MÉNAGE FISCAL » ET LE RISQUE DE BIAIS DANS LES VILLES UNIVERSITAIRES.

Le fait générateur de la taxe d'habitation est l'occupation d'un logement. Sur le plan statistique, le « ménage fiscal » est un ménage ordinaire correspondant soit à un foyer fiscal isolé (un couple marié et ses enfants mineurs par exemple) soit au regroupement des foyers fiscaux répertoriés dans un même logement (par exemple un couple de concubins ou un frère et une soeur ...). L'administration fiscale a créé un fichier dit "IR-taxe d'habitation" des foyers fiscaux présents dans un même logement. Ce fichier rapproche les données concernant ces deux impôts. Son existence tient au fait que coïncident la domiciliation d'une déclaration de revenus au titre de l'impôt sur le revenu et l'occupation d'un logement connu à la taxe d'habitation. De ce fait sont exclus de ce fichier :

• Les ménages constitués de personnes ne disposant pas de leur indépendance fiscale (essentiellement des étudiants majeurs rattachés fiscalement à leurs parents) ;

• Les ménages de contribuables concernés par un événement de type mariage, décès ou séparation en cours d'année et établissant des déclarations de revenus multiples pour la même année. Ces déclarations sont difficilement rattachables au fichier de la taxe d'habitation.

• Les contribuables vivant en collectivités

Le cas des étudiants rattachés à la déclaration fiscale de leurs parents est particulièrement important : peuvent-ils bénéficier d'un dégrèvement au titre du logement indépendant qu'ils occupent lorsque le revenu de leurs parents satisfait les critères de dégrèvement ? Il a été répondu à votre rapporteur qu'ils n'avaient pas droit à un dégrèvement législatif (donc automatique), mais qu'ils pouvaient demander le bénéfice d'un dégrèvement contentieux qui leur était généralement accordé.

Les statistiques des dégrèvements législatifs ne comprennent pas ce type de dégrèvements. De ce fait, on sous-évalue systématiquement dans les villes universitaires le nombre des contribuables dégrevés.

On a cherché à cerner au moins indirectement l'importance de ce phénomène en comparant, commune par commune, le nombre de « ménages fiscaux 2000 » à celui des « résidences principales 2001 » pour les communes de plus de 200 habitants 73 ( * ) Le graphique A-1 (page suivante) montre clairement que le nombre de ménages fiscaux par résidence principale se dégrade et tombe nettement en dessous de 1 lorsque la taille de la commune grandit, même parmi les villes de moins de 20.000 habitants qui pour la plupart ne sont pas villes universitaires. Ce résultat laisse perplexe en termes de contrôle fiscal. Doit-on en conclure que le taux des décès et séparations entraînant des déclarations de revenus multiples s'accroît avec la taille de la commune ?

Graphique A-1
Dispersion du rapport (nombre de ménages fiscaux en 2000 / nombre de résidences principales en 2001) dans les communes de plus de 200 habitants.

Le tableau A-2 quantifie le même résultat et fournit la valeur moyenne par strate démographique du rapport (ménages fiscaux/résidences principales). Ce rapport moyen, proche de 97 % dans les petites communes, diminue brutalement dans les deux dernières strates qui regroupent les villes de plus de 100.000 habitants, le plus souvent universitaires.

Tableau A-2
Comparaison du nombre de ménages fiscaux et de résidences principales

Si l'on examine en détail la liste des communes de plus de 10.000 habitants où le taux de couverture des résidences principales par des ménages fiscaux est inférieur à 85 %, on constate qu'il s'agit très majoritairement de villes universitaires ou de communes dotées d'un campus (St Martin d'Hères, Bruz, Talence, Olivet). Le cas de Vienne est plus difficilement explicable.

Tableau A-3

ANNEXE II :
LA CONSTRUCTION D'INDICATEURS PERTINENTS

Deux problèmes méthodologiques ont dus être résolus pour l'établissement de ce rapport :

• Comment mesurer la pression fiscale induite par la taxe d'habitation, le taux de l'impôt n'étant pas un indicateur satisfaisant.

• Comment ventiler le montant global des dégrèvements entre les diverses collectivités bénéficiaires ?

A. LA CONSTRUCTION D'UN INDICE DE PRESSION FISCALE

Cet indice doit permettre de déterminer le poids de la taxe d'habitation rapporté au revenu médian par ménage fiscal tel qu'il est établi par l'INSEE.

