III. LE RÔLE DES PARLEMENTS NATIONAUX DANS LES PROCÉDURES DE RÉVISION SIMPLIFIÉE

1. ARTICLE IV-444 : PROCÉDURE DE RÉVISION SIMPLIFIÉE

1. Lorsque la partie III prévoit que le Conseil statue à l'unanimité dans un domaine ou dans un cas déterminé, le Conseil européen peut adopter une décision européenne autorisant le Conseil à statuer à la majorité qualifiée dans ce domaine ou dans ce cas.

Le présent paragraphe ne s'applique pas aux décisions ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense.

2. Lorsque la partie III prévoit que des lois ou lois-cadres européennes sont adoptées par le Conseil conformément à une procédure législative spéciale, le Conseil européen peut adopter une décision européenne autorisant l'adoption desdites lois ou lois-cadres conformément à la procédure législative ordinaire.

3. Toute initiative prise par le Conseil européen sur la base des paragraphes 1 ou 2 est transmise aux parlements nationaux. En cas d'opposition d'un parlement national notifiée dans un délai de six mois après cette transmission, la décision européenne visée aux paragraphes 1 ou 2 n'est pas adoptée. En l'absence d'opposition, le Conseil européen peut adopter ladite décision.

Pour l'adoption des décisions européennes visées aux paragraphes 1 et 2, le Conseil européen statue à l'unanimité, après approbation du Parlement européen, qui se prononce à la majorité des membres qui le composent.

Commentaire

Cet article est nouveau. Il autorise ce qu'il est convenu d'appeler des « passerelles », c'est-à-dire la faculté, sans recourir à la procédure de révision ordinaire prévue par l'article précédent :

- de faire passer dans le champ de la majorité qualifiée un domaine ou une décision relevant, aux termes de la Constitution, de l'unanimité (paragraphe 1) ;

- de faire passer dans le champ de la procédure législative ordinaire des lois ou des lois-cadres européennes soumises par la Constitution, à une procédure législative spéciale (paragraphe 2).

Dans leur principe, de telles passerelles ne constituent pas à proprement parler une innovation de la Constitution : l'article 137 du traité instituant la Communauté européenne permet déjà au Conseil de rendre la procédure de codécision et la règle de la majorité qualifiée applicables à certains volets de la politique sociale relevant du champ de l'unanimité ; l'article 42 du traité sur l'Union européenne lui permet de « communautariser » des matières relevant du champ de la coopération policière et judiciaire en matière pénale et de déterminer les règles de votes qui se rattachent aux matières concernées.

Mais les passerelles sont exceptionnelles dans le cadre des traités actuels alors que, exception faite des décisions ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense, cet article les autorise pour toutes les dispositions de la partie III de la Constitution.

En outre, par rapport aux passerelles prévues par les traités actuels, celles de la Constitution présentent plusieurs différences au niveau de leur procédure de mise en oeuvre :

- la décision ne relève plus du Conseil des ministres, mais du Conseil européen (son adoption est toujours soumise à l'unanimité) ;

- l'initiative relève du Conseil européen et non plus de la Commission (art. 137 TCE et 42 TUE) ou d'un État membre (art. 42 TUE) ;

- l'approbation du Parlement européen est exigée, alors qu'il n'est que consulté dans le cadre de la mise en oeuvre des passerelles du TUE et du TCE ;

- enfin, le paragraphe 3 donne six mois à tout parlement national pour mettre, s'il le souhaite, son veto à la mise en oeuvre d'une passerelle.

2. ARTICLE IV-445 : PROCÉDURE DE RÉVISION SIMPLIFIÉE CONCERNANT LES POLITIQUES ET ACTIONS INTERNES DE L'UNION

1. Le gouvernement de tout État membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil européen des projets tendant à la révision de tout ou partie des dispositions de la partie III, titre III, relatives aux politiques et actions internes de l'Union.

2. Le Conseil européen peut adopter une décision européenne modifiant tout ou partie des dispositions de la partie III, titre III. Le Conseil européen statue à l'unanimité, après consultation du Parlement européen et de la Commission ainsi que de la Banque centrale européenne dans le cas de modifications institutionnelles dans le domaine monétaire.

Cette décision européenne n'entre en vigueur qu'après son approbation par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

3. La décision européenne visée au paragraphe 2 ne peut pas accroître les compétences attribuées à l'Union dans le présent traité.

Commentaire

Cet article est nouveau. Il institue une procédure de révision simplifiée pour les dispositions de la Constitution relatives aux politiques internes de l'Union.

Comme dans le cadre de la procédure de révision ordinaire, le pouvoir d'initiative appartient concurremment aux gouvernements, à la Commission et au Parlement européen.

En revanche, à la différence de la procédure ordinaire, aucune exigence n'est formulée quand à la préparation de la décision finale : la procédure de révision simplifiée n'est soumise ni à la convocation d'une conférence intergouvernementale, ni, a fortiori, à la mise en place d'une Convention. Par ailleurs, un projet de révision n'a pas, dans le cadre de cette procédure simplifiée, à être notifié aux parlements nationaux.

La décision finale relève du Conseil européen statuant à l'unanimité et son entrée en vigueur suppose « son approbation par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives » . (Rappelons que les modifications à la Constitution adoptées dans le cadre de la procédure ordinaire doivent être « ratifiées par tous les États membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives » ). A la différence de ce que prévoit l'article IV-443 pour la procédure ordinaire, cet article ne prévoit pas que le Conseil européen se saisisse de la question au cas où certains États membres rencontreraient des difficultés pour approuver une révision que quatre cinquièmes des États auraient approuvée.

Le dernier paragraphe de cet article interdit d'accroître les compétences attribuées à l'Union européenne en recourant à cette procédure de révision simplifiée.

On notera enfin que la procédure de révision simplifiée prévue par cet article se distingue sur plusieurs points de celle (également qualifiée de « procédure de révision simplifiée ») mise en place par l'article précédent, relatif aux « passerelles » :

- son champ d'application est à la fois plus restreint (car limité à un titre de la Partie III alors que les « passerelles » peuvent concerner toute cette partie) et plus large : les « passerelles » n'ont vocation qu'à apporter des modifications de procédure (passage de l'unanimité à la majorité qualifiée ou passage d'une procédure législative spéciale à la procédure législative ordinaire) ;

- le droit de veto reconnu à tout parlement national dans le cadre de la création d'une « passerelle » n'est pas formellement repris pour la procédure de cet article ; cela est logique dans la mesure où l'entrée en vigueur de la décision finale est subordonnée à l'approbation par les États conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

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