B. LES RÉPONSES DE LA SCIENCE ET DE LA TECHNOLOGIE

La transition énergétique impose une double exigence : diminuer notre consommation et diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Face à ces obligations, la science et la technologie apportent des réponses diversifiées, aussi bien dans la production que dans les usages.

1. Les propositions relatives à la production d'énergie

a) Les objectifs

L'équation de base est simple.

La production d'électricité dans le monde repose très largement sur l'utilisation des combustibles fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel). Cette production est responsable de 40 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre ; elle s'adresse, en outre, à l'utilisation des ressources fossiles qui sont - à l'exception du charbon - en voie accélérée de raréfaction et qui donc coûteront de plus en plus cher.

Or, si l'on examine un scénario très optimiste d'évolution de la demande mondiale d'énergie primaire (économies d'énergie, développement des énergies renouvelables, faible croissance de la demande d'ici 2030) on observe que même dans cette hypothèse vertueuse, la part de la demande potentielle en énergie fossile est en accroissement par rapport à 2000 (60 % pour le pétrole et le gaz naturel contre 56 % en 2000, et en légère hausse pour le charbon) :

Par rapport à cette évolution (qui pêche par son excès d'optimisme, au regard de la croissance continue des besoins de l'économie mondiale), il n'y a qu'une seule solution ; diminuer d'urgence par tous les moyens le recours aux énergies fossiles.

Or, si l'on examine l'impact de chacune des sources d'énergie sur les émissions de gaz à effet de serre :

Source : CEA LETI

l'on s'aperçoit :

- que celle de cette énergie fossile qui est la plus abondante , le charbon, est celle qui émet le plus de CO2 28 ( * ) ,

- et que pour le reste il n'y a que deux types de sources énergétiques qui ont un niveau satisfaisant d'émissions, l'énergie nucléaire et les différentes énergies renouvelables .

Dans ces conditions, l'apport de la science et de la technologie dans la production d'électricité, et principalement d'électricité, est bien cerné ; il s'agit :

- de diminuer fortement ou de supprimer les émissions de CO 2 dans les centrales thermiques,

- et de renforcer l'efficacité des deux filières de substitution que représentent le nucléaire et les énergies renouvelables.

Mais il faut bien comprendre que les 4 Gtep (40 % des 10 Gtep de consommation mondiale d'énergie) d'énergies fossiles consacrés à la production d'énergie ne pourront trouver de substituts que progressivement. Il ne peut donc pas y avoir en 2030 une solution unique mais seulement des « mix énergétiques » nouveaux incluant plusieurs éléments .

Par exemple, le développement d'une énergie nucléaire plus efficace et gérant mieux l'aval de son cycle est une des voies prioritaires pour limiter les émissions de gaz à effet de serre, mais ne constitue qu'un des éléments de la solution.

Actuellement, avec 437 réacteurs en service dans 32 pays au monde, le nucléaire représente 6 % à 7 % de l'énergie primaire consommée dans le monde et 17 % de l'énergie électrique produite. Les scénarios de poursuite du développement du nucléaire fournis par l'Agence de l'énergie nucléaire de l'OCDE montrent qu'il sera difficile de porter le nombre de réacteurs à plus de 720 en 2030 et à plus de 1120 en 2050 . Ce qui aboutirait, en 2030, à porter la capacité du nucléaire à produire un peu moins du tiers de l'électricité mondiale. L'installation des réacteurs de génération IV plus puissants aidant pourrait porter cette capacité entre 45 et 50 % autour de 2050, ce dernier pourcentage variant en fonction de l'état de modernisation du parc.

b) La rénovation des filières émettrices de gaz à effet de serre
(1) La cogénération par cycle combiné à gaz

Ces technologies, qui reposent sur les progrès effectués dans le cycle de cogénération (électricité + chaleur) des turbines à gaz naturel sont matures et déjà largement utilisées.

Elles utilisent un combustible dont la raréfaction sera décalée de 2 ou 3 décennies par rapport à celle du pétrole et émettent deux fois moins de gaz à effet de serre que les centrales thermiques utilisant le pétrole ou le charbon.

Elles répondent, comme les centrales classiques, aux contraintes de souplesse d'utilisation pour répondre aux pics de demande.