La notion de ménage fiscal est l'une des particularités conceptuelles de cette source nouvelle de données locales disponible pour la première fois en mai 2003. Ce concept génère des distorsions par rapport au dénombrement des ménages et des habitants au sens du recensement de la population : le « ménage fiscal » est en effet un ménage ordinaire constitué par un regroupement des foyers fiscaux répertoriés dans un même logement . On a donc été amené à construire un indicateur de la pression fiscale par résidence principale (en excluant les résidences secondaires et les locaux exceptionnels) de manière à assurer une certaine homogénéité aux données utilisées.

L'indice de pression fiscale aurait dû logiquement être construit pour le ménage fiscal « médian » de chaque commune, puisque la donnée de revenu utilisée est le revenu médian. Mais ce calcul s'avérait être impossible faute de données suffisantes sur la distribution des résidences principales. On a donc construit un indice légèrement biaisé en rapportant le poids moyen de la taxe d'habitation par résidence principale au revenu médian. Le biais est sans doute assez faible car la distribution des logements en fonction de leurs valeurs locatives est beaucoup moins dissymétrique que celle des revenus.

Le montant moyen de la taxe d'habitation par résidence principale est égal à la taxe d'habitation que devrait payer un contribuable occupant une résidence principale "moyenne" en l'absence de tout dégrèvement ou exonération ; c'est donc une cotisation "théorique" qui a été calculée de la façon suivante pour chaque commune. Il comprend trois éléments.

taxe d'habitation = VLM.[( indice d'abatt. com al . taux semi-global) + (indice d'abatt.dep al. .taux dép al )

• La valeur locative moyenne (VLM) est égale au montant des bases brutes des seules résidences principales (imposées ou exonérées) divisé par le nombre de ces résidences principales. Cette valeur ne correspond pas à la donnée utilisée par les services fiscaux qui calculent la VLM en tenant compte non seulement du nombre des résidences principales mais aussi de celui des dépendances non rattachées aux résidences principales (garages, etc.) et de celui des résidences secondaires

• Les indices d'abattement permettent de passer des valeurs locatives brutes aux valeurs locatives nettes. Ils sont égaux au rapport de la valeur locative nette à la valeur locative brute de la résidence principale « moyenne ».

La détermination de ces indices posait deux problèmes : tout d'abord quels abattements fallait-il prendre en considération ? Il était logique de retenir l'abattement à la base applicable à toutes les résidences principales et d'éliminer l'abattement spécial à la base qui ne s'applique probablement pas au ménage médian. Mais fallait-il tenir compte aussi des abattements pour charges de famille ? On a choisi de calculer deux indices différents, le premier ne retenant pas d'abattements pour charge de famille, le second retenant un abattement pour une personne à charge. Les quotités des abattements retenus sont les quotités réelles (en valeur absolue) votées par les communes d'une part, les départements d'autre part

• Les taux de taxe d'habitation retenus sont les taux semi-globaux (commune + EPCI) et départementaux de 2001.

Exemple de calcul de l'indice de pression fiscale sur le ménage fiscal médian

(Rennes 2001)

1) Nombre de résidences principales 101 439

Bases brutes des résidences principales 1 608 562 366

VLM (valeur locative moyenne) 15 857 francs = 1 608 562 366/101 439

2) Quotités des abattements

Abattement général à la base (commune) 2 024 francs

Abattement général à la base (département) 1 322 francs

Abattement pour 1 personne à charge (commune) 1 349 francs

Abattement pour 1 personne à charge (département 1 322 francs

Indice d'abattement (commune)

sans abattement personne à charge 0,8723 = (15857-2024)/15857

avec abattement 1 personne à charge 0,7873 = (15857-2024-1349) / 15857

Indice d'abattement (département)

sans abattement personne à charge 0,9166 = (15857-1322) / 15857

avec abattement 1 personne à charge 0.8333 = (15857-1322-1322) / 15857

3) Taux d'imposition

Taux semi global 21,75 %

Taux départemental 5,86 %

4) Cotisation moyenne théorique (compte non tenu des frais d'assiette)

sans abattement personne à charge
3860,4 F =15857*[(0.8723*21,75 %) + (0.9166*5,86 %)]

avec abattement personne à charge
3489,6 F =15857*[(0,7873*21,75 %) + (0,8333*5,86 %)]

5 ) Revenu médian des ménages fiscaux 132 387 F

6) Indice de pression fiscale sur le ménage médian

sans abattement personne à charge 2,916 % = 3860,4 / 13 2387

avec abattement personne à charge 2,636 % = 3489,6 / 13 387

B. LA VENTILATION DU MONTANT DES DÉGRÈVEMENTS ENTRE COLLECTIVITÉS LOCALES BÉNÉFICIAIRES

A la différence des compensations d'exonérations, le montant des dégrèvements législatifs ne fait l'objet d'aucune ventilation entre collectivités locales. Les dégrèvements sont accordés aux contribuables au vu de leurs cotisations globales de taxe d'habitation qui regroupent la part communale, la part des EPCI, la part départementale et la part de l'Etat (au titre des frais d'assiette et de recouvrement).

