II. RETRAITES, FAMILLE, LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS : UNE COUVERTURE PARTIELLE DE LA POPULATION

Le système de protection sociale argentin s'est développé tout au long de la deuxième partie du XX e siècle en prenant en charge de nouvelles catégories de risques. Initialement centré sur les accidents du travail et la maladie, il s'est progressivement étendu à la vieillesse, la famille et la perte d'emploi. Plus récemment, pour pallier les effets de la grave crise économique et sociale qui a touché l'Argentine au début des années 2000, les autorités ont également mis en place une politique de lutte contre l'exclusion.

La prise en charge de ces risques est institutionnellement moins fragmentée que dans le domaine de l'assurance maladie et si une dimension régionale demeure, elle est moins présente que dans le domaine de la santé.

A. RETRAITES : UN SYSTÈME PROFONDÉMENT RÉFORMÉ AU COURS DES QUINZE DERNIÈRES ANNÉES

Si le système de retraites argentin a vu le jour dès le début du XX e siècle, il faut attendre les années cinquante pour qu'il offre une couverture à une part importante de la population (avant 1950, seulement 7 % de la population active bénéficiaient d'une retraite).

En 1958, la loi fixa le niveau des prestations à 82 % du dernier salaire perçu. Cette décision a eu pour effet de déséquilibrer le régime nouvellement mis en place, car la fixation du taux de substitution ne s'est pas accompagnée d'une modification de l'âge de la retraite et du niveau des cotisations.

Le régime de retraite par répartition déployé à cette époque devra être réformé dix ans plus tard, en 1968, victime de son succès. Sans remettre en cause les principes du système (financement par cotisations sociales, régime par répartition), les autorités publiques ont alors adopté des mesures visant à assurer la viabilité financière du dispositif en fixant des règles de durée de cotisations et d'âge de départ à la retraite mieux adaptées à la population active. Cette réforme a permis le fonctionnement du système de retraite jusqu'au tournant des années quatre-vingt-dix.

1. 1993-2003 : la mise en place d'une nouvelle gouvernance

Sous l'impulsion des organismes financiers internationaux, l'Argentine a procédé à une réforme de son système de sécurité sociale au milieu des années quatre-vingt-dix. Cette mutation destinée à optimiser le fonctionnement de la protection sociale a concerné à la fois l'assurance maladie et les retraites.

Les modifications adoptées à cette occasion ont porté aussi bien sur la gouvernance du système de retraites que les conditions d'attribution des pensions.

a) Le regroupement des instances en charge de la gestion du système

Les autorités argentines se sont d'abord attachées à unifier le fonctionnement du système de retraite. En 1994, un premier pas dans cette direction a été franchi avec le regroupement de l'ensemble des assurés au sein de trois caisses : une pour les travailleurs indépendants, une pour les travailleurs du secteur public au niveau fédéral et une pour les salariés du secteur privé.

Ces caisses sont regroupées au sein du système intégré des retraites et pensions ( Sistema Integrado de Jubilaciones y Pensiones - SIBJ). Ce système est organisé autour de deux piliers gérés par des structures distinctes : l'Agence nationale de la sécurité sociale ( Administracion Nacional de la Seguridad Social - ANSES), établissement public en charge du régime par répartition, et l'Agence des fonds de retraites et pensions ( Administradora de Fondos de Jubilaciones y Pensiones - AFJPs), structure qui assure la gestion du régime de retraites par capitalisation.

L'adhésion à ce système, équivalent à un régime général, est obligatoire pour tous les salariés âgés de dix-huit ans et plus ainsi que pour les professions libérales. Les employés du secteur public régional et municipal ont, dans un premier temps, conservé leurs propres systèmes de retraites, organisés dans le cadre de leur obra sociale de rattachement qui leur offrait donc une couverture globale pour les risques maladie et retraite.

En 1996, la décision fut prise d'intégrer plusieurs caisses locales au SIBJ. Sur les vingt-quatre caisses régionales et vingt caisses municipales existantes, onze caisses provinciales et une caisse municipale l'ont ainsi rejoint.

Les caisses ayant préservé leur autonomie se sont vu proposer, en 2003, un accord en vertu duquel le régime général pouvait prendre en charge une partie de leur déficit en contrepartie d'une harmonisation de leurs pratiques avec les règles de droit commun. Dans ce cadre, les assurés se sont vu octroyer le droit de conserver leur affiliation auprès de leur obra sociale ou bien de s'assurer auprès du régime général.

Cette réforme de la gouvernance du système de retraite s'est accompagnée d'un relèvement de l'âge de départ à la retraite et du niveau des cotisations. L'âge de la retraite a été fixé à soixante-cinq ans pour les hommes, avec une durée de cotisation de trente ans, et à soixante ans pour les femmes, avec vingt-cinq annuités de cotisation. Une période de transition de cinq ans a été prévue afin de permettre la montée en charge de ce nouveau système de retraites.

Cette harmonisation de la gouvernance du système de retraites n'a pas été complète puisque des régimes de retraites spéciaux ont été maintenus pour les forces armées, la police, les magistrats, les employés gouvernementaux ou encore les parlementaires.

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