Enfin, elles peuvent utiliser des gaz issus des déchets ménagers, agricoles, hospitaliers, industriels ainsi que le bois.

Pour ces raisons, la substitution de ce type de technologies aux technologies thermiques classiques par la production d'électricité doit constituer une première solution d'attente pour les vingt prochaines années.

Il ne peut s'agir cependant que d'une solution provisoire puisque, en l'état, leur bilan total (construction/fonctionnement) d'émission de gaz à effet de serre est trois fois plus important que le photovoltaïque, vingt fois plus important que l'éolien et cinquante fois plus important que le nucléaire, sauf si la capture du CO 2 et son stockage sont pratiqués .

(2) La rénovation de la filière charbon
(a) L'amélioration des centrales classiques

Le charbon assure une part importante de la production électrique dans le monde.

Comme l'avaient relevé nos collègues Christian Bataille et Claude Birraux dans leur rapport sur « Les nouvelles technologies de l'énergie et la séquestration du dioxyde de carbone : aspects scientifiques et techniques », il assure 40 % de la production électrique mondiale, mais 50 % aux Etats-Unis et 80 % en Chine.

Par ailleurs, il constitue la seule énergie fossile encore abondante puisque les réserves excèdent deux siècles, et sont d'accès relativement aisé.

La rénovation de la filière charbon, dédiée à la production électrique, est donc un enjeu important.

On mentionnera en premier lieu les progrès technologiques effectués dans le domaine des centrales à lits fluidisés qui optimisent le cycle thermique du charbon. De même, les centrales dites à vapeur super critiques, technologie déjà disponible mais qui est en voie d'amélioration mettent en oeuvre des températures et des pressions de plus en plus élevées, ce qui permet de porter les rendements de 30 % pour une centrale classique à 40-45 % et quelquefois au-delà, ce qui réduit au moins du tiers les émissions de CO 2 .

A côté de ces technologies d'amélioration des processus classiques se développent - actuellement sous la forme de prototypes - des centrales dites « à gazéification intégrée et à cycle combiné », dans lesquelles le charbon est utilisé pour produire du gaz de synthèse utilisé par une turbine à gaz qui produit de la vapeur d'eau alimentant une turbine à vapeur pour produire de l'électricité. Ce processus diminue les émissions de gaz à effet de serre.

Il s'agit d'un cycle complexe exigeant plusieurs transformations et donc des pertes de rendements intrinsèques au processus et qui demande à être plus maîtrisé technologiquement. Mais le principal obstacle au développement de cette technologie réside dans les coûts d'investissement.

En toute hypothèse, l'ensemble de ces progrès technologiques a abouti ou aboutira à réduire les émissions de CO2 dans des proportions non négligeables, mais pas à les supprimer, sauf capture, stockage et séquestration.

(b) La captation-séquestration du CO2

Les technologies de captation-séquestration pourraient être un élément central de l'évolution du modèle énergétique mondial en matière de suppression des émissions de CO2 liées à la production d'électricité.

Comme le note le rapport précité de MM. Birraux et Bataille :

« La capture du CO2 issu de l'utilisation de combustibles fossiles est réalisée dans la pratique selon trois grands types de technologies.

« La capture postcombustion correspond à la récupération du CO 2 dans les fumées issues de la combustion.

« La capture précombustion correspond à la décarbonatation du combustible en préalable à la combustion. Le dioxyde de carbone est alors récupéré en amont de la combustion. Celle-ci ne porte alors que sur l'hydrogène et ne délivre que de la vapeur d'eau.

« La capture par oxycombustion correspond au remplacement du comburant habituel - l'oxygène de l'air - par de l'oxygène pur, ce qui permet d'obtenir en aval un flux de dioxyde de carbone très concentré ou pur 29 ( * ) . »

Capté, le dioxyde de carbone doit également être transporté , s'il n'est pas possible de le séquestrer sur les lieux de captation. Des transports de ce type, à usages industriels existent, notamment aux Etats-Unis.