La ventilation des dégrèvements partiels entre collectivités pose une difficulté théorique puisque leur octroi dépend du montant de la cotisation exigée d'un contribuable, comparé à son revenu, et que ce montant est obtenu par sommation des impositions communale, communautaire, départementale et étatique. Il convient donc de répartir les dégrèvements accordés globalement entre les divers échelons de collectivités.

Une ventilation satisfaisante devrait respecter un principe d'indépendance : la part de dégrèvement attribuée à chaque échelon ne devrait dépendre que des décisions fiscales propres à cet échelon (taux voté de taxe d'habitation et politique d'abattements) et être indépendante des décisions prises aux autres niveaux. Or, il n'existe pas de clé de répartition respectant ce principe simple.

Un modèle très simple permet d'illustrer cette difficulté :

Soit une commune indicée c et levant la taxe d'habitation au taux t c sise dans un département indicé d et levant la taxe d'habitation au taux t d . Cette commune ne comprend qu'un seul contribuable dont les bases nettes d'imposition sont b c (pour la commune) et b d (pour le département). Ces deux bases ne seraient égales que si le département et la commune pratiquaient les mêmes abattements. Ce contribuable paierait donc en l'absence de dégrèvement une cotisation globale (non compris la part de l'Etat) égale à

C = b c .t c + b d .t d ,

Il peut bénéficier d'un dégrèvement D si sa cotisation est supérieure à un montant T donné, fonction de son revenu et de sa situation de famille

D = C - T = b c .t c + b d .t d - T si C > T

Comment alors partager ce dégrèvement global D c en un dégrèvement communal Dc et un dégrèvement départemental D d ?

a) Si le dégrèvement est total , c'est à dire si T = 0, la ventilation ne présente aucune difficulté, le dégrèvement à chaque collectivité est égal à la part de cotisation allant à chacune d'elles.

D c = b c .t c et D d = b d .t d

Dans ce cas, le principe d'indépendance est respecté (le dégrèvement communal ne dépend que de la politique fiscale de la commune). Il serait en revanche facile de montrer que ce principe ne serait pas respecté si la répartition était faite au prorata des seuls taux d'imposition à moins que les mêmes abattements ne soient pratiqués par la commune et le département.

b) Si le dégrèvement n'est que partiel, la ventilation au prorata des cotisations ne respecte plus en règle générale le principe d'indépendance. On établit aisément que cette répartition est la suivante :

D c = b c .t c .[1-T/C] et D d = b d .t d .[1-T/C]

La répartition dépend alors de la cotisation globale C = b c .t c + b d .t d , ce qui traduit l'interdépendance des politiques fiscales départementale et communale sur le montant du dégrèvement partiel à partager.

c) Il existe cependant un cas où cette difficulté peut être contournée : c'est celui où les comparaisons entre communes du montant des dégrèvements s'effectuent au sein d'un même département. Dans ce cas les cotisations départementales dues par des contribuables identiques (ayant même bases d'imposition) localisés dans des communes différentes sont égales. On peut alors considérer que le taux départemental est un taux fixe et que le dégrèvement est uniquement attribuable au taux marginal d'imposition fixé par la commune. En d'autres termes, et à condition que b d .t d < T, le dégrèvement partiel est uniquement imputable à la commune.

D c = ( b c .t c - T) et D d = 0]

En conclusion

Les dégrèvements ne doivent pas être ventilés entre collectivités en fonction de leurs seuls taux de taxe d'habitation, mais en fonction du produit des cotisations allant à chacune d'elles, du fait des différences de politiques d'abattement.

Cette ventilation en fonction du produit des cotisations est satisfaisante en ce qui concerne les dégrèvements totaux, mais ne respecte pas le principe d'indépendance lorsqu'il s'agit des dégrèvements partiels. Cette difficulté ne devra pas être perdue de vue lorsque l'on comparera les « subventions implicites » que représentent pour les collectivités la part de dégrèvements qui leur est statistiquement affectée.

L'assimilation des dégrèvements partiels à des dégrèvements communaux n'est admissible que si l'on raisonne au sein d'un même département  Cette méthode que votre rapporteur avait utilisée dans son rapport spécial sur le budget des charges communes de 2003 n'est pas transposable au niveau de la France entière, du fait des différences de taux départementaux de taxe d'habitation.

