B. PEUT-ON LEVER CETTE CONTRAINTE ?

Trois issues sont envisageables pour parvenir à une trajectoire de pouvoir d'achat plus satisfaisante.

La voie d'une déformation du partage de la valeur ajoutée plus favorable aux salaires est souvent évoquée pour lever les contraintes pesant sur la progression du pouvoir d'achat. Elle supposerait un changement par rapport aux tendances observées en Europe ces dernières années.

Dans le contexte de maintien d'un chômage important, il est peu probable qu'un tel enchaînement se produise spontanément. En outre, la globalisation financière, la mondialisation, au moins partielle, des marchés nationaux de l'emploi et les politiques de désinflation compétitive à l'oeuvre en Europe rendent en pratique impossible qu'un tel ajustement puisse intervenir durablement dans un seul pays.

Si cet objectif devait être recherché, il faudrait, à tout le moins, qu' une coordination des politiques en Europe aille dans ce sens.

En outre, la question de l'opportunité d'une telle évolution doit être posée. Ce rapport ne prétendra pas y répondre mais simplement mettre en évidence les effets envisageables d'un tel choix conduit au niveau de l'Union européenne :

- un supplément de demande interviendrait et, l'Union européenne étant relativement fermée à l'extérieur, la croissance y serait mécaniquement plus dynamique à peu près à hauteur de cette demande supplémentaire ;

- le coût du travail en Europe augmenterait ce qui réduirait la compétitivité-prix de l'Union européenne, sauf à ce que la Banque centrale européenne (BCE) accompagne cette politique par une gestion efficace du taux de change, ce qui suppose déjà que les Gouvernements européens le lui demandent ;

- pour l'essentiel, les autres risques sont du côté de l'offre ; la réduction de la profitabilité des entreprises, qu'on suppose permanente au prix d'une hypothèse contestable, pourrait les conduire à réduire leurs investissements ce qui pénaliserait les efforts entrepris pour augmenter le rythme de la croissance potentielle en Europe ; la hausse du coût du travail pourrait conduire à un arbitrage capital/travail défavorable à l'emploi, probablement d'ailleurs plus à l'emploi non qualifié qu'à l'emploi qualifié.

Dans le scénario central, les finances publiques ne soutiendraient plus le niveau de vie des ménages. Au contraire, dans l'hypothèse où la norme de progression des dépenses publiques associée à une réduction drastique du déficit structurel serait suivie, elles pèseraient sur celui-ci.

Le tableau mentionné en début de section montre que les perspectives d'évolution de la masse salariale dans le secteur non-marchand seraient particulièrement moroses en cas de réduction rapide du besoin de financement public. C'est l'ensemble des transferts nets entre administrations publiques et ménages qui jouerait au détriment du revenu de ces derniers, les obligeant à une désépargne pour maintenir le rythme de leur demande.

Une politique des finances publiques alternative permettrait de gains de pouvoir d'achat supérieurs tant au niveau des revenus d'activité , comme le montre le même tableau, qu' au niveau des transferts entre administrations publiques et ménages . Mais, elle ralentirait le rythme de l'ajustement budgétaire sauf à ce que celui-ci s'appuie sur des recettes alternatives qui restent hypothétiques.

Enfin, la voie d'une augmentation de la productivité est envisageable. Ses conditions et son opportunité sont discutées dans le chapitre du présent rapport consacré à la productivité (v. chapitre « quelle productivité, pour quelle croissance potentielle ? » .

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