Les techniques de séquestration sont multiples :

• le stockage sous forme de minéralisation, source d'une consommation d'énergie importante est d'un coût élevé, de l'ordre de 120 € la tonne de CO 2 ;

• le stockage océanique qui présente des risques importants de libération ultérieure de CO 2 et dont le coût serait de l'ordre de 6 à 36 € la tonne ;

• le stockage en couches géologiques profondes, soit dans les :

- gisements pétroliers ou gaziers qui font l'objet d'expériences ;

- aquifères salins profonds, qui permettraient de piéger le CO 2 avec un degré de stabilité élevé et qui présentent le double avantage d'offrir une capacité mondiale de stockage presque illimitée (400 à 10 000 milliards de tonnes de CO 2 ) 30 ( * ) et de pouvoir s'effectuer à des coûts estimés relativement faibles (entre 0,5 et 10 € la tonne), selon les évaluations.

La mise en oeuvre de l'ensemble de ces technologies de captation-séquestration du CO 2 pourrait représenter une part de la solution : elles permettraient d'utiliser les réserves mondiales de charbon tout en éliminant les émissions de gaz à effet de serre liées à l'utilisation de ces réserves.

Mais leur introduction se heurte à deux types d'obstacles :

• technologiques

- les technologies de captation sont connues mais doivent être perfectionnées, notamment en ce qui concerne les baisses de rendement quelquefois importantes qu'elles impliquent ;

- les technologies de séquestration doivent faire l'objet de plus d'expérimentation tant ce qui concerne la stabilité du CO 2 séquestré que l'acceptation sociale du procédé ;

• économiques , car il s'agit de mettre en place, à des coûts compétitifs, une filière qui intéresserait plus de 2 000 centrales thermiques à charbon dans le monde. Or, les coûts d'investissement pour la seule captation se chiffrent à chaque fois à plusieurs centaines de millions d'euros ( cf. infra II - Les problèmes liés à l'introduction des filières de substitution).

c) Les filières électronucléaires

L'énergie nucléaire est un des pivots de la transition énergétique. Dans son cycle construction/fonctionnement elle fabrique de l'électricité en émettant 100 fois moins de gaz à effet de serre que le charbon ou le pétrole .

C'est une source d'énergie dont les réserves sont relativement abondantes et la sécurité d'approvisionnement a priori mieux assurée que celle du pétrole.

Elle peut en outre, à terme, être le support d'une cogénération d'électricité et d'hydrogène à très haute température.

Ceci explique que des pays qui avaient renoncé à la filière électronucléaire ou prononcé un moratoire sur la construction de nouveaux réacteurs réexaminent ou sont revenus sur leur position.

Si l'on ne peut que mentionner les perspectives offertes par l'énergie nucléaire de fusion - dont on estime qu'elles ne déboucheront pas, au moins, avant la fin de ce siècle - les propositions scientifiques et technologiques visent à résoudre deux problèmes :

- celui de la valorisation de l'uranium 238 utilisé comme combustible - la filière en place n'en valorisant qu'1 %,

- et celui de la gestion des déchets.

Les réacteurs de la génération III, qui seront en place vers 2020 (comme l'EPR en France), permettront d'utiliser plus largement du plutonium sous forme de MOx. La génération IV, dont l'implantation est prévue à partir de 2035-2040, fait l'objet de recherches coopératives entre les principales firmes et États mondiaux.

Six concepts ont été retenus à ce titre par 10 pays, dont ceux des réacteurs à neutrons rapides qui pourront consumer par fission les principaux actinides. Cela multiplierait d'un facteur 5 à 80 la matière fossile disponible et donc assurerait des réserves de combustibles fossiles pour des millions d'années. Il résoudrait en grande partie le problème de l'accumulation des déchets par recyclage des combustibles.

D'autres voies seront également explorées, comme les réacteurs sous-critiques pilotés par accélérateurs, avec des réacteurs à sels fondus utilisant le thorium comme combustible.

Cinq des pays du Forum International Generation IV (Canada, Etats-Unis, France, Japon et Royaume-Uni) viennent de signer un accord, au mois de mars 2005, afin de travailler sur les problèmes techniques que posent ces réacteurs.

Six réacteurs seront étudiés. Quatre de ces réacteurs fonctionneront avec des neutrons rapides, afin de recycler le combustible usé. D'autres atteindront des températures élevées (près de 1 000°C) afin de produire de l'hydrogène. Les fluides caloporteurs choisis sont variés : sodium, gaz, ou eau.

S'agissant de la modernisation de cette filière nucléaire, nous pensons utile d'accélérer la mise en oeuvre des réacteurs de génération IV.