ANNEXE III :
ANALYSE DE LA SENSIBILITE DES ALLEGEMENTS FISCAUX AUX DIVERSES COMPOSANTES DE LA PRESSION FISCALE LOCALE

L'indice de pression fiscale est un indice synthétique exprimant l'imposition moyenne de taxe d'habitation en pourcentage du revenu médian dans chaque commune . Mais le montant de la cotisation moyenne résulte de trois facteurs qui se multiplient : le taux voté de taxe d'habitation, la base brute par résidence principale (c'est à dire la valeur locative moyenne corrigée) et le régime des abattements qui commande la passage de la base brute à la base nette.

Ces diverses composantes de l'indice de pression fiscale jouent-elles un rôle équivalent dans la relation faisant dépendre la participation de l'Etat de l'indice de pression fiscale ? Revient-il au même d'habiter dans une ville où les valeurs locatives sont élevées et le taux faible ou dans une commune où un taux d'imposition élevé compense des valeurs locatives faibles ? On ne voit pas de raison objective pour qu'il en soit différemment au niveau d'un contribuable pris isolément, mais cette hypothèse de neutralité de la structure de l'imposition moyenne sur le montant des dégrèvements mérite d'être testée sur l'échantillon des 30.000 communes pour lesquelles le revenu médian est connu et les deux sous échantillons des communes de plus de 3.500 habitants et des communes de moins de 3.500 habitants à l'aide d'équations de régression multiple à élasticités constantes.

Les résultats de cette analyse sont présentés dans le tableau suivant

Si les trois composantes de l'imposition moyenne (indice d'abattement, valeur locative moyenne et taux global) jouaient un rôle équivalent, les élasticités de la participation de l'Etat par rapport à chacune de ces composantes seraient égales (ou du moins proches en raison de l'aléa statistique)

a. Si on compare l'élasticité de la participation de l'Etat par rapport au taux d'imposition et à la valeur locative moyenne , on constate que l'élasticité par rapport au taux d'imposition est un peu supérieure à l'élasticité par rapport à la valeur locative moyenne sauf pour les dégrèvements totaux où elle lui est égale. L'écart n'est cependant pas très significatif ; il est probable que les valeurs locatives moyennes (calculées sur l'ensemble des résidences principales d'une commune et tenant compte par conséquent des plus hauts standings) diffèrent plus d'une commune à l'autre que les valeurs locatives moyennes (inconnues) que l'on calculerait pour les seuls logements occupés par les contribuables de condition modeste.

b. En revanche, l' élasticité des compensations d'éxonérations et des dégrèvements totaux vis à vis de l'indice d'abattement est nettement supérieure à celles relatives aux bases brutes et aux taux dans les communes de plus de 3.500 habitants qui sont les seules à mener une politique active d'abattements. En d'autres termes, si ces collectivités diminuent leurs abattements facultatifs et en particulier l'abattement à la base, l'Etat est amené à accroître fortement les compensations d'exonérations et les dégrèvements totaux. Ce résultat est parfaitement logique car l'abattement à la base réduit relativement plus les faibles impositions que les moyennes ou les hautes. De plus, le blocage des compensations d'exonérations aux taux en vigueur en 1991 accroît encore cet effet (l'élasticité par rapport au taux des compensations d'exonérations tombe à 0,790 pour les communes de plus de 3.500 habitants alors que l'élasticité par rapport aux abattements atteint 1,369) : une commune ne peut plus tirer parti d'une hausse des taux depuis 1991 pour accroître ses ressources de compensation alors qu'elle peut très bien y parvenir en supprimant ses abattements facultatifs !

ANNEXE IV :
DONNÉES STATISTIQUES CONCERNANT LES ALLEGEMENTS DE TAXE D'HABITATION DANS LES COMMUNES DE PLUS DE 10.000 HABITANTS
EN 2001

Ce rapport a nécessité la constitution d'une base de données sur la taxe d'habitation dans chaque commune. Ces données sont originales en ce sens qu'elles ne se confondent pas avec les informations statistiques classiques en la matière (taux, produit par habitant etc.), même si elles ont été construites à partir de ces dernières. Cette annexe présente certaines de ces données pour l'ensemble des communes de plus de 10.000 habitants classées par département, puis par ordre alphabétique.

A. Quatre caractéristiques essentielles doivent être rappelées :

• Ces données ne concernent que les résidences principales. Il n'est pas tenu compte du produit de la taxe d'habitation assise sur les résidences secondaires.

• Les données par habitant sont calculées par rapport à la population totale et non à la population DGF (qui comprend un habitant fictif par résidence secondaire).

• Les données sont établies soit au niveau semi-global (commune + EPC ), soit au niveau global (commune + EPCI + département). La distinction d'un niveau communal et d'un niveau EPCI n'est en effet pas pertinente si l'on veut effectuer des comparaisons.

• Les données concernent les résultats de 2001. Les données monétaires restent donc exprimées en francs. La conversion des francs en euros sur un ensemble énorme de données a été jugée trop risquée et génératrice d'erreurs potentielles pour être tentée.

B. Les données présentées sont les suivantes.

(On se référera aux annexes précédentes pour connaître leur mode d'établissement précis.)

a. Identification de la commune : département, nom de la commune et population totale

b. Répartition des contribuables :

Colonne (1) : Pourcentage de contribuables occupant des résidences principales imposés à taux plein (ni exonérés, ni dégrevés d'office)

Colonne (2) : Pourcentage des contribuables occupant des résidences principales non imposés (soit exonérés, soit dégrevés totalement).

Colonne (3) : Pourcentage des contribuables occupant des résidences principales dégrevés partiellement .

c. Montant et origine des ressources de taxe d'habitation :

Colonne (4) : Montant total des ressources semi-globales de taxe d'habitation par habitant (compensations d'exonérations comprises)

Colonne (5) : Part des ressources semi-globales financée par l' Etat (dégrèvements + compensations d'exonérations)

Colonne (6) : Montant par habitant des ressources semi-globales de taxe d'habitation financé par l' Etat .

Colonne (7) : Montant par habitant de la part semi-globale des dégrèvements partiels.

d. Détermination de la pression fiscale :

Colonne (8) : revenu médian par « ménage fiscal » (donnée INSEE)

Colonne (9) : cotisation moyenne semi-globale de taxe d'habitation d'un ménage fiscal ayant une personne à charge, avant tout allègement.

Colonne (10) : pression fiscale semi globale

= (9) / (8) (cotisation moyenne semi- globale / revenu médian)

Colonne (11 ) : pression fiscale globale

= (cotisation moyenne globale / revenu médian)

Colonne (12) : taux semi-global de taxe d'habitation en 2001

La différence entre les colonnes (11) et (12) fournit la pression fiscale départementale dans la commune.


LA TAXE D'HABITATION EST-ELLE ENCORE UN IMPÔT LOCAL ?

La montée en puissance des dégrèvements législatifs explique le constat suivant : la moitié des contribuables ne paie plus ou ne paie que partiellement la taxe d'habitation . La taxe d'habitation n'est plus un véritable impôt local.

Un coin fiscal à la charge de l'Etat a donc été enfoncé entre la recette perçue par les collectivités locales et l'impôt payé par les contribuables. Il représente 30 % de la taxe d'habitation assise sur les résidences principales.

Une double anesthésie des élus et des contribuables locaux a dès lors été mise en place puisque les augmentations éventuelles de la pression fiscale locale ont cessé d'être ressenties par la moitié des contribuables-électeurs.

Les dégrèvements législatifs, même s'ils sont d'abord des aides individuelles apportées à certains contribuables, constituent également des « subventions implicites » aux collectivités territoriales où résident ces contribuables. Quelles sont les collectivités territoriales qui profitent le plus de ces subventions implicites ? Ces subventions implicites ont-elles un caractère péréquateur ?

Telles sont les questions auxquelles une analyse statistique des 36.500 communes de France réalisée par le rapporteur spécial du budget des charges communes tente de répondre. A partir de cette analyse statistique inédite, le présent rapport d'information formule 5 propositions pour responsabiliser élus et contribuables locaux.

* 1 La valeur locative du logement tend à croître avec le revenu, mais représente une fraction légèrement décroissante de celui-ci.

* 2 Il existe en effet un régime spécifique de dégrèvements dans les départements d'outre mer.

* 3 Ces problèmes méthodologiques sont abordés dans diverses annexes au présent rapport d'information.

* 4 Sous réserve des règles de plafonnement.

* 5 A la différence par exemple de la taxe professionnelle dont le poids peut être « exporté » hors des limites communales en étant transféré, via le prix des produits, sur des consommateurs n'habitant pas la commune.

* 6 Le seuil de non imposition (qui est égal à l'abattement sur le revenu de référence, soit 3.593 euros) est majoré de 1.038 euros par demi- part supplémentaire (dans la limite de quatre) et de 1.837 euros par demi-part supplémentaire (au delà de la quatrième). Le revenu plafond de 16.567 euros est majoré de 3.871 euros pour la première demi- part et de 3.045 euros pour chaque demi-part supplémentaire.

* 7 N'échappent théoriquement à cette condition que les Rmistes et les gestionnaires de foyers.