Ceci implique que les moyens mis à l'appui de l'effort de recherche devraient être doublés (en France notamment).

La mise en place de protocoles internationaux relayant et étendant celui de Kyoto valoriserait fortement une filière particulièrement économe en émissions de gaz à effet de serre et concourrait à l'extension plus rapide du parc.

d) Les énergies renouvelables
(1) Caractéristiques des énergies renouvelables

Les énergies renouvelables constituent près de 10 % de la part énergétique mondiale. 9 % de ces 10 % concernent des énergies renouvelables facilement stockables comme l'hydraulique (3 %) et la biomasse (6 %).

La part des autres énergies « nouvelles » est très marginale dans le modèle énergétique mondial : éolien 0,04 %, solaire 0,01 %.

On a vu que dans le domaine de la production d'énergie la transition énergétique commande que l'on fasse appel à toutes les sources d'énergie disponibles n'impliquant pas des carburants fossiles émettant des gaz à effet de serre.

Il va donc de soi que toutes les formes d'énergies renouvelables sont appelées à être des composantes du modèle énergétique futur.

Mais les caractéristiques, positives ou négatives, de ces énergies font qu'au-delà de ce constat de bon sens, on doit examiner les avancées scientifiques et technologiques susceptibles d'accélérer leur déploiement.

(a) Les caractéristiques positives

Les énergies renouvelables présentent l'avantage d'être abondantes et présentes partout dans le monde

De plus, les énergies renouvelables sont potentiellement presque illimitées par rapport à nos besoins :

Ainsi, le rayonnement solaire annuel représente 5 000 fois la consommation mondiale d'énergie, l'énergie du vent 300 fois, les courants et marées 80 fois et la biomasse 15 fois.

(b) Les caractéristiques négatives

Mais certaines de ces énergies renouvelables ne sont pas faciles d'accès, c'est le cas des courants océaniques et de la géothermie, et surtout elles sont :

• diffuses , et fournissent donc des puissances faiblement réparties. Par exemple, pour produire 1 GW pendant une année, il faut :

- 2,6 MT de charbon ou 1,8 MT de pétrole réparties entre 5 centrales thermiques,

- ou un réacteur nucléaire, ou encore :

- 12 barrages de type Serre-Ponçon ,

- 1 500 éoliennes de 2 MW, réparties sur 150 km ,

- 18 usines marémotrices identiques à celle de la Rance,

- ou de 70 à 100 km² de panneaux solaires ,

• et intermittentes 31 ( * ) en fonction de la pluviométrie, de l'alternance du jour et de la nuit ou du régime des vents. Ce qui a pour conséquence qu'elles ne peuvent pas assurer à coup sûr une réponse aux pics de consommation d'électricité.

Au regard des besoins de sociétés très urbanisées qui se sont constituées sur des schémas centralisés de distribution d'électricité, la contribution des énergies renouvelables (à l'exception de l'hydroélectricité) peut paraître manquer de pertinence.

D'où la tentation de reléguer le développement de ces énergies à des zones isolées des grands systèmes d'urbanisation ou de distribution d'électricité . On peut penser au tiers de l'humanité qui vit à l'écart des grands réseaux de distribution et qui est alimenté en électricité par des réseaux utilisant des groupes électrogènes.

Cette façon de considérer le problème n'est pas justifiée :

• en toute hypothèse, pour diminuer les 40 % d'émissions de CO 2 qui sont imputables à la production d'électricité, il faudra faire appel à des sources d'énergie complémentaires qui émettent peu, ou moins, de gaz à effet de serre ,

• par ailleurs, l'idée qu'il faut reléguer les énergies renouvelables à des emplois mineurs dans le futur modèle énergétique mondial comporte plusieurs conséquences peu souhaitables.

En premier lieu , cela peut conduire à défavoriser une filière dans les arbitrages rendus sur l'attribution des crédits de recherche. Or l'augmentation de ces crédits est nécessaire.

En second lieu, les progrès du stockage de l'électricité par batteries ou condensateurs permettront de pallier certains inconvénients liés à l'intermittence. Enfin , la transition énergétique devra établir peu à peu des liens entre des réseaux centralisés de distribution d'électricité et des réseaux décentralisés ou productions isolées.