* 8 On se souviendra que pour un contribuable percevant uniquement un salaire modeste, le revenu fiscal correspond à 72 % de sa rémunération.

* 9 En vertu des dispositions du 2 du III de l'article 1414 A du code général des impôts.

* 10 Elle est appelée à disparaître en 2005 car le dégrèvement partiel ainsi calculé était. de plus plafonné jusqu'en 2000 à 50 % du montant de l'imposition supérieur à 340 euros. Or le taux de ce plafonnement est réduit de 10 % chaque année et passe ainsi progressivement de 40 % en 2001 à 0 % en 2005.

* 11 On devrait se demander, dans une analyse plus fine, si, dans un certain nombre de cas, la réduction de la taxe d'habitation ne serait pas capitalisée par le propriétaire du logement sous forme d'une augmentation du loyer !

* 12 Mais la valeur locative moyenne servant au calcul de la quotité de ces abattements prend en compte le nombre et les bases des résidences secondaires !

* 13 L'INSEE tend désormais à distinguer dans ses statistiques les véritables résidences secondaires des logements occasionnels.

* 14 Le nombre de résidences secondaires figurant dans les statistiques fiscales (Etats 1.386 et 1.389) n'est pas une donnée fiable car il incorpore certaines de leurs dépendances, dans des proportions variables selon les communes.

* 15 Les données par habitant ne seront donc pas calculées à partir de la population dite « DGF » qui ajoute à la population totale de la commune un habitant fictif par résidence secondaire.

* 16 Depuis 2000, le montant des admissions en non valeur (ANV) de taxe d'habitation n'est plus disponible. Jusqu'en 1999 le montant des ANV relatif à la taxe d'habitation était fourni par les services territoriaux de la DGI. A partir de 2000, les statistiques sur les ANV sont traitées par la DGCP qui ne fournit qu'un montant global pour tous les impôts.

* 17 Les personnes de plus de 75 ans non imposables à l'impôt sur le revenu étaient déjà exonérées de taxe d'habitation avant 1982. Des dégrèvements partiels étaient accordés sous certaines conditions aux personnes âgées de 65 à 75 ans non imposables à l'impôt sur les revenus.

* 18 Ce coût a pris la forme de dégrèvements en 2000 et de compensations d'exonérations depuis.

* 19 Cette réforme de 1990 conditionna largement le vote positif du budget par le groupe communiste de l'Assemblée Nationale.

* 20 Cette réforme institue pour le calcul des dégrèvements partiels en fonction du revenu un mécanisme de gel des taux à leur niveau de 2000.

* 21 Les dégrèvements non législatifs sont calculés nets des frais de dégrèvements et non valeur à la charge des contribuables locaux.

* 22 Le taux déclenchant le dégrèvement partiel est celui pour lequel le contribuable paie une cotisation de taxe d'habitation juste égale à 4,3 % de son revenu de référence après abattement.

* 23 La perte peut être plus que proportionnelle à la variation du taux de taxe d'habitation parce que l'exonération totale est accordée pour un revenu de référence limite supérieur à celui d'un dégrèvement total en fonction du revenu.

* 24 De plus la valeur locative de leur habitation doit être inférieure à 130 % de la moyenne communale.

* 25 L'abattement à la base a un second effet : celui de transférer une partie de la charge des résidences principales sur les résidences secondaires qui n'en bénéficient pas.

* 26 En effet, 25 %*(80 %VLM) = 20 % VLM.

* 27 La déliaison à la baisse du taux de la taxe d'habitation, par rapport à celui de la taxe professionnelle faciliterait évidemment la mise en oeuvre de cette politique d'optimisation fiscale locale !

* 28 Encore faut-il que le poids de l'impôt local soit effectivement supporté par le contribuable-électeur et non rejeté par les mécanismes de l'incidence fiscale sur d'autres. C'est effectivement le cas pour la taxe d'habitation frappant les résidences principales.

* 29 Les dégrèvements ne sont pas ventilés par niveau de collectivités (cf chapitre trois).

* 30 Bien entendu, un pourcentage donné de ménages fiscaux ne correspond pas nécessairement au même pourcentage d'électeurs.

* 31 Une fraction d'entre eux peut de plus bénéficier d'un dégrèvement non législatif ou encore ne pas acquitter la taxe si elle est inférieure à un certain minimum (80 francs en 2001). Ainsi qu'il a été dit, il n'est pas tenu compte de ces possibilités dans cette étude.

* 32 La taxe d'habitation étant un impôt de superposition , les résultats observés dans une commune dépendent cependant partiellement de la politique fiscale départementale et ceux analysés au niveau d'un département concernent également l'ensemble de ses communes.

* 33 La notion d'unité urbaine repose sur la continuité de l'habitat. Une unité urbaine est un ensemble d'une ou plusieurs communes dont le territoire comprend une zone bâtie continue d'au moins 2.000 habitants.

* 34 Et non en fonction de leur population DGF qui prend en compte le nombre de résidences secondaires. En revanche, les limites de strates sont les mêmes que celles utilisées par la DGCL.

* 35 Sous la réserve de ce qui est dit dans l'annexe méthodologique sur la possibilité d'une surévaluation de ce pourcentage dans les villes universitaires.

* 36 On a systématiquement utilisé une échelle logarithmique pour représenter les populations communales de manière à ne pas « écraser » le bas de la distribution des communes. Les écarts de 50.000 habitants et une autre de 500.000 sont ainsi représentés par des intervalles égaux sur l'axe des abscisses.

* 37 Le revenu intervient indirectement pour l'octroi du RMI.

* 38 Le décalage d'un an entre les données fiscales concernant les dégrèvements en 2001 et les données relatives aux revenus de 2000 ne devrait pas biaiser da façon significative les résultats de l'analyse.

* 39 Les équations de régression multiple sont les suivantes avec E le taux d'exonération, Y le revenu médian, PA le pourcentage de personnes âgées et k une constante

communes urbaines (5937 communes) : E = k .PA 0,496 .Y -1.444 ( R²= 0.780)

communes rurales (24 722 communes) : E =k .PA 0,455 .Y -1,243 (R²= 0.771).

* 40 L'équation de régression multiple est la suivante avec D, le pourcentage de ménages fiscaux dégrevés totalement, CHO ,le pourcentage de chômeurs dans la population active, PA, le pourcentage de personnes âgées dans la population totale ,Y le revenu médian et k une constante :

8.750 communes de plus de 1.000 habitants D = k.CHO 0,539 .PA -0,509 .Y -1,858 ( R² = 0,788).

* 41 Le nombre moyen d'habitants par logement varie dans de fortes proportions suivant les communes, mais cette constatation ne biaise pas l'indicateur de pression fiscale dans la mesure où le revenu médian est également calculé par « ménage fiscal », c'est à dire en pratique par résidence principale.

* 42 L'indicateur est donc établi avec deux variantes ; la première prend en compte le seul abattement à la base, la seconde ajoute à cet abattement à la base, un et un seul abattement pour charge de famille.

* 43 L'imposition moyenne a été calculée en tenant compte du seul abattement à la base.

* 44 Au lieu et place de celle perçue effectivement en 2001.

* 45 On utilisera de ce fait pour calculer des données par habitant la population totale de chaque collectivité en 1999 et non sa population DGF qui incorpore un habitant supplémentaire par résidence secondaire.

* 46 Une ventilation au prorata des seuls taux d'imposition est incorrecte car ces taux dépendent eux-même des politiques d'abattement : à produit constant, une majoration des abattements nécessite une augmentation des taux.

* 47 Le passage à la TPU d'un EPCI levant antérieurement une fiscalité additionnelle sur les quatre taxes entraîne généralement la suppression de la part communautaire de la TH et son report sur la fiscalité communale.

* 48 Un accroissement de 10 % des ressources de TH induit un accroissement moyen de 16,7 % du montant des dégrèvements.

* 49 Ce mécanisme cessera de jouer pour l'avenir, du fait du calcul des dégrèvements en fonction des taux de 2000. Mais les données présentées reflètent les conséquences de l'évolution passée.

* 50 Le cas de Paris est particulier. Il n'existait pas de taux de TH départementale jusqu'en 1992.

* 51 Il s'agit de l'indice calculé à partir d'une cotisation moyenne incorporant l'impact d'un abattement pour une personne à charge, en sus de l'abattement général à la base.

* 52 Ces observations générales ne signifient pas que la charge financière par habitant soit exactement homothétique à la charge financière par résidence principale. Lorsqu'on exprime la charge financière par ménage fiscal, les grandes villes de plus de 100.000 habitants sont situées sous la courbe de tendance. A l'inverse, elles figurent au dessus de la courbe de tendance lorsque la charge financière de l'Etat est calculée par habitant. Ceci résulte du fait présenté que le nombre d'habitants par résidence principale tend à fortement diminuer dans les grandes villes.

* 53 La détermination de ce taux moyen de dégrèvement suppose que soit connu le montant des impositions avant impôt des contribuables dégrevés partiellement. Or cette donnée ne figure pas dans le fichier 1386. On a donc été amené à la reconstituer en multipliant les bases nettes communales dégrevées partiellement par le taux global de la taxe d'habitation. Cette évaluation est cependant légèrement biaisée car elle revient à supposer que les bases nettes départementales, inconnues, sont égales aux bases nettes communales, ce qui n'est pas le cas lorsque le Conseil général adopte une politique d'abattements spécifique.