Les énergies renouvelables sont donc appelées à être une composante importante du « panier » énergétique futur. Et ce d'autant plus que l'apport des sciences et technologies est en passe d'activer notablement les coûts et les rendements de certaines de ces filières.

(2) La géothermie

La géothermie, haute et moyenne énergie, est assez largement diffusée ; elle contribue pour 8 GW à la production d'électricité dans le monde. Son extension achoppe à deux difficultés :

• d'une part, la géothermie, haute et moyenne énergie volcanique, suppose l'implantation de forages pour capter des gisements de vapeur entre plusieurs centaines de mètres (de 90°C à 180°C) et plus d'un kilomètre (de 250°C à 350°C). Or si le bilan énergétique de ce pompage est favorable, les coûts - entre la moitié et les deux tiers de la charge financière - sont assez souvent prohibitifs ,

• d'autre part, dans certains cas la composition de la vapeur pompée peut créer des problèmes de corrosion non maîtrisés.

(3) L'éolien

L'éolien est un bon cas d'école des avantages et des inconvénients des énergies renouvelables .

Assez économe en émissions de gaz à effet de serre (elle émet 45 fois moins de CO 2 que le charbon par KW/h produit), cette énergie se caractérise aussi par l'intermittence et la faiblesse de puissance.

Les éoliennes ne fonctionnent qu'à des forces de vent entre 18 km/h et 90 km/h. En cas de temps très froid ou de canicule, périodes dans lesquelles se situent des pointes de consommation, leur réponse est très faible en raison de la présence d'anticyclones. Par exemple, en France, les sites les plus propices au développement de l'éolien n'offrent que 2 000 heures de fonctionnement nominal.

Leur faible puissance est aussi un obstacle.

A titre d'illustration, l'Allemagne qui possède le tiers de la puissance éolienne mondiale installée (16 GW sur 46 GW) n'en tire que 4 % de sa production d'électricité .

En outre, leur caractère irrégulier pose aux réseaux de transport des problèmes complexes au point que le plus grand producteur allemand d'électricité a pu dire publiquement que pour lui les éoliennes étaient un problème lorsqu'il y avait du vent.

La progression technologique dans ce domaine relève principalement du gigantisme car plus la turbine est placée en hauteur, plus elle reçoit des vents puissants, le rendement du système variant en fonction du cube de la vitesse du vent.

En prototypage sont étudiées des éoliennes de 3,5 MW de puissance d'une hauteur de 100 mètres avec des pales couvrant un diamètre du même ordre.

L'implantation de fermes d'éoliennes en mer est une réponse plus politique qu'économique. Cette technologie bénéficie d'une plus grande tolérance sociale, mais pour des rendements de 60 % supérieurs aux fermes terrestres, leurs coûts d'implantation et d'entretien sont multipliés par deux.

Mais quelles que soient les difficultés économiques et sociales de déploiement de cette source d'énergie renouvelable, elle constitue un apport non négligeable à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre .

(4) L'hydraulien

Le développement de turbines sous-marines reposant sur les fonds ou sur des mâts et actionnées par les courants pose des problèmes complexes.

Les sites d'implantation situés à proximité des côtes sont assez rares car ils exigent au minimum des courants de 4 noeuds. En outre, cette technologie se heurte à des problèmes liés aux agressions des milieux marins (corrosion, action des algues, et des micro-organismes).

Cependant un pays comme la France a des potentiels intéressants (Bretagne, Cotentin). Et il dispose d'un savoir-faire technologique lié à l'usine marémotrice de la Rance.

(5) L'énergie solaire
(a) L'énergie solaire thermodynamique

Cette technologie consiste à mettre en oeuvre des centrales thermiques concentrant le rayonnement solaire en vue de produire de l'électricité à des puissances de production de quelques dizaines de KW à plusieurs centaines de MW.

Le solaire thermodynamique, après avoir été abandonné dans les années quatre-vingt, fait à nouveau l'objet de développement - en particulier dans les pays qui bénéficient à la fois d'un ensoleillement fort et d'une densité de population restreinte .

Car l'extension du solaire thermodynamique - tout au moins pour la production massive d'électricité - peut créer des problèmes d'acceptation sociale : l'emprise au sol d'une centrale d'1 GW est de l'ordre de 70 à 100 km².