* 54 Les équations de régression estimées sont des équations à élasticités constantes du type P = k.C á .Y â reliant la participation P à la cotisation moyenne, C et au revenu médian Y. Il eut été indifférent de régresser la participation par rapport à l'indice de pression fiscale (C/Y) et au revenu médian : C = (C/Y) á .Y â+á, car les valeurs des élasticités á et â et du R² auraient été les mêmes.

* 55 La citation de Stiglitz est tirée de « Public economics ».

* 56 Le respect du principe « avantage-effort » permet d'atteindre un niveau donné de consommations collectives avec un effort fiscal identique sur l'ensemble du territoire, chaque collectivité restant maîtresse du choix de ce niveau de consommation collective.

* 57 On a déduit de l'imposition moyenne avant dégrèvement par ménage fiscal le montant des ressources apporté par l'Etat.

* 58 Par exemple du fait de l'indexation de la dotation forfaitaire de la DGF sur la moitié de l'augmentation de population.

* 59 La surpression fiscale dans le Languedoc est observable depuis un demi siècle. Traditionnellement et pour des raisons tenant à la répartition des impôts d'Ancien Régime, la Bretagne, ancien pays de « fouages » recourt plus à la taxe d'habitation que la Normandie qui fait plus appel à la fiscalité foncière et immobilière.

* 60 On remarquera que les bases brutes dégrevées sont prises en compte dans le potentiel fiscal, ce qui est justifié puisqu'elles sont génératrices de recettes pour les collectivités.

* 61 Les coefficients de corrélation entre l'inverse du potentiel fiscal par habitant et les autres critères sont respectivement de 0,060 pour les prestations logement, 0,019 pour la proportion de logements sociaux et 0,173 pour l'inverse du revenu. En revanche la proportion de logements sociaux est corrélée de façon positive avec la proportion de bénéficiaires de prestations logement (0,471) et un moins nettement avec l'inverse du revenu (0,322).

* 62 L'indice synthétique des ressources et des charges a donc été reconstruit pour le dernier quartile de la distribution des communes.

* 63 Aide personnalisée au logement.

* 64 Il n'a pas été jugé utile de présenter les résultats des simulations portant sur l'utilisation des deux autres critères, résultats qui ne diffèrent pas fondamentalement de ceux figurant au texte.

* 65 Si r est le revenu moyen dans la commune et R le revenu moyen dans les villes de plus de 10000 habitants, le taux moyen de prélèvement est affecté dans la commune considérée d'un coefficient correcteur égal à 2 - (R/r). Si r = R, le coefficient correcteur est égal à 1. Si r < ou = 0,5R, le coefficient correcteur est égal à 0. Si r est très élevé, le coefficient correcteur tend vers 2.

* 66 Il s'agit comme dans le reste de ce rapport d'une donnée calculée en fonction de la population totale et non de la population DGF.

* 67 Avant application du coefficient multiplicateur et du coefficient d'effort fiscal.

* 68 Le rapport sur les finances locales présenté en mars 2002 par les ministères de l'Intérieur et des Finances étudie (pages 69 à 76) diverses options de la proposition faite par la commission Mauroy de retenir comme base de la taxe d'habitation une assiette mixte composée de la valeur locative du bien occupé et d'une fraction du revenu du foyer.

* 69 Il paraît en revanche inutile d'augmenter l'importance relative du revenu dans la batterie des critères de péréquation tant que subsisteront des allègements fiscaux fonction du revenu.

* 70 Ces documents ont été mis à disposition de l'auteur du présent rapport en tant que rapporteur spécial du budget des charges communes, sous forme de CD Rom. La totalité des traitements statistiques relève de sa seule responsabilité.

* 71 Par exemple, il peut exister deux fiches par commune pour l'Etat 1389 retraçant les rôles généraux des contributions directes locales, au lieu d'une seule pour l'Etat 1386 concernant la seule taxe d'habitation ; de même, certaines communes ne sont pas renseignées dans le fichier des comptes de gestion de la comptabilité publique, etc. Le travail informatique de fusion des fichiers a été réalisé à la Faculté des sciences économiques de l'Université de RENNES I.

* 72 Immeubles que leur caractère architectural, leurs dimensions, leur mode de construction placent hors de la classification générale prévue pour les locaux d'habitation.

* 73 Le fichier INSEE des revenus fiscaux 2000 est incomplet pour des raisons de confidentialité des données. En-dessous de 50  ménages fiscaux par commune.

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