(b) L'énergie solaire photovoltaïque

Il y a actuellement un hiatus entre la perception culturelle du solaire photovoltaïque - largement centrée sur l'idée qu'il doit être dédié à des sites isolés - et la réalité de son développement qui concerne pour les deux tiers des installations mises en réseau dans des pays très développés .

Le photovoltaïque est en pleine expansion. La production mondiale a atteint 1 GW en 2004 (avec des investissements de l'ordre d'un milliard d'euros par an) et est 20 fois supérieure à ce qu'elle était il y a 15 ans.

Les prévisions d'extension de la filière sont assez impressionnantes :

- le Japon, qui est avec l'Allemagne le plus avancé dans ce domaine, a un plan qui prévoit d'avoir installé 4,8 GW en 2010 et 100 GW en 2030,

- l'Union européenne, de façon plus proclamative, escompte sur l'installation de 3 GW en 2010 et 41 GW en 2020 (en 2005, 26 MW sont déployés en France et 794 MW en Allemagne).

Mais il faut relever que le déploiement du photovoltaïque en réseau dans les pays très développés repose sur des bases économiques encore artificielles : l'obligation pour les opérateurs de racheter le courant ainsi produit à des tarifs nettement plus élevés que le prix moyen de production locale de l'électricité.

Actuellement la filière silicium (mono et polycristallin principalement) fournit 95 % de la demande.

Le silicium monocristallin est plus coûteux mais fournit des rendements de conversion de l'ordre de 25 % en laboratoire et de 18-20 % en développement industriel. Le silicium polycristallin, moins coûteux, n'aboutit qu'à des rendements de 13 %. On développe également des plaques dites « couche mince » (de l'ordre de 10 à 50  contre 500 ) permettant d'utiliser des matériaux moins purs, donc moins chers, mais qui n'offrent en l'état que des rendements inférieurs à 10 %.

Des développements sur les polymères doivent être mentionnés mais ces dispositifs n'ont que des rendements de 3 à 5 % et une durée de vie de l'ordre d'un an (contre une vingtaine d'années pour les dispositifs silicium et dix ans pour l'électronique de ces dispositifs), ce qui les cantonne à des usages forains 32 ( * ) .

Les éléments qui précèdent montrent que beaucoup des pays les plus avancés scientifiquement estiment que la filière photovoltaïque est une filière complémentaire de production d'électricité d'avenir.

En matière d'économies de rejets de gaz à effet de serre, elle est relativement coûteuse 33 ( * ) (sept fois plus que l'éolien), mais elle demeure intéressante par rapport aux centrales thermiques au charbon et au pétrole (quinze fois moins de rejets).

Son bilan énergétique est équilibré après 3 années de fonctionnement.

L'intérêt des grandes nations scientifiques pour le développement du photovoltaïque repose assez largement sur les possibilités de percées technologiques dans la filière dont les coûts ont déjà été divisés par cinq en vingt ans.

La plupart des personnes entendues sur ce problème estiment :

• que d'ici dix-quinze ans on aura divisé par 3 le coût total du courant produit , ce qui le rapprochera des coûts du courant utilisé en période de pointe de consommation,

• qu'à un horizon de vingt ans les progrès des nanotechnologies permettront encore de diviser par deux ou par trois ces coûts. E n utilisant mieux les structures du silicium à l'échelle nanométrique, on pourrait porter les rendements de conversion de la filière jusqu'à 50 % .

A terme, le photovoltaïque offre donc une véritable perspective technique et économique.

* 28 Relevons également une donnée qui ne figure pas dans ce tableau : une étude britannique vient de montrer que l'incinération des déchets pour produire de la chaleur et de l'électricité émet 600 g de CO2 par KW/h, soit 40 % de moins que le charbon, mais toutefois plus que l'éolien et 70 fois plus que le nucléaire.

* 29 Une expérimentation d'oxycombustion est en projet à Lacq (par Total).

* 30 Les émissions planétaires de CO 2 sont évaluées à 23 milliards de tonnes.

* 31 A l'exception de la géothermie.

* 32 Par exemple, les troupes américaines en Irak sont dotées d'installations photovoltaïques permettant de faire fonctionner un ordinateur ou de recharger des téléphones portables à partir d'un dispositif comportant des plaques minces de capteurs photovoltaïques.

* 33 Cela s'explique par les techniques de formatage du silicium, qui s'effectue dans des fours à très haute température.

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